Le principe de l’imitation de la nature introduit dans l’art un élément fixe et absolu, un principe d’unité et d’universalité, partant la raison, qui est en nous ce qui nous est commun avec tous les hommes, sous l’infinie diversité des races, des siècles et des humeurs. […] « Car, disait Longin traduit par Boileau, lorsqu’en un grand nombre de personnes différentes de profession et d’âge, et qui n’ont aucun rapport ni d’humeurs ni d’inclinations, tout le monde vient à être frappé également de quelque endroit d’un discours, ce jugement et cette approbation uniforme de tant d’esprits, si discordants d’ailleurs, est une preuve certaine qu’il y a là du merveilleux et du grand. » Quand à la diversité des âges, des humeurs et des professions s’ajoute celle des races, des époques et des mœurs, l’uniformité d’approbation sera une marque bien plus certaine et plus indubitable encore de l’excellence des ouvrages. […] On néglige comme indifférentes toutes les variations de l’esprit humain ; et depuis le costume jusqu’aux lois, depuis les formes de langage jusqu’aux façons de sentir, tout ce qui est localisé dans le temps et dans l’espace, particulier à une race, à un groupe d’individus ou à un individu, tout cela est compté comme non avenu.
Tels de ses vers s’appuient sur des souvenirs de la mythologie antique et, ranimant des sylvains et des hippocentaures qui n’ont rien de commun avec les croyances et les traditions de nos races, dénoncent ainsi la main du littérateur, le souvenir d’études faites, de choses prises dans les livres. […] Les grands tragiques d’Athènes interprétèrent ce que songeait leur race. […] Non seulement on est loin de la verve naturelle du peuple, dans la Poésie lyrique, mais on n’écrit pas même d’après les traditions héroïques de la race.
Supposez, dit-il, deux races particulières d’êtres humains, — l’une ainsi constituée dès l’origine, que de quelque façon qu’on l’élève et la traite, elle ne pourra s’empêcher de penser et d’agir de manière à être une bénédiction pour tous ceux qui en approchent ; — l’autre d’une nature originelle si perverse, que ni éducation, ni châtiment n’ont pu lui inspirer quelque sentiment de devoir ni l’empêcher de mal faire. Quand même ni l’une ni l’autre de ces deux races n’auraient de libre arbitre, nous ne pourrions nous empêcher d’honorer les premiers comme des demi-dieux, et de traiter les autres comme des bêtes nuisibles, de les garder à distance ou même de les tuer s’il n’y a pas d’autre moyen de s’en débarrasser. […] Il y a eu, ajoute Herbert Spencer (et ceci s’expliquera plus tard par sa doctrine générale), et il y a encore dans la race certaines intuitions fondamentales, qui sont le résultat d’expériences graduellement organisées et héritées, mais qui sont devenues inconscientes.
La merveille est que ce petit guerrier, qui sait éviter la bassesse sentimentale et l’aveuglement démagogique, conserve une noble humanité dans son âme, et c’est là le miracle de la raison française, la divine souplesse de notre race, quand elle atteint son point de perfection. […] Il me faut sans relâche contempler les grandes idées pour lesquelles je dois combattre, comparer le prix d’une personnalité mesquine et impure à celui des principes moraux qui sont la gloire de notre race humaine. » (Le Semeur d’août 1915.) — Le jeune volontaire Paul Guieysse (tombé depuis au champ d’honneur) confie à l’ami qui l’accompagne au bureau de recrutement : « J’aime tellement la vie que si je n’avais pas une foi entière dans l’immortalité de l’âme, j’hésiterais peut-être à m’engager » (lettre communiquée). — Michel Penet, âgé de dix-neuf ans, chasseur au 8e bataillon de chasseurs à pied, raconte : J’aurais voulu que vous assistiez, comme moi, aux demandes de départ. […] Ils naquirent deux fois : de la terre de France, d’une vieille race où chacun est noble, et puis du péril national.
Or, comment cette bizarrerie, nécessaire, incompressible, variée à l’infini, dépendante des milieux, des climats, des mœurs, de la race, de la religion et du tempérament de l’artiste, pourra-t-elle jamais être gouvernée, amendée, redressée, par les règles utopiques conçues dans un petit temple scientifique quelconque de la planète, sans danger de mort pour l’art lui-même ? […] Cette idée grotesque, qui a fleuri sur le terrain pourri de la fatuité moderne, a déchargé chacun de son devoir, délivré toute âme de sa responsabilité, dégagé la volonté de tous les liens que lui imposait l’amour du beau : et les races amoindries, si cette navrante folie dure longtemps, s’endormiront sur l’oreiller de la fatalité dans le sommeil radoteur de la décrépitude. […] Alors, comme je le faisais entrevoir tout à l’heure, la vitalité se déplace, elle va visiter d’autres territoires et d’autres races ; et il ne faut pas croire que les nouveaux venus héritent intégralement des anciens, et qu’ils reçoivent d’eux une doctrine toute faite.
De tout temps, on l’a observé, les gens de lettres n’ont pas été des mieux et n’ont pas fait très bon ménage avec les hommes politiques, même avec ceux qu’ils ont servis ; on l’a remarqué des plus grands écrivains, gens de fantaisie ou d’humeur, de Chateaubriand, de Swift ; écrivains et gouvernants, ils peuvent s’aimer comme hommes, ils sont antipathiques comme race. […] … Ne serait-il pas juste de s’occuper un peu de cette race, après tout intéressante et qui en vaut une autre ?
Je me rappelle aussi une phrase très belle de Sainte-Beuve, qu’il est toujours flatteur de s’appliquer : « Il y a la race des hommes qui, lorsqu’ils découvrent autour d’eux un vice, une sottise ou littéraire ou morale, gardent le secret et ne songent qu’à s’en servir et à en profiter doucement dans la vie par des flatteries ou des alliances ; c’est le grand nombre, — et pourtant il y a la race de ceux qui, voyant ce faux et ce convenu hypocrite, n’ont pas de cesse que, sous une forme ou sous une autre, la vérité, comme ils la sentent, ne soit sortie et proférée : qu’il s’agisse de rimes ou même de choses un peu plus sérieuses, soyons de ceux-là. » 1.
Il peut naître chez les races fortes et aux époques de crise des monstres dans l’ordre intellectuel, lesquels, tout en participant à la nature humaine, l’exagèrent si fort en un sens qu’ils passent presque sous la loi d’autres esprits et aperçoivent des mondes inconnus. […] Comparez l’homme moderne emmailloté de milliers d’articles de loi, ne pouvant faire un pas sans rencontrer un sergent ou une consigne, à Antar, dans son désert, sans autre loi que le feu de sa race, ne dépendant que de lui-même, dans un monde où n’existe aucune idée de pénalité ni de coercition exercée au nom de la société.
Aie pitié de ta fille, aie pitié du mâle de ta race ! » — « Ne laisse point périr en nous la race de PéIops : ainsi tu vivras, bien que tu sois mort. » — « Les enfants sauvent la renommée du père qui n’est plus, pareils au liège qui porte le rets et l’empêche de s’enfoncer dans l’abîme. » Cette fois l’Ombre est assurément réveillée ; sortie du sépulcre, elle enveloppe son vengeur ; le spectre ne fait plus qu’un avec le vivant. — Avant d’agir, Oreste veut savoir pourquoi ces libations envoyées au mort, « don misérable si fort au-dessous du crime ».
Que ne puis-je citer le dialogue de Pilate avec le peuple juif ; ces railleries romaines, faites avec le retors d’un légiste et l’insolence d’un soldat, car ces Romains, sous leurs tuniques militaires, cachaient une race de procureurs ! […] On n’analyse point les soupirs, les cris, les oracles des Sibylles et des Prophètes, et la sœur Emmerich fut de cette race mystérieuse d’esprits.
Quand un grand homme a cessé de vivre, quand il est sorti de la phase historique qu’il a marquée de la double empreinte de son esprit et de son caractère, il laisse souvent après lui, et dans l’histoire même, quelques gouttes de son sang : — une famille, que la curiosité aime à étudier pour y retrouver les influences de sa gloire et de son génie ; car ceux qui croient le plus à la personnalité du mérite posent, malgré eux, la question de race à propos de tout, comme si c’était une fatalité ! […] Il y a une biographie du marquis de Vardes qui fait rentrer sous terre les Améric Vespuce de sa gloire, les Lauzun, les Richelieu, et toute cette race de fats heureux, le caprice des femmes et leurs tyrans.
Or, c’est ce tableau, ou plutôt ce livre, que nous demanderons aujourd’hui à deux voyageurs contemporains qui viennent chacun de publier son voyage, tous deux appartenant à cette race d’écrivains préoccupés du pittoresque, qui ne vivent que pour le pittoresque, et qui vont l’un et l’autre justifier, l’un malgré des qualités souvent charmantes, et l’autre par ses défauts très réels et très persistants, ce que nous venons de dire des livres de voyages. […] L’auteur d’Un An dans le Sahel n’a pas l’antipathie moderne pour la guerre, et il croit à la haine implacable des races, nées ennemies, que toutes les civilisations de l’avenir seront impuissantes à empêcher.
Certes, il la fuit, cette banalité, serait-ce parfois aux dépens de la clarté, de la régularité, de la forme ; tant pis pour les césures, pour les rimes, il s’élance résolument, cingle sans pitié son Pégase fin de siècle et arrive au but ; enfant de race habitué à réaliser tous ses caprices, les obstacles ne comptent pas pour lui ; rien ne l’arrête, il forge les mots que la langue ne lui donne pas, prend ses aspirations parfois d’une assonance ou d’une consonance, mais il dit tout ce qui lui vient à la tête, et, s’il y passe des choses un peu surprenantes, il y passe aussi, et le plus souvent, d’exquises… L’idée maîtresse du Chef des odeurs suaves, la dominante de cette œuvre de délicat, de raffiné, c’est l’influence qu’exercent sur nos sens les objets qui nous environnent.
Pour ses proses, dont Arène et Daudet ont traduit les plus curieuses, elles sont l’expression absolue et parfaite de l’âme de sa race.
Autour d’un individu, il faut tracer, si l’on veut avoir de lui une idée suffisante, des cercles concentriques qui sont la famille, le groupe de ses amis et camarades, sa ville, sa province, sa nation, sa race.
Détracteur de la vie, Young, Anglois farouche, Noctambule pressé que le soleil se couche, Pour méditer en paix tes funebres tableaux, Apôtre de la mort, prêchant sur des tombeaux, A travers quel nuage ou quel verre infidele Vois-tu donc les devoirs de la race mortelle !
Il nous sied de le dire ; on retrouve en ses inspirations belliqueuses un digne fils des indomptables vainqueurs des Maures, de ces hommes dont notre Martel fut l’honorable émule : on croit entendre en ses discours magnanimes un descendant de la race du grand Pélage et des Alphonse. […] Ni les actions ni les discours de l’homme sauvage, ou récemment en société, ne seront pareils à ceux de l’homme policé : ces différences entre les individus existent entre les races humaines par la suite des temps, et entre les nations par l’empire dei gouvernements établis. […] De telles énumérations acquièrent un avantage de plus lorsque les titres des peuples et des races illustres s’y rapportent, ainsi que chez Homère et Virgile, à des souvenirs nationaux. […] contemple ta race, intrépide, aguerrie, « Libre, errante, elle garde et son arc et ses lois, « Et le sépulcre s’ouvre aux traits de son carquois. […] La sagesse naturelle lui expliquera-t-elle l’effusion d’un sang divin, et versé pour le salut des races expirées, des races vivantes, et des races à naître ?
Deux sons semblables au bout de deux lignes égales ont toujours consolé les plus cuisantes peines ; la vieille Muse, après trois mille ans, est une jeune et divine nourrice, et son chant berce les nations maladives qu’elle visite encore, comme les jeunes races florissantes où elle a paru. […] Ainsi Pausanias dit qu’il y eut une race d’hommes qui se plaisait à grignoter les superfluités et les excroissances des livres ; ce que les savants ayant enfin observé, ils prirent d’eux-mêmes le soin de retrancher de leurs œuvres les branches mortes et superflues. […] His time was come, he ran his race ; We hope he’s in a better place.’ […] He says they were a race of men, who delighted to nibble at the superfluities and excrescencies of books, which the learned at length observing took warning, of their own accord, to lop the luxuriant, the rotten, the dead, the sapless, and the overgrown branches from their works. […] I cannot but conclude the bulk of your natives to be the most pernicious race of little odious vermin, that nature ever suffered to crawl upon the surface of the earth.
La recherche des sensations fines les condamne à être de médiocres reproducteurs des races futures. […] Il lui semblait que peut-être il retrouverait là-bas, dans des coins ignorés, comme dans le fond d’un réservoir inépuisé, quelques restes des races primitives que l’Asie a versées sur l’Occident. […] Bonvalot, au moment où triomphe le « tout à l’Afrique », reste obstinément fidèle à l’Asie, parce qu’il retrouve, sur cette terre, saturée d’histoire, les origines de notre évolution, et les ancêtres de notre race. […] Eux-mêmes prétendent qu’Alexandre et Aristote étaient, comme Georges Castriot, bey d’Albanie, de leur pays et de leur race. […] La capitale de l’empire grec d’Égypte était un bazar cosmopolite, le rendez-vous de toutes les langues et de toutes les races.
Dans les faiblesses politiques des Polonais, je voyais des arguments pour, plutôt que contre, la supériorité de leur race. […] Or il est arrivé, à des époques déterminées, que ces deux races ont été envahies de curiosités qui ne leur étaient point naturelles : elles ont senti le désir de rivaliser en finesse avec des races plus fines, en pure beauté idéale avec des races moins sensuelles. […] Et, en effet, il garda toute sa vie cette lenteur singulière, qui sans doute lui venait de sa race. […] Mais Écossais ou Anglais, ses livres nous font voir en lui un métaphysicien de race, passionnément épris de pure dialectique. […] Un sourd travail s’accomplit en nous sans interruption : c’est le génie de notre race qui reprend conscience de lui-même ».
Les dieux des anciens partageant nos vices et nos vertus, ayant, comme nous, des corps sujets à la douleur, des passions irritables comme les nôtres, se mêlant à la race humaine, et laissant ici-bas une mortelle postérité ; ces dieux ne sont qu’une espèce d’hommes supérieurs qu’on est libre de faire agir comme les autres hommes.
n’ont pas les proportions aussi élegantes, ni le corsage et l’air aussi nobles que les chevaux que les sculpteurs ont faits depuis qu’ils ont connus les chevaux du nord de l’Angleterre, et que l’espece de ces animaux s’est embellie dans differens païs par le mêlange que les nations industrieuses ont sçû faire des races.
Une race superbe, qui se sent mourir, n’a pas peur de mourir, mais a peur des morts, et se sent attirée par eux. […] Rien qui ne soit plus éloigné des conceptions anglo-saxonnes, de celles de Kipling, de London, de Conrad, qui non seulement prennent la colonisation par la race blanche comme un fait inéluctable, mais considèrent cette race comme supérieure et ayant « le droit de commander ». […] Le Sang des races fait éclater ce phénomène aux yeux, à la pensée : le roman le plus dru, le plus brave. […] » Pareillement en Suisse, pays que les hasards bienheureux d’un traité vieux de cent ans ont neutralisé, et qui, partagé entre trois races, fut le premier à comprendre les avantages de la paix perpétuelle entre les races. […] Outre que ses entours hébreux sont fiers de montrer un type aussi séduisant de leur race, tous ses amis chrétiens sont épris de lui.
Les Grecs, après les clameurs et les peines des initiales batailles, avaient formé une race de raisonneurs, épris des notions claires et des enchaînements harmonieux, ils n’avaient point des sensations vives et n’étaient guère portés à l’émotion : nulle fougue passionnée ne secoue l’ordonnance tranquille de leurs discours, non plus que la froide sérénité de leurs faces. […] Encore ces fleurs, un peu maladives, du génie grec, les tragédies d’Euripide : « Vos dieux sont en vos âmes : ils sont les cruelles passions, détruisant l’équilibre salutaire des besoins : voyez les effets de ces maux ; tenez Hermione et Phèdre pour les images de vos passions. » Mais à cette race exemplaire de dialecticiens ni le récit ni le drame ne pouvaient suffire longtemps : ils exigeaient une vie toute de notions pures, bellement enchaînées : ils exigeaient la forme du roman dialectique. […] Dans les drames de Shakespeare cet état de l’art trouva son expression la plus complète : nulle analyse, nul souci d’une explication psychologique sérieuse ; jamais on n’a plus négligé l’étude des motifs mentaux ; mais c’est un superbe déploiement de gestes et défaits, un choc de paroles aisément poignantes ; la vie colorée, chaude, bruyante, — au fond creuse — une race très sanguine. Corneille créa les drames plus reposés, plus nobles, d’une autre race. […] Tolstoy, et plus encore Gontcharov, ont donné à l’Art les romans de la psychologie sans nul parti-pris : mais ils ont été les aristocrates d’une race indolente ; ils ont laissé aux Français le soin de parfaire la forme du roman : et voici qu’à nos esprits, coutumiers de cette forme, la vie de leurs œuvres apparaît incomplète.
influence de la race sur les familles bien faites ! […] Et si ce n’est pas vrai, si l’Anglais, l’Anglais ineffaçable et indestructible, qui vivait peut-être avec la ténacité de ses préjugés, de ses haines et de sa race, sous la fleur du génie cosmopolite de Shakespeare ; si l’Anglais fit faire à ce génie, contre Jeanne d’Arc, ce que plus tard les plus grands esprits de l’Angleterre firent pendant des années contre l’Empereur Napoléon, bravo ! […] Taine lui-même ne dit mot, dans sa récente Histoire de la littérature anglaise, parce que cette pièce et ce personnage de Henri V sont une des plus fortes objections qu’il y ait contre son système de l’influence de la race ; car Henri V est un Anglais diminué de tout le flot d’humanité que Shakespeare a fait entrer dans sa nature, comme s’il eût voulu démontrer, par la conception et la réalisation d’un tel personnage, combien son génie savait s’affranchir de ce joug de la race que M. […] Taine, le Henri V de la race et des Chroniques ne ressemble en rien à l’adorable création de Shakespeare.