Cette absence de Paris est sans doute cause que Bayle paraît à la fois en avance et en retard sur son siècle, en retard d’au moins cinquante ans par son langage, sa façon de parler, sinon provinciale, du moins gauloise, par plus d’une phrase longue, interminable, à la latine, à la manière du xvie siècle, à peu près impossible à bien ponctuer127 ; en avance par son dégagement d’esprit et son peu de préoccupation pour les formes régulières et les doctrines que le xviie siècle remit en honneur après la grande anarchie du xvie . […] La façon dont Bayle était religieux (et nous croyons qu’il l’était à un certain degré) cadrait à merveille avec le génie critique qu’il avait en partage. […] Bayle partit donc en style de la façon du xvie siècle, ou du moins de celle du xviie libre et non académique ; il ne s’en défit jamais.
Dans cet état, qu’on provoque à volonté chez beaucoup de personnes, le patient croit sans résistance ni réserve aux idées qu’on lui suggère 5, et l’on peut les lui suggérer de deux façons. […] De cette façon, les sensations perdent tout à fait ou en partie le contrôle qu’elles exercent à l’état normal. — En langage physiologique, l’équilibre qui règne pendant la veille, entre les nerfs et les centres sensitifs d’un côté et les hémisphères de l’autre, est rompu au profit des hémisphères ; ils fonctionnent seuls et d’une façon prépondérante.
Sans la nature, l’art ne peut rien : il donne la façon, mais elle fournit l’étoffe. […] Tous également, chacun à sa façon, prétendaient renchérir sur la nature, et faire mieux qu’elle ; par une délicatesse aristocratique, ils en avaient peur, comme trop grossière, ou mépris, comme trop simple. […] On néglige comme indifférentes toutes les variations de l’esprit humain ; et depuis le costume jusqu’aux lois, depuis les formes de langage jusqu’aux façons de sentir, tout ce qui est localisé dans le temps et dans l’espace, particulier à une race, à un groupe d’individus ou à un individu, tout cela est compté comme non avenu.
Parfois cette vérité éprouvée et sentie éclate dans son œuvre d’une façon charmante ; et tant pis, ou plutôt tant mieux, si elle bouscule et dérange les symboles laborieusement combinés. […] Guillaume de Lorris est un lettré, et à certains traits de son œuvre on reconnaît comme une première impression de l’éloquence latine sur la façon encore informe de notre langue. […] La grossièreté cynique de ses images ne doit pas nous arrêter : il y a de la grandeur dans la façon dont il a traduit par le lourd martèlement et l’insistance rude de son style l’effort de la nature réparant incessamment la mort par la naissance.
Si l’on met à part les vies de saints, qui ne se prêtaient d’aucune façon à s’agglutiner en masse, le mouvement se dessine nettement : le drame liturgique des Prophètes du Christ s’est brisé en drames distincts, et ces drames distincts se sont réunis de nouveau et soudés dans le mystère du Vieil Testament, où les derniers apparaissent seulement juxtaposés. […] La moralité fut de plus en plus un drame pathétique, qui usurpa parfois le nom de tragédie 154 1 , et devint peut-être en quelque façon la tragi-comédie de Hardy. […] C’est moins parce qu’on rit des dupes que par la façon dont on en rit, absolument de tout cœur et sans arrière-pensée, ni ombre de restriction, que l’insuffisance morale de la pièce éclate.
Cependant, on n’admire pas de la même façon les grands prosateurs du dix-huitième siècle et ceux du dix-septième. […] Dans un discours de sa jeunesse79, il avait traité de la politique des Romains dans la religion ; il est vrai qu’il s’agit de la religion en la main des grands pour gouverner les petits, par « cette crédulité des peuples qui est toujours au-dessus du ridicule et de l’extravagant. » Bossuet l’entend d’une tout autre façon. […] Il est de ceux qui songent à se payer de deux façons de l’emploi qu’ils font de leur esprit, par le plaisir qu’ils y prennent et par la gloire.
Le mari invoque bien la loi pour forcer sa femme à réintégrer le domicile conjugal, mais c’est d’une façon si timide, avec une contrainte si piteuse, qu’aucun effet d’angoisse réelle, de terreur sincère n’en peut résulter. […] Les Fourchambault Il faut applaudir deux fois à l’éclatant succès que les Fourchambault viennent de remporter au Théâtre-Français : d’abord et surtout pour la pièce elle-même : ensuite pour la façon parfaitement digne dont ce succès s’est produit. […] On peut trouver que Bernard procède avec des façons bien cassantes à cette réforme intérieure, qu’il s’y montre dur et presque bourru : quand on dépouille une femme de ses falbalas, il est convenable de mettre des gants.
Je n’ai jamais pensé là-dessus de deux façons, et M. le docteur Walker a pu vous rendre témoignage que j’ai célébré mille fois votre mérite dans les meilleures compagnies de Londres avec tout le zèle qu’inspirent la vérité et l’amitié. […] Les hommes en jugent à leur façon, mais ma conscience me répond que le Ciel en juge autrement, et cela me suffit.
Enfin je voudrais ouvrir largement le xixe siècle aux jeunes gens, sans exclure aucun genre et sans craindre d’accueillir des œuvres que la postérité ne recueillera pas ; ils y trouveront, sous une forme nouvelle et appropriée à leur façon de sentir, de penser et de parler, la plupart des idées qu’ils auront précédemment tirées des anciens, des étrangers et des classiques. […] Ce qui importe surtout, c’est la façon dont on lit.
Vous pourrez disposer ou rendre vos idées de telle façon que ce que vous dites mène à ce que vous ne dites pas par un insensible engagement, et que l’on soit conduit en vous lisant à découvrir soi-même ce qu’il ne vous était pas nécessaire d’exprimer. […] Ce sera ce qu’on peut appeler la loi d’économie : on mettra chaque idée là où elle devra prendre le plus de force et produire le plus d’effet, là aussi où elle pourra le mieux s’acquitter de toutes les fonctions qui lui appartiennent, de façon qu’il n’y ait pas besoin de la rappeler dans le cours de l’ouvrage.
Si la vie humaine n’avait d’autre horizon que de végéter d’une façon ou d’une autre ; si la société n’était qu’une agrégation d’êtres vivant chacun pour soi et subissant invariablement les mêmes vicissitudes ; s’il ne s’agissait que de naître, de vivre et de mourir d’une manière plus ou moins semblable, le seul parti à prendre serait d’endormir l’humanité et de subir patiemment cette vulgaire monotonie. […] » que de tolérer cette irrévérencieuse façon de traiter la vérité comme chose inférieure en valeur au repos de quelques peureux.
Il répétait sans cesse que ce serait une surprise comme du temps de Noé et de Lot ; qu’il fallait se tenir sur ses gardes, toujours prêt à partir ; que chacun devait veiller et tenir sa lampe allumée comme pour un cortège de noces, qui arrive à l’improviste 793 ; que le Fils de l’homme viendrait de la même façon qu’un voleur, à l’heure où l’on ne s’y attendrait pas 794 ; qu’il apparaîtrait comme un éclair, courant d’un bout à l’autre de l’horizon 795. […] Il est évident, en effet, qu’une telle doctrine, prise en elle-même d’une façon littérale, n’avait aucun avenir.
Il est aisé d’imaginer combien madame Guyon fut empressée d’entendre le saint à la mode, un homme dont la façon de penser & de sentir étoit analogue à la sienne. […] On prétend** que ces deux célèbres antagonistes, qui combattirent avec tant de chaleur pour des matières de théologie, avoient une façon de penser toute philosophique, & que, s’ils étoient nés à Londres, ils auroient donné l’essor à leur génie & déployé leurs principes, que personne n’a bien connus.
Chacun a son point de vue, son optique, son objet d’observation, sa façon de voir ; & cette diversité de vues, de goût, d’objets, &c. dans les voyageurs, varie toujours utilement ou agréablement leurs rélations. […] Le défaut de la diction n’est pas toujours un inconvénient dans les livres de voyages qui, ainsi que ceux d’histoire, se font lire de quelque façon qu’ils soient écrits.
Il vous indique telle particularité qui vous est échappée ; vous rentrez chez vous ; vous ne songez guère qu’à relire le volume, tout au moins à le repasser en revue dans votre mémoire ; d’une façon ou d’une autre, vous le relisez, vous le revoyez sous un nouvel angle. […] » Quand vous saurez ce qu’en pense un tel, vous serez préparé pour un nouveau voyage ; non, pour le même, mais avec une autre façon de voir.
Couper, c’est sa façon de démêler ! […] » Et plus loin : « L’influence de la femme chef de famille se sent encore et d’une façon funeste après plusieurs générations.
Barre quand il expose, de façon assez intelligente et précise (c’est la meilleure partie de son livre) les idées de M. […] Il me paraît les apprécier de façon très inexacte.
Le talent de Laprade me semble une sorte de composé d’André Chénier, de De Vigny et de Ballanche : combiner trois maîtres, c’est une façon encore d’être original. — Vous voyez que je baguenaude et mâche à vide.
Sans doute un philosophe comme Hobbes ou Descartes, un érudit comme Henri Etienne, un savant comme Cuvier ou Newton résument à leur façon le large domaine qu’ils se sont choisi ; mais ils n’ont que des facultés restreintes ; d’ailleurs ils sont spéciaux, et ce champ où ils se retirent ne touche que par un coin la promenade publique où circulent tous les esprits.
Il entasse du vide, et c’est ce soin de sa parade, cette façon d’offrir entre deux doigts la moindre des sornettes comme une perle, incomparablement précieuse puisqu’elle vient de lui, qui complique d’irritation l’ennui qu’il vous fait subir.
Pierre Quillard est fortement nourri des belles-lettres antiques, aussi a-t-il droit plus que tout autre d’intituler ainsi son livre ; mais il aime et connaît l’antiquité assez pour ne pas la réduire à des pastiches, à la façon littérale de cette bonne École Romane.
Aussi la compilation de Dupleix n’est pas plus regardée, par les Connoisseurs, comme une Histoire, que le Siecle de Louis XIV, celui de Louis XV, l’Essai sur l’Histoire générale, distribués de la même façon.
Le plus grand défaut qu’on puisse reprocher à l’Abbé Trublet, c’est d’appuyer trop long-temps sur une même pensée, de la retourner en trop de façons différentes ; défaut qui prouve au moins l’injustice des traits lancés contre sa stérilité & son peu d’imagination.
Ainsi il y aurait, entre les esprits, des liens électifs plus libres et plus vivaces que cette longue communauté du sang, du sol, de l’idiome, de l’histoire, des mœurs qui paraît former et départager les peuples ; ceux-ci ne seraient pas divisés par d’irréductibles particularités comme l’école historique moderne s’est appliquée à le faire admettre ; la France, l’Allemagne plus encore, dont la littérature est grecque et cosmopolite, aurait conservé intacte une sorte d’humanité générale et large, toute à tous, sensible à l’ensemble des manifestations spirituelles de l’espèce, payant cet excès de réceptivité par quelque défaut de production originale, le compensant en universelle intelligibilité, réduite à emprunter souvent et à ouvrer pour ainsi dire à façon, mais travaillait pour le monde, plutôt foyer de réflexion, de convergence et de rayonnement que flambeau proprement et solitairement éclatant.
On les écrit en vingt façons, ils se prononcent de vingt manières. […] Tant de façons d’écrire et vraisemblablement de prononcer un seul et même mot représenteront donc autant d’époques de la langue, autant de phases, pour parler comme les linguistes, de l’évolution d’un idiome, autant de dates de l’histoire d’un mot. […] Mais il faut considérer d’abord que la chanson de geste n’est proprement qu’une matière épique, l’étoffe en quelque façon de l’épopée possible, mais nulle part, on l’a vu, non pas même dans le Roland, l’épopée réalisée. […] Et si les poètes rejettent obstinément le mot propre, c’est bien moins encore par principe et par préoccupation de rester nobles que par ambition de trouver une façon singulière de redire des choses déjà dites. […] Les façons deviennent familières jusqu’à l’inconvenance et jusqu’à la grossièreté.