La suite des articles intitulés « Esprit public », et que le journal publia à dater du 16 février, est de lui. […] Au milieu de ces idées et de ces conseils politiques, Roederer ne cessait de varier les applications de sa plume et de parler à son public sur mille sujets littéraires qui se présentaient. […] Ils ont trouvé dans ces visites, au lieu de la morgue si ordinaire à la puissance, cette curiosité que donnent l’amour du bien public et le respect pour l’opinion nationale. […] [NdA] Sans doute appelé ainsi à cause de sa couverture ; c’est le Journal d’économie publique. […] Fortoul, ministre de l’Instruction publique, dépositaire des papiers de Sieyès, de qui il a préparé l’histoire.
La science ne doit pas sortir du collège ou de l’école spéciale ; le public n’a rien à faire avec elle. […] Il n’entre pas dans mon plan de rechercher jusqu’à quel point le système d’instruction publique adopté en France est responsable du dépérissement de l’esprit scientifique. […] En face d’un public dont la plus grande partie veut être intéressée, il faut des aperçus, des vues ingénieuses, bien plus qu’une discussion savante. […] Le département de la science et des recherches sérieuses devient ainsi celui de l’instruction publique, comme si ces choses n’avaient de valeur qu’en tant qu’elles servent à l’enseignement. […] Peut-être le public de l’Allemagne est-il aussi plus patient que le nôtre quand il s’agit de s’ennuyer cérémonieusement et sur convocation officielle.
Seulement, le public, le gros public, ce Cyclope aveugle qui forge la gloire et qui prend pour elle le bruit que fait son marteau en tombant sur l’enclume, à côté, le public ne le savait pas. […] Quand elle n’est pas contenue et soutenue par l’idée du public, son corset à elle, tout s’abaisse et s’en va de sa manière de parler et d’écrire dans un abandon sans grâce et surtout sans noblesse. […] Elle réfléchissait devant le public et savait très bien ce qu’elle disait. Devant ce public qu’elle n’oublie jamais et qui lui donnait sa tenue littéraire, elle est, après tout, un écrivain d’un certain ordre, qui a droit à un classement quelconque. […] Adolphe Guéroult, alors saint-simonien, ne sont plus de simples lettres comme on en écrit à ses amis, mais des pages ambitieuses de politique et de morale adressées, en vue peut-être du public, à des personnages solennels.
Le public en France. […] L’impiété leur semble une indiscrétion ; ils considèrent la religion comme le ciment de l’ordre public. […] Les grands mots, liberté, justice, bonheur public, dignité de l’homme, sont si beaux et en outre si vagues ! […] Il y a cinquante ans, dit encore d’Argenson, le public n’était nullement curieux des nouvelles d’État. […] Aubertin, l’Esprit public au dix-huitième siècle, 7.
Plus il y en aura, plus leurs inconvénients seront dilués, plus d’écrivains seront aidés — et moins aussi le public y attachera d’importance. […] Maintenant, le public s’y perd ! […] Eût-il écrit le meilleur livre, on ne le saura pas, car pour le public le meilleur livre est le livre primé. […] Ils finiront par dégoûter le public au point que la bande mentionnant sur un livre le prix obtenu fera fuir les acheteurs. […] Tout cela verse bon gré mal gré dans la politiquaille, le public le sent, et nous savons de probantes anecdotes.
Carrel n’avait pas eu le temps de se faire dans le public une place à beaucoup près aussi apparente que celle qu’occupaient MM. […] Entre le public et le poète, il y a contrat désormais ; il est notoire qu’ils peuvent marcher et qu’ils marcheront ensemble. […] Victor Hugo est-il ou n’est-il point capable de drame au point de vue du public ? […] Hugo a-t-il raison d’inculquer au public, et le public a-t-il raison d’accepter intégralement cette espèce particulière de drame ? […] Scribe et son public, c’est pure connivence.
Le public tout entier répéterait : C’est sa prévention ! […] le public ? […] qui eût laissé froid un public de théâtre. […] » Dès lors, le rôle a été faussé et le public trompé. […] Il s’amusait et ne prétendait qu’amuser son public.
Bertault prouvant que l’on allait faire subir une entorse formelle au droit, et que le domaine public ecclésiastique n’existait plus depuis 1817, ni l’énergie de M. […] « Cette église, qui sera construite exclusivement avec des fonds provenant de souscriptions, sera à perpétuité affectée à l’exercice public du culte catholique. […] Dans la demande de déclaration d’utilité publique présentée par l’archevêque au ministre des cultes, qu’allons-nous donc trouver ? […] L’utilité publique est purement et simplement déclarée pour la construction d’une église « à perpétuité affectée à l’exercice public du culte catholique ». […] Est-il d’utilité publique que la nation française, dont la constitution est de base purement laïque, je le répète, se voue au cœur de Jésus et à la protection du Saint-Siège ?
Quand les affaires publiques font le fil de l’Histoire, il est toujours suivi : quand les Rois n’y sont considérés qu’autant qu’ils ont servi à les faire changer, on les y fait entrer avec bien plus d’agrément, que lorsqu’on se met en tête de ne parler des affaires que selon qu’elles servent à relever ou diminuer la gloire des Rois. […] Quand on rapporte tout à une personne, les Lecteurs n’y prennent jamais tant d’intérêt que quand on rapporte tout au Public. […] On ne le peut mieux faire, qu’en réglant le prix des actions, par la conformité qu’elles ont au devoir, & en faisant penser qu’il est bien plus louable de faire pour le bien public quelque chose qui paroisse ordinaire ou médiocre, que de faire quelque chose de fort éclatant, qui ne lui serve de rien, ou qui lui coute trop. Si la matiere principale de l’Histoire n’est pas la Vie des Princes, le but principal qu’on doit se proposer en l’écrivant, c’est de les instruire : & c’est une raison de rapporter tout aux affaires publiques, & de leur faire connoître qu’il n’y a rien de beau ou de bon à exécuter, que ce qui tend à détourner un mal ou à procurer un bien public. » Les Littérateurs cultivés reconnoîtront d’abord dans ces maximes, bien des principes qui nous ont été débités récemment comme des découvertes ; & si l’on jugeoit d’après elles certains Historiens qui s’en sont fait honneur, pourroient-ils seulement mériter ce titre ?
Que si quelque événement public venait à éclater et à faire vibrer les âmes, il y prenait part avec ardeur, avec élévation ; mais il aimait à rentrer aussitôt après dans ses studieux sentiers, du côté où était sa « ruche », toute remplie, comme il dit, d’un « poétique miel ». […] … Et quand la société dure depuis assez longtemps pour que tout cela soit dans tous une habitude innée et soit devenu une sorte de religion, je dirais presque de superstition, certes alors un pays a le meilleur esprit public qu’il puisse avoir. […] Non content de les amnistier en mars 1792, on voulut encore les célébrer, et Collot d’Herbois fit la motion factieuse de leur décerner un honneur public. […] Je me borne à indiquer cette polémique d’André Chénier contre les Jacobins, d’où résulta une discussion publique et par écrit avec son frère Marie-Joseph, membre et alors défenseur de cette dangereuse Société. […] Mais, tout à coup, devant les yeux lui repasse l’image des horreurs publiques, et alors le sentiment vertueux et stoïque revient dominer le sentiment poétique et tendre.
. — Les affaires publiques ne regardaient que le roi. — Limites de l’opposition janséniste et parlementaire. […] Changement dans la condition du bourgeois. — Il s’enrichit. — Il prête à l’État. — Danger de sa créance. — Il s’intéresse aux affaires publiques. […] Par cet accroissement de son action et par cet emprunt de capitaux, il devient le débiteur universel ; dès lors les affaires publiques ne sont plus seulement les affaires du roi. […] Il annonçait le sérieux, la dignité, l’habitude de se contraindre et d’être en public, l’autorité, le commandement. […] Le public, toute la bourgeoisie indignée s’engagea à ne revenir au spectacle qu’après satisfaction, et en effet le théâtre resta vide pendant plusieurs mois, jusqu’à ce que Mme Barnave eût consenti à y reparaître.
N’y a-t-il pas de la faute du public ? […] Le public ne se choque pas de différences qui, pour des contemporains, eussent été monstrueuses. […] Cette disposition éclairait immédiatement le public sur le rang et le rôle du personnage qui paraissait. […] C’est donc de l’attitude de la figuration que dépend l’impression que recevra le public. […] Est-ce par caprice ou par ennui que le public s’en est détourné ?
Tous égaux, trop orgueilleux pour céder l’un à l’autre, ils ne se soumirent qu’à l’empire souverain des corps aristocratiques dont ils étaient membres ; leur domaine privé, jusque-là éminent, forma en se réunissant le domaine public également éminent du sénat qui gouvernait, de même que la réunion de leurs souverainetés privées composa la souveraineté publique des ordres auxquels ils appartenaient. […] Enfin lorsque les puissants dirigèrent le conseil public dans l’intérêt de leur puissance, lorsque le peuple corrompu par l’intérêt privé consentit à assujettir la liberté publique à l’ambition des puissants, et que du choc des partis résultèrent les guerres civiles, la monarchie s’éleva sur les ruines de la démocratie. […] Pomponius dans son histoire abrégée du droit romain caractérise cette loi par un mot plein de sens, rebus ipsis dictantibus regna condita . — Voici la formule éternelle dans laquelle l’a conçue la nature : lorsque les citoyens des démocraties ne considèrent plus que leurs intérêts particuliers, et que, pour atteindre ce but, ils tournent les forces nationales à la ruine de leur patrie, alors il s’élève un seul homme, comme Auguste chez les Romains, qui se rendant maître par la force des armes, prend pour lui tous les soins publics, et ne laisse aux sujets que le soin de leurs affaires particulières. Cette révolution fait le salut des peuples qui autrement marcheraient à leur destruction. — Cette vérité semble admise par les docteurs du droit moderne, lorsqu’ils disent : universitates sub rege habentur loco privatorum ; c’est qu’en effet la plus grande partie des citoyens ne s’occupe plus du bien public.
On avait des traités didactiques et généraux, des Rhétoriques et des Poétiques : on n’avait guère vu un homme se donner mission de dire au public ce qu’il devait penser des écrivains et des œuvres. […] Le public, d’abord étonné de voir ce jeune homme inconnu prendre plaisir à se mettre à dos toute la bande rancunière des écrivains, comprit insensiblement le sens et le but de ces attaques, en les voyant multiplier et redoubler. […] Tous abondaient dans leurs défauts naturels, ou se travaillaient à exagérer la mode du bel esprit dont le public était engoué. […] S’il se fût attaché à démêler finement le bien et le mal dans l’œuvre de Chapelain et dans celle de Scudéry, il eût brouillé les idées du public sans l’éclairer. […] Ce qu’est le Chapelain qu’on voit, le Chapelain officiel et public, jugez-en aux trois actes éclatants de sa vie littéraire.
La courtoisie du public le veut ainsi. […] Le public n’a pas besoin de comprendre. […] du succès et de l’oreille du public. […] Elle consiste à présenter, non pas l’auteur au public, cela serait difficile en effet, mais au public le public lui-même. […] Le public est prié de ne pas se méprendre.
Le public a reçu un coup. […] Le public en a assez. […] Le public en est comme désorienté. […] Sur le public, je parle du public d’après-demain, excellente. […] Immense influence du public !
I Ce n’est pas d’aujourd’hui que madame de Genlis fait les avances envers le public ; il y a longtemps qu’elle se croit comptable d’explications envers lui, et qu’elle lui distribue son histoire, comme une dette, en précis de conduite, en souvenirs, en romans : mais ce n’étaient là que des à-compte trop légers envers les contemporains et la postérité ; voici venir enfin, sous forme de mémoires, la plus considérable, la plus officielle, et probablement aussi la dernière édition de sa vie. […] A parler sérieusement, il n’est qu’un cas où le personnage vivant ait plein droit d’invoquer avec éclat et franchise l’attention publique sur l’intimité de ses pensées et de sa vie ; c’est quand ce personnage est public lui-même, que ses actes extérieurs sont dévolus à l’opinion, et qu’il les discute par-devant elle : ses mémoires ne sont rien alors qu’un plaidoyer qu’il lance dans les débats, et le procès se poursuit jusqu’à ce que vienne l’histoire. […] Elle aussi peut-être s’imagine appartenir au public, non-seulement par ses écrits et ses travaux littéraires, mais encore par sa vie et par les rôles politiques qu’elle a successivement revêtus. […] Nous y voilà donc ; la singularité s’explique, les Mémoires de madame de Genlis sont et devaient être un acte public, comme tous ceux de sa vie une sorte de compte rendu au monument enfin plus que littéraire ; et qu’on cesse de s’étonner que, consacrant cette publication mémorable, le libraire Ladvocat ait fait frapper une médaille en bronze.
Il accoutuma le public, en lui faisant connaître la bonne comédie, à le juger lui-même très-sévèrement. […] Le goût du public s’est tellement perfectionné depuis, que cette comédie ne paraît aujourd’hui inimitable que par son extrême impertinence. […] Ceux à qui la fête est donnée, sont toujours indulgents : mais le public libre est toujours sévère. […] Le public n’a point regretté que l’auteur ait négligé de finir cet ouvrage : il est dans un genre qui n’était point celui de Molière. […] Mais c’est le sort de tous ceux qui n’ont que leur talent pour appui, de travailler pour un public ingrat.
Au fond de toute autorité légitime, on doit retrouver son consentement ou son vote, et, dans le citoyen le plus humble, les plus hauts pouvoirs publics sont obligés de reconnaître un des membres de leur souverain. […] Ouvertement ou en secret, elle n’est qu’un subalterne commode, un avocat domestique et perpétuellement suborné, que les propriétaires emploient à plaider leurs affaires ; s’ils lui cèdent le pas en public, c’est par bienséance. […] Un enfant, en ouvrant les yeux, doit voir la patrie, et, jusqu’à la mort, ne doit voir qu’elle… On doit l’exercer à ne jamais regarder son individu que dans ses relations avec le corps de l’État. » Telle était la pratique de Sparte et l’unique but du « grand Lycurgue » « Tous étant égaux par la constitution, ils doivent être élevés ensemble et de la même manière. » — « La loi doit régler la matière, l’ordre et la forme de leurs études. » À tout le moins, ils doivent tous prendre part aux exercices publics, aux courses à cheval, aux jeux de force et d’adresse institués « pour les accoutumer à la règle, à l’égalité, à la fraternité, aux concurrences », pour leur apprendre « à vivre sous les yeux de leurs concitoyens et à désirer l’approbation publique ». […] À la place de ma volonté, il y a désormais la volonté publique, c’est-à-dire, en théorie, l’arbitraire changeant de la majorité comptée par têtes, en fait, l’arbitraire rigide de l’assemblée, de la faction, de l’individu qui détient le pouvoir public Sur ce principe, l’infatuation débordera hors de toutes limites. […] Ibidem, I, 9. « L’État, à l’égard de ses membres, est maître de tous leurs biens par le contrat social… Les possesseurs sont considérés comme dépositaires du bien public. » 443.
Presque tous ceux qui ont joué un rôle dans les affaires publiques n’aiment point à voir écrire sur la politique, le commerce, la législation. […] Le livre avait paru quand M. de Malesherbes fut averti du scandale à la fois par un de ses subordonnés et par la clameur publique. […] Le Parlement s’en mêlait, et, sur le bruit public, prétendait évoquer l’affaire, en s’arrogeant le droit de juger le livre, et en empiétant ainsi sur la juridiction du chancelier. […] Ne croyez pas, monsieur, que l’éloge le mieux fait et le mieux écrit en impose au public s’il n’a déjà prononcé avant l’auteur… Je ne vous ai pas fait cette objection à l’occasion de mon neveu (mort aussi depuis peu de temps), parce que le public avait bien voulu partager notre douleur, et d’ailleurs parce qu’un avocat général est un homme public ; qu’il est exposé comme un auteur à la critique, et que, par cette raison, il est susceptible d’éloges. […] Enfin, monsieur, je croyais mon neveu digne des larmes du public, et je ne crois mon cousin digne que des larmes de ses amis : vous voyez combien je vous parle naturellement.
Il est si habitué à gagner son pain à la sueur de son front, que son bon sens comprendra sans peine, malgré le cri de ses passions, que chacun doit se suffire, et que la fortune publique n’est faite que pour le bien public, et non pour les besoins et les appétits des particuliers. […] Non ; mais je suis protégé à la fois contre le pouvoir public et contre l’oppression particulière comme membre de la société humaine. […] Ici, à la vérité, je me rencontre précisément sur le terrain où M. de Tocqueville croit sentir le plus clairement la main toute-puissante de l’État. — Le progrès de l’industrie, dit-il, amène le développement de la puissance publique de trois manières : d’abord l’industrie, en réunissant un grand nombre d’hommes dans des cités populeuses, appelle des lois de police, une surveillance compliquée et coûteuse, la crainte des révolutions et par conséquent l’augmentation de la force publique ; en second lieu, un pays où l’industrie prospère a besoin de routes, de ponts, de ports, de canaux : de là un immense déploiement des travaux publics, et par suite de la puissance de l’État. […] Pourquoi, à mesure que les hommes devenaient individuellement plus humains, plus justes, plus tempérants, plus chastes, paraissaient-ils devenir chaque jour plus étrangers à toutes les vertus publiques ? […] Ce contraste, qui frappe dès les premiers temps du christianisme, entre les vertus chrétiennes et ce que j’ai appelé les vertus publiques, s’estsouvent reproduit depuis.
Comme il n’y a point de mérite à dérober une tête à Raphaël ou une figure au Dominiquin : comme le larcin se fait sans grand travail, il est défendu sous peine du mépris public. […] Au lieu de commencer à travailler pour nous mêmes, nous voulons travailler pour le public. […] Il seroit inutile cependant de vouloir engager de jeunes gens, pressez par l’émulation, excitez par l’activité de l’âge, et entraînez par un génie impatient de s’annoncer au public, d’attendre à se produire qu’ils eussent connu l’espece dont est leur talent, et qu’ils l’eussent perfectionné. On leur représenteroit en vain qu’ils peuvent gagner beaucoup à surprendre le public : que le public auroit bien plus de véneration pour eux, s’il ne les avoit jamais vû des apprentifs : que des chef d’oeuvres inesperez, contre lesquels l’envie n’a point eu le temps de cabaler, font bien un autre progrès que des ouvrages attendus long temps, qui trouvent les rivaux sur leurs gardes, et dont on peut définir l’auteur par un poëme ou par un tableau médiocre. […] Si les peintres et les poëtes ont le malheur de faire leur apprentissage sous les yeux du public, il ne faut pas du moins que le public mette en ligne de compte les fautes qu’il leur a vû faire, lorsqu’il les définit après qu’ils sont devenus de grands artisans.
Pensionné de la Cour, honoré par les académies, consulté par les ministres sur les objets d’intérêt public, il ne manquait rien à Bailly de ce qui pouvait, satisfaire l’ambition la plus légitime et la plus étendue d’un savant homme de bien, lorsque la Révolution de 89 éclata. […] Honnête homme qui, au moment où il rédigeait ses Mémoires, le lendemain et à la veille des catastrophes funestes, croyait sa carrière publique close et couronnée, et qui proposait son exemple comme un encouragement à bien faire et comme un monument mémorable de la récompense publique ! […] Au reste, il aurait fallu à Bailly un fonds d’humeur bien morose et un grain de misanthropie bien prononcée pour ne pas voir tout en beau en ces premiers mois où tout lui souriait, et où la publique estime lui apportait à chaque mouvement de l’opinion une surprise flatteuse et une récompense. […] Chacun les nommait avec une voix attendrie ; et j’eus quelque part, dit Bailly, à ces témoignages de sensibilité et de reconnaissance publique. […] Pitra, et un vainqueur de la Bastille, de grande et belle taille, Hullin, le trouvent sur l’escalier de l’Hôtel de Ville, assez en peine de s’orienter et de se conduire dans ces flots de peuple ; ils lui offrent leurs bras : cet accompagnement le désigne de plus en plus à l’attention publique : les cris de Vive Bailly !
En disant « adopté par le public », M. Rageot a certainement voulu dire : qui plaît au public. […] Le nom est lancé, l’œuvre s’impose, le public suit. […] Mais je n’ai pas voulu combattre en rien le goût du public. […] Le public n’aime pas qu’on lui en impose.
Mérimée l’a certainement été ; on n’a jamais mieux réussi à l’Académie, en étant moins académique ; il n’a fait aucune concession au genre et il en a triomphé ; il est resté dans sa propre manière, avec son genre d’esquisse précise, voisine du fait, son ironie contenue, sa fine raillerie qui ne sourit pas, mais dont le public n’a rien laissé échapper. Ce public d’Académie est un public très-délicat, très-disposé à goûter tout ce qui est bien ; c’est un public resté Français.
Et d’autres, moins originaux, nous frapperont du moins par l’adroite accommodation de leur esprit à la besogne qu’ils font et au public qu’ils entretiennent. […] Et le public a évidemment trouvé cela tout naturel. […] Dirons-nous qu’à force de se croire le plus Parisien des chroniqueurs, il a fini par le faire croire au public ? […] Wolff connaît bien son public ! Et comme il sait ce qui lui convient, à ce public, et ce qu’il peut supporter !
Discours prononcé dans la séance publique le jeudi 7 novembre 1811. […] La religion était en honneur, car les fripons se couvraient de son masque pour usurper l’estime publique ; Tartuffe nous l’apprend. […] Mais, à mesure que les classes de la société se confondent, les mœurs publiques se pervertissent. […] ils sont eux-mêmes spectateurs, et battent des mains avec le public qui leur insulte ! […] Ce sont, a dit Chamfort, des coupables dont il a donné le signalement au public, et qui se cachent dans la société sous un autre déguisement.
Nous n’en continuerions pas moins de penser que le libraire qui ne sait que vendre servilement au goût du public n’est qu’une moitié de libraire, et n’a pas l’esprit de son état. […] Car, nous le répétons, ce talent n’est pas connu encore dans ce qu’on appelle le public, quoique depuis la mort de l’auteur il en ait été question davantage. […] Limayrac s’est contenté d’être, en quelques lignes comme il sait les écrire, l’introducteur au public de l’auteur du livre de l’Amour : « Le livre de l’Amour — dit-il — est la physiologie complète de cette divine et infernale passion. […] Balzac, qui a monté le diamant de Beyle, ramassé sous les pieds du public trop myope pour l’apercevoir, n’avait point de reconnaissance et n’en devait nullement à Beyle. […] Un éditeur qui se dévoue la tire de cet oubli et la replace sous les yeux du public, comme un homme qui compte sur la justesse de son jugement et sur sa justice.
De tous temps les poètes ont souffert de l’indifférence ou de l’ignorance du public. […] De là, cette indifférence du public pour le Théâtre-Français, qui fut si longtemps notre gloire et notre plus noble plaisir. […] C’est aux gens de l’art à éclairer et à guider le public. […] Espérons que le Théâtre-Français se souviendra enfin que ses cartons renferment une belle tragédie d’un poète trop tôt pleuré, et que le public l’attend. […] dira-t-on encore, faut-il montrer au public français toutes les bouffonneries obscènes ou toutes les froides horreurs qui charmaient les Anglais du temps d’Elisabeth !
Mais partout où se sont rencontrés leurs principaux caractères, le théâtre s’est élevé ; et ni les hommes de génie n’ont manqué au public, ni le public aux hommes de génie. […] Ainsi les mœurs publiques appelaient la poésie ; ainsi la poésie naissait des mœurs publiques et s’unissait à tous les intérêts, à toute l’existence de cette population accoutumée à vivre, à agir, à prospérer et à se réjouir en commun. […] Il ne manquait à ce mouvement national qu’un homme de génie, capable de le recevoir et d’élever à son tour le public vers les hautes régions de l’art. […] Quelque différence que mette Hamlet entre les acteurs ambulants et ceux qui appartenaient à un théâtre établi, ces derniers devaient porter aussi le poids de la grossièreté du public dont ils dépendaient, et de celle des confrères avec qui ils partageaient la charge de divertir le public. […] Plusieurs poëtes de l’école de Shakespeare s’appliquaient aussi à satisfaire le goût du public pour le genre de plaisir auquel il l’avait accoutumé.
Van Dyck ; mais, auprès du grand public, le théâtre porte seul. Le succès de concert est forcément restreint à un public limité ; les succès wagnériens de MM. […] Le public rappelle invariablement les artistes après chaque acte, après le deuxième tout aussi bien qu’après les autres. […] A quelques rares et mesquines exceptions près, l’on est tombé d’accord en estimant à sa réelle valeur le grand chef-d’œuvre qui vient de s’imposer au public belge. […] Les articles, conjugués aux programmations des concerts, initiaient le public à la musique de Wagner.
Cependant les choses publiques empirent : l’anarchie va faire place à la terreur. […] Accompagnée de ses deux enfants, la généreuse épouse va de commune en commune soulever la pitié et la justice publiques pour un homme aimé et honoré de tout le pays. […] Il est loyal ; il n’est point de fonctions publiques qu’il ne puisse remplir d’une manière utile pour son pays. […] Le Gouvernement ne doit jamais perdre de vue un citoyen de ce mérite. » Avec Frochot on peut s’en tenir aux apparences directes et aux témoignages publics : homme sincère, il n’y a pas de double fond en lui. […] Il reste comme un modèle de ces hommes publics précipités en un jour et qu’on plaint en les estimant.
Sous prétexte de l’amour de la vérité & du bien public, il releva les fautes qu’il voyoit dans ce livre. […] Son rival Gibert soutient avec raison que l’orateur Romain n’a jamais eu cette pensée ; qu’on ne doit se règler, en parlant en public, sur le goût de ceux qui nous écoutent, que lorsque leur goût est bon. […] Ils alloient être l’entretien & la risée du public. […] L’abbé de Vertot n’avoit rien donné au public avant quarante-cinq ans. […] Rollin en avoit soixante passés, quand il écrivit dans notre langue ; & ce qu’il y a de plus extraordinaire encore, c’est l’enthousiasme avec lequel ses livres furent reçus du public.
.” — L’architecte prend la parole et dit : “Moi, je construirai le temple où vivront tes peintures, où respireront tes statues ; je bâtirai le théâtre immense où frémira le public sous l’empire de tes chants ! […] Ses notices, qui réussissaient dans les séances publiques, et auxquelles on n’a pas rendu peut-être assez de justice à la lecture, me font l’effet d’appartenir à ce que j’appellerai l’éloquence décorative : comme dans la peinture de décoration, il y entre bien des draperies et de l’arrangement, pas assez de vérité. […] Cependant quelques morceaux lus dans les séances publiques des cinq Académies et fort goûtés du public avaient révélé en lui ce que tous ses amis savaient bien qu’il était, un esprit riche, orné, facile, un écrivain élégant, un orateur aisé, agréable ; aussi quand Raoul-Rochette manqua, l’Académie des Beaux-Arts, après avoir pensé d’abord à M. […] Essayons d’Halévy ; il a déjà les suffrages du public. » Halévy fut nommé et trouva son genre aussitôt. […] Remarquez qu’Halévy, secrétaire perpétuel, se voyait obligé avant tout de justifier le choix de ses confrères devant le public ; il avait dû faire des frais pour plaire ; il avait réussi : désormais il avait acquis le droit d’être plus simple et plus sobre de fioriture et d’ornements.
Daunou, dans ce court prélude de sa vie publique, se dessine déjà pour nous tel qu’il sera dans toute sa carrière. […] Daunou inaugura, dès les premiers jours sa vie publique, par le plus bel acte qui l’honore, par son opinion et son vote dans le procès de Louis XVI. […] Son Essai sur l’instruction publique de cette même date (juillet 93) contient une singularité caractéristique et piquante. […] Mercier put être content, et tout l’Institut avec le public avait souri. […] Daunou eut, en ses dernières années, de douces satisfactions puisées à l’estime publique et dues aux honneurs littéraires qu’un choix libre lui déférait.
Le roi prit mal cette espièglerie d’un homme d’esprit dans un personnage public. […] Le public, alors tout littéraire, et très occupé de ces sortes de querelles, s’était fait de La Harpe une idée très malicieuse, peu favorable, et qui ne répondait point aux mérites étendus qu’il a déployés depuis. […] Une fois entré dans cette voie d’interprétation, le public ne s’arrêta plus, il chercha finesse à chaque phrase, et il prêta peut-être à l’honnête Marmontel plus de malice qu’il n’en avait eu d’abord. […] Jusque là, et depuis l’admission du public en 1672, il n’y avait eu que des hommes. […] La réponse de l’abbé de Voisenon fut un persiflage continuel : le public éclatait de rire à chaque phrase
Ainsi, si l’on défalque les terres publiques, les privilégiés possèdent la moitié du royaume. […] Visiblement, ce sont là encore des monopoles et des octrois qui remontent au temps où il avait le pouvoir public. […] Dans le district soumis à sa juridiction, le domaine public demeure son domaine privé ; les chemins, rues et places publiques en font partie ; il a le droit d’y planter des arbres et de revendiquer les arbres qui s’y trouvent. […] Par contrainte, ils ont souffert que le roi s’en appropriât la portion publique. […] En ce cas le public n’a pas besoin de les chercher pour les trouver.
Jusqu’en 1600, aucune de ces pièces n’a paru devant un vrai public, sur une vraie scène ; elles n’étaient pas faites pour cela. […] Il semble que ces pièces aient eu du mal à s’établir sur la scène de l’Hôtel de Bourgogne, et que le poète ait dû chercher autre chose pour satisfaire son public. […] Le public semble incertain : Scudéry, qui est dans le camp d’Aristote, continue à faire des pièces irrégulières « pour contenter le peuple ». […] Grâce à Hardy et à Mairet, le public était en train de se passionner pour le théâtre, et le poème dramatique passait insensiblement au premier rang des genres littéraires. […] Le public persista à croire que le Cid était une pièce unique, et il avait raison.
Que dirait Socrate de l’éducation publique qu’on donne à notre jeune noblesse, des puérilités dont on se plaît à la nourrir, comme si on n’avait rien de bon à lui apprendre ? […] Ils en sont toujours blâmés par ce public même, qui dans son oisiveté maligne, prend quelquefois plaisir aux traits qu’on lance contre eux. […] Pourquoi néanmoins dans l’ordre de l’estime publique les talents lui sont-ils préférés ? […] Et pourquoi un homme de lettres n’aurait-il pas le même droit à l’opulence, que tant d’hommes inutiles ou nuisibles à la patrie, dont le luxe scandaleux insulte à la misère publique ! […] Les premiers n’y ont vu qu’une fierté estimable, les autres qu’une vanité révoltante ; c’est au public à juger si les premiers m’ont rendu plus de justice que les seconds.
Aussi, quel immense public et quelle joie ! […] Autrefois le public était bienveillant pour M. […] Ary Scheffer, cruel et ingrat, comme tous les publics. […] Le public et lui y perdent également. […] Ajoutez à cela la pompe publique qui se réfléchissait dans la vie privée.
Les artistes et le public avaient des yeux pour ne rien voir le préjugé dominant l’art, les peintres alors n’étaient que des subjectifs. […] Cette conférence fut accueillie avec un vif enthousiasme par le nombreux public qui y assistait. Ce public pourtant n’était pas trié sur le volet, il était entré librement et représentait à peu près toutes les classes. […] Mais il écrivait en prose, et le prosateur a un public bien plus étendu que le poète. […] L’ivrognerie fait tomber ses adorateurs sur la voie publique.
Là-dessus, les amants sympathiques seront unis, pour la satisfaction du public. […] Il est vrai que plus tard, lorsqu’il vit le public s’intéresser à ce Shakespeare que lui-même avait révélé, le vieux classique qui était en lui se révolta. […] La pompe du spectacle, les machines, les costumes, tout l’éclat de la mise en scène flatte les yeux et amuse la frivolité du public mondain. […] Il usa de la tragédie, comme de toutes les autres formes littéraires, pour répandre dans le public les conclusions de son rationalisme. […] Lettre à l’Académie française, lue en séance publique le 25 août 1776.
Pendant que le gouvernement impérial s’affermissait, il cultivait sa terre de Lagrange et attendait la liberté publique. […] Il n’y a pas trop d’hommes publics qui aient ce défaut-là, de penser constamment à l’unité et à la pureté de leur ligne. […] Il se refuse à rentrer par un biais dans les choses publiques : « Rien, écrit-il (octobre 1797) à un ami qui semblait l’y pousser, rien n’a été si public que ma vie, ma conduite, mes opinions, mes discours, mes écrits. […] Un écrit assez considérable et inachevé95 expose la situation publique et sa propre attitude en 1814 et 1815. […] Éclairée par ces excellents Mémoires, l’histoire du moins, c’est-à-dire le public définitif, s’en souviendra.
Un Auteur que l’amour du bien public a dévoué, comme moi, à toute l’amertume ainsi qu’à tous les traits de l’animosité philosophique & littéraire, peut & doit même mépriser les déclamations atroces. […] Après avoir justifié mes motifs aux yeux du Public, serai-je donc obligé de faire mon apologie vis-à-vis de chaque particulier ? […] L’utilité publique étant le seul prix que j’y attache, je dois peu m’inquiéter des efforts que font mes Ennemis, pour me ravir le foible mérite qu’elles annoncent. […] S’il craint de paroître devant moi, qu’il dépose ses Pieces entre les mains, non d’un Officier public, mais d’une personne dont les lumieres & la probité reconnues rendent le témoignage valable ; & si je n’en démontre l’abus & la fausseté, je consens à être traité moi-même de Calomniateur public. […] Que ne puis-je mettre sous les yeux du Public ces monumens de démence !
Collé ne les avoit point composées pour le Public, mais pour la récréation de ses amis, ou plutôt pour celle du Prince auquel il est attaché ; & quand on ne travaille que pour un Théatre de Société, il est très permis de céder aux idées d’autrui, quoique peu conformes aux principes. […] Ce ne fut point l’ambition de paroître qui l’engagea à donner ces deux Pieces au Public. […] Il fallut que des Littérateurs éclairés, M. le Duc d’Orléans lui-même, encourageassent sa timidité, & le fissent consentir à ne plus soustraire au Public ce qu’on avoit si fort goûté dans le particulier. […] qu’il est aisé de voir qu’ils s’occupent moins à contenter le Public qu’à le dominer, en le repaissant des Pieces qu’eux seuls sont capables d’adopter.
Comment venir parler à ce public si nombreux, si divers, pure littérature et pure critique ? […] Véron toutes mes objections : il prit la peine de les combattre ; il me parla en homme de goût qui sent la littérature, et en homme d’esprit qui connaît son public. […] Le public a semblé agréer cette manière de faire plus dégagée et plus brève. […] Il revient, dans l’introduction de ce livre, sur les accusations de détournement de fonds publics qui le conduisirent, quelques semaines après la révolution de 1848, à démissionner de la Bibliothèque Mazarine et à accepter la chaire qui était vacante à l’Université de Liège (ibid.
Grâce au public et à un concours dont je serai toujours reconnaissant, ce travail rapportait libéralement son salaire. Mais les événements transforment la scène ; la main se lasse, le public se rassasie, les ennemis dénigrent : qui dit public dit hasard ; le métier d’hommes de lettres n’est qu’un jeu de dé avec l’opinion. […] L’empire tout entier n’a été qu’une vaste école ; les emplois publics n’ont été que les rangs décernés dans une académie. […] « Le pouvoir et les règles pour décerner les récompenses et les châtiments publics viennent d’en haut. […] Les inondations, les sécheresses et les différentes calamités publiques m’affectent beaucoup plus qu’elles n’affectent aucun de mes sujets.
Mais, ajoutait-il, tout cela n’est pas fait pour être livré au public. […] Un tel mode de procédé toutefois ne s’adressait qu’à très-peu de lecteurs et n’atteignait pas le public proprement dit. […] Au public même, et elle est allée à son adresse. […] C’est à ce grand et nombreux public que M. Renan a eu la confiance de s’adresser, et ce grand et nombreux public aussitôt a tressailli ; il a répondu, il a lu.
Toutefois ces réceptions n’étaient point publiques ; les compliments n’avaient lieu qu’à huis clos, et il se faisait ainsi bien des frais d’esprit et d’éloquence en pure perte. […] Colbert ; ainsi tout le monde s’y rangea. » Le premier académicien qu’on reçut après lui et qu’on reçut en public (janvier 1673) fut Fléchier, digne d’une telle inauguration. […] Étienne ; l’attention publique au dedans n’était alors distraite par rien, et les journaux n’avaient le champ libre que sur ces choses du théâtre. […] Toutes grossières et sans goût, toutes rebutantes que se trouvent ces dernières pièces, elles ne sont pas autant à mépriser qu’on est tenu de le faire paraître dans un Éloge public. […] Les applaudissements du public l’ont assez prouvé.
Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. […] S’il est une fois tout à fait établi et ancré dans la confiance, en étroite et complète sympathie avec son public, il pourra beaucoup sans effaroucher jamais et sans paraître empiéter en rien. […] C’est sur ce public, dont les huit neuvièmes se composaient d’ouvriers, que le lecteur a eu à exercer son action insensible, morale, affectueuse, et il y a complètement réussi. […] On me dit que les hommes éclairés du ressort de qui elles dépendent à l’Instruction publique songent à les développer et à les perfectionner. […] Il offre dans son public trop de hasard, trop de mélange et de rencontre.
Si j’étais député, je ne parlerais pas à la tribune comme j’écris dans un journal ; mais il faut écrire dans un journal autrement que lorsqu’on parle en public. […] Le National est une bonne situation et me permet une vie aussi large que celle que j’aurais pu me procurer en acceptant une fonction publique. […] Ce n’est pas la faim qui me fait crier ; au contraire, j’aurais peut-être quelque avantage à me modérer, maintenant que Le National a un public qui veut bien voir et penser par lui. […] Pourtant, s’il y a eu pour lui une heure où il put prendre acte d’un fait public pour ôter à son opposition ce qu’elle avait de trop personnel et de trop direct, de trop semblable à un duel continu, et pour lui donner une base sur laquelle il pût durer, ce fut ce jour-là. J’ai dit qu’il manqua l’occasion ; il n’interpréta point en ce sens public une démonstration générale si honorable pour lui ; il craignit de paraître déclamatoire, en datant hautement de ce point de départ nouveau dans sa reprise de plume au journal.
J’ai déjà montré Montaigne en voyage45 ; on va le voir ici dans l’exercice d’une magistrature publique. […] Grün a établi les divers temps et les principaux chapitres de la vie publique de Montaigne. […] La grande cloche de la ville avait retrouvé sa voix en 1561 ; son silence, qui rappelait une grande calamité publique, avait cessé. […] Il se loue donc d’avoir gardé la juste mesure dans l’exercice des charges publiques, de s’être donné à autrui sans s’être ôté à soi-même, « sans s’être départi de soi de la largeur d’un ongle. » On ne conduit jamais mieux la chose publique que lorsqu’on se possède ainsi. […] Il y a un beau mot de Mirabeau : « Tout homme de courage devient un homme public le jour des fléaux. » Montaigne, homme public, n’a pas fait ni senti qu’il devait faire ce qu’eût fait un Mirabeau et d’autres, qui, dans l’habitude, valaient moins que lui.
Ici, on entend le cri instinctif de cette âme pleine de courage et de vertu, qui fut patriotique et française avant tout dans son ambition, et qui confondra ses passions personnelles dans la grandeur de la chose publique. […] C’est un citoyen précisément qu’était Richelieu, un patriote ardent pour la grandeur publique de l’État, autant, pour le moins, que les deux Pitt furent de grands patriotes et citoyens de l’Angleterre. […] Richelieu n’est pas un philosophe ; ce haut esprit, qui est surtout un bon esprit armé d’un grand caractère, paie tribut aux idées et aux préjugés de son temps ; il parle en maint endroit comme croyant aux présages, aux horoscopes et aux sortilèges ; il est superstitieux : mais aussi il est sincèrement religieux, il croit au don de Dieu qui s’étend sur certains hommes destinés à être des instruments publics de salut : si les fautes commises envers les personnes publiques lui paraissent d’un tout autre ordre que celles commises contre des particuliers, les fautes de ces personnes publiques elles-mêmes lui semblent aussi plus graves et de plus de poids, eu égard à la responsabilité et à l’étendue des conséquences. C’est lui qui a écrit, à la dernière page de son Testament politique : « Beaucoup se sauveraient comme personnes privées, qui se damnent en effet comme personnes publiques. » Permis à Voltaire de rire de ces maximes et d’y voir la trace d’un petit esprit ! […] Elle avait signé la paix de Loudun, que les princes révoltés lui avaient fait chèrement payer (3 mai 1616) ; mais ce qu’elle avait fait pour ces prétendus réformateurs et champions de l’intérêt public avait plutôt ouvert que rassasié leurs appétits insatiables.
Necker en son premier ministère, au milieu de la faveur publique et de l’applaudissement. […] Je tâchai de la diminuer en parlant des regrets qu’ils laisseraient dans le public, et de la juste considération qui les suivrait dans leur retraite ; en quoi je ne les flattais pas. « Je ne regrette, me dit M. […] Entre toutes celles qui pouvaient convenir à une âme élevée, à un homme public jeté avant l’heure dans la retraite, il n’en était point de plus digne assurément que de considérer l’idée religieuse dans ses rapports essentiels avec le maintien de la société. […] Il continuait à y rendre au Premier consul de publics hommages ; s’appuyant de ces hommages mêmes, considérant le Premier consul comme une éclatante exception, et la Constitution de l’an VIII comme transitoire, il cherchait à trouver par la théorie les bases d’un établissement plus durable. […] Voltaire, qui n’a fait qu’assister à la naissance de ce style et qui s’en est raillé, ne l’a pas vu dans son développement et dans tout son beau ; il était venu à temps, dans sa jeunesse, pour corriger le goût public du précieux de Fontenelle : il a fait défaut, un siècle après, pour percer à jour cette forme de bel esprit plus sérieuse, et pour faire opposition, par son exemple, à des Fontenelle bien autrement prépondérants.
A la fin d’une première, d’une seconde, d’une troisième année d’études, les élèves ne seront point admis à l’année suivante sans en être jugés dignes par des épreuves publiques. […] Ces exercices publics soutiendront l’émulation entre les maîtres et les élèves, ils constateront le talent des uns pour apprendre, et le talent des autres pour enseigner. Indépendamment de ces examens publics, lorsqu’il s’agit de passer d’une classe dans une autre, il serait encore à propos que celui qui a rempli son cours de droit et qui sollicite une place dans un tribunal subît de nouveaux examens devant les membres du corps auquel il désire d’être agrégé. […] Je lui remontrerai seulement qu’il en est, en ce point, de l’éducation publique ainsi que de l’éducation domestique. […] Mais ce qu’il ne faut point perdre de vue, c’est que les parties d’éducation publique qui paraîtront superflues dans ce moment pourront devenir nécessaires avec le temps ; à mesure que le grand ouvrage de la civilisation s’avancera, les intérêts divers, les relations entre les sujets se multiplieront, et c’est cet avenir que Sa Majesté Impériale doit prévénir par sa sagesse, si elle redoute d’abandonner la suite de ses projets à l’ignorance ou aux caprices de la folie.
Il n’ignoroit pas que le vulgaire s’amuse volontiers des quérelles, & voit avec une sectette satisfaction ceux qui ont forcé son estime, exposés eux-mêmes à la risée publique. […] On se plaint vainement contre un critique qui a une partie du public pour lui. […] Le zéle du bien public a suggéré l’idée de cet ouvrage. […] Ces rélations des affaires publiques, inventées en France en 1631. par le Médecin Théophraste Renaudot, sont très-multipliées aujourdhui en Europe. […] On doit donc se consulter soi-même en faisant choix des papiers publics, qui favorisent le plus notre inclination.
I Je ne sais si c’est un Appel aux femmes que les femmes entendront, mais je sais bien que c’est un appel au Public. Pour que le Public l’entende mieux, cet appel, l’auteur, qui (dit-on) est une femme, et qui, en fait de sonorité de talent, n’est peut-être encore qu’une guimbarde, a trouvé deux obligeantes trompettes pour faire, autour de son livre, le rassemblement. […] Alexandre Dumas fils, un homme de lettres et un homme du monde, qui devrait avoir assez de fierté et de hautaine indifférence pour endosser la responsabilité de ses opinions devant tous les genres de publics, a fait, nous dit-on, saisir tous les exemplaires où se trouvait sa lettre. […] Dumas, susceptible, à lui tout seul, comme une Assemblée nationale, a fait de cet Appel aux femmes un véritable appel au Public ; et ce n’est qu’après l’avoir lu, que le Public, qui n’est pas toujours une bête, s’est refroidi et n’est plus venu à l’Appel… II C’est que ce livre n’est qu’une déclamation vide, sans talent et sans sincérité. […] … Elles ne se présentaient pas au public avec des jupons, faisant de telles rouffles !
Le dessin est d’une utilité si générale, il provoque si naturellement la naissance de la peinture et de la sculpture, et il est si nécessaire pour juger avec goût des productions de ces deux arts, que je ne suis point étonné que le gouvernement en ait fait une partie de l’éducation publique ; mais point de dessin sans perspective. Il me vient une idée que peut-être Sa Majesté Impériale ne dédaignera pas : la plupart de ceux qui entrent dans les écoles publiques écrivent si mal, ceux dont le caractère d’écriture était passable, l’ont si bien perdu quand ils en sortent, et il y a si peu d’hommes, même parmi les plus éclairés, qui sachent bien lire, talent toujours si agréable, souvent si nécessaire, que j’estime qu’un maître de lecture et d’écriture ne s’associeraient pas inutilement au professeur de dessin. […] Plus les édifices publics sont durables, plus longtemps ils attestent le bon ou le mauvais goût d’une nation, plus il convient que ceux qui président à cette partie de l’administration aient le goût sûr et grand. […] C’est ainsi qu’un militaire appelé de Terville donnait des leçons publiques de fortifications et rassemblait autour de lui des hommes de tous les états.
Il n’en est pas ainsi de l’instruction publique ; embrassant toutes les conditions d’un empire, répandant la lumière de toute part, son dernier effet est la formation des académies qui durent, renouvelées sans cesse par le fonds national. Fonder une académie avant que d’avoir pourvu à l’éducation publique, c’est vraiment avoir commencé son édifice par le faîte. […] Les maisons d’éducation publique doivent faire les progrès de la population ; la multitude de ces établissements serait une espèce de calamité. […] Il y a deux sortes d’écoles publiques : les petites écoles ouvertes à tous les enfants du peuple au moment où ils peuvent parler et marcher ; là ils doivent trouver des maîtres, des livres et du pain, des maîtres qui leur montrent à lire, à écrire et les premiers principes de la religion et de l’arithmétique ; des livres dont ils ne seraient peut-être pas en état de se pourvoir ; du pain111 qui autorise le législateur à forcer les parents les plus pauvres d’y envoyer leurs enfants.
De même que les médecins, pendant une épidémie, les officiers publics sont sur les dents. […] On le rencontre un peu partout, mais particulièrement dans les lieux publics. […] — Ô public crétin ! […] Ô public crétin ! […] Cette création scabreuse, et traitée avec un art infini, a été acceptée par le public.
Il faut lire son Esprit public des Whigs contre Steele. […] — Je n’en sais pas plus que ce qu’on en dit. — Il a tout légué au public. — Au public ? Voilà un caprice. — Qu’est-ce que le public avait fait pour lui ? […] To public uses ! […] What had the public done for him ?
Et la gloire lui sera mesurée aux portions meurtries de son âme qu’il saura servir proprement au public. […] Mais on ne saurait considérer ces œuvres poétiques comme célèbres, ni même comme connues du public. […] L’auteur s’y montre en communion constante avec le public. […] Les romanciers réalistes qui ont vraiment prise sur le public, M. […] Henri Heine parut encore trop divisé au public entre tous ces mouvements d’âme contradictoires, trop peu sincère et franc.
Le public ne vous lira pas ; et le public aura presque toujours raison. […] Le public, dans son indifférence systématique, ne se trompe donc guère qu’une fois sur mille. […] Quel débutant peut marcher longtemps seul, si le public ne lui offre la main ? La critique c’est la main du public étendue vers les jeunes auteurs. […] Les intérêts positifs, le commerce, les affaires publiques les passionnaient plus que nous.
Tant pis pour le public, pour ce « tas de bourgeois », s’il ne comprend pas. […] Avant tout, donc, il faut mettre le public de son côté. Le plus simple, ce serait, sans doute, de tout tirer de l’opinion et de servir au public ce qu’on sait être dans la moyenne de ses idées et de son goût : mais ce serait se condamner à la médiocrité, à la banalité. […] On ne renoncera pas, par respect pour le public, à ce qu’on sait être la vérité humaine : il applaudit Astrate, on lui présentera Andromaque. […] Mais on ne lui jettera pas violemment la vérité toute crue : où est le mérite de révolter le public ?
Nos écrits sont comme des arrhes que nous donnons au public de notre aptitude aux carrières élevées. […] Quant à la postérité, au public européen, qui en a souci ? […] Le public en saurait tort peu de gré au critique, en Allemagne particulièrement, où le lecteur est toujours plus patient que l’écrivain ne peut être obscur. […] Partout où l’écrivain est en rapport d’idées avec le public, le public se subordonnât-il à l’écrivain, il y a un beau spectacle pour l’esprit humain. Mais peut-être ce spectacle est-il plus beau encore là où le public, au lieu de se placer au point de vue de l’écrivain, force l’écrivain à se placer au point de vue général.
Le rapporteur en proposait le renvoi au ministre de l’instruction publique. […] Nicole un jour, écrivant au nom de Port-Royal, appela tous les romanciers et les auteurs de théâtres des empoisonneurs publics. […] M. le ministre de l’instruction publique y pousse de toutes ses forces, et je l’en loue. […] « Je ne ferai rien qui puisse dénaturer le caractère essentiellement public du conflit. […] « Je ne vois donc pour juge compétent que le public, le grand public, tout le monde, ce quelqu’un qui a plus d’esprit que personne et qui a autant d’honneur que qui que ce soit, — un honneur qui n’est pas le point d’honneur et où il entre de la raison.
Encourager l’esprit dans une nation, appeler aux emplois publics les hommes qui ont de l’esprit, c’est faire prospérer la morale. […] Il analyse des sentiments intimes, des détails inaperçus ; et souvent une expression énergique s’attache à la vie d’un homme coupable, et fait un avec lui dans le jugement du public. […] Ce qu’on mettrait à la place de ces progrès, ce ne seraient ni des vertus publiques, ni des affections privées, mais les plus avides calculs de l’égoïsme ou de la vanité. […] Celui qui cherche à se distinguer inspire d’abord une prévention défavorable ; le public malade est fatigué d’avance par qui veut obtenir encore un signe de lui. […] Il est impossible que, dans un état libre, l’autorité publique se passe du consentement véritable des citoyens qu’elle gouverne.
Sans doute le dix-huitième siècle ne tiendra jamais dans l’éducation publique la même place que le dix-septième, et ce serait un malheur que le second fît négliger le premier. […] « Je rends au public ce qu’il m’a prêté », on ne fait pas tort à Montesquieu en disant qu’il a rendu à la France du dix-huitième siècle ce qu’il en a reçu. […] Son public en méritait-il l’effort ? […] Les Pères ne gouvernaient pas seulement les esprits et les cœurs, ils avaient la charge de la chose publique. […] Elles n’ont été pour rien dans nos malheurs publics.
Amelot est bègue et ne peut haranguer en public ; M. d’Angervilliers devient vieux, usé, et très paresseux de travailler ; M. de Maurepas n’est pas gradué, et M. de Saint-Florentin n’y est pas propre. […] Une telle passion exclut la vertu et cet amour du bien public, qu’on doit adorer après son simple bonheur et bien avant sa propre grandeur… Il faut remarquer, ajoute-t-il (et l’on n’a que le choix entre vingt passages), que mon frère aime mieux une place qui lui vient par une brigue, par un parti et par une intrigue, que par la voie simple et noble de sa capacité reconnue et placée. […] Il n’a pas médité un moment le bien public ; il y a toujours apporté de l’indifférence ; il n’en a pris que quelques traits par-ci par-là, chez les uns et chez les autres, comme je sais quelques racines grecques que j’ai prises je ne sais où. […] Sur la conversation en particulier, il a de ces observations qui portent, et dont on n’a jusqu’ici donné quelques-unes au public qu’en les éteignant et les émoussant. […] Quand le siècle lui paraîtra, en avançant, présenter quelques meilleurs symptômes, il sera le premier à les noter et à nous en faire part, avec la joie d’un homme qui ne désespère pas des hommes et qui aime à croire au progrès de la raison publique.
A chacun de ces numéros, attaché avec des faveurs roses, il apporta un luxe d’élégance et de comme il faut, qui était dans ses goûts, mais qui dépassait ceux du public. […] Il est bon qu’il ait eu ce goût en lui, et en même temps que ce goût ait été combattu par celui du public et des entrepreneurs de journaux qui lui demandaient de la malice, du comique, et qui l’auraient bien Voulu pousser à la charge, s’il n’y avait résisté. […] Il dut donc sacrifier au goût du public lorsqu’il travailla pour le Charivari, pour la Caricature. […] Le recueil est plus intéressant pour le biographe que pour le public. […] En avançant, Gavarni, devenu plus maître et sentant qu’il dominait mieux son public, s’est accordé plus volontiers la série philosophique : mais ceci touche à une seconde manière que nous aurons à caractériser.
Les maris trompés de Molière et les femmes malheureuses des drames modernes disparaîtront de la scène, l’indissolubilité du mariage autorisant seule les revanches secrètes ou les lamentations publiques de la femme adultère. […] Ils blâmaient telle disposition, qui a été une concession forcée à des adversaires, comme celle qui proscrit le divorce par consentement mutuel et provoque ainsi au scandale public, ou bien celle qui interdit aux deux complices, en cas d’adultère constaté, de réparer leur faute en s’épousant. […] Défense était faite aux écrivains, par un édit de Louis XV, de médire de la religion, du roi, des ministres, des traitants, de tous ceux qui, de près ou de loin, touchaient à la chose publique. […] L’arbitraire est là si évident et le public s’est si bien habitué depuis une vingtaine d’années à toute espèce de nudités de style que le cercle des choses jadis défendues s’est étrangement rétréci. […] Mais en même temps que la verve des écrivains est invitée à se renfermer dans des limites plus restreintes, elle est stimulée par la possibilité d’atteindre, au moyen du journal même, un public plus vaste, de monnayer leur talent à la journée, d’obtenir une rémunération immédiate et plus forte.
Dès lors, moins précise, moins complète, la critique est devenue moins intéressante pour le public d’élite. […] Et le public ne saurait les confondre. […] Ni les arts, ni les lettres ne descendront jamais à ce public. […] Le public des journaux appelle littérature, une sorte de lyrisme en prose. […] Pour ce public, on a développé la critique anecdotique et la littérature de documents.
Son absolution est pire que le forfait lui-même : c’est le forfait rétrospectif, le forfait de sang-froid, le meurtre de la conscience publique, seul refuge que la fortune triomphante laisse ici-bas à la justice et à la vertu ! […] Il faut qu’il ait pratiqué lui-même les conseils, les assemblées, les négociations, les délibérations, les affaires publiques, afin d’avoir observé de ses propres yeux le jeu des passions, des intérêts, des ambitions, des intrigues, des caractères, des vertus ou des perversités qui s’agitent dans les cours, dans les camps, dans les comices, dans la place publique. […] « Nous, au contraire, que l’estime publique et les armes ont portés à l’empire, quels que soient nos services, nous y serons poursuivis par la jalousie. […] Quel autre homme qu’un homme rompu aux affaires publiques, un témoin des écroulements de Rome, un publiciste, un moraliste, un orateur, un vieillard, pouvait le penser et pouvait l’écrire ? […] La restitution au trésor public des sommes perçues par les favoris de Néron aigrit les esprits dans le camp et dans la plèbe.
Je voudrais que tous ceux qui écrivent sur Montaigne et qui nous transmettent sur lui le détail de leurs recherches et de leurs découvertes, se représentassent en idée une seule chose, à savoir Montaigne lui-même les lisant et les jugeant. « Que penserait-il de moi et de la façon dont je vais parler de lui au public ? […] Montaigne, âgé de cinquante ans, rentrait donc dans la vie publique un peu malgré lui et à la veille des troubles civils qui, apaisés et sommeillant depuis quelque temps, allaient renaître plus terribles au cri de la Ligue. […] Faire le bien public insensiblement lui paraîtrait toujours l’idéal de l’habileté et le comble du bonheur. […] Horace de Viel-Castel vient bien à l’appui de ce chapitre où Montaigne s’expose et se juge lui-même dans cette période de sa vie publique. […] Aux Gibelins, j’étois Guelfe ; aux Guelfes, Gibelin. » Au milieu de ses griefs personnels, il sait assez détacher et élever sa pensée pour réfléchir avant tout sur les malheurs publics et sur la dégradation des caractères.
Il me le disait encore tout récemment à l’occasion des Mémoires de M. de Candolles : il ne comprenait pas qu’on occupât ainsi le public de soi ; je ne donne pas cette opinion comme juste, mais comme sienne. […] L’acier manquait, on n’en pouvait tirer du dehors, l’art de le faire était ignoré ; on demanda aux savants de le créer, ils y parvinrent ; et cette partie de la défense publique devint indépendante de l’étranger… La poudre était ce qui pressait le plus : le soldat allait en manquer. […] Un jour, un officier dépêché d’une de nos frontières arrive au Comité de salut public ; il annonce que les armées sont en présence, mais qu’on n’ose envoyer le soldat au feu parce que les eaux-de-vie sont empoisonnées : des malades qui en ont bu dans les hôpitaux sont morts. […] Lorsqu’il s’agit, la Terreur passée, de réorganiser l’instruction publique, et dans l’instruction publique les hautes sciences, l’enseignement supérieur, de tout rapprendre, de tout recréer à la fois, et d’improviser en quelque sorte une civilisation, comme on avait tout à l’heure improvisé la guerre, M. […] Si tout est fixé, jusqu’aux moindres détails, il n’y a plus d’émulation : que l’objet de l’enseignement soit déterminé ; que la forme générale en soit réglée ; qu’il soit dirigé par une réunion d’hommes éclairés, mais que l’instruction publique soit vivante : que l’on cherche à exciter les esprits plutôt qu’à les enchaîner.
L’a-t-il connu, et l’a-t-il fait connaître au public ? […] Le public a fait sa rhétorique sous Balzac. […] D’où il arrive que, lorsqu’il considère l’avènement de cet esprit, il n’y voit point, comme fait le public, la naissance d’un genre particulier, ayant son domaine, mais ayant ses limites, ayant ses mérites, mais ayant ses défauts. […] La régente était faible, il s’agissait « de se bien faire valoir » et de prendre la plus grosse part possible du trésor public. C’était la mendicité à main armée, la guerre entreprise contre l’intérêt public, le vol pratiqué contre l’État par les défenseurs naturels de l’État.
Que le public qui voit les injures sache du moins à quel prix on les a méritées. […] Cependant l’atmosphère politique s’éclaircissait peu à peu à l’entour ; en même temps que la fièvre publique s’apaisait, les tendances littéraires reprirent le dessus et se prononcèrent : l’expérience se fit. […] Pour animer, pour ennoblir aux yeux du public cet ensemble de critique, en apparence si peu fastueuse, et que nous ne cherchons nullement à rehausser ni non plus à rapetisser ici, une seule considération peut-être suffira. […] Or ce sens de vérité est précisément ce qui, dans tous les genres, dans l’art, dans la littérature d’imagination et, ce qui nous paraît plus grave, dans les jugements publics qu’on en porte, s’est le plus dépravé aujourd’hui. […] Leurs déportements se jugent d’ailleurs par le fait même ; au bout de quelques jours, le public, d’abord excité, s’en dégoûte, sans avoir besoin d’être averti, et il ne reste d’irréparable, après de tels éclats, que les atteintes profondes que les violents se sont portées, qu’ils ont portées aussi à la cause littéraire qu’ils semblaient dignes de mieux servir.
Gunmere40, voit dans la poésie non une manifestation privée qui aurait son origine dans tel ou tel sentiment individuel, mais une « institution sociale » qui joue un rôle dans la vie publique. […] Aujourd’hui, l’art est, comme la religion, chose privée et par suite les pouvoirs publics n’ont rien à y voir. […] Le libéralisme du public est tel à cet égard que les promoteurs de ligues contre l’immoralité de certaines manifestations esthétiques trouvent peu d’écho et de faveur dans le public. […] Si la tolérance du public et même des critiques à l’égard de l’individualisme artistique est assez grande de nos jours, cela ne veut pas dire que l’originalité esthétique en soit facilitée. […] Nous avons dit qu’à défaut de l’intolérance du public, l’individualisme esthétique encourt l’hostilité des moralistes.
La dominante de l’esprit public c’était, alors, un chauvinisme grossier mêlé de niaiserie sentimentale et d’ignorance satisfaite. […] Ici et là on exaltait des noms inconnus du public ou tournés en dérision : Wagner, Puvis de Chavannes, Rodin, Verlaine, Mallarmé, Rimbaud, Villiers de l’Isle-Adam, Eugène Carrière, etc., et cette admiration des nouveaux venus s’exagérait encore du sentiment qu’ils avaient de réparer une longue injustice. Mais ces publications étaient trop intransigeantes pour faire aucune concession au goût du public ; et la grande presse restait hostile ; elle ourdissait autour de ces tentatives la conspiration du silence. […] Le lyrisme est déchaîné ; on réclame avec insistance Moréas, qui tout d’abord se récuse, mais qui, porté à la tribune par l’enthousiasme public, cède à la violence et s’exécute. […] Non, certes, l’effort considérable de ces dix années n’aura pas été stérile, puisqu’il a réussi à modifier le goût public.
Car ça a été jusqu’à présent, tout son public. […] Le public ne critique pas de cette façon. […] Y était-il désigné par la voix publique ? […] Le critique, même approuvé du public, qu’empêche-t-il ? […] Son public ne le poussera-t-il pas en avant ?
Aujourd’hui que le Globe est placé plus qu’il ne l’a jamais été depuis la révolution de Juillet sur un terrain solide et nettement dessiné ; aujourd’hui que sa nouvelle position en politique, en économie, en philosophie, en art et en religion, devient de plus en plus appréciable et notoire ; aujourd’hui enfin, pour tout dire, que le Globe est le journal reconnu et avoué de la doctrine saint-simonienne ; nous, qui ne l’avons abandonné dans aucune de ses phases, nous qui avons assisté et contribué à sa naissance il y a sept ans, coopéré à ses divers travaux depuis lors, qui avons provoqué et produit plus particulièrement ses transformations récentes ; nous qui avons suivi toujours, et, dans quelques-unes des dernières circonstances, dirigé sa marche ; qui, sciemment et dans la plénitude de notre loyauté, l’avons poussé et mis là où il est présentement, nous croyons bon, utile, honorable de nous expliquer une première et dernière fois par devant le public, sur les variations successives du journal auquel notre nom est demeuré attaché ; de rendre un compte sincère des idées et des sentiments qui nous ont amené où nous sommes ; et de montrer la raison secrète, la logique véritable de ce qui a pu sembler pur hasard et inconsistance dans les destinées d’une feuille que le pays a toujours trouvée dans des voies d’honneur et de conviction. La première idée, la conception du Globe, lorsqu’il fut fondé il y a près de sept ans (et celui qui parle ici est plus compétent que personne pour décider ce point), consistait à recueillir et à présenter au public français tous les travaux scientifiques, littéraires et philosophiques de quelque importance dans le grand mouvement pacifique qui commençait à emporter de concert les nations civilisées du monde. […] Et d’ailleurs les circonstances politiques devenant de jour en jour plus pressantes, le principe, qui n’aurait dû servir que d’instrument à prendre ou à laisser, devenait lui-même une arme de plus en plus chère, un glaive de plus en plus indispensable et infaillible ; le but lointain d’association et d’unité s’obscurcissait derrière le nuage de poussière que soulevaient les luttes quotidiennes ; car le Globe s’y lança sans hésiter dès que les besoins du pays lui parurent réclamer une pratique plus active ; mais ses tentatives de science générale y perdirent d’autant ; ce sentiment inspirateur, cette tendance générale et ce but d’avenir que nous signalons plus particulièrement ici s’éclipsèrent devant une application directe à la situation politique du moment, et, dans la préoccupation naturelle des rédacteurs comme du public, notre journal parut se réduira au travail du principe de liberté jouant et frappant dans toutes les directions. […] Mais la dissolution du Globe n’en résultait pas nécessairement ; l’idée première, la conception fondamentale dont le développement avait dévié en se resserrant dans la politique de la Restauration ; qui pourtant s’était reproduite plus d’une fois dans des applications partielles, dans des pressentiments organiques ; qui, en plus d’une page, à l’occasion de l’union européenne et de la politique de Napoléon, à l’occasion du Comité de salut public et de sa tentative avortée ; qui, plus récemment, au sujet du libéralisme de Benjamin Constant, jugé par le noble et infortuné Farcy, avait percé au point d’offenser dans le journal le principe dominant, et d’y scandaliser les politiques pratiques ; cette idée qui nous en avait inspiré le début ; qui, par le choix intérieur des matières et des faits, en alimentait le fond ; qui, par des renseignements nombreux, par d’amples informés sur l’instruction primaire aux frais de l’État, sur l’émancipation des artisans, sur les essais divers de système coopératif et sur une foule d’autres sujets, avait sourdement lutté contre les doctrines économiques d’indifférence et de laisser-faire professées dans des colonnes plus officielles ; cette idée qu’une plume ingénieuse et délicate avait autrefois effleurée, sans l’entamer, dans un article intitulé de la Critique de la critique, et qui s’était hardiment résumée en Juillet sous ce cri prophétique, bien qu’un peu étrange : Plus de criticisme impuissant ; cette féconde et salutaire idée d’association universelle et d’organisation future restait entière à exploiter ; elle demeurait à nu, dégagée de tous les voiles factices, de toutes les subtilités prestigieuses que la Restauration avait jetées devant. […] Voilà ce que dans notre position personnelle il nous a paru convenable d’expliquer au public, et ce que le public lui-même ne trouvera peut-être pas inutile de méditer.
Ses lecteurs ne se rencontrent pas dans cette active non plus que dans cette sensible partie du public — et cependant on voit bien que le public entier est son lecteur. […] Ce public compte, mais on connaît ses goûts et ce qui lui plaît. […] Attrait non moins puissant auprès du public sédentaire qu’auprès du public bourgeois l’attrait des sphères éblouissantes du grand monde. […] Que l’attention du public se déportât légèrement en se fixant sur lui. […] Si leurs écrits contiennent un enseignement, ils laissent au public le soin de le dégager.
Cette action mutuelle de l’auteur sur le public et du public sur l’auteur favori, explique assez les erreurs que commettent des talents clairs et profonds, mais qui enfin portent le sceau de leur époque. […] Il s’inspire des exigences du public. […] N’oublions pas que l’autre, c’est le public. […] Or, en Espagne, on ne peut presque pas compter sur le public. Ce que le public espagnol aime, ce n’est pas la littérature, c’est la politique.
Mais il disait cela dans l’intimité, et ne prenait pas la peine de communiquer ce jugement à son public. […] Le résultat de tout ce tapage fut que le public apprit à connaître le nom de M. […] Depuis le moment où parut L’Assommoir, sa vie publique est connue de tous. […] Zola une bonne partie du public et presque toute la critique. […] La sympathie que le public lui a témoignée l’a récompensée de son dévouement : elle la méritait bien.
La première représentation de Cosima a eu lieu devant le public le plus nombreux, le plus choisi et le plus divers, le plus littéraire et le plus mondain qui se puisse imaginer. […] cet auteur, si suspect aux religieux observateurs du mariage, n’a pas craint de mettre là en scène un mari à demi trompé, qui n’a rien de ridicule ni de paterne, mais plein de sérieux, et s’élevant à une éloquence parfois qui a gagné le public, quelque peu surpris. […] » Il écoute pourtant, et le public aussi. […] La faute en est en partie aux acteurs, je l’ai dit, et en partie au public, il faut oser le dire. […] Ici l’acteur, aussitôt même entendu, n’a eu qu’à jeter au public le pseudonyme retentissant.
Tous ces personnages ramassés sur la place publique, la commedia dell’arte les mit en scène et les fit servir au divertissement, non seulement du peuple, mais des cours les plus brillantes et des plus doctes académies. […] Mais c’étaient là des modifications une fois faites, qui duraient toute la vie du comédien qui avait le talent de les imposer au public. […] Parfois aussi, lorsque les pièces devinrent très compliquées, très chargées de personnages et d’incidents, les canevas entraient dans tous les détails de l’action ; la trame était tissue avec soin ; à l’acteur d’y broder les arabesques d’une libre fantaisie, suivant la disposition du moment et celle que montrait le public. […] Il faisait, en dehors, le tour des premières, secondes et troisièmes loges, exercice si périlleux que le public, tremblant pour la vie de cet acteur, l’obligea d’y renoncer. […] Il tire la langue au public sous son masque.
Si les Ecrivains dont nous relevons les défauts, nous faisoient cette question, nous pourrions leur répondre : La crainte d’en faire qui ne valussent pas mieux que les vôtres, nous a empêchés d’en donner au Public : la connoissance que nous avons des qualités indispensables pour un bon Ouvrage, nous détermine à censurer les vôtres. […] On l’a dit cent fois, quiconque livre ses Ouvrages au Public, reconnoît chaque particulier pour son Juge. […] Il seroit inutile de leur dire, qu’en Littérateurs zélés & en bon Citoyens, nous préférons l’intérêt des Lettres & du Public, à celui de leur vanité ; qu’avec les mêmes sentimens, ils devroient être plus dociles, & ne pas s’offenser ; que tant de penchant à se révolter contre la censure, est la preuve la plus certaine d’un talent médiocre & d’une gloire usurpée ; que rien ne nous assujettit ni ne peut nous assujettir à louer ce qui ne nous paroît pas louable ; que nous leur permettons la critique de nos jugemens, sauf à y répondre, s’ils n’apportent pas de bonnes raisons : nous nous contenterons de les assurer que l’impartialité a été notre premiere regle. Nous connoissons personnellement peu des Auteurs auxquels nous donnons des éloges, nous en connoissons encore moins de ceux que nous avons censurés : le Public décidera lui-même, si nous mettons quelque différence dans notre maniere de nous expliquer sur les uns & sur les autres, sur les vivans ou sur les morts. […] Leurs Subalternes seront mis en œuvre ; les Libelles fabriqués dans l’obscurité seront confiés à des mains aussi viles que zélées, pour être distribués dans le Public ; des Valets à gages s’efforceront de déclamer contre nous dans les Cafés, dans les Promenades, dans les Rendez-vous où certaines Compagnies s’assemblent pour débiter des oracles & régler les idées du Public qui ne les écoute pas.
On les trouvera rétablis dans celle-ci, et ce n’est pas un petit service rendu au public par ceux qui ont pris ce soin, puisque les nombreuses Assemblées qu’on voit encore tous les jours aux représentations des Comédies de ce fameux Auteurs, font assez connaître le plaisir qu’on se fera de les avoir dans leur pureté. […] Il vint à Lyon en 1653 et ce fut là qu’il exposa au public sa première Comédie ; c’est celle de L’Étourdi. […] Cette Troupe dont Monsieur de Molière était le Chef, et qui, comme je l’ai déjà dit, prit le titre de la Troupe de MONSIEUR, commença à représenter en public le 3 Novembre 1658 et donna pour nouveautés L’Étourdi et Le Dépit amoureux, qui n’avaient jamais été joués à Paris. […] Après qu’elle fut à sa Majesté, Monsieur de Molière continua de donner plusieurs Pièces de Théâtre, tant pour les plaisirs du Roi que pour les divertissements du public, et s’acquit par là cette haute réputation qui doit éterniser sa mémoire. […] Les commencements de cet établissement ont été heureux, et les suites très avantageuses ; les Comédiens compagnons de Monsieur de Molière ayant suivi les maximes de leur fameux Fondateur, et soutenu sa réputation d’une manière si satisfaisante pour le Public, qu’enfin il a plu au Roi d’y joindre tous les Acteurs et Actrices des autres Troupes de Comédiens qui étaient dans Paris, pour n’en faire qu’une seule Compagnie.
Tous les peuples ont le droit ou le devoir de courir sus à celui qui s’insurge contre le droit public : car ce droit public n’appartient pas seulement à une nation, il appartient à toutes. […] Anathème sur le roi, le peuple ou le conquérant qui ne reconnaît pas le droit public : qu’il soit l’excommunié de la civilisation ! […] Finances, liberté des cultes, éducation publique, diplomatie, telles étaient ses larges sphères d’action dans l’Assemblée. […] Bonaparte voulait laisser mûrir la versatilité publique ; M. de Talleyrand la croyait mûre tous les jours pour qui oserait en arracher le fruit. […] Soulever et calmer les tempêtes de tribune, de presse, de place publique, ou les apaiser du geste et de la voix, était un rôle qui n’allait pas au souverain diplomate.
Une maladie qui le défigura, et qui fit de lui le plus laid des gens d’esprit, l’obligea de quitter le barreau et l’action publique. […] Mais ce que Richelieu voulait décidément, ce qu’il a fait voir tout d’abord en demandant à l’Académie ses sentiments publics sur Le Cid, c’était (et indépendamment, je le crois, de la passion personnelle qu’il apportait dans cette question particulière du Cid) —, c’était de la faire juge des œuvres d’éclat qui paraîtraient ; de la constituer haut jury, comme nous dirions, haut tribunal littéraire tenu de donner son avis sur les productions actuelles les plus considérables qui partageraient le public. […] De tels jugements formeraient aujourd’hui une suite et comme une jurisprudence critique bien mémorable, et n’auraient pas été sans action certainement sur les vicissitudes et les variations du goût public. […] Cependant le public y croit, et, malgré ce que je dis, il pourra bien continuer d’y croire. […] Patin ; ce premier fascicule qui, tout important qu’il est, n’est lui-même qu’un essai, sera dans quelques jours présenté à M. le ministre de l’Instruction publique.
Les inscriptions des monumens publics de France doivent-elles être écrites en Latin ou en François. […] Il avoit écrit qu’elle pouvoit se plier à tous les sujets, & il ne vouloit pas qu’on eût recours à d’autre pour les monumens publics. […] Ce jésuite, homme de mérite, prononça, le 25 novembre 1676, une harangue latine, dans laquelle, sans se permettre aucune personnalité, il s’attacha simplement à prouver que les inscriptions des monumens publics devoient être en Latin. […] Il faudroit qu’on en usât de même pour nos fontaines publiques, nos jardins, nos portraits, nos statues. […] Consacrés par la vénération publique, ils frappent moins lorsqu’ils sont latinisés.
Le hasard d’un procès, un incident ridicule révèlent au public le génie de Beaumarchais, que ses médiocres drames n’avaient pas fait percer. […] Beaumarchais a pris le public par son faible, par l’amour des personnalités, de la satire anecdotique et individuelle. […] Beaumarchais avait pour lui tous les esprits curieux, avides de plaisir, de nouveauté et de scandale, c’est-à-dire tout le public, la cour, le comte de Vaudreuil, la princesse de Lamballe, le comte d’Artois, la reine même. […] Le public, surchauffé, fiévreux, débordait d’enthousiasme, applaudissait également à leur entrée dans la salle le bailli de Suffren et Mme Dugazon578. […] Le public prit Figaro comme Beaumarchais le lui donnait, pour le défenseur de la liberté contre le despotisme, de l’égalité contre les privilèges.
Les papiers publics qui transcrivent les débats de la Convention ne représentent donc que l’histoire d’une mascarade. […] Ce qui frappe Mallet aux diverses époques de notre Révolution, surtout pendant la période qui suit la Terreur, et au lendemain des nouvelles rechutes (telles que le 13 Vendémiaire, le 18 Fructidor), c’est l’absence complète d’opinion et d’esprit public, dans le sens où on l’entend dans les États libres : L’esprit public proprement dit, écrit-il le 28 janvier 1796, est un esprit de résignation et d’obéissance ; chacun cherche à se tirer, coûte que coûte, c’est-à-dire par mille bassesses infâmes, de la détresse générale. […] Que Carnot ou le duc d’Orléans, que Louis XVIII ou un infant d’Espagne soient roi, pourvu qu’ils gouvernent tolérablement, le public sera content. […] Il ne lui restait plus, s’il voulait encore parler au public, qu’à sortir du continent, car il n’y avait plus un lieu où il pût imprimer en sûreté une ligne contre le Directoire : Je n’ai été toléré ici, écrivait-il de Fribourg-en-Brisgau à l’abbé de Pradt, que sous la promesse d’y garder le silence. […] Il partit donc, et débarqua en Angleterre le 1er mai 1798 ; il s’y sentit à l’instant sur une terre forte et où régnait un esprit public puissant.
Quand l’Empire fut établi au complet et que l’organisation administrative s’étendit à tout, même à l’esprit public, M. […] Étienne, jusqu’au point de concerter avec lui les lettres palliatives qu’il fallait écrire pour ramener le public, tourne brusquement, et, obéissant à des sentiments fort équivoques, lance une brochure intitulée : Mes révélations. […] Les paroles qu’il prononça à cette occasion le 15 janvier 1844 devant le public, par une journée glaciale et en pleine rue Richelieu, furent son dernier succès. […] Étienne, contentez-vous de demander ce qu’aurait dit Molière s’il avait vu ce changement de comédie, et les mêmes hommes dans les deux rôles, administrant l’esprit public sous l’Empire, refaisant et remuant l’opinion publique sous la Restauration, et y trouvant toujours leur compte. […] [NdA] Dans une Notice lue à la séance publique des cinq Académies, du 25 octobre 1852, M.
Attendons le public ; c’est là qu’est le jury. […] Je crois aussi que cet opéra est destiné à la scène, j’ignore s’il fera de l’effet : cela dépendra de l’effet qu’il produira sur le public. […] Il poursuit aujourd’hui une tâche dès longtemps entreprise, faire connaître Richard Wagner, le révéler au grand public. […] La salle était boudée et les exclamations du public, plus que jamais chaleureuses, ont salué une dernière fois le chef-d’œuvre de Wagner. […] Répétition générale publique pour la presse et les invités, le 30.
Les livres que voici (livres de high life, s’il en fut jamais), quoique à l’adresse, par leur sujet et par le titre, d’un public d’élite et de choix, étendront, nous n’en doutons pas, une renommée qui avait commencé déjà, mais comme le jour commence, — en n’atteignant que les points les plus élevés de l’horizon, Jusqu’ici connu seulement des hommes de pensée et d’art, qui savaient ce qu’il en cachait et ce qu’il en faisait voir sous les formes gracieuses de l’homme du monde, Eugène Chapus ne s’était pas révélé au public véritable, à ce public qui, comme le Dauphin de la fable, porte parfois bien des singes sur son dos en croyant porter des hommes, mais qui est, en définitive, le soutien et le véhicule des talents sincères. Cette masse du public ne connaissait pas le nom de l’auteur du Turf et des Chasses royales.
C’est qu’en fin de compte le public seul jugeait. […] Racine, Molière, tout le monde vous le dira Et comment plaire au public de 1630 ? […] Ce public ne suppose rien. […] Dès lors, l’imagination du public fait tous les frais : on lui dit de voir ; il voit. […] Plus la pièce était compliquée, et plus le poète devait multiplier les indications : mais, plus il donnait d’explications au public, moins le public croyait que c’était arrivé.
Les auteurs dramatiques vont au succès c’est-à-dire à l’argent en flattant le mauvais goût public et en l’exagérant, et, comme le théâtre rapporte infiniment plus d’argent que le roman, il est descendu plus bas. […] Tout le monde est d’accord, le drame romantique est sans pouvoir sur le public et ses derniers bourreaux, à quelques exceptions près, ne savent même plus l’art des beaux vers inutiles. […] Catulle Mendès qui prône encore un théâtre de rêve, mâtiné de Marivaux, de Tabarin et d’Eschyle, le public, qui accepta tant de médiocres mélos, n’accepte plus les personnages chaponnés de Shakespeare. […] De la première de ces pièces on peut affirmer qu’elle est un chef-d’œuvre ; de la seconde qu’elle plut à un public d’élite, malgré les erreurs de l’interprétation. […] Ce qui manqua surtout à l’épanouissement du drame social, ce fut une scène et un public.
Plusieurs attendent avec impatience ce Lohengrin qui va bientôt montrer décidément au public français de quelle façon Wagner traitait l’opéra, lorsqu’il traitait l’opéra. […] Si la recette des concerts ne répondit guère à l’attente des organisateurs, en revanche l’enthousiasme du public vengea Wagner de l’indifférence et de la méfiance des absents. […] Guillaume se mit à l’œuvre en commençant par Rienzi, la partition la plus conforme aux habitudes du public, à cette époque. […] Notre public est mûr pour les grandes impressions du drame lyrique. […] XV : Mort et funérailles de Wagner ; continuation de son œuvre : ses revirements intéressés ; son attitude envers les compositeurs ; l’homme dans l’intimité, l’artiste en public.
Eh bien, cet éloquent discours a-t-il retenti dans le public, de même qu’il avait ébranlé les voûtes de la salle du Sénat ? […] Pour le vrai mérite chez un homme public, la publicité à la longue est toujours impartiale et équitable. […] Au prix où l’ont mis les exigences du public et les nécessités de la concurrence, un journal en ce moment se vend moins cher qu’il ne coûte. […] « La vie privée des fonctionnaires, disait à ce sujet le garde des sceaux de 1819, n’appartient, comme celle des autres citoyens, qu’à eux-mêmes ; leur vie publique appartient à tous : c’est le droit, c’est souvent le devoir de chacun de leurs concitoyens de leur reprocher publiquement leurs torts ou leurs fautes publiques. […] Laissez-moi achever, messieurs ; je crois que ce sera de meilleur goût ; je tiens à avoir mon affront jusqu’au bout, de même que j’ai mon public.
Voilà le vrai ; mais le public est ici le grand corrupteur. […] Si le public avait la tête assez forte, il se contenterait de la vérité. […] Dans les malheurs publics oui pourront venir, j’aurai donc ma conscience tout à fait en repos. […] Le public m’a eu autant qu’eux. […] Je n’ai existé pleinement que pour le public.
En effet, les hommes peuvent toujours cacher leur amour-propre et le désir qu’ils ont d’être applaudis sous l’apparence ou la réalité de passions plus fortes et plus nobles ; mais quand les femmes écrivent, comme on leur suppose en général pour premier motif le désir de montrer de l’esprit, le public leur accorde difficilement son suffrage. […] En bornant l’étendue des idées, on n’a pu ramener la simplicité des premiers âges ; il en est seulement résulté que moins d’esprit a conduit à moins de délicatesse, à moins de respect pour l’estime publique, à moins de moyens de supporter la solitude. […] Dès qu’une femme est signalée comme une personne distinguée, le public en général est prévenu contre elle. […] C’est le public qui entend la calomnie, c’est la société intime qui peut seule juger de la vérité. […] Les femmes sentent qu’il y a dans leur nature quelque chose de pur et de délicat, bientôt flétri par les regards même du public : l’esprit, les talents, une âme passionnée, peuvent les faire sortir du nuage qui devrait toujours les environner ; mais sans cesse elles le regrettent comme leur véritable asile.
Il m’intéresserait, ou l’épreuve servirait, de voir si énoncé en public, ce propos va produire pareil effet. […] Il s’agit d’une retouche, faite afin d’en éclairer le sens, à la loi qui régit momentanément notre Domaine public. […] » Il résulte que le commerçant hérite, ou touche, en plus de son mérite personnel, sur la valeur intrinsèque et publique de l’écrit : car c’est, autant que la sublimité, l’admiration accumulée par les lecteurs qui gonfle un grand nom. […] * * * L’État ne doit se désintéresser, entièrement, d’une source, très pure, d’honneur national, et il n’est pas à même d’y employer les deniers publics. […] Le Domaine public, dont il a été parlé, représente, en l’espèce, parfaitement, la place publique ou quelque édifice.
Les mœurs privées sont aussi belles que les mœurs publiques. […] Un pyrrhonisme aussi achevé n’est bon qu’à rejeter le public vers les croyances établies. […] Toujours quelque favori ou ennemi public provoque des démonstrations publiques. […] Le discours s’élève et s’élargit en même temps que le public se dégrossit et se multiplie. […] Ils ont épuré leurs mœurs privées, ils purifient leurs mœurs publiques.
Ils communiquaient entre eux et avec le public par leurs livres seulement. […] Les poètes ses contemporains étaient loin de ratifier les jugements du public. […] Ils étaient comme des sentinelles avancées, destinées à protéger la liberté publique. […] Nous nous applaudirons de voir la France si fertile en hommes éclairés et en amis du bien public. […] Au milieu des crimes et des calamités publiques, la littérature ne put jouer qu’un rôle bien secondaire.
Et puis la critique de ce qui se parle publiquement réalise bien à l’état pur cette critique du public par le public, ou plutôt, comme dit Sainte-Beuve, du critique qui n’est que le secrétaire du public. Comme l’éloquence de réunion publique (tous les arts de la parole sont frères), elle n’a d’influence sur le public que si elle porte de l’eau à la rivière, je veux dire si elle dit ce que pense déjà le public. […] Et le vrai public ne peut qu’acheter, lire et dire. […] Et qui fait la critique publique ? […] Même lorsque le public applaudit au théâtre une belle pièce, nous hésitons à dire que le public a du goût.
Le public, sur la foi des récits de société, s’était attendu à tant de rire et de folie qu’il n’en trouva pas assez d’abord. […] En matière de publicité et de théâtre, il est maître passé, il a perfectionné l’art de l’affiche, de la réclame, de la préface, l’art des lectures de société qui forcent la main au pouvoir et l’obligent d’accorder tôt ou tard la représentation publique ; l’art de préparer ces représentations par des répétitions déjà publiques à demi et où déjà la claque est permise ; l’art de soutenir et de stimuler l’attention, même au milieu d’un succès immense, moyennant de petits obstacles imprévus ou par des actes de bruyante bienfaisance qui rompent à temps la monotonie et font accident. […] Il y avait eu un certain nombre de répétitions à demi publiques : on allait passer outre et jouer. […] J’ai donné ma pièce au public pour l’amuser et non pour l’instruire, non pour offrir à des bégueules mitigées le plaisir d’en aller penser du bien en petite loge, à condition d’en dire du mal en société. […] On peut juger de l’éclat et de l’étonnement que produisit cette nouvelle dans le public.
Convenez qu’il fait beaucoup d’honneur à la mémoire de ce Philosophe ; il ne le taxe pas seulement d’avoir été athée & libertin, il le défere encore en public comme un Apôtre d’athéisme & de libertinage ; il veut qu’il ait fait commerce de ses bienfaits, & qu’il y ait attaché un prix doublement déshonorant. […] Pour montrer combien il respecte la Magistrature, il dit du Parlement de Paris, que c’est un Corps d’assassins, & cite en toutes lettres deux de ses Membres les plus respectables & les plus vénérés du Public, comme les auteurs d’un jugement, qu’il appelle atroce. Il porte la démence jusqu’à soutenir que le Fanatisme du Parlement avoit soulevé contre lui tous les honnêtes gens qui avoient applaudi à sa destruction…… Voilà pourtant, Monsieur, les Libellistes auxquels vous prétendez que je dois répondre : voilà pourtant les hommes qui recommandent la tolérance, qui s’indignent contre la Critique, & qu’une certaine portion du Public ne rougit pas d’honorer comme les vengeurs de la raison & les bienfaiteurs de l’humanité. […] N’est-ce pas trop présumer de la crédulité & de l’indulgence publique, que de recourir à de si indignes ressources pour se venger d’un blâme qui ne paroît, par ces ressources mêmes, que trop mérité ?
On voudroit qu’ils apprissent à se respecter eux-mêmes, à craindre les écarts & le sort de leurs semblables ; à mieux user des dons qu’ils ont reçus de la nature ; à ne se point rendre le jouet du public. […] On s’insulte, on s’injurie ; on se nuit réciproquement ; on devient la fable du public. […] Il les justifie encore sur leur familiarité avec les auteurs Latins, dont ils prennent insensiblement le ton, les manières & le stile injurieux ; sur l’indépendance attachée à la profession d’homme de lettres ; sur le goût du public pour la satyre ; plaisantes raisons pour dispenser un sçavant de la première science dont tout homme doit se piquer, celle de sçavoir vivre. […] On se flatte d’avoir inséré, dans presque tous les articles, des traits ignorés d’une grande partie du public, sur-tout dans ceux qui regardent nos écrivains les plus distingués.
Ils ont compilé de volumes, pour apprendre au public que les Livres qu’il pouvoit lire, se réduisoient à un très-petit nombre. […] N’en blâmons pas les Auteurs ; c’est le public qui les a gâtés ; il veut du frivole, & nos Ecrivains n’ont pu s’empêcher de se tourner vers cet objet du goût dominant du siécle. […] M. l’Abbé Goujet pensoit différemment : aussi il lui a fallu dix volumes pour l’histoire des Rimailleurs qui ont précédé l’aurore de la belle Poésie en France ; & pour s’être trop appesanti sur les mauvais Poëtes, il s’est vu obligé par le dégoût du public, à abandonner ce qu’il auroit pu écrire sur les bons. […] Je n’ai voulu choquer personne ; mais je n’ai pas voulu non plus choquer le public, en lui cachant les défauts qu’il désiroit connoître.
De l’art de reconnoître la main des peintres Le public écoute avec plus de prévention les peintres qui font le procès à un tableau, que les poëtes qui font le procès à un poëme. On ne sçauroit que loüer le public de placer ainsi sa confiance. […] Ainsi la réputation du peintre, dont le talent est de réussir dans le clair-obscur ou dans la couleur locale, est bien plus dépendante du suffrage de ses pairs, que la réputation de celui dont le mérite consiste dans l’expression des passions et dans les inventions poëtiques, choses où le public se connoît mieux, qu’il compare par lui-même, et dont il juge par lui-même. […] Quoique l’expérience nous enseigne que l’art de deviner l’auteur d’un tableau en reconnoissant la main du maître, soit le plus fautif de tous les arts après la médecine, il prévient trop néanmoins le public en faveur des décisions de ceux qui l’exercent, même quand elles sont faites sur d’autres points.
Entre les divers sentiments publics, c’est le mépris avant tout, et à tout prix, qu’il faut éviter et dont celui qui gouverne ne doit jamais laisser approcher de lui l’ombre même et le soupçon. […] L’animosité du public est poussée si loin qu’il craindra d’être compromis, et vraiment peut-être cela ferait tort à son crédit. […] Je crains aussi que le public (ne) nous force à prendre un parti beaucoup plus humiliant pour les ministres et beaucoup plus fâcheux pour nous, en ce que nous n’aurons rien fait d’après notre volonté. […] Elle serait disposée à le mieux comprendre et à tirer de lui meilleur parti que Louis XVI qui n’entend rien à cette nature puissante d’homme public, de tribun éloquent, et au double rôle qu’elle est obligée de jouer dans le temps même où elle se donne. […] Il y avait déjà une saisie opérée à la poursuite du ministère public pour ce volume et quelques autres d’une même collection, sous l’imputation d’outrage à la morale publique.
S’il gagna ce procès-là devant le Parlement, il le perdit devant le public : Beaumarchais est accablé de libelles et généralement haï en ce moment, écrivait Mallet du Pan à cette date (1787). Son Tarare n’attire pas moins la foule, et la vindicte publique est oubliée. […] Il savoura avec douceur ce suprême applaudissement, et se dit que sans doute le public était devenu plus moral, puisqu’il accueillait un si excellent ouvrage. […] Nous voudrions, par cette impression, effacer celle que laissent d’autres lettres publiques de Beaumarchais, écrites dans le même temps, et où il s’est oublié, par un dernier retour, à d’indignes irrévérences. […] Maintenant, j’accorderai volontiers que, dans toutes les occasions où il le put, Beaumarchais chercha à concilier son intérêt particulier avec l’intérêt public, à les confondre en quelque sorte pour en tirer du même coup profit, honneur, popularité.
Mais de la conscience privée le christianisme devait finir par s’élever dans la conscience publique par l’universalisation de ses principes de justice réciproque. […] 5º Quel est le gouvernement le plus propre à développer en lui et dans le peuple, la raison publique ? […] C’est ainsi que Pythagore, Zoroastre, Socrate, Platon, avant d’avoir une doctrine publique, eurent un auditoire de disciples bien-aimés qui répercutait leur parole à l’univers. […] L’intelligence cultivée (les lettrés) est le seul titre aux fonctions publiques. […] Ils montent, selon leur aptitude, au rang de mandarins ou de fonctionnaires publics de toute espèce.
Toute l’autorité de la vertu publique, toute la majesté du peuple romain, se levaient avec lui quand il se levait pour prendre la parole. […] Mais il fut consumé par sa propre flamme : son corps fragile ne put supporter ces excès d’études, de parole publique, de clientèle et de gloire dont il était submergé. […] Il ouvrit cette maison à toute heure à la foule des clients ou des plaideurs qui assiègeaient à Rome le seuil des hommes publics. […] Le même décret ordonnait que ses maisons seraient rebâties aux frais du trésor public. […] Il avait de plus, dans plusieurs harangues immortelles, soufflé dans Rome le feu de la colère publique contre Antoine.
Sarcey a voulu se réduire à enregistrer le goût du public, que personne ne sait flairer, démêler, dégager comme lui ; au lieu de hausser ce public à lui ; il s’est rabaissé à ce public. […] Sarcey s’est acquis sur le public une autorité incroyable. […] Becque973 y a usé son rare talent, son ironie aiguë, son observation sèche et perçante : le public a méconnu l’originale valeur de ces œuvres dont l’impression était douloureuse et dure. […] Certaines gaucheries d’exécution, et, je crois, pour la dernière pièce, une certaine erreur de l’auteur lui-même sur la valeur morale des actes de son personnage principal, ont fait qu’il n’a pas encore trouvé auprès du public ni auprès de la critique la justice qui lui est due. […] Jules Lemaître, qui, sans répudier bruyamment la technique établie, sans déconcerter les habitudes du public, sans prétention philosophique aussi et sans fracas de symboles, nous a donné la sensation rafraîchissante d’une originalité sincère.
Nous avons, depuis plus de trente ans, polissonné avec les choses les plus sacrées, la Religion, la Morale, les Pouvoirs publics… et aujourd’hui, il n’est pas permis de juger librement M. […] » C’est nous, en effet, nous les critiques qui tenons encore pour la grande sornette catholique, c’est nous race de critiques, dénonciateurs, pourvoyeurs de ministères publics, comme elle nous appelle (page 106), cette charmante, qui l’avons barbouillée d’adultère ! […] Mirabeau disait : « tout homme courageux est homme public le jour des fléaux, et les mauvais livres sont des fléaux », Madame ! […] Comme Alexandre Dumas, cet autre conteur facile, elle a toujours eu l’affreuse fortune de plaire à tous les publics ! […] Comment a-t-elle impressionné le public ?
Je voudrais y voir aussi une petite amende honorable au public qui n’a pas fait aux beaux poèmes de la Mer, très mêlés, je sais bien, mais où l’on trouve des choses exquises, de véritables petits chefs-d’œuvre, un accueil aussi empressé qu’ils le méritaient. […] Mais Banville aura des successeurs, et le théâtre verra fleurir des œuvres lyriques fantaisistes, tendres et farces simultanément, qui peut-être n’auraient plus de public si des entreprises comme le Chemineau ne maintenaient en appétit de rythmes et d’images les attentions contemporaines. […] Peut-être les publics qui viendront après nous voir le Chemineau auront-ils l’admiration plus calme. […] Vous ne sauriez croire quel en a été l’effet sur le public de l’Odéon. […] Et le public a été de cet avis.
On fournit ainsi, pendant dix ans, à la malignité du public. […] La sureté publique exigea qu’on fit revivre la sévérité des loix contre les libèles & tout ouvrage diffamatoire. […] que le cri public ait été contre lui, dans le temps des Couplets ? […] Mais une trop grande confiance en lui-même, l’envie de braver la voix publique & de confondre ses ennemis, la protection déclarée de deux ministres, Pontchartrain & Voisin, lui firent risquer tout. […] Cependant le public, sensible au sort des malheureux, commence à le plaindre.
Pourquoi ne participeroit-il pas à l’instruction publique ? […] Tout le Public en jouit également & à peu de frais. […] La coutume a fait de ce brigandage un acte public contre lequel personne ne réclame. […] Faut-il dire le mot à la portion majeure du Public ? […] Si le Public, en gros, n’étoit pas méchant, les Auteurs vivroient sans se faire la guerre.
Quel public, ou plutôt quels publics, pour cette génération, remplaceront celui-là ? […] Mais ce public ce n’est pas sur les Vingt ans en 1789 qu’il a agi. […] Tel est le second public possible d’une littérature entre 1792 et 1802, et, d’un autre point de vue, entre 1792 et 1815, — un retour du public traditionnel, en somme, de la République des Lettres. […] Fille aînée de l’Église, elle a trahi sa mère par des péchés publics. […] Il n’y a plus seulement un public, il y a des publics.
Ingrat public ! […] Et le public, sans y réfléchir, partage assez l’opinion de l’auteur. […] À peine aperçue, la planète devient comme une propriété publique. […] Le public n’allait pas encore plus loin. […] S’il s’égare, le public est là pour le ramener bien vite.
Ils dépendent des salons, de la politique, des journaux, des dispositions du public. […] Examinons-la sous les deux aspects qu’elle présente suivant qu’on la considère du côté du public ou du côté de l’écrivain. […] Quoi d’étonnant si le goût public s’épaissit au lieu de s’affiner ? […] Il n’y a pas d’art dans une atmosphère lourde et sous les regards d’un public barbare. […] Elles viennent à la fois du côté du public et du côté de l’écrivain.
La patience publique s’est lassée de cette comédie bruyante jouée au profit d’une autolâtrie d’emprunt. […] Un vrai poète n’est jamais l’écho systématique ou involontaire de l’esprit public. […] La critique, d’ordinaire si élogieuse, a rudement traité ce poème, et le public lettré ne l’a point lu ou l’a condamné. La critique et le public sont des juges mal informés. […] Le public lettré ne tardera pas à rejeter avec mépris ce qu’il acclame aujourd’hui dans son aveugle engouement.
D’abord la coutume immémoriale, différente selon la province, selon le titre de la terre, selon la qualité et la condition de l’individu ; ensuite la volonté du roi qui a fait écrire et qui a sanctionné la coutume Cette volonté elle-même, cette souveraineté du prince, ce premier des pouvoirs publics, qui l’autorise ? […] Par cette délégation permanente, un grand office public est soustrait aux compétitions, fixé dans une famille, séquestré en des mains sûres ; désormais la nation possède un centre vivant, et chaque droit trouve un protecteur visible. […] Ils ne sont qu’une flatterie publique des passions régnantes. « Plus la comédie est agréable et parfaite, plus son effet est funeste », et le théâtre, même chez Molière, est une école de mauvaises mœurs, « puisqu’il excite les âmes perfides à punir, sous le nom de sottise, la candeur des honnêtes gens ». […] » — La première propriété fut un vol par lequel l’individu dérobait à la communauté une partie de la chose publique. […] Et l’autorité publique n’est-elle pas toute en leur faveur ?
Les préjugés du public ne leur étoient pas même favorables. […] Il a donné l’éloge des courtisannes publiques. […] Cette contestation devint publique dans toute l’Italie. […] Le public fut inondé de critiques outrées & même indécentes. […] Le public nous jettera des pierres ».
Trop de gens — même parmi ceux qui font profession d’écrire l’histoire littéraire ou de diriger le public dans le jugement des ouvrages anciens et nouveaux — trop de gens ne sont habitués qu’à lire rapidement comme on lit un-journal ou comme on lit un roman, à parcourir plutôt qu’à lire. […] Ce jour est venu quand les textes français sont devenus objets d’étude, quand ils ont, en vieillissant, perdu pour les nouvelles générations cette clarté apparente d’expression et d’idée dont le premier public se contentait ; enfin quand les écoles et les collèges s’en sont emparés pour en faire les instruments de l’éducation de la jeunesse. […] Il sera bon de partir de là pour aller à la recherche du sens originel, du sens de l’auteur, et puis du sens du premier public, et des sens de tous les publics, français et étrangers, que le livre a successivement rencontrés. […] Il en faudrait inférer que le public français (dans sa très grande majorité) n’a jamais ni compris ni senti sa littérature. […] Je veux seulement indiquer que selon qu’on aura affaire ou non à un public ignorant la langue du modèle dont l’ouvrage français est inspiré, on orientera différemment l’étude ; et la comparaison même de l’imitation et du modèle ne se fera pas de même dans les deux cas.
LE PUBLIC. […] C’est une ivresse, et sur une âme délicate l’effet serait trop fort ; mais il convient au public, et le public l’a justifié. […] Dickens aime à les produire, et son public à les éprouver. […] Le public. […] Il ne servira qu’à instruire et à amuser le public.
Presque tous les ouvrages sortent d’un salon, et c’est toujours un salon qui, avant le public, en a eu les prémices. […] À tout le moins, elle résume le procédé par lequel les philosophes du siècle ont gagné leur public, propagé leur doctrine et conquis leur succès. […] Il ne s’agit ici que des grands hommes, des maîtres de l’esprit public. […] Quand le talent de l’écrivain rencontre ainsi l’inclination du public, peu importe qu’il dévie et glisse, puisque c’est sur la pente universelle. […] Devant leur complicité, le public ne fait guère de résistance, et la maîtresse n’a pas de peine à convaincre ceux que la servante a déjà séduits.
Cet Ouvrage fut d'autant plus accueilli du Public, que les antiquités, les loix, les usages & les mœurs privées des Romains, n'avoient encore été expliqués que d'une maniere confuse & peu instructive. […] La science, l'érudition, & l'amour du travail, sont des titres à l'estime publique ; mais ces qualités ne sont pas capables de justifier l'orgueil qui le dominoit & qui transpire souvent dans ses Ouvrages. […] « Quand il avoit communiqué à quelqu'un la moindre chose concernant les Belles-Lettres ou quelque autre Science, il vouloit non seulement qu'on lui en fût gré, mais même qu'on lui en témoignât une reconnoissance publique dans les Livres qu'on publioit, & qu'on le fît toujours avec de grands éloges….
Dupin allait-il aborder le public pour la première fois depuis sa grande et irréparable faute ? […] Arrivant à parler de lui-même et de l’éloquence de barreau et de tribune, l’orateur, que la froideur de l’auditoire semblait de plus en plus gagner, s’est retrouvé un moment : il caractérisait l’improvisation, il la montrait inégale, incorrecte peut-être, mais indispensable, irrésistible dans les luttes publiques, toujours sur la brèche, le glaive acéré et nu : « L’orateur, s’est-il écrié alors, n’a pas un cahier à la main, il ne lit pas, son œil ne suit pas des lignes, son geste n’y est pas enchaîné ; mais il vit, il regarde, il s’anime de l’impression universelle, etc., etc. » Et, tout en parlant ainsi, son doigt froissait le papier, son regard le dédaignait, et, l’oubliant durant quelques minutes, il s’est mis à lancer de rapides étincelles que le public lui a rendues en longs applaudissements. […] Viennet sourit ; le président-orateur s’enfonça plus avant dans le large fauteuil, et le public, qui jouissait de la pantomime, applaudit.
Qu’il évite seulement de se commettre avec le public attroupé, je veux dire de composer pour le théatre. […] Si notre artisan imitateur manque de sens, il emploïe hors de propos les traits et les expressions de son modele, et ses vers ne nous offrent que des reminiscences mal placées : il se conduit dans la production de ses ouvrages comme dans leur composition : il affronte le public rassemblé avec plus d’intrepidité, que Racine et Quinault n’en avoient dans de pareilles avantures. […] Plus méprisé à mesure qu’il est plus connu, son nom dévient enfin l’appellation dont le public se sert pour désigner un méchant poëte. […] Le public regarde un ouvrage dont il est en possession, comme un bien qui lui seroit devenu propre, et il trouve mauvais qu’on lui fasse acheter une seconde fois ce qu’il croit avoir déja païé par ses loüanges.
Le public, à son tour, on peut le dire, n’avait pas civilisé non plus les savants. […] Tous ses écrits de cette époque ne furent plus composés qu’en vue de quelque circonstance particulière et en quelque sorte domestique ; moins que jamais le public apparut à sa pensée, ce grand public prochain qui allait être le seul juge. […] L’inscription en resta là, et le public aussi. […] Il y intervint lui-même par de nouveaux écrits publics. […] Telle est l’inconséquence toujours : on n’écrit pas pour le public, et on imprime pour lui.
Les trahisons d’autrui donnaient à son habile indécision un air de persévérance, et l’immoralité publique élevait au-dessus de son prix son inactive vertu. […] C’est acheter la paix publique à bon marché que de laisser se déchirer, pour des rites religieux, des hommes qui autrement s’attaqueraient aux lois du pays. […] Ouvrez toute grande la porte de la croyance publique, il y aura toujours des gens qui se piqueront de rester dehors. […] L’apaisement de la colère publique, et une contestation, habilement soulevée par un de ses amis entre les deux chambres, le firent acquitter par la Chambre des lords. […] Public spirit of the whigs.
l’enjeu de quelques rhéteurs au jeu stérile de la tribune et des feuilles publiques jetées tous les matins au feu des animosités civiles, pour alimenter les vaines factions de cour et de rue qui ne produisent que fumée ou lueurs sinistres dans l’esprit des masses découragées ? […] Buchez et Roux, qui a été mon manuel historique, toujours ouvert sur ma table pendant les deux années consacrées par moi à écrire cette histoire, je n’ai pas négligé une seule information verbale possible à obtenir des parents ou des amis des personnages, même odieux, dont j’avais à sonder la vie publique ou la vie intime. […] Mais je veux porter dans l’histoire publique l’honnêteté de la conscience privée, peindre les acteurs non avec les traits du préjugé et de la vengeance, mais avec leurs propres traits. […] Elle m’accorda un libre accès dans sa retraite et me laissa feuilleter à mon aise, et page par page, sa mémoire présente, intarissable et passionnée sur tous les détails intérieurs ou extérieurs de la vie privée et de la vie publique de Robespierre. […] Il avait été un des confidents les plus initiés dans les pensées et dans les actes politiques du chef du comité de salut public.
C’est du critique seul que je m’occuperai aujourd’hui, et il le mérite bien par le caractère singulier, neuf, piquant, paradoxal, bien souvent sensé, qu’il nous offre encore, et qui frappa si vivement non pas le public, mais les gens du métier et les esprits attentifs de son temps. […] Cette conversation française, telle qu’un étranger peut l’entendre tous les jours au café de Foy et dans les lieux publics, me paraît le commerce armé de deux vanités. […] nous sommes bien revenus de ces prises à partie du public par les auteurs. Ce public, tel que nous le connaissons aujourd’hui, ne serait pas si difficile sur son plaisir : qu’on lui offre seulement quelque chose d’un peu vrai, d’un peu touchant, d’honnête, de naturel et de profond, soit en vers, soit en prose, et vous verrez comme il applaudira. […] Auger qui a prononcé à une séance publique de l’Académie les mots de schisme et de secte.
Le théâtre, la tragédie, qu’adorait Voltaire et où il excellait selon le goût de son temps, le livrait au public par un plus noble côté. […] Il avait fait semblant de résister aux avances de ceux qui voulaient qu’il la donnât au public. […] Je ne sais si je n’ai pas renoncé entièrement à l’envie dangereuse de me faire juger par le public. […] Le public est une bête féroce : il faut l’enchaîner ou la fuir. […] Irai-je quitter tout cela pour être déchiré par l’abbé Desfontaines, et pour être immolé sur le théâtre des farceurs italiens à la malignité du public et aux rires de la canaille ?
Malheureusement pour Monsieur, toutes ces menées commencent à être connues et ne lui laissent ni considération ni affection publique. […] Je ne suis pas si injuste de vouloir vous interdire la conversation très-naturelle des jeunes gens que vous connaissez, de préférence à ceux que vous ne voyez qu’en grand public, mais c’est un point essentiel que la distinction des gens, et que vous ne devez pas négliger, l’ayant si bien acquis au commencement. […] Il vient tôt ou tard un moment où le monde vous quitte, où le public qui vous avait porté se désenchante de vous, se retire de vous ; qu’au moins il n’y ait rien de notre faute. […] Vous dites que vous n’en êtes pas fâchée ; vous devez avoir vos bonnes raisons ; mais le public, depuis un temps, ne parle plus avec tant d’éloge de vous, et vous attribue tout plein de petites menées qui ne seraient point convenables à votre place. […] On rabattra tant qu’on voudra des pronostics, mais ils éclatent à chaque page, et ces mots sont écrits en toutes lettres dans la Correspondance : « Vous perdez beaucoup dans le public, mais surtout chez l’étranger… Votre avenir me fait trembler.
Il attribue à cette précaution, après son caractère reconnu d’intégrité, le crédit qu’il obtint auprès de ses compatriotes dans ses diverses propositions d’intérêt public. […] Dans la première partie de sa vie, bien qu’il paraisse plein d’inventions et un grand promoteur en toute matière d’utilité publique, Franklin ne l’est jamais que dans la mesure immédiate qui est applicable ; il ne sort point du cadre ; il est avant tout pratique. […] » Et lui, avant de rien proposer directement, avait soin d’y préparer l’esprit public en en écrivant quelque chose là-dessus dans sa gazettef. […] Il commença à entrer dans les affaires publiques proprement dites en 1736, à l’âge de trente ans, en qualité de secrétaire de l’Assemblée générale. […] [1re éd.] préparer l’esprit public en écrivant quelque chose là-dessus dans sa gazette g.
Necker, qui a tracé des portraits de société curieusement observés, en a fait un qui commence ainsi : « C’est une véritable tactique que la conduite d’un homme public occupé à cacher son ignorance. […] Le premier ouvrage qui appela sur lui avec éclat l’attention publique fut l’Éloge de Colbert, couronné par l’Académie française en 1773. […] Pour exprimer que Colbert, dès sa jeunesse, s’occupait des choses publiques et qu’il échappait aux passions personnelles, M. […] Il y avait, d’ailleurs, quelques belles pensées, mais rendues dans une langue gênée et contrainte : « À chaque instant le bien public, disait-il, lui demande le sacrifice de son intérêt, de ses affections et même de sa gloire. […] On vit la douce et jolie duchesse de Lauzun, celle même que nous avons vue précédemment (tome IV des Causeries) si timide de manières et si effarouchée, s’attaquer dans un jardin public à un inconnu qui parlait mal de M.
Renan a voulu les raconter au public. […] Émile Zola au public. […] C’est s’exposer à la risée publique ! […] Le public s’étonne et murmure. […] dit le public, regardant les roulettes.
» Mais comme cet éloquent confrère est le même qui nous propose d’admirer en 1860 les romans de Mlle de Scudéry, peut-il trouver étonnant qu’à de tels caprices rétrospectifs le public oppose ses caprices présents, qu’il y ait des représailles bien légitimes de l’esprit moderne plus positif, et qu’aux fades abstractions quintessenciées on préfère les réalités, fussent-elles un peu fortes ? J’ai eu beau me tâter, je n’ai pu me repentir ; mais, mon cher directeur, je suis pourtant resté un peu effrayé de voir à quel point la critique littéraire devient difficile, quand on n’y veut mettre ni morgue ni injure, quand on réclame pour elle une honnête liberté de jugement, le droit de faire une large part à l’éloge mérité, de garder une sorte de cordialité jusque dans les réserves, Depuis, en effet, que j’ai parlé des deux romans qui, dans ces dernières années, ont le plus piqué l’attention du public et auxquels je n’avais accordé, ce me semble, que des éloges motivés et tempérés, je n’ai cessé, en toute occasion, d’être dénoncé par des confrères vigilants comme un critique peu moral, presque un patron d’immoralité. […] et gardera le silence sur Les Fleurs du mal. » Il est vrai que l’auteur de cet article diffamant avait publié, vers le temps où paraissait Fanny, un petit livre anodin et assez agréable, Les Païens innocents ; j’y avais remarqué assez d’esprit, mais de celui qui cherche plutôt qu’il ne trouve, et qui est tout plein de tortillage ; et je n’en avait dit mot au public, lequel d’ailleurs s’en était peu occupé. […] Après la bourrasque de Daniel, le public, et même le public des critiques, qui n’est pas inflexible, reviendra. […] Rouland, ministre de l’Instruction publique
Cousin a eu une heureuse idée, celle de revoir, de retrouver en quelque sorte son Cours de 1815 à 1820, et de le donner au public aussi fidèlement qu’il a pu le ressaisir, mais sans se faire faute au besoin de suppléer l’éloquent professeur de ce temps-là par le grand écrivain d’aujourd’hui. […] Dans l’enseignement public, elle n’était guère de nature à être ouvertement et franchement professée. […] Cousin il était réservé d’enflammer à la fois et les jeunes maîtres et le jeune public. […] Aussi cet esprit de feu qui avait animé sa parole publique ne lui a pas fait défaut dans la solitude du cabinet, et l’ancien travail refondu en est ressorti très-vivant. […] Cousin, faire valoir, comme elle le mérite, cette révision patiente et vive qui témoigne d’un grand respect pour le public et d’un noble souci de l’avenir.
Anatole France Monsieur, Vous avez honoré d’une réponse publique la lettre que je vous avais adressée à propos de questions littéraires nouvelles. Je vous remercie de la courtoisie du fait et des termes, sans prendre pour moi les ironies légères qui relèvent votre prose, et qui vous sont un moyen facile et louable de faire agréer du « Grand Public » certaines idées dont la gravité l’effaroucherait si elle ne se masquait de sourire. Mais sur ces idées mêmes, j’ai tant à dire et, comme vous l’avez pensé, le sujet intéresse si fort quiconque n’est pas indifférent à la littérature, que je ne crois point excéder mes droits en vous demandant congé, Monsieur, de faire à votre réponse publique puisque aussi bien elle se refuse à conclure et reste hérissée de points d’interrogation une réponse publique aussi D’ailleurs je me défends d’avance de toute ridicule prétention à rien vous enseigner ; vous parlez au nom de l’expérience et avec l’autorité que des livres excellents vous donnent : je ne vous opposerai guère que des intuitions, et no puis compter que sur l’incertain avenir pour légitimer par des œuvres les théories. […] Le public a besoin de croire que les augustes poètes que nous admirons comme lui et dont les ombres lumineuses sont des soleils de nos rêves, s’abandonnèrent sans calcul au caprice de leur tempérament, parce qu’ils dédaignèrent de dire leur esthétique. […] Le public et les poètes ne suivent guère le même chemin.
. » Kœnig, indigné d’un pareil jugement, en appelle au public, & renvoie sa patente d’académicien de Berlin. […] Cet appel, écrit avec cette chaleur de stile que donne un juste ressentiment, mit le public dans les intérêts de l’auteur. […] Le président de l’académie ne vouloit point de conseillers qui partagent sa considération dans le public, ni sa faveur auprès du prince. […] Le roi de Prusse en donna des marques de mécontentement sur lesquelles la voix publique a beaucoup varié, & sur lesquelles on ne sçait rien de certain. […] Les comédiens intéressèrent le public en sa faveur.
Les luttes de ce pays qui a offert à lui seul presque autant de combats entre ses barons et ses rois que le Moyen Âge tout entier, ses guerres civiles des Roses, l’implication effroyable de ses droits de succession, l’entrechoquement des partis et les brouillards de tant de sang versé qui s’étendent sur toute son histoire comme les autres brouillards sur son sol, la législation anglaise, avec ces mille coutumes qui peuvent dormir des siècles, mais qu’on n’abolit pas, et l’esprit public enfin, l’esprit public qu’on n’entendait, certes ! […] Il est vrai que, sous le dernier des Stuarts, cette théorie, qui saignait encore du coup de hache qui avait fait tomber la tête de Charles Ier, fut définitivement mise en pièces, mais elle n’était pas tombée du ciel comme un bouclier salien, et, pour qu’elle se fût si souverainement posée, il fallait qu’elle répondît à des sentiments publics, à des idées qui avaient cours. […] La prérogative royale ne fut si véhémentement repoussée par l’esprit public d’alors que parce que Jacques II était catholique, et qu’il avait — l’Angleterre ne l’ignorait pas ! […] En le prenant dans les faits les plus publics de sa vie, il n’a jamais été — qu’on le croie bien ! […] Quant aux cruautés qu’on lui reproche, quant à ces terribles et vivants témoignages qu’on invoque : Jeffreys et le colonel Kirke, il faut se rappeler les idées d’un temps qui croyait que la première des vertus était la fidélité au prince, et ces mœurs publiques qui avaient été pétries dans le sang des guerres civiles, mais surtout, quand on est, comme Macaulay, l’auteur de la belle théorie des décimés de l’Histoire, il fallait savoir l’appliquer, pour l’honneur de la vérité et de la justice, fût-ce à ses ennemis !
Le public, qui en général n’aime point à croire aux grands hommes, rit de ces créations nouvelles, et se moque également de l’apothéose et de celui qui l’a faite. […] Au reste, il est également difficile et d’inspirer au public une admiration qu’il n’a pas, et de lui ôter celle qu’il a. […] Si le public les connaît, c’est à lui à les apprécier ; s’il ne les connaît point, ils le sont déjà. […] Comme ils ont un caractère qui leur est propre, et que leur auteur n’a voulu imiter ni Fontenelle ni personne, ils méritent d’être distingués ici comme ils l’ont été par le public. […] Depuis que cet ouvrage est écrit, il a paru des éloges d’un mérite distingué dans différents genres, et justement accueillis du public.
Et, le jour du concert, devant le public, spontanément, M. […] Il faut savoir gré à un chef de concert aussi musicalement doué, d’initier son public si nombreux et si ouvert, aux grandes pages de l’œuvre wagnérienne. […] Colonne qui a eu la bonne fortune de présenter au public le miraculeux Joachim. […] Ce nous est une joie bien vive d’enregistrer ici les ovations faites au maître par un public enthousiaste. […] Le succès a couronné ses efforts, le Wagner qui est aujourd’hui offert au public wagnérien, est enfin le vrai Wagner auquel nous devons tant d’admirables jouissances.
Chamfort enchérira lui-même sur cette doctrine du petit nombre des élus en matière de goût, quand il répondra à quelqu’un qui lui opposait sur un ouvrage le jugement du public : « Le public ! le public ! combien faut-il de sots pour faire un public ? » Nous aurons bientôt occasion de relever cette contradiction chez le futur révolutionnaire qui, après avoir tant méprisé le public, accordera tout au peuple. […] Il guérissait ou semblait en train de guérir lorsqu’il mourut d’une imprudence, dit-on, de son médecin, le 13 avril 1794, avant d’avoir vu la délivrance publique et la chute de Robespierre.
On ajoute qu’il demeure content de sa vie obscure, dans l’avilissement et dans le mépris public. […] Ce n’était que des demi-quarts d’heure et en public. […] Les habiles gens vous feront alors justice ; et les habiles gens décident toujours à la longue dans le public. […] Il lui recommande surtout en toute occasion « de chercher au-dehors le bien public autant qu’il le pourra, et de retrancher les scrupules sur des choses qui paraissent des minuties ». […] Les lettres de Fénelon, à cette date, jettent un profond et triste jour sur la décadence de l’esprit public et la détérioration des caractères et de la morale sociale.
Il a écrit dans son livre De la sagesse, en distinguant chez les hommes les divers genres de vie, soit tout à fait privée et intérieure, soit de famille, soit publique, que « de ces trois vies, interne, domestique, publique, qui n’en a qu’une à mener, comme les ermites, a bien meilleur marché de conduire et ordonner sa vie, que celui qui en a deux ; et celui qui n’en a que deux, est de plus aisée condition, que celui qui a toutes les trois. » Serait-ce dans ce sens tout philosophique qu’il voulait devenir ermite ou religieux ? […] C’est tout en vaquant à cette charge publique de prédication que l’auteur trouva le temps de répondre, dans une seconde édition (1593), aux critiques que les Protestants avaient faites de son livre. […] Il faut discerner la peau de la chemise39 : l’habile homme fera bien sa charge… ; il l’exercera, car elle est en usage en son pays, elle est utile au public, et peut-être à soi ; le monde vit ainsi, il ne faut rien gâter… » Voilà ce qu’on sent trop dans Charron, ce que les contemporains y voyaient peut-être moins distinctement que nous, et ce que son livre De la sagesse nous a appris à discerner en lui. […] Nous aurons à voir en quoi Charron, à son moment, a été un des précepteurs de la raison publique. […] Grün, dans La Vie publique de Montaigne, page 373-374, veut que leur connaissance ait commencé plus tôt qu’on ne l’admet communément ; il en allègue pour preuve un ex dono d’ouvrage, qui porte la date de juillet 1580.
La Correspondance, venant sur le tout, en quatre gros volumes, a payé les frais de cette indiscrétion des amis, de cet agacement de nerfs donné par eux au public et à ceux qui parlent en son nom. […] Il est curieux d’assister à ce partage, à cette hésitation telle qu’on la voit se dessiner dans ces lettres sincères où rien n’est arrangé en prévision du public. […] L’âme publique du poëte n’est pas éveillée encore ; il lui fallut quelque temps pour s’orienter. […] Simple employé dans les bureaux de l’Université, il craintdéjà l’envahissement du parti prêtre dans l’instruction publique : c’est le seul indice qu’on aperçoive de son opposition future. […] Béranger refuse ; il refuse d’être feuilletoniste comme il refusera plus tard d’être académicien, comme il refusera d’être homme public et de rester député, comme il avait refusé au début d’être chef ou sous-chef dans l’Université.
Michel Nicolas sur Jean-Bon Saint-André, d’abord pasteur protestant, puis conventionnel montagnard, membre du Comité de salut public, en mission auprès des armées navales ; puis dénoncé, mis en arrestation ; puis consul de France à l’étranger, captif en Orient, éprouvé par la persécution et le malheur ; puis enfin, à sa rentrée en France et pendant douze années, excellent préfet de Mayence sous le Consulat et sous l’Empire, un administrateur modèle, mort à son poste, au champ d’honneur, en décembre 1813, sous le coup de nos désastres, cerné par la guerre, les maladies, par tous les fléaux qu’amènent avec elles les défaites, et lui-même atteint et frappé du typhus qui sévissait dans ces contrées des bords du Rhin. […] Il s’adressa dans sa haute et froide impartialité à toutes les nuances, à toutes les couleurs d’opinions qui s’étaient dessinées depuis 1789 jusqu’au 18 brumaire, sans en exclure aucune, au côté droit comme au côté gauche des diverses Assemblées qui s’étaient succédé : il convenait pourtant que les Constituants lui donnaient plus de mal que d’autres à réduire et à employer ; les Conventionnels lui en donnèrent moins : ils avaient été amenés à comprendre mieux que les premiers que la liberté n’est pas tout, que le salut public doit passer même avant les principes, et que dans la vie des nations il y a telle chose qu’on ne saurait supprimer, le gouvernement avec ses nécessités à certaines heures. […] Jean-Bon Saint-André, quinze ans après environ, et déjà préfet de Mayence, ayant à prononcer un discours pour la première séance publique de la Société des Sciences et Arts dont on l’avait nommé membre (1804), y disait dans un sentiment de vérité et de modestie qu’il nous faut tout d’abord invoquer à sa décharge : « Citoyens, en paraissant pour la première fois au milieu de vous, étonné de la place que vos bontés m’ont assignée, je me demande à moi-même quels sont mes titres pour l’occuper. […] On raconte que dans les premiers mois où il siégeait à la Convention, Jean-Bon, au milieu de tous les soins et soucis que lui donnait la chose publique, trouvait encore le temps de diriger de loin l’instruction du fils de sa sœur, le jeune Belluc30, et que chaque courrier apportait à l’enfant ses devoirs corrigés. […] Nommé du Comité de Salut public lors du renouvellement en juillet 1793, il en devint aussitôt un des membres les plus actifs et les plus employés.
On connaît cet épisode qui émut si vivement le public sous le Directoire. […] La portion supérieure de son ouvrage est celle où il montre la décomposition de la société par les sophistes, espèce destructive si éloignée en tout de ces hommes à grand caractère et à grandes vues positives, qui ont fondé les sociétés et institué les peuples : « Le faux esprit philosophique est une lime sourde qui use tout. » Il distingue entre les diverses sortes de corruption publique : malgré sa bonté morale personnelle, il sait à quoi s’en tenir sur le fond de l’homme ; les passions étant les mêmes en tout temps, les mœurs aussi sont toujours à peu près les mêmes, ce ne sont que les manières qui diffèrent : mais la différence est grande, d’une corruption qui n’est que dans les mœurs, et à laquelle de sages lois peuvent remédier, d’avec cette corruption subtile qu’un faux esprit philosophique a naturalisée dans la morale publique et dans la législation. […] Le tableau que Portalis y trace de la France est de main de maître et accuse une touche plus ferme que celle qu’on rencontre dans ses discours publics ; il ose plus dans la familiarité et en causant. […] Chercher à la découvrir n’est pas un droit qui appartienne exclusivement aux fonctionnaires publics. […] Ces simples paroles qu’il a replacées depuis dans un discours public, mais dont on a ici la clef, nous rendent au vrai la définition des deux natures, et Portalis, sans y viser, s’y peignait fidèlement dans les derniers mots aussi bien que dans les suivants : La sagesse est l’heureux résultat de nos lumières naturelles et des leçons que nous recevons de l’expérience.
Il serait tout simple que le public, sevré de jouissances délicates, se rabattit sur une pâture d’un goût médiocre. […] Cette situation est triste, on en conviendra ; mais si elle résulte un peu de la faute de tout le monde, la responsabilité du public y est plus grande encore que celle des auteurs. […] À la vérité, le public dont nous parlons n’est pas le seul qui existe en France, heureusement ; mais pourtant c’est le public apparent, le public fort, le peuple souverain. […] Il osa se passer de tout cela et il fit bien, qui plus est ; car il donna à son public une nouveauté. […] Toutefois j’aime beaucoup mieux rester ce que je suis, c’est-à-dire dans les neutres, et me borner à trouver avec la partie désintéressée du public que M.
Mais ces regrets discrètement touchés et une fois exprimés ont fait place, de nos jours, à un deuil public, solennel, inconsolable. […] Il est tel poëte de nos jours qui a commencé d’être atteint de ce regret public de la fuite des années le jour où il a eu trente ans, et même on commence maintenant à gémir tout haut sur cette perte dès vingt-cinq. […] pour le commun des spectateurs et du public, et pour un commun même très-distingué, cet essai est utile, instructif, et donne à penser ; notre éducation ainsi s’achève, notre sens critique s’aiguise en divers sens : après Shakspeare, Sophocle. […] s’il venait un vrai poëte dramatique, combien il trouverait la place libre et le public disposé !
Ne vaudroit-il pas mieux se guérir de la démangeaison du Théatre, si on est sans talent, ou, si l'on en est pourvu, se borner à ne produire dans tout le cours de sa vie qu'une ou deux bonnes Pieces, que d'amuser le Public par des bagatelles qui passent bientôt de vogue, sans avoir le mérite de reparoître une seconde fois avec succès ? […] Ce n'est pas au caprice du Public à diriger la maniere des Auteurs : c'est aux bons Auteurs à fixer le caprice du Public, en lui présentant des Ouvrages d'accord avec le goût & la raison.
Si l’on pouvait, à différentes époques et à diverses reprises, faire une exhibition de la même œuvre, nous pourrions garantir la justice du public envers cet artiste. […] — J’entends par là envoyer à l’imprimeur du livret des légendes pour le public du dimanche. […] Muller croit-il plaire au public du samedi en choisissant ses sujets dans Shakespeare et Victor Hugo ? […] Gigoux, que la faveur publique faisait, il y a quelques années, marcher de pair avec les plus sérieux novateurs. […] Ce jeune artiste a déjà eu de beaux salons — sa statue est évidemment destinée à un succès ; outre que son sujet est heureux, car les pucelles ont en général un public, comme tout ce qui touche aux affections publiques, cette Jeanne d’Arc que nous avions déjà vue en plâtre gagne beaucoup à des proportions plus grandes.
Le seul problème des constitutions est donc de connaître jusques à quel degré on peut exciter ou comprimer les passions, sans compromettre le bonheur public. […] Ainsi l’on a vu la république Romaine déchirée, dès qu’une guerre, un homme, ou le temps seul a rompu l’équilibre. — On dira qu’en Angleterre il y a trois intérêts, et que cette combinaison plus savante, répond de la tranquillité publique. […] Ces hommes, séparés pendant le cours de leurs magistratures, par les exercices divers du pouvoir public, se réuniraient ensuite dans la nation, parce qu’aucun intérêt contraire ne les séparerait d’une manière invincible. […] Rien n’est plus contraire, il est vrai, aux premiers mouvements de la jeunesse, que l’idée de se rendre indépendant des affections des autres ; on veut d’abord consacrer sa vie à être aimé de ses amis, à captiver la faveur publique. […] Le public aussi, dont on avait éprouvé la faveur, perd toute son indulgence ; il aime les succès qu’il prévoit, il devient l’adversaire de ceux dont il est lui-même la cause ; ce qu’il a dit, il l’attaque ; ce qu’il encourageait, il veut le détruire : cette injustice de l’opinion fait souffrir aussi de mille manières en un jour.
Ce grand et magnifique édifice de vérités nouvelles ressemble à une tour dont le premier étage, subitement achevé, devient tout d’un coup accessible au public. Le public y monte, et les constructeurs lui disent de regarder, non pas au ciel et dans les espaces, mais devant lui, autour de lui, du côté de la terre, pour connaître enfin le pays qu’il habite. […] Mais on en conclurait à tort que le public verra juste ; car il reste encore à examiner l’état de ses yeux, s’il est presbyte ou myope, si, par habitude ou par nature, sa rétine n’est pas impropre à sentir certaines couleurs. […] Ses indices, sa durée, sa puissance. — Ses origines et son public. — Son vocabulaire, sa grammaire, son style. — Son procédé, ses mérites, ses défauts. […] « Urbanité, exactitude », ces deux mots qui naissent en même temps que l’Académie française sont l’abrégé de la réforme dont elle est l’organe et que les salons, par elle et à coté d’elle, imposent au public.
Le ministère Decazes succomba sous le coup : « Ceux qui luttaient encore contre la haine publique, écrivait Chateaubriand dans un fameux article du Conservateur (3 mars 1820), n’ont pu résister à la publique douleur. […] Si M. de Chateaubriand n’avait pas écrit cette partie politique de ses Mémoires, et s’il eût laissé le souvenir public suppléer à ses récits, on lui eût trouvé sans doute des écarts bien brusques et des inconséquences ; mais la grandeur du talent, la chevalerie de certains actes, la beauté historique de certaines vues, auraient de loin recouvert bien des fautes ; je ne sais quel air de générosité aurait surnagé, et jamais on n’eût osé pénétrer à ce degré dans la petitesse des motifs et des intentions. L’imagination publique, assez d’accord avec ses défauts, les eût, au contraire, protégés et agrandis. […] En voici les termes textuels : Je donne et livre à l’honorable Philip Henry Stanhope, autrement dit le vicomte Mahon, et à Edward Cardwell, de Whitehall, membre du Parlement, mes exécuteurs, administrateurs ou mandataires, toutes les lettres inédites, les papiers et documents d’un caractère public ou privé, imprimés ou manuscrits, dont je pourrai être possesseur à ma mort. […] R. le prince Albert ne soit livrée au public pendant la vie de l’un ou de l’autre sans avoir été préalablement communiquée à LL.
Je réponds, dans les termes d’un bon juge, que toute assemblée publique où les bienséances sont observées est une école utile… Il continue dans ce sens cette apologie des cafés. […] Dans son jugement de Rhadamiste, qui parut en brochure, le critique, après avoir reconnu qu’il y a dans la pièce des traits hardis, heureux, et des situations intéressantes, se met à la suivre scène par scène et à démontrer les invraisemblancesk, les incohérences du sujet, l’action peu liée, les caractères peu soutenus ; il n’en laisse à peu près rien subsister : Enfin, dit-il, je n’ai pas d’idée d’avoir jamais lu une tragédie plus embarrassée, plus fausse, et moins intelligible ; j’ai l’avantage de pouvoir dire ici tout ce que je pense, sans crainte de faire tort à l’auteurl ; car, ou je m’égare dans le jugement que j’expose, et en ce cas le public le vengera de moi, ou le public déférera à mes remarques, et en ce cas même il en rejaillira beaucoup de gloire à M. de Crébillon : on estimera à la vérité un peu moins sa pièce, mais il paraîtra d’autant plus grand, qu’il aura mieux trouvé l’art de fasciner les esprits, en leur cachant les défauts de sa tragédie à force de splendeur et de magnificence. […] Celui-ci lui ayant lu sa pièce du Lot supposé avant la représentation, il l’avait approuvée, et il se croyait comptable devant l’auteur et devant tous de son premier jugement : Il me semble, disait-il, que lorsqu’un ouvrage livré à notre censure nous a semblé bon, nous devons à l’auteur l’hommage public du jugement avantageux que nous en avons porté… Quand il me serait arrivé de trouver bon un ouvrage que le public aurait ensuite jugé mauvais, il n’y aurait pas grand mal à cela, et j’ose assurer que je serais en ce cas moins mécontent de moi, que si, dissimulant lâchement mon estime, je m’étais épargné cette espèce d’humiliation.
Nous dirons pourquoi tout à l’heure ; mais nous commençons par l’affirmer, sans craindre qu’on le nie ou qu’on le conteste : la critique vraie, — sympathique et sévère, — qui s’adresse au public de tous les lieux et de tous les temps, et non plus au petit public du carrefour ou du quart d’heure ; la critique, ce symbole d’ordre universel, est complètement étrangère à notre temps de mœurs lâches et d’individualités mesquines. […] Eh bien, pour commencer par les revues, qui restent plus longtemps que les autres journaux sous l’œil du public et dont la gravité et les développements touchent au livre, la Revue des Deux Mondes et la Revue Contemporaine, ces deux solitaires, nous offrent-elles le modèle et l’exemple de la critique que nous cherchons ? […] … où la voyons-nous dans ces revues où passent les uns après les autres des gens d’esprit, des gens de science, des gens d’infiniment d’agrément, qui viennent tous déballer leurs petites curiosités devant le public, lequel se plaît à ces différents déballages ? […] L’examen littéraire se partageant entre plusieurs plumes, dans ce cantonnement mobile de la Variété qui devrait être une forteresse et qui n’est qu’une place publique, nous avons, sur le talent des mêmes hommes et la tendance et la portée des mêmes ouvrages, les appréciations les plus contradictoires.
Le Français sociable et égalitaire, se rallie autour de son roi qui lui donne la paix publique, la gloire extérieure, et le magnifique étalage d’une cour somptueuse, d’une administration réglée, d’une discipline uniforme, d’une prépondérance européenne et d’une littérature universelle. […] Elle aura beau se discréditer d’abord par ses emportements et sa tyrannie ; atténuée par l’épreuve, elle s’accommodera par degrés à la nature humaine, et, transportée du fanatisme puritain dans la morale laïque, elle gagnera toutes les sympathies publiques parce qu’elle correspond à tous les instincts nationaux. […] Car remarquez qu’à l’inverse des autres aristocraties, ils sont instruits, libéraux, et marchent à la tête, non à la queue, dans la civilisation publique. […] Une proclamation de la reine interdit de jouer à aucun jeu ce jour-là, en public ou en particulier ; défense aux tavernes de recevoir les gens pendant le service. […] La religion ne reste pas en dehors et au-dessous de la culture publique ; les jeunes gens, les hommes instruits, l’élite de la nation, toute la haute classe et la classe moyenne y demeurent attachés.
Pourtant je crois qu’en art comme en politique, chacun se doit à tous ; c’est au public de choisir dans le contingent d’idées qui lui sont apportées, de faire une moyenne et de juger en dernier ressort. […] Sifflée pendant des années chez le brave Pasdeloup, la musique de Wagner fait maintenant la joie du Conservatoire et dit public de MM. […] Dans les stalles le public sera debout, tout entier aux clameurs de la rue. […] Le public également protestera. […] Si le public français veut l’entendre, il n’y a plus aucune raison pour lui refuser ce plaisir ; mais s’il n’en veut pas, de quel droit viendrait-on le lui imposer ?
Enfin, le Lehrbuch ne s’adresse pas au grand public ; il reste inaccessible (et à cause de la langue et à cause de la forme) à l’immense majorité du public français. […] La concentration d’un grand nombre de documents historiques dans de vastes établissements publics, ou à peu près publics, fut le résultat excellent de cette évolution spontanée. […] L’auteur a voulu plaire au public ou du moins a voulu éviter de le choquer. […] INSTITUTIONS PUBLIQUES (obligatoires). — 1° Institutions politiques : A. […] C’est que ces auteurs, s’adressant au public, ont l’intention d’agir sur lui.
Il était le public de ses amis, l’orchestre, le chef du chœur qui écoute et qui frappe la mesure. Il n’y a plus de public aujourd’hui, il n’y a plus d’orchestre ; les vrais M. […] La seule fonction publique de M. […] Joubert n’eut d’autres fonctions, sous l’Empire, que dans l’instruction publique, inspecteur, puis conseiller de l’Université par l’amitié de M. de Fontanes. […] M. de Chateaubriand dans les Débats du 8 mai, et M. de Bonald dans la Quotidienne du 24, ont consigné leurs publics regrets.
Moins de deux ans après, Mme Monmayeux mourut à Saint-Germain-en-Laye (11 novembre 1794), et le bruit public fut qu’elle s’était tuée. […] Dans ce cas, le public est toujours de moitié pour le moins dans l’épigramme ; quand il se mêle une fois d’être malin, il l’est impitoyablement. […] La Harpe cependant faisait bonne contenance, bien qu’il ait dit depuis qu’à un moment il fut tenté de prendre la parole et d’apostropher le public. […] De telles disgrâces n’arrivent jamais aux guides supérieurs de l’opinion ; dans les circonstances décisives ils retrouvent tous leurs alliés, et ils ont le public de leur bord. […] Il y donna pêle-mêle au public ses erreurs mêmes, ses jugements sur le prochain, toutes ses médisances de libre critique, en y retranchant très peu de chose.
. — et que par conséquent leur état est révélateur de l’état de l’esprit public. […] Ce n’est pas seulement la faculté de contribuer au gouvernement, mais celle d’être également protégés par les lois, d’accéder sous les mêmes conditions aux fonctions publiques, celle même de participer aux richesses collectives, qu’elles tentent de distribuer à tous leurs membres : elles ne veulent l’égalité politique que parce qu’elles veulent l’égalité juridique, civile, économique. […] L’égal accès aux fonctions publiques est, avec l’isonomie, le minimum des droits que tout gouvernement moderne reconnaît à ses sujets. […] De même, nous avons vu que les fonctions publiques cessent d’être l’apanage de telle catégorie de citoyens, comme les droits politiques commencent à se répartir entre tous les citoyens sans distinction. […] Des conventions de plus en plus nombreuses se nouent, un droit international privé se constitue à côté du droit international public, prouvant que, malgré tout ce qui sépare les nations modernes, elles reconnaissent aux hommes en tant qu’hommes une valeur propre.
L’assemblée était assez nombreuse, quoique médiocrement empressée : on ne s’attendait pas à quelque chose de bien vif, évidemment ; mais, désœuvrement et habitude, peu à peu la portion de la salle destinée au public s’est remplie. […] Ce mot de M. de Montesquiou a paru au public le trait le plus piquant peut-être du discours de M. […] Jay, des questions déjà bien vieilles de goût et de genres en littérature, ne sont plus en rapport avec la préoccupation du public, ni même avec l’atmosphère de l’Académie. […] Lemercier a fini par la lecture d’une ode contre la dégradation de la morale publique et des beaux-arts.
Il n’en est point que les flagellans ne crussent expier en se fouettant en public. […] Les flagellations publiques y furent de mode. […] Il sçavoit bien que cette maladie, autrefois épidémique, ne les regardoit plus ; que le parlement de Paris avoit donné, en 1601, un arrêt, à la requisition de l’avocat général Servin, qui condamnoit les flagellations publiques ; mais il avoit en vue certaines pratiques de quelques communautés de religieux & de religieuses. […] Malgré cette précaution, à peine l’ouvrage est-il devenu public qu’il cause un scandale affreux.
I Il fut un temps où c’était une fonction publique que d’écrire l’Histoire. […] Il aurait fallu placer dans l’État à la même hauteur de respect, l’historiographe et le juge ; il aurait fallu assimiler, dans la considération publique, le juge des morts et des intérêts généraux et politiques, comme l’historiographe, et le juge des vivants et des intérêts privés et civils, comme le magistrat ; car l’honneur et la sécurité des sociétés reposent également sur cette double justice. […] Aussi, nous ne craignons pas de l’affirmer, les corrupteurs les plus profonds de la pensée publique, en ces derniers temps, n’ont pas été les Philosophes, mais les Historiens. […] Que la Libre Pensée ait ses historiens, qui font leur histoire comme leurs romans et leurs romans comme leur histoire, mais que nous ayons, nous, un domaine public de vérité inaliénable ; que l’on puisse retrouver toujours une tradition visible et vivante, au milieu de nous, et qui puisse résister au travail dépravant et effréné de la Libre Pensée !
Mais il est d’habitude, je dirai même de mode, d’injurier cette disposition d’esprit dans toutes les réunions, les solennités publiques, de la dépeindre comme un malheur, comme une infériorité morale déplorable. […] Nous avons honoré, pour l’avoir vu de près, un ancien membre des assemblées publiques, cet homme de conscience et qui eut le courage de sa conscience le jour du vote dans le procès de Louis XVI, l’intègre et respectable Daunou. […] alors on cesse d’être injurié, répudié, maudit, — je ne dis pas dans les chaires sacrées, c’est leur droit, — mais dans les assemblées publiques et politiques. […] Trois mois environ après cette première leçon, une lettre de M. le ministre de l’intérieur fut adressée à M. le ministre de l’instruction publique pour lui signaler les faits en question. […] Et moi aussi, je signalerai un danger, et j’aurai de l’écho au dehors, j’aurai de l’assentiment de la part de tous ceux qui, amoureux du bien public, de la paix publique, du progrès des idées justes et de l’avancement civil de la société, ne désirent, dans cette large voie, d’autre guide et d’autre appui que le Gouvernement impérial, issu du suffrage universel.
Le goût du public parut si décidé pour elles, que les critiques furent réduits à se taire. […] Aux personnes, pour que celles qui sont constituées en dignité, ou d’une profession comptable au public de leurs momens, n’aillent pas tous les jours à la comédie. […] Le Brun s’établissoit juge du Procès des comédiens avec un certain public, il auroit bien fait de rapporter ce qui leur est favorable. […] Dans cette idée, il donna au public les raisons qu’il avoit de condamner la comédie, & de vouloir en dégoûter les autres : mais ces raisons étoient ridicules. […] Puisque le théâtre des comédiens François subsiste depuis plus de cent ans, ils se sont apparemment conformés aux loix de l’honnêteté & de la bienséance publique.
Celui-ci étoit fort jeune lorsqu’il débuta dans les Lettres par la Tragédie de Coligni, & par des Poésies légeres dont il prépare une édition plus digne du Public, que celle qui a paru en trois volumes, & qu’il désavoue. […] De tels Ecrivains doivent être regardés comme d’adroits Legislateurs, qui se servent des passions pour les combattre ou les diriger vers le bein public, qui, par le sentiment, menent à la vertu, & nous font aimer nos devoirs. […] Il doit abandonner ces ressources aux esprits médiocres, qui ont besoin de ce genre de conquetterie pour attirer les regards du Public sur leurs Productions.
Si on ne décide pas selon les idées du Public, on a le Public, à la vérité, contre soi, avant qu’il soit désabusé ; mais son zele n’est jamais si ardent que celui des particuliers. […] Le Public doit-il être la victime d’une foule d’Ecrivains médiocres qui l’ennuient, ou qui corrompent le gout ?
Notons ce symptôme excellent : le public accourt dès qu’on lui annonce Molière. […] Lewinski s’est avancé et a lu, aux bravos du public, une longue poésie, composée par lui. […] Il traçait une farce à la hâte et se donnait simplement la tâche d’amuser son public. […] Acteur et auteur, Molière succès avait séduit et pour toujours conquis le public. […] Orateur, il devait avoir beaucoup de prise sur le public par ce charme souffrant et musical de sa voix de malade.
Depuis il s’était loué aux théâtres secondaires, pour vivre en s’amusant du rire du public. […] La société doit favoriser de tout son pouvoir le progrès de la raison publique, et mettre l’instruction à la portée de tous les citoyens. […] Le peuple est souverain ; le gouvernement est son ouvrage et sa propriété ; les fonctionnaires publics sont ses commis. […] C’est à la partie du peuple la plus rapprochée du danger public d’y pourvoir la première. […] Il rêva peut-être un moment une couronne votée d’acclamation par la faveur publique.
Fortoul, ministre de l’Instruction publique Lundi 9 janvier 1855. […] Les hommes éminents et zélés qui avaient présidé à l’Instruction publique pendant ces années, d’ailleurs florissantes, n’avaient pas été sans songer à l’inconvénient et sans prévoir le danger. […] Combien de fois, dans ces luttes parlementaires où la question de l’enseignement public moderne se débattait, les esprits impartiaux n’étaient-ils point partagés et ne souffraient-ils pas ? […] De cette succession de médecins à vues diverses, il résulte finalement que l’instruction publique laïque est assez malade en France (1867). […] Il n’est que juste, et c’est mon droit, presque mon orgueil, en terminant ces volumes, d’y rattacher ce qui en a été le remerciement public et la récompense. — J’avais choisi pour sujet du cours Virgile et l’Énéide.
Joseph Bertrand voulant écrire pour le public, c’est-à-dire pour la moyenne des gens instruits, a éludé ce genre de difficulté autant que possible : il eût pu trancher davantage et mettre plus en relief et en vedette les résultats scientifiques, sauf au lecteur à ne prendre que ce qu’il en pourrait saisir ; il a mieux aimé accuser moins à nu les côtés sévères pour fondre plus couramment le ton de l’ensemble. […] S’est-il assez préoccupé, même en ne s’en rapportant pas aux apparences, du phénomène moral, je veux dire de la voix publique et de l’indignation grossissante qui a donné lieu à la belle légende, — ici plus belle que la vérité ? […] Le grand livre du ciel est plus ouvert aujourd’hui que jamais : il l’est jusque dans ses profondeurs ; les télescopes sont partout et vous sollicitent au passage ; on les voit sur les places publiques, sur les ponts, sans même aller les chercher sur les terrasses accessibles et hospitalières de l’Observatoire : le goût du public tourne évidemment à l’astronomie, et je n’en voudrais pour preuve que l’ouvrage de M. […] On peut aujourd’hui avoir une médiocre estime pour ceux qui, non contents de divulguer la science par des exposés clairs, nets, proportionnés à la classe du public qu’ils se proposent d’instruire, prétendent encore à l’orner, à l’enjoliver, à la rendre gentille, amusante ou plaisante : c’est un assez mauvais genre en effet. […] Trouessart : Quelques mots sur les causes du procès et de la condamnation de Galilée (extrait de la Revue de l’instruction publique, mars 1862), à l’adresse de M.
Justement il vient d’acheter un journal, la Conscience publique. […] Nous sommes dans les bureaux de la Conscience publique. […] A cette menace, le banquier tremble, il entend dans le lointain la Conscience publique hurler contre lui, et, pour apaiser sa colère, il jette sa fille à son directeur ! […] Quel spectacle que celui des hommes de lettres s’injuriant du livre au théâtre, du roman à la comédie, et se jetant, devant le public, leurs encriers à la tête ! […] Madame Maréchal, furieuse de cette infidélité chimérique, fait, en plein salon, un affront public au jeune homme.
Il s’estima heureux pourtant que la fin prochaine de l’École vînt le délivrer de cette charge de la parole publique, pour laquelle il était peu fait. […] Je n’aurais probablement point songé à parler de la séance publique à l’Institut, du 24 novembre 1807, dans laquelle Bernardin eut à recevoir à la fois les trois nouveaux académiciens, Laujon, Raynouard et Picard, si M. Villemain, dans son rapport public du 19 août dernier, n’avait jugé à propos, par un coup de talent, de rendre un éclat inattendu à cette ancienne séance. […] Sur quoi il avait répondu : « J’ai assez de voix pour lui parler à six pas de distance. » Mais le Nestor mélodieux n’en avait pas assez pour prononcer son discours en séance publique ; ce fut François de Neufchâteau qui le lut pour lui. […] Le public a vainement essayé de le suivre dans les différents siècles, dans les différentes régions du globe ; il nous a fait passer en revue les Druides, les Gaulois, les Romains, César, les Francs et les Saxons, Clovis, Louis XIV.
Sous le titre Avril, Mai, Juin, j’ai reçu il y a deux ans un recueil de sonnets41, où deux jeunes amis se sont mis à chanter de concert tout un printemps et sans livrer au public leur nom ; je ne l’ai moi-même appris qu’à grand’peine (Léon Valade et Albert Mérat). […] Mais le public, le grand public, même celui qui lit, ne s’en inquiète nullement, et les générations passent, se succèdent et s’effeuillent, sans presque qu’on s’en souvienne. […] La critique elle-même, qui est un peu aux ordres du public, ne saurait appeler sur eux la curiosité ni forcer une attention qui se porte ailleurs. Pour plus d’éclaircissement, je prendrai un exemple dans un genre voisin et fraternel : s’il en était en ceci de la peinture comme de la poésie, si la quantité de nouveaux peintres et paysagistes qui se produisent chaque année n’arrivait pas aux yeux du public, s’ils restaient chacun avec son œuvre à l’ombre de son atelier, combien ils auraient lieu de se plaindre de cette condition ingrate, de cet isolement, de ce manque de place et de lumière au soleil ! […] Mais pourquoi le public, même le nôtre, nos amis eux-mêmes, pourquoi sont-ils froids à ces questions délicates ?
Le public demande de la critique, et il a raison puisqu’il n’y en a plus guère ; mais il ne sait pas combien ce qu’il demande est difficile, et, osons le dire, impossible presque aujourd’hui, pour une multitude de causes qui tiennent à l’état même de la société et à la constitution de la littérature. […] Quoi qu’il en soit, si on n’en a pas donné constamment, selon le désir du public, c’est (pour revenir aux difficultés des conditions) qu’en ce qui concerne la littérature proprement dite le rôle de juge va se compliquant singulièrement. […] Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure. […] La forme et le style poétique sont encore une fois tombés, en quelque sorte, dans le domaine public ; il coule devant chaque seuil comme un ruisseau de couleurs ; il suffit de sortir et de tremper. […] Un de mes amis, bibliothécaire dans un établissement public, a eu l’idée de ranger à la suite toute cette branche particulière de littérature trop fleurie : c’est une quantité de beaux volumes jaunes et blancs, morts avant d’avoir vu le jour, que personne n’a connus et qui sont ensevelis dans leur premier voile nuptial : Hélas !
« La vieillesse des rois est un malheur public parce qu’elle les isole ; les passions de leur jeunesse les mettent du moins en communication avec les idées de leur temps. […] Trois jours de combat, et les ateliers se rouvrirent avec la certitude d’une longue sécurité ; c’est ce que voulait un peuple qui craint le joug du besoin, mais qui a accepté la nécessité du travail depuis qu’il jouit d’un peu d’aisance et d’un peu d’instruction qui doivent tendre à s’accroître, dès que des habitudes nouvelles lui ont fait comprendre qu’il n’y a rien de plus moral que le travail pour ceux qui ont leur fortune à commencer, et que la vie publique pour ceux dont la fortune est faite. » Après ce qui s’est passé dans les rues, l’auteur de la brochure comprend et indique très-bien ce qui doit se passer dans le gouvernement par rapport à la société. Il y a là plus d’un bon conseil, et nous invitons ceux qui peuvent en profiter à y réfléchir : « Le 26 juillet, la position de la France était bien plus compliquée, bien plus extraordinaire que si le gouvernement et l’administration publique avaient disparu par un événement surnaturel. Des trois pouvoirs qui composent le gouvernement, le pouvoir qui dispose de l’armée déclarait la guerre à la société ; les deux autres pouvoirs étaient nuls par des causes que j’expliquerai ; et l’administration publique, depuis longtemps organisée pour nous priver de tout mouvement, restait partout menaçante. […] Mais l’idée qu’on avait généralement des pouvoirs et de l’administration publique n’en reste pas moins affaiblie pour plus ou moins de temps.
Henry Bauër Hier, sur la scène de la Porte-Saint-Martin, devant le public transporté d’enthousiasme, un grand poète héroï-comique a pris sa place dans la littérature dramatique contemporaine, et cette place n’est pas seulement l’une des premières parmi les princes du verbe lyrique, sentimental et fantaisiste, c’est la première. […] Je vois à l’énormité de son succès deux causes, dont l’une (la plus forte) est son excellence, et dont l’autre est, sans doute, une lassitude du public et comme un rassasiement, après tant d’études psychologiques, tant d’historiettes d’adultères parisiens, tant de pièces féministes, socialistes, scandinaves ; toutes œuvres dont je ne pense, à priori, aucun mal, et parmi lesquelles il y en a peut-être qui contiennent autant de substance morale que ce radieux Cyrano, mais moins délectables à coup sûr, et dont on nous avait accablés ces derniers temps. […] On m’a affirmé qu’en les signalant au public, un critique de la Revue bleue, dont on ne m’a pas dit le nom, avait écrit : « Je salue un vrai poète, peut-être un futur grand poète ! […] Il dédiait ses vers aux raillés, aux déshérités, à ceux qu’insulte le public et qu’on appelle des ratés. […] Alors, qu’est-ce que ce jeune académicien, dont chaque strophe contient au moins quatre fautes de français, trois calembours et une calembredaine, et comment a-t-on pu monter aussi puissamment le coup au public ?
C’est que les personnes très riches sont privilégiées de plus de façons encore qu’il ne paraît à première vue ; c’est que, en même temps que la charité sous sa forme la plus élémentaire, qui est l’aumône en argent, semble devoir être plus facile aux gens qui en ont beaucoup, ceux-ci, à mérite égal — et en vertu de leur richesse même, qui les signale à l’attention et leur permet des largesses d’un chiffre imposant — sont singulièrement plus assurés de la reconnaissance publique que les gens de condition médiocre ou petite, et, ainsi, ne manquent guère de recevoir, dès ici-bas, la récompense de leur bonne volonté. […] Au reste ce détail, et aussi le formidable total de sa fortune, ont été connus trop tard pour arrêter les premières manifestations de l’admiration et du deuil publics. […] Je n’ai pas nié un instant le rare mérite de la dame dont j’examine, comme j’en ai le droit, les actes publics. […] Il leur est plus difficile d’entrer dans le royaume de Dieu qu’à un câble de passer par le trou d’une aiguille. » Puisque l’Évangile même reconnaît implicitement que la charité leur est si malaisée, il est excellent que des louanges et des honneurs publics, et des décorations, et de la réclame et des « échos », payés ou non, encouragent ces infortunés à s’arracher les entrailles, et les aident à passer par ce chas, qui figure pour eux la porte de l’affranchissement et du salut.
Le public fut ahuri. […] puisque le public a mis ailleurs ses préférences. […] — Le public n’achète pas vos livres ? […] — Lucien Bruno. — Petite exhortation au public. […] Le public s’était trompé dans son interprétation, que le public se rétracte !
Il eut là véritablement ce qu’il appelait « sa soirée » un triomphe public qui peut se discuter, non se contester. […] La séance publique fut ici, en effet, des plus dramatiques ; elle le devint, et voici comment. […] Son discours élégant et compassé fut débité de façon à donner bientôt sur les nerfs d’un public qui était arrivé favorable. […] Le public, qui avait d’abord applaudi à d’heureux traits, avait fini par être impatienté, excédé, et, pour tout dire, irrité. […] La malice et l’irritabilité du public avaient fait le reste.
Associer dans un projet d’hommage public J. […] L’éducation publique et privée, avant et depuis le christianisme, était fondée sur ce principe, que l’homme est libre de faire le mal ou le bien. […] La nature le fait bon ; c’est la société qui, par une mauvaise éducation publique ou privée, le fait mauvais. […] Ni les mœurs publiques n’ont jamais empêché personne de vivre honnêtement, ni l’éducation n’a jamais absous celui qui outrageait la nature. […] » Que La Bruyère s’entendait mieux à nous prendre, lui qui disait de ses Caractères : « Je ne fais que rendre au public ce qu’il m’a prêté !
On a taillé depuis en plein drap, et le public paraît très bien s’en accommoder. […] Encore une fois, il n’y avait rien là dedans du professeur, de cette sorte de fontaine publique jaillissante et retentissante, où tous vont en foule s’abreuver. […] Magnin avait mises à en suivre le mouvement l’avait évidemment arriéré un peu ; il en est encore à l’admiration quand le public était arrivé à la fatigue. […] Magnin reprenait sa lecture à un feuillet où le public n’était déjà plus. […] Van Praet, avant l’invasion du grand public et l’irruption d’un peuple de lecteurs, était restée l’idéal de M.
A en juger d’après l’impression du public, il ne paraît pas que ces transpositions du drame Wagnérien dans une salle de concert soient bien fâcheuses : aux quatre auditions du premier acte de la Walküre, public nombreux, attentif, ému, finalement enthousiaste ; succès sans conteste. Qu’annonce-t-on en effet au public ? […] Pinelli, rémittent artiste qui propage avec autant d’intelligence que de succès, dans le public italien, le goût de la musique wagnérienne, ainsi que le sentiment de l’art classique, et auquel est dû un véritable réveil musical. […] Le public écouta religieusement de la première note à la dernière, avec une admiration croissante, et se retira plein d’enthousiasme pour ce grand poème musical. […] Rappelons qu’à Bayreuth, la fosse d’orchestre est placée sous la scène et que les musiciens sont totalement cachés aux yeux du public.
Tous ces défauts, je suis le premier à les reconnaître, mais aussi que de manières de voir, de systèmes, d’idées en faveur, à l’heure présente, auprès de l’attention publique, commencent à prendre voix, à balbutier dans ce méchant petit volume. […] Le public aime les romans faux : ce roman est un roman vrai. […] Est-ce simplement pour choquer le public et scandaliser ses goûts ? […] Et à propos du roman sans péripéties, sans intrigue, sans bas amusement, tranchons le mot, qu’on ne me jette pas à la tête le goût du public ! Le public… trois ou quatre hommes, pas plus, tous les trente ans, lui retournent ses catéchismes du beau, lui changent, du tout au tout, ses goûts de littérature et d’art, et font adorer à la génération qui s’élève ce que la génération précédente réputait exécrable.
Dès lors le public s’est divisé en deux camps. […] Le public ne lit plus, parce qu’il a trop lu. […] Il ne s’y est pas présenté : le public l’y a porté. […] A force de se blaser, le public est devenu exigeant. […] Reste donc le grand public, et, en première ligne, parmi ce grand public, les femmes.
Personne dans le public n’y a fait attention. […] Mais le public ne comprenant guère une salle du trône si le trône n’est pas au fond, en face de lui, on a mis le trône au fond, en face du public. […] Ils ont rendu, — avec intérêts, — au public ce que le public leur a prêté. […] Le public vibrera toujours. […] Le public a été tout à fait de cet avis.
Ils leur laissaient ce qui ne peut pas se prendre ; ils laissaient à Lope de Véga sa verve, et tout ce qui échappe de vérités à un génie heureux, malgré son public et malgré lui-même. […] Le public y prendrait-il le même plaisir qu’aux ouvrages légers ? […] En outre, comme la convention tient plus de place dans la tragédie que dans la comédie, le public se croit le droit d’y demander plus de changements. […] Voilà bien des choses entre l’art et le public. […] Au lieu de regarder d’un coin de la salle, dans l’ombre d’une loge, l’effet de la pièce sur le public, avec un parti pris de tendresse pour l’une et de prévention contre l’autre, et l’excuse toute prête de quelque cabale pour expliquer les sifflets, il interrogeait lui-même le public.
Arago est une difficulté pour tout le monde peut-être d’ici à quelques années encore, surtout si l’on avait la prétention de le juger à la fois comme savant, comme professeur et comme homme public, en s’attachant à démêler en lui avec précision les diverses capacités dont il était pourvu et les influences générales qu’il a exercées ou subies. […] Il n’était pas de ces savants qui s’isolent et se contentent de cultiver durant la sérénité des nuits la muse austère et silencieuse de Newton ou de Pythagore : nature méridionale fortement accusée, il avait besoin d’agir immédiatement sur le public, de le servir et d’en être entouré, d’en recevoir un contrecoup d’applaudissement et de louange en retour des utiles et faciles enseignements qu’il était toujours prêt à lui prodiguer. […] La difficulté de composer ces notices, lorsqu’on est secrétaire perpétuel pour les sciences mathématiques, est très grande et presque insurmontable, si l’on veut unir toutes les nécessités et les convenances, y compris les convenances oratoires : ou bien l’on néglige et l’on sacrifie en partie l’exposition des travaux de l’homme dont on parle ; ou bien, si l’on entre dans le détail de cet exposé, on devient nécessairement inintelligible pour la foule du public, même instruit et lettré, qui assiste à une séance publique de l’Institut. Il y a des chapitres, et souvent les plus essentiels, qu’à une lecture publique il faudrait supprimer tout entiers. […] Lorsqu’il lisait dans les séances publiques de l’Institut ces éloges ou plutôt des portions de ces énormes assemblages biographiques (car lire le tout eût été impossible), l’auditoire était souvent fatigué, impatienté ; pourtant on écoutait toujours : il y avait dans la manière de M.
Chaque difficulté était reportée aux États-Généraux ou au jugement particulier des provinces, et devenait matière à discussion publique. […] Et ce même panégyriste ajoute avec assez de délicatesse que le sage vieillard, en recevant modestement ces marques publiques d’affection, ne laissait pas de témoigner par quelques signes de joie « qu’il était devenu sensible à cette seule vanité, de se voir aimé des hommes ». […] Jamais il n’embrassa plus d’affaires qu’il n’en pouvait expédier… Jamais il ne flatta son maître ; s’est toujours plus étudié à servir qu’à plaire ; ne mêla jamais ses intérêts parmi les affaires publiques. […] Il me semble que Le Moniteur, à leur égard, pourrait être comme un Plutarque français continuel : tous les grands serviteurs publics y trouveraient tôt ou tard leur biographie ou leur portrait. Et quelle plus belle image que celle du président Jeannin, de ce vieillard, comme on l’a dit, « si nécessaire au public, exercé par tant de rois, blanchi sous Henri le Grand, usé sous Louis le Juste », et qui nous apparaît jusqu’à la fin courbé, mais ferme, sous le fardeau des choses de l’État !
les gens de lettres par des choix d’une littérature moins spéciale, et par toutes les sortes de variétés que présentent, dans une société comme la nôtre, les applications publiques de la parole : à la bonne heure ! […] Il y avait jouissance de société, il y avait caractère public et sérieux hommage : un prélat mort, un homme d’État considérable qui le remplaçait, et qu’on nous permette d’ajouter, un homme aimable. […] Molé se rapporte à ce moment qui précéda son entrée dans la carrière publique. […] Toutefois ces réceptions n’étaient point publiques, et l’on n’y dansait le menuet qu’entre soi. […] Colbert : ainsi tout le monde s’y rangea. » Le premier académicien qu’on reçut après lui et qu’on reçut en public (1673), fut Fléchier, digue d’une telle inauguration.
Un autre témoin des tendances de l’esprit public nous instruit combien dès la première moitié du siècle la philosophie avait de prise sur les nobles âmes : c’est Vauvenargues, mort en 1747528. […] L’ambition, pourtant, le dévorait, une ambition héroïque, née du sentiment de sa valeur et du désir de la faire servir au bien public. […] Celui qui eut le plus de talent, qui marqua inexorablement toutes les petitesses des philosophes dans ses acres satires, Gilbert, obtint la faveur de la cour, des pensions, un nom littéraire qui n’est pas encore oublié : il n’eut aucune prise sur l’esprit public. […] Victor de Riquetti, marquis de Mirabeau 1715-1789), consacra au bien public tout le temps qu’il n’employait pas à écraser les siens. […] Il se passera cinquante ans avant que le public revienne à Vauvenargues.
Sur le théâtre, plus que dans le journal, elle aurait le respect du public. […] À ces spectacles le public ne s’indigne pas, — il rit. […] Elle s’est tue, le public n’a pas lu, — il ne savait pas ! […] Ils n’ont aucune raison, eux, de cacher ce talent au public ? […] Sois maître de toi pour rester maître des acteurs et du public.
Avec une piété antérieure, un public, pour la seconde fois depuis les temps, hellénique d’abord, maintenant germain, jouit d’assister au secret représenté de ses origines. […] Ainsi naissait pour cette Œuvre et ce Théâtre, un Public, le Public du Pur et Simple, du Parsifal qui, seul, peut, lorsque les autres la méconnaissent, connaître la Cène ; et, aujourd’hui, après le Maître, l’Association Wagnérienne, par ses propagandes, ses enseignements, son assistance à Bayreuth, s’efforce vers ce même but, la formation du Public Wagnérien. […] Le public n’existe pas consciemment à Bayreuth ; tout ce qui en moi est susceptible de répondre à l’appel de ce drame vivant, se mêla intimement à ce drame, vit de sa vie. […] Enfin, une organisation, l’association wagnérienne, s’efforce de former le public au projet wagnérien populaire, artistique et religieux. […] Le théâtre est le Livre accessible au public d’une Bible que seul Wagner a pu déchiffrer.
Des historiens, des biographes éminents l’ont abordé par ses côtés publics. […] Mais on peut dire, malgré ces résumés substantiels et judicieux, que, si le personnage public a donné sa formule, l’homme, chez Sieyès, ne nous apparaît que dans une sorte d’éloignement et d’ombre. […] Quand on les médite plein du seul désir de l’intérêt public, on est obligé à chaque page de se dire que la saine politique n’est pas la science de ce qui est, mais de ce qui doit être. […] Son orgueil et sa conviction d’inventeur, et j’ose ajouter, son amour du bien public à ce début, l’auraient bien vite fait sauter à pieds joints sur cette difficulté-là. […] Tout esprit public leur est étranger.
Renan était inconnu du grand public. […] Je ne cite pas tous les arguments, j’en arrive à l’intervention du public, qui est considérable ; le public veut ceci, le public ne veut pas cela ; il ne tolérerait pas trop de vérité, il exige quatre pantins sympathiques, contre un personnage réel, pris dans la vie. […] Bon public ! […] Qu’en pense le public ? […] Il n’a fallu qu’un sonnet pour faire pâmer un public.
Geffroy, nous ont valu, cette année encore, d’excellents articles, excellents surtout en ce qu’ils signalent des artistes indépendants, sans notoriété, déplaisants en général au public et qu’il n’est peut-être pas absurde de lui imposer quelques années, jusqu’à ce qu’il ait eu le loisir de les comprendre et de les aimer tout seul. […] Des arbustes interposés entre les décors et le public assureraient un suffisant trompe-l’œil aux élégants de bonne volonté et orneraient cette réunion printanière. […] Et toutes les fâcheuses impressions que peuvent laisser des visites aux Champs de Mars ou Élysées ne tiennent pas contre ce bon raisonnement : il est louable de présenter gratuitement les œuvres des artistes au public à qui elles sont destinées. […] Dans une démocratie bourgeoise le seul grand acheteur est le grand public. […] Trois ou quatre modes me semblent plus intéressants : 1º Le décor public, fresques modernes des grandes surfaces, en harmonie avec l’architecture et la destination de l’édifice ; 2º Le décor intime, utilisation des murs de nos appartements modernes pour des colorations agréables, sans le ressassement immobile d’un sujet de fait-divers ; 3º La fixation sur la toile d’impressions visuelles de peinture, sans apposition ménagère, conservée dans des châssis, ou roulée à des poulies mobiles à nos grés ; 4º L’ornementation d’objets de luxe qu’on pourrait retirer aux maroquiniers de la rue de la Paix et confier à des artistes auxquels je recommanderais personnellement la peinture sur maroquin qui nous a fait en d’autres siècles les belles reliures de maioli.
Un Croisé trouve tout naturel d’acheter par sa mort la liberté du Tombeau du Christ ; le vieux Corneille ravit tout le public par ses tirades sur l’honneur ; Vincent de Paul est sûr de trouver toujours qui le suive dans sa mission de charité. […] Ce livre est né de la confiance que me témoignent des inconnus, me communiquant chaque jour ce qu’ils admirent, ce qui les émeut et qu’ils croient bon à mettre sous les yeux du public et dans le cœur de la France. […] » Aux plus illustres, nous dresserons des statues sur nos places publiques ; aux autres, des stèles funèbres sur leurs ossuaires. […] La brusque disparition d’un dixième peut-être de notre corps électoral jettera un trouble profond dans la direction des affaires publiques. […] » Aucune objection d’ordre public ou social ne peut nous être opposée.
La publication d’Atala fut fêtée, comme la naissance d’une fille de roi ; la « non pareille des Florides » enleva le public. […] Jamais œuvre ne vint plus à propos, ne répondit mieux aux besoins du public et ne s’adapta plus exactement aux goûts du siècle. […] L’analyse rapide de quelques romans qui eurent de la vogue, sera la meilleure manière de donner une idée des goûts du public. […] À côté de ces pièces d’actualité qui transformaient la scène en journal parlé, le public ne tolérait que des opéras-comiques assaisonnés de jeux de mots et de calembours et des tragédies bourrées de meurtre : en voici deux spécimens. […] L’impatience du public était si vive, que Rosa ou la Fille mendiante, de Mme Bennett, se traduisait à Paris à mesure que les feuilles de l’original s’imprimaient à Londres (Décade, 20 brumaire an VI).
Pline ayant commandé d’abord une légion en Syrie, revint à Rome, où il se livra entiérement aux affaires publiques. […] “On s’étonnera peut-être, dit-il, que pour donner mes Sermons au public j’aie attendu qu’il m’ait oublié. […] Manouri, leur confrere, ne les a pas imité, & le public lui en sçait gré. […] Il ne vouloit pas laisser ignorer au public comment il étoit devenu Avocat. […] L’usage est insensiblement établi que tout Académicien répéteroit ces éloges à sa réception : Ç’a été une espêce de loi d’ennuyer le public.
Ses solides qualités armées de sévérité et de rudesse l’avaient rendu odieux aux grands, et le peuple même ou la bourgeoisie n’appréciait pas en lui un défenseur des intérêts publics. […] Le vrai caractère de Sully se déclare déjà mieux dans cette attention publique et constante à la gravité que dans quelque infraction particulière, s’il y est tombé. […] Il avait de tout temps écrit ou fait rédiger les journaux et mémoires des actions principales et des événements importants de sa vie ; il chargea en définitive quatre secrétaires d’en faire un extrait considérable et un recueil à l’usage du public : Monseigneur, est-il dit dans la dédicace, Votre Grandeur ayant commandé à nous quatre, que vous connaissez assez, de revoir et considérer bien exactement certains mémoires que deux de vos anciens serviteurs et moi avons autrefois ramassés et depuis fort amplifiés, etc., etc., de toutes lesquelles choses nous nous sommes acquittés le mieux qu’il nous a été possible, etc. […] Ces Mémoires en grande partie terminés et en vue du public, Sully songea à les faire imprimer, et, pour plus de sûreté, il voulut que ce fût sous ses yeux, dans une de ses maisons seigneuriales. […] En cette saison gracieuse, reposée et unique peut-être dans sa vie, Rosny, âgé de près de vingt-sept ans, dans sa maturité première et, si l’on ose dire, dans sa fleur d’austérité, n’avait pas encore cette mine rébarbative qu’il eut depuis, et que nous lui verrons prendre successivement à travers les fatigues, les périls, les contentions et les applications de toutes sortes, où sa capacité opiniâtre, son ambition légitime et jalouse, son amour du bien public et de l’honneur de son maître l’engagèrent de plus en plus.
Il serait temps de rejeter à leur place, c’est-à-dire dans quelque note finale imperceptible, ces interminables histoires de papiers, ces aventures et odyssées d’une malle, ces pistes perdues et retrouvées, qui donnent des émotions à l’éditeur, mais auxquelles le public est parfaitement indifférent. […] Cette vie de la pensée, à laquelle il était presque exclusivement appelé, fut pourtant interrompue, coupée de temps en temps et longuement entamée par les fonctions publiques. […] Royaliste par affection et par conviction, voulant le bien, l’ordre et la paix, on ne sera pas tenté, après la lecture de son journal, de lui attribuer plus de vertus publiques qu’il n’en eut. […] Rien n’est plus funeste au repos public comme au bonheur individuel que cette préoccupation universelle de droits, d’intérêts, d’affaires de gouvernements. […] Nous allions de pair l’année dernière ; il faut désormais que j’apprenne à me passer de considération publique, de renommée, et que je me couvre du manteau philosophique en prenant pour devise : Bene qui latuit bene vixit.
On doit des remerciements à tous ceux qui nous apportent sur quelque partie de l’histoire des informations et des lumières nouvelles : on en doit à ceux même qui nous les apportent à contrecœur et en grondant51 ; à plus forte raison, à ceux qui le font de bonne grâce, dans la seule vue du public et par zèle pour la vérité. […] Bon citoyen, animé d’une véritable passion pour le bien public et d’une sorte de tendresse pour le pauvre peuple, ayant des entrailles pour les souffrances du paysan, il était pourtant homme d’autorité : c’était un vigoureux préfet que d’Argenson intendant. […] Une des maximes de sa politique était qu’on augmentât chez le propriétaire foncier l’esprit de propriété, mais que l’office public ne pût jamais être considéré comme propriété par l’officier qui en était investi. […] À Soissons, il fit presque même chose en son département où il s’indigna des inconvénients du canal de Picardie et des injustices qu’attire cette petite entreprise de bien public qui n’a pour motif, dit-on, que l’intérêt particulier d’un grand seigneur. […] Le piquant, lorsqu’on lit de suite le Journal, est de voir les idées sensées de d’Argenson, ses vœux honorables pour la grandeur de son pays, se mêler sans cesse à ses propres poussées d’ambition ; car ce vertueux était de la même pâte que les autres hommes, seulement son ambition prenait, à son insu, je ne dirai pas le masque, mais la forme du bien public : il avait l’ardeur du bien, s’en croyait les moyens et la science, et avait hâte d’en venir à l’application.
Je ne me suis jamais proposé pour sujet d’embrasser par une étude la carrière publique de Benjamin Constant, d’autres (et M.Loève-Veimars, par exemple) l’ayant fait avant moi et de manière à m’en dispenser. […] En attendant, nous en avons tiré, à l’usage de notre public, un simple choix, tâchant de le rendre le plus agréable qu’il était possible à la lecture, et aussi de le rapporter à une idée d’étude et d’analyse. […] Quand un personnage public passe sa vie dans le monde et dans les salons, ce qu’il y dit soir et matin est tout aussi authentique que le discours écrit qu’il apporte une fois par mois à la tribune. […] Mais l’homme public en lui ne put jamais, à l’image de certains politiques célèbres de la Grande-Bretagne, se dégager, s’affermir et prendre assez le dessus pour recouvrir les faiblesses et les disparates de l’autre. […] « Je ne vous parlerai pas d’affaires publiques, parce que je ne lis et ne vois aucun journal.
C’est l’abbé de Pradt qui a dit cela en tête d’un de ses écrits (Les Quatre Concordats) ; et, sans regarder toutes les paroles que jetait cet homme d’esprit comme autant d’oracles, il est juste de tenir compte de ses jugements, surtout quand il s’agit du style de pamphlets, de brochures politiques, de ce style qui prend et mord sur le public, même en matière sérieuse : l’abbé de Pradt s’y connaissait. […] Grâce aux Mémoires qui vont paraître dans quelques jours et que nous sommes heureux d’annoncer au public, chacun désormais va le connaître, lui rendre la justice qui lui est due, et le voir au rang estimable qu’il mérite d’occuper. […] Aujourd’hui, vieillard lui-même, il a cru devoir rendre à la mémoire paternelle un hommage longtemps différé, en publiant les manuscrits, lettres et correspondance, en un mot tout ce qui, dans les papiers de Mallet du Pan, peut intéresser le public de la postérité. […] Ce qui ressort des premiers travaux de ce jeune homme, déjà arrivé à l’âge de trente ans, c’est l’indépendance du jugement, l’habitude d’avoir son avis en toute matière sans en demander la permission à son voisin ; et le besoin d’exprimer cet avis hautement et devant le public. […] Il reçut des lettres anonymes : « Vous verrez, lui écrivait-on, dans l’imprimé que je joins ici, le cri de l’indignation publique. » Et on joignait à la lettre un exemplaire de la Dénonciation au Parlement de la souscription des Œuvres de Voltaire, avec cette épigraphe « Ululate et clamate ».
Sobre sur le manger, il était extrêmement libertin, mais surtout ambitieux, menant de front toutes choses, ses passions, ses vues, et des desseins même dans lesquels entrait à quelque degré la considération de la chose publique. […] Mazarin, étranger à la France, habile négociateur au-dehors, mais sans idée de notre droit public et de nos maximes, suivait, à pas plus lents, la voie tracée par Richelieu, mais il la suivait sans se douter qu’elle était « de tous côtés bordée de précipices ». […] Les humeurs vagues de mécontentement public sont très promptes, en ces heures de crises, à se prendre d’émulation, à se déterminer par l’exemple du voisin et à affecter la forme du mal qui règne et circule. […] Ce premier et double rôle de restaurateur du bien public et de conservateur de l’autorité royale tenta d’abord l’esprit élevé et lumineux de Condé ; mais Retz nous fait comprendre à merveille comment le prince ne put s’y tenir ; il était trop impatient pour cela : « Les héros ont leurs défauts ; celui de M. le Prince était de n’avoir pas assez de suite dans l’un des plus beaux esprits du monde. » Et, poussant plus loin, il nous explique à quoi tient ce peu de suite. Au retour de l’armée, voyant le Parlement aux prises avec la Cour, la gloire de restaurateur du public fut la première idée du prince, celle de conservateur de l’autorité royale fut la seconde.
Ne serait-ce point comme faisant partie de l’autorité publique, qu’il a le privilège d’être contesté ? […] Deux sortes de poètes jouissaient alors de la faveur publique. […] Attaquer Chapelain, c’était presque un délit contre l’ordre public. […] Tout autour de Boileau, l’admiration publique se portait sur d’autres que ses amis. […] C’était l’opinion du public de la mode ; Saint-Évremont la met[sic].
Ces deux textes mis à côté l’un de l’autre eussent été l’objet, assurément, d’un bien curieux examen : il n’a pas été donné au public — j’entends le public des amateurs et connaisseurs — de se livrer à cette comparaison73. […] Et puis il est impossible qu’on ait été crédule et dupe jusqu’à un certain point, sans en dire quelque chose, comme excuse au moins, au public. […] Les rapports de ressemblance et de différence de ces deux Recueils connexes et solidaires, qu’on s’est appliqué à disjoindre dans la défense, sont restés, pour moi comme pour le public, un problème obscur et non résolu ; il y a un coin de mystère.
Et cependant un Public léger & prévenu me reprochera de n’avoir pas assez ménagé les Philosophes dans les Trois Siecles ! […] J’avoue que ces bruits me donneroient de la vanité, tout absurdes qu’ils sont, si je pouvois attacher d’autre prix à mon travail, que celui de l’utilité publique. […] On peut aussi me contredire ; on l’a fait, on le fera encore ; c’est au Public à juger. […] Ce Discours a paru pour la premiere fois à la tête de la quatrieme édition publiée en 1779 ; comme il a été fort goûté du Public, on n’a pas cru devoir le supprimer. […] Si j’en crois le bruit public, c’est maintenant en France l’esprit du jour ».
Ces désordres de tempérament n’empêchaient pas Saint-Just de s’occuper ardemment des choses publiques, et de travailler à s’instruire et à se produire. […] Il semble que ce membre du Comité de salut public soit allé dormir et rêver dans la grotte d’Épiménide. […] Au Comité de salut public ou dans ses missions aux armées, Saint-Just sera le même. […] Barère, un faux frère, qui a échappé au supplice et qui s’est vengé par des révélations, nous a montré Saint-Just au naturel dans l’intimité des séances du Comité de salut public. […] J’ai voulu essayer les forces, le tempérament et l’opinion du Comité de salut public.
ils sont bien mal avec le public. […] fi du public ! […] Le public prodigue cet argent-là pour qu’il soit prodigué. […] Un comédien qui achète des rentes vole le public. […] Cependant le public veut le revoir.
D’un côté un ouvrage considérable, un ouvrage gigantesque, et qu’en raison de l’étendue et de la nouveauté du plan on peut appeler original ; un livre qui, rajeuni de siècle en siècle par les révisions de grammairiens tels que Huet, Basnage et les Pères de Trévoux, est encore resté aujourd’hui, pour l’homme de lettres, l’autorité décisive et l’encyclopédie grammaticale la plus complète ; de l’autre une obscure Batrachomyomachie de tracasseries misérables, de questions personnelles, sans profit pour le public et sans intérêt pour l’histoire. […] Cependant, et l’Académie, et lui, ont joué à la bascule, comme les enfants, sans pouvoir convenir d’un équilibre qui leur aurait sauvé, à l’un et à l’autre, tant de mauvaises démarches dont le public se divertit. » 9 Ces deux témoignages, rapprochés de la dernière phrase de la lettre de Bussy, et de l’approbation de Bossuet10, sont la meilleure caution de Furetière et sa véritable oraison funèbre. […] Il serait à souhaiter que chaque académicien eût autant travaillé que moi à cet ouvrage, Furetière n’aurait pas le public de son côté. » (Carp. […] Racine le jour que la chose devoit être décidée ; mais, voyant que le gros de l’Académie prenoit parti pour la négative, lui seul osa parler ainsi à cette compagnie : « Messieurs, il y a trois choses à considérer ici : Dieu, le public et l’Académie. […] Devant le public, il vous sera très glorieux de ne pas poursuivre votre ennemi par-delà le tombeau.
Les murs des édifices publics, toute pierre de taille neuve, portent le nom de M. […] En public, il ne mange pas… c’est vrai ! […] Mais avant d’être un fonctionnaire public, ce fut un viveur, un homme qui s’amusait et amusait les autres. […] La publication des fameux articles démolisseurs, publics dans le Journal des Débats, par M. […] Harel a raison ; le public qui, dans la pensée de M.
Partant, les emplois publics sont spéciaux comme les autres. […] La vie publique concourait au même effet. […] Devant ridée du salut public, les intérêts et les caprices de l’individu se sont effacés. […] Sous Solon, en en comptait déjà trois grands qui étaient publics et une quantité de petits. […] L’État en a besoin ; les mœurs publiques les demandent.
Ce genre de comédie manque entièrement aujourd’hui, chacun se contente d’être plein de ridicules soi-même et de se moquer de ceux du voisin ; mais la grande exécution publique est comme supprimée. […] Or, voilà que le 20 juillet, dans son Rapport lu à la séance publique de l’Académie, M. […] Champion, qui va par les halles et les places publiques, avec sa croix d’honneur sur son manteau bleu, y faisant des distributions, séance tenante, à tous les pauvres gens qui passent, non sans quelque bizarrerie et ostentation), — M.
Que les hommes qui vivent dans une révolution, et qui en sont ou spectateurs éclairés ou acteurs principaux, lèguent à la postérité le dépôt fidèle de leurs souvenirs, c’est un devoir que nous réclamons d’eux ; que ceux mêmes qui, dans une situation secondaire, n’ont vu qu’un coin du vaste tableau et n’en ont observé que quelques scènes, nous apportent leur petit tribut de révélations, il sera encore reçu avec bienveillance ; et si surtout l’auteur nous peint l’intérieur d’une cour dans un temps où les affaires publiques n’étaient guère que des affaires privées, s’il nous montre au naturel d’augustes personnages dans cette transition cruelle de l’extrême fortune à l’extrême misère, notre curiosité avide pardonnera, agrandira les moindres détails ; impunément l’auteur nous entretiendra de lui, pourvu qu’il nous parle des autres ; à la faveur d’un mot heureux, on passera à madame Campan tous les riens de l’antichambre et du boudoir : mais que s’en vienne à nous d’un pas délibéré, force rubans et papiers à la main, mademoiselle Rose Bertin, modiste de la reine, enseigne du Trait galant, adressant ses Mémoires aux siècles à venir, la gravité du lecteur n’y tiendra pas ; et, pour mon compte, je suis tenté d’abord de demander le montant du mémoire. […] Une autre fois qu’elle allait aussi chez la reine, c’était dans des jours moins heureux, la princesse lui dit : « J’ai rêvé de vous cette nuit, ma chère Rose ; il me semblait que vous m’apportiez une quantité de rubans de toutes couleurs, et que j’en choisissais plusieurs ; mais, dès qu’ils se trouvaient dans mes mains, ils devenaient noirs… » L’éditeur a compris qu’il n’y avait pas là de quoi faire un volume : il a donc grossi le sien de notes sur le comte de Charolais, le duc d’Orléans, MM. de Choiseul et de Maurepas, qui ne se rattachent aucunement au texte ; ils sont à peine nommés dans l’ouvrage, et voilà qu’on nous donne en notes toute leur vie privée et publique. Les pièces officielles n’y manquent pas, les décrets du Comité de salut public, l’interrogatoire et l’inventaire de la Dubarry, les arrêtés du parlement, que sais-je ?
Car le génie n’est rien qu’une puissance développée, et nulle puissance ne peut se développer tout entière, sinon dans le pays où elle se rencontre naturellement et chez tous, où l’éducation la nourrit, où l’exemple la fortifie, où le caractère la soutient, où le public la provoque. […] Par cette correspondance entre l’oeuvre, le pays et le siècle, un grand artiste est un homme public. […] Sans doute un philosophe comme Hobbes ou Descartes, un érudit comme Henri Etienne, un savant comme Cuvier ou Newton résument à leur façon le large domaine qu’ils se sont choisi ; mais ils n’ont que des facultés restreintes ; d’ailleurs ils sont spéciaux, et ce champ où ils se retirent ne touche que par un coin la promenade publique où circulent tous les esprits.
Ce n’est pas par ces deux nouveautés qu’il a mérité l’estime du Public, mais par des Mémoires sur les Gaules, remplis d’excellentes recherches, qui ont été d’un grand secours aux Historiens postérieurs. […] C’est assez en dire pour annoncer un spéculateur visionnaire, un triste zélateur du bien public, & de plus un Auteur foudroyé par la plume étincelante de M. […] Cette sage précaution, jointe à la noblesse de l’expression toujours soutenue, a procuré à cet Ouvrage plusieurs éditions que le Public ne se lasse pas d’accueillir.
Tant d’œuvres, tant d’auteurs, un tel engouement du public, et, sauf Patelin, pas une œuvre d’art ! […] Leur nombre révèle-t-il une mode, un goût du public ? […] combien grande sa valeur relative, et surtout quel succès auprès du public ! […] Mais, devant ce public qui trouvait Racine brutal, qu’on se représente Tartufe triomphant, Alceste marié et trompé par Célimène, Trissotin épousant Henriette, Argan aux mains de Béline ! […] Alphonse. — Laissons de côté Sardou qui n’est qu’un Hardy plus habile et plus heureux ; sa réclame a trompé le public et l’a peut-être trompé lui-même.
« Le public est, relativement au génie, une horloge qui retarde. […] Où il ne faut voir que le beau, notre public ne cherche que le vrai. […] Mais cela dépasserait les forces vertueuses du public de M. […] Il faut que le petit public se soulage. […] Qu’attendez-vous du ciel ou de la sottise du public ?
Tout citoyen romain était orateur dans la mesure de son esprit et de son talent ; la grande loi, la loi suprême, la loi de la place publique, c’était la parole. […] « Mais surtout ces distinctions, ces honneurs, cette considération publique, en un mot tous vos bienfaits, quelque brillants qu’ils m’aient toujours paru, renouvelés aujourd’hui, se montrent à mes yeux avec plus d’éclat que s’ils n’avaient souffert aucune éclipse. […] Ce mélange de la vie publique et de la vie méditative, cette alternative de l’éloquence et de la philosophie dans la vie du même homme d’État, qui allait mourir sous le glaive des sicaires d’Antoine après avoir combattu les sicaires de Clodius, ne se retrouve dans aucun de nos grands hommes de tribune moderne au même degré. […] N’y a-t-il pas des actions d’elles-mêmes infâmes, lors même que leur auteur échapperait à la flétrissure publique ? […] Lui, en rougissant : — Ne m’interrogez pas là-dessus, dit-il, moi qui suis même descendu sur la plage de Phalère, où l’on dit que Démosthène déclamait au bruit des flots, pour s’habituer à vaincre par sa voix le frémissement de la place publique.
Évidemment, je n’appelle pas romans-feuilletons tous les livres publiés en feuilleton, tels chefs-d’œuvre qui, comme les Parents pauvres, par exemple, auraient été ou seraient obligés de passer par cette porte basse de la publicité, sous cette fourche caudine de l’imagination publique. […] L’abaissement de son exécution fait resplendir qu’il a eu, en écrivant, les yeux attachés sur le public pour lequel il écrivait ; qu’il lui en a fourré selon ses goûts ; qu’il l’a pris par ses préoccupations les plus momentanées ; que l’homme s’est fait enfin le courtisan du public et non son dompteur de génie… cherchant, avant la gloire de l’art, le petit chatouillement de la popularité. […] Les abonnés, dont dépend le journal, n’auraient peut-être pas accepté la monstrueuse et basse immoralité du monsieur dont Feydeau a distillé les infamies dans son roman, si, de temps à autre, l’auteur n’eût montré une indignation honnête, et allongé, pour l’acquit de la conscience publique, un coup de fouet à l’indigne animal qu’il conduit l’espace de trois volumes dans le brancard de son feuilleton. […] Enfin, dans le Mari de la Danseuse, vous avez la Pologne, couplet de circonstance, chanté pour le public de l’Opinion nationale où le livre de Feydeau a paru : et, pour faire pendant à l’Afrique, vous avez un bout de New-York et de San-Francisco, cette actualité pour les feuilletonistes en quête de neuf !
En 1863 fut publiée la première édition publique du poème ; je juge inutile de parler des variantes qu’elle renferme. […] Lévy, directeur de l’orchestre de Munich ; mais ce Lohengrin, qui est toute poésie, a été traîné sur une traduction française, devant un public boulevardier qui a trouvé cet « opéra » délicieux. […] L’art que voulait Wagner ne pourrait vivre entièrement, pleinement que « par la volonté de tous les artistes réunis », et par la volonté du public qui se joindrait à celle des artistes, c’est ce que très peu comprennent, tant parmi les artistes que parmi le public. […] Elle ne se fait pas vis-à-vis du grand public ; la Revue Wagnérienne, qui disparaît aujourd’hui, était la seule tentative dans cette direction. — Ce ne sont cependant pas les efforts pour éclairer le public qui manquent, car nous sommes inondés depuis plusieurs années de livres et de brochures sur Wagner et son œuvre. […] Camille Benoit a rendu à Wagner un fort mauvais service en donnant au public français la traduction soit de brochures sans importance, soit de fragments arrachés à ses écrits.
Le moment allait venir où les fonctions publiques manqueraient à M. […] En prenant pour sujet l’histoire de Venise, il se donnait une ample et neuve matière dans laquelle trouveraient place naturellement toutes les observations de sa vie publique et les fruits de son expérience sur les gouvernements et sur les hommes. […] Lui, il était surtout favorable aux productions sérieuses, et il croyait voir que le goût du public et des lecteurs s’y portait de plus en plus103. […] Quelques fragments, lus en séance publique, de ce poème exact, dont l’écueil à la longue est dans la monotonie, mais dont la versification ferme et serrée rappelle souvent les bonnes parties ordinaires de Lucrèce, inspirèrent assez d’estime à l’Académie des sciences pour qu’elle s’associât l’auteur comme membre libre en remplacement du comte Andréossi (27 octobre 1828). […] Si vous voulez être libres, soyez forts ; pour être forts, soyez unis ; pour demeurer unis, ayez de l’esprit public, c’est-à-dire préférez l’intérêt général à votre intérêt privé, et souvenez-vous qu’il n’y aurait point d’injustice, si tous les citoyens la ressentaient comme celui qui l’éprouve.
Mais, selon cette idée que se fait le bon public, on n’est pas défiguré toujours, on est idéalisé quelquefois : n’en faudrait-il pas prendre son parti alors, composer avec cet idéal, et ne le pas secouer avec ce sans façon ? Le devoir d’un écrivain et de tout homme public est en raison composée de ce qu’il est et de ce qu’il a donné à croire par ses écrits et par ses paroles. […] Lui est-il donc permis de se prendre d’autant plus à la légère, que le public l’a pris davantage au sérieux ? […] S’il y avait en eux un préjugé défavorable contre les poëtes, ce ton à l’égard de soi-même et de son public ne le dissiperait pas et l’augmenterait plutôt. […] Le public ami du poëte en a souffert amèrement.
Les Romains avaient commencé par mépriser les beaux-arts, et en particulier la littérature, jusqu’au moment où les philosophes, les orateurs, les historiens rendirent le talent d’écrire utile aux affaires et à la morale publique. […] Les patriciens instituaient, par condescendance pour le peuple, des spectacles, des chants et des fêtes ; mais la puissance durable étant concentrée dans le sénat, ce corps devait nécessairement donner l’impulsion à l’esprit public. […] Les Romains n’auraient jamais supporté, sur leur théâtre, les plaisanteries grossières d’Aristophane ; ils n’auraient jamais souffert que les événements contemporains, les personnages publics fussent ainsi livrés en spectacle. […] L’écrivain qui compose a toujours ses juges présents à la pensée ; et tous les ouvrages sont un résultat combiné du génie de l’auteur, et des lumières du public qu’il s’est choisi pour tribunal. […] Des écoles publiques furent instituées pour étudier l’esprit des lois ; des commentateurs les analysèrent.
Sans doute nos mœurs extérieures, c’est-à-dire nos habitudes sociales, nos rapports entre nous dans les relations publiques et dans les relations privées, ont plus d’une fois subi de très grands changements ; peut-être même qu’aucun peuple n’a été soumis à autant de vicissitudes, et n’a plus présenté le spectacle d’un peuple changeant et mobile, d’un peuple difficile à fixer. […] Cette austérité des habitudes républicaines, cette aridité du régime constitutionnel, sont peu à notre usage : nous aimons à pouvoir nous occuper de la chose publique, comme de tout, et en nous jouant, si j’ose parler ainsi ; car tout ce qui nous intéresse, tout ce qui fait le sujet de nos études ou de nos méditations, nous aimons à en parler, le, soir, dans la chambre des dames, comme disaient nos anciens chevaliers sur le champ de bataille ou sur la brèche d’une forteresse ouverte par leur vaillance. […] Ainsi l’excommunication admise par les traditions du clergé de France contre les spectacles paraît être en opposition avec les opinions actuelles, avec les progrès de la société : cependant elle est tellement dans nos habitudes de bienséance, que si elle tombe devant la force de l’opinion il restera toujours cette sorte d’excommunication civile dont les Romains, avant nous, avaient déjà frappé cette classe qui se dévoue aux plaisirs du public, cette profession où ceux qui l’exercent immolent leur personne même à la multitude. […] C’est peut-être dans cette seule combinaison de la marche de l’esprit public qu’il faut attribuer la distance qui se trouve maintenant entre les mœurs et les opinions. […] Chez nous, par exemple, dès le moment où le tiers-état a commencé à se soustraire à la féodalité, c’est-à-dire vers le temps des croisades, il a commencé à être la nation même ; car la noblesse n’a plus eu qu’un ministère à l’égard de la société, c’est-à-dire un service public à accomplir : des honneurs sans doute étaient attachés à ce service public, mais enfin la nation tout entière marchait dans la direction progressive dont nous venons de parler.
Baudelaire étaient depuis longtemps attendues du public, j’entends de ce public qui s’intéresse encore à l’art et pour qui c’est encore quelque chose que l’avènement d’un poète. […] Ce qui manque aujourd’hui aux hommes d’un vrai mérite, aux artistes graves et convaincus, ce n’est donc pas le bon vouloir du public ; le public ne demande qu’à faire des succès, parce qu’il veut jouir. […] Le public, nous en sommes témoins, s’est entretenu dix ans dans cette attente. […] Baudelaire, attendre l’impression du public. […] Il faut bien cependant que le public sache ce qu’est ce poète terrible dont on veut lui faire peur.
» Qu’on veuille y réfléchir : ce n’est pas là un accident oratoire que cette opposition ainsi proférée et proclamée au début de la carrière, par un homme public jeune et grave, âgé de trente-quatre ans ; c’est une intention, une volonté réfléchie et formelle, un système ; c’est tout un engagement et un serment ; et il l’a tenu ! […] Pasquier s’y était refusé par des raisons de convenance politique, et où il s’autorisait même de son avenir d’homme public pouvant être utile au roi ; ce refus avait un peu étonné et piqué Louis XVIII, qui avait dit : « Concevez-vous M. […] Dans sa haute et suprême situation publique de président de la Chambre des pairs, il retrouva toute sa valeur un peu dispersée jusqu’alors, il la rassembla pour ainsi parler, et l’accrut encore au su et vu de tous. […] Il se garda bien de donner dans aucune de ces théories absolues, de ces professions de foi excessives, qui ne servent qu’un jour et qu’une heure, et qui embarrassent dans toute la suite de la vie publique. […] Royer-Collard était président du Conseil de l’Instruction publique, Jouffroy, alors maître de conférences à l’École normale, avait parlé trop librement du Christianisme devant ses élèves, au nombre desquels se trouvait alors un parent de M. de Villèle.
Mais il n’en est pas moins vrai qu’écrire pour être lu du public est de moins en moins une rareté et une marque à part, que tout le monde aujourd’hui est sujet à se faire imprimer plus d’une fois dans sa vie, et que le maniement du langage dans ses emplois les plus divers n’a plus rien de mystérieux. […] Il nous faut en prendre décidément notre parti, écrivains et gens de lettres : tout homme d’esprit qui est d’une profession, s’il a à s’en expliquer devant le public, surpasse d’emblée les lettrés, même par l’expression ; il a des termes plus propres et tirés des entrailles mêmes du sujet. […] Eugène Véron (par des articles récents de la Revue de l’Instruction publique)… ; j’y suis moi-même entré depuis bien des années, et en affichant si peu d’intention systématique que beaucoup de mes lecteurs ou de mes critiques ont supposé que j’allais purement au hasard et selon ma fantaisie. […] Un jour, après une distribution de prix du Concours général, dînant chez le ministre de l’Instruction publique, il se trouva placé à côté de M. […] Deschanel en Belgique, laborieux, courageux, faisant des cours publics, des conférences, et publiant de petits livres fort agréables et fort lus.
Tout ceci fut exposé dans le rapport prononcé en séance publique par M. […] Le public, la foule n’y avait que faire, comme bien l’on pense ; en proie aux irritations de parti, aux engouements grossiers, aux fureurs stupides, on laissait cet éléphant blessé bondir dans l’arène, et l’on était là tout entre soi dans la loge grillée. […] Ces vrais poëtes gagnèrent aux réunions intimes dont ils étaient l’âme, d’avoir dès lors un public, faux public il est vrai, provisoire du moins, artificiel et par trop complaisant, mais délicat, sensible aux beautés, et frémissant aux moindres touches. L’autre public, le vrai, le définitif, et aussi le plus lent à émouvoir, se dégrossissait durant ce temps, et il en était encore aux quolibets avec nos poètes, ou, qui mieux est, à ne pas même les connaître de nom, que déjà ceux-ci avaient une gloire. […] Le futur recueil dont on a lu le prologue, sera pour le public la preuve de ceci, nous l’espérons.
En un mot cette Grammaire, quoique semée de quantité d’observations utiles, ne répondit nullement à l’espérance que le public en avoit conçu. […] Ce fut un heureux augure pour son livre, auquel le public fit un accueil très-favorable. […] M. d’Olivet a rendu un service inestimable au public en consacrant ses talens & ses veilles à un travail utile, mais pénible & ingrat. Tous ceux qui parlent en public doivent étudier son traité de la prosodie ; c’est un livre classique. […] Le style barbare des anciennes formules commence à se glisser dans les papiers publics.
Le National a déjà signalé à l’attention du public les excellents travaux de M. […] C’est ce que, depuis juillet, malgré la clameur universelle, il a exécuté avec une sévère et imperturbable logique ; c’est ce qui a fait sacrifier la République à la quasi-Restauration ; c’est ce qui a fait sacrifier l’honneur du nom français, le sang de la Pologne, la liberté de l’Espagne et de l’Italie, à l’exigence et au despotisme des rois ; c’est ce qui a fait sacrifier toute amélioration du sort de la classe ouvrière à l’étroit égoïsme de la classe bourgeoise, sacrifier aux menues fantaisies d’un fils de roi la somme destinée à l’éducation des fils de cent mille prolétaires ; c’est ce qui a maintenu l’impôt sur les boissons et sur le sel, et rejeté les blés étrangers par-delà nos frontières ; c’est ce qui a ouvert nos provinces aux insolentes violences des carlistes, troublé nos villes aux éclats de la voix des prolétaires se frayant une issue sur les places publiques, souillé nos régiments du sang des citoyens, et répandu de toutes parts sur le sol ces étincelles qui allument la guerre civile au sein des nations. […] Avec la capacité philosophique éminente qui distingue les écrivains de cette école, s’ils savent tempérer leur ardeur à généraliser, ne pas forcer les conséquences encore lointaines de principes seulement entrevus, ne pas les étendre dès l’abord à tout ; s’ils continuent d’exercer cette faculté de comprendre, cette chaleur sympathique de leur esprit, sur les sujets nombreux susceptibles de solutions partielles et incontestables, nul doute qu’ils ne fondent un honorable centre où bien des esprits se rallieront et où l’élite du public s’habituera de plus en plus. […] Ces fréquentes mystifications ont dû rendre circonspects et le public qui s’est fatigué, et la philosophie qui se cherche encore.
Méditant ce petit traité littéraire et didactique, il était encore dans cette mystérieuse ivresse de la composition, instant bien court, où l’auteur, croyant saisir une idéale perfection qu’il n’atteindra pas, est intimement ravi de son ouvrage à faire ; il était, disons-nous, dans cette heure d’extase intérieure, où le travail est un délice, où la possession secrète de la muse semble bien plus douce que l’éclatante poursuite de la gloire, lorsqu’un de ses amis les plus sages est venu l’arracher brusquement à cette possession, à cette extase, à cette ivresse, en lui assurant que plusieurs hommes de lettres très hauts, très populaires et très puissants, trouvaient la dissertation qu’il préparait tout à fait méchante, insipide et fastidieuse ; que le douloureux apostolat de la critique dont ils se sont chargés dans diverses feuilles publiques, leur imposant le devoir pénible de poursuivre impitoyablement le monstre du romantisme et du mauvais goût, ils s’occupaient, dans le moment même, de rédiger pour certains journaux impartiaux et éclairés une critique consciencieuse, raisonnée et surtout piquante de la susdite dissertation future. […] Quoique ces diverses formules, au dire du discret conseiller, ne fussent pas sans quelque vertu tentatrice, l’auteur de ce livre ne se sentit pas assez d’humilité et d’indifférence paternelle pour exposer son ouvrage au désenchantement et à l’exigence du lecteur qui aurait vu ces magnifiques apologies, ni assez d’effronterie pour imiter ces baladins des foires, qui montrent, comme appât à la curiosité du public, un crocodile peint sur une toile, derrière laquelle, après avoir payé, il ne trouve qu’un lézard. […] Il les préviendra d’abord que ce mot, seconde édition, est ici assez impropre, et que le titre de première édition est réellement celui qui convient à cette réimpression, attendu que les quatre liasses inégales de papier grisâtre maculé de noir et de blanc, dans lesquelles le public indulgent a bien voulu voir jusqu’ici les quatre volumes de Han d’Islande, avaient été tellement déshonorées d’incongruités typographiques par un imprimeur barbare, que le déplorable auteur, en parcourant sa méconnaissable production, était incessamment livré au supplice d’un père auquel on rendrait son enfant mutilé et tatoué par la main d’un iroquois du lac Ontario. […] Comme il paraît qu’en ce siècle tout lumineux chacun se fait un devoir d’éclairer son prochain sur ses qualités et perfections personnelles, chose dont nul n’est mieux instruit que leur propriétaire ; comme, d’ailleurs, cette dernière tentation est assez forte, l’auteur croit, dans le cas où il y succomberait, devoir prévenir le public de ne jamais croire qu’à demi tout ce que les journaux lui diront de son ouvrage.
C’est pourquoi le public parisien juge encore Wagner, (ce musicien fourvoyé dans le théâtre) une « outrecuidante personnalité. » Gardant, aujourd’hui, par la ridicule ignorance des uns et l’odieuse malhonnêteté des autres, de tels étonnants préjugés, le public parisien est arriéré. […] Or, c’est l’Association Wagnérienne qui veut, ainsi, continuer la pensée du Maître : maintenir, pour l’Œuvre idéale, les représentations du Théâtre idéal, et leur donner, pieux, le Public idéal. […] Les différents morceaux ont été religieusement écoutés, puis acclamés par un public extrêmement nombreux. […] Ç’a été un triomphe sans conteste, bien élogieux pour la Société de Symphonie d’Anvers et pour le public anversois. […] Obtenir la représentation idéale dans un théâtre idéal et préparer le public idéal : voilà donc le but de la Revue en cette nouvelle livraison.
Il se tentait dans l’art, dans la poésie, dans les diverses branches de la pensée, quelque chose de nouveau à quoi le public n’était pas encore accoutumé ; il a fallu bien des efforts pour qu’il y fût définitivement conquis. On peut par là marquer les deux temps de ma manière critique, si j’ose bien en parler ainsi : dans le premier, j’interprète, j’explique, je professe les poëtes devant le public, et suis tout occupé à les faire valoir. […] Dans le second temps, ce point gagné, je me retourne vers eux, je me fais en partie public, et je les juge.
— « Ingrat public ! […] Pendant très longtemps, ce même public, qui la devait adorer, n’a voulu ni la voir, ni l’entendre ; il la trouvait vieille et laide à vingt ans ! […] Cette représentation, où Marivaux et sa légitime interprète se montraient dans tout leur éclat, pour la dernière fois, fut empreinte de je ne sais quelle fièvre inquiète avec toutes les agitations de la fièvre ; et le public et les comédiens semblaient animés des mêmes regrets ; les comédiens jouaient mal, le public écoutait mal, Tartuffe (on jouait encore Tartuffe !) […] Hier encore la flatterie n’avait rien de si lâche et de si rampant qui ne fût à leur taille… le lendemain le public prend sa revanche, et c’est à peine si l’on sait le nom de cette adorée. […] Heureusement la critique est plus humaine que le public.
Le prince est prince de droit public, le pontife est pontife de droit divin. […] Or qu’est-ce que la souveraineté dans le droit public moderne de l’Europe, depuis la décadence de ce que nous appelions le droit divin ? […] S’il en était autrement, il y aurait donc deux droits publics ou deux vérités contradictoires en Europe : un droit public du monde entier, qui est le droit des peuples de modifier leur gouvernement ; un droit public des États romains, qui serait la pétrification de la souveraineté civile dans Rome : c’est absurde ! […] Le droit public moderne reconnaît parfaitement le droit à tout peuple de faire des révolutions chez lui et d’y changer, selon ses volontés libres, la forme de son gouvernement intérieur : c’est ce qu’on appelle liberté, souveraineté du peuple, gouvernement de soi-même ; mais aucun droit public, ni antique ni moderne, ne reconnaît à un peuple constitué dans ses limites par les traités, par les congrès, par les conventions avec les autres États de l’Europe, le droit d’envahir, sans être en guerre, d’autres États voisins, de les ravir à leur souveraineté propre, théocratique, monarchique ou républicaine, et de se les annexer sans le consentement du souverain, du peuple, de l’Europe entière, rassemblée en congrès pour veiller à la constitution générale des sociétés. […] La liberté constitutionnelle à laquelle vous aspirez sera justement plus assurée chez vous qu’à Turin ; ce n’est plus l’arbitraire d’un roi soldat qui vous mesurera selon ses intérêts cette liberté constitutionnelle, et qui vous la changera en dictature militaire au premier tocsin ; c’est vous-mêmes qui vous la donnerez selon vos mœurs et vos lumières, et qui ne la mesurerez qu’à vos vertus publiques !
C’est donc au public et non à moi de caractériser le style des Girondins. […] L’homme m’explique l’événement, le visage m’explique l’homme, les traits me révèlent le caractère, la vie privée me dévoile les motifs souvent cachés de la vie publique. […] Voyez comment ce singe et ce tigre de la Terreur y sont peints ; et cependant, si l’opinion publique a eu quelque faiblesse, même parmi les écrivains royalistes de ce temps, c’est pour Camille Desmoulins, cet enfant gâté de la faveur publique. […] Son journal, colporté le soir dans les lieux publics et crié avec des sarcasmes dans les rues, n’a pas été balayé avec ces immondices du jour. […] La volonté publique devient le gouvernement.
Il fut un temps où cette seule annonce aurait mis en émoi le public partagé en une double rangée d’admirateurs enthousiastes. Aujourd’hui ce public est dissous, et nous sommes rassasiés. […] Félix Bovet, placé à la source, avait, lui aussi, préparé un travail ; il en a donné au public quelques extraits, et en a surtout communiqué les précieux éléments à tous les curieux qui le visitaient. […] Il considère cette société antérieure et postérieure à l’individu ; il la voit subsistante, nécessaire, harmonieuse, agissant en mille façons et par toutes sortes d’influences inappréciables, plus mère encore que marâtre, ne retirant à l’homme primitif du côté des forces physiques que pour rendre davantage par le moral à l’homme actuel, et imposant dès lors à quiconque naît dans son sein des devoirs, des obligations qui ne sont point proprement de particulier à particulier, mais qui prennent un caractère commun et général : Car les individus, dit-il, à qui je dois la vie, et ceux qui m’ont fourni le nécessaire, et ceux qui ont cultivé mon âme, et ceux qui m’ont communiqué leurs talents, peuvent n’être plus ; mais les lois qui protégèrent mon enfance ne meurent point ; les bonnes mœurs dont j’ai reçu l’heureuse habitude, les secours que j’ai trouvés prêts au besoin, la liberté civile dont j’ai joui, tous les biens que j’ai acquis, tous les plaisirs que j’ai goûtés, je les dois à cette police universelle qui dirige les soins publics à l’avantage de tous les hommes, qui prévoyait mes besoins avant ma naissance, et qui fera respecter mes cendres après ma mort. […] Nous vivons dans le climat et dans le siècle de la philosophie et de la raison ; les lumières de toutes les sciences semblent se réunir à la fois pour éclairer nos yeux et nous guider dans cet obscur labyrinthe de la vie humaine ; les plus beaux génies de tous les âges réunissent leurs leçons pour nous instruire ; d’immenses bibliothèques sont ouvertes au public ; des multitudes de collèges et d’universités nous offrent dès l’enfance l’expérience et la méditation de quatre mille ans ; l’immortalité, la gloire, la richesse et souvent les honneurs sont le prix des plus dignes dans l’art d’instruire et d’éclairer les hommes : tout concourt à perfectionner notre entendement et à prodiguer à chacun de nous tout ce qui peut former et cultiver la raison : en sommes-nous devenus meilleurs ou plus sages ?
Pour faire des Tragédies qui puissent intéresser le public en 1823, faut-il suivre les errements de Racine ou ceux de Shakspeare ? […] Le public, qui ne jouit pas d’ailleurs d’une extrême liberté, aime à entendre réciter des sentiments généreux exprimés en beaux vers. […] C’est par cette raison ignorée de lui-même, car à vingt ans, quoi qu’on en dise, l’on veut jouir, et non pas raisonner, et l’on fait bien ; c’est par cette raison secrète que le jeune public du second théâtre français se montre si facile sur la fable des pièces qu’il applaudit avec le plus de transports. […] c’est que le public ne veut que de beaux vers. Le public va chercher au théâtre français actuel une suite d’odes bien pompeuses, et d’ailleurs exprimant avec force des sentiments généreux.
La portion du public qui veut bien suivre ses travaux avec quelque intérêt a lu peut-être le livre intitulé le Rhin, et sait par conséquent que ce voyage d’un passant obscur ne fut autre chose qu’une longue et fantasque promenade d’antiquaire et de rêveur. […] Seulement, en l’employant, l’auteur voulait réveiller un grand souvenir, glorifier autant qu’il en était en lui, par ce tacite hommage, le vieux poëte de l’Orestie qui, méconnu de ses contemporains, disait avec une tristesse fière : Je consacre mes œuvres au temps ; et aussi peut-être indiquer au public, par ce rapprochement bien redoutable d’ailleurs, que ce que le grand Eschyle avait fait pour les titans, il osait, lui, poète malheureusement trop au-dessous de cette magnifique tâche, essayer de le faire pour les burgraves. Du reste, le public et la presse, cette voix du public, lui ont généreusement tenu compte, non du talent, mais de l’intention. […] Il est fier de l’attention persistante et sérieuse dont le public veut bien entourer ses travaux, si insuffisants qu’ils soient, et, sans répéter ici ce qu’il a déjà dit ailleurs, il sent que cette attention est pour lui pleine de responsabilité.
Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps Le Feuilleton de 1830 et années suivantes parlait souvent de la comédienne unique et charmante, mademoiselle Mars ; c’est qu’à entendre parler de cette femme adorée, le public, inconstant d’habitude, ne se lassait pas ! […] Ni les uns ni les autres ne songent même à posséder cette belle : ce qu’ils veulent avant tout, c’est une bonne parole et devant témoins ; c’est un tendre regard, en public ; ce sont des lettres qu’ils puissent montrer à tout venant ; et quant au reste, le reste viendra, si veut Célimène. — Et justement voilà pourquoi Célimène, fidèle au rôle qu’elle s’est imposée, est si prodigue envers les uns et les autres de bonnes paroles, de tendres regards, de billets doux ; là est sa force, et elle a besoin d’être forte pour se défendre. […] Alors Baron s’avançant tout au bord du théâtre, et regardant dans cette foule, comme s’il eût pu découvrir les insulteurs : — Ingrat public que j’ai formel dit-il en les montrant du doigt ; et depuis ce jour-là, on eut beau le prier et le supplier de reparaître, il ne reparut plus. « Oui, ingrat public, qui ne voit pas ces insultes cachées ! Ingrat public, qui ne comprend pas tout ce qu’il va perdre !
Le public et la critique les y mettent également ; mais c’est la critique qui crée dans le public enivré cette prodigieuse idolâtrie. Plus coupable que le public, parce qu’elle devrait le diriger et le conduire, la critique de théâtre a fait au comédien, et surtout à la comédienne, une position exceptionnelle, anarchique et folle, à ne voir même que le théâtre et les intérêts de l’art dramatique ; car, si l’on place dans le ciel le simple interprète d’une œuvre de talent ou de génie, où placera-t-on celui qui l’a faite ? […] Aujourd’hui, le feuilleton dépasse de beaucoup sur l’imagination publique les impressions données par les pièces. […] Pendant que nous parlions de l’idolâtrie au théâtre et que nous dénoncions l’histrionisme comme un des signes de la fin des temps pour les peuples, les mœurs publiques nous répondaient.
Guizot, qui a bien d’autres motifs d’être heureux et tranquille, semblait depuis longtemps l’avoir aussi oublié que le public, quand le succès, très vif et très mérité, de François-Victor Hugo a réveillé tout à coup cette antique prétention de traduction et de critique, qu’on croyait morte et qui n’était qu’endormie. […] Or, une Vie de Shakespeare est autrement difficile à faire qu’une Vie de Washington, qui eut, lui, la vie publique de la place publique, du champ de bataille, de la tente, des congrès, de la correspondance, et qui éclate partout comme le soleil du nouveau monde, et plus beau, car ce n’est qu’un astre ! […] Ni Aubrey, le premier historien de Shakespeare, qui écrivait cinquante ans après la mort de ce grand homme, compris par le public de son temps avec la finesse et la sûreté d’appréciation ordinaires à toutes les foules et à tous les publics ; ni Nathan Drake, qui a fait un livre énorme sur Shakespeare qu’il appelle Shakespeare et son temps (Shakespeare and His Time), un titre, je crois, de la connaissance de Guizot ; ni Guizot enfin, lequel pourtant, je m’imagine, ne doit pas être l’ennemi complet du représentatif dans l’humanité, n’ont pensé comme Emerson et, comme lui, fait également bon marché de la prodigieuse originalité du génie de Shakespeare et de la vie privée de cet homme phénoménal, — à lui seul tout un monde perdu, qui attend encore son Cuvier !
Quoique le goût de la musique soit assez vif, c’est avec une espèce d’indolence que l’on va se placer ; l’aspect d’une foule ferait trembler un public italien. […] Le public prit une part assez vive à la discussion littéraire qui s’éleva ensuite entre Geoffroy et M. […] Ils n’osaient pas manifester cette opinion à la face du public ; mais elle est consignée très clairement dans leur correspondance intime. […] C’était de la laisser dans l’oubli qu’elle méritait, ou, s’il en faisait part au public, ce ne pouvait être que pour la réfuter et venger l’honneur de Corneille. […] Il est vrai que son héroïsme est moins agréable au public ; ce qui prouve combien l’esprit du théâtre est faux, dangereux pour les mœurs, et nuisible à la société.
Je luy ay rendu dans mes odes un hommage public que je confirme encore avec plaisir. […] Nous n’avons en vûë l’un et l’autre que la vérité, et l’avantage du public. […] Le public s’appuye alors sur ce jugement ; et ce jugement lui-même n’étoit appuyé que sur l’admiration publique. […] Nous avons dit nos raisons ; c’est au public à prononcer. […] Tous mes confreres sont témoins de l’accüeil que le public a fait aux livres qu’il a entendus, et le public est témoin lui-même de l’approbation de la plûpart de mes confreres.
Du reste, ils ne s’exemptent pas eux-mêmes de cette censure publique. […] Elle eut à cet égard à résister à quelques superstitieux de son principe, qui voulaient immoler en toutes circonstances l’écrivain au public, et se montraient plus académiciens que l’Académie. […] « Je ne veux pas, disait-il, en servant le public, nuire aux particuliers que j’honore. » S’il lui faut critiquer un vivant, il altère le passage où se trouve la faute, afin qu’on ne reconnaisse pas qui l’a faite. […] Cette influence, qui s’est exercée sur des hommes de la trempe de Boileau (et combien plus sur tout le public éclairé d’alors !) […] Dès 1660, l’Académie française, par ses travaux sur la langue, Port-Royal, par son enseignement, avaient fort avancé la double tâche de fixer la langue et de faire l’éducation du public.