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1731. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Au lieu de faire du progrès, nous avons fait de l’absolu : nous avons pris au pied de la lettre et comme étant d’une vérité immédiate, a priori, sans conditions, le dogme de la souveraineté du peuple, et nous sommes arrivés juste, avec cette souveraineté, au même résultat où parvinrent jadis les cités grecques et romaines, à la tyrannie. » — « Le dogme de la souveraineté du peuple est une parfaite niaiserie. » C’est que, pour Proudhon, qui, à certains égards, est un idéaliste effréné, en ce sens qu’il ne croit qu’aux idées pures qui sont les siennes et à la logique particulière qui est la sienne, le nombre n’est rien et les tendances et aspirations du plus grand nombre, qui sont des idées confuses et des sentiments vagues, doivent n’être comptées pour rien.

1732. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

— Monsieur, dit Duclos au précepteur, peu de latin, très peu de latin ; point de grec, surtout… De quoi cela l’avancerait-il, votre grec ?… Il ne s’agit pas ici d’en faire un Anglais, un Romain, un Égyptien, un Grec, un Spartiate, … mais un homme à peu près bon à tout. — Mais, monsieur, objecte le pauvre Linant, ce n’est pas là une éducation ordinaire… Il faut réformer et refondre, pour ainsi dire, un caractère… — Qui diable vous parle de cela ?

1733. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Les mortels éphémères n’apercevant qu’une faible parcelle de cette vie douteuse, ne saisissant qu’une vaine fumée et croyant aux choses seules qui leur tombent sous les sens, errent dans toutes les directions, car ils désirent découvrir cet ensemble des choses que les hommes ne peuvent ni voir, ni entendre, ni saisir. » Platon n’est guère plus optimiste en certaine circonstance, témoin ce fragment de l’Apologie : « Que quelqu’un choisisse une nuit passée dans un sommeil profond que n’aurait troublé aucun songe, et qu’il compare cette nuit avec toutes les nuits et tous les jours qui ont rempli le cours de sa vie ; qu’il réfléchisse et qu’il dise combien dans sa vie il y a eu de jours et de nuits plus heureux et plus doux que celle-là ; je suis persuadé que non seulement un simple particulier, mais que le grand roi de Perse lui-même en trouverait un bien petit nombre et qu’il serait aisé de les compter. » Mais c’est surtout chez un philosophe grec de la Cyrénaïque, chez Hégésias, que s’accuse cette sombre disposition. […] Dans son ouvrage, publié en 1800, sur La littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales, elle proclame qu’il y a deux littératures tout à fait distinctes : « celle qui vient du Midi, et celle qui descend du Nord, celle dont Homère est la première source, celle dont Ossian est l’origine. » Elle range dans l’une les Grecs, les Latins, les Italiens, les Espagnols et les Français du siècle de Louis XIV ; dans l’autre les ouvrages Anglais, les ouvrages Allemands, quelques écrits des Danois et des Suédois et un certain nombre d’ouvrages modernes. […] Il soutenait, avec raison, que les Grecs n’avaient été nullement étrangers à la mélancolie, qu’ils avaient parfaitement compris « la douleur rêveuse dans les impressions solitaires. » Enfin il rappelait que les poésies les plus tristes avaient été composées par un arabe il y avait plus de trois mille ans.

1734. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Il se trompe et doit se tromper à tout moment sur ces détails, sur le nez grec qu’il donne à Mme Roland et sur le reste.

1735. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Ce que les Grecs et les Latins, inventeurs de celui-ci, ont cherché en toutes choses, c’est l’agrément et l’ordre.

1736. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Tout entier aux écrivains, il néglige les artistes ; en effet, la source des arts est le sentiment de la forme, et les plus grands artistes, les Italiens, les Grecs, n’ont connu, comme leurs prêtres et leurs poëtes, que la beauté de la volupté et de la force.

1737. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Toute son emphase un peu castillane de Grec moderne, toute sa désinvolture de Palikare insouciant s’y révèlent en des vers d’allure tendre ou fanfaronne.

1738. (1933) De mon temps…

De tout temps le destin l’avait marquée du signe sacré, cette enfant, dans les veines de qui coulait le double sang latin et grec.

1739. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

La plupart du temps, il ne s’agit dès lors que de transporter la vie commune et vulgaire dans un cadre grec ou romain.

1740. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

Souday perdrait son grec à tenter de s’y reconnaître.

1741. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

L’antiquité grecque, celle du moyen âge, avaient besoin d’un nom propre pour une pensée qui les obsédait ; quand on est impatient de trouver, et que tout peut servir, on ne cherche pas longtemps ; la tradition livre des noms, je dirais presque les premiers venus, c’est Prométhée, c’est Faust ; la forme première est trouvée ; le poème s’ébauche sous le ciseau grossier du peuple ; et alors seulement viennent les poëtes, Eschyle, Gœthe, entre les mains de qui l’intention primitive se précise ou se modifie.

1742. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Loin de là, il ne se prend pas plus au sérieux qu’il ne faut, du moins pendant la plus belle partie de sa vie : il « posséda au plus haut degré ce que nous regardons comme la qualité essentielle d’une personne distinguée, je veux dire le don de sourire de son œuvre, d’y être supérieur, de ne pas s’en laisser obséder »  Il n’est pas jusqu’au style qui n’accuse encore la ressemblance : rien de la période grecque ; un tour qui se rapproche de celui des parabolistes hébreux ; des développements de peu d’étendue ; un sentiment exquis de la nature qui lui fournit à chaque instant des images expressives  En sorte qu’en dernière analyse, Jésus a fondé la religion que conçoit et prêche M.  […] La sienne est cependant une des plus légitimes : celle qui se réclame avant tout de la tradition ; car notre auteur, malgré qu’il ait la tête farcie de métaphysique allemande, de romans anglais, d’histoire universelle, sans parler de là quantité prodigieuse de latin classique et de bas latin, de grec, d’italien et d’espagnol qu’il a réussi à emmagasiner encore, notre auteur est ou se croit dans la pure tradition française.

1743. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Le Breton est alors devenu un Grec épris, comme les fils de l’Attique, de l’idéal et du divin. […] Nous apprenons alors que le maître a dans les veines du sang de trois nations : du sang français par ses grands-parents maternels, du sang italien par son grand-père paternel, du sang grec par la femme de ce grand-père.

1744. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Ses poèmes sont asiatiques par la violence de la passion, et grecs par la ciselure rare et le charme sobre de la strophe. » — Mélange subtil que nous goûtons aux vers de Mme Renée Vivien.

1745. (1883) Le roman naturaliste

Mais l’interprétation d’un papyrus, ou d’un simple cartouche hiéroglyphique devient à celui-ci l’occasion de récrire l’histoire d’Égypte ; et, de la discussion de l’âge exact d’un morceau de marbre ou d’un fragment de poterie, c’est plaisir de voir celui-là tirer toute une théorie de l’art et de la religion grecque. […] Faites plutôt vous-même la comparaison. « Jusqu’en 1835, il n’y avait point de route praticable pour arriver à Yonville ; mais on a établi vers cette époque un chemin de grande vicinalité qui relie la route d’Abbeville à celle d’Amiens… Cependant Yonville est demeuré stationnaire, malgré ses débouchés nouveaux… L’église est à l’entrée de la place… Le confessionnal y fait pendant à une statuette de la Vierge… Une copie de la Sainte Famille, envoi du ministre de l’intérieur, domine le maître-autel entre quatre chandeliers… La mairie, construite sur les dessins d’un architecte de Paris, est une manière de temple grec ».

1746. (1910) Rousseau contre Molière

Songez aux jeunes filles de Sparte — Virginibus bacchata lacaenis Taygeta — et à l’exhibition presque continuelle que la loi voulait qu’elles fissent de leurs personnes : « Les filles de Sparte s’exerçaient, comme les garçons, aux jeux militaires… Ce n’est pas là ce que j’approuve et il n’est pas nécessaire que les jeunes filles fassent l’exercice à la prussienne ; mais je trouve qu’en général l’éducation grecque était très bien entendue en cette partie. […] Il n’y avait presque pas une fête, pas un sacrifice, pas une cérémonie où l’on ne vît des bandes de filles des premiers citoyens couronnées de fleurs, chantant des hymnes, formant des chœurs de danse, portant des corbeilles, des vases, des offrandes et présentant aux sens dépravés des Grecs un spectacle charmant et propre à balancer le mauvais effet de leur indécente gymnastique.

1747. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Je regrette tout ce que j’ai coupé, mais l’espace commande ; il ne me reste plus qu’à engager le lecteur à lire avec recueillement ces poèmes dont chaque vers est aimé et ciselé à la façon antique ; il y a dans ce livre un parfum de poésie grecque et une pureté de ferme et de langage qui rappellent le charme des bonnes œuvres d’André Chénier.

1748. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

On sait que ce mot, — qui vient du grec πραγματικός, relatif aux affaires, aux faits, — sert à désigner aujourd’hui une apologétique uniquement fondée sur l’utilité. […] L’Allemand Krœpelin a repris le mot grec de paranoïa, pour définir ce trouble initial des facultés qui confine au délire systématique.

1749. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Comme tous ces écrivains, comme Montaigne, il est imbu de l’antiquité classique ; il cite en chaire des anecdotes grecques et latines, des passages de Sénèque, des vers de Lucrèce et d’Euripide, et cela à côté des textes de la Bible, de l’Évangile et des Pères.

1750. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1870 » pp. 3-176

C’est comme cela que les Grecs ont brûlé la flotte arabe… — Mais pourquoi ne pas avertir Trochu ?

1751. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Les historiens et les poètes de l’antiquité latine ne sont pas jugés par M. de Lamartine avec plus de clairvoyance et de sagacité que les historiens et les poètes de l’antiquité grecque. […] Hugo refuse à la poésie grecque la connaissance du grotesque.

1752. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

C’est Monsieur Caritidès, des Fâcheux, qui raffine sur l’habitude, surannée du reste, d’habiller son nom en latin et qui travestit le sien en grec et qui recherche la faveur des gens de cour pour faire parvenir ses placets au Roi et pour leur donner tout le poids qu’il faut ; c’est Monsieur Lysidas le critique, à cheval sur les règles, et qui se fait tout blanc d’Aristote et qui a pour doctrine que seuls les savants, à l’exclusion de la Cour et du parterre, se connaissent aux ouvrages de l’esprit et ont qualité pour décider de leur valeur. […] Ce qui la distingue, c’est sa hauteur d’âme qui est vraie : elle n’est pas comme Armande qui enrage de voir s’envoler le bonheur qu’elle a repoussé et qui ne peut se passer des choses dont il ne soucie point ; elle supporte la perte de sa fortune avec un stoïcisme très véritable et très simple ; elle est une grande intellectuelle, ridicule seulement par ses petits côtés et odieuse aussi, un peu, parce que sa passion maîtresse lui ferme les yeux sur la dureté qu’il y a à vouloir forcer sa fille qui n’entend pas le grec à épouser un homme de lettres.

1753. (1876) Romanciers contemporains

il a raillé les Grecs modernes avec une finesse et une élégance dignes du siècle de Périclès. […] Bovary, et est bien de ces maris prédestinés qui suffisent à expliquer cette allégorie charmante des Grecs plaçant un bandeau sur les yeux de l’amour.

1754. (1899) Arabesques pp. 1-223

Grâce à la Réforme, premier essor de la liberté individuelle, grâce aux chefs-d’œuvre grecs retrouvés, grâce à ce flot de lumière sans lequel nous serions de pauvres sauvages abrutis sous la discipline imbécile des moines et du Grand-Lama des Sept Collines, le catholicisme subit sa première défaite.

1755. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

L’un est un savant ou un philosophe, dont la seule préoccupation est de comprendre et d’expliquer les phénomènes en les groupant dans un ordre intelligible ; l’autre est, — faut-il dire : avant tout — je ne crois pas, mais en tous cas : principalement, un écrivain, un poète au sens large, je veux dire au sens grec de créateur, un fabricant de fictions.

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