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2325. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Je l’avoue, je me sens parfois humilié qu’il m’ait fallu cinq ou six ans de recherches ardentes, l’hébreu, les langues sémitiques, Gesenius, Ewald, pour arriver juste au résultat que ce petit drôle atteint tout d’abord.

2326. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IV »

La poésie dans le drame wagnérien ; le système poétique ; la langue, le vers ; l’invention poétique, les sujets, leurs origines.

2327. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Au retour de sa campagne triomphale, sur son char traîné par quatre éléphants, Bacchus longeant les rives du Gange ou côtoyant les villages de l’Himalaya, aurait pu voir, par la porte entrouverte de quelque case au toit de bambous, une famille fidèle au culte antique de sa race accomplir une cérémonie mystérieuse autour du foyer : — l’homme chantant une hymne en langue inconnue, et frottant deux morceaux de bois de figuier sur une poignée de feuilles sèches : puis, quand l’étincelle l’avait enflammée, la femme exprimant le suc d’une plante acide, pour nourrir le feu nouveau-né.

2328. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

Jeudi 2 mars Hier dans le fumoir de la princesse, l’on causait style, et l’on parlait de l’impuissance de bien écrire chez les gens qui parlent plusieurs langues.

2329. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — IV. La Poësie dramatique. » pp. 354-420

C’est une Bachante dont la langue est détrempée de fiel .

2330. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Combien de fois n’a-t-on pas dit que le rire du spectateur, au théâtre, est d’autant plus large que la salle est plus pleine ; Combien de fois n’a-t-on pas fait remarquer, d’autre part, que beaucoup d’effets comiques sont intraduisibles d’une langue dans une autre, relatifs par conséquent aux mœurs et aux idées d’une société particulière ?

2331. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Maintenant, tire la langue comme un chien ! […] Fredly Westphal ; car, outre que sa traduction est d’une bonne langue, je la devine fidèle, bien que j’en ignore le texte, hélas ! […] Et à ces gens « comme il faut », il prêle une langue d’une brutalité composite, où éclatent pêle-mêle des mots de camelots et de faubouriens, les métaphores canailles du pavé de Paris, les figures de rhétorique et les tours de phrase facétieux des commis en nouveautés qui fréquentent les courses et font la noce, le tout mêlé à des bribes de littérature, à du style de vaudeville ou d’opérette… Et cela nous heurte d’abord d’un choc inattendu : puis, à la réflexion, nous reconnaissons que M. Courteline a simplement prêté à ses mufles de « gens comme il faut » la vraie langue de leurs âmes, celle qu’ils parlent devant Dieu… Alexandre Dumas fils. […] Elle est comme dévorée par les épisodes. — En dehors des passages où il se relève d’argot mondain, le dialogue est d’une langue souple et fluide, mais qui manque de « ramassé ».

2332. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

De guerre lasse, enfin, il s’est mis à l’étude : il sait les langues, il sort même d’Europe, il explore l’Inde et voyage de temps en temps en Chine… par les livres, s’entend ; on le croit revenu de sa chimère ; on le prend en estime, on est près de le féliciter… Gardez-vous en bien ! […] Leur langue les trahit, et ils sont grossiers sans s’en douter.

2333. (1901) L’imagination de l’artiste pp. 1-286

On l’a remarqué depuis longtemps : nous sommes incapables d’abstraction pure ; toute langue est faite de métaphores ; nous ne saurions parler autrement qu’en style figuré. […] Dans la langue des signes figurés, si l’emblème est le mot, l’allégorie est la phrase. […] Sa langue suit les mouvements de son crayon. […] L’écrivain qui a fait ses classes connaît sa langue ; il a dans l’esprit un riche répertoire d’expressions, et des figures de style d’un effet infaillible, des tournures, des mouvements de phrase, des cadres tout préparés. […] Sur ses épaules se dressent cent têtes de serpent, d’affreux dragons dont les gueules effroyables dardent toutes une langue noire.

2334. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Mœurs assez simples, avec des dehors qui ont de l’élégance : bourgeois et ruraux parlent une jolie langue ; et, dans les temples de cette petite ville, les paysannes peuvent admirer des tableaux d’A-pelle et des statues ciselées par les propres fils de Praxitèle (Au temple d’Asklépios, mime IV). […] Puis je voudrais bien que, dans ces à-propos où l’on met en scène des écrivains classiques, on ne s’éloignât pas trop de leur langue, on s’abstînt du vocabulaire romantique ou parnassien… Ceci ne s’adresse pas seulement à M.  […] Et comme il a dix thalers dans sa poche, il paye à boire : une des mômes rapporte une bouteille d’eau-de-vie ; chacun à son tour y boit à même, et Jœger s’en va, poliment, appliquer le goulot aux lèvres de l’aïeule paralytique… Les langues vont maintenant plus vite. […] Sur le haut poêle de briques, la grand’mère est couchée : elle est folle depuis que les chrétiens, voilà trois ans, ont égorgé son mari après lui avoir arraché la langue et crevé les yeux. […] C’est une joie de ne trouver, dans Britannicus, ni laticlave, ni rheda, ni lectisternium, ni murènes, ni escargots de Phlionte, ni coquillages du lac Lucrin, ni l’inévitable plat de langues de rossignols… Et je n’y regrette point davantage le christianisme ni la Gaule.

2335. (1899) Arabesques pp. 1-223

Les Médiocres, emphatiques dénués d’émotion profonde, les joueurs de flûte à soi-même qui tournent, de propos délibéré, le dos à la vie, les rêveurs d’idée pure, « n’importe où, hors du monde », prédominèrent et se livrèrent à de violents attentats contre le génie de la langue. […] S’irriter, s’indigner ou simplement émettre une critique, ce serait imiter ma chienne absurde qui aboie aux talons des passants en sueur, comme pour leur reprocher de ne pas faire la sieste à l’ombre, puis qui revient s’étendre devant ma porte, en haletant, la langue pendante, fière, croirait-on, de la peine inutile qu’elle vient de se donner… Ô poètes, ô chers fous dont je partage infiniment la folie, je me garderai bien d’imiter ma chienne. […] Van de Putte, en une langue un peu barbare, chante les jeunes filles aux yeux doux et les joies enfantines : Ils se sont dénudés dans la clairière — Du frais soleil ruisselle en le feuillis — Ils sont dix gosses nus dans la lumière              Qui coule du feuillis.

2336. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Conclusion. Le passé et le présent. » pp. 424-475

Ils ont voyagé par toute l’Europe, et souvent plus loin ; ils savent des langues et des littératures ; leurs filles lisent couramment Schiller, Manzoni et Lamartine.

2337. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

Effacez l’enseigne du sang, et chantez Cosette, cette idylle, la plus accomplie de la langue, qui fait oublier la tragédie !

2338. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Né près du peuple, absent de Paris pendant douze années, il est resté à l’écart du travail que faisait la société polie sur la langue ; et quand il revient, en 1638, il garde son franc et ferme style nourri d’archaïsmes, de locutions italiennes ou espagnoles, de façons de parler et de métaphores populaires ou provinciales, un style substantiel et savoureux, plus chaud que fin, plus coloré que pur, brusque en son allure et assez indépendant des règles savantes ou du bel usage.

2339. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

Puisque tout est doute aujourd’hui dans l’âme de l’homme, les poètes qui expriment ce doute sont les vrais représentants de leur époque ; et ceux qui font de l’art uniquement pour faire de l’art sont comme des étrangers qui, venus on ne sait d’où, feraient entendre des instruments bizarres au milieu d’un peuple étonné, ou qui chanteraient dans une langue inconnue à des funérailles.

2340. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Je vais apprendre ta langue, désapprendre le reste.

2341. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

Le premier veillait à la pureté de la langue, pour laquelle la Bible de Luther servait de règle et de modèle, le deuxième examinait si le chanteur observait les lois de la tablature, le troisième inscrivait les rimes, pour constater qu’elles se succédaient conformément aux principes de l’école et le quatrième était chargé d’exercer sa critique sur la mélodie du chant proposé.

2342. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Des observateurs qui ne se connaissent pas entre eux, qui parlent des langues différentes, s’expriment ici en termes qui sont la traduction textuelle les uns des autres.

2343. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

On fera que le juge, le médecin, le soldat appliquent aux choses usuelles la langue du droit, de la stratégie ou de la médecine, comme s’ils étaient devenus incapables de parler comme tout le monde.

2344. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Il ne s’agit pas pour lui de copier, mais d’interpréter dans une langue plus simple et plus lumineuse. […] Toutes ces paroles, qui échappent à votre langue, témoignent que vous croyez à une beauté nouvelle et particulière, qui n’est celle ni d’Achille, ni d’Agamemnon.

2345. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Sainte-Beuve désignait même le chant du poème, que j’ai oublié), — et du reste le fils de l’ex-conventionnel était capable des deux langues.

2346. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

La parole tantôt lui montait au bout de la langue, et tantôt se renvolait au fond de sa poitrine.

2347. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Ces applaudissements, au reste, étaient fortifiés par le grandiose de cette pièce sacrée, écrite dans la haute langue de Racine par l’écrivain du Génie du Christianisme.

2348. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Ainsi que le littérateur peut, par le même moyen des mots constants d’une langue, nous communiquer, immédiatement, la suite de ses pensées — et c’est la Prose — ou bien, aussi, — dans la Poésie — négligeant, presque, le sens habituel des mots, avec le seul agencement des rythmes et des sons, évoquer en nous, plus exacte, la vie intense de l’émotion ; ainsi peuvent les peintres, par le même moyen des procédés plastiques, traduire, immédiatement, leur vision du monde objectif, — ou bien, aussi, négligeant, presque, le sens habituel des figures, avec le seul agencement des lignes et des teintes, évoquer en nous, réelles, précises, des émotions que nulle poésie, nulle musique, ne sauraient exprimer.

2349. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

De là la réaction qui a commencé à se produire au siècle dernier : de là Rousseau : de là l’aspiration à la nature et le débordement de la sensibilité si longtemps contenue ; de là le grand essor de la musique, cette expression pure du sentiment, cette langue naturelle de l’homme ; de là enfin la révolution et la crise de la morale, ou plutôt d’une morale imaginaire et fausse.

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