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492. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Si j’avais une fille à marier ! » pp. 215-228

il est vrai que cette râpe de Pascal ne jouait pas à la bonhomie ! […] que ce n’était là qu’une façon de bien jouer, et il a fait comme ces joueurs de trente et quarante qui inventent les plus ingénieux calculs pour dompter l’indomptable chance, prévoir le hasard et organiser l’imprévu, toutes choses semblables.

493. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

C’est la passion de son art d’historien toute seule, la passion de l’instrument dont il joue, et dont il ne joue au profit de personne qu’au sien !

494. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Ce livre, qui joue la pensée et qui met des idées générales sous des noms propres, est divisé en quatre parties : le Pape, l’Antipape, l’Empereur et le Citoyen, correspondant à quatre hommes célèbres qui les expriment : de Maistre, Lamennais, Béranger et Lamartine. […] Le lyrique et l’enthousiaste qui sont encore en lui ont eu horreur de cet antipathique petit bourgeois, de ce Tartufe de libéralisme qui savait jouer sa partie avec l’opinion et gagner, en trichant, la popularité, de ce constructeur de couplets qui mettait de l’habileté jusque dans sa poésie charmante et dont l’imagination froide, madrée et libertine, n’eut jamais une grande et vraie inspiration.

495. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Hoffmann »

Or, par un de ces tours que les faits jouent parfois aux gens d’esprit, ces documents sont la meilleure réponse qu’on puisse adresser aux opinions de Champfleury sur Hoffmann. […] Hoffmann resta toute sa vie dans l’entre-deux, entre cette foi au surnaturel sans laquelle il ne saurait y avoir de vrai fantastique, et cette comédie de terreur qu’Anne Radcliffe nous a jouée en maître.

496. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

… J’imagine qu’il serait peu flatté de la chose, et qu’il ressentirait une de ces superbes colères vert-pâle auxquelles il était sujet et comme il en eut une, par exemple, quand les directeurs de Drury-Lane firent le projet de jouer son Marino Faliero : « Je n’ai rien tant à cœur — écrivait-il alors de Ravenne à Murray (c’était en 1821) — que d’empêcher ce drame d’être joué. » Et cependant les directeurs de Drury-Lane ne travestissaient pas l’œuvre du poète ; ils voulaient seulement l’interpréter.

497. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

Il n’avait pas la joue enflée du sonneur de trompe… Il ne promettait rien. […] III À son originalité dans la conception de son livre qui tient à ses idées premières, aux assises mêmes de son esprit, et qu’il met audacieusement, pour la première fois, sous cette forme difficile du conte, pour les faire mieux briller sous cette forme vivante, comme on retourne et l’on fait jouer un diamant à la lumière du jour pour l’épuiser de tous ses feux, Ernest Hello ajoute aujourd’hui une originalité qui n’est plus celle de ses idées, mais de leur expression et de la vie spéciale qu’il sait leur donner, et il obtient ce résultat superbe que l’exécution de l’artiste vaut la conception du penseur !

498. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Soulary. Sonnets humouristiques. »

On ne le trouve cultivé et florissant qu’aux époques de forte poésie. » Pour nous, le symptôme est différent : le Sonnet si vanté, à cause de la difficulté vaincue, chez un peuple qui a toujours aimé à vaincre la difficulté, n’est que l’amusette des sociétés qui jouent aux petits jeux de la littérature… Ni les grands noms de Shakespeare, de Milton, de Corneille, de Machiavel, de Pétrarque, qui ont splendidifié ce monde de poésie, si écourté et presque puéril, ne me troublent et ne m’imposent. […] Sous une chevelure qui pousse, en l’air, droite, dure et indomptable au fer, qui en la coupant souvent l’a épaissie, un front vaste et carré comme un parallélogramme, d’un lisse de marbre, mais auquel l’Effort a mis son pli rudement marqué entre les deux sourcils, yeux rentrés où le noir du crayon s’allume, joue rigide, regard attentif, la bouche presque amère, tel est l’homme de ce portrait, et c’est le poète aussi, le poète laborieux, violemment laborieux, l’ardent Puritain du Sonnet, cette pauvreté opulente, la pensée cruelle à elle-même comme la femme, la coquette martyre, dont le pied saigne dans le brodequin, dont la hanche bleuit sous la baleine, mais qui se console avec l’adage : il faut souffrir pour être belle !

499. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Alfred de Vigny »

Il s’est abstenu avec un chaste respect de jouer sur la viole du Sentiment les grands airs trop connus que la Vulgarité aime à y jouer en l’honneur du génie mort, assez heureux pour ne pas l’entendre.

500. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Tout cela est combiné pour faire plus tard une comédie, qui aura beaucoup de succès, comme Mademoiselle de la Seiglière, et qui sera jouée un jour au Théâtre-Français. […] A la page 81, il y a un meunier qui compare sa fille, non-seulement « à une rose , mais à une hermine. » Les meuniers de mon pays, à moi, jouent du violon, mais ne sont pas si poëtes !

501. (1893) Alfred de Musset

Il trouvait très mauvais qu’on l’eût emmené à deux cent cinquante lieues pour lui faire jouer un aussi sot personnage. […] Qu’on ne s’imagine pas que ses œuvres dramatiques auraient été à peu près les mêmes, s’il avait eu l’espoir de les voir jouer. […] Elle se nomme Marguerite, et elle jouait encore hier à la poupée. […] Elle voulut la voir, la trouva de son goût et en demanda une traduction pour la jouer devant la cour impériale. […] On en est venu à jouer l’injouable : Fantasio, et Les Nuits.

502. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Cette indifférence fondamentale sur les dieux, sur les vertus stoïques, sur les formes politiques, fait partie de son charme ; il est léger comme un cœur vide de fortes convictions ; il joue autour des fibres les plus molles du cœur, il ne les brise jamais. […] Elle n’a pas de date ; c’est sans doute le moment où les légions d’Auguste allaient chercher les légions du fils de Pompée pour jouer au jeu des batailles le dernier sort de Rome. […] « Pourmoi, dit-il après avoir parlé de toute l’opulence qu’il ne désire pas, les olives de mon verger, la chicorée, les mauves légères suffisent à mes repas, fils de Latone ; mes vœux se bornent à jouir en paix du peu que je possède, à me bien porter, à conserver mon âme tout entière, à ne pas traîner une misérable vieillesse, et à jouer encore jusqu’à la mort avec la lyre !  […] Rien ne surpasse, dans la poésie grecque, l’énergie descriptive de ces jeux de la Fortune qui joue avec les trônes, qui élève et abaisse à son caprice les heureux. […] Horace a voulu prouver dans ce badinage qu’il savait jouer avec le pinceau comme avec la lyre.

503. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

« Tout en chantant, l’enfant interrompait de temps en temps sa marche et jouait aux osselets avec quelques pièces de monnaie qu’il avait dans sa main, toute sa fortune probablement. […] Les quatre étudiants se jouent des quatre sultanes qu’ils ont séduites parmi les plus jolies filles du peuple, comme de quatre instruments de plaisir qu’ils brisent après les avoir corrompues et rendues mères, sans se soucier seulement de leur innocence passée et de leur malheur à venir. […] Un pli triste, qui ressemblait à un commencement d’ironie, ridait sa joue droite. […] Les flots déchirés et déchiquetés par le vent l’environnent hideusement, les roulis de l’abîme l’emportent, tous les haillons de l’eau s’agitent autour de sa tête, une populace de vagues crache sur lui, de confuses ouvertures le dévorent à demi ; chaque fois qu’il enfonce, il entrevoit des précipices pleins de nuit ; d’affreuses végétations inconnues le saisissent, lui nouent les pieds, le tirent à elles ; il sent qu’il devient abîme, il fait partie de l’écume, les flots se le jettent de l’un à l’autre, il boit l’amertume, l’océan lâche s’acharne à le noyer, l’énormité joue avec son agonie. […] Personne ne se rappelait le rôle que chacun pouvait avoir à jouer ; l’avocat général oubliait qu’il était là pour requérir, le président qu’il était là pour présider, le défenseur qu’il était là pour défendre.

504. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

Marius, devenu tout à coup philosophe radical, joue d’inspiration un hymne à la guerre civile. […] Il y a des pensées qui nous jouent le même tour ; elles se blottissent dans un coin de notre cerveau ; c’est fini ; elles sont perdues ; impossible de remettre la mémoire dessus. […] La terre en été est aussi vite sèche que la joue d’un enfant. […] Mais toute insurrection qui couche en joue un gouvernement ou un régime vise plus haut. […] La géante joue la naine ; l’immense France a ses fantaisies de petitesse.

505. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Il joue de la langue française, avec une parfaite connaissance de tous les parisianismes, pimentés d’une certaine gouaillerie sentant le ruisseau. […] Quand il est parti, il y a eu des plumes taillées à la maison, pour jusqu’à mon mariage… On m’avait découvert un maître d’allemand, possédant une joue mangée par une immense dartre, et toute la leçon, il en faisait tomber des écailles. […] Enfin il s’écrie que la pièce lui a semblé, tout le temps, jouée en charge, en charge sérieuse, appliquée, pieuse même, mais en charge, comme devaient la jouer les excellents acteurs du Théâtre-Français. […] Et là-dessus, Zola laisse percer son ennui de ne pouvoir se faire jouer, disant que le roman ne l’intéresse plus, que c’est toujours la même chose, à moins de découvrir une forme nouvelle.

506. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Nous autres Romains de cet âge de vertu, tous tant que nous sommes, nous tenons en réserve nos costumes politiques pour le moment de la pièce et moyennant un demi-écu donné à la porte, chacun peut se procurer le plaisir de nous faire jouer avec la Toge ou la Livrée tour à tour, un Cassius ou un valet. » (Essai, page 333.) […] Elle range dans la catégorie des écrits misérables « Candide et les ouvrages de ce genre qui se jouent par une philosophie moqueuse de l’importance attachée aux intérêts les plus nobles de la vie9 ». […] Divers théâtres en nivôse an IV jouaient une pièce intitulée : Réclamations contre l’emprunt forcé. […] La fortune, ils la voulaient soudaine, amenée par un coup de dés ou de spéculation : ils jouaient et spéculaient avec rage. […] On copiait le premier, on le mettait sur le théâtre ; en nivôse an V on jouait le Lovelace français, comédie en cinq actes ; le nom du héros passa dans la langue, Atala est une Clarisse Harlowe francisée et déguisée en sauvagesse.

507. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Il est si bien entré dans son rôle d’hypocrite qu’il le joue, pour ainsi dire, sincèrement. […] De sorte qu’on pourrait dire, sans jouer aucunement sur le sens des mots, que le réalisme est dans l’œuvre quand l’idéalisme est dans l’âme, et que c’est à force d’idéalité seulement qu’on reprend contact avec la réalité. […] Une fois l’illusion formée, Don Quichotte la développe d’ailleurs raisonnablement dans toutes ses conséquences ; il s’y meut avec la sûreté et la précision du somnambule qui joue son rêve. […] Enfin on se donne l’air de quelqu’un qui joue. […] L’enfant qui joue près de là vient en ramasser une poignée, et s’étonne, l’instant d’après, de n’avoir plus dans le creux de la main que quelques gouttes d’eau, mais d’une eau bien plus salée, bien plus amère encore que celle de la vague qui l’apporta.

508. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

La seule puissance qui domine les héros de l’histoire comme ceux du drame antique, c’est le destin, ce mystérieux acteur qui conçoit, compose, exécute son drame à lui, sans se soucier aucunement du drame bruyant et superficiel que joue l’humanité ; mais cette puissance n’a pas plus de rapport avec l’activité humaine que n’en a ce que nous appelons le hasard, et si les personnages de l’histoire s’en effraient, ils ne comptent avec elle ni pour s’y appuyer ni pour lui résister. […] La nature y joue aussi son rôle par l’influence extérieure des climats et des situations géographiques, et aussi par le travail interne des causes ethnographiques et économiques, double action qui concourt, avec les causes politiques et morales, à former les instincts, les tempéraments, les mœurs, les aptitudes des races et des nations. […] Il en est tout autrement dans l’histoire moderne, où cette fatalité éclate dans des proportions en rapport avec la grandeur des théâtres sur lesquels elle joue son rôle à-côté de la volonté et de l’intelligence humaines. […] « Que nous jouons légèrement avec la mort dans nos systèmes ! […] De pareils personnages n’auront plus, dans un avenir plus ou moins prochain, d’occasions de jouer leur rôle glorieux ou sanglant, mais toujours mortel pour la vie morale des peuples qu’ils mènent.

509. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Bref, elle n’a pas seulement joué, comme elle sait jouer, son rôle : elle l’a « composé ». […] Une fillette de quinze ans, Frida, achève de lui jouer au piano la Danse macabre de Saint-Saëns. […] Bref, elle joue les deux premiers actes délicieusement, mais comme elle jouerait Juliette ou Françoise de Rimini : elle est, comme Françoise et comme Juliette, « sans profession » ; elle est la Duse amoureuse ; et voilà tout. […] Ce rôle est joué par M.  […] Les cloches sonnaient, les musiques jouaient, on jetait des roses ; les femmes criaient : « Comme il est beau ! 

510. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Riotor, Léon (1865-1946) »

Holbein ; dans ce défilé mystique, la mort joue le grand rôle.

511. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 271-272

Sédaine ne dureront que tant qu'on jouera ses Pieces, parmi lesquelles le Public a distingué Rose & Colas, On ne s'avise jamais de tout, le Roi & le Fermier, le Déserteur, plus amusantes par quelques Ariettes, heureusement mises en musique, que par le fond de l'intrigue & l'intérêt des caracteres.

512. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre IX. De l’astronomie poétique » pp. 233-234

Aussi les Phéniciens trouvèrent les dieux et les héros de la Grèce et de l’Égypte déjà préparés à jouer ces deux rôles ; et les Grecs, à leur tour, trouvèrent dans ceux du Latium la même facilité.

513. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Avant de faire jouer une pièce, on commence par l’écrire. […] L’imagination auditive en effet joue un certain rôle dans la perception des sons eux-mêmes. […] Jamais je n’ai songé à dire que la pensée pure ne jouait et n’avait à jouer aucun rôle dans l’art des vers. […] On peut jouer magistralement du cœur humain sans se laisser prendre soi-même à ce jeu. […] Il est malaisé de jouer parfaitement la comédie ; le plus habile simulateur finit toujours par laisser percer l’artifice.

514. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 102-104

On joue encore plusieurs de ses Drames lyriques, dont l’accueil est dû en partie à la Musique de Campra.

515. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 89-91

On dit que les Comédiens se préparoient à la jouer, lorsque l’Auteur, qui ne s’étoit jamais proposé de travailler pour eux, obtint un ordre pour en arrêter la représentation.

516. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre IX. Caractères sociaux. — Le Prêtre. »

Un grand prêtre, un devin, une vestale, une sibylle, voilà tout ce que l’antiquité fournissait au poète ; encore ces personnages n’étaient-ils mêlés qu’accidentellement au sujet, tandis que le prêtre chrétien peut jouer un des rôles les plus importants de l’Épopée.

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