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239. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Pénétrez dans le quartier funèbre de Thèbes : la ville de la mort s’étale au milieu de la ville vivante ; silencieuse comme un sépulcre, active comme un laboratoire. […] Il remplit Rome, la ville positive, des fantasmagories du despotisme asiatique. […] De tous côtés, on n’entend plus que le fracas des villes qui tombent et le râle des nations qu’on égorge. […] Sa poudre de succession faisait par la ville les ravages d’une épidémie. […] Elles ensorcellent la jeunesse de la ville, et font le dégât d’une invasion dans ses patrimoines.

240. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

Ma fenêtre, dans une chambre de faubourg hors de la ville, était assez rapprochée pour que les sons aigus de l’instrument fussent saisissables à mon oreille et pour que je fisse cadrer mes visites avec l’absence de celle qui fut, plus tard, ma belle-mère. […] Le contraste du calme resplendissant de cette solitude, cernée par les flots de la mer, avec le bruit menaçant et tumultueux d’une grande ville en révolution, augmentait la sensation de bonheur, de calme et de sécurité qu’inspirait cette résidence enchantée entre le ciel et l’eau. […] J’y arrivai au moment où un détachement de l’armée autrichienne campait de l’autre côté du Tibre, prêt à entrer dans la ville, si une révolution analogue à la révolution d’Espagne, de Naples et de Turin, venait à éclater, comme on l’annonçait à toute heure. […] C’était la ville hanséatique des consciences et des opinions. […] C’était un Poussin moderne tout à fait italianisé par son talent et par son culte pour Raphaël, dont il recherchait les moindres vestiges, et dont il légua, à sa mort, les reliques retrouvées au musée de sa ville natale, Montpellier.

241. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Bayreuth est une ancienne petite ville de Bavière, sur le plateau de la Haute-Franconie, à peu près au centre de l’Allemagne ; elle est arrosée par une rivière, le Rothe-Mayn, dans un pays accidenté et pittoresque. Un chemin de fer la relie à Nuremberg et à Bamberg, et, par ces deux villes, — mais indirectement, — au reste de l’Allemagne. […] L’activité de Richard Wagner et le dévouement du roi de Bavière sauvèrent l’œuvre : le Maître donna, dans les principales villes d’Allemagne, au profit du Théâtre de Bayreuth, des concerts, qui lui gagnèrent deux cent mille marks, et le « Royal Ami » intervint, chaque fois que ce fut nécessaire. […] Le Théâtre est à quelques distance de la ville, sur une petite colline, au milieu d’un parc : une large route, en pente douce, bordée d’arbres, y mène, traversant le parc ; et, des portes du Théâtre, on aperçoit, par tous côtés, l’horizon : en face, la vieille ville de Bayreuth, et, au loin, la campagne ; par derrière, les chaînes montagneuses du Sophienberg. […] Il vivait à Vienne, n’a pas connu d’autre ville que Vienne ; n’est-ce point tout dire ?

242. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Quelle justice, grand Dieu, de m’accabler de maux et de craintes, parce qu’une ville a reçu de moi le sceau de la piété chrétienne ! […] Une fois éloigné, je goûterai la vie paisible, laissant là tout ensemble, et la cour, et les villes, et les prêtres, comme je le souhaitais jadis. […] Tantôt je me suis approché en suppliant des temples saints de ton culte vénéré ; tantôt, sur la crête des montagnes, je suis venu prier ; tantôt je suis descendu dans cette grande vallée de la Libye déserte, au midi, là où nul souffle impie ne pénètre, où n’est point imprimée la trace des hommes affairés de nos villes. […] Arrière, fléau des mortels privés de Dieu, magnificence des villes ! […] Il mourut, comme saint Augustin, dans sa ville épiscopale assiégée par les barbares ; et, sans être jamais devenu complètement orthodoxe, il fut martyr.

243. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Le jeune Bossuet, qui demeurait dans la maison de son oncle, suivait ses classes au collège des Jésuites de la ville. […] Il commence avec grandeur et par une large similitude : Comme on voit que de braves soldats, en quelques lieux écartés où les puissent avoir jetés les divers hasards de la guerre, ne laissent pas de marcher dans le temps préfix au rendez-vous de leurs troupes assigné par le général ; de même, le Sauveur Jésus, quand il vit son heure venue, se résolut de quitter toutes les autres contrées de la Palestine par lesquelles il allait prêchant la parole de vie ; et sachant très bien que telle était la volonté de son Père qu’il se vînt rendre dans Jérusalem, pour y subir peu de jours après la rigueur du dernier supplice, il tourna ses pas du côté de cette ville perfide, afin d’y célébrer cette Pâque éternellement mémorable et par l’institution de ses saints mystères et par l’effusion de son sang. Et c’est alors que, tandis que Jésus descend le long de la montagne des Olives, il le présente touché au vif dans son cœur d’une tendre compassion, et pleurant sur la ville ingrate dont il voit d’avance la ruine ; puis, tout d’un coup, sans transition et par une brusque saillie qui peut sembler d’une érudition encore jeune, Bossuet s’en prend à l’hérésie des marcionites qui, ne sachant comment concilier en un seul Dieu la bonté et la justice, avaient scindé la nature divine et avaient fait deux Dieux : l’un purement oisif et inutile à la manière des épicuriens, « un Dieu sous l’empire duquel les péchés se réjouissaient », le Dieu qu’on a nommé depuis des bonnes gens ; et, en regard de ce Dieu indulgent à l’excès, ils en avaient forgé un autre tout vengeur, tout méchant et cruel : et aussi, poussant à bout la conséquence, ils avaient imaginé deux Christs à l’image de l’un et de l’autre Père. […] Il en énumère les circonstances, il la commente, la suit pas à pas en l’accompagnant de ses cris d’aigle ; et quand il a amené les Romains et l’empereur Tite devant Jérusalem, quand il est bien sûr qu’elle est investie, qu’elle est entourée de murailles par l’assiégeant, qu’elle est plutôt comme une prison que comme une ville, et que pas un du dedans, comme un loup affamé, n’en peut échapper pour chercher de la nourriture : Voilà, voilà, chrétiens, crie-t-il, en triomphant, la prophétie de mon Évangile accomplie de point en point.

244. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Mâtho cherche partout une brèche, un passage, pour pénétrer dans cette ville ennemie qui renferme son trésor : « Son impuissance l’exaspérait. […] En effet, il a observé les jours précédents l’aqueduc qui conduit les eaux douces dans la ville : il décide Mâtho à s’y enfoncer avec lui, et après des prodiges de dextérité et de bonheur, tantôt nageant, tantôt rampant, ils s’introduisent dans la ville. […] Mâtho, revêtu du voile rayonnant, les effraye, passe au travers d’eux tous, personne ne se risquant à l’approcher ni à le toucher ; il s’éloigne et traverse ainsi la ville, que le bruit de son audace et de son crime a éveillée et soulevée.

245. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Sa surdité l’empêchait de participer aux agréments de cette société très-distinguée, mais sa femme et ses filles attiraient chez lui la cour et la ville. […] En 1848, à la fatale journée du 15 mars, où le peuple fit invasion dans l’Assemblée constituante et la dispersa par un acte de démence, j’y rentrai avec un bataillon de gardes mobiles et nous dispersâmes les séditieux, maîtres du palais de la Chambre ; je haranguai les députés au son d’un tambour, et je montai à cheval pour marcher contre l’Hôtel de ville, occupé par six cents hommes et six pièces de canon braquées sur nous. […] L’Hôtel de ville fut pris et les chefs des factieux furent faits prisonniers avant la nuit. Ledru-Rollin, craignant avec raison qu’ils ne fussent massacrés par le peuple en allant à Vincennes, eut l’heureuse pensée de les garder jusqu’à la nuit à l’Hôtel de ville.

246. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

L’Italie était alors tout en confusion ; ses plus grandes villes s’étaient érigées en Républiques, tandis que les autres suivaient la fortune de quelques petits tyrans. […] Les papes avaient toujours eu l’adresse de leur susciter des embarras dans l’empire, et de leur opposer les rois de France : de sorte que les empereurs, ne venant à Rome que pour punir un pontife, ou imposer des tributs aux villes coupables, revolaient aussitôt en Allemagne pour apaiser les troubles ; et l’Italie leur échappait. […] Pistoie, ville du territoire de Florence, était depuis longtemps troublée par les intrigues de deux familles puissantes, et ces intrigues avaient produit deux partis qu’on appela les Blancs et les Noirs, pour les mieux distinguer sans doute. […] Après cet événement, il se flattait d’une paix durable, lorsqu’étant allé en ambassade à Rome, les Noirs profitèrent de son absence, mirent à leur tête Charles de Valois, frère de Philippe le Bel, et, secrètement aidés par Boniface VIII, rentrèrent dans la ville.

247. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

La prostitution des grandes villes, ce « tant pour cent » de bestialité que l’humanité prélève sur sa propre chair, lui est amèrement familière. […] Il hait et écarte les beaux diseurs, les intelligents, les habiles, les hommes bien élevés qui pensent et sentent selon les formulaires et laissant à d’autres la peinture de l’être social, il descend à tout ce qui est resté de franc et de brut dans la lie des villes ou des caractères. […] Malade de la névrose épileptique, ayant passé en sa jeunesse par le choc effroyable d’une condamnai ion à mort, et gracié les pieds sur l’échafaud, pour aller traîner des années dans un bagne en Sibérie avec toute la vermine d’une société primitive, il vécut ensuite sous le ciel, « saturé d’encre », de Saint-Pétersbourg, et promena dans cette sombre ville, dure aux pauvres, sa silhouette râpée. […] Dans cette vie obscure et dans cette ville neigeuse ou torride, l’intelligence vacillante et la sensibilité malade de Dostoïewski se sont émues et déployées.

248. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

Lorsque le Nil était contenu dans des canaux et dans de vastes bassins, il distribuait la fécondité parmi les peuples, et l’Égypte était couverte de villes immenses. […] Sa ville, dont le nom se trouve une seule fois dans l’histoire, s’appelait-elle la ville des Palmiers, ou la Reine du désert ? Si l’industrieux Batave cesse un instant de réparer les digues qu’il sut élever à force de courage et d’art, bientôt la mer retombera de tout son poids, et les villes ne seront plus que d’affreux récifs, ou des phares pour les navigateurs.

249. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

Préface Une des légendes les plus répandues en Bretagne est celle d’une prétendue ville d’Is, qui, à une époque inconnue, aurait été engloutie par la mer. […] Il me semble souvent que j’ai au fond du cœur une ville d’Is qui sonne encore des cloches obstinées à convoquer aux offices sacrés des fidèles qui n’entendent plus. […] Pour moi, je ne suis jamais plus ferme en ma loi libérale que quand je songe aux miracles de la foi antique, ni plus ardent au travail de l’avenir que quand je suis resté des heures à écouter sonner les cloches de la ville d’Is.

250. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

 » Lisant un jour, dans une gazette du théâtre, que le public de la ville de *** avait l’habitude de jeter des gros sous aux acteurs trouvés mauvais, c’est lui qui écrivait au directeur du théâtre de cette ville, pour lui offrir d’aller y donner des représentations. […] *** Le coupé de mademoiselle D… stationnait devant les Villes de France. […] Il a été rattrapé par un sergent de ville, et reconduit dans sa prison de verre, où il continue à ne pas vouloir descendre au-dessous de la température des vers à soie. […] Quant à M. de Balzac, il n’en voulut pas démordre, et pendant longtemps il entretint toute la ville de ce beau trait de ses amis. […] Et, prenant autant d’exemplaires que peuvent en contenir ses poches, il en va faire la distribution dans la ville.

251. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Clément Marot, et deux poëtes décriés, Sagon & La Huéterie. » pp. 105-113

On y voit son valet, rendant cette justice à son maître, d’être estimé des bons écrivains, & de n’avoir pour ennemis,         Qu’un tas de jeunes veaux, Un tas de rimasseurs nouveaux, Qui cuident eslever leur nom Blasmant les hommes de renom ; Et leur semble qu’en ce faisant, Par la ville on ira disant : Puisqu’à Marot ceux-cy s’attachent, Il n’est possible qu’ilz n’en sçachent. […] L’auteur suppose que Mercure, venant de Paris, rencontre, dans une avenue de cette ville, Honneur qui se promenoit, & qui s’arrête pour lui demander des nouvelles.

252. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 25, des personnages et des actions allegoriques, par rapport à la poësie » pp. 213-220

Paris y paroissoit comme le pere de trois filles qu’il vouloit marier, et ces trois filles étoient les trois principaux quartiers de la ville de Paris, l’université, la ville proprement dite et la cité, que le poëte avoit personifiez.

253. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Crébillon, très-supérieur à son compatriote Piron, était de Dijon ; cette ville fournissait ainsi la France d’antagonisme et d’envie contre un vrai grand homme. […] Genève lui offrait à la fois en perspective les avantages d’une ville lettrée et l’indépendance d’une terre vierge des tyrannies des rois et des ombrages de l’Église. […] Il parut chercher une habitation dans le voisinage ; mais la froideur de l’archevêque de Lyon, autrefois son ami, maintenant son observateur hostile, et le saint murmure d’un clergé menaçant dans une ville fanatique, le forcèrent à renoncer à ce périlleux séjour. […] Il y appela de Genève et des villes voisines des familles d’ouvriers horlogers, auxquels il fournit libéralement des maisons, des capitaux, des matières premières, pour exercer leur industrie sous ses auspices. […] Il rêvait une ville future de son nom.

254. (1925) La fin de l’art

On a beaucoup détruit dans les campagnes, dans les villes de province. […] Comme telles grandes villes, anciennement riches, Paris, qui n’avait pas encore été remanié, était encore en 1830 un véritable musée de pierre. […] Ils ont traité de même d’ailleurs la plupart des villes célèbres de l’Europe. […] Or, la ville de Calvi se donna, en 1459, au « Sérénissime Seigneur le Roi de France » : donc, quand il découvrit l’Amérique, il était sujet français. […] Une province aussi est vaste à qui la veut bien connaître, et une ville aussi et aussi un canton.

255. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

La ville indigène est encore très vivante. […] Un blanc soleil rayonnait sur la ville, plein d’allégresse, malgré son peu de force et la bise aiguë. […] Depuis trente ans, je fis deux courtes visites à ma ville natale. […] La nuit gagne la ville. […] … J’ai revu la ville de Cannes sous la pluie.

256. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface et note de « Notre-Dame de Paris » (1831-1832) — Note ajoutée à l’édition définitive (1832) »

Et l’on ne parle pas ici seulement de ce qui se passe en province, mais de ce qui se fait à Paris, à notre porte, sous nos fenêtres, dans la grande ville, dans la ville lettrée, dans la cité de la presse, de la parole, de la pensée.

257. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

Sortez un beau jour de printemps de l’enceinte fangeuse et enfumée des villes, égarez vos pas dans la campagne, au bord du fleuve, au bord des ruisseaux, au bord de la mer calme, au bord des bois retentissants ; un chant sort du calice de chaque fleur sous vos pas, du dôme de chaque arbre dans la forêt, du creux de chaque sillon dans les blés en herbe ; l’insecte ivre dans sa coupe de parfum, la caille dans le chaume, le merle dans le buisson, le rossignol sur la branche morte, la cigale elle-même dans la poudre ardente du champ labouré, tout chante devant le soleil. […] Enfin le patriotisme, cette noble passion de l’homme pour le sol menacé de ses pères, de son berceau, de sa tombe, de ses enfants ; le patriotisme, quand il est poussé jusqu’à l’héroïsme par la terreur de voir ses foyers ravagés, ou par le dévouement des Trois-Cents aux Thermopyles antiques ou aux Thermopyles modernes ; le patriotisme chante comme Tyrtée, comme Rouget de Lisle ou comme Béranger dans quelques-unes de ses odes nationales à la veille des combats ; et, quand une victoire inespérée a sauvé par l’héroïsme, soit une ville de la sédition et de la subversion civiles, soit des frontières de l’invasion, et, avec les frontières, ses toits, ses foyers, ses compagnes, ses vieillards, ses enfants, ses mères, l’armée victorieuse traduit instinctivement en chant sa joie et son cri de salut. […] Des yeux rêveurs, une bouche pensive, des dents de lait, petites, rangées dans leurs alvéoles roses comme celles d’un agneau à sa première herbe ; un teint que l’ombre perpétuelle des feuilles dans ce pays de forêts conservait aussi blanc, mais moins délavé, que celui d’une enfant des villes ; une taille ferme, des bras ronds, des mains effilées, des pieds cambrés et délicats, qui brillaient comme deux pieds de marbre d’une statue quand elle les plongeait nus dans le courant de la source en lavant les toisons dans l’eau courante ; un caractère doux, sérieux avant l’âge ; des silences, des rougeurs, des timidités qui la faisaient aimer de toutes ses compagnes et respecter de tous ses compagnons de travail dans la maison et dans les champs, telle était la Jumelle. […] Ils entraient dans les villes et dans les villages sous des arcs de triomphe. […] Le nouveau chant, exécuté quelques jours après à Strasbourg, vola de ville en ville sur tous les orchestres populaires.

258. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Demidoff, le père, qui vivait alors à Florence dans une opulence sans limites, entretenait dans son palais une troupe de comédiens français très distingués, et un orchestre italien réunissait, une fois par semaine, chez lui, tout ce que la cour, la ville et le corps diplomatique renfermaient de spectateurs. […] Je ne fis que traverser la ville, et je descendis à Saltochio, superbe villa antique qu’habitait le marquis de La Maisonfort, de l’autre côté de la plaine, sur la route des bains. […] En quittant Pise et ses monuments de marbre blanc étincelant sous son ciel bleu, qui font de cette ville un musée en plein soleil, on s’enfonce dans des gorges fertiles, où l’olivier, le figuier, le grenadier, le maïs oriental, le peuplier, l’if poudreux, la vigne grimpante, inondent la campagne de végétation. Bientôt ces vallées s’élargissent, et deviennent un bassin de quelques lieues de circonférence, dont la ville de Lucques occupe le centre. […] Ce monde, monsieur, n’est qu’un grand oubli pour la plupart ; je ne dis pas cela pour toi, notre Fior d’Aliza, qui ne nous as jamais oubliés dans notre misère et qui as préféré la veste brune et le bonnet de laine de ton cousin aux plus riches habits et aux chapeaux galonnés des villes.

259. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

Quelquefois aussi j’avais la permission d’entrer dans la chambre de mon père et de lire les volumes contenus dans une ancienne cassette de toilette, qu’on nous envoyait de la ville voisine les jours de marché. […] V Ces chefs-d’œuvre de madame de Surville lui avaient été révélés à lui-même à Viviers, petite ville du Vivarais, à son retour de la première émigration en 1795. Il passa alors quelques mois dans cette ville, et ayant été investi de l’héritage de sa famille dans la terre de Vessau, il y trouva de nombreux et curieux manuscrits qui encombraient, depuis deux siècles, les archives du château. […] Un de mes oncles paternels qui demeurait à la ville l’attendait de Paris. […] Bellone, au front d’arhain, ravage nos provinces ; France est en proye aux dents des léoparts : Banny par ses subjects, le plus noble des princes Erre, et proscript en ses propres remparts, De chastels en chastels et de villes en villes, Contrainct de fuyr lieux où devoit régner, Pendant qu’hommes félons, clercs et tourbes serviles L’ozent, ô crime !

260. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

Un cavalier de la ville l’ayant été voir, elle lui enleva du cou un joyau qui renfermait le portrait d’une très belle dame, donné par celle-ci à ce cavalier nommé Oratio. […] Ils se félicitent entre eux de cet usage de faire des cadeaux aux comédiens, usage répandu parmi les villes d’Italie et auquel ne manquent guère les personnes d’un rang distingué. […] Le 10 juin, ses obsèques eurent lieu avec beaucoup de solennité ; les échevins y envoyèrent les bannières de la ville avec leurs massiers ; la corporation des marchands suivit le convoi avec des torches.

261. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

Une rivière qui s’ennuie Au bas de la ville de Poitiers — coule, ou plutôt paraît couler, une rivière stagnante qu’on nomme le Clein. […] Plus on approchait de la ville, plus les poteaux se multipliaient. L’Empereur, très intrigué, s’arrête et fait appeler le maire de la ville pour avoir l’explication de cette inscription énigmatique.

262. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Puis il vieillit en paix dans sa ville natale. […] Il était aussi salarié par la ville comme percepteur, sur le marché, des droits d’étalage. […] Cléopâtre morte, il y eut de grandes réjouissances dans la Ville éternelle. […] Né au Havre, en 1863, il avait grandi dans sa ville natale. […] Il allait de ville en ville montrant aux barbares sa douceur et sa simplicité.

263. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

L’unité nationale et militaire de ces diversités politiques eût été quelque chose d’analogue à la confédération hellénique des villes, royaumes, républiques du Péloponèse et des Îles sous la garantie des phalanges macédoniennes. […] Une lune éclatante, se réfléchissant dans les ondes sinueuses et encaissées de l’Arno, brillait comme un fanal sur les murailles grises de la ville des Médicis. […] Les rares habitants qui circulaient sur les places ou qui respiraient le frais autour des fontaines donnaient à la ville un air de magnifique champ des morts, entrecoupé de monuments et peuplé de fantômes. Jamais je n’oublierai cette première entrée de nuit dans la ville de Dante. […] Mais je ne fis pas même attention à la nudité et à l’indigence de cette hôtellerie : j’allais m’endormir et me réveiller dans la ville des grandes mémoires ; c’était assez pour un jeune homme qui ne vivait que d’imagination.

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