C’est dans ces morceaux que le Traducteur, si on peut se servir de ce terme, déploie les richesses de notre Poésie, & fait de vrais Originaux de ses imitations.
Quant aux formes absolument originales, beaucoup dérivent directement du latin ou du grec, et sont instaurées suivant les règles admises.
Un écrivain dont nous regretterons longtemps la perte, — un esprit assurément moins original, moins profond, moins artiste que Stendhal, mais qui était de la même race, qui en avait l’acier, moins damasquiné mais aussi pur, et surtout le fil, — Bazin, l’auteur du Louis XIII, ce sobre historien que les imbéciles peuvent croire sec, avait entrepris de restaurer le livre de madame de La Fayette, et c’est cette restauration, accomplie avec le tact d’une connaissance approfondie, que l’éditeur Techener a publiée.
En relisant ces divers écrits, en tâchant, s’il se peut, pour les Essais d’un jeune Barde et pour les Tristes, de ressaisir l’édition originale (car dans les volumes des œuvres complètes la physionomie particulière de ces petits recueils s’est perdue et comme fondue), on surprend à merveille les affinités sentimentales et poétiques de Nodier dans leurs origines. […] Bonneville avait débuté jeune par des poésies originales où l’on remarque de la verve ; ensuite il s’était livré au travail de traducteur. […] Adèle n’est pas une vraie femme de chambre, ce qu’il faudrait pour que la donnée eût toute sa hardiesse originale ; elle n’est qu’une demoiselle déclassée et méconnue. […] Les Tristes, écrits dans des quarts d’heure de vie errante, ne sont qu’un recueil de différentes petites pièces (prose ou vers), originales ou imitées de l’allemand, de l’anglais, et qui sentent le lecteur familier d’Ossian et d’Young, le mélancolique glaneur dans tous les champs de la tombe. […] Nodier peut être dit un frère cadet (bien Français d’ailleurs) des grands poëtes romantiques étrangers, et il le faut maintenir en même temps original : il était en grand train d’ébaucher de son côté ce qui éclatait du leur.
Nous ne sommes pas réduits ici au panégyrique vide, aux éloges académiques, à la critique oratoire et officielle : nous avons les originaux de La Fontaine, les textes de Pilpay, de Phèdre, d’Esope, tels qu’il les avait sur sa table, nous pouvons voir en quoi il les a changés, marquer du doigt les passages retouchés, ajoutés, corrigés, entrer dans le laboratoire poétique, saisir au vol l’imagination qui arrive, la philosophie qui s’introduit, la gaieté qui s’insinue. […] , Lassé d’entendre un tel lutin, Vous le renvoie à la campagne Chez ses parents…157 Esope rencontre parfois le trait original : « Un rat de terre, par un mauvais destin, devint l’ami d’une grenouille. […] Cela sera plus visible encore si vous observez comment La Fontaine a corrigé ses originaux. […] Il nous y fait voir comment il rapporte tout à l’ensemble, et pourquoi il rejette certains traits de son original. […] Ses originaux s’égarent sans cesse à côté de leur objet.
La langue poétique et la langue oratoire de la France se trouvaient précisément à ce confluent des différents ruisseaux des idiomes où le génie des langues, un moment indécis, s’arrête comme embarrassé de ses richesses, tente différentes voies, puis, prenant tout à coup son parti décisif, forme ce grand courant original de la langue nationale, qui entraîne tout en purifiant tout dans son cours. […] L’étude attentive de ces premières poésies révèle le Racine futur tout entier, un fils de l’antiquité, non un fils de son siècle, un homme de renaissance, non de création, original plus tard, mais original seulement par la perfection. […] Imitateur jusque-là tant qu’il avait été païen, du jour où il fut biblique et chrétien, il fut original. […] Nous ne jetterons qu’un coup d’œil rapide sur cette idylle héroïque et sacrée d’Esther, qui n’est remarquable que parce qu’elle est la première inspiration originale et biblique de Racine, et le premier prélude à son style sacré.
Dans ces limites vit et parle la même langue une nation profondément originale dont l’existence subit assez peu les influences des peuples voisins. […] La poésie de ces temps se trouve dans les chants des minnesangers et dans ceux des meistersangers, qui ont beaucoup de ressemblance avec nos troubadours de Provence, et qui peut-être en tirent leur origine, Déjà le nom de meister indique qu’ils formaient école ; cette poésie paraît d’abord, par cela même, moins originale et moins populaire que celle de la première époque. […] La scholastique d’Allemagne est sans doute moins originale et moins féconde que celle de France, qui n’a ni égale ni rivale ; toutefois elle présente de grands noms, dont le plus grand est celui d’Albert. […] On vit s’élever en Allemagne une infinie variété d’écoles où la vieille scholastique subit des améliorations, c’est-à-dire des altérations continuelles ; mais au milieu de cette confusion on ne trouve rien de grand, rien d’original, rien qui soit digne d’occuper sérieusement l’histoire. […] Or, dans tout inventeur, dans tout penseur original, c’est la méthode qu’il faut avant tout rechercher, car cette méthode est le germe de tout le reste ; souvent elle survit aux vices de ses applications.
Un catalogue d’expressions originales eût été meilleur. […] Copier des expressions, même originales, ne suffit pas. […] Virgile les imite et n’a de vraiment original que le trait : « le flot le fait tournoyer sur lui-même ». […] Il a traité tous les sujets d’Horace et n’a de vraiment original que son Lutrin. […] Les écrivains originaux, c’est-à-dire ceux qui ont des tournures caractéristiques, sont les plus faciles à pasticher.
André Gide avait pu le lire dans l’original. […] On devine si Julius le considère comme un original. […] Il vend aussi les éditions originales de ses propres ouvrages : quarante ou cinquante numéros au catalogue ! […] Cette vérité commune admet sans doute que chacun doit suivre sa vocation, et que les grands écrivains sont originaux. […] Les chefs-d’œuvre les plus originaux ressemblent toujours à d’autres œuvres antérieures ou contemporaines.
Nous ne leur demandons pas d’être très grands, il nous suffit qu’ils soient originaux. Inversement, s’ils ne sont pas originaux, nous les négligeons, et nous avons raison. […] Où est « l’original » d’une cathédrale gothique ? […] Spronck n’hésite pas à l’appeler « le caractère peut-être le plus original qu’ait produit notre époque ». […] Qu’on les ramène plutôt à Poinsinet de Sivry, l’auteur du Cercle, ou à Fagan, celui des Originaux. — Si je parle ici des Originaux, c’est que, comme on le sait, la Comédie-Française les a récemment exhumés de l’oubli pour que M.
Achille Genty, il déclare le volume original des Poésies complètes de La Fresnaie « tout à fait rare, hors de prix et inabordable. » Il l’eût du moins été pour lui de nos jours, dans ces conditions-là.
Mais tant que cette évocation n’est pas faite, nulle pensée originale, nulle invention n’est possible : les mots se combinent en nous, sans nous, mécaniquement, selon les affinités et les répugnances qu’ils ont contractées, avant nous souvent et hors de nous « par leur association avec l’expérience de l’objet et avec l’image de l’objet ».
Il reste original même à côté d’André Chénier, auquel, du reste, sa modestie bien connue l’eût empêché de s’égaler.
Cet agréable badinage sera toujours distingué parmi les Productions originales, qui font aimer aux Etrangers la gaieté Françoise, sans leur donner une mauvaise idée de nos mœurs.
., en original, et 23 ou 24 volumes de copies de pièces. […] Cela est vrai ; les Mémoires secrets de Duclos ont de l’intérêt, de l’agrément, de la vivacité ; il y a du sien souvent ; il y marque sa griffe par certaines anecdotes qu’il savait d’original. […] Ce que je fais là pour le portrait de Mlle Choin, on peut le faire presque indifféremment pour le portrait de n’importe quel personnage du temps, le duc et la duchesse de Bourgogne, le maréchal de Villars, Louis XIV mourant, Mme des Ursins, le père Tellier, etc. ; entre la copie de Duclos et l’original de Saint-Simon, le rapport est le même.
Il a sur notre nation et sur notre caractère des observations très originales, et s’il dit des vérités aux autres peuples, il nous en adresse assez à nous-mêmes les jours d’éloges, pour qu’on puisse tout citer sans faire de jaloux : On ne le croirait pas, dit-il, la nation française est, des nations de l’Europe, celle dont les peuples ont communément plus de jugement mêlé avec le plus d’esprit. […] Cet ouvrage ne serait pas indigne d’être réimprimé, si l’on réunissait dans une collection les principaux publicistes originaux du xviiie siècle : il faudrait alors recourir au manuscrit du Louvre, car des deux éditions de 1764 et de 1784, la première est criblée de fautes qui troublent le sens, et la seconde, qui se lit couramment, a subi des corrections arbitraires et tous les adoucissements de M. de Paulmy. […] C’est là le dernier aspect sous lequel nous apparaît cet homme original qui a tant écrit, tant fait de confidences sur lui-même et sur son temps, et qui offre en lui un mélange de vertueux, de cordial, de sensé, de singulier, de naïf et même de grossier, bien fait pour appeler l’étude et les explications de plus d’un moraliste.
Charles de Nîmes, qui a été longtemps professeur à Montpellier, homme très-instruit, original et sincère, est allé étudier, pendant plusieurs années, l’allemand en Allemagne, là où il faut le prendre, c’est-à-dire à sa source, à sa souche et dans sa racine. […] Charles que de l’original lui-même, auquel une intelligence amie a bien voulu m’ouvrir un entier et facile accès. […] Partout ailleurs, c’eût été un affreux guêpier de bas-bleus : là, ce n’est qu’un jeu de société assez original et amusant, un passe-temps de dilettanti, qui entretient dans ce cercle l’activité de l’esprit et sauve des commérages.
Plus tard, il y aura des chapitres tout entiers consacrés à la révolte des Pays-Bas et aux causes qui amenèrent cette révolution : ce sont des chapitres d’histoire où l’auteur intervient à peine et où, parlant le moins possible en son nom, il ne vous fait marcher avec lui que sur des extraits enchâssés, tirés des documents originaux : méthode des plus solides et des plus sûres. […] Ce portrait, qui se compose tout entier de mots et de traits originaux rapportés, me donne au plus haut degré le sentiment de la vérité et de l’équité historique, et ceux qui ont une fois goûté à ce genre sobre et sain sont guéris à jamais du clinquant, du flambant, du faux enthousiaste, du faux pittoresque, du faux lyrique. […] Sur ce nom demi-fabuleux, depuis Tirso de Molina, Molière, Mozart, jusqu’à Byron, Mérimée et Musset, chacun a joué à son tour et à sa guise ; chacun a transformé le type à son image et l’a fait chaque fois original et nouveau.
., pour tous les acteurs et actrices en renom, pour Déjazet surtout ; j’ai eu sous les yeux de ces dessins originaux : jusque dans les plus simples indications au crayon, il y avait de l’esprit, de la gaieté. […] Il l’a modernisé sans le vulgariser ; il a inventé le débardeur, ce demi-déshabillé flottant, élégant, engageant, et où tous les avantages et les agréments naturels trouvent leur compte ; il a refait un Pierrot tout neuf, original, coquettement coiffé, aux plis mous, relâchés, mais artistement agencés dans leur mollesse, un Pierrot plein de grâce et à faire envie aux plus séduisants minois (voir, entre autres, dans là série des Bals masqués, le n° 4). […] La légende de Gavarni, c’est une forme à part, et qui porte avec elle son cachet distinct, original, comme la maxime de La Rochefoucauld.
Dans sa cinquième édition, en 1863, il lui consacre treize colonnes en petit texte, et un travail approfondi sur les éditions originales. […] Achille Genty, semblait s’être attaché de prédilection à Vauquelin de La Fresnaye dont il nous a rendu l’Art poétique (1862), mais qu’il n’a pu cependant faire réimprimer en entier, au grand regret de tous ceux pour qui le volume original, tout à fait rare et hors de prix, est inabordable. […] Les autres, plus ou moins, sont des barbares : ils ont chance, dira-t-on, d’être plus originaux.
On ne s’étonnera donc pas qu’à propos du livre, et pour le mieux expliquer à notre gré, nous parlions aussi de l’homme même, des origines et des accroissements intérieurs de cet esprit si original et si vif. […] Ce docte et original esprit, dont les idées historiques et littéraires, sans guère franchir encore le cercle de l’intimité, eurent tant d’effet autour de lui dès 1820, peut ici revendiquer un droit que s’est toujours empressé à proclamer, dans sa reconnaissance, le disciple émancipé, devenu maître à son tour. […] Son ouvrage est tout original, puisé aux sources, d’une méthode et de résultats qui ne sont qu’à lui.
et si quelque chose de véritablement essentiel ou de piquant, d’original en un mot, est en jeu ; c’est à ce fond qu’il faut venir pour classer les œuvres et surtout les hommes. […] Elles ne valent que par l’emploi et non par l’essence. » Combien, dans une académie, de ces savants par art, qui ne valent que par l’emploi, qui ne sont ni originaux, ni inventeurs, qui ont tout appris, même l’esprit ! […] Mon Esprit des Journaux me rendait sur Buffon197 des dépositions originales qui ajouteraient un ou deux traits, je pense, aux complètes leçons de M.
Enfin, par leur style tourmenté, raffiné, souvent extravagant ou alambiqué, souvent aussi d’une intense et originale précision, MM. de Goncourt ont exercé une grande influence sur leurs contemporains. […] Flaubert lui apprit à poursuivre le caractère original et particulier des choses, à choisir l’expression qui fait sortir ce caractère. […] Avec un mélange original de sympathie et d’ironie, il conte des légendes religieuses, les miracles du mysticisme ou de l’ascétisme ; d’autres fois, il nous promène à travers le monde moderne, prenant plaisir à nous détailler les plus excentriques ou immorales combinaisons de la sensualité et de l’intelligence, du positivisme et de l’esthétisme dans les âmes contemporaines.
C’est la figure la plus originale qu’il ait dessinée. […] C’est un homme tout neuf, non déformé, parfaitement original ; c’est l’être qui reçoit des choses et du monde entier les impressions les plus directes et les plus vives, pour qui tout est étonnement et féerie ; qui, cherchant à comprendre le monde, imagine des explications incomplètes qui en respectent le mystère et sont par là éminemment poétiques. […] Un des mérites les plus originaux du livre, c’est que l’enfant qui en est le héros est bien « au milieu du monde ».
Et si le goût nous vient de parler de sa manière, c’est parce que ce sceptique — qui ne l’est que plus que d’autres — nous paraît n’avoir été et n’être avant tout qu’un ouvrier de lettres, voire un artisan, — un artisan original et éclectique, aussi éclectique que son bourgeoisisme est raffiné, aussi original que sa médiévale figure n’en finit pas d’être expressive. […] Tout au plus ne réussissons-nous pas à nous défendre d’un certain trouble, en voyant notre impuissance d’en savoir plus long sur les dispositions sensibles, les nuances d’âme du plus paradoxal de nos écrivains contemporains, d’un auteur aimable et, apparemment, non moins normal, qui nous a présenté l’œuvre la plus originale, la plus déconcertante à la fois, la plus inattendue et la plus agréable, qui nous a tenu, avec cordialité, les propos les plus désolants, et qui, en nous secouant du plus ample désespoir, a eu aussi bien l’air de se mettre en peine pour nous en démontrer la logique que celui de tenir à nous en inspirer le mépris raisonné.