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1253. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

Nous l’avons dit déjà, nous avons dans ce livre beaucoup plus qu’un Mazarin en famille ; nous avons toute une société retrouvée et saisie en pantoufles et en négligé.

1254. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

En effet, ce n’est presque jamais la vérité du fait ou du jugement politique, — l’Hôpital excepté, — qui manque à cette très noble histoire, c’est la vérité dans la conception de la nature humaine que l’auteur ne saisit pas telle qu’elle est.

1255. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

Mérimée, — ne craignait pas la mort, mais il n’aimait pas à en parler, la tenant pour une chose sale et vilaine plutôt que triste. » En se laissant saisir par la glace du matérialisme, un homme comme Diderot pouvait donc ne pas s’éteindre tout entier, tant il était bouillonnant !

1256. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

Mérimée, ne craignait pas la mort, mais il n’aimait pas à en parler, la tenant pour une chose sale et vilaine plutôt que triste. » En se laissant saisir par la glace du matérialisme, un homme comme Diderot pouvait donc ne pas s’éteindre tout entier, tant il était bouillonnant !

1257. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre II. La relativité complète »

Telle nous paraissait en effet être la fonction du métaphysicien : il doit pénétrer à l’intérieur des choses ; et l’essence vraie, la réalité profonde d’un mouvement, ne peut jamais lui être mieux révélée que lorsqu’il accomplit le mouvement lui-même, lorsqu’il le perçoit sans doute encore du dehors comme tous les autres mouvements, mais le saisit en outre du dedans comme un effort, dont la trace seule était visible.

1258. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

Le témoignage s’en trouve dans cette anecdote du médecin Érasistrate surprenant la passion secrète du fils de Séleucus pour sa belle-mère Stratonice, par l’observation même des signes qu’avait sentis et marqués sur elle-même Sapho saisie d’amour : « Les symptômes, dit Plutarque, étaient les mêmes, la perte de la voix, l’expression des regards, la sueur brûlante, l’ataxie de la fièvre et le trouble dans les veines, enfin l’abattement de l’âme, l’abandon, la stupeur et la pâleur. » Telle est en effet, dans son expressive vérité, l’analyse médicale de cette ode profane, de ce crime élégant de la pensée dont Catulle avait égalé la force, mais non la grâce, et que voici, dans la lettre morte de la prose : « Il est pour moi égal aux dieux l’homme qui s’assied en face de toi et t’écoute doucement parler et doucement sourire.

1259. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

Il est un tout cependant qu’on souhaite de découvrir, bien qu’il soit formé de ce que l’homme ne voit pas, n’entend pas, ne peut saisir par la pensée.

1260. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Ici un mysticisme raffiné aspire à Dieu par l’extase ; là, un mysticisme grossier croit le saisir par les sens. […] Nos sens en perçoivent aisément les détails : notre raison saisit l’heureuse harmonie de toutes ses parties. […] Un objet sublime est celui qui par des formes, non pas disproportionnées en elles-mêmes, mais moins arrêtées et plus difficiles à saisir, éveille en nous le sentiment de l’infini. […] Et saisissez bien son vrai caractère. […] Saint Ambroise, agenouillé et en prière, est comme saisi de terreur.

1261. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Celui que le dégoût a saisi peut être aimé, il ne peut aimer : « Les passions sortent de lui et n’y peuvent rentrer. » Or ce sont les affections qu’on éprouve et non celles qu’on inspire qui rendent heureux. […] Ce qu’ils ont trouvé, chacun dans sa langue, c’est le secret des rythmes propres à la prose, rythmes très complexes, très délicats, très fuyants, plus difficiles à saisir que ceux de la poésie qui sont plus fixes, d’un charme incomparable quand ils sont al teints. […] La profondeur de la chute, la stupeur de l’intelligence supérieure brusquement noyée dans la boue des régions basses, l’âme aveuglée dans la matière qui l’a saisie, et la conscience obscurcie dans le mal, tout cela est indiqué fortement plutôt que rendu avec pleine lumière. […] Nous saisissons ici le développement de la faculté maîtresse d’un artiste quand elle est tout à fait supérieure. […] Cette faculté de saisir l’âme obscure des choses est son secret propre.

1262. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Beaucoup d’hommes tombaient, saisis de cette faim subite qu’on nomme fringale ; Xénophon prit ce qu’il y avait de vivres sur les bêtes de somme, et les leur fit manger. […] Michelet est un poète, un poète de la grande espèce ; à ce titre il saisit les ensembles et les fait saisir. […] Le livre saisit l’esprit dès la première page ; en dépit des répugnances, des objections, des doutes, il reste maître de l’attention et ne la lâche plus. […] Saisi de dégoût à la vue des derniers portraits du prince, l’historien a compris deux phrases d’Hubert et de Brantôme. […] Et surtout il faut avoir l’esprit naturellement très calme : car quiconque se laisserait saisir par l’enthousiasme et la verve amère du morceau serait troublé jusqu’au fond de l’âme, et les idées seraient en lui noyées sous les émotions.

1263. (1883) Le roman naturaliste

Voilà peut-être une bien longue analyse : elle nous permettra de saisir à nu le procédé réaliste. […] En second lieu, s’efforcer à saisir l’insaisissable, et, dans une impression fugitive réussir à démêler, une par une, les impressions élémentaires qui concourent à former et produire l’impression totale. […] Une toile se saisit d’ensemble, et d’un coup d’œil ; une narration, comme un discours, ne peuvent être perçus que par fragments successifs, qui s’ajoutent un à un, pour se modifier en s’ajoutant, et se compenser en se complétant. […] Claretie saisit l’occasion et la saisit avidement ; et, plutôt que de ne pas utiliser toutes ses notes, il se condamnera, de gaieté de cœur, à nous conter les étranges amours de l’étudiant en médecine Finet avec Lolo, la cataleptique. […] Il fallait absolument le saisir ; à l’instant, l’enfant se mit à marcher à quatre pattes, étendant sa petite main pour s’emparer de ce jouet.

1264. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Le mousquetaire, saisi par la peau du cou et par le fond de la culotte, alla piquer une tête, par-dessus le rebord de la loge, sur les spectateurs du parterre. […] Il pouvait, paraît-il, en passant sous une poutre, au manège, saisir avec ses bras ladite poutre et enlever son cheval entre ses jambes. […] Quand il voulut rentrer, il saisit la barre transversale de la grille et, sans effort, fit sauter les deux montants de pierre où cette barre était scellée. […] Hervieu a saisi leurs correspondances. […] L’œil y saisit au vol, sans effort, quelque nouvelle sobrement annoncée, un fait divers exempt de ces « horribles détails » dont nous surchargeons volontiers nos reportages.

1265. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Celui qui s’entend le mieux en brides et en mors, c’est le cavalier : celui qui s’y entend encore, mais moins bien et comme par routine, c’est le sellier ou le forgeron ; celui qui ne s’y entend pas du tout et qui seulement en saisit et sait en reproduire le dessin, saisit et sait reproduire la sensation fugitive qu’ils font sur l’œil, c’est le peintre. […] Comme il a ordonné le monde les yeux fixés intérieurement sur elles, de même nous ordonnons quelques parcelles de l’univers suivant un plan dont il nous a permis d’apercevoir et de saisir quelques traits. […] Si elle est incohérente à ses propres yeux, c’est qu’elle ne s’est pas saisie, c’est qu’elle reste dispersée, c’est qu’elle ne s’est pas ramenée à son centre et à son fort et à son essence. […] L’âme ne se saisit donc définitivement que dans la morale, ne se connaît profondément et complètement que dans la morale, ne prend conscience intégrale d’elle-même que dans la morale. […] Philosophes et artistes, nous l’aidons à se créer en l’excitant à se saisir.

1266. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

L’âge oratoire qui finit, comme il finissait à Athènes et à Rome, a groupé toutes les idées dans un beau casier commode dont les compartiments conduisent à l’instant les yeux vers l’objet qu’ils veulent définir, en sorte que désormais l’intelligence peut entrer dans des conceptions plus hautes et saisir l’ensemble qu’elle n’avait point encore embrassé. […] Ils veulent saisir les puissances naturelles et morales en elles-mêmes, indépendamment des supports fictifs auxquels leurs devanciers les attachaient. […] Ses sensations étaient « celles d’un homme qui monte sur l’échafaud, toutes les fois qu’il mettait le pied dans le bureau ; pendant six mois il y vint tous les jours1187. » — « Dans cet état, dit-il, j’étais saisi par moments d’un tel accès de désespoir, que, seul dans ma chambre, je poussais des cris et maudissais l’heure de ma naissance, levant mes yeux au ciel, non pas en suppliant, mais avec un esprit infernal de haine envenimée et de reproche contre mon Créateur1188. » Le jour de l’examen approchait ; il espéra devenir fou pour s’y soustraire, et comme la raison tenait bon, il pensa même à se tuer. […] Ce qu’il expose, ce sont les grands intérêts de l’âme, « c’est la vérité, la grandeur, la beauté, l’espérance, l’amour, —  la crainte mélancolique subjuguée par la foi, —  ce sont les consolations bénies aux jours d’angoisse, —  c’est la force de la volonté et la puissance de l’intelligence, —  ce sont les joies répandues sur la large communauté des êtres, —  c’est l’esprit individuel qui maintient sa retraite inviolée, —  sans y recevoir d’autres maîtres que la conscience, —  et la loi suprême de cette intelligence qui gouverne tout1222. » Cette personne inviolée, seule portion de l’homme qui soit sainte, est sainte à tous les étages ; c’est pour cela que Wordsworth choisit pour personnages un colporteur, un curé, des villageois ; à ses yeux, la condition, l’éducation, les habits, toute l’enveloppe mondaine de l’homme est sans intérêt ; ce qui fait notre prix, c’est l’intégrité de notre conscience ; la science même n’est profonde que lorsqu’elle pénètre jusqu’à la vie morale ; car nulle part cette vie ne manque. « À toutes les formes d’être est assigné un principe actif ; —  quoique reculé hors de la portée des sens et de l’observation, —  il subsiste en toutes choses, dans les étoiles du ciel azuré, dans les petits cailloux qui pavent les ruisseaux, —  dans les eaux mouvantes, dans l’air invisible. —  Toute chose a des propriétés qui se répandent au-delà d’elle-même — et communiquent le bien, bien pur ou mêlé de mal. —  L’esprit ne connaît point de lieu isolé, —  de gouffre béant, de solitude. —  De chaînon en chaînon il circule, et il est l’âme de tous les mondes1223. » Rejetez donc avec dédain cette science sèche « qui divise et divise toujours les objets par des séparations incessantes, ne les saisit que morts et sans âme et détruit toute grandeur1224. » « Mieux vaut un paysan superstitieux qu’un savant froid. » Au-delà des vanités de la science et de l’orgueil du monde, il y a l’âme par qui tous sont égaux, et la large vie chrétienne et intime ouvre d’abord ses portes à tous ceux qui veulent l’aborder. « Le soleil est fixé, et magnificence infinie du ciel — est fixée à la portée de tout œil humain. —  L’Océan sans sommeil murmure pour toute oreille. —  La campagne, au printemps, verse une fraîche volupté dans tous les cœurs. —  Les devoirs premiers brillent là-haut comme les astres. —  Les tendresses qui calment, caressent et bénissent — sont éparses sous les pieds des hommes comme des fleurs1225. » Pareillement à la fin de toute agitation et de toute recherche apparaît la grande vérité qui est l’abrégé des autres. « La vie, la véritable vie, est l’énergie de l’amour — divin ou humain — exercée dans la peine, —  dans la tribulation, —  et destinée, si elle a subi son épreuve et reçu sa consécration, —  à passer, à travers les ombres et le silence du repos, à la joie éternelle1226. » Les vers soutiennent ces graves pensées de leur harmonie grave ; on dirait d’un motet qui accompagne une méditation ou une prière.

1267. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

On pourrait conclure de là, que souvent les figures seront nécessaires dans un dictionnaire de langue ; car il est dans les sciences et dans les arts une grande quantité d’objets, même très familiers, dont il est très difficile et souvent presque impossible de donner une définition exacte, sans présenter ces objets aux yeux ; du moins est-il bon de joindre souvent la figure avec la définition, sans quoi la définition sera vague ou difficile à saisir. […] L’orateur peut même se permettre quelquefois la finesse des pensées et des tours, pourvu que ce soit avec sobriété et dans les sujets qui en sont susceptibles, ou qui l’autorisent, c’est-à-dire, qui ne demandent ni simplicité, ni élévation, ni véhémence : ces tours fins et délicats échapperont sans doute au vulgaire, mais les gens d’esprit les saisiront et en sauront gré à l’orateur. […] C’est principalement cette qualité qui distingue les grands écrivains d’avec ceux qui ne le sont pas : ceux-ci sont, pour ainsi dire, toujours à côté de l’idée qu’ils veulent présenter ; les autres la rendent et la font saisir avec justesse par une expression propre. […] Concluons de ces réflexions, que le secrétaire d’une Académie doit non seulement avoir une connaissance étendue des différentes matières dont l’Académie s’occupe, mais posséder encore le talent d’écrire, perfectionné par l’étude des belles-lettres, la finesse de l’esprit, la facilité de saisir les objets et de les présenter, enfin l’éloquence même.

1268. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Nous nous étions rapprochés du nord, en nous élevant le long de la côte chinoise, et ce froid inattendu nous saisissait. […] Dès les premières lignes, l’écrivain a pris possession du lecteur ; il l’a transporté dans le milieu qu’il décrit et, brusquement, il l’a saisi et fait vivre de cette vie de la mer, des matelots, des Bretons, des tranquilles héros qu’il peint sans les grandir, juste à leurs proportions exactes. […] Il la saisit violemment, la releva, et la pressa longtemps sur son cœur et sur ses lèvres. — Tout était dit. […] Mais la mère lui avait saisi le bras. […] Il fallut la saisir, l’enlever de force.  

1269. (1923) Nouvelles études et autres figures

Et il ajoute, car il faut nous expliquer pourquoi l’affreux polype, la bête sans os, se ronge les membres : « C’est que le soleil ne lui montre aucune proie à saisir. […] Elle est d’ailleurs extrêmement difficile à atteindre, et souvent en croyant la saisir, nous n’étreignons qu’une ombre. […] L’émulation, qu’on voudrait étouffer chez nos élèves, ne les saisit-elle pas au sortir du collège ? […] » Les femmes, les jeunes filles ne résistaient pas à la séduction de cet Ariel, de cet Obéron, comme elles l’appelaient, si difficile à saisir, plus difficile à retenir. […] Le monde extérieur, dont la nouveauté l’a saisi, se modifie sous son regard, et lui paraît plus neuf encore quand l’âme cachée derrière ces apparences finit par les éclairer.

1270. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Lui qui, tout à l’heure, semblait craindre de ne pas pouvoir se dissoudre sans retour dans le vide universel, il est saisi subitement d’un frisson d’épouvante en face de la mort nécessaire ; et c’est avec les prières, les flatteries humbles d’un esclave qu’il la supplie de ne pas l’emmener encore, de revenir demain. […] S’il voyage et s’il raconte ses promenades aux pays exotiques, toujours avec la même disposition d’esprit, dédaigneuse de l’âme humaine, sensible aux formes, il laisse de côté les mœurs et les pensées spéciales à chaque race pour saisir et dépeindre son aspect extérieur. […] Une école a surgi cependant, en cette seconde moitié du siècle, qui, dans le but d’obtenir la réalité vraie, de saisir la nature et l’humanité vivantes, a tenté de reproduire les phénomènes extérieurs aussitôt qu’ils étaient perçus, avec la netteté immédiate d’un miroir renvoyant une image. […] À force de sentir avec délicatesse, MM. de Goncourt parviennent à saisir le vrai, sans presque qu’ils aient besoin de penser : ce que d’autres démontrent, ils le devinent. […] partout, sans cesse, avec une extraordinaire finesse des sens, il le saisit et le retrouve dans les moindres manifestations de la vie réelle ; il en subit, d’une manière continue, l’influence stérilisante.

1271. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

Balzac rebuta par son insoumission au poncif du progrès perpétuel, Mistral par son ordre sublime ; l’un et l’autre par leur profondeur rythmique, qui fait que les ondes courtes ne les peuvent saisir. […] La vie n’est ni un volcan, ni une fosse d’aisances, et sa complexité insaisissable (que l’artiste s’évertue à saisir) passe bien au-dessus des jeux limités de la flamme, de la cendre, ou du purin. […] Cette vérité de fait est invisible à la foule, incapable de saisir une relation de cause à effet. […] Un mouvement réel, saisi par un œil exercé, paraît faux au commun public. […] J’ai pu saisir là, sur le fait, l’action incontestable du moral persuadant sur le physique.

1272. (1924) Critiques et romanciers

Elle les saisira par la nuque et leur écrasera le nez dans leurs ordures. […] Quand il ne s’est pas juré de taquiner son lecteur et le sens commun, nul romancier ne saisit mieux l’humble vérité, ne vous la donne mieux toute vive et bien frémissante. […] Tito fut orphelin et, dans son deuil aussi, fut déçu de lui-même : il n’avait pas saisi l’occasion si glorieuse. […] Tito se jette aux naseaux du cheval, saisît la bride. […] Il devra ensuite élaborer les documents qu’il aura saisis d’un coup preste et heureux : mais il redoutera surtout de leur ôter leur vivacité.

1273. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Notre vouloir est un pronostic de ce que nous ferons dans toutes les circonstances ; mais ces circonstances nous saisissent d’une manière qui leur est propre. […] Le dépouillement des papiers saisis chez le duc d’Enghien n’avait rien fourni aux investigations passionnées et sottes des policiers enquêteurs. […] En plus d’une rencontre, les Mémoires du général de Gelder complètent par un trait de mœurs, rapidement saisi, habilement noté, ce que nous savons par les autres témoins. […] Peu d’officiers étaient capables de déchiffrer les dépêches allemandes saisies sur les espions. […] Je voudrais que l’aimable et délicat romancier des Oberlé eût saisi d’un trait plus puissant cette invincible influence de la maison sur l’homme.

1274. (1774) Correspondance générale

Et comment voulez-vous que celui qui n’en veut à personne s’imagine, sous les tuiles où il s’occupe à se rendre meilleur, que des bourreaux attendent le jour pour se saisir de lui, et le jeter dans un bûcher ? […] Les parents, qui savaient que les effets de cette fille n’étaient pas en sûreté dans leur propre domicile, en autorisèrent le dépôt en différentes maisons ; les dépôts changeaient de place d’un moment à l’autre, parce que la terreur saisissait les dépositaires. […] 3° Que ses frères lui ont fait un tort réel en faisant saisir mal à propos des marchandises qui sont restées sur son compte. C’est, ce me semble, au saisissant à répondre des suites d’une saisie mal faite. […] L’affaire de la saisie a été définitivement jugée le 30 janvier 1770, et il n’y en a point d’appel.

1275. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

C’est l’existence de la troisième unité, l’unité d’action, la seule admise de tous parce qu’elle résulte d’un fait : l’œil ni l’esprit humain ne sauraient saisir plus d’un ensemble à la fois. […] Elle s’en saisit, elle débarbouille cette canaille, et coud à ses vilenies son clinquant et ses paillettes ; purpureus assuitur pannus. […] Il est temps que tous les bons esprits saisissent le fil qui lie fréquemment ce que, selon notre caprice particulier, nous appelons défaut à ce que nous appelons beauté.

1276. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

Dans les Souvenirs du peuple il saisit mieux que jamais l’accent populaire pour enfoncer l’enthousiasme et le remords de voir abandonner son héros dans le cœur des enfants et des femmes. […] Elles expliquent la profonde tristesse civique qui saisit Béranger quand, à la place de l’unanime et patriotique enthousiasme qui soulevait le peuple et l’Assemblée nationale au-dessus de terre en 1848, il vit l’Assemblée législative jouer, comme une assemblée d’enfants en cheveux blancs, à l’utopie, à la Terreur, à la Montagne, à la réaction, à l’orléanisme, au militarisme, à l’anarchie, à tous les jeux où l’on perd la liberté, la dignité, l’ordre social et la patrie. […] Quand Béranger, s’arrêtant tout à coup comme saisi au pan de sa redingote par quelque main invisible, et prenant à deux mains son gros bâton de bois blanc à pommeau d’ivoire, il dessinait sur le sable des figures inintelligibles, tout en dissertant avec une éloquence rude, mais fine, sur les plus hautes questions de religion, de philosophie ou de politique !

1277. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Et cela est si admirablement présenté, sans déclamation et sans vain apitoiement, que nous sommes saisis sur la fin par la tristesse de cette souillure imposée par la vie à une créature humaine. […] Ou plutôt on saisit trop ici le procédé, emprunté par Maupassant aux écrivains de l’école naturaliste et qu’il eût mieux fait de leur laisser : il consiste à rattacher, à l’aide d’une aventure quelconque, et qui aurait pu être différente étant par elle-même insignifiante, la série des documents et des notes prises sur un milieu. […] L’œil saisissait à peine ce qui devait être la mer : d’abord, cela prenait l’aspect d’une sorte de miroir tremblant qui n’aurait aucune image à refléter ; en se prolongeant, cela paraissait devenir une plaine de vapeurs, et puis plus rien ; cela n’avait ni horizon ni contours. […] Le feuilletoniste des Débats a bravement saisi l’occasion pour dire qu’il avait fait plus d’un emprunt au cours de ce maître qui a cessé de plaire. […] Il saisit le reflet du monde dans un esprit, et de cet esprit dans un autre32 ».

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