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2038. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de Pompadour. Mémoires de Mme Du Hausset, sa femme de chambre. (Collection Didot.) » pp. 486-511

L’aimable abbé, qui ne voit de crime que dans l’inconstance, nous promet qu’il n’y en aura plus : Tout va changer : les crimes d’un volage Ne seront plus érigés en exploits ; La Pudeur seule obtiendra notre hommage ; L’Amour constant rentrera dans ses droits.

2039. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

« La preuve de l’effet qu’a fait cette brochure, ajoutait-il avec insistance, est dans la douleur des auteurs offensés, de la part de qui j’ai reçu dix fois plus de plaintes que je n’en ai reçu contre eux des gens de bien. » Les gens de bien, c’est-à-dire les gens du bord de la reine et du Dauphin ; et, en effet, ils s’intitulaient eux-mêmes de la sorte ; mais j’ai regret, ici, je l’avoue, de voir Malesherbes essayer de leur donner le change, en leur accordant ce nom qui n’avait pas tout à fait pour lui le même sens.

2040. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1861 » pp. 361-395

Je m’éveille ce matin dans une chambre pleine de portraits d’aïeux et d’aïeules qui me regardent tous, dans le costume de leur profession ou dans l’habillement de leur classe, avec des accessoires aussi naïfs d’indication que les phylactères du moyen âge : le médecin avec un Boerhave à la main, le prêtre avec un paroissien, l’homme de banque avec une lettre de change.

2041. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

Comme les années changent les générations.

2042. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

La haute raison des libres-penseurs ne se déformera pas beaucoup en découvrant que ce fut la routine d’une religion timorée, comme si tout ce qui ne change pas, tout ce qui se suit et ce qui dure n’était pas aussi une routine, depuis la fidélité dans l’amour jusqu’au train du ciel étoilé au-dessus de nos têtes, depuis la persévérance dans la volonté de l’homme jusqu’à l’adoration perpétuelle des Anges devant le trône de Dieu !

2043. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Ses admirateurs trop passionnés seront toujours ce qu’ils furent, amoureux jusqu’à l’aveuglement ; et rien ne sera changé en France, pas même la manie de prendre à un grand artiste des qualités bizarres qui ne peuvent être qu’à lui, et d’imiter l’inimitable.

2044. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

Nous avons vu les dieux changer selon les âges et, en disparaissant graduellement, laisser la place à l’homme.

2045. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

Comment ce mouvement abstrait, qui devient immobilité quand on change de point de repère, pourrait-il fonder des changements réels, c’est-à-dire sentis ?

2046. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Bien des choses adviennent aux hommes contre leur attente et pour leur déplaisir ; et quelques-uns aussi, après s’être aheurtés à d’affreuses tempêtes, ont vu tout à coup le mal se changer pour eux en souverain bonheur.

2047. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Que tout est changé quelques années plus tard ! […] L’histoire de son siècle renferme plus de contradictions qu’il n’en faut pour expliquer naturellement toutes les siennes, et, en face des bouleversements inouïs qui ont tour à tour modifié l’esprit des générations modernes, on n’a pas lieu de s’étonner beaucoup que lui-même ait pu changer quand rien autour de lui ne restait immuable. […] Elle a, suivant sa fantaisie de femme, changé, transposé, raccourci, retranché. […] Les monuments de Francfort, histoire vivante du temps passé, le couronnement de Joseph II, qui remet sous ses yeux le moyen âge, des cérémonies symboliques, derniers vestiges de mœurs perdues, qui reviennent chaque année, à époque fixe, changer l’aspect de la ville et transporter ses habitants huit siècles en arrière, surtout les « gravures sur bois » des vieilles chroniques lui fournissent la mise en scène ; de sorte qu’on peut dire que le drame de Gœtz est dans sa tête, avant même qu’il ait jamais entendu parler de Gœtz. […] une fois qu’il s’est établi à X***, tout change d’aspect ; la tristesse sur cette terre de deuil fait place à l’espérance.

2048. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Il s’arrête à ce moment, change de ton, regarde autour de lui, pour qu’on le comprenne :     Je pense Qu’il est bon que chacun s’accuse ainsi que moi Car on doit souhaiter, selon toute justice,     Que le plus coupable périsse. […] Il change son personnage.

2049. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

Lui, sitôt qu’il aperçoit dans le lointain une espérance : La voix changée, de pure crainte, Et cette voix tremblante ainsi que toute sa personne, Tout à fait humble, et le teint tantôt rouge,  Tantôt pâle, devant Cresside, sa dame bien-aimée, Les yeux baissés, la contenance humble et soumise, Oh ! […] Plût à Dieu qu’il me fût permis de changer aussi souvent que lui… Béni soit Dieu de ce que j’en ai épousé cinq !

2050. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

IV Je vais vous faire son portrait exact, la moyenne de son apparence, tel qu’il était dans son brillant uniforme de mousquetaire en 1822, tel qu’il était en 1825, enfin tel qu’il était en 1863, quelques mois avant sa mort ; toujours jeune et agréable d’esprit, sans que le temps eût presque rien changé à sa taille et à son visage, excepté quelques légères nuances imperceptibles de transition, entre les cheveux qui menaçaient de blanchir et les ondes molles et blondes de sa chevelure qu’il laissait flotter sur le collet de son habit. […] en ont été changés.

2051. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

L’art n’a pas mission de changer en or fin le plomb vil des âmes inférieures, de même que toutes les vertus imaginables sont impuissantes à mettre en relief le côté pittoresque, idéal et réel, mystérieux et saisissant des choses extérieures, de la grandeur et de la misère humaines. […] Il devait moins changer, comme on le lui a reproché tant de fois, qu’il ne devait grandir sans cesse, dans l’ampleur de sa puissante imagination et dans la certitude d’un art sans défaillance.

2052. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

Puis dans le moment, lui, l’homme du travail de la matinée, il se lève à onze heures, par suite de douleurs névralgiques, qui se changent, à une heure du matin, en d’affreuses rages de dents. […] En chemin de fer, Rodin, que je trouve vraiment changé, et très mélancolieux de son état d’affaissement, de la fatigue qu’il éprouve à travailler dans le moment, se plaint, presque douloureusement, des contrariétés que, dans le métier de peintre et de sculpteur, infligent aux artistes, les commissions d’art, qui, au lieu d’être des aides de leur travail, par les sollicitations, les démarches, les courses, leur font perdre un temps, que lui aimerait mieux employer à faire de l’eau-forte.

2053. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

En définitive, rien n’est changé à nos premières déclarations : il reste établi que la parole intérieure est essentiellement une image simple, une image sonore ; l’image tactile qui, théoriquement, devrait l’accompagner toujours, est d’ordinaire réduite à une intensité minimum ; par suite, elle est inobservable ; certains faits très généraux semblent pourtant dénoter sa présence, parce qu’ils trouvent en elle la condition qui peut servir à les expliquer. […] Si parfois ma parole intérieure est l’expression réfléchie d’une conviction arrêtée, elle n’est alors pour moi que la formule de la vérité ; or ce qui est vrai est vrai de toute éternité ; l’heure où j’ai pour la première fois rendu hommage à la vérité dans le silence de la méditation, importe peu ; l’essentiel, c’est que je crois encore tenir le vrai, c’est que ma conviction n’a pas changé ; ma pensée n’est pas un moment du temps écoulé, elle est un présent qui reflète l’éternité.

2054. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

Et à quel moment de l’histoire la vie a-t-elle changé avec une rapidité aussi affolante qu’en celui-ci ? […] Mais je crois que c’est l’idée même de l’esthétique que nous devons changer.

2055. (1902) Le critique mort jeune

Il montrerait que, depuis Pascal d’abord, Michelet, Quinet et Eugène Sue ensuite, il y a quelque chose de changé dans les esprits. […] De ces lois inéluctables « auxquelles notre libre arbitre peut bien tenter de se soustraire, mais que nos révoltes ne changent pas, non plus que nos désirs, un ancien disait déjà : « Ducunt volentem, nolentem trahunt. — Acceptez-les, elles vous guident, résistez-leur, elles vous traînent. » Cette acceptation, cette obéissance, cet équilibre, que donne « l’implacable discipline du fait », c’est le commencement de la sagesse : on se rappelle que M.  […] Quoiqu’il soit bien éloigné de tomber dans les erreurs de la volupté sanglante, ce partisan des mœurs libres et ce défenseur de l’amour songe sans déplaisir à la soirée où le peuple de Paris montra qu’il n’entendait pas que la ville des jeux et des arts se changeât en une autre Genève. […] Nous n’avions rien à y changer des éloges ou des réserves que nous y faisions.

2056. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Aujourd’hui encore ; on n’a fait que changer mon bégayement… » Voilà les sujets de quelques-unes de ces petites pièces « qu’on a faites petites pour les faire avec soin ». […] La science est en train de changer la face extérieure de la vie humaine et, par des espérances et des vertus neuves, l’intérieur de l’âme. […] Que les temps sont changés ! […] Le mieux est de ne rien affirmer, ou bien de changer d’avis de temps en temps. […] Passe encore s’il avait changé de foi : il pourrait avoir la sérénité que donnent souvent les convictions fortes.

2057. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Mais combien mes sentiments, mes espérances et mes alentours sont changés ! […] Les circonstances ont changé mon goût : à Paris, je cherchais tous les gens d’un certain âge, parce que je les trouvais instruits et aimables ; ici, les vieux sont ignorants comme les jeunes, et roides de plus. […] Rien n’est changé dans les intentions de l’Académie, et Rousseau est traité comme la Madeleine : Remittuntur illi peccata multa, quia dilexit multum. » Mme de Charrière concourut, en effet, pour l’Éloge de Jean-Jacques Rousseau ; elle n’eut pas le prix.

2058. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

le progrès grandit toute chose, l’industrie crée des merveilles, la science se développe rapidement, nous admirons l’Amérique, nous écoulons Saint-Simon, Fourier, Owen, tout change… et nous commentons de mauvaises traductions de Platon ! […] Un chêne change de forme et de couleur pour l’homme sanguin et pour l’homme bilieux. […] Hugo, je vous ferai remarquer, en toute humilité, qu’on n’a pas eu de peine à ramasser ces niaiseries, vu qu’elles n’ont aucunement changé de valeur, que personne ne les a oubliées, et que ce qu’on nommait un défaut chez le poète, il y a trente ans, n’est pas, que je sache, considéré aujourd’hui comme vertu.

2059. (1932) Le clavecin de Diderot

Jolie solidarité que celle d’un monde où des lettres enfermées dans les frontières d’un même mot ne peuvent changer, c’est-à-dire vivre de concert. […] En vérité, depuis des siècles, on se contente de répéter les mêmes expériences et considérations sur certains réflexes à fleur de peau, avec une volonté d’agnosticisme ou, au moins, le désir de conclure qu’il n’y a rien de changé sous le soleil. […] Elle croyait ainsi que l’heure ne changerait pas, donc que ne passerait pas la sienne, que ne viendrait pas celle des autres.

2060. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

On en est moins loin dans le sonnet qui suit, et où l’on retrouve le ton élevé, digne du sujet : Ni la fureur de la flamme enragée, Ni le tranchant du fer victorieux, Ni le dégât du soldat furieux, Qui tant de fois, Rome, t’a saccagée ; Ni coup sur coup ta fortune changée, Ni le ronger des siècles envieux, Ni le dépit des hommes et des dieux, Ni contre toi ta puissance rangée ; Ni l’ébranler des vents impétueux, Ni le débord de ce dieu tortueux, Qui tant de fois t’a couvert de son onde, Ont tellement ton orgueil abaissé, Que la grandeur du rien qu’ils t’ont laissé Ne fasse encore émerveiller le monde.

2061. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Parmi ces figures de gens de lettres si vivement  éclairées en quelques mots, on voit Parny, « poëte et créole, à qui il ne fallait que le ciel de l’Inde, une fontaine, un palmier, une femme, et dont la paresse n’était interrompue que par ses plaisirs qui se changeaient en gloire. » On y voit Delille de Sales, le philosophe de la nature, « qui (comme d’autres philosophes de nos jours) faisait en Allemagne ses remontes d’idées. » On y trouve La Harpe, arrivant chez une sœur de M. de Chateaubriand, avec trois gros volumes de ses œuvres sous ses petits bras.

2062. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

S’il a rappelé une fois dans une parenthèse que l’amiral Coligny était son cousin, cela se change en sublime, au lieu de paraître un simple trait de vanité.

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