L’un venait en habits de deuil, et disait : « Il a fait périr ma femme et mes enfants ; j’apporte ici les dernières plaintes qu’ils prononcèrent en mourant : ô juges, vengez-nous. » Un autre : « Il m’a ravi ma liberté et j’étais innocent ; voilà mes chaînes, elles déposent contre lui, et je viens les secouer sur sa tombe. » Des malheureux, en lambeaux, disaient : « Nous avons été arrachés de nos maisons pour bâtir ces pyramides et ces palais : sur chacune de ces pierres que vous voyez, a coulé quelqu’une de nos larmes » ; et souvent des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, étendant leurs bras à la fois, s’écriaient tous ensemble : « Il a causé la mort de nos pères, de nos frères, de nos époux, qui ont tous péri dans une guerre injuste ; ô juges !
Ne craignons donc pas de jeter quelques regards en arrière sur les désastreux effets des événements passés : ceux qui ne se souviennent que des impressions qui les ont tourmentés, il y a vingt-cinq ans, nous permettront, je crois, de leur apprendre celles qui nous ont agités depuis ces trois dernières années. […] Ce courage de leur âme témoigne qu’ils possédaient l’une des qualités sans laquelle j’affirmai que le génie n’atteint jamais au dernier degré d’éminence : je veux dire la vertu, disposition naturelle que j’estime être la source du beau et du grand. […] Quoi de plus en rapport avec le fonds des épopées que les secousses générales dont le système des nations de l’Europe est ébranlé depuis la fin du dernier siècle, et le commencement du nouveau ? […] La différence des religions ne détruit pas l’identité de l’imaginaire, du surnaturel, du fonds successif d’historiettes par lesquelles on passe de la création au déluge, et des époques originelles aux dernières révolutions des annales. […] Le Dante eut le même tort avant ces poètes, et le fameux Michel-Ange, dont il fut l’inspirateur, imita cette faute lorsqu’il plaça le nocher Caron passant les damnés aux enfers de son jugement dernier ; composition merveilleuse qui, du reste, semble être l’épopée de la peinture.
Aussi les deux derniers actes au moins sont très languissants, mais enfin il y a partout de beaux vers. […] On nous présente un dernier argument, qui du reste est très pertinent, à savoir les servantes de Molière. […] Et enfin, au dernier acte, il est hypocrite : c’est une espèce de Tartuffe. […] Elle le connaît tel qu’il a été, tel qu’il est et tel qu’il sera au dernier acte. […] Son dernier mot est touchant, bien caractéristique encore de son caractère.
Il a beau souffrir, il ne regrette point l’emploi qu’il a fait de ses derniers mois : non, ce n’est pas un mauvais génie qui l’a conduit à ce bal où il a fait la connaissance de Lotte : « Non, c’était un bon génie, s’écrie-t-il, je n’aurais pas voulu passer mes jours à Wetzlar autrement que je ne l’ai fait ; et pourtant les dieux ne m’accordent plus de tels jours, ils savent me punir et me Tantaliser. » A Francfort, où il est revenu vivre près de sa famille, il a dans sa chambre la silhouette de Lotte attachée avec des épingles au mur ; il lui dit le bonsoir en se couchant, et le matin, il prend plus volontiers ces épingles-là que d’autres pour s’habiller. […] Un moment, dans les premières années de cette existence nouvelle à Weimar, il a l’idée de se plaindre de son esclavage ; un reste de misanthropie werthérienne s’est glissé sous sa plume, mais il a le bon esprit aussitôt de s’en repentir : « Que le style de ma dernière lettre ne vous fâche pas, écrit-il à Kestner (mars 1783). […] Au moment de les publier lui-même, ce fils de Charlotte mourut, mais les autres membres de la famille ont voulu accomplir son vœu, et c’est ainsi que l’ouvrage a paru l’année dernière en Allemagne.
D’après les aveux officiels, le déficit annuel était de soixante-dix millions en 1770, de quatre-vingts en 1783565 : quand on a tenté de le réduire, ç’a été par des banqueroutes, l’une de deux milliards à la fin de Louis XIV, l’autre presque égale au temps de Law, une autre du tiers et de moitié sur toutes les rentes au temps de Terray, sans compter les suppressions de détail, les réductions, les retards indéfinis de payement, et tous les procédés violents ou frauduleux qu’un débiteur puissant emploie impunément contre un créancier faible. « On compte cinquante-six violations de la foi publique depuis Henri IV jusqu’au ministère de M. de Loménie inclusivement566 » et l’on aperçoit à l’horizon une dernière banqueroute plus effroyable que toutes les autres. […] Par les Éloges de Thomas, par les pastorales de Bernardin de Saint-Pierre, par la compilation de Raynal, par les comédies de Beaumarchais, même par le Jeune Anacharsis et par la vogue nouvelle de l’antiquité grecque et romaine, les dogmes d’égalité et de liberté filtrent et pénètrent dans toute la classe qui sait lire585. « Ces jours derniers, dit Métra586, il y avait un dîner de quarante ecclésiastiques de campagne chez le curé d’Orangis, à cinq lieues de Paris. […] C’est pourquoi, pendant les vingt dernières années, l’ancien régime a beau s’alléger, il semble plus pesant, et ses piqûres exaspèrent comme des blessures.
Il souffrit de ce refroidissement de la faveur royale avec sa vivacité ordinaire de sentiment : et ses derniers jours en furent attristés. […] Ainsi sont construites les tragédies d’Andromaque, de Britannicus, de Bérénice, d’Iphigénie (sauf le miracle mythologique qui renverse le dénouement logique) : Bajazet un peu, Mithridate davantage, Phèdre surtout admettent certains faits du dehors à modifier l’action ; mais il est remarquable que pour les deux dernières, ces faits (mort, résurrection, retour de Mithridate et de Thésée) sont des hypothèses nécessitées par la vérité psychologique, et point du tout des ressorts disposés pour la surprise. […] Nous ne pouvons exiger que Racine nous parle selon nos idées de la Grèce ou de l’Asie, qu’il costume ses acteurs d’après les dernières trouvailles ou les hypothèses récentes de l’histoire et de l’archéologie : il n’y avait guère que la civilisation gréco-romaine », la décadence raffinée, dont il pût avoir un sentiment historiquement exact.
J’enregistre ces faits, sinon comme avérés, du moins comme très vraisemblables et surtout comme faisant partie de la légende de Rabelais, de cette sorte de vie fantastique qu’on lui a faite, impression dernière de ses écrits. […] C’était assez des embarras que pouvait lui causer la publication du dernier. […] Ronsard, qui ne l’aimait pas, à cause de ses traits contre les superstitieux d’antiquité, lui en fait une en vers français, dont les derniers sont piquants.
Il donna le secret de la véritable harmonie en montrant que, loin d’être une qualité spéciale qui résulte de certaines combinaisons de sons, elle n’est que la suprême et dernière convenance d’un style qui réunit toutes les autres. […] Témoin la naissante Académie française, qui mit trois mois à examiner la Prière pour le roi Henri II allant en Limousin ; encore ne toucha-t-elle point aux quatre dernières strophes. […] Qu’à l’un de ces moments-là Malherbe nous tombe sous la main, d’où vient que nous sommes si surpris de cette vivacité, de cette verdeur d’un sexagénaire, de ce grand sens de ces vérités qui ont reçu leur forme dernière, de ce style si précis, si noble, si frappant ?
Je ne parle point ici de ces œuvres où la plus solide érudition s’unit à une critique fine ou élevée, comme les derniers volumes de l’Histoire littéraire de la France, comme l’Essai sur le bouddhisme de M. […] Là est la dignité de toute recherche particulière et des derniers détails d’érudition, qui n’ont point de sens pour les esprits superficiels et légers. […] Bien plus, les résultats généraux qui ne s’appuient pas sur la connaissance des derniers détails sont nécessairement creux et factices, au lieu que les recherches particulières, même destituées de l’esprit philosophique, peuvent être du plus grand prix, quand elles sont exactes et conduites suivant une sévère méthode.
Le Hir, la théorie comparée des langues sémitiques, et ma position était celle du dernier maître d’étude ; j’étais un savant et je n’étais pas bachelier. […] Si ces lignes étaient les dernières confidences que j’échange avec le public, qu’il me permette de le remercier de la façon intelligente et sympathique dont il m’a soutenu. […] À moins que mes dernières années ne me réservent des peines bien cruelles, je n’aurai, en disant adieu à la vie qu’à remercier la cause de tout bien de la charmante promenade qu’il m’a été donné d’accomplir à travers la réalité.
Il est à noter que cet acte a été composé le dernier ; Wagner fit d’abord le troisième tout entier, ensuite le premier, en dernier lieu le second (Glasenapp ; Kastner) ; ceci était contraire à toutes ses habitudes (Pohl : Musik. […] L’Association Wagnérienne Universelle vient de publier (en allemand) son Bayreuther Taschen-Kalender fur 1886, sous la direction du comte Ferdinand de Sporck et d’Oskar Merz ; ainsi que le calendrier de l’année dernière (1885, Ière année), c’est un petit volume de poche in-16, contenant des renseignements et des études Wagnériennes : on y a joint cette fois un plan de la salle du théâtre de Bayreuth, avec les numéros des places. […] La Valkyrie est particulièrement réussie, elle est, certes, supérieure aux Maîtres Chanteurs ; nous en citerons un des meilleurs passages : (Acte III, scène dernière, « nicht straf ich dich erst… ») Quel châtiment, cœur indompté, A mérité ta désobéissance ?
Un dernier détail : après l’éblouissement final qui termine La Walkyrie, tandis que des acclamations partaient de tous les points de la salle, un coup de sifflet s’est fait entendre, un seul, oh ! […] Vainement il cherche un collaborateur : soliste perpétuel, il ne peut réussir à s’appareiller ; mais rien ne le décourage, et il voue à sa tâche, à l’œuvre de sa vie, les derniers restes d’une voix qui tombe et d’un sifflet qui s’éteint. […] Le critique marque les oscillations de la mode entre le public et les auteurs, et ne juge sévèrement les derniers que pour plaire au public, n’ayant ni le courage, ni la sagesse de comprendre que le légitime objet de la préoccupation incessante du critique, ce doit être le public.
Vinet, n’hésite pas à dire que ces dernières pages sont sublimes. […] Quant à l’impression dernière qui résulte de cette lecture, en vérité, tout en condamnant le déplorable système de l’auteur, on ne saurait dire qu’elle soit mauvaise. […] Polybe, dans son Histoire générale de la république romaine, aux quatre derniers chapitres du premier livre, raconte avec sa précision accoutumée la guerre des mercenaires contre les Carthaginois.
Et ces plans diffèrent en ce qu’ils semblent en relation plus ou moins médiate avec notre centre personnel : ainsi, dans un tableau, les dernières lignes d’un paysage paraissent fuir dans un lointain imaginaire. […] Une dernière condition n’est-elle pas nécessaire : apercevoir la ressemblance de l’image avec l’objet ? […] Le problème de la reconnaissance nous fait ainsi toucher aux dernières profondeurs de la conscience et aux actes les plus simples de l’esprit.
Et le sergent de ville de lui apprendre, que mon voisin est un ancien saltimbanque d’origine irlandaise, auquel un oncle a laissé quelque chose comme un héritage de cent mille livres de rente, qu’il est en train de manger… et qu’il a fait revenir son ancienne voiture de saltimbanque pour y remonter, quand il sera arrivé à son dernier billet de mille. […] La mariée se fait coiffer par Julie, le marié quitte son habit noir et passe un veston, et Burty, dont la paternité est arrivée à la limite dernière des devoirs et des obligations, m’entraîne japoniser chez Bing. […] Son dernier morceau, sa « première » dont il pouvait faire un chef-d’œuvre, ce n’est pas ça, dit-il.
Jamais notre question ne recevra sa dernière réponse. […] Si les premiers vers rappellent par trop les vers de Louis Racine, les derniers contiennent d’heureuses formules de philosophie néoplatonicienne. […] Et, dernier trait de ressemblance avec l’enfant, il ne, sait jamais lui-même s’il va rire ou pleurer, et il pourrait dire de toutes ses pièces ce qu’il dit de deux d’entre elles : Il se peut que l’on pleure à moins que l’on ne rie.
Dans le volume que je vous ai envoyé, il n’y a que des titres de chapitres ; à chacune des quelques idées qu’il contient manque le développement, c’est-à-dire la lumière qui justifie une idée en l’éclairant dans tout son cours, depuis son principe jusqu’à ses dernières conséquences. […] Vous appelez Dieu à votre propre tribunal ; vous jugez en dernier ressort de la parole sainte ! […] De ces trois dogmes, les deux derniers sont évidemment les conséquences du premier.
A mesure que nous descendons vers les derniers siécles de l’Eglise, nous trouvons l’Histoire du Calvinisme, par Solier in-4°. […] Le premier parut en 1714., & les sept derniers furent donnés après la mort de l’auteur. […] On a cependant reproché à l’auteur d’être trop diffus & trop peu modéré dans les derniers volumes ; mais il s’éleve avec force & peut-être avec trop peu de ménagement contre les défauts des Jésuites & de leur compagnie ; il donne des éloges à la vertu de quelques-uns.
C’est ainsi que Goëthe, l’auteur de Werther, a peint dans Goetz de Berlichingen 1 la lutte de la chevalerie expirante contre l’autorité de l’empire ; et Schiller a de même voulu retracer, dans Wallstein, les derniers efforts de l’esprit militaire, et cette vie indépendante et presque sauvage des camps, à laquelle les progrès de la civilisation ont fait succéder, dans les camps mêmes, l’uniformité, l’obéissance et la discipline. […] Dans le Goetz de Berlichingen de Goëthe, ce guerrier, assiégé dans son château par une armée impériale, donne à ses soldats un dernier repas pour les encourager. […] Il me semble néanmoins facile de concevoir, malgré nos habitudes contraires, que ce trait, emprunté de la vie commune, est plus propre que la description la plus pathétique à faire ressortir la situation du héros de la pièce, d’un vieux guerrier couvert de gloire, fier de ses droits héréditaires et de son opulence antique, chef naguère de vassaux nombreux, maintenant renfermé dans un dernier asile, et luttant avec quelques amis intrépides et fidèles contre les horreurs de la disette et la vengeance de l’empereur.
Cela ne l’abandonnera jamais, car vous savez déjà, puisque je vous en ai parlé un peu mercredi dernier, qu’à l’égard des princes de Vendôme il a été exactement le même. […] De votre nom j’orne le frontispice Des derniers vers que ma muse a polis. […] Il faut que je vous fasse une confidence : Corneille a été amoureux toute sa vie et, jusqu’au dernier terme, il a parlé de l’amour de la façon la plus admirable.
Le prêtre catholique, peint par elle plus d’une fois dans sa vie, y est repris et peint une dernière. […] Après avoir été infidèle à sa femme pour cette fameuse Charlotte de Campvallon, — que les ingénus qui jugent les femmes à l’audace avec laquelle elles relèvent leurs jupes ne manqueront pas de prendre pour un caractère, — il redevient platement amoureux de sa femme, à lui, uniquement parce qu’elle l’a quitté et que c’est l’éternel jeu de ces enfants : « Tu ne veux plus, mais moi précisément je veux, parce que toi tu ne veux plus. » Enfin, dernier coup porté à cet invincible ! […] Et, véritablement, si effacés, si énervés que nous soyons dans les dernières passions qui nous restent, ce n’est pas encore un fait ordinaire — une habitude dans nos mœurs — que cette commisération conjugale qui fait reprendre à un mari sa femme l’âme pleine d’un homme qui n’est pas le premier, mais le second, qu’elle ait mis dans son cœur.
Un don secret et précieux retient le vrai talent sur la pente, alors même qu’il est tenté d’y glisser ; il se garde, même en ses entraînements logiques, d’aller aux derniers excès. […] Ils se disent adieu dans une dernière poignée de mains, tandis que la sœur aînée, après avoir un moment essayé de forcer sa nature en cherchant auprès d’un homme du monde et d’un artiste les bénéfices et les élégances du vice entretenu, se lasse des contraintes qu’il lui faut s’imposer dans une vie sociale plus relevée, revient aux amans de sa classe et retourne avec joie au ruisseau qui, bien décidément, est sa vraie patrie. […] Il en est aujourd’hui à sa dernière incarnation ; je ne vois vraiment pas comment il s’y pourrait prendre pour se transformer encore, aller plus loin qu’il n’est allé et trouver désormais le moyen de nous étonner.
Tel il nous apparaît, dans sa prédiction d’Alexandra, dernier excès, et par là même, involontaire parodie de cette poésie sublime, de cette magnificence de langage, dont les chœurs des tragiques et les hymnes de Pindare avaient offert le modèle à la fois extraordinaire et naturel. […] Bien que, longtemps après et dans le déclin du polythéisme, les hymnes de Callimaque se soient conservés comme une dernière réminiscence d’un culte mourant, on peut douter que ces hymnes aient été jamais familiers au peuple et chantés par la foule. […] et nous ne serons jamais au dernier rang.
Fléchier trouvait en Auvergne un précieux et dernier abrégé du gouvernement paternel. […] Les muggletoniens professaient que les « deux derniers prophètes et messagers de Dieu étaient John Reeve et Ludovic Muggleton ». […] Quelques Carduques se rassemblèrent, chargèrent les derniers rangs, tuèrent quelques hommes, et en blessèrent d’autres avec des pierres et des flèches. […] On a lu dans Robertson les dernières années de François Ier. […] Qu’auriez-vous fait, vous autres faibles et derniers nés du monde ?
Inutile d’ajouter que ce qu’il poursuit ainsi de sa haine, ou, si l’on veut, de sa défiance, c’est en dernière analyse le Dieu personnel. […] Une dernière réflexion seulement sur Proudhon considéré comme critique. […] Le scepticisme est donc tolérance, douceur de mœurs et civilisation et progrès ; et progrès, civilisation, douceur de mœurs et tolérance se ramènent en dernière analyse au scepticisme. […] Et puis ceci nous donne un dernier trait sur ce scepticisme très particulier de Sainte-Beuve. […] Il ne s’y épargnait pas : dernière qualité, dernière « vertu », comme il dit, du critique, il avait une loyauté absolue dans son enquête, dans ses découvertes et dans ses erreurs.