Anxiétés, jalousies, fatigue, désillusion, ennui, ridicules, tout est ici, mais sous un voile de poésie jeté sur tout par une imagination ravissante, et c’est bien le mot, car elle nous ravit aux cruautés de cette comédie du mariage comme nous autres hommes la comprenons et l’écririons.
Ridicule ambassadeur, forban adroit. […] La parodie consiste à prendre les défauts des autres pour en faire éclater le ridicule. […] Je ne parle pas des discours ridicules qu’il prête à quelques-uns de ses personnages et où il parodie le beau style du temps. […] Accumulez les héroïsmes ; comparée à la sienne, la grandeur morale humaine reste une turpitude misérable et ridicule. […] Son devoir, c’est de ne pas essayer, de remonter le courant ; être fier d’arriver où le courant le mène, s’en faire un mérite, c’est ridicule.
Antoine, devant ce pourceau trop fraternel, devait se sentir non seulement malheureux, mais ridicule. […] Quoi de plus ridicule que cette obstination du gouvernement britannique à lui dénier le titre d’empereur et à ne lui concéder que celui de général ? […] Je ne me donnerais sous aucun prétexte le ridicule de discuter un problème d’histoire proprement dite avec M. […] Ces laideurs triviales ne l’égayent point par leur ridicule, mais le font réellement souffrir parce qu’il a les nerfs à vif. […] Ils ont ensuite reconnu que c’était un préjugé ridicule.
Et il est tout à coup ressaisi d’un désir brutal, qu’il prend pour un regain d’amour ; et elle le repousse tristement ; et il ne peut s’empêcher de dire des mots méchants, et il se sent odieux et ridicule. « Ratée, notre rupture ! […] À côté d’elles, ou même au milieu d’elles, il y a les femmes du monde et les « honnêtes femmes », agitées, inquiètes, curieuses, mais incapables de grandes passions, ignorantes d’elles-mêmes avec beaucoup d’esprit, généralement sauvées de la faute par l’habitude de la « blague » et le sentiment du ridicule. […] J’ai fait une fois le compte des choses, les unes respectables, les autres moins, qui étaient gentiment tournées en ridicule dans une seule des opérettes de Meilhac ; et j’ai trouvé qu’il y raillait, notamment, l’amour, la virginité, la poésie pastorale, la littérature romanesque, le donjuanisme, la royauté, les principes de 89, la croyance au libre arbitre, la science, et, finalement, la mort. — S’il aime, certes, la vertu, il ignore tout à fait quel en peut bien être le fondement. […] Elle dit à son mari : « C’est fait, j’ai un amant, et un amant ridicule. » Il la traite comme elle le mérite. […] La honte de l’hypocrisie rejaillit directement sur la religion et lui est en quelque sorte plus personnelle que l’infamie des autres vices. » Et enfin : « … Molière n’a fait aux mœurs aucun bien réel, il en a même favorisé le relâchement : il a corrigé quelques ridicules ; les vices lui ont résisté… Quand il a secondé, par ses plaisanteries, le progrès des mauvaises mœurs, il a toujours réussi : tous ses traits contre l’autorité des pères et des maris ont porté coup ; il est parvenu à rendre ridicules la piété filiale et la foi conjugale : mais toutes les fois qu’il a essayé de lutter contre le torrent de la corruption, il a échoué. » Je note ici, chez Geoffroy, un trait assez curieux.
Zola, qui ne craint point le ridicule, a dit quelque part : « Nous autres savants ! […] Elle nous enseigne que les heureux de ce monde ne sont point dignes d’envie, qu’ils sont misérables dans leurs joies et ridicules dans leurs élégances. […] Elle tient la vieille habileté de M. d’Oronge pour aussi ridicule que la jeune inexpérience de Fryleuse. […] Gyp a raison, tout cela est ridicule. […] » Ce n’est pas que tout soit ridicule dans ce second mouvement romantique dont Victor Hugo fut l’expression la plus éclatante.
Vraiment si ridicules ces femmes qui, pour se mettre au ton de plusieurs fins et galants poètes, imaginaient de nouvelles façons de dire et, par haine du commun, singularisaient leur esprit, leurs costumes et leurs gestes ? Leur crime, après tout, fut de ne pas vouloir « faire comme tout le monde » et il semble qu’elles l’aient assez payé cher, elles — et toute la poésie française qui, pendant un siècle et demi, craignit vraiment trop le ridicule. […] Aicard ; ce serait plus encourageant, plus académique et peut-être plus mondain, car, en France, le génie semble toujours un peu ridicule. […] Moréas ne comprendra jamais combien il est ridicule d’appeler Racine le Sophocle de la Ferté-Milon.
Autant la fausse modestie est ridicule et banale, autant l’aveu public et sincère de ses défauts est digne d’éloges et de sympathie. […] Bulwer ait eu le dessein avoué de tourner en ridicule l’aristocratie anglaise, il ne pouvait réaliser sa volonté sans attribuer à l’idole qu’il voulait briser quelques bonnes qualités. […] L’empereur et le roi de France, après avoir échangé plusieurs provocations ridicules, signent la paix de Cambray, en 1529. […] Celles qui ne sont ni curieuses ni coquettes sont inestimables, infiniment rares, et presque ridicules par leur singularité. […] Elle proclame la pauvreté de ses joies, la ridicule ambition de ses rêves ; mais elle ne songe pas un seul instant à se placer au-dessus de Pulchérie.
Il me paraît évident que, dans la pensée de Molière, Armande est une pécore infiniment déplaisante, sèche, envieuse, d’ailleurs ridicule d’un bout à l’autre de la pièce, — peu jolie enfin et déjà fort montée en graine. […] Le sujet était bien de ce siècle-ci : car vous savez que, de notre temps, le sentiment public a prolongé de beaucoup, pour les hommes et même pour les femmes, l’âge où il n’est pas encore ridicule d’être amoureux. […] Evidemment, ces vers sont ridicules si on les donne pour des vers lyriques, extraits de quelque Messénienne. […] Lecomte, qu’elle fut infiniment moins ridicule que touchante dans cette posture délicate. […] Un peu ridicule à le prendre par le menu, l’ameublement Empire donne, dans son ensemble, une impression de beauté et de fierté.
Il est un peu ridicule, cet homme qui poursuit tranquillement son existence, en ajoutant chaque jour une page à la litanie des délices de la mort. […] Saint Antoine, ermite modèle, est resté célèbre et un peu ridicule. […] Challemel-Lacour ne trouve pas que la foi de Pascal soit ridicule. […] Sans doute il est à craindre que la rhétorique, c’est-à-dire l’art d’apprendre à écrire sans don naturel, ne continue à priver les jeunes gens d’une année heureuse, et cela sans aucun profit ni intellectuel, ni esthétique ; on leur épargnera cependant l’étiquette ridicule qui servait à les appeler. […] Mais, comme il avait du génie, il a porté, même dans ces ténèbres ridicules, quelque lumière.
Mettre en relief et en lumière, avec vigueur, justesse et précision, les vices et les ridicules individuels ou sociaux, voilà l’unique mission du satirique. […] S’il se garde d’attacher son nom aux faits étroitement contemporains et de le laisser clouer, en guise d’écriteau, sur un événement quelconque, souvent insignifiant et même ridicule à certains égards, tel que la révolution de 1830, par exemple ; s’il possède les vertus propres à la poésie, c’est-à-dire la puissance de généraliser, l’emportement lyrique et la certitude de la langue ; si le vers est de trempe solide, habile, voulu, non sermonneur et vierge de plates maximes à l’usage du troupeau banal, tout est bien. […] Cette ardeur indécente et ridicule de prosélytisme moral, propre aux vertueuses générations parmi lesquelles la nôtre tient assurément la première place, non moins que cette étrange manie d’affubler de mauvaises rimes les découvertes industrielles modernes, sont des signes flagrants que le sens du beau, si profondément altéré déjà, tend à disparaître absolument.
La chanson du Sénateur, modèle achevé de raillerie grivoise contre la vanité sénatoriale et l’obséquiosité bourgeoise, fut un autre trait qui passa par-dessus la tête de Napoléon pour aller effleurer d’un premier ridicule un corps jusque-là inviolable de l’État. […] Cet esprit de faction et de démagogie a sa langue à part, langue triviale, dénigrante, quelquefois ordurière, jetant le mépris, l’offense, l’injure, le ridicule sur les choses et sur les hommes qu’elle veut saper ; prêtant des pierres à la multitude pour lapider les noms qui l’offusquent, comme les démagogues d’Athènes prêtaient des coquilles aux Athéniens pour proscrire Aristide. […] Ce genre de littérature, quand on s’y livre, a l’inconvénient de ne faire considérer les choses et les hommes que du côté ridicule, et, par conséquent, de rabaisser, de ravaler, de fausser l’esprit, comme de dégrader la langue.
Paul Hervieu d’une pareille accusation, et si ridicule. […] Opinion ridicule et qui retarde par trop d’anachronique candeur, sur le siècle ! […] Réussi, c’est Hamlet… et alors nous frissonnons en nos moelles… Oui, mais, raté… c’est Joseph Prudhomme, monsieur le vicomte… Et voilà une chose bien, bien ridicule ! […] Et pourquoi ai-je eu l’idée bizarre et ridicule de le mettre au monde ? […] … Avant qu’il ne fonctionnât, le suffrage universel était, lui aussi, une utopie… Et comme les Cornély du temps devaient pouffer de rire, à l’idée de cette chose ridicule et inapplicable !
Le tiers-état et la noblesse libérale lui répondirent par des applaudissements réfléchis et par un vote populaire ; l’aristocratie lui répondit par des outrages et par des ridicules ; son nom devint plus odieux que s’il avait sacrifié du sang au peuple ; les pamphlets contre-révolutionnaires s’acharnèrent sur ce Coriolan de sa caste ; il ne se troubla pas ; il poursuivit de vote en vote l’accomplissement des principes honnêtes de la Révolution, sur les traces des Sieyès, des Mirabeau, des Lafayette, jusqu’au point où la Révolution se sépara avec ingratitude de son vertueux promoteur, Louis XVI. […] XVI Mais, entre 1809 et 1814, Juliette, de plus en plus attachée à madame de Staël, partagea généreusement les exils de son amie, tantôt à Coppet, tantôt dans des châteaux à quarante lieues de Paris ; exils plus ridicules que sévères, où deux femmes gémissaient de ne pouvoir respirer la fumée de Paris, et où un maître du monde s’inquiétait du commérage de deux femmes.
À quoi bon ces ridicules posthumes jetés en pâture au peuple impérial de 1862 par l’enfant sublime baptisé par les Bourbons d’un autre temps ? […] Si le ridicule mordait sur l’acier, il fallait en garder un peu pour le 93 de l’évêque et du terroriste !
La famille de Robert a raconté le reste. » VI Nous avons eu la curiosité de lire le drame composé sur ce sujet, par Joseph Pilhes, de Tarascon, en 1784 ; ce drame est médiocre, et le nom de Montesquieu, changé en celui de Saint-Estieu, produit un effet assez ridicule ; cependant il a dû faire couler des larmes, surtout pendant la révolution où il se jouait encore, et où les pièces dans lesquelles triomphaient l’humanité et la nature, réussissaient d’autant plus que l’époque était plus terrible et plus agitée. […] Le Sénat et le peuple rentrèrent dans une liberté qui avait été confiée à des tyrans ridicules.
Il fut résolu « que l’on n’obligerait personne à travailler au-dessus de ses forces, et que ceux qui auraient mis leurs ouvrages au point qu’ils seraient capables de les mettre, en pourraient recevoir l’approbation, pourvu que l’Académie fût satisfaite de l’ordre de la pièce en général, de la justesse des parties et de la pureté du langage. » De cette façon, l’Académie n’empêchait pas plus l’invention qu’elle ne l’imposait : elle ne demandait aux écrivains que les qualités essentielles, d’obligation, sans lesquelles un écrit est mauvais et l’auteur de cet écrit ridicule. […] J’ai d’autant plus de plaisir à reconnaître la part qu’il prit à un travail utile et durable, et à trouver quelque endroit où le nom de Chapelain ne soit pas ridicule, que j’aurai plus tard à louer Boileau de la guerre qu’il lui fit dans l’intérêt de la poésie.
Ici le compositeur nous emporte aux plus hauts sommets de la rêverie ; là il bafoue les ridicules si spirituellement, que la gaieté s’allume et flambe de tous côtés ; ailleurs il nous remplit des clameurs et des allégresses d’une fête populaire. […] La partie du luth est confiée à une harpe minuscule du timbre le plus ridicule du monde.
Un romantique qui fut un « prince de la critique », Jules Janin, sans être hué et tué par le ridicule, devait donner une contrepartie morale et sentimentale au Neveu de Rameau. […] — « Un jour, raconte René, j’étais au sommet de l’Etna… plein de passions, assis sur la bouche de ce volcan qui brûle au milieu d’une île. » Cette phrase paraîtra prétentieusement ridicule au lecteur de 1896 ; mais en 1802 elle rappelait des événements récents.
Ceux mêmes d’entre nous qui avaient une ambition démesurée n’auraient pas osé la proclamer trop bruyamment, de peur de ridicule. […] Ils essayent de jeter le ridicule sur le nom même du progrès.
« La seule chose qui est favorable à M. de Blainville, ajoute Dangeau, c’est qu’il aura la queue de son manteau plus longue d’une aune que celle de M. de Sainctot ; et ainsi les charges ne sont pas égales, mais elles ne sont pas subordonnées. » Il semble à quelqu’un de spirituel avec qui je lis ce passage, que Dangeau, cette fois, a été à une ligne près de trouver cela ridicule, mais qu’il n’a pas osé.
— L’art en est arrivé à une époque de décadence manifeste, ceci n’est pas douteux ; un excès ridicule d’ornementation a remplacé la richesse et la pureté des lignes, etc. » Mais, en vérité, il y a bien longtemps déjà (vingt ans au moins) que M.
Vous n’avez pas de magasins ; ceci est par trop ridicule !
Car c’est votre faute, après tout, et vous avez bien votre meâ culpâ à faire ; vieillard de soixante et dix ans, vous avez été imprudent comme un jeune homme ; vous avez traité, quoique déjà averti, des sujets défendus ; vous y avez mêlé des railleries peu séantes, vous avez prêté à un personnage ridicule de vos Dialogues les opinions du Pape lui-même.
Il raconte que, dans une de ses tournées de début, un consul de Nogaro, qui était à la fois médecin, lui dit dans sa harangue « que le roi l’avait envoyé dans la province pour la purger de tous les fainéants et gens de mauvaise vie, et qu’au sentiment d’Hippocrate ce qui formait les humeurs peccantes était l’oisiveté. » L’idée, en un sens, n’était pas aussi fausse que l’expression était ridicule. — « Je gardai mon sérieux, ajoute Foucault, mai les assistants ne se crurent pas obligés à la-même gravité. » Foucault, comme autrefois Fléchier aux Grands Jours d’Auvergne, se moque des harangueurs surannés de la province ; il est un homme, de goût par rapport à ce consul.
La nature humaine n’est peut-être pas toute plate, basse ou perfide ; il y a de l’honnêteté, de l’élévation, de la tendresse ou du charme en de certains caractères : pourquoi ne pas s’arranger pour en rencontrer quelques-uns, — ne fût-ce qu’un seul, — au milieu des inévitables bêtises, des méchancetés ou des ridicules ?
Beugnot est un esprit des plus fins, des plus prompts à saisir les ridicules ; et il ne sort jamais, en les exprimant, de la ligne de la parfaite urbanité.