Gavarni n’est qu’un nom de guerre ; il s’appelle de son nom de famille Chevallier (Sulpice-Guillaume), né à Paris, mais, du côté de son père, originaire de Bourgogne ; du village de Saint-Sulpice, aux environs de Joigny. […] Cet artiste, qui a tant contribué au succès des journaux politiques les plus armés en guerre et les plus acharnés à la démonétisation des masques royaux, ce fin railleur a l’aversion et la haine de la politique, et n’y a jamais trempé : « Ces erreurs-là, dit-il, ne sont pas des miennes ; elles ont trop de fiel et trop peu de sincérité. » — « Ce peuple insensé, dit-il encore, en parlant d’une de nos révolutions, avait poussé la question du progrès jusqu’au coup de fusil. » Il est donc trop philosophe pour être politique, de même qu’il est foncièrement trop élégant pour être caricaturiste.
« il était voltairien en diable, de même que monsieur son père, l’homme établi, le sergent, rélecteur, le propriétaire ; il avait lu en cachette au collège la Pucelle et la Guerre des Dieux, les Ruines de Volney et autres livres semblables : et c’est pourquoi il était esprit fort comme M. de Jouy et prêtrophobe comme M. […] Que si le poète, après cela, se rejette vers l’antique Grèce et sur le plaisir couronné de roses, on sent que c’est pour s’étourdir ; c’est de guerre lasse et en désespoir de cause.
Pour me tenir à l’exemple présent de Niebuhr, je suis singulièrement frappé (à ne juger qu’en ignorant et en simple amateur) du résultat final de toute cette guerre sur la première Rome. […] La vie humaine, il y a longtemps qu’on l’a dit, ressemble à la guerre : chacun n’a qu’à tenir son rang avec honneur et qu’à faire sa fonction, comme si la mort n’était pas là dans tous les sens, qui sillonne.
Sans entrer dans le fond du débat, et en laissant aux maîtres le soin, s’il y a lieu, de relever le gant, il faut reconnaître que toute cette forme de discussion est de bonne guerre, de bonne et légitime méthode. […] J’ai sous les yeux deux chansons des rues, en tête desquelles Napoléon sur sa colonne est mis en regard (j’en demande bien pardon) de la plus adorable et de la plus ineffable image de la mansuétude divine et humaine, et, dans le parallèle que déduit au long la complainte bien plutôt niaise que sacrilège, il est dit sérieusement : Napoléon aimait la guerre, Et son peuple comme Jésus !
Si la chose est extremement particuliere, il se nomme talent ; s’il a plus de rapport à un certain plaisir délicat des gens du monde, il se nomme goût ; si la chose particuliere est unique chez un peuple, le talent se nomme esprit, comme l’art de la guerre & l’Agriculture chez les Romains, la Chasse chez les sauvages, &c. […] Il nous donne une idée de toute la guerre de Macédoine, quand il dit : « ce fut vaincre que d’y entrer », introisse victoria fuit.
Tout industrieux est en guerre avec la masse et malveillant envers elle par intérêt personnel. […] C’est ainsi qu’en industrie civilisée, tout individu est en guerre intentionnelle avec la masse ; effet nécessaire de l’industrie antisociétaire ou monde à rebours.
Étrange personnage que ce lettré, qui ne s’occupe pas de morale ou de philosophie parce que cela est de la nature humaine, mais parce qu’il y a des ouvrages sur ce sujet, de même que l’érudit ne s’occupe d’agriculture ou de guerre que parce qu’il y a des poèmes sur l’agriculture et des ouvrages sur la guerre !
Les voyez-vous faire la guerre aux mots grecs ou latins qui hérissent les poèmes de Ronsard et la prose de Rabelais, chasser honteusement les vocables habillés à l’ancienne mode ? […] Est-il en guerre avec le beau sexe ; il ne connaît qu’une façon de le combattre : c’est de le fuir.
Voici la marche ordinaire des choses : si nous prenons pour point de départ une époque où elle est maîtresse incontestée des âmes, par exemple l’époque des premières croisades, nous la voyons d’abord, dans la plénitude et l’orgueil de sa force, faire peser un joug de fer sur les consciences, régenter la société civile, essayer de gouverner à la fois et les rois et les peuples, se faire l’arbitre de la paix et de la guerre, s’ériger en dépositaire unique et infaillible de la vérité tant religieuse que scientifique. […] Si le théâtre par une revanche imprévue fait à son tour la guerre à la religion, la philosophie, elle aussi, se pose en ennemie de la foi.
L’un avait fermé à Charles IV l’entrée de la Lorraine ; deux autres avaient pris Condé, Bouchain, Valenciennes, Saint-Omer ; deux autres avaient combattu les Espagnols au pied des Pyrénées et les avaient défaits jusque dans la Sicile ; Duquesne, le vainqueur de Ruyter, était avec ces illustres guerriers ; leur réunion, ornement de la paix, était toujours une menace de guerre. […] » Dans le monde voué à la corruption, on verra pulluler les directeurs, qui sont en guerre avec les confesseurs ; on verra le gros jeu s’allier à cette prétendue dévotion.
— Monsieur, je vous l’accorde avec reconnaissance… Ainsi lui répond la marquise : pourtant le duc ne veut pas jouer le rôle d’Arnolphe ; il lui faut le consentement de la jeune fille, mais à la guerre comme à la guerre !
Ce n’est pas une guerre de détail que je viens faire à un poète que j’admire ; mais cette guerre, cet examen de détail, veuillez le remarquer, on n’en a fait grâce pourtant jusqu’ici à aucun des poètes modernes, excepté Béranger.
La petite Bettina n’aurait pas pris ce mot pour une injure : « Ce que d’autres appellent extravagance est compréhensible pour moi, disait-elle, et fait partie d’un savoir intérieur que je ne puis exprimer. » Elle avait en elle le démon, le lutin, la fée, ce qu’il y a au monde de plus opposé à l’esprit bourgeois et formaliste, avec qui elle était en guerre déclarée. […] Au printemps de 1809, lorsque la guerre de toutes parts se renflamme, et que les combats de géants vont se livrer, Bettina ne saurait être indifférente ; le son du clairon ne la laisse plus dormir.
Il rompt de bonne heure avec la Comédie-Française, se met en guerre avec elle, avec les Comédiens du roi qui représentent le grand genre, la déclamation tragique. […] Lesage fut quelque temps avant de pardonner à son fils de s’être fait comédien, et comédien surtout à la Comédie-Française, avec laquelle il était en guerre perpétuelle pour son Théâtre de la Foire.
Son père, le prince de Broglie, fils aîné du maréchal, était entré jeune au service ; il avait fait la guerre d’Amérique avec zèle et gaieté, comme toute cette jeune noblesse du temps, les Lameth, les Ségur, les Lauzun ; comme eux aussi, il était en plein dans les idées du xviiie siècle. […] Le premier de ces discours est celui qu’il prononça au sujet de la guerre d’Espagne (14 mars 1823).
Cependant, la dernière guerre de Louis XIV, la guerre de la succession d’Espagne, s’était allumée et embrasait l’Europe ; la fortune commençait à devenir contraire ; les peuples s’épuisaient d’impôts et de sang ; le duc du Maine ne s’illustrait point à l’armée par sa valeur ; mais, à Sceaux, la duchesse, radieuse d’espérance et d’orgueil, s’amusait et jouait toujours.
Dès qu’elle fut dans les plaines de Beauce, elle monta à cheval, elle se mit à la tête de l’armée de la Fronde qui était aux environs ; on tint conseil de guerre devant elle, et il fut dit que rien ne se ferait plus que par ses ordres. […] Il adressa une lettre à Mademoiselle pour la remercier et la féliciter de sa prouesse : « C’est un coup qui n’appartient qu’à vous, lui écrivait-il, et qui est de la dernière importance. » Comme on lui rendait compte d’un conseil de guerre auquel elle avait assisté et où elle avait donné son avis : M. le Prince dit que les résolutions prises dans un conseil où j’avais bien voulu être devaient être suivies, quand elles ne seraient pas bonnes, mais que celles que l’on avait prises étaient telles que le roi de Suède (Gustave-Adolphe !)
Comme militaire, il montra du talent et se distingua dans la guerre de l’Inde. […] Le temps le frappera assez pour moi. » En attendant, dans les notes à la Cour qu’il eut bientôt l’occasion d’adresser, Mirabeau ne cessa de s’élever de toutes ses forces contre « cette dictature ignominieuse qui séparait le roi de ses peuples, le tenait en quelque sorte en état de guerre avec eux, leur servait d’intermédiaire, et, dans ce rôle non moins indécent que perfide, usurpait l’autorité, le respect et la confiance », absorbant à son profit toute la popularité, et ne laissant remonter au trône que le blâme : tout justement le contraire d’un vrai ministère constitutionnel !
En 1807, en 1812 et depuis, ce fils assista aux terribles batailles : « Nul ne sait ce que c’est que la guerre s’il n’y a son fils », écrivait le père à un ami. […] Je n’ai pas sur le cœur le poids que j’y sentais lorsque vous tiriez sur les Suédois : aujourd’hui, vous faites une guerre juste et presque sainte.
Au bien que j’en ai ouï dire, personne n’avait plus que lui les qualités éminentes et le talent de la guerre. […] Il lui fallut prendre désormais son parti de la louange et de la critique, et devenir auteur à ses risques et périls, avec tous les honneurs de la guerre.
Il s’engagea dans une polémique nouvelle avec Marie-Joseph Chénier, organe de la Convention ; il fit la guerre à la Convention elle-même. […] C’était le temps des mystifications, et on en imagina une qui parut de bonne guerre à cette vive et légère jeunesse.
Il lui donne d’excellents conseils littéraires sur la méthode à suivre dans une semblable entreprise, mais il ne tarde pas à y mêler des conseils plus généraux et d’un autre ordre ; par exemple : « Pendant la guerre des parlements et des évêques, les gens raisonnables ont beau jeu, et vous aurez le loisir de farcir l’Encyclopédie de vérités qu’on n’eût pas osé dire il y a vingt ans ; quand les pédants se battent, les philosophes triomphent. » Les tracasseries commencent. […] J’ai si peu de temps à vivre, que je ne dois point craindre la guerre. » J’abrège ces ignominies.
Voilà l’éternelle morale qui avant et depuis Salomon, jusqu’à Sophocle, jusqu’à Cicéron, jusqu’à nous tous, se peut tirer du spectacle changeant des choses humaines, et il semble que, sauf le rajeunissement de l’expression, toujours possible à une âme sincère, les ruines de la ville de Zénobie, dévastée à la suite d’une guerre par l’empereur Aurélien, n’étaient guère de nature à inspirer d’autres pensées. […] Pendant l’année 1792, Volney, je l’ai dit, tenta en Corse une entreprise industrielle et coloniale ; il allait y chercher la paix agricole, il y rencontra des discordes, des haines et des guerres domestiques, exaspérées encore par le contrecoup de la Révolution française et fomentées par les intrigues de Paoli.
Et, le déterminisme des économistes anglais et des statisticiens paraissant à tort plus facilement applicable aux peuples qu’aux individus, on arriva aux conceptions de Buckleeg, chez qui la guerre, par exemple, se fait sans généraux, sans stratégie, sans discipline, sans influence d’armement ou de tactique, par le hasard et le vague instinct des bandes. […] Après un siècle d’art, Athènes fut épuisée, bien que ses guerres navales lui coûtassent peu de monde et quand Sparte autrement éprouvée dura bien plus longtemps, illettrée.
L’homme de guerre est un vivant redoutable ; il est debout, la terre se tait, siluit ; il a de l’extermination dans le geste, des millions d’hommes hagards se ruent à sa suite, cohue farouche, quelquefois scélérate ; ce n’est plus une tête humaine, c’est un conquérant, c’est un capitaine, c’est un roi des rois, c’est un empereur, c’est une éblouissante couronne de lauriers qui passe jetant des éclairs, et laissant entrevoir sous elle dans une clarté sidérale un vague profil de César ; toute cette vision est splendide et foudroyante : vienne un gravier dans le foie ou une écorchure au pylore, six pieds de terre, tout est dit. […] Pendant que ceci se passe à Londres, le percement de l’isthme de Panama est remplacé par une guerre, la coupure de l’isthme de Suez dépend d’un Ismaïl-Pacha quelconque ; une commandite entreprend la vente de l’eau du Jourdain à un louis la bouteille ; on invente des murailles qui résistent à tous les boulets, après quoi on invente des boulets qui détruisent toutes les murailles ; un coup de canon Armstrong coûte douze cents francs ; Byzance contemple Abdul-Azis, Rome va à confesse ; les grenouilles, mises en goût par la grue, demandent un héron ; la Grèce, après Othon, reveut un roi ; le Mexique, après Iturbide, reveut un empereur ; la Chine en veut deux, le Roi du Milieu, tartare, et le Roi du Ciel (Tien-Wang), chinois… — Ô terre !