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800. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

On a ici la lumière sans la foudre. […] Que quelques fautes inévitables dans un si vaste travail, et inséparables de la manière même adoptée par l’historien ; des redites ou ce qui semble tel, et qui tient à un besoin extrême de clarté ; quelques inexactitudes sur des points accessoires et qu’on pouvait fort bien laisser de côté, pures inadvertances, sans effet sur l’ensemble, et qui tiennent encore à l’excellente habitude de ne parler qu’avec des données positives et avec des faits, non avec des phrases ; le tout si réparable dans une seconde édition : que ces taches légères n’aillent pas obscurcir dans notre esprit, quand nous jugeons de tout le monument, la grandeur du dessin, la noblesse et l’aisance de la distribution, la lucidité des exposés, la lumière des tableaux, l’ouverture et la largeur des horizons.

801. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Il songeait à la senteur des pâturages par les matins d’automne, à des flocons de neige, aux beuglements des aurochs perdus dans le brouillard, et, fermant ses paupières, il croyait apercevoir les feux des longues cabanes, couvertes de paille, trembler sur les marais, au fond des bois. » C’est la contrepartie et comme la revanche de ce beau passage des Martyrs ou l’on voit le Grec Eudore, dans le camp romain, à la lisière de la Gaule et de la Germanie, regretter les paysages éclatants de la Grèce et s’ennuyer sous « ce ciel sans lumière, qui semble vous écraser sous sa voûte abaissée. » Ici c’est le Gaulois qui a trop de lumière et trop de midi, c’est le Normand qui, sous le ciel africain et surtout quand règne le sirocco, regrette sa Normandie d’alors, ses horizons boisés et ses agrestes pâturages.

802. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — II »

Soudain Ariel ou Puck, Scapin ou Dorine, Chérubin ou Fenella, merveilleux lutins, messagers malicieux et empressés, s’agiteront autour du maître, le tirailleront de mille côtés pour qu’il prenne garde à leurs êtres chéris, à leurs amants séparés, à leurs princesses malheureuses ; ils les évoqueront devant lui, comme dans l’Élysée antique le devin Tirésias, ou plutôt le vieil Anchise, évoquait les âmes des héros qui n’avaient pas vécu ; ils les feront passer par groupes, ombres fugitives, rieuses ou éplorées, demandant la vie, et, dans les limbes inexplicables de la pensée, attendant la lumière du jour. […] Ingres, comme on a l’œil rempli de l’éclatante variété pittoresque du grand maître flamand, on ne voit d’abord dans l’artiste français qu’un ton assez uniforme, une teinte diffuse de pâle et douce lumière.

803. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

Pareillement, les yeux fermés et sans être prévenu, vous voyez un flamboiement, en même temps vous entendez un son, et enfin vous avez dans le bras la sensation d’un coup de bâton ; essayez l’expérience sur un ignorant ou sur un enfant ; il croira qu’on l’a frappé, que quelqu’un a sifflé, qu’une vive lumière est entrée dans la chambre ; et cependant les trois faits différents n’en sont qu’un seul, le passage d’un courant électrique. — Il a fallu faire l’acoustique pour montrer que l’événement qui éveille en nous, par nos nerfs tactiles, les sensations de vibration et de chatouillement, est le même qui, par nos nerfs acoustiques, éveille en nous les sensations de son. Récemment encore156 « les phénomènes de chaleur, d’électricité, de lumière, assez mal définis en eux-mêmes, étaient produits par autant d’agents propres, de fluides doués d’actions spéciales.

804. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

Le reste de sa dissertation revient à dire qu’un livre de maximes vaut exactement ce que vaut l’esprit de l’auteur : nous n’avions pas besoin du secours de ses lumières pour nous en aviser. […] Mme Sarah Bernhardt dans Théodora … La grâce, le charme, la lumière, ou plutôt l’attrait malsain et diabolique de cette fantasmagorie byzantine, c’est encore Mme Sarah Bernhardt.

805. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

On s’étonne de ne trouver ni dans le portrait qu’il a tracé de lui, ni dans ses Mémoires, aucun aveu sur cette fatalité qui le condamna pendant près de vingt ans à s’imposer toutes les fatigues de l’ambition et de l’intrigue, au profit de volontés qui se perdaient dans leurs propres vues, et ne s’inquiétaient guère des siennes ; à n’agir qu’à la suite ; à ne se déterminer qu’au moment même où, sans le consulter, son parti venait de changer d’avis ; à haïr ses propres lumières comme des empêchements de sa volonté, et sa volonté comme la dupe de ses passions. […] Il en est d’autres, sorties parfaites de notre esprit, que nous restituons pour ainsi dire, dans leur intégrité, au genre humain, comme si nous ne les avions reçues qu’à titre de prêt ; lumières qui nous sont révélées, non pour en éblouir les autres, mais pour nous conduire nous-mêmes ; cause et non effet du peu que nous avons de sagesse.

806. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Mignet fit paraître, de 1847 à 1850, dans le Journal des savants, une série d’articles où, non content d’apprécier les documents produits, il introduisait pour sa part de nouvelles pièces jusque-là inédites, et apportait de nouvelles lumières. […] Dargaud parle d’un autre portrait où « un rayon de soleil éclaire, dit-il assez singulièrement, des boucles de cheveux vivants et électriques dans la lumière. » Mais Walter Scott, réputé le plus exact des romanciers historiques, nous peignant Marie Stuart prisonnière dans le château de Loch Leven, nous montre, comme s’il les avait vues, les tresses épaisses d’un brun foncé (dark brown) qui s’échappaient à un certain moment de dessous le bonnet de la reine.

807. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

Elle nous les fait bien connaître jusqu’à un certain point, mais seulement comme les sensations nous font connaître la chaleur ou la lumière, le son ou l’électricité ; elle nous en donne des impressions confuses, passagères, subjectives, mais non des notions claires et distinctes, des concepts explicatifs. […] Toutefois, sur ce point, il y a lieu de faire une distinction qui jettera peut-être quelque lumière sur le débat.

808. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Ainsi l’apôtre des nations, saint Paul, en arrivant pour la première fois à Athènes, cette ancienne métropole des lumières, des sciences et des arts, y trouva l’autel du Dieu inconnu. […] Le développement de cette idée n’est point de mon sujet : mais si jamais elle est traitée avec quelque profondeur, la sagesse humaine sera obligée de reculer devant une telle lumière ; et la science philosophique sera tout étonnée de n’avoir pas du moins entrevu les voies de la Providence.

809. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

Nous subissons même la puissante maîtrise de l’heure et de la lumière. […] Le peintre établira son chevalet dans une clairière de forêt, je suppose ; il dessinera les troncs et les branches des arbres, les buissons, les places d’ombre et de lumière ; il s’ingéniera à peindre ces dégradations de teintes des frondaisons qui s’éloignent et qui, vertes d’abord, se perdent bientôt dans le bleu.

810. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Ils ignorent Verhaeren et ses Villes Tentaculaires, ses adorables Petites Légendes et son récent recueil, les Forces Tumultueuses, tout plein d’un bruit de villes, d’un choc de métaux et d’activité industrielle, mais où l’on trouve aussi des vers comme ceux-ci : Dès le matin, par mes grandes routes coutumières        Qui traversent champs et vergers,        Je suis parti clair et léger Le corps enveloppé de vent et de lumière. […] « N’ayons pas ce dédain qui, chez un particulier comme chez un peuple, marque ordinairement peu de lumière », a dit excellemment Raynal dans son Histoire philosophique.

811. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Je le demande, quelle puissance a enseigné tout cela à tant de milliers d’hommes dans l’ancien monde, avant la venue de Jésus-Christ, sinon cette lumière naturelle qu’on traite aujourd’hui avec une si étrange ingratitude ? Qu’on le nie devant les monuments irréfragables de l’histoire, ou que l’on confesse que la lumière naturelle n’est pas si faible pour nous avoir révélé tout ce qui donne du prix à la vie, les vérités certaines et nécessaires sur lesquelles reposent la vie et la société, toutes les vertus privées et publiques, et cela par le pur ministère de ces sages encore ignorés de l’antique Orient, et de ces sages mieux connus de notre vieille Europe, hommes admirables, simples et grands, qui, n’étant revêtus d’aucun sacerdoce, n’ont eu d’autre mission que le zèle de la vérité et l’amour de leurs semblables, et, pour être appelés seulement philosophes, c’est-à-dire amis de la sagesse, ont souffert la persécution, l’exil, quelquefois sur un trône et le plus souvent dans les fers : un Anaxagore, un Socrate, un Platon, un Aristote, un Épictète, un Marc-Aurèle !

812. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

« Chers compagnons de mon art mélodieux, chers à moi comme la lumière qui visite ces tristes yeux, comme les gouttes de sang qui réchauffent mon cœur, vous êtes morts au milieu des cris de notre patrie mourante ; je ne pleure plus. […] Demain, l’astre renouvelle ses Ilots d’or, et réchauffe les peuples d’un redoublement de lumière.

813. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « PAUL HUET, Diorama Montesquieu. » pp. 243-248

De larges teintes, une plénitude de ton qui pousse à l’impression de l’ensemble, des ondées de lumière et d’ombre, des nuances uniques dans l’épaisseur des feuillages et dans la profondeur des lointains, nuances devinées et pressenties, qu’un œil vulgaire ne discernerait pas dans la nature, qui ne se révèlent qu’à la prunelle humide de larmes, et qui nous plongent en de longues et ineffables rêveries durant lesquelles nous nous mêlons à l’âme du monde.

814. (1874) Premiers lundis. Tome I « Œuvres de Rabaut-Saint-Étienne. précédées d’une notice sur sa vie, par M. Collin de Plancy. »

On y reconnaît aussi certaines vues développées ensuite par Dupuis, dans la conversation duquel Rabaut avait puisé des lumières.

815. (1874) Premiers lundis. Tome II « Li Romans de Berte aus Grans piés »

Pour cela, la comparaison de nos épopées avec le cycle germanique, avec le cycle scandinave, devenait indispensable ; notre cycle de la Table Ronde en particulier en pouvait recevoir une vive lumière.

816. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre III. Des moyens de trouver la formule générale d’une époque » pp. 121-124

Il arrive parfois, dans l’exécution d’une cantate par une société musicale, que les chanteurs, basses, barytons, ténors, se groupent au fond du théâtre et forment en sourdine un chœur puissant, tandis que, sur le devant de la scène, en pleine lumière, se détache une prima donna ; elle chante et sa voix domine toutes les autres, sans cesser cependant d’être en harmonie avec elles.

817. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — II »

Elle joue le rôle de la couche légère de gélatine qui, au fond de la chambre noire, se montre sensible à l’action de la lumière et s’empare, pour le fixer, du reflet des objets.

818. (1889) L’art au point de vue sociologique « Préface de l’auteur »

C’est ainsi que le déterminisme, qui, en nous déniant cette forme de pouvoir personnel qu’on appelle libre arbitre, semblait d’abord n’avoir qu’une influence morale dépressive, paraît aujourd’hui donner naissance à des espérances métaphysiques, très vagues encore, mais d’une portée illimitée, puisqu’il nous fait entrevoir que notre conscience individuelle pour rait être en communication sourde avec toutes les consciences, et que d’autre part la conscience, ainsi épandue dans l’univers, y doit avoir, comme la lumière ou la chaleur, un rôle important, capable sans doute de s’accroître et de s’étendre dans les siècles à venir.

819. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Nicole, Bourdaloue, Fénelon »

Ce style, où il ne manque que des nerfs, du sang, du mouvement et de la lumière, ce style dur, mais épousseté et propre, lisse comme un parchemin qui joue la vie… pour des myopes, ne peut être admiré ou aimé sincèrement de personne.

820. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Bathild Bouniol »

Fera-t-il son sillon de lumière ?

821. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Champfleury ; Desnoireterres »

Champfleury, comme tous les hommes de son triste système, décrit pour décrire, mais il ne peint pas ; car peindre, c’est nuancer les couleurs, c’est entendre les perspectives, c’est creuser ou faire tourner par les ombres, c’est éclairer par le sentiment presque autant que par la lumière.

822. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

J’ai, en effet, un peu peur que toutes vos lumières sur lui ne se bornent à savoir qu’il fut un grand journaliste, le plus violent, le plus éloquent et le plus spirituel des « ultramontains », et qu’il a laissé une page curieuse sur Thérésa. […] Jugez par là du reste. » Si je ne me trompe, Veuillot à vingt-quatre ans était, ou peu s’en faut (car tout recommence), dans la disposition d’âme de ces jeunes gens d’aujourd’hui qui sont inquiets de Dieu et de l’humanité et qui cherchent à la fois la vérité religieuse et la solution des questions sociales, — à cette différence près que ces jeunes hommes dont je parle sont beaucoup plus instruits que ne l’était alors Veuillot, qu’ils connaissent les philosophes, qu’ils sont surveillés et arrêtés, après tout, par leur propre esprit critique, et qu’il est à craindre que leur raison trop exercée ne leur permette jamais de faire ce « saut dans le gouffre », qui est peut-être le saut dans la lumière. […] Il serait content, comme Ajax, de combattre dans plus de lumière, fût-ce dans une lumière d’orage. […] Sa lumière me remplit d’une aversion sans borne pour les chefs-d’œuvre d’un art ou je ne suis qu’un pauvre vieil écolier, lorsque ces chefs-d’œuvre n’ont pas la marque du vrai… Cette aversion avait ses défaillances.

823. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

C’est comme une mise en rapport de la lumière avec votre demi-évanouissement. […] » et opérant dans la lumière matinale du jour. […] Le soir, Léon nous lit, dans La Revue nouvelle, son article sur Hugo, un article tout à fait remarquable, où foisonnent les idées, les images, les coups de lumière, dans une langue superbe. […] » L’on dîne, et un nuage noir qui fait craindre un orage, amène Mme Zola à reparler des terreurs nerveuses, qu’a son mari du tonnerre, et qui, dans le billard de Médan, les fenêtres fermées, et toutes les lumières allumées, se met encore un mouchoir sur les yeux. […] Ces œils-de-bœuf de lumière du fond des loges, ça tue tout, ça éteint tout, et le doux éclat des toilettes claires et des décolletages, et aujourd’hui, comme me le disait la comtesse Greffulhe, qui était charmante en blanc, il y avait trop d’uniformes de militaires, attirant l’œil à leurs chamarrures, et empêchant les femmes de ressortir du fond sourd des habits noirs.

824. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XI : Distribution géographique »

Partant de ce point de vue que le monde entier ou du moins de larges bandes longitudinales ont été simultanément plus froides d’un pôle à l’autre, on peut jeter quelque lumière sur la distribution actuelle des espèces identiques ou alliées. […] Cherchons maintenant quelle lumière on peut jeter sur les différents faits qui précèdent en partant de l’hypothèse appuyée, comme nous l’avons vu, sur un ensemble considérable de preuves géologiques, que le monde entier, ou du moins une grande partie de sa surface, a subi un abaissement simultané de température pendant toute la durée de la période glaciaire. […] Si notre soleil, en décrivant son orbite, venait à croiser l’orbite d’une autre étoile, dans l’instant très court où les deux astres s’approcheraient l’un de l’autre, notre terre jouirait momentanément de la chaleur et de la lumière de deux soleils très inégalement distants, ce qui pourrait causer, non pas une diminution de chaleur, mais, au contraire, une augmentation considérable, très passagère. […] Faudrait-il donc supposer au nuage cosmique de l’honorable membre de l’Institut une course hyperbolique avec une très petite vitesse, et un volume suffisant pour qu’à son passage à travers notre système il occupât tout l’espace du ciel compris dans l’orbite de la terre, de sorte que notre globe, en tournant autour du soleil pendant une ou plusieurs années, n’aurait pu apercevoir la lumière de cet astre ? […] Nous ignorons, il est vrai, si elle est conductrice, mais nous savons par contre qu’une comète n’intercepte pas même les rayons lumineux des étoiles, et qu’à plus forte raison elle pourrait passer entre la terre et le soleil sans nous priver ni de la chaleur ni de la lumière de cet astre.

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