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347. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

» Même observation pour la scène où Valère représente à Harpagon qu’il aurait tort de marier sa fille à un homme qu’elle n’aime pas. « Sans dot !  […] On nous montre d’abord, faisant leur quotidienne partie de cartes ensemble, un vieux garçon et une vieille fille qui sont de vieilles connaissances. […] Appliquons cette méthode à un exemple classique. « J’ai mal à votre poitrine », écrivait Mme de Sévigné à sa fille malade. […] Le faux médecin Clitandre, appelé pour donner ses soins à la fille de Sganarelle, se contente de tâter le pouls à Sganarelle lui-même, après quoi il conclut sans hésitation, en se fondant sur la sympathie qui doit exister entre le père et la fille : « Votre fille est bien malade !  […] N’est-ce pas cette idée qu’on nous suggère ici en nous amenant à matérialiser, pour ainsi dire, la sympathie que nous établissons entre la fille et son père ?

348. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Et si ce n’était froisser les justes sentiments d’une fille pour un père auquel elle doit tant, je n’hésiterais pas à indiquer une préférence sur laquelle je me reprocherais d’insister davantage. […] Tandis que les garçons se dépensent en généreux efforts, déjà les filles ne livrent qu’une partie d’elles-mêmes, et de leurs regards en coulisse observent si l’intérêt s’attache sur elles. […] La voyez-vous, la fille d’Ève ? […] Volontiers moqueuses, les petites filles ont la terreur d’êtres moquées, car elles sentent déjà que c’est la suprême atteinte au prestige par où elles s’imposeront. […] Chez la fille de Hérédia, l’originalité d’auteur est plus encore dans l’assemblage des traits qui contribuent à l’unité du personnage que dans la conception même de ce personnage.

349. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Il a donné à ses filles les noms de Mercy (compassion) et Charity. […] N’enseignez à ces filles et à ces garçons que des faits ; on n’a besoin que de faits dans la vie. […] S’il dédaigne sa fille et s’il souhaite un fils, c’est pour perpétuer l’ancien nom de sa banque. […] Sa fille arrive juste à point. […] Vous voyez un bateleur abandonner sa fille, son unique joie, de peur de lui nuire en quelque chose.

350. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

On regarde pousser les jolies filles à vue d’œil, comme des asperges. […] « Merci, ma fille… » murmura-t-il, très touché. […] C’était sa fille Suleïma, nous dit-il. […] dit-elle à sa fille. […] Fille hypocrite, tu as bien su tout taire, tout cacher, tout engloutir !

351. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Pourquoi une fille ne trouverait-elle pas cette aptitude dans sa chair, comme son frère ? […] Une fille a le droit de se marier, dès qu’elle est nubile. […] Jaurès, dont on ne peut arriver à savoir si la fille est élevée au Sacré-Cœur ou au lycée Molière. […] Bref une jeune fille est une jeune fille — ou une fille. […] Au contraire, la distinction n’en serait que plus marquée entre la fille vivant à sa guise dans le monde et la fille confinée dans sa famille.

352. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — III »

madame, quand l’illustre Sévigné, que vous aimez tant, écrivait des riens, elle les adressait à sa fille en lettre close, et puis en ce temps-là qu’y avait-il de plus sérieux à dire ? […] L’une épouse, l’autre fille d’un ministre, elles furent portées dans la vie publique, plutôt qu’elles ne s’y jetèrent ; élevées, l’une dans le recueillement des mœurs bourgeoises, et l’autre au bruit des discussions philosophiques, elles avaient contracté dès l’enfance de fortes et sérieuses habitudes d’esprit, qu’elles déployèrent dans l’occasion avec toute l’énergie de la jeunesse et de la vertu.

353. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Idée commune, d’ailleurs, à tous les esprits sans véritable profondeur, qui croient que la sensibilité dans les arts ou dans l’expression littéraire des sentiments est la même que la sensibilité dans la vie, et qui fait, par exemple, s’éprendre de tant de poètes secs, tant de pauvres filles par trop tendres ! […] La paternité débordée, l’amour insensé de Lear pour ses filles, cet amour d’un père aveuglé dont elles ont crevé les yeux avec de monstrueuses flatteries, et son ressentiment non moins aveugle contre la seule de ses enfants qui soit vraie et qui ait pour son père la piété que l’on a pour Dieu, la lâche, faiblesse des gendres imbéciles, les mauvaises filles mauvaises épouses, par une loi fatale et vengeresse, et l’infamie de l’adultère rendue plus horrible par une incestueuse rivalité. Au contraire, la pieuse fille épousée par l’amour désintéressé et sincère, et les serviteurs, qui sont de la famille encore et en ferment le cercle sacré, fidèles au père et au Roi, autre père ! […] Lear et le Père Goriot sont aussi insensés, aussi coupables, dans leur amour pour leurs filles indignes, et aussi sublimes l’un que l’autre, et le plus sublime est peut-être celui qui le paraît le moins ; c’est peut-être le père Goriot ! […] Si j’étais Philoxène Boyer, le commentateur éloquent et savant de Shakespeare ; si j’avais devant moi une tribune où les développements sont permis, je suivrais en détail la comparaison entre ces deux grandes œuvres, filles l’une de l’autre, mais égales.

354. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Louise Charlin, Charly ou Charlieu (on trouve toutes ces variantes de noms dans des actes authentiques), dite communément Louise Labé, était fille d’un cordier de Lyon ; elle dut naître vers 1525 ou 1526. […] Mercure, au contraire, plaide les avantages et les prérogatives de Folie, cette fille de Jeunesse, et son alliance intime, naturelle et nécessaire avec Amour. […] Mais il n’est que trois cœurs au monde qu’elle ne peut persuader ni abuser, et près desquels elle perd ses sourires : à savoir, « l’auguste Minerve, qui n’aime que les combats, les mêlées, ou les ouvrages brillants des arts, et qui enseigne aux jeunes filles, sous le toit domestique, les adresses de l’aiguille ; puis aussi la pudique Diane aux flèches d’or et au carquois résonnant, qui n’aime que la chasse sur les montagnes, les hurlements des chiens, ou les chœurs de danse et les lyres, et les bois pleins d’ombre, et le voisinage des cités où règne la justice ; et enfin la vénérable Vesta, la fille aînée de l’antique Saturne, restée la plus jeune par le décret de Jupiter, laquelle a fait vœu de virginité éternelle, et qui, à ce prix, est assise au foyer de la maison, à l’endroit le plus honoré, recevant les grasses prémices. » A part ces trois cœurs qui lui échappent, Vénus soumet tout le reste, à commencer par Jupiter, dont on sait les aventures. […] … » Or, pour revenir à Louise Labé, qui ne se reprochait point, comme Atala, ses transports, et qui, en fille plutôt païenne de la Renaissance, n’a pas craint de s’y livrer, elle se rapproche avec grâce de la naïveté du vœu antique dans son sonnet xiii, qui commence par ces mots : Oh ! […] Louise Labé, nous l’avons pu voir en l’étudiant de près, était beaucoup moins fille du peuple et moins naïve ; mais qu’importe qu’elle ait été docte, puisqu’elle a été passionnée et qu’elle parle à tout lecteur le langage de l’âme ?

355. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

LX Après le souper, je demandai timidement, en regardant tour à tour l’aïeule, le père, la fille, le récit qui m’avait été promis pour m’expliquer la profonde blessure du châtaignier. […] Les garçons d’en bas venaient aussi de temps en temps courtiser les filles de l’aîné des Zampognari, réputées pour leur beauté et pour leur bonne renommée dans les collines de Lucques, et c’est ainsi que nous avons bien des parents sans les connaître, à présent, parmi les Lucquois, qui nous méprisent pour notre pauvreté aujourd’hui. […] — Tiens, ma fille, dit-elle à sa nièce en s’interrompant, ouvre donc le coffre de bois, et montre à l’étranger les trois dernières zampognes qu’ils ont fabriquées ainsi avant la mort de mon pauvre mari. […] C’est ainsi que nous ne restâmes plus que six à la cabane : notre vieille mère, qui ne comptait plus les années de sa vie que par les pertes de son mari, de ses frères, de ses sœurs, de ses filles mariées bien loin dans la plaine ; Antonio, que vous voyez déjà aveugle et ne pouvant plus sortir qu’avec son chien de la cabane, pour aller à la messe au monastère de San Stephano deux fois par an ; Hyeronimo, mon fils unique, et Fior d’Aliza, dont la mère était morte la semaine où elle était née ; c’était la chèvre blanche qui l’avait nourrie. […] Je disais souvent à mon beau-frère Antonio : « Remarie-toi donc pour donner une autre mère à ta fille  » ; mais il me disait toujours non. « Je lui donnerais bien, à elle, une autre mère, mais qui est-ce qui me donnerait, à moi, une autre femme ? 

356. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

et la Chloé, une fille, élevée comme une femelle, et qui meurt enceinte de ses œuvres. […] La sœur de l’abbé Mouret est une grande et forte fille que l’Église n’a point rendue idiote comme son frère. Elle l’était de par la nature, et comme la nature ne se trompe pas comme l’Église, cette fille est la créature adorée de M.  […] Cette fille, qui s’appelle Désirée, est née fille de basse-cour… Type de femme qui ne manque pas de vérité, mais de vérité inférieure et de cette chaleur animale, la préoccupation éternelle de M.  […] Désirée intervient tout à coup dans l’enterrement de la fille qui s’est tuée parce que le prêtre lui a préféré son église.

357. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Avant de mourir, après sa confession, M. le comte de Timey a voulu épouser Mlle d’Evré, qui était peut-être, et probablement même, sa fille. […] Il lui a dit finalement : Ma chère fille, je laisse dans votre âme virginale l’expérience d’un vieux roué. […] » Ô bienfaisante poésie, fille de l’éternelle illusion !

358. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Anatole France, le Lys rouge »

La femme pourrait fort bien être une fille ; le premier amant, quelque rôdeur de barrière, et le second, quelque garçon boucher. […] Or, elle se nomme la comtesse Martin-Bellème ; elle est la fille d’un financier puissant, la bru d’un ministre du second empire, la femme d’un ministre de la troisième République. […] Mais peut-être direz-vous que, si elle est philosophe dans ses propos, c’est qu’elle reçoit Paul Vence à sa table et qu’elle a de la mémoire ; que c’est un instinct secret qui lui fait trouver plaisir aux rues mal soignées et fortement odorantes où grouille de l’humanité en tas, et qu’enfin son absence de préjugés lui vient de son tempérament et de son hérédité, car elle est la fille d’un rapace.

359. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

En effet, il enlève l’épousée ; Arlequin le suit et disparaît avec la fille qu’il a choisie. […] Vous tuez le mari d’une pauvre femme ; vous enlevez la fille d’une autre ; vous débauchez même des religieuses ! […] « Arlequin est forcé de sortir de sa retraite pour chanter et boire à la santé d’une des favorites de Don Juan ; son maître lui fait signe de nommer Dona Anna, fille du commandeur.

360. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVIII. Souvenirs d’une Cosaque »

Je ne reconnais plus la fille de la race d’Ivan le Terrible, — cette fille qui s’annonçait si bien, — qui (dit-elle) aurait tué un jour, aussi simplement qu’on avale un verre d’eau, un de ses frères, si on n’avait pas oublié les pistolets des fontes de la selle, — parce qu’en sautant une rivière, il avait pu voir qu’elle avait eu peur… Quelle débâcle de caractère quand il s’agit d’un livre ! […] Lola Montès, dont j’aime à faire planer la mémoire sur ce chapitre, car c’était une bonne fille au fond (quoique très menteuse et elle s’en vantait, !)

361. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Edmond About » pp. 91-105

Si ce n’était pas cette grande fille qui a aussi ses faiblesses, c’était son gamin de frère qui se donne souvent pour elle, c’était le bruit ! […] Il y a au faubourg Saint-Germain une illustre et antique maison, — la maison de La Tour-d’Embleuse, — laquelle est tombée de la splendeur dans la misère et qui n’a pour tout rejeton qu’une fille de quatorze ans minée de consomption et qui va mourir. […] grâce à la misère du duc de La Tour-d’Embleuse et à la piété filiale de sa fille Germaine, Antigone sans fierté ; grâce surtout aux plaidoiries d’un médecin, espèce de Figaro soi-disant honnête dans toute cette intrigue, l’immonde mariage s’accomplit.

362. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

Leurs fils s’enorgueillissent d’une gaieté fraîche et nouvelle ; et leurs jeunes filles, se jouant avec allégresse en chœurs couronnés de guirlandes, dansent parmi les fleurs de la prairie : les fils et les filles de ceux que tu veux honorer, sainte déesse, inépuisable génie ! […] La douleur irritée de Cérès, la vengeance dont elle menace les humains en laissant la terre inculte, est vaincue par les prières de Rhéa, sa mère, et par la promesse qu’elle reverra sa fille et passera désormais avec elle dans l’Olympe les deux tiers de l’année. […] « La rage, dit Horace, l’arma de l’ïambe qu’il avait forgé. » Sa fureur de calomnie donnait la mort ; et la poésie ancienne est remplie d’allusions au suicide de Lycambe et de sa fille, qui avaient osé le refuser pour gendre et pour époux.

363. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

» La mère du poète, naïve et rêveuse comme les filles de l’Allemagne, était poète elle-même sans avoir cultivé jamais la poésie comme un art. […] Les deux amis, en Allemands un peu ombrageux, parce qu’ils sont timides, évitent, autant que possible, les rencontres prolongées avec la fille de M.  […] Mais terrible est cette même force quand elle échappe à ses chaînes, quand elle suit sa violente impulsion, fille libre de la nature. […] Nous n’avons pas connu nous-mêmes Bettina d’Arnim, mais nous avons connu sa fille, et, si l’on doit juger des charmes de physionomie, d’âme et d’esprit de la mère, par la figure de la fille, Bettina fut bien digne d’être l’Hébé de ce Jupiter mourant. Son nom de fille était Bettina Brentano ; sa famille était italienne.

364. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Il me dit d’abord qu’en prenant la fille de l’empereur, ce serait peut-être le moyen d’adoucir la cour de Vienne et de conserver le repos de la chrétienté ; mais, ayant fait de sages réflexions, il convint avec moi que le premier intérêt de la cour d’Espagne était de renoncer absolument à toutes autres liaisons pour mériter davantage l’amitié et la confiance de notre roi. […] Je serais bien aise aussi d’y voir mes amis, et entre autres M. le cardinal Porto-Carrero, avec qui je chercherais les moyens de marier en ce pays-là une douzaine de mesdemoiselles vos filles. […] La maréchale de Noailles, en effet, n’avait pas moins de onze filles sur vingt et un enfants ; il y avait de quoi l’allécher que de lui montrer de grands partis, et sous air de railler on venait de glisser une sorte de promesse. — C’est dans ces termes habiles et modestes que Mme des Ursins présente d’abord son idée, sa vue. […] Un moment elle craint que le peu de contentement où l’on est à la Cour de France de certains procédés équivoques habituels au duc de Savoie, ne fasse renoncer aux vues qu’on avait sur la princesse sa fille : « Si cette nouvelle est véritable, écrit Mme des Ursins, je vous supplie très humblement, madame, de m’informer sur ce qui pourra venir à votre connaissance, afin que je puisse prendre mes mesures de bonne heure. » Mais bientôt elle apprend que tout tient et achève de se conclure ; en attendant, elle ne s’en est pas fiée aux simples insinuations auprès de la cour de Turin ; elle a écrit, elle s’est décidément offerte.

365. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

On vint demander à M. le bailli un passeport pour ces bonnes filles, afin qu’elles pussent en toute sûreté gagner Fribourg, une terre catholique. « Précisément dans ce moment-là, racontait Bonstetten, j’expédiais la permission d’exporter pour les besoins de l’armée française une certaine quantité de bétail. […] Bonstetten déjeunait un jour chez eux en famille ; il n’y avait que M. et Mme Necker, et leur fille non encore mariée et dans sa première jeunesse. […] À peine est-elle dehors que sa fille, comme délivrée, bondit sur sa chaise, roule sa serviette, y fait un nœud et la lance à la tête du grave personnage qui s’y prête comme s’il n’avait attendu que le signal, et toute une partie entre eux commence ; elle le prend dans ses bras et lui fait danser une ronde. […] On ne leur parlait qu’à genoux : Je me souviens, raconte Bonstetten, qu’une des premières informations que j’eus chez moi comme juge fut celle d’une dame accompagnée de ses deux filles.

366. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Madame de Sévigné cite fréquemment La Fontaine dans ses lettres à sa fille ; dans ses épanchements maternels elle emprunte souvent de lui des paroles d’affection et de tendresse. […] Le 15 décembre 1673, elle écrit à sa fille : « Je dînai hier avec M. le Duc, M. de La Rochefoucauld, madame de Thianges, madame de La Fayette, madame de Coulanges, l’abbé Testu, MM. de Marsillac et Guilleragues, chez Gourville. […] Le 15 janvier 1674, elle dit à sa fille : « J’allai donc samedi dîner chez M. de Pomponne, comme je vous avais dit, et puis jusqu’à cinq heures, il fut enchanté, enlevé, transporté de la perfection des vers de la Poétique de Despréaux. » Il y a lieu de croire que Boileau et madame de Sévigné ne s’évitaient pas, puisqu’ils se trouvaient ensemble aux lectures de celui-ci. On voit dans une lettre de madame de Sévigné du 9 mars 1672, à sa fille, au sujet de cette pièce des Femmes savantes, qu’on nous assure avoir été faite jour lui donner une petite correction, ainsi qu’à madame de La Fayette, qu’elle avait ménagé au cardinal de Retz, retenu chez lui par la goutte, le plaisir d’en entendre la lecture de la bouche de Molière.

367. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Telle elle sera jusqu’à la fin de ses jours, ayant sans cesse le besoin d’avoir quelqu’un à régenter, à documenter près d’elle, — de petits paysans, faute de mieux, ou bien encore la fille d’une laitière. […] Elle se trouva bientôt liée avec la jeune et facile princesse par une véritable amitié, et il fut décidé entre elles qu’elle deviendrait la gouvernante de ses filles, et (contre l’usage) leur gouvernante dès le berceau. […] Il n’a pas assez de louanges pour célébrer les petites pièces du théâtre de société ou d’éducation que Mme de Genlis composait à cette époque et faisait jouer à ses propres filles : c’étaient de petites comédies morales où il n’entrait jamais ni rôle d’homme, ni intrigue d’amour. […] Elle menait de front plusieurs élèves, M. de Valois (Louis-Philippe), ses frères, M. de Montpensier, M. de Beaujolais, et leur sœur (Mme Adélaïde) ; elle leur avait adjoint un neveu à elle, une nièce, sans compter cette fille adoptive, la célèbre et intéressante Paméla (ce nom romanesque était du choix de Mme de Genlis).

368. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Du moment que le traité d’alliance entre les deux nations est conclu, il n’a qu’une réponse à opposer à toutes les ouvertures qui lui sont faites pour écouter les propositions de l’Angleterre : « Nous ne pouvons négocier sans la France. » L’Amérique a été une fille soumise jusqu’au jour où elle s’est émancipée de l’Angleterre ; mais celle-ci a beau la rappeler en secret et la vouloir tenter sous main, l’Amérique sera une épouse fidèle. […] Pendant que Franklin correspondait ainsi avec ses amis d’Amérique ou d’Angleterre, avec sa fille absente, et qu’il anticipait pour son pays les perspectives de l’avenir ou qu’il regrettait les joies du foyer, il était populaire en France, il était à la mode. […] Son retour dans sa patrie, les honneurs qu’il y reçut, les légers dégoûts (car il en est dans toute vie) qu’il y essuya sans le faire paraître, son bonheur domestique dans son jardin, à l’ombre de son mûrier, à côté de sa fille et avec ses six petits-enfants jouant à ses genoux, ses pensées de plus en plus religieuses en avançant, lui font une fin et une couronne de vieillesse des plus belles et des plus complètes que l’on puisse imaginer. […] J’espère qu’un jour, disait celui-ci, au sortir de l’Assemblée nationale, présidée par un juif, j’assisterai au mariage d’un catholique séparé par divorce de sa première femme luthérienne, et épousant une jeune anabaptiste ; qu’ensuite nous irons dîner chez le curé qui nous présentera sa femme, jeune personne de la religion anglicane, qu’il aura lui-même épousée en secondes noces, étant fille d’un calviniste.

369. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Casuistique. » pp. 184-190

Une femme, jeune, jolie, et qui paraît n’avoir pas été du tout une mauvaise fille, est morte ensanglantée par deux opérations chirurgicales. […] (Meurtriers pleins de gentillesse et de fantaisie quelquefois : on m’en a signalé un qui invite de temps en temps une de ses faciles amies à venir le voir « opérer » dans sa clinique, et qui lui offre, pour divertissement, le spectacle des pauvres filles endormies dont il taille les chairs secrètes.)

370. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Joseph Scaliger, et Scioppius. » pp. 139-147

Nous y voyons que la femme & la fille de ce bas aventurier, étoient des personnes sans mœurs. […] La fille, aussi déréglée que la mère, après la fuite d’un mari scélérat qu’on alloit faire brûler pour le crime le plus infâme, exerça la profession de courtisane.

371. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — I. Takisé, Le taureau de la vieille »

Quand il rendit visite au roi, le gambari lui raconta qu’il avait vu chez une vieille femme du village une jeune fille d’une beauté sans pareille : « Cette fille, conclut-il ne peut avoir qu’un sartyi pour époux. » Le sartyi ordonna incontinent à son griot d’aller, en compagnie du dioula, chercher la jeune fille. Elle se présenta, suivie de la vieille. « Ta fille est merveilleusement jolie dit le sartyi à cette dernière, je vais la prendre pour femme. — Sartyi, répondit la vieille, je veux bien te la donner comme épouse mais que jamais elle ne sorte au « soleil ou ne s’approche du feu, car elle fondrait « aussitôt comme de la graisse. » Le sartyi promit à la vieille que jamais Takisé ne sortirait aux heures de soleil et que jamais non plus elle ne s’occuperait de cuisine.

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