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871. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Matthieu Ricci, qui cherchoit, par toutes sortes de moyens, à grossir la foule des prosélytes, & les mettoit le moins qu’il pouvoit à des épreuves. […] On eût passé sur tout cela comme on passe sur cette foule de petites querelles qui déchirent continuellement & nécessairement tout corps où l’on cherche à s’instruire, & qui ne sont que de simples partages d’opinions. […] Les pauvres alloient en foule chez lui. […] Les seules circonstances l’ont tiré de la foule. […] « Si l’impie, dit l’auteur, foule aux pieds la thiare, les mitres & les crosses, c’est vous qui l’avez enhardi.

872. (1842) Discours sur l’esprit positif

Dans son aveugle instinct de liaison, notre intelligence aspire presque à pouvoir toujours lier entre eux deux phénomènes quelconques, simultanés ou successifs ; mais l’étude du monde extérieur démontre, au contraire, que beaucoup de ces rapprochements seraient purement chimériques, et qu’une foule d’événements s’accomplissent continuellement sans aucune vraie dépendance mutuelle ; en sorte que ce penchant indispensable a autant besoin qu’aucun autre d’être réglé d’après une saine appréciation générale. […] Une telle relation indique aussitôt combien sont nécessairement creuses et stériles les recherches spéculatives dirigées, en un sujet quelconque, vers les premiers principes, qui, devant toujours émaner de la sagesse vulgaire, n’appartiennent jamais au vrai domaine de la science, dont ils constituent, au contraire, les fondements spontanés et dès lors indiscutables ; ce qui élague radicalement une foule de controverses, oiseuses ou dangereuses, que nous a laissées l’ancien régime mental. […] Enfin, au lieu de laisser la science sociale dans le vague et stérile isolement où la placent encore la théologie et la métaphysique, il la coordonne irrévocablement à toutes les autres sciences fondamentales, qui constituent graduellement, envers cette étude finale, autant de préambules indispensables, où notre intelligence acquiert à la fois les habitudes et les notions sans lesquelles on ne peut utilement aborder les plus éminentes spéculations positives ; ce qui institue déjà une vraie discipline mentale, propre à améliorer radicalement de telles discussions, dès lors rationnellement interdites à une foule d’entendements mal organisés ou mal préparés. […] S’adressant à des populations plus avancées, il a livré à la raison publique une foule de prescriptions spéciales que les anciens sages avaient cru ne pouvoir jamais se passer des injonctions religieuses, comme le pensent encore les docteurs polythéistes de l’Inde, par exemple quant à la plupart des pratiques hygiéniques. […] L’ensemble de la nouvelle philosophie tendra toujours à faire ressortir, aussi bien dans la vie active que dans la vie spéculative, la liaison de chacun à tous, sous une foule d’aspects divers, de manière à rendre involontairement familier le sentiment intime de la solidarité sociale, convenablement étendue à tous les temps et à tous les lieux.

873. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Au lieu d’être simplement l’organe fidèle de l’idée qu’il a conçue, l’humoriste, dans l’ivresse du pouvoir arbitraire et des droits superbes de l’esprit, s’érige en dominateur de l’idéal, change à son gré l’ordre normal des choses, foule aux pieds la nature, la règle et la coutume, efface, éclipse, annule sa propre conception par l’éblouissant éclat de ses caprices, et n’est satisfait que lorsque son tableau, vide d’intérêt, vide de substance, sans vérité comme sans unité, présente à nos regards fatigués et distraits le spectacle à la fois changeant et monotone d’un chaos fantastique, où tout se mêle, s’entrechoque et se détruit. […] Rompre sans cesse le développement rationnel d’un roman tragi-comique, commencer arbitrairement, continuer et finir de même, jeter au hasard, pêle-mêle, sans suite, une foule d’images, de sentiments et de saillies : voilà le programme qu’il suit et qu’il nous propose. […] Dans la comédie moderne, celle-ci domine si généralement, qu’une foule de productions comiques tombent ainsi dans la simple plaisanterie prosaïque, et même prennent un ton âcre et repoussant.

874. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Nous parlons d’Obéron, et de la foule qui est arrivée à Weimar de tous côtés pour assister à la représentation ; déjà à midi il n’y avait plus de billets. […] Je connais la grande-duchesse depuis 1805, et j’ai eu une foule d’occasions d’admirer son esprit et son caractère. […] Il appelle de leur vrai nom ces exécuteurs des forfaits du peuple, — des meurtriers complaisants de la foule, des flatteurs d’en bas aussi timides et aussi coupables que les courtisans d’en haut.

875. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Leur simplicité n’est qu’apparente, car elles enveloppent une foule d’éléments associés et unis ; aussi contiennent-elles des affirmations sous-entendues. […] Il y a dans la pensée deux intermédiaires tout naturels entre les images particulières et les concepts généraux : l’espace et le temps, qui sont comme la pluralité devenue sensible et répandue devant l’imagination ; quand nous voyons une chose dans l’espace, nous en voyons en même temps une foule d’autres ; quand nous apercevons une chose dans le temps, nous avons une perspective indéfinie sur le passé. Le concept général, comme celui d’homme, est une image particulière associée à une foule d’autres images semblables dans l’espace et dans le temps, et jointe au sentiment de mobilité interne qui se traduit par une tendance continuelle à passer d’une image à l’autre, à déborder l’image particulière ; cette tendance est elle-même un sentiment de tension, d’énergie.

876. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

De ce qu’une foule de poëtes se déclarèrent bien haut ses amoureux, doit-on en conclure qu’ils furent ses amants, et faut-il prendre au positif les vivacités lyriques d’Olivier de Magny plus qu’on ne ferait les familiarités galantes de Benserade ? […] De la foule qui passe évitant la faveur, Inclinant sur ton fleuve un front tendre et rêveur, Louise, tu chantas !

877. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

Depuis mars 1799, où il donnait au théâtre des Jeunes-Artistes le Testament de Carlin, on le trouverait sans interruption mêlé à une foule de petites pièces de tout genre, opéras-comiques, vaudevilles, tantôt comme auteur unique, tantôt et le plus ordinairement comme collaborateur pour une moitié ou pour un tiers. […] J’omets cette foule de réunions moins en vue et vouées à une goguette moins choisie, qui pullulèrent alors, et qui n’ont pas laissé de traces ni d’archives ; mais l’institution qui sembla l’héritière directe des Dîners du Vaudeville, et qui représente la gaieté sous l’Empire, comme l’autre réunion l’avait représentée sous le Directoire et sous le Consulat, ce fut la société du Rocher de Cancale ou du Caveau moderne.

878. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

Vous n’avez pas assez d’humain en vous pour la foule, vous serez mieux compris des anges que des hommes, vous sacrifierez sur les hauts lieux. […] Voyez-vous cette foule essayer de sourire, Ivre de ces faux biens dont vous ne voulez pas ?

879. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Émule de Chapelain autant que de Malherbe, il s’éleva même jusqu’à l’ode, et lançant l’invective contre les Anglais forcenés, il prédit des batailles navales, des cadavres flottant sur les eaux, et les « baleines du Nord » courant en foule à cette proie. […] Aux yeux de tous, et par leurs allures, leurs habitudes, leurs propos, ce sont deux bourgeois qui devraient être ailleurs : ni Voiture, ni Sarrazin, ni Saint-Amant, aucun des poètes de l’âge précédent, n’eût paru aussi dépaysé, et leur présence eût semblé naturelle dans la foule des gentilshommes qui suivaient le roi.

880. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Le plaisir était d’autant plus vif qu’il était interdit à la foule, et réservé, comme un prix, aux plus doctes. […] Le poëte médiocre se mesure à sa vogue ; il en croit les louanges qu’il reçoit et qui sont d’autant plus excessives qu’il est moins au-dessus de la foule qui l’applaudit.

881. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

La nation est plus grande que nature ; les obstacles disparaissent, on ne voit que le but, on ne proclame que des principes ; ils sont vrais et divins comme les théories : on ne foule pas la terre, on marche sur les nues. […] Les enfants qui suivaient ses ébats dans la plaine,         Les vierges aux belles couleurs Qui le baisaient en foule, et sur sa blanche laine         Entrelaçaient rubans et fleurs, Sans plus penser à lui, le mangent s’il est tendre.

882. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Selon lui, il est à craindre que le spectateur ne voie avec peine le théâtre presque vide, après l’avoir vu occupé par une foule de personnages. […] Les chœurs de leurs comédies étaient en partie destinés à cet usage ; ils y rassemblaient plusieurs personnages ridicules sur lesquels le poète lançait rapidement une foule de traits.

883. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Mais style et magie de l’art, facilité, souplesse et abondance pour tout dire, regard scrutateur pour beaucoup démêler, connaissance profonde de la foule, de la cohue, de l’homme vain, vide, glorieux, mendiant, vagabond, savant, sensuel ; intelligence inouïe de la forme, expression sans égale de la grâce, de la beauté matérielle et de la grandeur ; reproduction équivalente et indestructible d’un gigantesque monument ; gentillesse, babil, gazouillement de jeune fille et d’ondine, entrailles de louve et de mère, bouillonnement dans un cerveau viril de passions poussées au délire, l’auteur possède et manie à son gré tout cela.

884. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — I »

En effet, « Nous tenons d’un témoin oculaire digne de confiance que, pendant l’attaque de la Bastille, une voix cria au milieu de la foule que le régiment de Royal-Allemand  s’approchait.

885. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Les femmes du monde, on leur doit cette justice, se sont prêtées à merveille à l’attrait et à l’embellissement de cette renaissance, elles ont multiplié l’éclat des fêtes particulières ; elles n’ont même pas absolument dédaigné ces tourbillons, moins étroits, mais plus enivrants, où la foule enhardit et protège le mystère. à la blancheur suave du cou et aux lignes voluptueuses de plus d’une pose indécise, il était aisé, jusque sous le masque, de saisir la curiosité de l’aristocratique beauté qui se confiait là, pour la première fois, à quelque guide heureux et fier : c’était une nuance nouvelle en ces sortes de lieux que de suivre ainsi un embarras charmant, dissipé à mesure.

886. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre III. Association des mots entre eux et des mots avec les idées »

Pourquoi le pathétique simple ne fait-il pas d’effet souvent sur la foule ?

887. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

Au contraire, j’ai fait une large place aux ouvrages très récents, qui, en dépit de toutes les annonces de librairie et comptes rendus critiques, échappent souvent pendant longtemps à la foule des lecteurs.

888. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « José-Maria de Heredia.. »

Et à ce scrupule de poètes irréprochables se mêlait naturellement un orgueil aristocratique, la fierté et peut-être aussi l’affectation de ne jamais traduire dans la langue des dieux aucune émotion vulgaire, de se confiner dans des impressions exquises, rares, difficiles, inaccessibles à la foule.

889. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

Mais, après avoir senti les formes uniquement dans ce qu’elles ont de sexuel, on les aime bientôt pour elles-mêmes ; à l’attrait génétique succède le sentiment beaucoup plus complexe du Beau plastique, qui n’est en soi ni masculin ni féminin ; et la sensation primitive appelle alors et provoque, par des liaisons naturelles et rapides, une foule d’idées et de sentiments très nobles, très doux et très purs.

890. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens I) MM. Albert Wolff et Émile Blavet »

Est-ce la curiosité de la foule qui a provoqué ce développement de la chronique ?

891. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre III. L’antinomie dans la vie affective » pp. 71-87

Ils sont, en partie, en communauté de sentiments avec leur groupe et ce n’est que dans la mesure où ils éprouvent un désir de sociabilité supérieur à celui de la foule qu’ils se séparent d’elle.

892. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre I. Place de Jésus dans l’histoire du monde. »

Il ne spéculait pas sur l’essence de la divinité ; les croyances sur les anges, sur les fins de l’homme, sur les hypostases divines, dont le premier germe se laissait déjà entrevoir, étaient des croyances libres, des méditations auxquelles chacun se livrait selon la tournure de son esprit, mais dont une foule de gens n’avaient pas entendu parler.

893. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VII. Développement des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Dès ce moment, en effet, il prêche avec beaucoup plus de force et s’impose à la foule avec autorité 339.

894. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IX. Les disciples de Jésus. »

Dans cette foule amie, Jésus avait évidemment des préférences et en quelque sorte un cercle plus étroit.

895. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

Ne disons pas davantage que la gloire de la fondation du christianisme doit revenir à la foule des premiers chrétiens, et non à celui que la légende a déifié.

896. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VIII. Quelques étrangères »

Il est capable d’ailleurs de quelque diversité de joies et il ne rêve pas uniquement aux bravos de la foule.

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