Malgré ces réserves, toutes les œuvres de Chateaubriand restent à lire, et il y a dans ces œuvres quatre ou cinq volumes absolument supérieurs : d’abord ces livres courts et charmants, pleins d’une poésie si nouvelle, et d’un trouble si exquis, René et Atala ; puis les Martyrs, malgré leurs défauts, ou, si l’on veut y choisir, le Récit d’Eudore, où sont des pages qui vont de pair avec les plus admirables de notre littérature ; les tableaux de la vie religieuse contenus dans le Génie du Christianisme ; Sparte, Athènes et Jérusalem dans l’Itinéraire ; les années de jeunesse dans les Mémoires ; enfin les Natchez, moins les premiers livres. […] Le père de la tribu raconte les maux que l’on faisait subir aux chrétiens A la lueur du feu on voyait ses gestes expressifs, sa barbe noire, ses dents blanches, les diverses formes qu’il donnait à son vêtement dans l’action de son récit. […] Il se fait demander à quoi il s’occupe, et répond : « Je fais mon métier de flambeau. » Parlant d’Eschyle et du théâtre d’Athènes, il ne peut se tenir de faire le récit de la première représentation d’Hernani 49. […] Mais quand il a affaire à des sensations vraies, et que, dans la foule de celles qui le pénètrent, il en juge plusieurs justes, il peut nous faire le récit de ses sensations, et ceci n’est plus un développement, c’est un tableau qui se compose, se modifie, et se recompose devant nos yeux. […] Il faut lire tout le Satyre, tout Pleine mer, tout Plein ciel, pour comprendre ce que c’est qu’une évolution d’images, qu’un récit de sensations, soutenu d’une si puissante faculté de vision ou d’évocation qu’il n’y a pas la moindre incohérence, dans une variété et un renouvellement infini de métaphores.
S’il faut en croire un récit de Flaubert aux Goncourt, elle arrivait de l’Amérique du Sud, et logeait avec deux compagnes, dans le même hôtel où étaient descendus nos voyageurs. […] Nous l’y voyons d’ailleurs avec les yeux de la foi, car nous n’avons là-dessus que le récit de Du Camp. […] Mais le récit de Du Camp paraît bien arrangé pour donner aux réflexions et aux critiques des deux amis de Flaubert le rôle le plus efficace dans les origines de Madame Bovary. […] Mais, dans les grandes lignes, Flaubert a suivi le récit de Polybe ; le lecteur doit le savoir, on peut bien lui demander cela. […] Il y a dans le Journal d’Edmond de Goncourt un récit de ses obsèques, que lui-même eût aimé.
Lui-même a fait, dit-on, l’an passé, le récit d’un sauvetage au canal de l’Ourcq, je crois, où un garçon cordonnier s’enfonçait. […] C’est dans le salon de Mme Sophie Gay que s’accomplit un soir une merveille, dont le plus exact récit ne pourrait jamais donner que la plus faible idée. […] — dit le jeune Ney ; — faites-nous quelque récit terrible ; moi je vais vous accompagner au piano ! […] Son récit posé : tout à coup ! […] Le piano accompagnait chaque phrase en conformant son harmonie au sens toujours lugubre, toujours effrayant du récit.
Au tome second des Œuvres choisies de La Monnoye (page 296), on lit un récit détaillé de cette mort de Santeul par La Monnoye ; témoin presque oculaire ; rien n’y vient ouvertement à l’appui du dire de Saint-Simon : Santeul s’était levé le 4 août, encore gai et bien portant ; il ne fut pris de ses atroces douleurs d’entrailles que sur les onze heures du matin ; il expira dans la nuit, vers une heure et demie. […] Après cela, les symptômes extraordinaires rapportés par La Monnoye, et les réponses peu nettes des médecins, aussi bien que le traitement employé, s’accorderaient assez avec le récit de Saint-Simon ; on conçoit que la chose ait été étouffée le plus possible.
C’est toujours le très intéressant récit de ses négociations entre M. de Chateaubriand, ambassadeur à Londres, et M. […] — Mais d’abord, quelques mots de préambule, nous dit alors notre prudent lecteur, pour vous expliquer où nous allons prendre le récit.
Mariano, selon le récit de Politien, était le prédicateur le plus remarquable de ce temps. […] Son début était frappant et son regard plein d’expression ; je commençai à m’intéresser sérieusement à ce qu’il allait dire. — Il commence ; je suis attentif : une voix sonore, des expressions choisies, des sentiments élevés. — Il établit les divisions de son sujet : je les saisis sans peine ; rien d’obscur, rien d’inutile, rien de fade et de languissant. — Il développe ses arguments ; je me sens embarrassé. — Il réfute le sophisme, et mon embarras se dissipe. — Il amène un récit analogue au sujet ; je me sens intéressé. — Il module sa voix en accents variés qui me charment. — Il se livre à une sorte de gaieté ; je souris involontairement. — Il entame une argumentation sérieuse ; je cède à la force des vérités qu’il me présente. — Il s’adresse aux passions ; les larmes inondent mon visage. — Il tonne avec l’accent de la colère ; je frémis, je tremble ; je voudrais être loin de ce lieu terrible. » « Valori nous a laissé, sur les sujets particuliers qui occupaient l’attention de Laurent et de ses amis dans leurs entrevues au couvent de San-Gallo, des détails qu’il tenait de la bouche de Mariano lui-même.
Ces livrets étaient des programmes détaillés, qui contenaient la suite des entrées, les noms des danseurs, les vers des récits, des couplets sur chacune des personnes qui figuraient dans les diverses entrées. […] A travers un rapide récit, où Xipharès expose toutes les circonstances par lesquelles son rôle est déterminé, soudain il s’arrête un moment sur les victoires de son père : Et des rives du Pont aux rives du Bosphore, Tout reconnut mon père… De ce triomphe l’orgueil filial de Xipharès est enivré, et le sentiment suscite un réveil de sensations, la vision d’une mer sans ennemis, où les flottes du roi déploient joyeusement leurs voiles : ….Et ses heureux vaisseaux N’eurent plus d’ennemis que les vents et les eaux.
Atala et René ne sont que des débris des Natchez ; ces deux récits étaient allés d’abord grossir le Génie du Christianisme : Atala s’en détache avant l’impression ; René y reste incorporé jusqu’en 1805. […] Le Dernier Abencérage est une transposition poétique des impressions d’Espagne, qui n’avaient pu trouver place dans le cadre des Martyrs, et c’est de plus une réplique ou réduction d’une des idées fondamentales de la grande épopée : musulman et chrétienne, chrétien et païenne, au fond des deux récits est l’antithèse de deux religions.
N’en pouvant obtenir d’audience, est-il vrai qu’il aurait imaginé, pour attirer son attention, de se promener sous ses fenêtres dans un costume grotesque ; qu’alors le chancelier lui ayant dépêché un page pour savoir qui il était, Rabelais lui aurait répondu en latin ; qu’à un autre page il aurait parlé en grec ; à un autre, en espagnol ; à d’autres successivement, en allemand, en anglais, en italien, en hébreu ; et que la rencontre si plaisante de Pantagruel et de Panurge44 ne soit que le récit, sous d’autres noms, de cette anecdote de sa vie ? […] Si je la regarde ensuite, soit dans les caractères que Rabelais a créés, soit dans tout ce qu’il conservé et perfectionne de ce don charmant du récit, aussi antique que notre France, je ne la trouve pas moins admirable.
Si le premier prélude est l’un des plus radieux fragments symphoniques de Wagner, le récit du Saint-Gral, qui d’ailleurs est dérivé de ce prélude, demeure l’une des pages les plus hautement suggestives que le maître ait écrites. […] Garcia) : Récit et chœur des Pèlerins.
Son histoire est le récit de son émancipation à l’égard de la théologie et de sa transformation en science. […] Cousin, qui combat Locke « en rhétoricien »215, se plaint de le voir parler de sauvages, d’enfants, de récits de voyageurs, et il ne voit pas que Locke essaie la méthode comparative.
Alors, c’est le drolatique récit de ses soixante-trois créanciers, dont quelques-uns ne sont pas venus se faire payer, redoutant une mystification, et dont les autres lui disaient avec toutes sortes de défiances : « Vous êtes bien chez vous, on peut parler, n’est-ce pas ? […] Ainsi il préludait aux récits des batailles de l’Empire.
» C’est ainsi qu’un ami commence le récit suivant : À Biarritz, il y a une bibliothèque de 25 volumes, votre Histoire de la société française pendant le Directoire s’y trouvait. […] Le dîner se termine par un humoristique récit d’une pendaison à Londres, fait par Gavarni.
Le récit de Rulhière si piquant et tant contesté est aujourd’hui vérifié, dans son esprit du moins et dans ses circonstances principales.
Cependant un sentiment de solidarité s’y développe chez lui ; opprimé, il prendra aussitôt parti pour les opprimés : « Ces souffrances de l’éducation universitaire ont laissé dans mon âme des traces ineffaçables ; elles y ont développé de bonne heure les instincts de solidarité au point que je n’ai jamais été témoin, que jamais je n’ai entendu le simple récit d’une injustice sans en ressentir le contre-coup ; je leur dois encore d’avoir été, dans toute l’étendue du mot, un excellent camarade. » La lecture de Gibbon commença de bonne heure son émancipation en matière de croyances.
Mais que ces révélations, d’ordinaire fugitives et rares, se succèdent et se reproduisent incessamment dans une âme ; qu’elles se mêlent à toutes ses idées et à toutes ses passions ; qu’elles jaillissent, éblouissantes et lumineuses, de chaque endroit où se porte la pensée, des récits de l’histoire, des théories de la science, des plus vulgaires rencontres de la vie ; que, cédant enfin à ces innombrables sensations qui l’inondent, l’âme se mette à les répandre au dehors, à les chanter ou à les peindre, là est le signe, là commence le privilège du poète.
Il s’est conservé, en certaines contrées à part, surtout en Bretagne et vers les Pyrénées, d’anciennes traditions poétiques, des récits superstitieux, des chants même en langue du pays, altérés sans doute, mais évidemment transmis.
Corneille avait bien vu le péril d’un sujet, si dramatique dans le récit de l’historien, mais si rebelle, en effet, à la forme dramatique.
Admirateur enthousiaste et timoré de Racine, il conservera scrupuleusement les formes léguées par le xviie siècle ; il résistera de toutes ses forces aux doctrines subversives de La Motte qui voulait supprimer de la tragédie les confidents, les monologues, les récits, les unités, et le vers.
(Et tout ce récit, je dois le reconnaître, est un pur chef-d’œuvre.)
Il est impossible, parmi les récits miraculeux dont les évangiles renferment la fatigante énumération, de distinguer les miracles qui ont été prêtés à Jésus par l’opinion de ceux où il a consenti à jouer un rôle actif.
Il faut reconnaître cependant que le tour de la narration de Jean a quelque chose de profondément différent des récits de miracles, éclos de l’imagination populaire, qui remplissent les synoptiques.
C'est par-tout la même lenteur dans la marche, la même uniformité dans les récits, la même tournure dans les réflexions, la même attitude dans les paralleles, la même symétrie dans les figures, la même surcharge dans les tableaux.
Je sais que les sauvages relèvent à de certains indices les traces des animaux qu’ils poursuivent à la chasse, voici une notion : mais si quelque explorateur cite devant moi quelque fait de ce genre, l’image notion qu’il me transmettra avec les mots du récit sera bien loin d’éveiller dans mon intelligence une image réelle aussi précise et aussi riche que celle qui naîtrait dans l’intelligence d’un sauvage.
Barbey d’Aurevilly, les études des de Goncourt et de Théodore de Banville, les descriptions de tableaux du Voyage en Italie de Taine, certains récits d’auditions par Baudelaire seraient ce que nous réclamons, s’ils étaient basés, cependant, sur l’enquête analytique préalable sans laquelle ces pages de haute littérature demeurent la constatation insuffisante d’une émotion morale inexpliquée.
Un homme n’ayant plus, etc… Cette fable n’est que le récit d’une aventure dont il ne résulte pas une grande moralité.