Cet abbé Nicaise, que Rancé avait connu durant son voyage de Rome, était, comme on sait, le plus infatigable écriveur de lettres, le nouvelliste par excellence et l’entremetteur officieux entre les savants de tous les pays ; c’était un Brossette avec beaucoup plus d’esprit et de variété ; il ne résistait pas à l’idée de connaître un homme célèbre et d’entretenir commerce avec lui.
Nous avons une armée en Chine, nous avons une expédition en Cochinchine ; nous portons une escadre d’observation sur les côtes septentrionales des États-Unis d’Amérique, nous avons une colonie militaire en Afrique, nous avons une armée en Syrie, nous en avons une au cœur de l’Italie, à Rome ; nous avons une expédition française à Taïti, route égarée où ne passe aucune voile et qui ne mène à aucun but français sur l’immensité de ces mers futures ; nous avons un établissement armé dans un coin des Indes orientales, triste et impuissant mémento d’un empire qui n’est plus qu’un comptoir.
L’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres entretînt le goût sérieux et l’exacte connaissance de la Grèce et de Rome.
De tout cela résulta autour du temple une sorte de cour de Rome, vivant de politique, peu portée aux excès de zèle, les redoutant même, ne voulant pas entendre parler de saints personnages ni de novateurs, car elle profitait de la routine établie.
En 1599, Henri IV avait obtenu de la cour de Rome la dissolution de son mariage avec Marguerite de Valois, sœur de Henri III.
L’épuration plastique et spirituelle du monde est un travail grave et austère qu’ont su seulement exécuter des esprits comme Sophocle et Platon à Athènes, comme Raphaël à Florence et comme Michel-Ange à Rome.
C’est ce même sentiment qui, dans son dernier discours sur les affaires de Rome (19 octobre), lui a fait proclamer avec amertume que le résultat le plus net de l’anarchie, ce n’était pas de détrôner quelques rois, c’était de détrôner la liberté : « Les rois sont remontés sur leurs trônes, s’est-il écrié douloureusement, la liberté n’est pas remontée sur le sien : elle n’est pas remontée sur le trône qu’elle avait dans nos cœurs. » Je n’ai rien à dire de ce dernier discours, qui retentit encore.
Il en a toujours été ainsi chez les anciens, au moins dans les beaux jours et jusqu’au moment où les études politiques furent rendues tout à fait vaines et inutiles, en Grèce par la conquête romaine, à Rome par la perte de la liberté.
Ces chemins mènent tous à Rome.
Un peintre françois de vingt ans, qui arrive à Rome pour étudier, ne voit pas d’abord dans les ouvrages de Raphaël un mérite digne de leur réputation.
Chez ces dernières l’organisation à base de clans s’est maintenue, quoique effacée, jusqu’au terme de leur histoire, tandis que, à Rome, à Athènes, les gentes et les γένη cessèrent très tôt d’être des divisions politiques pour devenir des groupements privés.
L’histrionisme, cette passion dernière des peuples futiles, qui ne vivent plus que par les yeux et veulent des distractions pour combler l’abîme de leur ennui et de leur vieillesse, l’histrionisme l’amour dépravé des bateleurs, règne, en Chine, comme il a régné à Rome et à Constantinople et comme il règne chez tous les perdus des civilisations excessives.
, — les mendiants de la forêt Ancienne, qui disaient la bonne aventure, remettaient les péchés à vil prix, et enseignaient à voix basse la loi de Moïse. » Ce qui était des Juifs, du reste, existait à Rome de toutes les religions de l’Orient.
Et puis nous sommes pour Rome (du moins je le crois). […] Mais, puisqu’il s’agit de la Rome impériale, je préfère emprunter à un consciencieux élève de Hugo et de Dumas un petit morceau d’un drame romain. […] Tout le long du drame vous entendrez ce nom de Rome sonner au commencement des vers ou à la rime inexorablement. […] Et Racine finit par rencontrer ce qu’il lui faut : Mithridate, vaincu, mais irréductible, exposant son projet d’attaquer les Romains dans Rome même. […] Un fils que Rome craint, qui peut venger son père Pourquoi répandre un sang qui m’est si nécessaire ?
À coup sûr c’est la comédie la plus latine de Plaute, ce vieux latin qui représenterait, au besoin, toute la langue vulgaire de l’ancienne Rome. […] Cette comédie est la fille des vendanges et du hasard ; elle est venue à Rome du fond de l’Étrurie, colportée sur tous les chemins et dans toutes les tavernes, par des bateleurs et des joueuses de flûte ; elle se tenait sur un pied, elle chantait mille insolences lascives. […] À ce compte, le courtisan, la comédienne, le fâcheux, le plaideur, le poète, le banqueroutier, le parasite, sont les mêmes, sur le théâtre d’Athènes, de Rome ou de Paris. […] un baiser à Rome, un baiser sur le front d’une esclave qui sort du bain ! […] S’il se fut contenté de si peu, l’eunuque lui-même eût été honni dans toutes les petites maisons de Rome, car ces sortes de gens sont dangereux !
Mais pourquoi, dites-vous, s’il aime tant Paris, nous conduit-il à Rome, chez Sérénus ? Je vous répondrai qu’il a choisi, pour aller à Rome, le temps où l’on avait à Rome bien des idées et bien des sentiments que l’on a aujourd’hui à Paris. […] À Rome, âgée de seize ans, elle passait de longues heures devant les marbres du musée du Capitole. […] Elle voyage sans cesse allant de Nice à Rome, de Rome à Paris, de Paris à Pétersbourg, à Vienne et à Berlin. […] Rome eut des idées simples, fortes, peu nombreuses.
Ce malheureux Clémenceau s’enfuit jusqu’à Rome, où il se réfugie en plein idéal d’art. […] On m’a écrit de Paris, de Rome, de Bucarest : Quel est donc ce Saint-Cyr de Rayssac ? […] Il resta plus longtemps à Rome, dont il aimait les splendeurs et les ruines. […] Saint-Cyr de Rayssac, à Rome, se promène avec ivresse des marbres antiques aux fresques de la Renaissance. […] Ce voyage est celui de Rome, où René, nommé secrétaire d’ambassade, devait conduire madame de Beaumont, mourante.
Je conviens que ces jeunes filles grecques, juives ou romaines, dans la fable de Racine, sont plus de notre pays que du leur, plus contemporaines du siècle de Louis XIV que de la Grèce héroïque ou de la Rome des Césars. […] Mithridate doit personnifier la lutte de l’univers contre Rome, et le génie de la barbarie aux prises avec le génie de la civilisation. […] « Titus la renvoya de Rome, malgré lui, malgré elle. » «Berenicem statun ab urbe dimisit, invitus, invitam. » Suet., Titus, vii.
S’il a eu besoin d’eux pour être ce qu’il est, négligera-t-il de les mener avec lui comme les patriciens de Rome menaient leurs clients ? […] Si Rome impériale se rétrécit ou s’élargit sous la plume de Suétone ou de Tacite, pourquoi Brantôme et Strada ne subiraient-ils pas la même destinée entre les mains d’un rimeur ou d’un poète ? […] Il lui faut un italien qui se parle à Madrid et à Lisbonne aussi bien qu’à Florence et à Rome ; et puisque nous lui permettons d’italianiser tout le midi de l’Europe, nous aurions mauvaise grâce à le chicaner pour Augsbourg. […] César prend Faenza, les duchés d’Urbin et de Bologne, tandis qu’à Rome des tribunaux vendus à son père condamnent les titulaires et légalisent effrontément la confiscation de leurs domaines. […] Comme les prêtres de la vieille Rome, c’est dans le sang de la victime palpitante qu’il a cherché l’énigme de la destinée humaine ; lui sera-t-il permis d’oublier tout à coup le but du sacrifice ?
Là-haut, la perception bien au-delà de sa pensée au ras de terre, de la grandeur, de l’étendue, de l’immensité babylonienne de Paris, et sous le soleil couchant, la ville ayant des coins de bâtisses de la couleur de Rome, et parmi les grandes lignes planes de l’horizon, le sursaut de l’échancrure pittoresque dans le ciel, de la colline de Montmartre, prenant au crépuscule, l’aspect d’une grande ruine qu’on aurait illuminée. […] Dans les dessins, des dessins au crayon noir de Macari, des dessins de la Rome antique, de la Rome togata, où tous ces vieux Romains sont si bien saisis dans les plis et la tombée de la toge, dans leurs attitudes sur les sièges de pierre, dans leurs groupements debout, sont si bien saisis, qu’on croirait à des photographies du temps. […] Puis, à quelques années de là, Lenoir obtenait le second prix au concours de Rome, était découragé, dégoûté du travail de l’École, allait passer à ses frais huit mois en Italie, puis revenait à Paris, où il obtenait une seconde, et enfin une première médaille aux Salons.
Il a heurté de front et sans aucun ménagement la cour de Rome ». […] Stendhal, Rome, Naples et Florence , 371.
Rome, association de brigands à son origine, pour ravager des voisins et se conquérir des territoires, ne pouvait être qu’une république militaire, soumise tour à tour à l’anarchie sanguinaire ou à la servitude féroce de cette nature d’institution armée. […] Plus tard, Rome, décomposée par sa grandeur et par ses vices, devait se sentir prête à laisser sa proie, à moins de resserrer sa serre par le despotisme et de se réfugier contre ses anarchies dans la servitude.
Les versatilités effrontées de Rome sous le Bas-Empire n’ont rien dans Tacite qui égale l’apostasie de soi-même en quelques heures par Benjamin Constant. […] Cet exil, volontaire cette fois, dans la délicieuse demeure de Coppet, loin du bruit des armes, qui décidaient du sort du monde sans altérer sa félicité domestique, ressemblait au recueillement de Cicéron dans son Tusculum pendant que César l’invitait à venir à Rome pour y partager l’amitié du maître du monde.
En ce temps-là, je vivais seul, le cœur débordant de sentiments comprimés, de poésie trompée, tantôt à Paris noyé dans cette foule où l’on ne coudoyait que des courtisans ou des soldats ; tantôt à Rome, où l’on n’entendait d’autre bruit que celui des pierres qui tombaient une à une dans le désert de ses rues abandonnées ; tantôt à Naples, où le ciel tiède, la mer bleue, la terre embaumée m’enivraient sans m’assoupir, et où une voix intérieure me disait toujours qu’il y avait quelque chose de plus vivant, de plus noble, de plus délicieux pour l’âme que cette vie engourdie des sens et que cette voluptueuse mollesse de sa musique et de ses amours. […] Elle n’est point, comme on n’a cessé de le dire malgré les démentis successifs de toutes les époques, elle n’est pas seulement la langue de l’enfance des peuples, le balbutiement de l’intelligence humaine ; elle est la langue de tous les âges de l’humanité, naïve et simple au berceau des nations, conteuse et merveilleuse comme la nourrice au chevet de l’enfant, amoureuse et pastorale chez les peuples jeunes et pasteurs, guerrière et épique chez les hordes guerrières et conquérantes, mystique, lyrique, prophétique ou sentencieuse dans les théocraties de l’Égypte ou de la Judée ; grave, philosophique et corruptrice dans les civilisations avancées de Rome, de Florence ou de Louis XIV ; échevelée et hurlante aux époques de convulsions et de ruines, comme en 93 ; neuve, mélancolique, incertaine, timide et audacieuse, tout à la fois, aux jours de renaissance et de reconstruction sociale comme aujourd’hui !
Au moment où venait au monde l’enfant prédestiné à être encore plus le roi du Catholicisme que le roi de toutes les Espagnes, Charles-Quint apprenait avec triomphe le sac de Rome et la Papauté scélératement humiliée, et palpitait d’une joie politiquement impie sur le berceau de cet enfant. […] Et qu’il y eût pour les affaires de Rome, c’est-à-dire pour les affaires de la chrétienté, la politique romaine et la politique espagnole, c’était un désordre, un dualisme plein de dangers et qui en créait un pour le Catholicisme, que Philippe II adorait et qu’il faussait par sa manière de le défendre.
Nous savions bien que les peuples décrépits et corrompus tombent tous dans un cabotinisme effréné, mais nous ne savions pas que nous fussions plus avancés dans le sens de gibier faisandé que Rome et Byzance. En effet, ni Rome ni Byzance n’ont eu, dans leurs littératures, un homme de talent quelconque — un Goncourt — qui ait fait un roman avec les cochers bleus et verts du Cirque, avec les mimes ou les joueurs de flûte aimés des jeunes Romaines… Mais l’objection ne me touche point.