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986. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Voilà cependant que la jolie fille de mon concierge, enfant de douze à quatorze ans, ouvre la porte de ma chambre au premier rayon d’un mois de printemps, avant l’heure ordinaire où elle m’apportait le journal matinal ; elle jette sur mon lit en souriant une petite lettre cachetée d’un énorme sceau de cire rouge avec une empreinte d’armoiries qui devaient être illustres, car elles étaient indéchiffrables. « Pourquoi riez-vous ainsi finement, Lucy ? […] Ajoutez à cela les simples accidents ordinaires de la vie privée, la mort de l’aïeule, la naissance d’un nouveau-né, le départ du fils pour l’inconnu de sa destinée, hors du nid et du pays, les amours, le mariage de la sœur aînée, les fêtes du foyer, la religion introduisant l’infini des espérances et la sainteté des amours dans ce petit monde qui s’étend de la cheminée à la fenêtre, et du seuil au cimetière : voilà l’épopée de famille, sujet dont le drame s’agite sous quelques tuiles, et qui ne se dénoue que dans l’éternité, ce rendez-vous de tout ce qui s’aime ; voilà ce qu’il se chante tout bas à lui-même, ce jeune Homère de l’Iliade du cœur !

987. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Puis des combats sont chantés d’un souffle qui ne se soutient pas mais qui par instants est singulièrement vaillant : même, une fois, en décrivant l’assaut de Delhi, Mauclair ajoute la couleur à ses dons ordinaires et la page est d’une poésie rouge et noire vraiment émouvante. […] Mais, d’ordinaire, il ne se fie pas à ses propres yeux.

988. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

« On n’envisage d’ordinaire la science, — lisons-nous dans L’Avenir de la science, — que par ses résultats pratiques et ses effets civilisateurs. […] Seulement, et au lieu de voir la contradiction où on la voit d’ordinaire, je veux dire entre les affirmations premières du positivisme, et l’affirmation finale de l’Inconnaissable, je la vois en ceci qu’il a essayé de réaliser ou de concréter l’Inconnaissable sous la forme de l’Humanité.

989. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

J’étais couché mollement, Et, contre mon ordinaire, Je dormais tranquillement… Petite remarque à faire. […] Ces endroits, comme vous le savez, sont d’ordinaire le quartier des Flores : j’y en vis une et une Vénus, un Bacchus moderne, un consul (que fait ce consul parmi de jeunes déesses ?)

990. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

Et Moréas, qui s’était peut-être un peu avancé, avec sa fougue ordinaire, et qui avait peut-être dit de confiance quelque chose à quoi il ne croyait pas beaucoup, Moréas avait raison : il y a de très beaux vers dans le Quinquina, et je vous les lirai dans un instant. […] Il a écrit une Astrée très ordinaire quoique assez bien conduite  ce n’est qu’un épisode de l’Astrée, le principal, à la vérité, les amours d’Astrée et de Céladon  mais sans talent supérieur ; c’est simplement acceptable.

991. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Il y a là des dévouements ordinaires à tout roman sentimental, plus lieux communs encore que les duels ; et, entre autres, il y a celui-là qu’aimait La Fontaine : De la dame Emportée à travers la flamme ! […] On dirait qu’il a interverti l’ordre des procédés ordinaires, et qu’il n’a pas placé ses personnages dans ses descriptions, mais plaqué ses descriptions par-dessus ses personnages, mettant l’accessoire devant le principal, et la plastique inerte devant la nature vivante !

992. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

Alors il tire son épée, chose unique dans sa vie ordinaire, fait battre un ban, reconnaît lui-même le général Friant et lui donne l’accolade.

993. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — I » pp. 219-230

J’ai fait ce que j’ai pu pour les rendre aussi ridicules qu’ils le sont… » Il n’y a pas réussi cette fois à son ordinaire.

994. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « À M. le directeur gérant du Moniteur » pp. 345-355

Mais ce ne sont pas les salons tous seuls qui m’onts donné cette crainte de parler qui, de ma part, vous étonne ; ce sont nos confrères de la presse, les gens du métier et qui ne sont pas sujets d’ordinaire à se scandaliser pour si peu.

995. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

« Fidèle à la détestable méthode de collège, M. de Pongerville a tellement en aversion tous les mots qui servent de lien logique au langage, il les supprime si constamment, de peur de tomber en prosaïsme, que, pour peu que le raisonnement se prolonge, ce qui est très ordinaire chez Lucrèce, il devient impossible d’en suivre l’enchaînement chez son traducteur.

996. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

Lamennais, Paroles d'un croyant Un jour Nicole, fatigué des tracasseries et des luttes, invitait avec sa douceur ordinaire le grand Arnauld à déposer la plume ; et celui-ci lui répondait vivement : « N’avons-nous pas l’éternité pour nous reposer ? 

997. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

On est dédommagé par un bon nombre de justes et piquantes observations, présentées d’ordinaire sous forme d’ironie ; ainsi ce mot : « Lorsqu’on est heureux, il ne faut pas trop se demander pourquoi.

998. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « FLÉCHIER (Mémoires sur les Grands-Jours tenus à Clermont en 1665-1666, publiés par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont.) » pp. 104-118

Régulièrement, durant tout le volume, on aura le récit des causes célèbres qui vont être jugées, des grandes exécutions qui vont faire éclat, et, entre deux petites histoires de la question ordinaire ou extraordinaire, on aura le délassement de ces horreurs, la conversation avec les dames, de galantes promenades en carrosse hors de la ville, quand le soleil d’automne le permet, non pas sans quelques excursions plus lointaines, à Vichy, par exemple, avec des descriptions de nature qui rappellent et égalent celles de madame de Motteville en face des Pyrénées.

999. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres publiées par M. J. Sabbatier. Tome Ier, 1845. » pp. 154-168

Pour qu’en 1845 une telle opinion puisse sérieusement se produire et qu’elle trouve place dans un esprit aussi cultivé que paraît l’être celui de l’éditeur, il ne suffit pas d’une dose d’illusion ordinaire ; c’est un phénomène qui exige une explication plus appropriée ; Victorin Fabre a eu ses dévots, et M.

1000. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Des soirées littéraires ou les poètes entre eux »

Pour être juste toutefois, n’oublions pas que cette époque fut le règne de ce qu’on appelait poésie légère, et que, depuis le quatrain du marquis de Sainte-Aulaire jusqu’à la Confession de Zulmé, il naquit une multitude de fadaises prodigieusement spirituelles, qui, avec les in-folio de l’Encyclopédie, faisaient l’ordinaire des toilettes et des soupers.

1001. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — I »

« L’Assemblée (constituante) abolit toutes les distinctions honorifiques, toutes les armoiries, jusqu’aux titres insignifiante de monsieur et de madame, locutions de pure courtoisie, si l’on veut, mais qui, réunies à d’autres semblables, rendent plus douces les relations ordinaires de la vie, et entretiennent cette urbanité de mœurs que les Français désignaient par l’expression heureuse de petite morale. » Notez ce mot en passant, MM. de l’Académie ; et vous tous qui étudiez l’histoire, n’oubliez pas que l’Assemblée constituante abolit les titres de monsieur et de madame.

1002. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Fourier lui-même déploie d’ordinaire une éloquence cynique que rien n’égale, comment passer à M. 

1003. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Car après les trois jours, durant deux années, le saint-simonisme a été en grande partie cela. à ce sujet, on nous, permettra de citer ici quelques vers laissés par un jeune saint-simonien mort, Bucheille ; le sentiment qu’il éprouve en approchant du groupe qu’il considère comme sacré, ce détachement des autres amitiés et des liens antérieurs, cette illusion d’un essor plus vaste et d’un rajeunissement moral, tous ces symptômes, que beaucoup ont partagés, y sont assez naïvement réfléchis : nous n’avons supprimé qu’un bout d’amourette vers la fin ; et c’était là encore un trait qui d’ordinaire ne faisait pas faute.

1004. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre premier. Pour faire des Tragédies qui puissent intéresser le public en 1823, faut-il suivre les errements de Racine ou ceux de Shakspeare ? » pp. 9-27

Mais un spectateur ordinaire, dans l’instant le plus vif de son plaisir, au moment où il applaudit avec transport Talma-Manlius disant à son ami : « Connais-tu cet écrit ? 

1005. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

L’isvoschik était charmant avec le col blanc de sa chemise ressortant de son caftan, et serrant son cou vigoureux et rouge ; il avait un traîneau commode, plus élevé que les traîneaux ordinaires (jamais Levine ne retrouva son pareil), attelé d’un bon cheval, qui faisait de son mieux pour courir, mais qui n’avançait pas.

1006. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

L’ampleur charnue de l’ordinaire interlocuteur de M. 

1007. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Anatole France, le Lys rouge »

Même la première « déclaration », qui est d’ordinaire naïve, confiante, optimiste, Dechartre la fait avec âpreté, en termes inattendus, menaçants pour tous les deux, et qui, vers la fin, semblent commenter Darwin.

1008. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Le valet rend grâces au ciel de cet heureux changement, lorsque Don Juan se lève, et, par un coup de pied adroitement placé, fait sa réponse ordinaire à la harangue du moraliste, et lui donne l’ordre de faire servir à l’instant le souper.

1009. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVII. Romans d’histoire, d’aventures et de voyages : Gebhart, Lemaître, Radiot, Élémir Bourges, Loti » pp. 201-217

Je pense seulement à ceci : qu’il est d’une douceur infinie de se délasser du travail par une occupation qui est presque le contraire de celle à qui l’on s’adonne d’ordinaire, et où pourtant l’on ne perd pas le bénéfice de ses compétences.

1010. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Au contraire, pour travailler sur les mots, tout le monde y est prêt, les uns par la médiocrité de leur fonds, les autres parce que la mode est d’ordinaire aux mots travaillés.

1011. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre V. L’Analyse et la Physique. »

Toutes les lois sont donc tirées de l’expérience ; mais pour les énoncer, il faut une langue spéciale ; le langage ordinaire est trop pauvre, il est d’ailleurs trop vague, pour exprimer des rapports si délicats, si riches et si précis.

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