Hommes et Dieux, c’est le titre du premier livre qu’il publie, et ce titre est exact, non pas tant en effet parce qu’il y a placé, en commençant, la description de quelques grandes divinités antiques, la Vénus de Milo, Diane, Gérés et aussi Hélène, la déesse de beauté, mais parce que partout, dans les jugements de M. de Saint-Victor, dans les rangs qu’il assigne, dans les étages et comme les sphères d’admiration qu’il embrasse, respire et règne une véritable religion littéraire. […] Oui, M. de Saint-Victor, classique en cela, classique dans la plus large acception sans doute, classique toutefois, comme le pourrait être un fils retrouvé de Chateaubriand, a au plus haut degré et possède en toute sincérité la religion de l’art, la religion littéraire ; à la manière dont je les lui ai vu quelquefois défendre, dans la conversation comme dans ses écrits, j’ai compris qu’il a bien réellement des dieux, et il a eu droit, par une sorte d’invocation, de les inscrire dès le début au frontispice de son livre.
C’est un esprit moderne, qui a remplacé toutes les religions par la religion de la civilisation, dont le Dieu est l’homme. Si les mécaniques avaient une religion, elles auraient aussi ce même Dieu.
Ils ne descendaient pas la marche qui sépare la religion de la politique. […] Rapports entre Dieu et les pouvoirs humains, — Nécessité d’une réforme de l’enseignement public dans l’intérêt de la religion, — Nécessité d’une réforme de l’enseignement public dans l’intérêt de la littérature et de la politique, — Importance sociale du catholicisme, — Mœurs des Grands, — Exemple des Grands, — l’Église et l’État, ou Théocratie et Césarisme, — Royauté de Jésus-Christ et Restauration de l’Empire en France, voilà les neuf majestueux sujets que le P. […] La religion est une Thétis qui trempe les cœurs dans des eaux dont ils ressortent Achille et qui leur dit : « La peur seule est mortelle. » Et d’ailleurs, avait-il besoin de courage ?
L’Art n’est pas plus un hochet amusant qu’un instrument utile202 au service de la morale ou de la religion. […] Ce qu’il attaque, renverse et laisse sur le carreau, ce n’est pas eux, et ce ne sont pas non plus les idées éternelles de la morale, de la religion, de l’art et de la politique ; c’est le mensonge du Divin. […] Tartuffe se brise contre la Religion dont il a pris le masque, contre la sainteté du Foyer conjugal, et contre la justice du Roi. […] C’est ainsi qu’Aristophane avait détruit ce qui est faux en Morale, en Religion, en Politique, en Philosophie, en Littérature, au plus grand honneur de l’indestructible Vérité. […] Les intérêts dans lesquels se meut la comédie n’ont pas besoin d’être tirés des domaines opposés à la morale, à la religion, à l’art.
Cependant Chapelain et M. de Montausier avaient beau s’y mettre, on rencontrait un obstacle qui tenait peut-être à la religion de Le Fèvre, et aussi à quelques inconstances de son caractère. […] Sa lettre se terminait par une exhortation directe à rentrer dans la croyance catholique et par une insistance marquée sur cette corde de la religion : « À quoi peut servir toute votre science, si vous ignorez ce point si important ? […] Mme Dacier était disposée la première à embrasser la religion catholique romaine ; M. […] Là, pendant plus d’une année, ils suivirent leur méthode studieuse en la transportant et la renfermant cette fois dans les matières de religion, et ils tombèrent tout à fait d’accord sur la conduite qu’ils avaient à tenir ; mais ils voulurent faire plus, ils aimèrent mieux différer de quelques mois leur déclaration publique, et ils s’appliquèrent dans l’intervalle à user de leur influence, de l’estime qu’ils inspiraient et des raisons dont ils étaient remplis, pour ramener la ville entière avec eux. L’idée du roi se confondait tellement alors avec celle de religion qu’il y aurait bien de la sévérité à faire à M.
Les princes du sang, les Condé, en se convertissant à la religion catholique, n’avaient pas affaibli, selon Rohan, la position des réformés ; car ces princes, s’ils maintenaient le parti, en étaient maintenus et faisaient le plus souvent leurs affaires aux dépens de tous. […] Quand il n’y aurait que deux personnes de la religion, je serai un des deux. » Il a tenu cette parole dans toute la suite des guerres, et il n’a renoncé que lorsque tout lui a manqué. […] Il se plaint, en terminant, de tout le monde : « C’est ce qui s’est passé en cette seconde guerre, dit-il, où Rohan et Soubise ont eu pour contraires tous les grands de la Religion de France, soit par envie ou peu de zèle, tous les officiers du roi à cause de leur avarice, et la plupart des principaux des villes gagnés par les appâts de la Cour… Quand nous serons plus gens de bien, Dieu nous assistera plus puissamment. » Par cette paix les réformés obtenaient ce qui à leurs yeux était l’essentiel, la subsistance des nouvelles fortifications qu’ils avaient élevées dans la plupart des petites villes du Midi, c’est-à-dire la faculté de recommencer la guerre. […] Et il eut l’idée, très hardie et originale, de se servir pour cela du secours des alliés, de ceux-mêmes qui étaient de la religion des rebelles : car la France alors n’avait pas de marine, elle n’avait pas un seul vaisseau à opposer à Soubise triomphant sur les mers depuis sa capture. […] Quelque chose de ce sentiment austère et contristé se réfléchit dans la page suivante, où M. de Rohan, après avoir raconté la reddition de La Rochelle le 28 octobre (1628), ajoute du ton de fermeté et de fierté qui lui est propre : La mère du duc de Rohan et sa sœur4 ne voulurent point être nommées particulièrement dans la capitulation, afin que l’on n’attribuât cette reddition à leur persuasion et pour leur respect, croyant néanmoins qu’elles en jouiraient comme tous les autres ; mais comme l’interprétation des capitulations se fait par le victorieux, aussi le conseil du roi jugea qu’elles n’y étaient point comprises, puisqu’elles n’y étaient point nommées : rigueur hors d’exemple, qu’une personne de cette qualité, en l’âge de soixante-dix ans (et plus), sortant d’un siège où elle et sa fille avaient vécu trois mois durant de chair de cheval et de quatre ou cinq onces de pain par jour, soient retenues captives sans exercice de leur religion, et si étroitement qu’elles n’avaient qu’un domestique pour les servir, ce qui, néanmoins, ne leur ôta ni le courage ni le zèle accoutumé au bien de leur parti ; et la mère manda au duc de Rohan, son fils, qu’il n’ajoutât aucune foi à ses lettres, pource que l’on pourrait les lui faire écrire par force, et que la considération de sa misérable condition ne le fît relâcher au préjudice de son parti, quelque mal qu’on lui fît souffrir.
Necker avait compris quelque chose de l’immense danger social qui était prêt à sortir de toutes les doctrines irréligieuses du xviiie siècle, et il venait montrer les avantages publics de la religion, l’appui efficace, l’achèvement qu’elle seule apporte à l’ordre général, en même temps qu’il parlait avec persuasion du bonheur intime et de la consolation intérieure qu’elle procure à chacun. […] Necker, dans son déisme théologique, s’avançait avec ménagement et précaution comme médiateur entre la philosophie et le sacerdoce ; il admettait les religions révélées, mais sa qualité de protestant, et son désir d’éviter toute discussion intérieure au christianisme, le forçaient à se tenir dans la généralité et dans le vague. […] Necker, quel temps je suis venu prendre pour entretenir le monde de morale et de religion ! […] Necker intervient dans la guerre ouverte entre les incrédules et les intolérants de tout genre dont il était environné, comme un médiateur honnête, sensé, sincère, éloquent même à la longue, si l’on consent à l’écouter ; il dira de toutes les manières à ceux qu’il s’efforce de ramener : Un homme sage ne se permet jamais de semer la tristesse et le découragement, pour la ridicule vanité de se montrer un peu élevé au-dessus des opinions communes, ou pour le plaisir de faire des distinctions plus ou moins ingénieuses sur quelques parties de la religion établie. […] Il se remit en marche vers la Jérusalem de la religion et de la poésie, le casque en tête et le glaive à la main, comme un des chevaliers du Tasse, et non sans se laisser aussi surprendre en chemin par les enchantements ; il entra dans la Cité sainte reconquise par l’arc de triomphe ou par la brèche (je ne sais trop), mais en plein soleil, tandis que M.
Je me demande ce qu’ils trouvent de soutien patriotique dans leur religion. […] Roger Cahen ne s’aventure pas au-delà du cercle de clarté que répand sa petite flamme intérieure : « Je ne crois à aucun dogme d’aucune religion », écrit-il. […] Les documents que je possède sur l’élite morale des israélites ne me font connaître que des consciences qui paraissent vidées de leur tradition religieuse… Là-dessus, un jeune officier israélite, industriel lorrain, qui a été l’objet d’une belle citation à l’ordre de l’armée, m’écrit une lettre intéressante qui commence par ces mots : « Je suis juif, sincèrement croyant et attaché à ma religion… » J’en détache quelques fragments : « Prenons comme exemple, me dit cet officier, un israélite de ce que l’on appelle la bonne bourgeoisie, c’est-à-dire le sous-lieutenant qui vous écrit… J’ai eu une instruction moyenne (études classiques à Carnot, puis commencement de droit). […] » La religion juive n’est pas faite pour le peuple, car elle n’est pas composée de petites pratiques extérieures, mais uniquement de l’idée de Dieu et de la survie de l’âme. […] Et je veux vous le dire aussi, le Dieu infiniment puissant et miséricordieux, dans lequel nous croyons tous, quoique différents de religion, dans lequel votre fils croyait (il me l’a dit), a pris auprès de lui, je l’espère, l’âme droite et loyale, qui s’est sacrifiée pour le devoir, et il l’a prise pour l’immortalité… J’ai prié du fond de mon cœur hier, aujourd’hui, ce Dieu de miséricorde, de recevoir votre fils auprès de lui, et de vous réunir à lui, quand le temps sera venu pour une réunion éternelle et heureuse… Puisse cette parole d’un ministre de Dieu, non pas calmer votre douleur, mais vous apporter l’espérance, soutenir votre courage, vous aider à supporter le sacrifice.
A beaucoup d’entre nous il manque la foi ; il nous manque à tous la science de la religion. […] Qu’est-ce que la religion, sinon un sublime effort de la nature humaine pour lutter contre sa corruption originelle ? […] Une religion qui ne parle qu’à la raison risque fort de ne pas persuader, et de détourner sur elle-même les doutes qu’elle n’a pas dissipés. […] Il tient les mystères pour établis, les difficultés de la religion pour résolues ; il craint de hérisser son discours de textes sacrés ; s’il cite les Pères, c’est pour ôter au discours l’air mondain plutôt que pour y mettre le nerf de la tradition. […] Il y a eu là tout au moins un jour où la religion de sa mère lui a parlé.
Et c’est l’office de la religion et de la philosophie, j’entends de notre religion et de la philosophie qui a régné chez nous, car d’autres ont resserré d’une manière différente le lien social. […] Ceci convient mieux à la philosophie, ou aux religions peu mystiques, qui, parlant au cœur humain avec moins de force et moins d’autorité, ont besoin de se montrer en quelques points plus accommodantes ou plus souples. […] Sans doute, ni la religion ni la philosophie n’entendent toujours ainsi leur rôle. […] Les religions, les philosophies se décomposent et tombent. […] Il travaille sourdement pour approprier à ses fins, pour détourner à son profit les forces que suscitent ou que façonnent l’art, la religion, la pratique de la vie et même l’instinct égoïste.
Il écrivait le 11 décembre 1702 à Fleury, non pas à l’abbé, mais à l’évêque de Fréjus, le futur premier ministre de Louis XV, « que l’esprit d’incrédulité gagnait toujours dans le monde ; qu’il se souvenait lui en avoir souvent entendu faire la réflexion ; que c’était encore pis à présent, puisqu’on se servait même de l’Évangile pour corrompre la religion des peuples ». […] Il n’y voyait pas seulement sa religion de chrétien, il y retrouvait sa poésie d’adolescent. […] — « Monsieur, je vous ai toujours cru honnête homme, disait un jour à Bossuet un incrédule au lit de mort ; me voici près d’expirer, parlez-moi franchement, j’ai confiance en vous : que croyez-vous de la religion ? […] Bossuet croit à la religion de toute son intelligence et de tout son cœur, et dans le cours de cette vie si pleine on ne voit pas d’interstice par où le doute se soit jamais introduit.
Mille petits pots, en terre rouge ou brune, ne seront que des petits pots, quelques-uns avec des bonshommes dessus : le mille et unième sera précieux pour l’histoire de l’art ou des religions, complétera pour nous le sens d’un mythe, nous fera mieux connaître l’âme des anciens hommes. […] Qu’est-ce que cet amour de la vérité, poursuivie en dehors de tout intérêt matériel ou moral, à plus forte raison en dehors de toutes les théologies et dans l’oubli de toutes les explications qu’on a pu tenter de l’univers et de sa destinée qu’est-ce que cet amour, sinon une religion encore ? […] Regardez-y de près : cette étude des transformations d’un vieux récit populaire contient comme un raccourci de l’histoire des religions. […] Je vous recommande son admirable leçon sur la Poésie du moyen âge, sur la poésie de sa religion, de sa science, de sa vie entière.
La procédure contre le « séducteur » (mésith), qui cherche à porter atteinte à la pureté de la religion, est expliquée dans le Talmud avec des détails dont la naïve impudence fait sourire. […] Le plan des ennemis de Jésus était de le convaincre, par enquête testimoniale et par ses propres aveux, de blasphème et d’attentat contre la religion mosaïque, de le condamner à mort selon la loi, puis de faire approuver la condamnation par Pilate. […] Quoique neutres en religion, les Romains sanctionnaient ainsi fort souvent des pénalités portées pour des délits religieux. […] C’est un fait juif, en ce sens que le judaïsme dressa pour la première fois la théorie de l’absolu en religion, et posa le principe que tout novateur, même quand il apporte des miracles à l’appui de sa doctrine, doit être reçu à coups de pierres, lapidé par tout le monde, sans jugement 1153.
Mais, au milieu de tant de changements, il demeurait toujours fidèle à l’honneur, qui est, pour lui, comme une religion civile. […] Nos pères avaient, à mon avis, plus de respect pour les nations : tout à fait dans les temps anciens les rois étaient de race divine ; dans les temps modernes on a cru, d’après l’autorité de l’Écriture sainte, que Dieu lui-même se mêlait de choisir les princes des peuples : il y avait alors une religion sociale ; un roi n’était pas traîné à l’échafaud par ses propres sujets ; il ne tombait pas du trône à la présence d’un chef de bande : la royauté avait ses martyrs, et la patrie ne périssait jamais : le roi était la patrie devenue sensible ; la royauté était une des libertés de la nation, et la plus importante de toutes. […] Les plus beaux dévouements qui puissent honorer la nature humaine venaient consoler l’âme ; les pensées nobles et généreuses trouvaient un asile dans de grands caractères ; la religion et les croyances sociales recevaient d’illustres témoignages jusque sur les échafauds de la terreur ; de magnanimes protestations éclataient même dans les tribunes élevées par les crimes et les factions. […] Ne l’avons-nous pas vu, en effet, au moment où il saisit les rênes du gouvernement, relever les autels de la religion, et élargir les routes qui ramenaient de la terre de l’exil ?
Le signe de l’acte sexuel tient dans l’amour normal à peu près la même place que la chaudière bouillante dans la religion normale. […] Son Charles Baudelaire, ses monographies sur la peinture du XVIIIe siècle, sa Religion de la musique, montrent excellemment à quel point cette place centrale dans le monde du beau permet une critique riche et vivante. […] Le mariage, point de départ de la cristallisation sociale, le mariage bourgeois fondé sur l’argent peut être ridicule ou odieux du point de vue de l’amour, du point de vue de l’art, du point de vue de la religion. […] Maurras seraient bien capables d’en écrire la magie, comme Chateaubriand dans son génie du christianisme (Stendhal ne pouvait le souffrir) a écrit une cristallisation, une Magie de la religion.
Que la Religion est respectable, lumineuse & consolante sous son pinceau ! […] Semblable à ces vastes réservoirs destinés à entretenir de leur superflu les canaux qui en dépendent, l’éloquence de l’Orateur Historien répand une riche abondance sur toutes les matieres qu’il traite* Les Oraisons funebres de Bossuet sont un nouveau triomphe pour sa gloire, ajoutons, pour celle de la Religion.
La philologie moderne et la science des religions comparées ont renouvelé, depuis trente ans, l’interprétation du polythéisme hellénique. […] Les Védas récemment ouverts ont révélé la parenté directe des religions de la Grèce avec les premières croyances de la race aryenne, mère de l’Inde et de la Perse, aïeule immémoriale de l’Europe.
La société où la morale parvint le plus tôt à son développement, dut atteindre le plus vite au beau idéal moral, ou, ce qui revient au même, au beau idéal des caractères : or, c’est ce qui distingue éminemment les sociétés formées dans la religion chrétienne. […] Trop loin de la nature et de la religion sous tous les rapports, on ne peut représenter fidèlement l’intérieur de nos ménages, et moins encore le fond de nos cœurs.
Ô religion, quels ont été tes triomphes ! […] si tout meurt avec nous, les soins du nom et de la postérité sont donc frivoles ; l’honneur qu’on rend à la mémoire des hommes illustres, une erreur puérile, puisqu’il est ridicule d’honorer ce qui n’est plus ; la religion des tombeaux, une illusion vulgaire ; les cendres de nos pères et de nos amis, une vile poussière qu’il faut jeter au vent, et qui n’appartient à personne ; les dernières intentions des mourants, si sacrées parmi les peuples les plus barbares, le dernier son d’une machine qui se dissout ; et, pour tout dire en un mot, si tout meurt avec nous, les lois sont donc une servitude insensée ; les rois et les souverains, des fantômes que la faiblesse des peuples a élevés ; la justice, une usurpation sur la liberté des hommes ; la loi des mariages, un vain scrupule ; la pudeur, un préjugé ; l’honneur et la probité, des chimères ; les incestes, les parricides, les perfidies noires, des jeux de la nature, et des noms que la politique des législateurs a inventés.
Ainsi quand Agamemnon veut sacrifier sa fille, il viole la loi naturelle sans être en poësie un personnage scelerat : il est excusé par sa resignation aux loix et à la religion de sa patrie qui autorisoit de pareils meurtres. […] On plaint la misere des hommes de ce tems-là qui ne pouvoient plus discerner la loi naturelle à travers les nuages dont les fausses religions l’enveloppoient.
I — Le génie comme puissance de sociabilité La religion commande aux hommes de croire à la réalisation possible d’une société idéale de justice, de charité et de félicité, déjà en partie réalisée et dont nous devons, pour notre part, nous faire membres ou citoyens. Comme il y a une cité idéale de la religion, il y a aussi une cité idéale de l’art ; mais la première est, pour le croyant, l’objet d’une affirmation et d’une volonté, la seconde est un simple objet, de contemplation et de rêve. La religion vise au réel, l’art se contente du possible ; il n’en superpose pas moins, comme la religion, un monde nouveau au monde connu, et, de même que la religion, il nous met en rapport d’émotion et de sympathie avec ce monde ; par conséquent, il en fait un monde d’êtres animés plus ou moins analogues à l’homme ; par conséquent enfin, il en fait une société nouvelle ajoutée par l’imagination à la société où nous vivons réellement. Comme la religion, l’art est un anthropomorphisme et un « sociomorphisme17. » La science expérimentale, en son ensemble, est une de la analyse réalité, qui note les faits l’un après l’autre, puis en dégage les lois abstraites.
On lui a pardonné de s'être élevé, dans son premier Ecrit*, contre cette Philosophie orgueilleuse qui voudroit élever la Religion naturelle sur les débris de l'auguste Religion de nos Peres ; d'avoir dit, en 1756, en parlant de M. de Voltaire que le génie de cet homme célebre est un volcan qui ne jette plus aujourd'hui que de foibles étincelles, obscurcies par beaucoup de cendres qui s'y mêlent ; que cet Ecrivain, nourri des maximes Angloises, s'est abandonné à une liberté effrénée de penser & de dire les choses les plus dangereuses. […] Réflexions philosophiques & littéraires sur le Poëme de la Religion naturelle, vol.
. — A quelle religion appartiennent-ils ? […] La foi tolérante n’est plus une religion, mais une religiosité. C’est par cette tolérance, si fortement à la mode, que les religions périraient, car elles meurent d’elles-mêmes, on ne les tue point ; en les persécutant, on les fortifie. » Saint-Saëns n’a pas tort.
La religion achève donc de combler à nos yeux l’intervalle, déjà rétréci par les habitudes du sens commun, entre un commandement de la société et une loi de la nature. […] A quoi l’on a répondu que c’est au contraire par la supériorité de sa morale qu’une religion gagne les âmes et les ouvre à une certaine conception des choses. […] Nous parlions des fondateurs et réformateurs de religions, des mystiques et des saints. […] La religion exprime cette vérité à sa manière en disant que c’est en Dieu que nous aimons les autres hommes. […] On se plaît à dire que la religion est l’auxiliaire de la morale, en ce qu’elle fait craindre ou espérer des peines ou des récompenses.
Il s’appliqua, de tout son cœur, à étudier un ou deux moments de l’histoire des religions. […] On m’a reproché de beaucoup prôner cette religion, facile en apparence, en réalité la plus difficile de toutes. […] C’était là sa religion. […] Comment naissent, croissent et meurent les littératures, les religions, les arts, les sociétés politiques ? […] Je ne connais pas un écrivain qui soit plus dévot à la religion de la beauté.