L’Oraison funebre de M. de Turenne peut être regardée comme un chef-d’œuvre, par la maniere dont les différentes qualités du Héros sont développées, & par la chaleur du style, la beauté des traits qui s’y succedent sans appareil, sans gêne, comme la vraie peinture de chaque objet.
Quelle comparaison entre un Ouvrage marqué au coin du génie, conduit avec un art qui enchante, enrichi de tableaux & de sentimens qui attachent & pénetrent l’ame, embelli par des peintures qui ravissent l’imagination & la captivent !
Le roman et la poésie ont voulu être de la peinture, de la musique, de la sociologie, etc… À ces croisements multipliés et peu raisonnables s’est abâtardie la sève littéraire d’un pays qui reste cependant encore le premier, dans le domaine littéraire et idéologique.
Enfin, cette ressource étant encore interdite aux poètes comiques, Ménandre et ses contemporains cherchèrent à intéresser le spectateur par une intrigue attachante et par la peinture des mœurs générales : c’est ce qu’on appelle la comédie nouvelle, que Plaute et Térence offrirent aux Romains.
Quand la veuve d’Hector, dans l’Iliade, se représente la destinée qui attend son fils, la peinture qu’elle fait de la future misère d’Astyanax a quelque chose de bas et de honteux ; l’humilité, dans notre religion, est bien loin d’avoir un pareil langage : elle est aussi noble qu’elle est touchante.
S’il existait une religion qui s’occupât sans cesse de mettre un frein aux passions de l’homme, cette religion augmenterait nécessairement le jeu des passions dans le drame et dans l’Épopée ; elle serait plus favorable à la peinture des sentiments que toute institution religieuse qui, ne connaissant point des délits du cœur, n’agirait sur nous que par des scènes extérieures.
Ces derniers présentent au pinceau le genre tragique dans sa plus grande élévation ; après la peinture de leurs tourments, nous dirions ce que Dieu fit pour ces victimes, et le don des miracles dont il honora leurs tombeaux.
Les Réfléxions sur la Poésie & la Peinture en 3. vol.
Or c’est l’invention de ces circonstances qui constituë le poëte en peinture.
Michel Ange de Caravage et ses imitateurs ont aussi fait sur cette partie de la peinture, des découvertes excellentes, quoiqu’on puisse leur reprocher d’en avoir été trop amoureux.
Il en est de même de la peinture.
Et sur la passion de la peinture de Bracquemond fils, d’après des vitraux, il me confesse avoir ce goût, et avoir travaillé à Chartres, à Reims, et à Notre-Dame, à Notre-Dame, qu’il a habitée la matinée, presque deux années, visitant tous les coins et les recoins des tours, au milieu de ces anges suspendus dans le ciel, ayant comme des mouvements de corps, pour se retenir et ne pas tomber en bas. […] Vous avez assoupli votre langue aux exigences complexes de la peinture des réalités observées, aux nécessités changeantes des traductions d’une âme, au caprice même des impressions les plus fugitives. […] le bleu qui habille les femmes cette année, le bleu qui met sur elles la note dure, que le bleu de Prusse apporte dans la peinture, et n’ayant rien de la nuance céleste dont on le baptise, — et qu’a le bleuet, dans l’ensoleillement de midi ! […] On déjeune dans une salle à manger, en laquelle, à la suite d’un dîner végétarien, a été peint un Sarcey énorme, dans une épouvantable peinture décorative, le représentant au milieu de tous les légumes de la terre. […] Et surtout, il nous venait une horreur des grosses colorations, auxquelles j’avais un peu trop sacrifié, et nous cherchions dans la peinture des choses matérielles, à les spiritualiser par des détails moraux.
Lorsque Énée, voyant à Carthage, dans le temple de Junon, des peintures qui représentent le siège de Troie, fait cette remarque : Sunt lacrymæ rerum…, cela signifie simplement, comme vous savez : « Notre triste renommée est donc parvenue jusqu’en ce pays ! […] Trois grands faits dominent dans ses peintures éparses : l’avènement de l’argent, le déclin moral de la noblesse, le discrédit jeté sur le clergé et sur l’Église par la « fausse dévotion ». […] Cet homme d’imagination violente et charnelle (vous vous rappelez ses études sur la Renaissance et sur la peinture flamande) a eu la vie d’un ascète et d’un bénédictin. […] Coppée a recommencé si souvent ; il y est revenu avec une si évidente complaisance qu’il faut bien qu’il y ait mis son coeur et qu’il ait trouvé, dans ces peintures en vers de la vie, des mœurs, des souffrances et des mérites des « humbles », — et non point des « humbles » pittoresques : bergers, pêcheurs, vagabonds, gueux de Richepin, mais des « humbles » incolores : épiciers, employés, vieilles filles une autre douceur, plus intime, plus humaine, que celle d’accomplir des séries de tours de force En somme, Coppée, dans ses Humbles, a presque créé un genre ; il a presque réalisé un rêve de Sainte-Beuve. […] Mais, là est le piquant, l’immoralité courageuse des peintures commente et « illustre », chez M.
D’ailleurs en choisissant le mot Poésie pour lui donner ce sens universel, je sous-entendais une distinction qu’il faut maintenant préciser entre l’art général — que nous nommons poésie, et la technique particulière de chaque expression artistique : les vers, la musique, la peinture… Désormais toutefois, je me restreindrai à l’art écrit, à celui qu’on a pu par excellence désigner du terme de poésie. […] Le sentiment lui-même a pris le masque de la sensation ; mais la musique et la peinture de ses vers reconstituent, par le logique enchaînement de la sensation au sentiment et à la pensée, tout le composé humain. […] Voyez le rôle que la personnalité du Christ a repris dans la poésie sous toutes ses formes, depuis qu’on l’a rapproché de nous. — Voyez en musique les plus grands artistes s’inspirer avec prédilection de cette figure tendre et pensive en des chefs-d’œuvre comme « l’Enfance du Christ » de Berlioz, le « Parsifal » de Wagner, « les Béatitudes » de César Franck (pour ne citer que ceux-là). — Voyez en peinture : là le mouvement va jusqu’à l’excès, voire jusqu’à la caricature, et l’on ne peut plus compter les exemplaires de la peinture religieuse ramenée aux proportions humaines, qui fait la plus singulière caractéristique des salons annuels. — Voyez en littérature, voyez même au théâtre. […] Ou bien au contraire elle envahit le domaine plastique, hérisse le style écrit de termes arides et qui ne font pas image, encombre la peinture et la musique de théories réputées infaillibles, de procédés qui suppriment l’émotion et l’instinct et prétendent mettre l’artiste à même de produire à coup sûr des œuvres irréprochables.
La peinture et la sculpture ne vivent que de traiter éternellement les mêmes sujets. […] S’il s’entête à peindre, quelle pourra être la valeur de cette peinture ? […] Les pastiches littéraires ne trompent plus personne ; en peinture, ils représentent une tige toujours fleurissante de l’art international. […] D’une peinture à la chinoise, la poésie est devenue une musique. Ses règles ont changé dans la mesure où ce qui est applicable à la musique ne l’est pas à la peinture.
Ces peintures allégoriques sont encore traitées dans la manière religieuse. […] Faut-il continuer l’énumération des peintures et nommer Francesco di Gorgio, Neroccio Cazarelli, Bernardino Fungai ? […] Il me montrait les peintures de Signorelli sur les épisodes légendaires de la vie de saint Benoît et celles de Sodoma. […] Lemonnier amasse des notes pour la préparation d’un nouveau catalogue de nos peintures, celui de son prédécesseur, M. […] L’identification des peintures anciennes passionnera toujours les critiques d’art.
Je ne connais pas de peinture plus navrante que celle-ci, dans sa tragique simplicité, pour exprimer le désespoir religieux. […] Sous cette influence nouvelle, un art, lentement développé, arrive après de longs essais à sa perfection ; c’est la peinture. […] C’est à exprimer ce type dans sa pureté que tendra de toutes ses forces la peinture à sa grande époque. […] N’y a-t-il pas eu une peinture païenne comme il y a une peinture chrétienne ? […] Il a été trop exigeant envers lui-même, en se refusant ces vives et larges peintures ; il n’a pris que le côté abstrait de son sujet.
— Ils se piquent de peinture, du moins ils l’étudient avec une minutie étonnante, à la chinoise ; ils sont capables de peindre une botte de foin si exactement, qu’un botaniste reconnaîtra l’espèce de chaque tige ; celui-ci s’est installé sous une tente pendant trois mois dans une bruyère afin de connaître à fond la bruyère ; beaucoup sont des observateurs excellents, surtout de l’expression morale, et réussiront très-bien à vous montrer l’âme par le visage ; on s’instruit à les regarder, on fait avec eux un cours de psychologie ; ils peuvent illustrer un roman ; on sera touché par l’intention poétique et rêveuse de plusieurs de leurs paysages. Mais dans la vraie peinture, la peinture pittoresque, ils sont révoltants. […] On peut la traiter comme une affaire, ramasser et vérifier des observations, combiner des expériences, aligner des chiffres, peser des vraisemblances, découvrir des faits, des lois partielles, posséder des laboratoires, des bibliothèques, des sociétés chargées d’emmagasiner et d’accroître les connaissances positives ; en tout cela ils excellent ; ils ont même des Lyell, des Darwin, des Owen capables d’embrasser, de renouveler une science ; dans la construction du vaste édifice, les maçons industrieux, les maîtres de second ordre ne manquent pas ; ce sont les grands architectes, les penseurs, les vrais spéculatifs qui leur manquent ; la philosophie, surtout la métaphysique, est aussi peu indigène ici que la musique et la peinture ; ils l’importent ; encore en laissent-ils la meilleure partie en chemin ; Carlyle est obligé de la transformer en poésie mystique, en fantaisies d’humoriste et de prophète ; Hamilton l’effleure, mais pour la déclarer chimérique ; Stuart Mill, Buckle, n’en prennent que l’espèce la plus palpable, un résidu pesant, le positivisme.
J’ai prouvé ce caractère littéraire de la musique dans mes Entretiens sur Mozart, et ce caractère littéraire de la peinture dans mes Entretiens sur Léopold Robert. […] C’est un jeu d’enfant ; et, si un philosophe recueilli a inventé l’écriture, si un oiseau inspiré a inventé la musique, si un opticien coloriste a inventé la peinture, nous pensons que la sculpture a été inventée par un enfant. […] Il y a trop d’illusion dans la peinture, trop d’optique, trop de chimie, trop de mathématique, trop de prestige. […] J’ignore si la sculpture reverra jamais le siècle de Périclès, ou la peinture celui de Léon X.
Entre l’élégie de Lamartine et la philosophie de Vigny, dès qu’il fut décidé à être romantique, il fit éclater le propre et sensible caractère du romantisme français : c’était de faire de la poésie une forme, et la peinture des formes. […] Et le plus singulier, c’est qu’il ne donnait pas autant la vision de l’objet que celle de la peinture de l’objet : sa littérature nous fait repasser par un autre art avant d’atteindre le modèle lui-même. […] Et vous avez là une peinture symbolique de l’hiver. […] Ce n’est rien de pareil à Hugo ni à Vigny ; mais qu’on lui donne un lieu commun, une idée, il en fera le « tableau », et c’est ce tableau que son vers décrit : voyez sa Caravane 789 ; ici encore avant d’atteindre l’objet, nous devons repasser par la peinture.
L’historien n’étant plus échauffé par la présence des objets, ni par les intérêts actuels qui s’éteignent avec les passions qui les font naître, ne pouvoit qu’en retracer le tableau ; mais avec quelle grandeur, quelle noblesse, quelle fierté, quelle force, quel sens, Salluste & Tite-Live tracent-ils ces peintures ? […] Mais ses peintures, quoique vives, sont sans images. […] L’on en est bien dédommagé par la beauté & la vivacité des images, par les pensées délicates, par les peintures ingénieuses, mais fidéles de nos mœurs, par un style sentencieux, enfin par un langage clair, noble & coulant, presque tout emprunté de l’Ecriture sainte. […] La grandeur des pensées releve chez lui la vivacité des peintures.
On voit passer devant soi une suite de peintures de mœurs fort contrastées, prises chacune sur le vif dans les régimes successives que l’auteur a traversés et qu’il a trouvé moyen de railler, tout en les servant. […] Quelles vivantes peintures de cette société, aimable encore et légère jusque dans les prisons, à la veille du supplice !
Il considère le fait d’écrire comme une carrière d’État, qui doit être utile à la nation, et le rôle du critique comme celui d’un fonctionnaire ; il est convaincu au même point que les professeurs de l’Académie des Beaux-Arts perpétuant l’enseignement de la peinture sans même admettre l’hypothèse que l’art ne s’enseigne pas. […] Gustave Geffroy, outre sa série de belles appréciations sur la peinture, a écrit avec l’Enfermé une monographie critique et historique de haute valeur, constituant un des plus beaux essais que la littérature française ait produit depuis trente ans.
L’historien des religions n’est pas tenu de nous donner une religion nouvelle, ni celui des beaux-arts de faire un chef-d’œuvre en peinture, ni celui de la guerre d’être un grand capitaine : ainsi l’historien de la philosophie n’est pas nécessairement un grand philosophe, ce n’est pas son objet. […] Après tout, c’est un grand mal sans doute si dans un temps donné il n’y a pas de grand philosophe ; mais ce n’est pas une raison pour qu’il n’y ait point d’historien de la philosophie, de même que, s’il n’y a pas de grand peintre, ce n’est pas une raison pour ne pas faire l’histoire de la peinture.
C’était là un livre médiocre d’inspiration… et de calcul, car cette inspiration était calculée, sans composition, sans mise en scène supérieure, vulgaire de détails, colorié plutôt que coloré, tant grossière en est la peinture ! […] Ils sont et doivent être la peinture vivante d’une classe disparue, selon l’auteur, ou qui est sur le point de disparaître, et dont ils sont les derniers débris ou les dernières épaves ».
J’ai lu avec une grande émotion votre très vive et très exacte peinture de l’École normale de 1849 à 1852.