Mais, vers la fin, Mme Du Deffand, qui se levait tard et n’était jamais debout avant six heures du soir, s’aperçut que sa jeune compagne recevait en son particulier chez elle, une bonne heure auparavant, la plupart de ses habitués, et qu’elle prenait ainsi pour elle seule la primeur des conversations. […] Mlle de Lespinasse, n’ayant moyen de donner à dîner ni à souper, se tenait très exactement chez elle de cinq heures à neuf heures du soir, et son cercle se renouvelait tous les jours dans cet intervalle de la première soirée. […] Sa première lettre est datée du samedi soir 15 mai 1773.
D’ailleurs, elle n’avait pas quitté la banlieue ; et, même quand elle allait faire visite à la campagne chez quelque ami, elle revenait habituellement le soir et ne découchait pas. […] Le soir, la maison de Mme Geoffrin continuait d’être ouverte, et la soirée se terminait par un petit souper très simple et très recherché, composé de cinq ou six amis intimes au plus, et cette fois de quelques femmes, la fleur du grand monde. […] Mme Geoffrin est venue l’autre soir, et s’est assise deux heures durant à mon chevet ; j’aurais juré que c’était milady Hervey, tant elle fut pleine de bonté pour moi.
Aux beaux jours du Consulat, Mme de Genlis, encore à la mode, un soir qu’elle devait recevoir beaucoup de monde, eut l’idée de jouer au coin de sa cheminée un proverbe improvisé, avec M. […] Cet homme lunatique, qui commence sa matinée du dimanche par contrarier femme et domestique en tout point, par se refuser au dîner périodique de famille sous prétexte qu’on ne l’a pas invité par écrit, qui ne sait qu’imaginer pour contredire les autres et lui-même, qui n’a pas plus tôt exprimé un caprice, qu’il le regrette ; que tout vient tenter et lutiner sans le fixer à un choix ; qui passe de l’envie du trictrac à celle de dîner tout seul, puis à l’idée de se purger, et qui finit, après avoir bien grondé, et sa lune déclinant vers le soir, par se laisser coiffer par sa belle-mère d’un bonnet de coton à longue mèche, et par se coucher docilement à jeun, comme un enfant honteux qui est puni d’avoir fait le malade ; tout ce portrait est délicieux, et si La Bruyère avait fait de son Distrait une petite comédie, c’est ainsi qu’il aurait voulu s’y prendre, qu’il aurait ménagé les scènes, en y semant les jolis mots. […] La belle veuve, à le voir si tranquille en ce jour solennel, et si bien établi tout le soir dans le salon, en est piquée et presque irritée ; elle va jusqu’à se repentir, et elle ne sait pas dissimuler devant ses bonnes amies, qui ne demandent pas mieux que de surprendre sa faiblesse ; retirée chez elle, elle est près de se porter à quelque résolution extrême, et de vouloir continuer ses habitudes de veuve, lorsque pourtant, bien qu’un peu tard et fort tranquillement, M. de Gerfaut arrive.
Le soir vient vite en automne ; la petitesse des fenêtres s’ajoutait à la brièveté des jours et aggravait la tristesse crépusculaire de la maison. […] Lord Southampton allait au spectacle tous les soirs. […] Les salles étaient de deux espèces : les unes, simples cours d’hôtelleries, ouvertes, un tréteau adossé à un mur, pas de plafond, des rangées de bancs posés sur le sol, pour loges les croisées de l’auberge, on y jouait en plein jour et en plein air ; le principal de ces théâtres était le Globe ; les autres, des sortes de halles fermées, éclairées de lampes, on y jouait le soir ; la plus hantée était Black-Friars.
J’aurais voulu que vous puissiez voir notre joie, à nous juifs qui, d’après vous, Monsieur, n’ont pas l’amour réel de leur patrie ou ne l’ont que par reconnaissance pour un pays où ils n’ont pas été martyrisés… Je me souviens de ce samedi soir, lorsque mes parents m’ont accompagné au Paris-Lyon-Méditerranée. […] Je me suis souvenu de la prière que je faisais tout petit, le soir avant d’embrasser ma maman et qui ressemble beaucoup à votre « Pater noster ». […] Hier soir celles du 31 août et du 1er septembre.
Un soir, elle était joyeuse, et semblait avoir eu dans la journée un bonheur ; qu’était-ce donc ? […] À la voir l’hiver, chaque soir, dans le monde perpétuel et brillant quelle reçoit, toujours présente et toujours prête, parlant à chacun, variant l’accueil et l’à-propos, elle semble née pour la représentation : à la retrouver à la campagne, entourée de quelques amis toujours les mêmes, on dirait plutôt qu’elle est faite pour l’intimité, pour un cercle d’habitudes paisibles, riantes et heureuses.
Le premier jour qui devait être employé si activement, Grouchy, après des tâtonnements infructueux pour s’assurer de la marche des Prussiens, ne fit que deux lieues, s’arrêta à six heures du soir et jugea qu’il serait à temps le lendemain pour suivre l’ennemi, qui se trouvait ainsi avoir gagné sur lui plusieurs heures. […] Il était environ six heures du soir, et tout annonçait qu’on allait avoir affaire en effet à toutes les forces de Blücher.
Le soir même où la première annonce de la blessure de M. […] La polémique a dû changer de terrain, à partir de ce soir-là.
Les voluptés du soir montent des horizons. ……… Dans le recueillement des longs soirs parfumés, A l’heure où, scintillant comme un pleur sous des voiles, La tristesse des nuits monte aux yeux des étoiles… Je crois bien que, si l’on cherchait où est décidément l’originalité de M.
Mais la mauvaise destinée veut qu’il rencontre un soir son prédécesseur. […] Pour vous avoir trouvée belle, un soir, sur ce canapé, j’ai été assailli d’une nuée de pensées violentes.
— Allez lui dire, reprit le roi, que vous lui donnerez ce soir 100 000 fr. pour vos dragées. — La mère me brouille avec le roi, son fils me réconcilie avec lui. […] « On me renvoya le soir pour me faire entendre raison » (pour me détourner du dessein de me retirer).
Elle alluma trois flambeaux, le soir, quand le jour eut disparu. […] La ballade de Lénore si médiocrement sentimentale chez Burger, se révèle, au contraire, dans sa forme orale, telle qu’une admirable vision fantastique ; et le Plongeur, — une des plus populaires des chansons connues, comme il y a loin de celle de Schiller, qu’apprennent les écoliers, à celles que chantent les vieilles « le soir à la chandelle » !
Quelquefois c’était le soir ; au moment où le crépuscule ôtait leur forme aux collines et donnait au Rhin la blancheur sinistre de l’acier, il prenait, lui, le sentier de la montagne, coupé de temps en temps par quelque escalier de lave et d’ardoise, et il montait jusqu’au burg démantelé. Là, seul comme le matin, plus seul encore, car aucun chevrier n’oserait se hasarder dans des lieux pareils à ces heures que toutes les superstitions font redoutables, perdu dans l’obscurité, il se laissait aller à cette tristesse profonde qui vient au cœur quand on se trouve, à la tombée du soir, placé sur quelque sommet désert, entre les étoiles de Dieu qui s’allument splendidement au-dessus de notre tête et les pauvres étoiles de l’homme qui s’allument aussi, elles, derrière la vitre misérable des cabanes, dans l’ombre, sous nos pieds.
Elle imite en cela madame de Staël, dont le talent a bien gardé quelque peu de l’amphigouri de Thomas, qui l’avait bercée, quand elle s’écriait un beau soir, à une représentation de Talma, qu’elle « lui voyait positivement des étoiles autour de la tête ». […] Ils sont réellement, dans ces soirs tristement brillants, les vrais ornements de la chose et les maîtres de la situation.
On a lu l’autre soir la pièce chez l’acteur Bocage : il avait invité force notabilités, et l’on a paru content, surtout du cinquième acte.
Tout le monde de se jeter sur ce morceau, et le soir tous d’en parler à qui mieux mieux.
Le soir, un chiaoux (tchâoùch) turc vint à la forteresse où j’étais, et fit savoir qu’il venait de la part du pacha. […] Le soir, nous arrivâmes à Anarghie, percés de pluie jusqu’aux entrailles. […] Je demeurai tout le jour sur le bord de la mer: le patron de la chaloupe m’en pria ; il attendait encore deux esclaves qui devaient arriver sur le soir….. […] J’acceptai de prendre de l’or, et on me remit au soir. […] Le 14, le roi partit, sur le soir, et alla coucher dans une maison de plaisance, à deux lieues de celle-ci, à l’autre bout de la ville.
C’est l’Exegi monumentum d’Horace ; c’est l’hymne de l’ouvrier de l’esprit qui s’assied sur sa tâche à la fin de sa journée et qui attend le soir sa solde de gloire des mains du temps. […] Nous restâmes en vain assis sur ces branches étendues et cachés dans ces feuillages depuis midi jusqu’au soir ; nous ne vîmes d’autre mouvement dans le parc que celui d’un filet d’eau qui scintillait en sortant d’un bassin de stuc, et celui de l’ombre qui tournait et s’allongeait sur les gazons aux pieds des saules pleureurs. […] Un soir je fus surpris par un grand orage mêlé de tonnerre et de vent. […] Il m’attira un soir sur un canapé, dans un arrière-salon éclairé d’un demi-jour. « Je désire causer avec vous sans témoin », me dit-il de sa voix la plus creuse. « Vous ne voulez pas vous rallier à nous, bien que l’œuvre de reconstruire un gouvernement avec des matériaux quelconques soit le chef-d’œuvre de l’esprit humain. […] Une poignée d’anarchistes grisés d’encre le matin dans quelques feuilles incendiaires et de la fumée de clubs communistes le soir dans quelques faubourgs, avait construit des barricades et assiégeait Paris, surpris dans son sommeil.
Je m’étais assis à côté d’elle au bord du ruisseau, loin d’Élise et de ma sœur ; nous les accompagnâmes le soir jusqu’au moulin à vent, où je m’assis encore à côté d’elle pour observer, nous quatre, le coucher du soleil qui dorait ses habits d’une lumière charmante. […] Ballanche, par un épithalame en prose, célébra, dans le mode antique, la félicité de son ami et les chastes rayons de l’étoile nuptiale du soir se levant sur les montagnes de Polémieux. […] Je lis dans une lettre de ce temps : … J’ai été chercher dans la petite chambre au-dessus du laboratoire, où est toujours mon bureau, le portefeuille en soie, J’en veux faire la revue ce soir, après avoir répondu à tous les articles de ta dernière lettre, et t’avoir priée, d’après une suite d’idées qui se sont depuis une heure succédé dans ma tête, de m’envoyer les deux livres que je te demanderai tout à l’heure. […] Dans le récit d’une vie comme dans la vie même, les sentiments émus, cette brise du matin, ne reparaissent convenablement qu’au soir. […] Étant un soir avec ses amis Camille Jordan et Degérando, il se mit à leur exposer le système du monde ; il parla treize heures avec une lucidité continue ; et comme le monde est infini, et que tout s’y enchaîne, et qu’il le savait de cercle en cercle en tous les sens, il ne cessait pas, et si la fatigue ne l’avait arrêté, il parlerait, je crois, encore.
C’est un soir de durée au cœur des amoureux ! […] Mainte fois nous le voyons arrêté au seuil des humbles intérieurs : la lampe allumée, la bûche du foyer et le labeur du soir ont trouvé en lui leur poète ému. Chez la petite ouvrière qui passe, « gantée et mise avec décence », se rendant dès le matin à l’ouvrage dans la maison des riches, il devine les souffrances de la mansarde qu’elle quitte, qu’elle retrouvera ce soir avec les petits frères qui disent « nous avons faim », tandis que le père roule dans l’escalier après avoir laissé au cabaret sa paye de la semaine. […] Savons-nous, quand le soir, rêveurs, nous admirons Le Zodiaque immense en marche sur nos fronts, Combien dans la nature, Isis au triple voile, La lumière survit à la mort d’une étoile, Et si cet astre d’or, dont le rayonnement A travers l’infini nous parvient seulement Et décore le ciel des nuits illuminées, N’est pas éteint déjà depuis bien des années ? […] Un soir de mai, le poète entre par hasard à un club socialiste : Tout briser, tout détruire… Aux armes, citoyens !
VII Mais vous approchez des Alpes ; les neiges violettes de leurs cimes dentelées se découpent le soir sur le firmament, profond comme une mer ; l’étoile s’y laisse entrevoir au crépuscule comme une voile émergeant sur l’océan de l’espace infini ; les grandes ombres glissent de pente en pente sur les flancs des rochers noircis de sapins ; des chaumières, isolées et suspendues à des promontoires comme des nids d’aigles, fument du foyer de famille du soir, et leur fumée bleue se fond en spirales légères dans l’éther ; le lac limpide, dont l’ombre ternit déjà la moitié, réfléchit dans l’autre moitié les neiges renversées et le soleil couchant dans son miroir ; quelques voiles glissent sur sa surface, les barques sont chargées de branchages coupés de châtaigniers, dont les feuilles trempent pour la dernière fois dans l’onde ; on n’entend que les coups cadencés des rames qui rapprochent le batelier du petit cap où la femme et les enfants du pêcheur l’attendent au seuil de sa maison ; ses filets y sèchent sur la grève ; un air de flûte, un mugissement de génisse dans les prés, interrompent par moments le silence de la vallée ; le crépuscule s’éteint, la barque touche au rivage, les feux brillent çà et là à travers les vitraux des chaumières ; on n’entend plus que le clapotement alternatif des flots endormis du lac, et de temps en temps le retentissement sourd d’une avalanche de neige dont la fumée blanche rejaillit au-dessus des sapins ; des milliers d’étoiles, maintenant visibles, flottent comme des fleurs aquatiques de nénuphars bleus sur les lames ; le firmament semble ouvrir tous ses yeux pour admirer ce bassin de montagnes ; l’âme quitte la terre, elle se sent à la hauteur et à la proportion de l’infini ; elle ose s’approcher de son Créateur, presque visible dans cette transparence du firmament nocturne ; elle pense à ceux qu’elle a connus, aimés, perdus ici-bas, et qu’elle espère, avec la certitude de l’amour, rejoindre bientôt dans la vallée éternelle : elle s’émeut, elle s’attriste, elle se console, elle se réjouit ; elle croit parce qu’elle voit ; elle prie, elle adore, elle se fond comme la fumée bleue des chalets, comme la poussière de la cascade, comme le bruissement du sable sous le flot, comme la lueur de ces étoiles dans l’éther ; elle participe à la divinité du spectacle. […] Si la mer est peuplée de barques de pêcheurs comme un village flottant, on songe à la joie des chaumières qui attendent le soir le fruit du travail du jour, on voit sur la côte s’allumer une à une les lampes des phares, étoiles terrestres des matelots […] Un soir, le jeune héros, en proie à cette tristesse vague, symptôme et pressentiment des grandes passions, s’enfonce seul dans une forêt pour rêver plus librement de Damayanti. […] XXXVI « C’était le soir », dit le poète ; « le char conduit par Nala ébranla la ville de Damayanti du bruit de ses roues ; les chevaux de Nala, qui ne l’avaient point oublié, entendirent ce bruit, qui retentit jusque dans leur écurie.
., un soir, notre auteur alla visiter son ami, et il le trouva dans son ermitage, livré à un véritable enthousiasme de naturaliste, parce qu’il avait découvert un bivalve inconnu formant un nouveau genre, mais surtout un scarabée qu’il croyait être aussi entièrement nouveau. […] Mais restez ce soir avec nous, et j’enverrai Jupiter le chercher au lever du soleil. […] Qui ne se souvient du magnifique « fragment » sur cet ami de Londres que Byron appelle « Auguste Darvell », et de sa mort, sans raison apparente de mourir, à vingt pas des ruines d’Éphèse, un soir, au coucher du soleil ? […] L’Amérique, qui couvre de dollars les derniers saltimbanques, fut pour lui une tour de la Faim et lui fit avaler tous les soirs la clef que Gilbert n’avala qu’une fois, — à l’agonie. […] C’est là que Poe mourut, le soir même du dimanche 7 octobre 1849, à l’âge de trente-sept ans, vaincu par le delirium tremens , ce terrible visiteur qui avait déjà hanté son cerveau une ou deux fois… » Hélas !
Vers la fin du second siècle, on chantait, aux prières du soir de la réunion chrétienne, un hymne cité plus tard, en preuve de l’antique foi au Saint-Esprit, comme au Verbe divin : « Gracieuse lumière de la sainte béatitude196, Fils du Père immortel, céleste et bienheureux, ô Christ ! […] Mais la véritable inspiration de telles paroles, c’était la foi même de la foule, et ce sentiment qui faisait dire à saint Basile : « Il a plu à nos pères de ne pas recevoir en silence le bienfait de la lumière du soir, mais, quand elle paraît, de rendre grâces. […] La prière du matin, celle de la troisième heure du jour, celle du soir, semblaient autant de degrés de cette vie laborieuse toujours aspirant à Dieu et à la vertu. […] à toi mes hymnes du soir ! […] L’étoile du matin sourit ; et l’étoile dorée du soir, l’astre de Cythérée, la lune, qui remplit l’orbe de son disque d’effluves étincelants, marchait la première, comme la conductrice des dieux nocturnes.
Le soir, il rentrait chez lui avec le projet d’écrire un grand poème, dont le commencement seul lui venait à l’instant : deux strophes tout au plus. […] « Un soir, mon ami en la conduisant chez elle lui demanda la permission d’y passer la nuit. […] Les soirs exquis n’ont plus d’oreillers pour mes rêves. […] Le soir est venu et la petite famille est rassemblée autour de la lampe. […] « Vous rencontrerai-je demain soir chez Renard ?
risqua, pour se mettre à l’aise, Xavier Oui, c’est Toulet qui m’avait donné ce gentil surnom, c’est encore lui qui nous rassemble ce soir, et si vous le voulez bien, nous allons travailler. » Xavier ne comprenait plus rien. […] Alfred Fabre-Luce réunissait l’autre soir quelques amis en petit comité secret. […] Le soir en rentrant, par un bon dîner attendri, c’était jeter au concierge son prénom au lieu de son nom. » À Gabrielle, à Hélène, ajoutons Anne, Geneviève. […] Quelle impression d’accablement ce soir de 1917 où il me fallut prendre le parti de retourner au front avant d’être arrivé au terme de ma permission ! […] D’abord publié sous le titre « Cinq soirs, cinq réveils » dans La Grande Revue, en janvier et février 1917.