Il n’admet pas davantage l’abus et l’excès dans la vie intellectuelle. […] Le scrupule intellectuel était trop fort chez lui. […] Il l’est, mais d’une intelligence qui n’a rien d’intellectuel. […] Il n’y a pas, il n’y a jamais eu d’Européanisme intellectuel. […] Celui qu’ont inventé d’autres travailleurs, intellectuels ceux-là.
Les individus diffèrent beaucoup moins les uns des autres par leurs besoins économiques que par leurs besoins sentimentaux, intellectuels et moraux. […] Les travailleurs intellectuels sont aussi à plaindre que les travailleurs manuels. […] De là ce fait que la valeur intellectuelle, la plus individualisée de toutes, est généralement méprisée de la masse. […] La production intellectuelle sera dépréciée au profit de la production matérielle. […] Le fonctionnaire, l’intellectuel moderne en sont des exemples.
Cela tendrait à démontrer que l’activité intellectuelle de M. […] L’on voit ainsi que le moraliste, en lui, comme l’intellectuel, est encore passif. […] France avait su ou voulu brider sa pensée, et ne lui demander qu’un moindre effort, ou plus d’audace réfléchie que de dilettantisme, sans doute n’eussions-nous eu aujourd’hui qu’à nous empresser de voir en lui, à côté de l’écrivain de race, un intellectuel sincère et digne d’estime. […] France est intellectuel, avec maîtrise et avec allure, et combien son incomparable art d’écrivain en reçoit de précieux éclats, et combien il sait mettre en œuvre son talent ! […] Faut-il donc désespérer d’épurer nos instincts, d’en retenir les incessants débordements, et croire que, fussions-nous héroïques, nous ne saurons jamais faire que quelque chose d’eux ne demeure en la substance de nos formes intellectuelles !
Partout l’éveil des sens se fait sentir dans notre littérature jusque-là tout intellectuelle. […] Par un chemin tout opposé, par l’intensité de la vie intellectuelle, on est conduit au même point. […] La vie sensuelle et la vie intellectuelle ont besoin d’être illuminées, réchauffées par la participation du cœur. […] Alors commence le règne de la musique, où l’on savoure le maximum de puissance émotionnelle uni au minimum de détermination intellectuelle. […] Mme du Deffand, qui a connu toutes les excitations de la vie sensuelle et de la vie intellectuelle, agonise dans l’ennui le plus aigu, le plus douloureux dont jamais âme humaine ait été torturée.
Ils constituent, pour l’humanité civilisée, des possibilités permanentes d’excitation intellectuelle ou sentimentale. […] Dans l’ordre intellectuel, comme dans l’ordre moral, c’est contre soi-même d’abord qu’il faut savoir être libre. […] Il y a, Messieurs, vous le savez, dans le travail scientifique, un principe d’unité intellectuelle. […] La science est humaine, mais comme elle tend à faire l’unité intellectuelle de l’humanité, la science aussi concourt à maintenir et à restaurer l’unité intellectuelle des nations. […] Tous les hommes d’un même pays qui participent à l’esprit scientifique affermissent par là l’unité intellectuelle de leur patrie.
Je crois qu’il y a dans les âmes du XIXe siècle tout autant de besoins intellectuels que dans celles d’aucune autre époque, et je tiens pour certain qu’il n’y a jamais eu autant d’esprits ouverts, à la critique. […] En conclura-t-on que ce dernier siècle fut mieux partagé sous le rapport de l’activité intellectuelle ? […] La culture intellectuelle, la recherche spéculative, la science et la philosophie, en un mot, ont la meilleure de toutes les garanties, je veux dire le besoin de la nature humaine. […] D’ailleurs, l’activité, qui, en apparence ne se propose pour but qu’une amélioration matérielle, a presque toujours une valeur intellectuelle. […] La tendance des classes pauvres au bien-être est juste, légitime et sainte, puisque les classes pauvres n’arriveront à la vraie sainteté, qui est la perfection intellectuelle et morale, que par l’acquisition d’un certain degré de bien-être.
Parmi les choses intellectuelles qui sont toutes également saintes, on distingua du sacré et du profane. […] Ce serait sans doute porter ses espérances sur l’avenir de l’humanité au-delà des limites respectées par les plus hardis utopistes que de penser que l’homme individuel pourra un jour embrasser tout le champ de la culture intellectuelle. […] Mais ce qui pourra devenir possible dans une forme plus avancée de la culture intellectuelle, c’est que le sentiment qui donne la vie à la composition de l’artiste ou du poète, la pénétration du savant et du philosophe, le sens moral du grand caractère, se réunissent pour former une seule âme, sympathique à toutes les choses belles, bonnes et vraies, et pour constituer un type moral de l’humanité complète, un idéal qui, sans se réaliser dans tel ou tel, soit pour l’avenir ce que le Christ a été depuis dix-huit cents ans un Christ qui ne représenterait plus seulement le côté moral à sa plus haute puissance, mais encore le côté esthétique et scientifique de l’humanité. […] La vie des hommes de génie présente presque toujours le ravissant spectacle d’une vaste capacité intellectuelle jointe à un sens poétique très élevé et à une charmante bonté d’âme, si bien que leur vie, dans sa calme et suave placidité, est presque toujours leur plus bel ouvrage et forme une partie essentielle de leurs oeuvres complètes. À vrai dire, ces mots de poésie, de philosophie, d’art, de science, désignent moins des objets divers proposés à l’activité intellectuelle de l’homme que des manières différentes d’envisager le même objet, qui est l’être dans toutes ses manifestations.
Hugo ne peut plus concentrer son activité intellectuelle en un seul point ou en un seul ensemble. […] Cette simple mécanique intellectuelle, résumée en un conflit de deux natures, de deux passions, de deux mobiles, est la plus complexe que M. […] Elles montrent que l’organisation intellectuelle de ce poète n’est pas absolument dénuée des propriétés qui constituent le talent d’artistes d’une autre école. […] Kussmaul (Troubles du langage) expose que l’acte de parler se décompose en trois phases : l’impulsion interne, intellectuelle et émotionnelle ; l’expression intérieure ; l’expression proférée. […] Le poète dont toute l’activité intellectuelle se dépense en mots, qui use sans cesse de ces brillants faux jetons de la pensée, rie pourra s’empêcher de voir les choses aussi démesurées que les paroles qui les magnifient.
Quoique cette première forme de la philosophie théologique se retrouve avec évidence dans l’histoire intellectuelle de toutes nos sociétés, elle ne domine plus directement aujourd’hui que chez la moins nombreuse des trois grandes races qui composent notre espèce. […] Mais cette transformation décisive, quoique de plus en plus urgente, a dû rester jusqu’ici essentiellement impossible, faute d’une philosophie vraiment propre à lui fournir une base intellectuelle indispensable. […] Ainsi, l’empirique expédient suggéré par le vain désir de maintenir, à tout prix, l’antique régime intellectuel, ne peut finalement aboutir qu’à laisser indéfiniment dépourvus de toute doctrine morale la plupart des esprits actifs, comme on le voit trop souvent aujourd’hui. […] Ce nouveau régime mental dissipe spontanément la fatale opposition qui, depuis la fin du Moyen Âge, existe de plus en plus entre les besoins intellectuels et les besoins moraux. […] Mais cette juste reconnaissance ne saurait aller jusqu’à prolonger artificiellement ce régime initial au-delà de sa destination provisoire, quand l’âge est enfin venu d’une économie plus conforme à l’ensemble de notre nature, intellectuelle et affective.
L’état policé est un fait intellectuel, et non un fait mécanique ou métallurgique. […] Il nous faut maintenant chercher les preuves de la loi de constance intellectuelle dans le domaine proprement intellectuel. […] L’idée de constance intellectuelle ne doit pas se comprendre au sens de continuité intellectuelle ; la ligne de la civilisation est une ligne ondulée dont les sommets sont sensiblement égaux de même que les profondeurs. […] La constance est au fond de tout, dans les lois physiques comme dans les lois intellectuelles. […] Les grands événements intellectuels modifient la civilisation et la civilisation modifie les tendances de l’intelligence ; ainsi s’accomplit l’évolution intellectuelle.
L’homme idéal, celui qui viendra à la fin des temps, comme il saura et concevra également toutes choses, n’aura sans doute presque plus de personnalité intellectuelle ; et il n’aura que des passions, des vices et des travers fort atténués. […] Bourget, l’histoire de sa propre formation intellectuelle et morale. […] Ce qu’il y a d’abord d’éminent en lui, c’est précisément cette curiosité intellectuelle et sentimentale, cette aptitude et aussi cette application à connaître, éprouver et comprendre les états d’âme les plus récents, tels qu’ils se manifestent dans les livres de nos écrivains les plus originaux. […] L’aristocratie intellectuelle a pour rançon une sensibilité douloureuse à toutes les vulgarités de la vie réelle. […] Armand de Querne, c’est l’homme d’aujourd’hui, un homme qui a conçu et éprouvé tous les états d’âme analysés dans les Essais et qui résume en lui toute la distinction morale et intellectuelle où s’est élevé l’effort des deux dernières générations.
Renan On peut douter, après une première lecture, qu’il y ait quelque sérieux bénéfice intellectuel à retirer de la Correspondance de Renan avec sa sœur Henriette. […] Cette correspondance pose avec une ingénuité émouvante le problème d’un jeune garçon du peuple, empêché par sa condition précaire et par des complications familiales, qui veut assurer son développement intellectuel. […] Ce que nous aimons avec respect, dans ses premiers épanchements, c’est la force de sa curiosité intellectuelle et sa puissance d’enivrement cérébral. […] Nul des sentiments que nous connaissons à Ernest Renan ne nous permet de le considérer comme ayant accepté le catholicisme à un instant quelconque de sa vie intellectuelle.
Suivant eux, les circonvolutions du cerveau, siège des facultés intellectuelles et morales, se manifesteraient extérieurement par des protubérances, vulgairement appelées bosses, qui peuvent servir à juger de l’intérieur par l’extérieur. […] Aussi les anatomistes qui, avec Desmoulins, voyaient dans le développement des circonvolutions les indices du progrès intellectuel voulaient-ils simplement dire que plus il y a de circonvolutions, plus il y a de matière cérébrale dans un espace donné, il n’y a pas là toutefois cette délimitation précise qui permet de distinguer un organe d’un autre. […] D’autres faits non moins graves déposent contre la localisation des facultés intellectuelles dans les parties antérieures du cerveau : c’est d’abord le fait signalé par M. Lélut, à savoir, que cette partie du cerveau est égale chez les idiots à ce qu’elle est chez les autres hommes ; ce sont enfin de nombreux cas pathologiques d’où il résulte que les mêmes troubles intellectuels peuvent se produire, dans quelque partie du cerveau qu’ait eu lieu la lésion soit en avant, soit en arrière, soit sur les côtés. […] Enfin l’on cite de nombreux cas de lucidité intellectuelle coïncidant avec les lésions de la partie antérieure du cerveau.
Appauvrissement et raffinement de la langue : langue intellectuelle, scientifique plutôt qu’artistique. […] La langue est une algèbre, il ne s’agit que de rendre les signes et les formules aussi commodes que possible à tous les usages intellectuels. […] Le résultat de ce travail fut un système de signes réduits au nombre minimum, mais merveilleusement précis, clairs, aptes à fournir une infinité de combinaisons ; et la qualité du style sera précisément équivalente à la valeur intellectuelle de ces combinaisons. […] Bouhours, type accompli de la délicatesse intellectuelle et de l’inaptitude artistique de la société polie, la langue s’enrichit parfois en se dépouillant. » De quoi s’était-elle dépouillée en effet ? […] Comme après tout il est impossible de vider les mots de toute qualité sensible, comme ils restent sons, et recèlent toujours quelque possibilité d’image, de grands poètes, de grands artistes sauront organiser ce langage intellectuel selon la loi de la beauté, ils en exprimeront des formes esthétiques ; mais il en est d’autres, et non les moins grands, qui refuseront de souscrire aux arrêts de l’Académie, et qui, pour épancher leur riche imagination, iront rechercher les éléments d’un plus copieux et substantiel langage.
Toute œuvre, du reste, et c’est le cas pour la peinture, ne manifeste guère ces caractères intellectuels : le raisonnement juste ou fautif, le jugement sain ou faux, la faculté forte ou faible de généralisation, etc. […] Les âmes qui retrouvent en cette œuvre leur âme, l’admirent, se groupent autour d’elle et se séparent des hommes d’âme diverse… En d’autres termes (remarquons la fin de ce paragraphe), la série des œuvres populaires d’un groupe donné écrit l’histoire intellectuelle de ce groupe, une littérature exprime une nation, non parce que celle-ci l’a produite, mais parce que celle-ci l’a adoptée et admirée, s’y est complue et reconnue. » En ces quelques lignes se trouvent exprimées une doctrine et une méthode, qui ne marchent pas nécessairement ensemble. […] Mais à négliger, ici surtout, les caractères extérieurs, et à retirer, en quelque sorte, les données physiologiques des données intellectuelles, on courrait le risque d’établir une description de peuples sans racines dans le sol qui les nourrit, sans filiation entre eux, et peu s’en faut incorporels. […] Ou, plus justement peut-être, l’homme intellectuel et l’homme moral, un peu de l’un, un peu de l’autre. […] Une psychologie des peuples, est-il besoin de le faire remarquer, exigerait, outre la connaissance des événements artistiques, matière de l’esthopsychologie, celle des événements économiques, juridiques (moraux, religieux) et intellectuels (développement des sciences, etc.).
C’est une crise purement intellectuelle qui fit sortir Renan du séminaire. […] Il avait souvent exprimé le vœu de mourir sans souffrances physiques et sans affaiblissement intellectuel. […] Au point de vue intellectuel, on retrouve en lui l’influence des divers milieux qu’il a fréquentés. […] Par elle il retrouva tout ce qui était nécessaire à sa vie intellectuelle et morale. […] L’âme humaine naît innocente et contient en elle les éléments de tout développement intellectuel et moral.
Par contre, le contenu intellectuel est la copropriété de l’expéditeur et de celui à qui la lettre est adressée. […] J’ai dit combien les tribunaux comprennent peu les questions intellectuelles. […] C’est toute la question de la propriété intellectuelle qui est à remettre en question. […] Ses intérêts pécuniaires comme ses intérêts intellectuels primordiaux sont totalement méconnus. […] Ainsi l’intellectuel lègue à la société les biens les plus précieux qu’il possède et qu’elle dilapide en barbare.
On vous l’a dit avec une parfaite raison : la culture rationnelle de l’esprit, le perfectionnement de l’être intellectuel et moral ne s’improvisent pas. […] La barbarie n’aura jamais d’industrie savante, de forte organisation politique ; car tout cela suppose une grande application intellectuelle. Or la barbarie n’est pas capable d’application intellectuelle. […] Ce n’est pas de nos jours, assurément, que ce privilège de la culture intellectuelle a commencé.
Mais au-delà des ressemblances d’humeur, si l’on veut saisir la filiation intellectuelle, on se trouve singulièrement embarrassé. […] Notre nation, ce me semble, est moins sensible que sensuelle et moins sensuelle qu’intellectuelle : plus capable d’enthousiasme que de passion, peu rêveuse, peu poétique, médiocrement artiste, et, selon le degré d’abstraction et de précision que comportent les arts, plus douée pour l’architecture que pour la musique, curieuse surtout de notions intelligibles, logicienne, constructive et généralisatrice, peu métaphysicienne ni mystique, mais positive et réaliste jusque dans les plus vifs élans de la foi et dans les plus aventureuses courses de la pensée. […] Race plus raisonnable que morale, parce qu’elle est gouvernée par la notion du vrai plutôt que du bien, plus facile à persuader par la justice que par la charité ; indocile, même quand elle est gouvernable, tenant plus à la liber té de parler qu’au droit d’agir, et encline à railler toujours l’autorité pour manifester l’indépendance de son esprit : elle a le plus vif sentiment de l’unité, d’où vient que la tolérance intellectuelle lui est peu familière, et qu’elle est moutonnière, esclave de la mode et de l’opinion, mais tyrannique aussi, pour imposer à autrui la mode et l’opinion, chacun voulant ou penser avec tout le monde ou faire penser tout le inonde avec soi.
Ce duel intellectuel souvent interrompu par des journées révolutionnaires, recommençait toujours. […] — Centre intellectuel. — MM. […] Frayssinous dut conformer son enseignement à l’état intellectuel et moral de son auditoire. […] Tableau du monde intellectuel au début de la restauration. […] Sa vie intellectuelle est de tous les jours.
Autrefois il y avait centralisation intellectuelle et décentralisation matérielle. […] Parfaite anarchie morale et intellectuelle du reste. […] Elle a été un ferment intellectuel et moral très puissant. […] Son éducation intellectuelle me paraît avoir été faible. […] Enfin, il faut savoir quelle a été l’éducation intellectuelle de Ballanche.
Cette loi est sans exception ; car quelle que soit la supériorité relative des hommes élus à titre d’intelligence dans un corps intellectuel, c’est une loi de la nature que l’empire y appartient toujours à la médiocrité. […] et en n’achevant pas cette généreuse tentative de rénovation du monde intellectuel, moral et politique. […] Sa cause ne fut point dans des hasards ; elle fut dans une pensée : cette pensée, rapide et universelle comme tous les mouvements intellectuels de ce pays où la main est si près de la tête, s’était développée d’abord dans sa littérature. Ce pays est si intellectuel, que ses écrivains le gouvernent plus véritablement que ses ministres. […] C’est de la masse et du concours de toutes ces mesquines satisfactions matérielles que devait se recruter, pour l’action politique simultanée et collective, cette grande force motrice, capable de remuer jusque dans ses fondements le moyen âge et de faire place à l’âge intellectuel.
Saint-Bonnet ne serait pas chrétien que de nature et de physiologie intellectuelle il irait au fond des choses et creuserait les questions jusqu’au tuf. […] Saint-Bonnet est une de ces pompes intellectuelles qui vident toute question à laquelle s’applique le formidable appareil de leur cerveau. […] Devenue panthéiste sur les sommets de la pensée et socialiste dans le terre-à-terre de la pratique et de la réalité, cette révolution intellectuelle qui fait l’intérim de la révolution politique en attendant son retour, est pour M. […] Du reste, le remède proposé par notre pathologiste intellectuel est bien simple. […] elles ne le sont plus, aux esprits sévères qui croient aujourd’hui la foi et la civilisation perdues, si on ne refait pas l’homme dans son germe, c’est-à-dire dans son existence intellectuelle.
La tendance inhérente à l’appétition est-elle de nature tout intellectuelle. — II. […] Maintenant, la tendance intérieure à l’idée et au désir est-elle de nature tout intellectuelle, et consiste-t-elle simplement dans une tendance à la clarté, à la plénitude de conscience ? […] Mais est-il vrai de soutenir avec Herbart que la tendance tout intellectuelle de l’idée à la clarté précède l’appétition et soit la cause de l’appétition même ? […] Mais le désir complet n’est pas purement intellectuel, il ne suffit pas qu’une idée quelconque s’élève dans la conscience pour être vraiment elle-même désirée. […] Toute idée peut donc avoir une double force, 1° une force comme acte de représentation, qui fait qu’elle tend à croître par cela seul qu’elle est, car toute représentation comme telle, même d’un objet pénible, est un exercice d’activité intellectuelle tendant à se maintenir ; 2° une force comme sentiment, comme dépression ou surcroît de notre activité totale, non plus seulement de notre activité intellectuelle.
Comment le moi intellectuel et rationnel est un moi social. — 3. […] Même dans nos rapports avec les animaux, nous subissons encore une logique commune, qui est plutôt, il est vrai, sensitive qu’intellectuelle : le commerce avec les animaux, amis ou ennemis, n’en est pas moins une interprétation de signes, conséquemment un phénomène de logique sociale. […] Le moi, d’abord centre d’attraction sensitive et appétitive, deviendra ainsi un centre d’attraction intellectuelle. […] L’idée du moi exercera donc une attraction irrésistible, au point de vue intellectuel comme au point de vue sensitif et appétitif. […] La conséquence finale est la survivance, par hérédité, des cerveaux qui aboutissent le mieux à la formation de cette image intérieure, de ce foyer intellectuel et appétitif : le moi.
Dans l’ordre matériel, réimprimer les anciennes œuvres est un fait qui correspond à la reproduction des anciennes formes dans l’ordre intellectuel et artistique. […] Échappant aux règles du goût par l’excentricité même de sa nature intellectuelle, — car c’est un excentrique que Mercier, et il a je ne sais quoi dans l’esprit qui rappelle la bizarrerie de certaines imaginations anglaises, — méconnaissant l’autre règle de la vie, plus importante que le goût, c’est-à-dire la religion, qui, en nous éclairant le cœur, fait monter la lumière jusqu’à la pensée, Mercier s’adapte exactement à l’époque qu’il a plutôt inventoriée que peinte. […] mais il faut dire qu’il y a vingt ans2 à peu près (étaient-ce les dernières flammes, plus vives de leur agonie, de notre crépuscule intellectuel ?
Mais ce qu’on cherche et ce qu’on désire, ce qui est nécessaire pour que la littérature d’un peuple se soutienne, pour que son niveau intellectuel ne s’abaisse pas, c’est la continuité dans l’effort, c’est la succession dans les œuvres, ce sont les noms nouveaux, des noms jeunes, à auspices favorables, pour remplacer les noms éteints et les talents fatigués. […] Mais, on n’a pas besoin de le dire, Lerminier comme Rémusat, quelle que soit l’énergie intellectuelle qu’ils possèdent encore, appartiennent tous les deux à un mouvement d’idées qui eut son jour, à une phase littéraire et philosophique qu’on peut regarder comme fermée, et à laquelle, nous le répétons, on ne voit rien succéder. […] Dans l’ordre matériel, réimprimer les anciennes œuvres est un fait qui correspond à la reproduction des anciennes formes dans l’ordre intellectuel et artistique.
Les occupations mécaniques calment la pensée en l’étouffant, l’étude, en dirigeant l’esprit vers des objets intellectuels, distrait de même des idées qui dévorent. […] Plusieurs écrivains se sont servis des raisonnements les plus intellectuels pour prouver le matérialisme ; mais l’instinct moral est contre cet effort, et celui qui attaque avec toutes les ressources de la pensée la spiritualité de l’âme, rencontre toujours quelques instants où ses succès même le font douter de ce qu’il affirme. L’homme donc qui se livre, sans projet, à ses impressions, reçoit par l’exercice des facultés intellectuelles un plus vif espoir de l’immortalité de l’âme. […] Toutes les époques de la vie sont également propres à ce genre de bonheur ; d’abord, parce qu’il est assez démontré par l’expérience, que quand on exerce constamment son esprit, on peut espérer d’en prolonger la force ; et parce que, dut-on ne pas y parvenir, les facultés intellectuelles baissent en même-temps que le goût qui sert à les mesurer, et ne laissent à l’homme aucun juge intérieur de son propre affaiblissement.
Unité du développement intellectuel de Pascal. […] Et c’est ce qui le rendra propre à représenter dans le siècle l’esprit de toute la religion, c’est ce qui en fera l’adversaire par excellence et la barrière du libertinage intellectuel et moral. […] Ils contribuèrent ainsi très sensiblement à élever le niveau intellectuel de leur époque. […] A ce seul titre, le jansénisme occuperait une grande place dans le mouvement intellectuel du xviie . […] Il n’y a pas eu de rupture dans sa vie intellectuelle : il y a eu une évolution continue, au terme de laquelle il a tout quitté pour suivre Jésus-Christ.
L’être vivant a donc, au fond de toutes ses perceptions, la perception essentielle de son organisme, et c’est sur ce fond de tableau sensitif, nullement intellectuel, que viendront se dessiner et se détacher les diverses sensations. […] L’intensité est une sorte de concentration, l’extension est une sorte d’expansion ; l’un n’est pas plus intellectuel en soi que l’autre. […] Elles supposent des éléments particuliers et détachés, tels que les sensations, qu’on groupe ensuite selon des lois intellectuelles, soit celles de l’association, soit celles de la « pensée pure ». […] Dans tout cela, il y a des sensations et des réactions motrices, mais aucune intervention de principes intellectuels et a priori. […] Selon nous, il y a aussi un fait actif de désir naissant, sous la forme d’impulsion simplement intellectuelle ; l’attention, encore une fois, est le désir intellectuel, la volonté provisoire de percevoir, pour savoir en quel sens définitif il faudra vouloir et mouvoir.
Du point de vue même de cette interprétation purement intellectuelle de l’existence phénoménale, il faut donc faire place à la tendance de l’être humain qui s’exprime en ce vœu : fonder son bonheur sur la sensation. […] Les bienfaits provisoires, mais immédiats, apportés à tout moment de l’évolution historique, et en toutes occasions, par l’industrie de l’intelligence, expliquent suffisamment que l’humanité ait considéré la connaissance comme un moyen d’améliorer la vie, et bien que la plus grande part des développements précédents aient eu pour objet de faire voir eu cette croyance une illusion, il n’y a pas lieu, du point de vue intellectuel, de penser que cette illusion puisse disparaître. […] Dans cette hypothèse, la haute antiquité de ces notions primordiales, leur durée considérable, le nombre infini de connaissances secondaires qu’elles soutiennent, seraient les seules causes qui les garantiraient contre la possibilité d’une dissociation ; elles ne tiendraient plus leur autorité d’une loi inhérente à la nature des choses, mais elles la recevraient d’une considération d’utilité intellectuelle. […] Les vérités scientifiques nous apparurent les dernières venues parmi les créations de l’utilité intellectuelle, elles nous montrèrent aussi, sous leur aspect provisoire de vérités successives, leur valeur purement transitoire, leur caractère de moyen pour atteindre des conceptions nouvelles et des représentations plus complexes. […] Aussi les esprits curieux d’assister à cette genèse et à cette agonie des vérités réputées absolues trouveront-ils au cours de ces pages à se satisfaire pleinement : dans le milieu historique ils verront, en de multiples exemples, se joindre ensemble dans un but d’utilité, intellectuelle ou vitale, des éléments idéologiques qu’une utilité différente montrera bientôt désunis.
Dans un autre temps qu’à une époque où la production intellectuelle se répand d’autant sur le marché qu’elle est plus inconsistante et plus lâche, l’œuvre de Léon Gozlan, composé d’une vingtaine de volumes, sans compter ses pièces de théâtre, pourrait sembler considérable ; mais nous sommes trop accoutumés à ce prétendu tour de force de la production toujours prête, qui n’est guères plutôt qu’une preuve de faiblesse, pour admettre que vingt volumes in-18, dans une vie tout entière, dans un remuement de plume qui dura trente-cinq ans, soit quelque chose de bien imposant par son ensemble et par sa masse. […] C’est un Benvenuto Cellini littéraire ; mais qui dit littéraire dit un Benvenuto bien autrement compliqué et profond qu’un simple Benvenuto plastique… Par la précision, la torsion, le mordant du mot, Léon Gozlan a des consanguinités avec Théophile Gautier, qui a cru faire une belle chose de dédoubler l’art intellectuel d’écrire et de le descendre presque au niveau d’un art plastique. […] Eh bien, dans l’ordre de la pensée pure appliquée, la Critique, comme l’Histoire, doit étager les grandes aptitudes intellectuelles avec la même rigueur et suivant la même loi ! […] Or, justement, ce sont ces trois esprits, c’est cette triplicité intellectuelle qu’avait Balzac dans sa fonction spéciale et son cadre de romancier. […] Si vous étudiez Gozlan à la clarté des œuvres de Balzac, ne vous semble-t-il pas comme la femelle intellectuelle de ce mâle ?
C’est le phénomène moitié matériel, moitié intellectuel, de la translation de la pensée de l’un dans l’esprit de l’autre, ou de la pensée d’un seul dans l’esprit de tous. […] « Avec cette révélation probable de la parole parlée, ou de la langue innée, est née aussi la première littérature du genre humain, autrement dit l’expression de l’humanité par la parole ; c’est-à-dire encore le seul lien intellectuel possible entre les hommes, c’est-à-dire enfin cette société intellectuelle d’où devait découler et se perpétuer l’esprit humain. » …………………………………………………………………………………………………… L’homme est donc un être qui a besoin de s’exprimer au dedans et au dehors pour être un homme, et qui n’est un homme complet qu’en s’exprimant. […] Nous prendrons en main tour à tour une de ces œuvres, nous en traduirons les principaux textes, en faisant goûter les beautés et en indiquant les imperfections, et nous nous rendrons compte ainsi des trésors d’intelligence, de sagesse et de génie que possède l’homme intellectuel au temps où nous vivons.
Quelque chose d’analogue se produit dans la genèse des idées : nous commençons par penser à la manière des animaux, avant de penser à la manière humaine ; nous réalisons, pour les dépasser, les diverses phases de leur évolution intellectuelle. […] Mais, selon nous, une troisième théorie des idées est possible : c’est celle qui, sous l’opposition du sujet pensant et du sujet pensé, chercherait une unité plus profonde, une action commune à l’esprit et aux choses, un processus universel dont la « représentation intellectuelle » est un moment et une manifestation incomplète. […] Il oppose violemment la « représentation » intellectuelle à la « volonté » aveugle et inintelligente sans en montrer le lien ; il déclare même ce lien absolument « inexplicable ».
Il est aussi difficile de circonscrire dans un corps vivant une émotion morale, esthétique ou autre, que d’y circonscrire de la chaleur ou de l’électricité ; les phénomènes intellectuels ou physiques sont essentiellement expansifs ou contagieux. […] La société religieuse, la cité plus ou moins céleste est l’objet d’une conviction intellectuelle, accompagnée de sentiments de crainte ou d’espérance ; la cité de l’art est l’objet d’une représentation intellectuelle, accompagnée de sentiments sympathiques qui n’aboutissent pas à une action effective pour détourner un mal ou conquérir un bien désiré.
Alexandre de Humboldt rassemble des matériaux précieux pour toutes les sciences naturelles, il ne néglige point ceux qui peuvent enrichir les sciences intellectuelles. […] William Jones nous ouvrent les trésors de cette sorte de cosmogonie intellectuelle et morale qui est toute dans les langues. […] La société des êtres intelligents subsiste par les idées morales et intellectuelles que la parole y a semées. […] J’arrive donc enfin à cette conclusion que j’avais annoncée : Le christianisme a été une première émancipation du genre humain, dans l’ordre moral ; l’extension des limites de la liberté morale par l’affranchissement des liens de la parole est une seconde émancipation, dans l’ordre intellectuel.
Points d’appui purement intellectuels, du reste. […] Et le lit resta toujours vide… Symbole charmant de son intellectuelle destinée ! […] Dans l’ordre intellectuel, il ne fut réellement rien de fort ni même d’assez charmant pour faire oublier son manque de force. […] l’aurea mediocritas intellectuelle qui suffit dans la vie pour être heureux, disait Horace, et qui suffit aussi, à ce qu’il paraît, pour être heureux en fait de renommée, — : et, naturellement, elle le dit.
C’est là l’erreur de ces Guèbres modernes du feu intellectuel, inextinguible et toujours croissant en lumière. […] dans un temps où la décadence intellectuelle et morale marche en sens inverse du progrès matériel et industriel ? […] Il y a cette intermittence, cette alternative, cette jeunesse et cette vieillesse, cette fin et ce recommencement qui sont la condition et la loi de toutes choses intellectuelles ou matérielles. […] — Dans les révolutions intellectuelles, disent-ils, ces grandes perturbations du monde. — Mais les révolutions intellectuelles, au contraire, ne sont-elles pas les secousses que l’esprit humain se donne à lui-même pour enfanter dans le travail et dans la douleur ce qu’il porte en lui ? […] Tâtez le pouls du monde intellectuel, et dites s’il est prêt à mourir.
Un autre stigmate intellectuel des dégénérés est leur émotivité. […] A ces modifications intellectuelles répondent des modifications physiques. […] Ce trouble occasionne des anomalies de la vie intellectuelle sur lesquelles je m’étendrai dans le livre suivant. […] Au moyen âge, l’Allemagne avait eu une brillante période de force et de floraison intellectuelle. […] Il est le plus curieux phénomène de la vie intellectuelle de la France contemporaine.
La méditation intellectuelle est donc l’opposé de l’aliénation. […] Il faut conclure qu’on n’a trouvé aucun rapport précis entre la constitution et la supériorité intellectuelle, et que, jusqu’à nouvel ordre, il est permis de penser que le génie n’est pas une maladie. […] En outre, j’admets que l’abus du travail intellectuel puisse amener la folie (quoique cela soit très rare quand il n’y a pas de cause concomitante). […] Est-ce à dire que le travail intellectuel soit une névralgie ? […] Pour lui, folie, hallucination, idiotisme, scrofules, rachitisme, surdité, mutisme, cécité, morts subites, apoplexies, paralysies, tics nerveux, ivrognerie, etc., tous ces phénomènes sont des prédispositions héréditaires qui peuvent donner naissance, par la transmission, à la supériorité intellectuelle.
J’ai ouï dire que ce fut assez tard que Philarète Chasles reçut le baptême ; mais le baptême n’efface que le péché originel dans l’homme, il ne remplace pas l’éducation chrétienne qui fait les seuls forts dans l’ordre moral comme les seuls voyants dans l’ordre intellectuel. […] Je sais où sont ses préférences, ses passions, ses amours intellectuels, mais ses convictions ? […] Ce radieux Arlequin intellectuel, qui avait beau être critique et professeur se retrouvait toujours Arlequin, et jouait de la batte de son esprit avec de si brillants et de si gracieux moulinets, regrettait que cette batte ne fût pas le sceptre qu’on aurait respecté, s’il avait pesé davantage. […] Chasles, élevé comme un chien, mais comme un chien savant, par un père athée et régicide, avait de par la nature intellectuelle de son esprit résisté à cette éducation abominable, et il resta toujours élevé, sinon pur, dans toutes les intempérances et les débauches de la pensée littéraire. […] Ils ont des parentés intellectuelles.
Cette conscience successive et partielle de nos souvenirs est leur reconnaissance, et c’est l’opération vraiment caractéristique de la mémoire intellectuelle. […] Puis, quand la voie est ouverte, la conscience ne sent presque plus que les bords du lit où coule le courant nerveux : la forme intellectuelle tend à remplacer le fond sensible ; c’est le second moment de l’évolution. […] La mémoire intellectuelle est un ensemble de signes au moyen desquels la conscience arrive à renouveler les idées par leurs contours sans renouveler les émotions et efforts qui en occupaient primitivement le fond. […] Tous les actes de la vie physique ou intellectuelle, disent-ils, tendent à se faire d’une façon automatique, et c’est en cela même que consiste le progrès. Si les opérations intellectuelles pouvaient devenir aussi automatiques que celles de la vie organique, ajoutent-ils, elles seraient bien supérieures à ce qu’elles sont maintenant.
Où l'Orateur se plaît sur-tout à nous promener, c'est dans le monde physique, dans le monde moral, le monde politique, le monde intellectuel…… Le plus doux de ses plaisirs est d'imprimer le respect, d'imprimer la crainte, d'imprimer à, d'imprimer sur, d'imprimer au dedans, d'imprimer au dehors…… Si nous le suivons dans des phrases de plus longue haleine, il nous dira d'abord que les passions, comme un limon grossier, se déposent insensiblement en roulant à travers les Siecles, & la vérité surnage ; que la Nature varie par des combinaisons infinies les facultés intellectuelles de l'homme, comme les propriétés des êtres physiques *. […] De ce monde intellectuel, l'histoire le ramene au sein de l'Univers. […] Fidele à ses engagemens, malgré toutes les réactions, il s'est persévéramment tenu renfermé dans les formes intellectuelles & les forces combinées de son style, & s'est élevé même au dessus du niveau de son immense génie, dans son Essai sur le caractere, les mœurs, & l'esprit des Femmes.
. — Élément intellectuel. — la rêverie. […] La rêverie se caractérise par l’absence d’effort intellectuel. […] Il y a des types intellectuels très divers. […] Mais cela exigerait d’eux un labeur intellectuel, incompatible avec l’effet poétique. […] Bergson, l’effort intellectuel.
Car autre chose est la différenciation sociale ; autre chose la « différence » intime et profonde entre individus : je veux dire la différence intellectuelle et sentimentale, la différence d’âmes. […] Ce mélange peut paraître difficilement intelligible à qui regarde les choses du point de vue de la pure logique intellectuelle, de la logique fondée sur le principe de contradiction. Mais les règles de la logique intellectuelle ne s’appliquent pas à l’esprit de groupe. […] Il y a là une improbité intellectuelle qui est comme l’étoffe spirituelle dont sont faites les opinions et les croyances collectives. […] Toutes ces idéologies sont unitaires : elles ont pour but de faire croire à l’unité intellectuelle, morale, politique, juridique, de l’espèce humaine ; à l’unité d’intérêts, de droits et de valeur morale des individus humains.
Comme celui de Poe, il est également apte à la construction d’œuvres tangibles et saisissantes et à la spéculation abstraite, conciliation naturelle chez lui, et si difficile aux autres esprits : c’est l’intellectuel complet. […] Ce qu’il en a esquissé présage un métaphysicien peut-être inattendu de l’Europe intellectuelle, un surprenant continuateur de la philosophie imagée et artiste de Carlyle. […] L’enthousiaste Mirbeau l’approche à tort de Shakespeare, avec qui il n’a nulle affinité intellectuelle.
Si sa mère objecte que la littérature est « mal vue », et constituera peut-être à son « établissement » futur un empêchement rédhibitoire, le père réplique qu’il faut savoir vivre avec son siècle, que la plume est un riche instrument quand on est malin comme le petit, que les histoires de littérateurs de brasserie sont des contes à dormir debout, que la Société des Gens de lettres est le plus beau des syndicats « parce qu’il est intellectuel », et que son garçon, doué certes du talent de M. […] Les cerveaux impatients de logique verbale, amateurs de catalogues, qui veulent tout inscrire en accolade de catégories et rubriques intellectuelles, pourront distribuer en d’autres cadres ce qu’on juxtaposait dans cette enveloppe flasque. […] Cette prostitution intellectuelle est inélégante.
Une autre différence encore qu’il faut noter entre ces dîners, dont probablement un 1858 ne sortira pas, et les banquets dont 1848 est sorti, c’est que les dîneurs intellectuels d’aujourd’hui ont sur les orateurs politiques d’autrefois l’avantage d’être beaucoup moins longs, puisqu’ils ne sont tenus qu’à un mot. […] Le fondateur des Dîners littéraires, à bon mot et à dix francs, n’est pas seulement un professeur d’hygiène intellectuelle aussi simple que cet ivrogne de Sheridan, qui disait : « Quand la pensée est lente à venir, un verre de bon vin la stimule, et quand elle est venue, un verre de vin la récompense », c’est un homme plus profond que cela : il connaît son temps et sait jouer du vice de son temps. […] Nous ne disons pas que le résultat intellectuel est le premier de tous.
Mais, d’autre part, il quitte le milieu intellectuel qu’il s’est choisi, auquel il s’est adapté, où la liberté d’esprit est absolue (du moins il le croit), où les préoccupations sont purement abstraites (du moins s’il en est de matérielles, comme il en ressent l’importance, il les excuse), et cette atmosphère, inférieure selon lui, où il se plonge, est encore faite plus médiocre par cette besogne monotone d’examiner des jeunes gens, et par la nécessité de se mettre en relations avec des fonctionnaires de toute sorte. […] Taine, qui vit dans un petit milieu d’artistes, de penseurs, d’intellectuels, éprouve, à chaque fois qu’il se trouve en contact avec le « philistin », ce même mouvement d’horreur que ressentirent les Gautier et tous les poètes romantiques, les G. […] Mais ce qu’on peut constater dès maintenant, et la constatation contredit d’une façon piquante le préjugé où nous vivons sur l’audace des esprits élevés, c’est que depuis le grand mouvement industriel et commercial qui transforme l’Europe, il y a presque constamment en France une protestation de l’élite intellectuelle (au moins du monde littéraire accrédité) contre les directions du siècle.
Dieu, qui est un très grand peintre en arabesques et en toutes autres peintures, l’a composé d’entrelacements très contrastants et très singuliers… La force, en lui, — une force intellectuelle par moments immense, — tout à coup se fond en faiblesse. […] C’est alors seulement qu’on se replie sur soi-même et qu’on admire… IV Ce chef-d’œuvre de Ludovic couvrirait de sa beauté de chef-d’œuvre, comme d’un manteau de roi tombé sur des haillons, les autres contes du recueil quand ils seraient les plus misérables pauvretés intellectuelles, ce que, d’ailleurs, ils ne sont pas… Mais il en est deux autres encore, qui nous montrent que l’inspiration d’un conteur de cette énergique invention ne s’est pas épuisée en une fois. […] C’est le crime intellectuel, qui ne s’est jamais accompli qu’au fond de la conscience, et qui sort du fond de ses enfoncements et de ses ténèbres pour devenir extérieurement, par le remords, une réalité, une épouvantante et visible réalité ! Pour le fort spiritualiste qui a pensé audacieusement un tel conte, le crime intellectuel serait aussi certain, aussi positif, aussi réprouvé que si le sang physique avait coulé des veines de la victime rêvée, et le remords et l’épouvante qu’il cause vont jusqu’à la folie et au suicide.
Tout acte intellectuel n’est qu’une impression transmise au cerveau et convertie en idée par un travail des cellules cérébrales. […] « L’obscure impression du besoin de se mouvoir inhérent au système musculaire est transformée par les cellules cérébrales en volonté, qui ensuite, au gré de l’éducation tant privée que sociale, prend toutes les complications intellectuelles et morales. […] le génie, c’est-à-dire la plus haute expression, le nec plus ultra de l’activité intellectuelle, n’être qu’une névrose ? […] Pour la volonté, il invoque l’expérience attestant tout ce qu’amène de fatigue et d’épuisement dans l’économie des forces organiques l’effort prolongé de la force volontaire, soit pour résister à l’assaut des passions, soit pour maintenir la concentration des facultés intellectuelles sur un objet donné. […] N’est-ce pas une vérité de conscience que nous sentons une espèce de violence faite à notre volonté dans le cas d’un entraînement passionné, tandis qu’au contraire nous nous sentons en parfaite possession de nous-mêmes et en plein exercice de notre pouvoir personnel dans le cas d’une pure délibération intellectuelle ?
J’ai eu entre les mains le manuscrit d’une folle, ancienne maîtresse d’écriture, qui, par une sorte de tic intellectuel et de chassé-croisé mental, confondait habituellement son diplôme et son estomac, en sorte que, lorsqu’elle voulait parler de sa gastrite, sa phrase finissait par une mention de son diplôme, et que, lorsqu’elle voulait parler de sa profession, elle arrivait à décrire sa gastrite ; nulle autre lésion ; mais, à cet endroit, deux cordons intellectuels s’étaient noués, et, quand le courant mental atteignait l’un, il entrait dans l’autre. — Rien de plus curieux que ces sortes de faits ; ils éclairent tout le mécanisme de notre pensée. […] Entre autres renseignements, nous lui devons la distinction capitale de deux groupes de centres dans l’encéphale : le premier, qui comprend la protubérance annulaire, les pédoncules cérébraux et les ganglions de la base, notamment les couches optiques, et qui est le siège des « sensations brutes » ; le second, qui comprend les lobes cérébraux proprement dits et où se fait « l’élaboration intellectuelle » de ces sensations. — À notre tour, nous pouvons lui fournir un renseignement non moins utile. En effet, les recherches qui suivent montrent en quoi consiste « l’élaboration intellectuelle ». […] Il est déjà prouvé que les grosses cellules pyramidales ne se rencontrent en grande abondance que dans les régions de l’écorce où les vivisections démontrent la terminaison d’un courant intellectuel et le point de départ d’un courant moteur : voilà une première découverte ; probablement elle en amènera d’autres
Émile Faguet, qui est évidemment le plus sérieusement intellectuel et la plus solide personne morale de tous nos critiques, s’est tiré de ce mauvais pas par la large franchise de son intelligence, qu’illumine la clarté d’un beau caractère dédaigneux des intrigues et des mesquineries de l’arrivisme. […] Les circonstances de publicité l’entravent autant que les dispositions intellectuelles du temps présent. […] Car il y a une hauteur intellectuelle où le fait de découvrir les raisons essentielles de l’association des idées équivaut à créer. […] Si, lors du mouvement symboliste, à peine terminé depuis trois ans après avoir occupé douze années, lors de cette confuse aspiration de la jeunesse française vers une réunion de tous les arts sous l’influence de Wagner et de l’internationalisme, un critique de haut sens moral s’était levé pour arrêter les polémiques inutiles et substituer la logique aux dédains des critiques et aux saillies des nouveaux venus, il aurait précisé l’un des plus curieux mouvements intellectuels du siècle, et peut-être développé deux ou trois conséquences fécondes de cette crise pleine d’intentions et de promesses ; il y avait là un rôle considérable et bienfaisant à remplir, le rôle de Heine dans le second romantisme allemand, après Schlegel et Tieck, le rôle de Baudelaire, de Gautier et de Nerval, en 1840, le rôle de Taine dans les débuts du rationalisme, le rôle de William Morris dans les tentatives de socialisation d’art qui suivirent le préraphaélisme, le rôle professoral de César Franck dans l’école symphonique après Wagner ; ce rôle, personne ne se présenta pour le tenir, et si le symbolisme a avorté, s’est restreint à un dilettantisme de chapelle alors qu’il était parti pour une bien plus grande tentative, c’est à cause des obstinées plaisanteries des critiques superficiels, à cause du manque d’intelligence logique dans l’école, autant et plus qu’à cause des défauts eux-mêmes des symbolistes. […] Et une pareille organisation, transportée à l’étranger, créerait un échange international de volumes sobres, débordants de pensée concentrée, qui enrichiraient les bibliothèques et constitueraient, à côté de la bibliographie effective, un memento intellectuel de premier ordre.
Voilà l’humanité : chaque nation, chaque forme intellectuelle, religieuse, morale, laisse après elle un court résumé, qui en est comme l’extrait et la quintessence et qui se réduit souvent à un seul mot. […] Quand on songe au vaste engloutissement de travaux et d’activité intellectuelle qui s’est fait depuis trois siècles et de nos jours, dans les recueils périodiques, les revues, etc., travaux dont il reste souvent si peu de chose, on éprouve le même sentiment qu’en voyant la ronde éternelle des générations s’engloutir dans la tombe, en se tirant par la main. […] Toute cette dépense de force intellectuelle n’est pas perdue, si ces controverses ont fourni un atome à l’édifice de la pensée moderne. […] La lecture des auteurs du XVIIe siècle est certes éminemment utile pour faire connaître l’état intellectuel de cette époque. […] L’œuvre intellectuelle cesse de la sorte d’être un monument pour devenir un fait, un levier d’opinion.
L’usage le plus répandu consiste, comme on le sait, à répartir les phénomènes intellectuels en classes, à séparer ceux qui diffèrent, à grouper ensemble ceux de même nature et à leur imposer un nom commun et à les attribuer à une même cause ; c’est ainsi qu’on en est arrivé à distinguer ces divers aspects de l’intelligence qu’on appelle jugement, raisonnement, abstraction, perception, etc. […] Entre la psychologie qui ramène les faits intellectuels à quelques facultés et celle qui les réduit à la loi unique de l’association, il y a la même différence, selon nous, qu’entre la physique qui attribue les phénomènes à cinq ou six causes, et celle qui ramène la pesanteur, la chaleur, la lumière, etc., au mouvement. […] Elle explique tous les faits intellectuels, non sans doute à la manière de la métaphysique, qui réclame la raison dernière et absolue des choses ; mais à la manière de la physique, qui ne recherche que leur cause seconde et prochaine. […] La conscience est le mode fondamental de l’activité intellectuelle. […] Un plus grand progrès a consisté à voir, comme l’a fait Davy, qu’il y a une substance métallique dans la soude et la potasse, en se fondant sur des ressemblances purement intellectuelles.
Dieu, pour me soutenir, m’avait réservé pour ce moment un vrai événement intellectuel et moral. […] La morale de Kant est bien supérieure à toute sa logique ou philosophie intellectuelle, et nos Français n’en ont pas dit un mot. […] Nouvelles sources de peines intellectuelles excessivement vives, et auxquelles je suis actuellement en proie ; car c’est pour moi un supplice de me spécialiser, et, de plus, nulle spécialité ne cadre parfaitement avec les divisions de mon esprit. […] Ô mon ami, qu’il est cruel d’être gêné dans son développement intellectuel par des circonstances extérieures ! […] Il faut se garder, mon cher ami, de croire sur le bonheur certaines généralités très fausses, supposant toutes qu’on ne peut être heureux que conséquemment et avec un système intellectuel parfaitement harmonisé.
Seulement, comme d’ordinaire on ne sait par cœur que ce que l’on a étudié, il est rare qu’un effort intellectuel soit nécessaire pour interpréter les mots qui se succèdent dans l’esprit ; l’effort mental se concentre sur la remémoration, et nous comprenons à mesure sans intervalle appréciable. […] Donc, en règle générale, quand il ne s’agit pas d’invention intellectuelle, mais seulement d’interprétation et d’assimilation, le mot précède l’idée, d’un temps qui est d’autant plus long que l’association de l’idée avec le mot nous est moins familière ou que l’idée prise en elle-même nous est plus imprévue. […] 2° Dans l’invention intellectuelle, l’ordre des phénomènes est renversé. […] IV, § 3] ; certains faits intellectuels apparaissent donc à la conscience sans qu’aucun mot leur corresponde, et si, faute d’une juste discrimination, ils ne passent pas inaperçus, ils doivent attendre un certain temps avant d’obtenir l’expression qui leur est due. […] Rien n’appartient en propre au langage : il relie entre elles les différentes périodes de la pensée ; il sert de médiateur entre le moi passé et le moi présent comme entre mes semblables et moi ; il fait ma personnalité intellectuelle [ch.
Autant que je suis informé, il me semble bien que nos versificateurs les plus connus reflètent assez exactement le désarroi moral et intellectuel de notre temps. […] Il s’inspire surtout du panthéisme brahmanique, et tout particulièrement du système de Hegel et de son évolutionnisme tout intellectuel.
Cela, dans tous les domaines, notamment l’intellectuel et le politique. […] symétriques, cela montre l’anarchie et la misère intellectuelle de tout un temps. […] Elle est un signe, cette oscillation, de misère intellectuelle et de flottement moral. […] Il n’est de vraie liberté, intellectuelle et morale, que dans une règle et une discipline. […] Nous attendons encore maintenant le « thermidor » (au moins intellectuel) du libéralisme.
Aussi, un Mérimée, un Stendhal professent-ils une absolue amoralité intellectuelle. […] Or l’intelligence, ce sont les intellectuels, c’est-à-dire les lettrés à côté des savants. […] Intellectuel, certes, il l’est, — et à quel degré ! […] Seulement, de l’émotif et de l’intellectuel qui se battaient en lui, l’intellectuel l’a emporté. […] Pour les intellectuels surtout, le changement est total.
Les politiciens n’ont cure des intellectuels, ou, quand ils y pensent, ils les détestent. […] Vous n’estimez que les valeurs intellectuelles. […] Car ce sont les aristocrates, les intellectuels, les dirigeants, qui sont tyrannisés. […] Les intellectuels ont d’autres critères. […] La découverte de Taine a été le grand événement intellectuel pour les collégiens de ma génération.
Des jeunes gens de bonne volonté, des intellectuels ce semble, interrogeaient, renseignaient, prêchaient, inscrivaient ces recrues disparates. […] Claires et fortes, avec tous les germes qui annoncent le grand talent, elles respirent la confiance d’un jeune intellectuel qui, parlant à sa famille, à des amis sûrs, à son ancien maître, M. […] C’est vrai qu’il est différent, mais comment le lire sans l’aimer, ce jeune intellectuel, mort à vingt-cinq ans pour la France ! […] J’aime suivre en elles les âges divers, les étapes, la formation d’un personnage, le jeune intellectuel juif, qui joue un grand rôle depuis plusieurs années en France, mais je ne les donne pas comme représentatives de la communauté israélite française14. […] On me dit : « Vous avez fait voir des Israélites d’exception, nouvellement venus parmi nous ou bien grands intellectuels », et l’on me donne à lire la correspondance du capitaine Raoul Bloch, tué le 12 mai 1916 devant Verdun, qui appartenait au monde des affaires.
Son dernier livre vient, en effet, de révéler dans un de ses plus beaux chapitres — le chapitre de la charité intellectuelle — le secret de cette ardente préoccupation de la gloire, opposée si longtemps dans M. […] J’ai voulu la faire ; j’ai voulu la penser ; j’ai voulu la parler ; j’ai voulu mettre à leur place les hommes et les choses ; j’ai voulu prendre leur mesure et la donner… J’ai promené la balance à travers le monde intellectuel, n’ayant qu’un poids et qu’une mesure, et j’ai laissé les plateaux monter et descendre comme ils voulaient, abandonnés aux lois de l’équilibré… Les chapitres de ce livre ne sont pas juxtaposés par une unité mécanique, mais ils sont liés, si je ne me trompe, par une unité organique, et cette unité, c’est la faim et la soif de la « Justice. » Et comme le mystique ne s’éteint jamais, ainsi que je Fai dit, dans M. […] Dans les chapitres de son livre, qui n’a que des chapitres et dont l’unité n’existe que dans la personnalité très particulière de l’auteur, ceux-là qui sont intitulés : La Lumière et la Foule, Les Ténèbres et la Foule, Les Sables mouvants, Les Préjugés, Les Caractères, Les Passions et les Âmes, La Charité intellectuelle, sont de ces choses qu’il est difficile dénommer, parce qu’elles n’ont pas d’analogue en littérature… Le côté que j’oserai appeler le côté divin de cette critique, échappera sans nul doute à ceux qui ont le mépris insolent et bestial du mysticisme de l’auteur. Mais le côté humain ravira tout le monde, même les ennemis de ce mysticisme, s’ils ont quelque race et quelque aristocratie intellectuelle.
Il s’agit des usages d’une caste intellectuelle. […] Comme on se joue de lui et qu’ils sont stupides, en leur bonté, ses maîtres intellectuels ! […] L’art n’a de valeur que comme source d’émotions intellectuelles. […] Tenez-vous-en à l’expression d’émotion intellectuelle. […] N’ayant plus de position intellectuelle le christianisme est inaccessible aux arguments intellectuels.
On ira reprendre dans le riche fond de la latinité ce que l’on y avait d’abord laissé ; et les mots savants viendront presque dès le premier jour s’ajouter aux mots populaires : de ces deux classes de mots, formés ceux-ci sous l’influence et ceux-là hors de l’influence de l’accent latin, ceux-ci par la bouche et l’oreille du peuple, et ceux-là par l’œil des scribes, de ces deux classes se fera une langue plus riche, plus souple, plus fine, plus intellectuelle. […] Insensiblement l’unité politique devenant plus étroite et plus réelle, la littérature d’autre part se faisant de moins en moins populaire, Paris dut à ses rois et a son université d’être le centre intellectuel du royaume. […] Je ne parle point d’une expansion d’un autre genre : celle où la littérature porte la langue avec elle au lieu de la suivre, celle qui résulte de l’éclat de la civilisation française et de l’influence intellectuelle exercée à l’étranger par nos écrivains.
Derrière le milieu physique il y a donc un milieu moral et même intellectuel, qui commande son activité. […] Mais il lui faut la collaboration du peuple et celle de l’élite intellectuelle. […] On n’a voulu ici que dégager quelques traits d’une noble figure intellectuelle et morale d’un si haut enseignement. […] Cette probité intellectuelle, Grasset y voyait, avec raison, une des formes de son apologétique. […] Corpechot, car la personnalité de l’intellectuel princier que fut le duc d’Aumale se manifeste ici par d’innombrables détails.
Mais combien il serait vain de les rechercher parmi les classes dirigeantes et chez les intelligences qui composent l’aristocratie intellectuelle. […] Je ne connais rien de plus terrible, dans l’existence intellectuelle, que cette perplexité dans laquelle nous sommes plongés. […] Taine, comme des pères intellectuels et les fécondateurs de la patrie. […] L’analogie entre les faits sociaux d’une époque et les actes intellectuels de l’autre apparaît ici étonnante. […] Que faisiez-vous alors, vous tous, les « intellectuels » de Belgique, de Suisse et de France ?
Les idées de Balzac : éducation intellectuelle du public par les lieux communs. — 2. […] Leur fantastique amour se réduit au fond au culte de la perfection, conception intellectuelle et non sentimentale. […] Le « Discours de la méthode pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences » est la biographie d’une pensée ; et du seul caractère narratif et descriptif de l’ouvrage sortent visiblement deux traits de la physionomie intellectuelle de Descartes : au lieu d’une exposition théorique de sa méthode, il nous en décrit la formation dans son esprit, et présente ses idées comme autant d’actes successifs de son intelligence, de façon à nous donner en même temps qu’une connaissance abstraite la sensation d’une énergie qui se déploie ; le tempérament actif des hommes de ce temps est devenu chez Descartes une puissance créatrice d’idées et de « chaînes » d’idées. En second lieu, ces actes intellectuels sont toute la vie du philosophe ; le reste ne compte pas dans son autobiographie, et toutes les déterminations de sa vie extérieure, choix d’une profession, voyages, retraite, expatriation, ont toujours pour fin d’assurer un jeu plus facile et plus libre à l’activité de son esprit : par là Descartes est l’homme idéal du xviie siècle, l’homme-pensée. […] La philosophie de Descartes illumine tout le mouvement intellectuel et littéraire auquel la Renaissance a donné l’impulsion.
Ce qui constitue la bohème, ce n’est pas le manque d’argent, c’est, avant tout, le manque d’éducation morale, d’empire sur soi-même et de pudeur intellectuelle. […] Il y a tous les enfantillages de l’intellectuel accoutumé à la libre solitude et au sans-gêne de l’atelier ; il y a l’amour-propre, le dépaysement, et surtout, très au fond, une timidité spéciale, qui vient de ce que l’artiste est en marge de la société et ne sait jamais s’il y est accepté ou s’il y règne. […] Mais ils partent au moins d’un principe plus intéressant que le débraillement intellectuel et physique, ils partent de la résolution de garder une retenue. […] Un divorce, un adultère d’artistes inspirent à cette caste une joie haineuse que les intellectuels ne soupçonnent pas : c’est l’objet des commentaires méprisants ou fielleux de mainte bourgeoise et de maint rentier enrageant de leur obscurité, conscients de leur nullité morale, et ravis de se retrancher derrière les principes honnêtes et la légalité pour se venger de la beauté, de la gloire et de l’indépendance représentées par les artistes. […] Il installera le créateur intellectuel à son rang exact dans la société.
Que l’on extraie donc d’une série d’œuvres émanant d’un seul artiste toutes les particularités esthétiques qu’elles contiennent, on en pourra déduire une série de particularités intellectuelles. […] Mais il faut comprendre que le fait même de l’imitation, le fait intime grâce auquel un écrivain s’enrôle sous telle bannière plutôt que sous telle autre, qu’il parvient à se servir avec quelque succès et quelque originalité de l’esthétique qu’il a choisie, a une cause profonde, et se ramène, comme tous ses actes, à sa constitution intellectuelle, à ses aptitudes, à ses tendances. Il y a donc, entre l’artiste imitateur et son maître, une similitude générale d’organisation intellectuelle. […] Le texte auquel Hennequin fait ici allusion est La psychologie morbide dans ses rapports avec la philosophie de l’histoire, ou De l’influence des névropathies sur le dynamisme intellectuel (Masson, 1859). […] Morel en 1857 dans son Traité des dégénérescences physiques, intellectuelles et morales.
Il a été pendant l’avant-dernière période d’anarchie intellectuelle le défenseur des règles classiques, de l’équilibre et de l’ordre. […] La Belgique, splendidement réveillée à la vie intellectuelle par M. […] Avec le suffrage universel et les mœurs électorales actuelles, le niveau intellectuel de notre parlement ne peut être que d’une médiocrité dégoûtante. […] un père intellectuel qu’ils menaient à la gloire, ce n’était qu’un ami qu’ils ensevelissaient dans l’oubli. […] Son influence n’est pas à craindre ; il ne constitue plus un danger intellectuel.
Nettement, qui finit son ouvrage d’aujourd’hui par le bilan intellectuel de la Restauration, n’a pas donné cet autre bilan qui eût complété et précisé le premier, le bilan du gouvernement et des partis. […] Nettement, écrivain catholique, d’appartenir à une doctrine constituée, car les doctrines constituées sont comme de grands bureaux de bienfaisance, établis au profit des indigents intellectuels. […] Nettement a surtout les notions courantes, ou plutôt les notions qui ont couru et que le journalisme a usées à force de les faire courir, ce journalisme qui porte encore sur ses oreilles la poussière du moulin où la France intellectuelle a fait moudre sa farine pendant dix-huit ans… Et non seulement M. […] Nul criterium déduit d’une doctrine première et fondamentale, et quand il s’agit de juger les grands faits intellectuels de l’époque, nulle vue profonde, mais un lieu commun d’une superbe venue, un lieu commun de dix-huit ans qui prend aujourd’hui dans ce gros livre solennellement sa robe prétexte et qui rencontre un autre lieu commun du même âge, lorsqu’il s’agit de juger les œuvres et les hommes. […] Elle avait seulement à montrer dans quelle inspiration ces jugements prenaient leur source, ce qu’ils prouvaient de force intellectuelle ou de conséquence d’opinion, et ce que valait enfin toute cette monnaie de jugements qui n’appartiennent pas plus à M.
Si des jeunes gens contemporains paraissent si avides de gloire et d’exploits, c’est que la violence de leurs pères, exaspérés par la déroute et par la période de l’insurrection, sut leur constituer, en effet, un extraordinaire caractère de frénésie intellectuelle. […] Toutes nos déroutes militaires ne me paraissent pas aussi effrayantes que cette conquête intellectuelle où sont parvenus récemment, malgré Zola, malgré Barrès, malgré Bruneau et Gustave Charpentier, les dramaturges norvégiens et allemands. […] C’est une famille intellectuelle.
Alors, les livres de voyage n’étaient pas d’une grande difficulté (intellectuelle, s’entend), et ils intéressaient presque tous. […] Après Barthélemy, Choiseul-Gouffier et Chateaubriand, il aborde les augustes ruines de la Grèce et leur récrépissage moderne avec l’irrévérencieuse plaisanterie d’un enfant de Paris (pour ne pas dire un autre mot), et, comme ce gros obèse intellectuel d’allemand qui sautait par la fenêtre pour se faire vif, il saute, lui, en pleine ironie, — tenant infiniment, sans doute, à nous montrer qu’il sait, quand il le faut, s’éponger de sa science et s’alléger du pédantisme de ses études et de ses fonctions ! […] Dans sa peur de paraître dupe, la seule peur qui soit française et dont les crânes de ce pays de Murats intellectuels ne rougissent jamais, il va jusqu’à nous dire (toujours légèrement !)
Mme de Warens, capable de tenir tête à ces hommes distingués, n’avait pas de préférence pour les conversations intellectuelles. […] Que l’inquiétude de l’Absolu n’est pas une inquiétude intellectuelle. […] Et voici une des aventures intellectuelles de cette complexe adolescence qui les courait toutes. […] Mais la mémoire intellectuelle semble bien leur faire défaut. […] Au surplus, beau comme Lucifer, paré de toutes les perfections intellectuelles et sportives, mystérieux surtout.
Un des plus pardonnables de nos défauts, c’est, comme on sait, une certaine coquetterie généreuse d’hospitalité intellectuelle. […] Et c’est pourquoi elle abandonne son mari et ses enfants pour s’en aller, toute seule, chercher la vérité, refaire son éducation intellectuelle et morale. […] Ce significatif roman est plein des plus délirants cris d’orgueil intellectuel et moral qu’on ait jamais poussés Et la Dame de la mer, c’est Jacques, sauf le dénouement. […] Les livres d’Eliot et d’Ibsen demeurent, en dépit de l’émancipation intellectuelle de ces écrivains, des livres protestants. […] Car, justement, ce qu’il y a de liberté dans le protestantisme empêche, non les affranchissements intellectuels, mais, si je peux dire, les affranchissements de langage et de tenue.
Les différences et inégalités individuelles du vouloir humain proviennent surtout du fond originel, physiologique et héréditaire, de l’individu, de ses ressources intellectuelles, sentimentales et énergétiques. […] Elle dépend aussi de la forme particulière de la volonté elle-même, suivant la proportion variable des éléments qui la composent (éléments sensitifs, intellectuels, moteurs) ; suivant la quantité d’énergie vitale de l’individu ; suivant le mode d’action de cette énergie (adaptation ou domination), suivant le caractère modéré et continu ou au contraire violent et spasmodique des réactions de l’individu. […] Dans un pays vieux, dans une société policée, la plupart des actes de la vie physique et intellectuelle sont réglés par des lois. Renan remarque que Jésus n’eût pas fait dix pas dans nos rues sans se faire arrêter pour désordre sur la voie publique. — Un certain état de flottement dans les conceptions intellectuelles laisse, dans les sociétés peu civilisées, une plus grande latitude à la fantaisie individuelle et ne lui interdit même pas les incursions dans le domaine du merveilleux.
Il est bien évident qu’étant en correspondance directe avec notre sensibilité intellectuelle, laquelle se développe de siècle en siècle, sous l’action du savoir de plus en plus étendu, elle ne peut rester stationnaire. […] La poésie intervient au sein même de toutes ces correspondances mystérieuses qui sollicitent notre activité intellectuelle, notre mémoire, nos aspirations, notre moi tout entier, et constituent cet état de conscience où, semble-t-il, nous communions dans l’infini. […] Elle est une résultante affective de toutes sortes d’influences d’origines physiologiques aussi bien qu’intellectuelles. […] … Il existe, dans la génération qui demain paraîtra devant la vie, une puissance intellectuelle énorme.
C’est à Paris que s’impriment tous les journaux qu’on lit ; c’est à Paris que s’éditent tous les livres qu’on achète ; c’est le train de Paris que prennent obstinément tous les talents robustes et hardis ; Paris est la ville sainte, où toute royauté intellectuelle a besoin de se faire sacrer pour être reconnue et acclamée ; rien de beau, rien de grand, qui ne se fasse et ne se défasse à Paris… Tout pour Paris et par Paris ! […] Cela s’appelle : la Province, journal de décentralisation intellectuelle. […] — Pour moi, je ne vois en Allemagne que des littérateurs clairsemés çà et là… Mais où est la littérature, où est le mouvement intellectuel ? […] — Dans l’ordre intellectuel, le frottement n’use jamais, il dilate, il étend — il féconde.
C’est commettre une grande erreur historique et politique que de croire à l’existence de traits intellectuels stables et universels, dans les peuples, qui, de tout temps ont été composites et changeants. […] Voici en effet, pour conclure, une liste sommaire de littérateurs appartenant à la même nation, à la même époque, au même milieu social, et, autant que possible à la même région, mais présentant cependant des caractères intellectuels nettement divers. […] Certains auteurs ont trouvé leur patrie intellectuelle en d’autres pays que celui où ils sont nés. […] Elle conduira, par une synthèse plus vaste, à faire l’historique du développement intellectuel de l’humanité, du développement même de tel organe psychique isolé. […] Par ces deux méthodes, en étudiant, d’abord en leurs initiateurs, puis en leurs adhérents, les grands mouvements intellectuels, politiques, guerriers, l’histoire tout entière doit être écrite.
La conduite pratique, droite, bonne, dépend bien plutôt de la santé du corps que de la santé de l’intelligence. » Aussi Schneider se montre-t-il, comme Spencer, assez dédaigneux de l’instruction intellectuelle et fort peu confiant dans la force des idées. […] Par exemple, le plaisir intellectuel et artistique, pris en soi et indépendamment des organes qui se fatiguent à la longue, croit en raison directe de l’activité exercée et de son succès. […] Mais James Ward, comme Herbart et Wundt, concentre trop toute qualité dans la représentation, dans le côté intellectuel de la conscience. […] Il nous semble que les exemples classiques de Platon et d’Aristote, tirés des sens supérieurs, comme la vue, l’ouïe, l’odorat même, et des plaisirs intellectuels, comme ceux de la science ou de l’art, rentrent dans cette dernière catégorie. […] Il en résulte que les êtres inférieurs sentent la souffrance avec une impitoyable nécessité, tandis que les êtres supérieurs peuvent seuls accomplir les formalités intellectuelles requises pour participer au plaisir.
I Pour celui qui considère d’un œil attentif les origines mêmes de cette peinture intellectuelle et mystique, il n’est pas douteux qu’elles recèlent les germes morbides qui envahiront plus tard tout son organisme. […] Il existe encore pour nous un autre motif d’étonnement à constater cette singulière méprise des novateurs : c’est qu’ils eurent pour principal auxiliaire et pour guide intellectuel, le vivant et robuste John Ruskin, dont le naturisme puissant semble en contradiction flagrante avec l’esprit chrétien de la « Confrérie ». […] Par idéaliste, je désigne celui qui, détournant son regard des choses et des êtres du monde extérieur, du monde sensuel qui nous enveloppe en un perpétuel contact, ne daigne employer les formes de la nature qu’à l’expression de ses conceptions intellectuelles. […] » Il est impossible de mieux caractériser qu’en cette affirmation la folie de l’art « intellectuel ». […] C’est le peintre anglais Burne-Jones, le préraphaélite, le peintre intellectuel (nous y voilà !)
Encore reste-t-elle capricieuse dans ses manifestations, et comme les souvenirs qu’elle apporte ont quelque chose du rêve, il est rare que son intrusion plus régulière dans la vie de l’esprit ne dérange pas profondément l’équilibre intellectuel. […] Mais ici commence précisément l’obscurité, car l’idée d’une attitude intellectuelle n’est pas une idée claire. […] Il s’agit de deux conceptions radicalement différentes du travail intellectuel. […] Derrière lui les cercles B, C, D, de plus en plus larges, répondent à des efforts croissants d’expansion intellectuelle. […] Par eux se préparent et se décident, comme nous le faisions pressentir, les phénomènes caractéristiques de la reconnaissance intellectuelle.
Tout trouble lent ou soudain de ses fonctions change aussi les aptitudes intellectuelles. […] Il était hémiplégique du côté gauche, mais ses fonctions intellectuelles étaient intactes. […] Ainsi, d’une part, l’appareil intellectuel est distinct de l’appareil moteur, et le bout terminal du premier est autre que le bout initial du second. […] D’innombrables courants intellectuels cheminent ainsi dans notre intelligence et dans notre cerveau, sans que nous en ayons conscience ; et ordinairement ils n’apparaissent à la conscience qu’au moment où, devenant moteurs, ils entrent dans un autre lit. […] Rien, il me semble, ne démontre mieux que cette expérience, et l’absence réelle de perception, et l’absence de tout phénomène intellectuel, et l’absence de la volonté.
La persistance séculaire du latin chez les intellectuels et leur mépris du vulgaire nous ont privés des œuvres littéraires les plus significatives. […] L’Église s’est accommodée à la réalité, mettant son autorité au service de la royauté, moyennant quoi elle règne dans l’enseignement, dans la vie intellectuelle, où elle crée par saint Thomas d’Aquin un système qu’il est permis aujourd’hui de combattre à outrance sans en méconnaître la grandeur géniale. […] Ces énergies d’un peuple entier tendues vers le même but, dans un même esprit, sont l’affirmation solennelle du génie français ; cet effort assure à la France une suprématie intellectuelle séculaire qui est aujourd’hui encore une avance ; il donne sa direction durable et logique à l’action française dans l’œuvre humaine. […] Je vois chez Mallarmé, Verlaine, Moréas et d’autres encore, exactement le même phénomène de réaction que chez les peintres impressionnistes : une confusion étrange, mais fatale, des notions élémentaires sur les conditions mêmes de l’art, une désagrégation intellectuelle et morale. […] Ce sont là des faits intellectuels que rien ne saurait hâter ; la science y est impuissante ; il y faut des siècles de travail en commun, et des légions d’ouvriers petits et grands.
La croyance en l’existence de la vérité, absurde du point de vue intellectuel, conditionne l’existence du réel qui se fonde sur l’arbitraire et sur l’irrationnel. […] Du point de vue intellectuel, comme du point de vue politique, il n’est point d’antre mode d’appréciation d’une vérité. […] Sous le jour de ces considérations, il conclut au rétablissement d’un culte auquel se montre attachée la majorité de la nation. — Il faut tenir pour un geste de pure passion intellectuelle ce coup de pied impérial par lequel prit fin une discussion où s’obstinaient l’idéologisme religieux du philosophe et son défaut de scepticisme.
Dix ans nous portâmes le deuil du droit ; nous protestâmes selon nos forces contre le système d’abaissement intellectuel savamment dirigé par, M. […] Pendant que la fortune publique, en effet, prenait des accroissements inouïs, pendant que le paysan acquérait par ses économies des richesses qui n’élevaient en rien son état intellectuel, sa civilité, sa culture, l’abaissement de toute aristocratie se produisait en d’effrayantes proportions ; la moyenne intellectuelle du public descendait étrangement. […] Il serait contre nature qu’une moyenne intellectuelle qui atteint à peine celle d’un homme ignorant et borné se fit représenter par un corps de gouvernement éclairé, brillant et fort. […] Vous voulez garder vos jeunes gens dans une sorte de gynécée intellectuel ; vous en ferez des hommes bornés. […] La supériorité intellectuelle et militaire appartiendra désormais à la nation qui pensera librement.
Elles ne sont jamais d’ordre purement intellectuel. […] Plaignons ces grands intellectuels si préservés d’avoir subi la secousse de ce tragique réveil. […] C’est une raison de plus pour ceux qui restent de méditer cette vie intellectuelle de Barrès et son enseignement. […] Marche intellectuelle. […] Barrès aura désormais pour tâche de la défendre, cette Marche intellectuelle, en la magnifiant.
Ne donner à l’étude et à la culture intellectuelle que les moments de calme et de loisir, c’est faire injure à l’esprit humain, c’est supposer qu’il y a quelque chose de plus important que la recherche de la vérité. […] Que ceux qui exploitent nos faiblesses et qui, escomptant par avance nos malheurs, fondent leurs espérances sur la fatigue et la dépression intellectuelle qu’amènent les grandes souffrances, ne s’imaginent pas que la génération qui entre dans la vie de la pensée est à eux !
Il n’y a dans le triumvirat de Nisard que trois Lépide (Lepida capita), et on s’étonne du choix singulier qu’il a fait des trois hommes qu’il nous donne pour le triumvirat intellectuel de leur époque. […] Quelle fut l’influence profonde et que nous sentions sur nous, modernes, des travaux et de la personnalité intellectuelle de Juste Lipse, Scaliger et Casaubon ?
Ces instincts étant de la nature humaine, il ne faut pas les blâmer, et le vrai système moral et intellectuel saura leur faire une part : mais cette part ne doit jamais être l’affaissement ni la superstition. […] La foi sera toujours en raison inverse de la vigueur de l’esprit et de la culture intellectuelle. […] Mais Voltaire a un esprit, une façon de prendre les choses, qui résulte de tout un ensemble d’habitudes intellectuelles. […] Mais il y a une position intellectuelle, susceptible d’être exprimée en un livre, non en une phrase, qui est à elle seule une religion ; il y a une façon religieuse de prendre les choses, et cette façon est la mienne. […] J’ai souvent songé que ce type (haute fierté intellectuelle, jointe aux faiblesses les plus féminines) pourrait servir de sujet à un roman psychologique.
Cessons donc aussi, et indépendamment de leurs situations dans les ordres, de considérer comme contradictoires en elles-mêmes des qualités qui précisément ne sont contradictoires que dans les classements des intellectuels. […] Et leurs troubles appris, leurs troubles artificiels, (intellectuels), ne leur ont jamais permis d’obtenir que des profondeurs superficielles. […] Et en dehors il y a l’immense tourbe de ceux qui ne sont pas même capables de pécher, et que je nommerai les intellectuels ou les intellectualistes dans l’ordre du péché ; de la grâce ; du salut. […] Et que je nommerai les intellectuels dans l’ordre du bonheur. […] Il y a des intellectuels partout et il y a des intellectuels de tout.
Enfin relevons-nous sous le poids de l’existence, ne donnons pas à nos injustes ennemis, et à nos amis ingrats, le triomphe d’avoir abattu nos facultés intellectuelles. […] Le sentiment du beau intellectuel, alors même qu’il s’applique aux objets de littérature, doit inspirer de la répugnance pour tout ce qui est vil et féroce ; et cette aversion involontaire est une garantie presque aussi sûre que les principes réfléchis. […] La plupart des hommes, épouvantés des vicissitudes effroyables dont les événements politiques nous ont offert l’exemple, ont perdu maintenant tout intérêt au perfectionnement d’eux-mêmes, et sont trop frappés de la puissance du hasard pour croire à l’ascendant des facultés intellectuelles. […] Les sciences et les arts sont une partie très importante des travaux intellectuels ; mais leurs découvertes, mais leurs succès n’exercent point une influence immédiate sur cette opinion publique qui décide de la destinée des nations. […] Si tous les efforts devaient être inutiles, si les travaux intellectuels étaient perdus, si les siècles les engloutissaient sans retour, quel but l’homme de bien pourrait-il se proposer dans ses méditations solitaires ?
Le Bovarysme intellectuel admet lui-même des distinctions ; tandis qu’il porte, avec Frédéric Moreau, sur presque toutes les facultés de l’esprit, il devient plus spécialement avec Homais un Bovarysme scientifique, avec Pellerin un Bovarysme artistique. […] À posséder les résultats du labeur accompli au cours d’une longue civilisation par le génie de ses meilleurs représentants, quelques-uns des plus médiocres parmi les derniers venus prennent le change sur leur propre valeur ; ils se gonflent, comme d’un mérite individuel, des conquêtes intellectuelles dues à l’élite de l’espèce et dont ils bénéficient en vertu d’un privilège commun à toute l’Humanité. […] Un comique supérieur se dégage du contraste manifeste entre la pauvreté intellectuelle du fantoche et la grandeur complexe de l’idéal qu’il a entrevu et qu’il voudrait atteindre. […] La révélation de l’immense richesse intellectuelle qui leur est livrée n’excite en eux qu’un sentiment d’admiration pour la science, pour l’art, pour la philosophie, pour la pensée sous ses formes les plus hautes. […] Tandis que, dans La Tentation, le délire du saint évoque la cohorte des religions et des métaphysiques se réfutant les unes les autres par le seul fait de leur confrontation, l’enthousiasme intellectuel de Bouvard et de Pécuchet qui les porte à tout apprendre, à s’élancer sans cesse dans toutes les directions de l’esprit, prête à une revue encyclopédique de toutes les philosophies et de toutes les sciences.
Le Bovarysme scientifique ou le Génie de la connaissance : L’homme, croyant augmenter, par la recherche intellectuelle, la somme de ses joies, n’augmente que la somme de ses connaissances — Double mobile de la recherche intellectuelle : Mobile métaphysique : l’homme mortel se veut immortel. — Mobile d’intérêt immédiat : par la connaissance des lois de la nature, l’homme prétend accroître son bien-être. […] Le choix est nécessairement déterminé par le nombre et la qualité des éléments que l’on vient de dire, l’action de ces éléments, facteurs de l’acte, combinée elle-même avec l’inclination dominante, intéressée, passionnelle, intellectuelle ou morale, de l’être qui choisit. […] Et tous ces états, les normaux comme les anormaux, résultent d’une disposition physiologique héréditaire à laquelle rien ne peut être changé, si ce n’est dans une petite mesure par des circonstances fortuites, indépendantes absolument de l’individu lui-même : le milieu où il naît, l’éducation qu’il reçoit, la pénétration intellectuelle dont il dispose et qui lui permettra d’intervenir avec plus ou moins de bonheur dans sa physiologie, l’état peut-être de la science médicale contemporaine. Voici donc l’homme : rigoureusement déterminé quant à la qualité, quant au degré de sa force — physique, intellectuelle et morale — par des causes situées dans le passé et intangibles, façonné par des circonstances dont il n’est pas maître, qui surgissent ou ne surgissent pas, et qui décident quel parti sera tiré de l’élasticité rigoureusement limitée elle-même de ses instincts hérités, cet homme dont la faculté de s’efforcer, de réagir, de se résoudre, sort de l’inconnu, cet homme se croit libre. […] Sitôt qu’un de ces gouvernements de fait est fondé, l’illusion de la personne est à son profit un instrument de règne ; il devient le moi, et le moi, c’est au regard des instincts du corps humain ce qu’est, au regard des hommes, la divinité, une force intellectuelle à laquelle il est juste et raisonnable de se soumettre.
Cette amazone intellectuelle, qui n’a pas qu’un sein coupé, comme la guerrière, mais qui a les deux, n’est jamais, après tout, que l’ambidextre éternel qui, dans la pensée comme dans la vie, toujours poltronne et toujours coquette, avance quand on recule et recule lorsqu’on avance. […] Mme Stern n’est en réalité qu’une volontaire, toujours en révolte contre son organisme féminin, et la volonté n’a jamais mieux démontré qu’elle n’est pas le talent et qu’elle peut être l’impuissance… Savante, dit-on, du moins de pose savante ; allemande d’éducation intellectuelle ; hégélienne peut-être et, dans tous les cas, très digne de l’être, elle a trouvé que ce n’était pas encore assez de savoir l’allemand et elle s’est mise à apprendre le hollandais pour faire le livre que voici. […] Il y a des bas-bleus très coquets, qui tirent très bien leurs bas sur des jambes ravissantes ; mais Mme Stern devait porter les siens triboulés ou à l’envers comme La Fontaine, non par distraction, mais par une superbe et intellectuelle non-curance ! […] … Et comme à, ses yeux parmi les hommes, les plus mâles dans l’ordre intellectuel et moral sont les plus savants, les plus philosophes, les plus puritains, elle se fait, à bras raccourci, savante, philosophe, puritaine. […] Le livre de Mme Stern est, par la forme, le pensum de la gravité affectée, comme il est, par le fond, le doctrinarisme de la Libre-Pensée et l’expression de ces misérables généralités philosophiques qui sont les vulgarités intellectuelles de ce temps.
Voilà quels furent, et tout de suite saillants, les caractères primitifs de cet esprit bien né et bien portant, si succulent, si frais et si robuste, d’un sang très pur, sans humour ni humeur, sans enfin une seule des maladies intellectuelles qui font si souvent des esprits anglais, et même des plus grands, ou des maniaques sublimes ou tout au moins des excentriques et des originaux. […] S’il était un chef de parti, je sais la considération intellectuelle que j’aurais pour lui, en la mesurant au mot de Goethe : « Un chef de parti n’est jamais, après tout, qu’un bon caporal. » Mais Macaulay n’est qu’un soldat, le soldat d’un parti. […] Or, que peut devenir, sans la morale, l’esthétique des nations très civilisées et très intellectuelles ? […] L’écrivain, chez lui, l’écrivain dont la force poétique est toujours donnée par la comparaison, a la comparaison surtout ingénieuse, et il la suit longtemps quand il la trouve… En somme, si le critique défaille souvent pour les causes que j’ai dites, l’écrivain se soutient toujours, et c’est ce souci d’être toujours écrivain qui fait de lui un esprit, avant tout, littéraire et inaliénablement tel, alors même que le critique littéraire a disparu dans l’historien à prétention, dans le whig incessamment présent, dans l’utilitaire, dans le scholar ; car il est resté scholar aussi, d’habitude intellectuelle et même quelquefois de langage, cet homme qui n’a pas, malgré une force incontestable, su rompre ces emmaillottements ! […] Sous sa main, elle était devenue humaine ; elle écoutait aux portes du cœur ; et pas de doute que si son cœur, à lui, avait souffert, si la destinée lui avait fait goûter à ses savoureuses amertumes, si la divine Marâtre qu’on appelle la Douleur lui avait mis au front ce baiser mordant qui le féconde, pas de doute que comme critique même (comme écrivain, ce n’est pas douteux), il aurait été plus profond et plus grand… L’homme n’est jamais assez intellectuel pour pouvoir se passer de sentiments, et les plus forts sont les sentiments blessés.
Il y en a qui rétrécissent et diminuent tous les sujets qu’ils traitent, il y en a qui les dessèchent ; lui, il les élève et les ennoblit, il les transforme sans les dénaturer ; il les revêt d’un mélange heureux de gravité et d’élégance ; il les fixe surtout et les situe en leur lieu et à leur point précis, dans leurs rapports avec les autres régions, sur la carte du monde intellectuel. […] Soustrait à toute inspection, à tout contrôle officiel, le régime intellectuel des grands séminaires est celui de la liberté la plus complète : rien ou presque rien n’étant demandé à l’élève comme devoir rigoureux, il reste en pleine possession de lui-même ; qu’on joigne à cela une solitude absolue, de longues heures de méditation et de silence, la constante préoccupation d’un but supérieur à toutes les considérations personnelles, et on comprendra quel admirable milieu de pareilles maisons doivent former pour développer les facultés réfléchies. […] Le caractère de cette émancipation intellectuelle de M. […] Telle est l’humanité : chaque nation, chaque forme intellectuelle, religieuse, morale, laisse après elle une courte expression qui en est comme le type abrégé et expressif, et qui demeure pour représenter les millions d’hommes à jamais oubliés qui ont vécu et qui sont morts groupés autour d’elle. » Cette conscience, cette mémoire du genre humain, c’est donc comme une Arche de Noë perpétuelle dans laquelle il ne peut entrer que les chefs de file de chaque race, de chaque série.
De telles âmes ne se laisseront pas persuader aisément de la supériorité intellectuelle et morale de la société ; elles continueront à voir dans cette dernière une machinerie plus ou moins habile destinée à mater et à duper les individus et le sentiment qu’elles éprouveront vis-à-vis d’elle sera surtout la défiance. […] L’individualisme uniciste revêt d’ailleurs autant d’aspects particuliers qu’il y a de modes possibles de différenciation pour les individus. — Un homme ne peut voir le monde, un homme ne peut penser exactement comme un autre homme ; de là un individualisme intellectuel. — Un homme ne peut sentir exactement comme un autre ; de là un individualisme sentimental. — Un homme ne peut avoir exactement les mêmes raisons d’agir qu’un autre ; de là un individualisme moral. — Un homme ne peut avoir exactement la même manière de sentir la beauté qu’un autre ; de là un individualisme esthétique. — Un homme ne peut avoir exactement les mêmes intérêts qu’un autre ; de là un individualisme économique. — Un homme ne peut avoir exactement la même puissance, ni par conséquent le même droit qu’un autre ; de là un individualisme juridique ou antijuridique, comme on voudra. — Ainsi dans les différents ordres de pensée et d’activité, l’individualisme uniciste nie tout idéal collectif : idéal intellectuel, sentimental, moral, esthétique, économique, juridique, politique. […] Il représente, dans l’ordre intellectuel, un effort vers la plus grande science, dans l’ordre esthétique, un effort vers la plus grande beauté, dans l’ordre économique un effort vers la plus grande richesse considérée elle-même comme un moyen pour la plus grande puissance ; dans l’ordre politique, un effort vers la plus grande initiative et la plus grande responsabilité chez les maîtres et les créateurs de valeurs ; dans l’ordre moral, un effort vers une affirmation plus intense de la vie, de la grandeur humaine et de l’orgueil humain.
Les sensations musculaires ont un double caractère affectif ou émotionnel et intellectuel ; tous deux160 en raison inverse l’un de l’autre. […] Considérées sous leur aspect intellectuel, les sensations musculaires « sont très importantes au point de vue de la connaissance ; d si à un poids de quatre livres que nous tenons dans la main, on en ajoute un autre, l’état de conscience change : ce changement d’état, c’est la discrimination (faculté de discerner), et c’est le fondement de notre intelligence. […] Les trois dernières sont surtout intellectuelles. […] Le toucher est le sens le plus général ; il est probable même qu’il ne manque à aucun être doué de sensibilité, et son importance intellectuelle est grande.
un Tartuffe intellectuel ! […] Tout en aimant d’un goût involontaire le plaisir intellectuel qu’il nous donne, nous n’en avons pas été abruti au point de ne pas voir tous les défauts et toutes les misères d’un écrivain qui en eut, pour sa part, autant que personne, si ce n’est peut-être davantage. […] Dans la biographie intellectuelle servant d’introduction à la Correspondance, un trait rapporté par P. […] Dans cette Correspondance, qui commence en 1829 pour finir en 1842, nous trouvons, au milieu de toutes les questions intellectuelles qui y sont agitées, plusieurs lettres où Stendhal parle d’amour pour son propre compte et non plus pour le compte de ses héros de roman.
Oui, un Tartuffe, entendons-nous bien, un Tartuffe intellectuel ! […] Tout en aimant d’un goût involontaire le plaisir intellectuel qu’il nous donne, nous n’en avons pas été abruti au point de ne pas voir tous les défauts et toutes les misères d’un écrivain qui en eut, pour sa part, autant que personne, si ce n’est peut-être davantage. […] Dans la biographie intellectuelle servant d’introduction à la Correspondance, un trait rapporté par M. […] Dans cette Correspondance, qui commence en 1829 pour finir en 1842, nous trouvons, au milieu de toutes les questions intellectuelles qui y sont agitées, plusieurs lettres où Stendhal parle d’amour pour son propre compte, et non plus pour le compte de ses héros de roman.
Nous avons vu de ces intellectuels fameux nous rappeler au devoir patriotique, lorsque nous paraissions pris d’une velléité de regarder par dessus les murailles nationales pour voir ce que pouvait bien faire le voisin. […] Mais il lui faut pour cela des hommes sérieux et non des flatteurs… Nous considérons avant tout comme notre véritable ami celui qui nous apprend à nous garder de ce que nous craignons le plus au monde : le vague vide et l’appréciation insuffisante de nos concurrents dans le domaine matériel et intellectuel. […] Hugo, de sa vision pénétrante, a parfaitement caractérisé dans une page de son William Shakespeare, l’importance des traductions en même temps que l’hostilité du patriotisme vulgaire envers les productions intellectuelles du dehors : « Une traduction est presque toujours regardée tout d’abord par le peuple à qui on la donne comme une violation qu’on lui fait. […] Foncin, l’auteur des Géographies scolaires, d’aussi véridiques paroles : « Si nous voulons, nous, Français, conserver une place dans le monde et résister aux flots anglo-saxon, allemand, américain, russe, qui menacent de nous submerger, nous, notre commerce, notre industrie, notre agriculture, notre richesse, notre race, notre influence politique et intellectuelle, il faut, par un vigoureux effort, sortir de nous-mêmes…. » 52.
Nous pensions et nous espérions que l’on sortirait de l’éloge confus et de la petite explication à ras de terre, pour pénétrer dans cette haute valeur intellectuelle, dans le mystère de ce talent, et pour nous le faire bien comprendre ; Adrien Destailleur semblait un commentateur digne de La Bruyère. […] Pour cela, il eût fallu oser une biographie intellectuelle, et ne pas suspendre à la tête de son édition ce vieux morceau de tapisserie académique, ouvrage oublié du bonhomme Suard ! […] C’est là, sans doute une délicatesse… mais il est évident aussi que des délicats de cette espèce ne sont pas faits pour traiter largement un mâle sujet littéraire et nous l’ouvrir jusqu’aux entrailles ; il est évident qu’ils n’ont pas été créés et mis au monde pour ne rien comprendre aux énergiques trivialités des grands écrivains, et qu’il leur faut renoncer à écrire la biographie intellectuelle du Génie, aussi bien qu’à peigner, la crinière des lions !
Goethe est le type de ces hommes doubles et le héros suprême de l’humanité intellectuelle. […] C’est par faiblesse intellectuelle que les ménages ouvriers se laissent déborder par la progéniture. […] L’histoire littéraire n’est, en somme, que le tableau d’une suite d’épidémies intellectuelles. […] Car tout se tient et l’aisance intellectuelle est certainement liée à la liberté des sensations. […] Un grand silence intellectuel planera sur notre patrie.
De quelle côté la supériorité : du côté des intellectuels ou du côté des incultes ? […] C’est elle qui, à cette heure, représente dans le monde la prééminence intellectuelle, en face de la jeune barbarie. […] Ce ne sont pas en effet les intellectuels qui constituent la vitalité d’une nation. […] Je veux dire simplement que le développement excessif des fonctions intellectuelles corrompt et paralyse. […] Dès lors l’intellectuel a l’illusion de vivre, plus qu’il ne vit.
Si l’homme n’a plus le même besoin intellectuel de croire, il a conservé le besoin de sentir comme aux temps où il croyait. […] Et en même temps il a causé à tous les coins des rues de cette ville aussi intellectuelle que dépravée. […] Il faut attribuer au caractère de ces deux études la sérénité de sa conscience intellectuelle à l’endroit du problème religieux. […] Ils ont dû dissimuler ce divorce et s’emprisonner dans des professions de foi dépourvues de sincérité intellectuelle. […] Sa vie sentimentale et morale a précédé ou accompagné sa vie intellectuelle.
Dans une excellente étude sur le roman-poème publiée dans la France intellectuelle, il place M. […] Au contact des poètes d’outre-Manche il prit conscience de lui-même, et reconnut où se trouvait sa vraie famille intellectuelle. […] Mes habitudes intellectuelles m’éloignent des problèmes qui ne me semblent pas nettement posés. […] Les habitudes intellectuelles de M. […] Un mouvement intellectuel sérieux se prépare dans la génération qui monte.
Lemaître revient plusieurs fois sur sa « facilité à être dupé », sur l’état contristant de « son niveau intellectuel » et sur « cette inattention voisine de la sottise » qui le fait éclater en « furieux applaudissements » aux endroits où lui, Jules Lemaître, reste absolument froid. » Ici, je proteste très sérieusement. J’ai pu insulter le public, mais non pas en ces termes. « L’état d’un niveau intellectuel… », « une inattention voisine de la sottise », jamais je n’ai écrit ça, grâce à Dieu, et M. […] Voici mon texte : « … Que si, malgré tout, on ne s’en est pas aperçu, je n’en sais que dire, sinon que cela nous donne le niveau intellectuel du public », etc.
Ôtez-lui l’uniforme dans lequel l’École normale boutonne ses vélites, ôtez-lui enfin les bénéfices intellectuels de l’institution dont il fait partie, et demandez-vous ce qui resterait alors à M. […] Lenient — lequel n’est pas un livre d’aperçu, qui n’a été conçu ni écrit comme les Considérations de Montesquieu sur la grandeur et la décadence des Romains, et qui embrasse toute la période du Moyen Âge, — est de n’avoir que quatre cents et quelques pages pour nous donner le train des faits intellectuels de cette époque, qui est immense. […] Lenient et son livre forment tous deux le résultat le plus favorisé de la pisciculture intellectuelle, qui crée du talent avec un semis de connaissances, et comme elle peut, le fait lever.
Saisset a vu très juste dans les circonstances contemporaines, et si la question morale et intellectuelle du monde doit s’agiter entre les conséquents du catholicisme ou les conséquents du panthéisme, a-t-il vu également juste en croyant possible d’établir, ou, pour parler aussi modestement que lui, de pressentir une troisième solution à introduire en catimini, sous les regards de l’opinion, avec des patelinages de plume qui montrent au moins de la souplesse dans le talent de M. […] Saisset ne vénérerait pas la force jusque dans l’abus qu’on fait d’elle, un bon sens plus fier n’aurait pas de ces attitudes devant les gauchissements du génie ou ses crimes, car les fautes intellectuelles d’un homme investi de facultés transcendantes peuvent aller jusque-là, mais il faut se rappeler que M. […] Il est inférieur aussi, après avoir conclu au particulier dans chacune de ces biographies intellectuelles, de n’avoir pas su conclure au général, et après avoir fait passer philosophes et systèmes par le creuset de l’analyse, de n’avoir pas jaugé d’un dernier regard la puissance en soi de la philosophie !
La vie intellectuelle ressemble à la vie morale. […] Il ne s’agit pas ici, bien entendu, des talents du gymnaste intellectuel que l’on appelle un philosophe, ni même de la dorure de bec de la Gloire, qui répète parfois et crie des noms, comme les perroquets, sans rien y comprendre, mais il s’agit des hommes qui représentent pour les avoir réellement exprimées le petit nombre de vérités nécessaires à la vie et à l’honneur de l’esprit humain. […] parce qu’il est une créature de passage, d’inquiétude et d’orgueil, qui veut savoir pour ne pas se soumettre ; mais sa triple vie morale, sociale, intellectuelle, ne dépend pas de si peu que cela !
II Avec cette délicatesse de vision intellectuelle, cet art minutieux, puis fuyant et teinté d’une poésie indécise, M. […] Mais on sa science des nuances morales, son habileté à minutieusement analyser la dépendance et le jeu des départements spirituels, atteint encore au plus liant, c’est dans le débat d’un des problèmes psychologiques les plus considérables de notre époque, celui dont la solution importe le plus à nos races débilitées par une culture intellectuelle trop rapide : l’atrophie graduelle de la volonté par le développement excessif de l’intelligence. […] De plus, les conceptions intellectuelles qui ont envahi ce cerveau, sont étrangères, assimilées, factices : elles ont fait de Roudine un homme expulsé de toutes les traditions nationales, mis à part de sa race. […] Il est étudiant en lettres à Saint-Pétersbourg, car tous ces êtres débilités appartiennent à l’élite intellectuelle ; il est également de l’élite morale. […] Mais Tourguénef était empêché par toute son organisation mentale de connaître ces consolations intellectuelles.
En voyant aujourd’hui à quel poids spécifique on a réduit l’édition ancienne, on se demande si c’est par respect ou par enthousiasme pour Rivarol, que les éditeurs du présent volume se sont donné les airs de faire un choix dans ses ouvrages, de prendre ceci ou de laisser cela, au nom de leur propre goût à eux, éditeurs, et de leurs préférences, ou si c’est plutôt par mépris bien entendu pour le public, qui n’aime et ne lit que les petits livres, quand il les lit toutefois… Ce qu’il y a de certain, c’est que nous n’avons pas là Rivarol ; c’est que nous n’avons en petit paquet que quelques paillettes de ce Pactole intellectuel, qui passa, en brillant, à travers le xviiie siècle. […] Voluptueux intellectuel, il se contenta de s’enivrer du plaisir qu’il donnait aux autres, et il le donnait sur place, à l’instant même, — avec l’idée, avec l’image, avec la parole, le geste, le regard, la voix, jouissant de son esprit comme les femmes jouissent de leur beauté ! […] Pour l’acquit probablement de sa conscience d’éditeur littéraire, M. de Lescure a recueilli, il est vrai, comme un double échantillon des aptitudes littéraires et philosophiques de Rivarol, le Discours (si connu du reste) sur l’universalité de la langue française, couronné par l’Académie de Berlin, et le Discours (moins apprécié) sur l’homme intellectuel et moral, d’un si mâle spiritualisme encore malgré les influences de toutes les philosophies du xviiie siècle, qui tendaient à l’anéantir. […] Chose renversante quand il s’agit de ce volcan intellectuel de Rivarol ! […] J’ai signalé déjà le spiritualisme du Discours sur l’homme intellectuel et moral.
» au radical, qui s’est roulé dans l’ivresse de son capiteux libéralisme à travers tous les escaliers de la démagogie : « Qu’as-tu fait de l’aristocrate d’esprit, de facultés, de naissance intellectuelle que tu étais ? […] c’est pour ce rire de satyre rieur — signe d’infirmité intellectuelle — que Henri Heine, l’un des plus grands poètes de ce temps, a été infidèle au génie de la poésie et des larmes ! […] Il est de la race du grand poète, impie au stoïcisme, qui disait : « Je les attends, les plus enragés stoïques, à leur première chute de cheval. » Ce n’est qu’un épicurien, sentant trop la douleur pour la nier, — mais un épicurien de la Pensée, un voluptueux de l’Idéal et de la Forme, ayant la sensibilité nerveuse de la femme et l’imagination des poètes qui s’ajoute à cette sensibilité terrible… Et, dans les livres où il parle de ses souffrances avec une expression tout à la fois délicieuse et cruelle, il ne songe pas une minute à se poser comme un résistant de force morale et de volonté héroïque… En ces livres, parfumés de douleur, il n’est que ce qu’il a été toute sa vie, dans ses livres de bonheur et de jeunesse, — c’est-à-dire bien moins une créature morale qu’une charmante créature intellectuelle, intellectuelle jusqu’au dernier soupir. […] En vain nous dit-il, entre deux morsures du mal sous lequel il a succombé, que « malgré ses souffrances, il est gai, et que les pensées joyeuses le hantent », je ne connais, moi, rien de plus navrant que ces lettres dans lesquelles l’enchanteur intellectuel qu’il était, en conversation aussi animé, aussi éclatant, aussi poète que dans ses livres, sent la paralysie lui infliger l’affreux mutisme de l’impuissance, et se peint tête à tête avec sa femme deux heures durant, sans pouvoir rien lui dire, lui qui l’adore !
L’impossibilité de la tâche entreprise excitera notre intellectuel. […] Ce Félix fut introduit à la vie intellectuelle vers 1895, je pense. […] Péché de « sentimental », et non péché « d’intellectuel ». […] le bon billet qu’ont les femmes amoureuses d’un intellectuel ! […] Et voici reparaître l’intellectuel.
Ainsi les éléments intellectuels et moraux dominent dans l’amour courtois. […] Ils font consister l’art et la beauté dans la difficulté et dans la rareté : ils font de la poésie un exercice intellectuel. […] On ne saurait faire abstraction de l’opération intellectuelle, qui les a formés : c’est à elle que va l’estime ou l’admiration. […] À partir de Gace Brûlé, l’image est comme pourchassée, exclue, excommuniée : le concept, intellectuel, abstrait, règne seul et souverain.
Son excès de travail intellectuel l’avait de bonne heure rendu sujet à une maladie nerveuse singulière qui développa encore sa sensibilité naturelle si vive. […] Mais ces hommes de doute et d’érudition, ou bien les libertins simplement gens d’esprit et du monde, comme Théophile ou Des Barreaux, prenaient les choses peu à cœur ; soit qu’ils persévérassent dans leur incrédulité ou qu’ils se convertissent à l’heure de la mort, on ne sent en aucun d’eux cette inquiétude profonde qui atteste une nature morale d’un ordre élevé et une nature intellectuelle marquée du sceau de l’archange ; ce ne sont pas, en un mot, des natures royales, pour parler comme Platon. […] Bossuet ne repousse point les lueurs ni les secours de l’antique philosophie, il n’y insulte point ; selon lui, tout ce qui achemine à l’idée de la vie intellectuelle et spirituelle, tout ce qui aide à l’exercice et au développement de cette partie élevée de nous-mêmes, par laquelle nous sommes conformes au premier Être, tout cela est bon, et toutes les fois qu’une vérité illustre nous apparaît, nous avons un avant-goût de cette existence supérieure à laquelle la créature raisonnable est primitivement destinée. […] Il faut citer ce passage d’une souveraine beauté : Qui voit Pythagore ravi d’avoir trouvé les carrés des côtés d’un certain triangle, avec le carré de sa base, sacrifier une hécatombe en actions de grâces ; qui voit Archimède attentif à quelque nouvelle découverte, en oublier le boire et le manger ; qui voit Platon célébrer la félicité de ceux qui contemplent le beau et le bon, premièrement dans les arts, secondement dans la nature, et enfin dans leur source et dans leur principe, qui est Dieu ; qui voit Aristote louer ces heureux moments où l’âme n’est possédée que de l’intelligence de la vérité, et juger une telle vie seule digne d’être éternelle, et d’être la vie de Dieu ; mais (surtout) qui voit les saints tellement ravis de ce divin exercice de connaître, d’aimer et de louer Dieu, qu’ils ne le quittent jamais, et qu’ils éteignent, pour le continuer durant tout le cours de leur vie, tous les désirs sensuels : qui voit, dis-je, toutes ces choses, reconnaît dans les opérations intellectuelles un principe et un exercice de vie éternellement heureuse.
Néanmoins, pour rendre à notre pays un hommage fort bien placé dans la solennité qui nous réunit, et comme préparation à mon enseignement annuel de littérature française, je vais tenter de replacer devant vos yeux une revue de ces richesses intellectuelles de notre patrie. […] J’abrège pour vous présenter un dernier tableau, celui de la domination intellectuelle de notre pays à diverses époques. […] Au quatorzième siècle et au quinzième l’Italie prend la dictature intellectuelle du monde qui semble partagée au seizième ; mais à partir du dix-septième siècle elle revint à la France pour ne plus lui échapper. […] Jusqu’en 1815, l’Allemagne nous semble avoir tenu le principat intellectuel, de par Goethe et Schiller, Herder et Fichte ; mais depuis la Restauration, date d’une seconde Renaissance, depuis l’apparition des Villemain, des Thierry, des Michelet ; depuis l’avènement de Lamartine et de Victor Hugo, quelle est la littérature dont l’Europe, même involontairement, proclame la suprématie irrécusable ?
Il voudrait bassement que le confort fût donné par surcroît à celui qui conquiert l’indépendance intellectuelle et morale. […] Cet individualisme est un héroïsme à la fois intellectuel et moral.
Elle consiste dans le défaut d’homogénéité qui a toujours existé jusqu’à ces derniers temps entre les différentes parties du système intellectuel, les unes étant successivement devenues positives, tandis que les autres restaient théologiques ou métaphysiques. […] Le problème général de l’éducation intellectuelle consiste à faire parvenir, en peu d’années, un seul entendement, le plus souvent médiocre, au même point de développement qui a été atteint, dans une longue suite de siècles par un grand nombre de génies supérieurs appliquant successivement, pendant leur vie entière, toutes leurs forces à l’étude d’un même sujet. […] Ils tiennent à ce qu’il y a nécessairement d’artificiel dans notre division du travail intellectuel. […] Je la crois tellement indispensable, que je regarde l’enseignement scientifique comme incapable de réaliser les résultats généraux les plus essentiels qu’il est destiné à produire dans la société pour la rénovation du système intellectuel, si les diverses branches principales de la philosophie naturelle ne sont pas étudiées dans l’ordre convenable. […] De même, relativement aux phénomènes Sociaux, qui sont encore plus compliqués, ne serait-ce point avoir fait un grand pas vers le retour des sociétés modernes à un état vraiment normal, que d’avoir reconnu la nécessité logique de ne procéder à l’étude de ces phénomènes, qu’après avoir dressé successivement l’organe intellectuel par l’examen philosophique approfondi de tous les phénomènes antérieurs ?
L’exercice intellectuel les occupait plus, ne fût-ce que parce que ces épicuriens, lorsqu’ils nous parlent, sont hors d’âge, condamnés à pécher surtout d’intention et de langue. […] « Si j’avais la main pleine de vérités, je me garderais bien de l’ouvrir. » Ce n’était pas timidité intellectuelle, ou prudence personnelle : c’était délicatesse : il haïssait le tapage, le scandale, les luttes brutales ; tout cela était de mauvais ton ; il était trop bien élevé pour faire l’apôtre ou le tribun. […] Par légèreté et paresse intellectuelle, on a plus tôt fait d’expliquer que vérifier ; et l’on interprète des prodiges qui n’existent pas : témoin la charmante anecdote de la dent d’or, qu’un enfant en Silésie avait, disait-on, en la bouche.
Car il ne s’est pas vu, je pense, de tristesse plus purement intellectuelle. […] Il est donc fait en même temps d’imagination sympathique— et de défiance intellectuelle … et ainsi, il peut être la pire chose ou la meilleure : tout dépend du dosage des deux éléments qui le composent, et ce dosage dépend lui-même du tempérament de celui qui le pratique… Je suis persuadé, pour moi, qu’un dilettante sec est un homme qui aurait été plus sec encore s’il n’avait pas été dilettante. […] Et je me figure que l’origine de ce mouvement, c’est, quoi qu’on en dise, cette curiosité même qui est la marque éminente de notre temps : car on arrive assez vite à reconnaître que la curiosité intellectuelle et sentimentale ne suffit pas pour vivre pleinement, et c’est là une constatation qui a des conséquences.
L’Arabe, qui n’a eu aucun maître, est souvent néanmoins très distingué ; car la tente est une sorte d’école toujours ouverte, où, de la rencontre des gens bien élevés, naît un grand mouvement intellectuel et même littéraire. […] Philon, qui vivait dans un grand centre intellectuel, et qui avait reçu une éducation très complète, ne possède qu’une science chimérique et de mauvais aloi. […] Cet état intellectuel fut toujours celui de Jésus.
Nous voulons rester dans l’ordre purement intellectuel. […] L’impartialité dans l’enthousiasme, qui correspond pour l’esprit à ce qu’est la justice dans l’amour pour le caractère, tel est le trait saillant, particulier, impossible à oublier, de cette belle physionomie intellectuelle, — son fer à cheval de Redgauntlet, à ce noble front ! […] Cette théorie, d’une si originale simplicité qu’elle plonge l’esprit dans l’étonnement qu’inspirent ces vers qui semblent si faciles à trouver, et pour lesquels cependant il ne fallait rien moins que du génie, cette théorie, que son auteur a exposée dans son écrit intitulé : Symbolisme dans l’Architecture, est intégralement, pour qui sait l’y voir, en cet axiome, d’une concentration si profonde ; « L’art tout entier est symbolique de l’état matériel, moral et intellectuel de l’humanité aux diverses époques de son développement. » Mais, de cette profonde concentration, Daly l’a puissamment tirée.
En quelques coups de vent, ces amoncellements disparaissent ; en quelques années, ces systèmes… Demandez-vous quelle grande place tiennent, maintenant, dans le respect intellectuel des hommes, tous ces capucins de cartes philosophiques tombés les uns sur les autres : Kant, Fichte, Schelling, Hégel, qui étaient pourtant, comme on dit au whist, les honneurs du jeu. […] Il est, dans l’ordre du talent, et presque, si on ose le dire, dans l’ordre de la moralité, très au-dessus de Schopenhauer et de Hartmann, de ces deux Chimères bobynantes dans le vide d’une métaphysique laborieusement et logiquement imbécile, et qui n’ont pas dans la poitrine de quoi se faire pardonner le crime intellectuel de leurs misérables têtes, contre la vie et contre Dieu ! […] , et il s’y propage, par une contagion subtile, dans un certain nombre d’esprits qu’elle trouble ; c’est une sorte de maladie, mais de maladie privilégiée, concentrée jusqu’à ce jour dans les sphères de la haute culture intellectuelle… » Que de tortillements pour nous dire que c’est M.
La seconde loi, dont il s’agit à présent, détermine les causes de l’évolution intellectuelle d’un siècle à l’autre. […] Ils conçurent donc d’exalter jusqu’à l’enthousiasme cette discipline intellectuelle. […] Nous le verrons d’abord se chercher, pousser des prolongements dans tous les domaines de l’activité intellectuelle. […] Pour nous dégager de la mentalité positiviste, il ne fallut rien moins qu’une révolution intellectuelle extrêmement violente. […] Elles seules intéressent un historien de la littérature, décidé à étudier l’ambiance intellectuelle d’une époque.
C’est par excès d’intellectualisme qu’on suspend le sentiment à un objet et qu’on tient toute émotion pour la répercussion, dans la sensibilité, d’une représentation intellectuelle. […] Il y a des émotions qui sont génératrices de pensée ; et l’invention, quoique d’ordre intellectuel, peut avoir de la sensibilité pour substance. […] Sur le plan intellectuel, en effet, toutes les exigences de la morale se compénètrent dans des concepts dont chacun, comme la monade leibnizienne, est plus ou moins représentatif de tous les autres. Au-dessus ou au-dessous de ce plan nous trouvons des forces dont chacune, prise isolément, ne correspond qu’à une partie de ce qui a été projeté sur le plan intellectuel. […] comme si l’idée était autre chose ici que l’extrait intellectuel commun, ou mieux la projection sur le plan intellectuel, d’un ensemble de tendances et d’aspirations dont les unes sont au-dessus et les autres au-dessous de la pure intelligence !
Corneille est d’un autre temps, il a et il exprime une nature plus rude et plus forte, qui a longtemps été la nature française, une nature intellectuelle et volontaire, consciente et active. En son temps surtout, c’était la vérité : il y a une harmonie admirable entre l’invention psychologique de Corneille, et l’histoire réelle des âmes de ce temps-là : même les femmes sont peu féminines ; leur vie intérieure est plus intellectuelle que sentimentale. […] Voilà comment Corneille a peint si peu de pures passions : il a peint des exaltés, des fanatiques, mais toujours des passionnés intellectuels, qui voient leur passion, la raisonnent, la transforment en idées, et ces idées en principes de conduite. […] Mais il a la force, et un éclat intellectuel, qui résulte du ramassé de la pensée, de la justesse saisissante des mots, de la netteté logique du discours. […] Son génie et son langage sont éminemment intellectuels ; il ne regarde et n’enregistre que les mouvements psychologiques.
II Savoir est le premier mot du symbole de la religion naturelle : car savoir est la première condition du commerce de l’homme avec les choses, de cette pénétration de l’univers qui est la vie intellectuelle de l’individu : savoir, c’est s’initier à Dieu. […] Le seul moyen de ramener l’ancien ordre de choses, c’est de détruire la conscience en détruisant la science et la culture intellectuelle. […] Guizot, livre inestimable et qui aura le rare privilège d’être lu de l’avenir, car il peint avec originalité un curieux moment intellectuel. Croira-t-on, dans cinq cents ans, qu’un des premiers esprits du XIXe siècle ait pu dire que, depuis l’émancipation des diverses classes de la société, le nombre des hommes distingués ne s’est point accru en France, comme si la Providence, ajoute-t-il, « ne permettait pas aux lois humaines d’influer, dans l’ordre intellectuel, sur l’étendue et la magnificence de ses dons 26 ». […] Notre système d’éducation, sans que nous nous en doutions, est encore trait pour trait celle des jésuites : idée que l’on style l’homme par le dehors, oubli profond de l’âme qui vivifie, machinisme intellectuel.
La situation géographique de notre patrie, ses ressources intellectuelles, la force de nos atavismes, le bon sens indéfectible de la race permettent, néanmoins, les espérances les plus vastes. […] « Le Symbole est le couronnement d’une série d’opérations intellectuelles qui commencent au mot même, passent par l’image et la métamorphose, comprennent l’emblème et l’allégorie. […] Le barrésisme est un développement de l’unité intellectuelle et morale du français. […] Par un violent effort ils ont voulu se placer au centre même du réel, et par une sorte de sympathie intellectuelle, communier avec la nature. Leur désir a été d’exprimer immédiatement l’inexprimable, si j’ose dire, de fondre leur âme avec la conscience universelle afin de noter, par une sorte d’auscultation intellectuelle, jusqu’aux pulsations de la matière, jusqu’à la respiration du monde. » Tancrède de Visan, Paysages Introspectifs, in-8º, 1904.
Allons-nous, sur les conseils des comités coloniaux, devenir une nation polyglotte, sans même nous apercevoir que cela serait un véritable suicide linguistique, et demain un suicide intellectuel ? […] Il vaut mieux perdre son temps que de l’employer à des exercices de déformation intellectuelle.
Les raisons de M. de Gourmont sont purement intellectuelles. […] Nous lui avons reconnu trop peu de sensibilité, nous l’avons trouvé trop purement intellectuel, — dirons-nous pour le craindre ? […] Faguet paraît capable de toutes les fantaisies et de toutes les audaces intellectuelles. […] Paul Bourget traite comme son personnage d’élection et en qui il a présenté un pur intellectuel — mot qu’il tient à conserver tout en condamnant l’abus qu’on en a fait — mais un intellectuel de bon aloi. […] Il est avant tout l’anarchie intellectuelle, celle qui ne met aucune chose à la place qui lui revient.
Ensuite et surtout, il n’y a de pleinement intellectuel que l’unique souci et le respect absolu de la vérité. […] C’est lui qui m’a initié à la haute vie intellectuelle, à l’ivresse de la pensée libre. […] La véritable réalité, souverainement belle et pure, est d’ordre intellectuel. […] Dans l’ordre esthétique et intellectuel, c’est non seulement un maître, mais une espèce de saint. […] Estime personnelle, peut-être, mais intellectuelle, non pas !
Il convient que chaque écrivain fasse sa confession intellectuelle. […] D’ailleurs, la poésie n’est-elle pas réellement une architecture intellectuelle ? […] Qu’il émane de la pierre ou de la parole, le beau est intellectuel. […] La révolte d’un art qui s’adresse surtout aux sens est un fait dangereux pour tout l’ordre intellectuel. […] Le dix-huitième siècle en est-il moins une grande époque intellectuelle ?
Il en est de même pour la tribu intellectuelle génevoise au xviiie siècle. […] Je les définis, au xviiie siècle, toute une tribu intellectuelle, née de Calvin, restée très morigénée en s’émancipant, très philosophisée d’ailleurs et sécularisée, où Bayle est entré, où Fontenelle a passé, mais où, même avec la liberté de penser acquise, il se sent beaucoup de circonspection, de réserve, et une sorte de contrainte. […] En un mot, malgré l’extension morale et la tolérance relative, due à l’influence de Turretin, la cité intellectuelle génévoise restait, à quelques égards, fermée comme la cité politique. […] Si nous revenons à Genève, le baromètre intellectuel et moral y dut éprouver de grandes variations et perturbations, on le conçoit, de la présence dans le voisinage de ces deux météores du xviiie siècle, Voltaire et Rousseau, du passage orageux de l’un et du séjour prolongé de l’autre.
Je ne pense pas que l’espèce humaine ait rétrogradé pendant cette époque ; je crois, au contraire, que des pas immenses ont été faits dans le cours de ces dix siècles, et pour la propagation des lumières, et pour le développement des facultés intellectuelles. […] Les habitants énervés du Midi, se mêlant avec les hommes du Nord, empruntèrent d’eux une sorte d’énergie, et leur donnèrent une sorte de souplesse qui devait servir à compléter les facultés intellectuelles. […] Elle créa des conquérants ; mais elle ne portait eu elle aucun germe de développement intellectuel. […] Néanmoins c’est un genre d’effort intellectuel, qui a singulièrement développé les facultés de l’esprit.
C’était des deux côtés, sous des formes plus âpres ou plus doucereuses, même étroitesse d’esprit, même inintelligence des besoins intellectuels du temps, même indigence de talent et d’éloquence, que ne compensaient pas suffisamment la violence et la malignité. […] Par lui, l’Encyclopédie resta ce qu’il l’avait destinée à être : un tableau de toutes les connaissances humaines, qui mit en lumière la puissance et les progrès de la raison ; une apothéose de la civilisation, et des sciences, arts, industries, qui améliorent la condition intellectuelle et matérielle de l’humanité, ce fut une irrésistible machine dressée contre l’esprit, les croyances, es institutions du passé. […] Il faisait dépendre tout le progrès de l’humanité, tout le développement de la civilisation de la conformation de nos organes ; et par une inconséquence singulière il croyait à la toute-puissance de l’éducation : il estimait que tous les esprits sont ù peu près égaux, et que toutes les différences intellectuelles résultent de l’inégalité de culture ; or, si l’on ramène tout au physique, c’est le contraire qui est vrai ; il n’y a pas d’éleveur qui croie que, pour avoir un bon étalon, il suffit de bien nourrir n’importe quel poulain. […] Les jugements sont des équations, et les termes qu’on assemble sont des objets abstraits, idéaux : nulle part on n’aperçoit mieux que chez Condillac pourquoi l’esprit français au xviiie siècle élimine de sa pensée toute réalité concrète, les formes par conséquent de la vie et la matière de l’art, et pourquoi la poésie ne peut plus être qu’un jeu intellectuel, réglé par des conventions arbitraires.
car les hommes n’ont pas assez de générosité intellectuelle pour s’incliner devant l’Esprit pur, réduit à sa seule force. […] Il n’est pas, qu’on me permette le mot, si hypertrophiquement intellectuel. […] Il avait écrit à jet continu plus de quatre-vingts volumes, parmi lesquels cette Comédie humaine dont il a dit, avec le légitime orgueil qui nous venge de tous nos désespoirs : « Jamais œuvre plus majestueuse et plus terrible n’a commandé le cerveau humain. » La persévérance enflammée de Balzac fut inextinguible… et dans l’ordre moral elle est tout aussi étonnante que sa force de production dans l’ordre intellectuel.
Croirait-on, en effet, si le roman de Guy Livingstone ne l’attestait à toutes ses pages, que le vigoureux byronien dont nous venons d’indiquer les parentés intellectuelles avec l’immortel auteur du Don Juan et du Childe Harold, n’a pas eu assez de sa propre personnalité ou même d’indépendance pour s’affranchir du joug qui pèse sur tant d’esprits anglais, je veux parler de cet horrible pédantisme des Universités anglaises, auprès duquel le pédantisme de la nôtre est presque d’une élégance légère, et qui nous gâte jusqu’au génie d’hommes aussi éloquents que le furent Burke et le grand Chatham ! […] Tout artiste qu’il soit, tout expert des choses de la vie qui font main-basse sur nos affectations et élèvent un homme à la simplicité, tout grandement ou profondément passionné qu’il puisse être, l’auteur de Guy Livingstone porte au milieu de son talent et de son dandysme, que je ne veux point séparer, la tache d’un pédantisme qui, dans le pays du cant sous toutes les formes, est un véritable cant intellectuel. […] La Bible, — cette éducation de l’Angleterre, ce livre grand et terrible où le Dieu jaloux frappe Satan, l’autre jaloux, — la Bible a empreint pour jamais l’imagination anglaise de sa grandeur et de sa terribilité, et c’est elle que je vois rayonner de son feu sombre et âpre aussi bien dans Richardson, qui a fait Lovelace, que dans Milton, qui a fait Satan ; aussi bien dans ce nouvel écrivain qui ajoute dans Livingstone une grande figure à ces grandes figures aimées et hantées par l’imagination de son pays, que dans ce Byron dont il est l’enfant intellectuel.
Il est un artiste très-froid, d’une concentration infinie, arrivant toujours à la chaleur par l’extrême froid, ce qui est une loi de la nature intellectuelle tout autant que de la nature physique ; c’est de plus un esprit analytique des plus perçants, qui a introduit l’analyse jusque dans la peinture, sans que la peinture soit morte du coup ! […] Il croit à l’égalité intellectuelle de l’homme et de la femme. […] La morale, la religion, la métaphysique, toutes les conditions de la nature humaine intellectuelle pèsent sur vous.
Croirait-on, en effet, si le roman de Guy Livingstone ne l’attestait à toutes ses pages, que le vigoureux byronien dont nous venons d’indiquer les parentés intellectuelles avec l’immortel auteur du Don Juan et du Childe-Harold n’a pas eu assez de sa propre personnalité ou même d’indépendance pour s’affranchir du joug qui pèse sur tant d’esprits anglais, je veux parler de cet horrible pédantisme des Universités anglaises, auprès duquel le pédantisme de la nôtre est presque d’une élégance légère, et qui nous gâte jusqu’au génie d’hommes aussi éloquents que le furent Burke et le grand Chatham ! […] Tout artiste qu’il soit, tout expert des choses de la vie qui font main-basse sur nos affectations et élèvent un homme à la simplicité, tout grandement ou profondément passionné qu’il puisse être, l’auteur de Guy Livingstone porte au milieu de son talent et de son dandysme, que je ne veux point séparer, la tache d’un pédantisme qui, dans le pays du cant, sous toutes les formes, est un véritable cant intellectuel. […] La Bible, — cette éducation de l’Angleterre, ce livre grand et terrible où le Dieu jaloux frappe Satan, l’autre jaloux, — la Bible a empreint pour jamais l’imagination anglaise de sa grandeur et de sa terribilité, et c’est elle que je vois rayonner de son feu sombre et âpre aussi bien dans Richardson, qui a fait Lovelace, que dans Milton qui a fait Satan, aussi bien dans ce nouvel écrivain d’aujourd’hui qui vient d’ajouter dans Livingstone une grande figure à ces grandes figures aimées et hantées par l’imagination de son pays, que dans ce Byron dont il est l’enfant intellectuel.
Et elle suppose, chez ceux qui la pratiquent, une grande superbe intellectuelle, une extrême surveillance de soi, et comme une terreur de jouir d’autre chose que des démarches, jeux et prouesses dialectiques de son propre esprit. […] Et, sans doute, le critique « impressionniste » semble ne décrire que sa propre sensibilité, physique, intellectuelle et morale, dans son contact avec l’œuvre à définir ; mais, en réalité, il se trouve être l’interprète de toutes les sensibilités pareilles à la sienne.
Dans la série des espèces intellectuelles, le Moraliste occupe une place nettement circonscrite. […] Ainsi s’explique la singulière mélancolie intellectuelle dont il était atteint dans ses dernières aimées. […] Spinoza, qui fut un psychologue aussi délicat qu’il était un puissant métaphysicien, invitait le Sage idéal de son Ethique à se réfugier dans le « moi intellectuel », — car ce « moi intellectuel » est seul capable de se renoncer lui-même. […] Mais c’est le mal du siècle tombé dans une nature intellectuelle, et c’est une poésie dont le tissu premier est une trame d’idées. […] Cette promenade n’est pas seulement intellectuelle.
Les catégories de l’entendement ou modes de l’être, sont la formule intellectuelle en fonction du Tout. […] D’étroites corrélations, objet de la statique sociale dans le système de Comte, soudent une époque à chacune de ses manifestations intellectuelles et morales, rayons issus d’un même centre. […] L’une procède par analyse et n’atteint que le relatif, l’autre touche à l’absolu par le moyen d’une sympathie intellectuelle qu’on nomme intuition. […] Par un violent effort ils ont voulu se placer au centre même du réel et, par une sorte de sympathie intellectuelle, communier avec la nature. […] N’allez pas croire que le saint, que le soldat consentiraient à s’ensevelir dans un froid linceul intellectuel.
Ces problèmes d’histoire intellectuelle sont bien difficiles et peut-être insolubles. […] Il est devenu quasiment populaire chez nos intellectuels. […] Ce n’était pas du tout un intellectuel. […] Lapie, céder la place il ceux qui suscitent la curiosité intellectuelle ». […] Mais par nature, ce grand intellectuel est un sentimental, un inquiet, un anxieux.
Ce petit canton heureux et florissant, qui depuis quinze ans était un modèle d’ordre, de bien-être, de culture intellectuelle et morale, a été brusquement bouleversé. […] Par un juste instinct, la violence s’attaqua d’abord à ce qu’il y avait de plus moral et de plus intellectuel.
Nobles, bourgeois, ou vilains, il n’y a guère de différence entre les classes ; l’égalité intellectuelle est aussi réelle que l’inégalité sociale ; savoir le latin, savoir écrire, savoir lire, sont choses rares, et qui trahissent quelque relation ou caractère clérical. […] Avec toutes ses misères en somme, sa dureté, sa pauvreté intellectuelle, le moyen âge est grand, surtout il est fécond.
Vous m’écrasez, il est vrai, et vous me le dites trop, de la hauteur des milliers de pieds cubes de l’atmosphère intellectuelle, dans laquelle vous planez, vous gravitez, vous « tourneboulez » au-dessus de moi, — ainsi que s’exprimait René François, prédicateur du Roy, en son Essay des merveilles de nature… Un conseil, M. […] J’accepte le reproche, et n’en ai nulle honte, mes indiscrétions n’étant pas des divulgations de la vie privée, mais tout bonnement des divulgations de la pensée, des idées de mes contemporains : des documents pour l’histoire intellectuelle du siècle.
Cette idée serait de dresser dans un cadre, qui prendrait chaque année plus de profondeur et d’espace, l’inventaire intellectuel du xixe siècle. […] Quant aux principes sur lesquels elle s’appuie… pour clouer, — cette Critique, qui n’est, telle que nous la concevons, ni la Description, ni l’Analyse, ni la Nomenclature, ni la Sensation morbide ou bien portante, innocente ou dépravée, ni la Conscience de l’homme de goût, c’est-à-dire le plus souvent la conscience du sentiment des autres, toutes choses qu’on nous a données successivement pour la Critique, elle les exposera certainement dans leur généralité la plus précise, mais lorsque l’auteur des Œuvres et des Hommes arrivera à cette partie de son Inventaire intellectuel, intitulée : Les Juges jugés ou la Critique de la critique… Seulement d’ici-là, sans les formuler, ces principes auront rayonné assez dru dans tout ce qu’il aura écrit, pour qu’on ne puisse pas s’y tromper.
Les lois de la mémoire et de l’association pourraient s’appeler des lois de sélection cérébrale ou intellectuelle, et il n’est pas moins intéressant de savoir comment survivent ou revivent les idées que de savoir comment subsistent les individus ou les espèces dans la lutte pour l’existence. […] Ce fait prouve que l’opération nerveuse est en partie semblable dans les deux cas, dans la perception et le souvenir, et que le souvenir n’est point un état tout intellectuel. […] Pour avoir la seconde base et l’intérieur de la mémoire, qui en est vraiment l’essentiel, il faut donc ajouter au mouvement : 1° la sensation ou le germe de la sensation ; 2° la réaction appétitive, intellectuelle et motrice qui en est inséparable. […] Enfin les perceptions comme telles sont surtout, à notre avis, la conscience de relations, de différences, de changements et de mouvements : conséquemment elles tiennent de la nature abstraite et superficielle des signes ou symboles ; les émotions, au contraire, sont des états généraux et profonds : elles sont donc autrement difficiles à reproduire qu’une simple esquisse de nature intellectuelle. […] Il est des philosophes qui déclarent la chose impossible et qui prétendent qu’on reproduit seulement les perceptions et états intellectuels concomitants, ainsi que les mots.
Mais ici encore, je crois, la pensée de nos philosophes a été chercher eu Angleterre plutôt des soutiens, des exemples, des vérifications que des principes et l’impulsion initiale : c’est chez nous et de nous surtout que les inventions particulières par lesquelles les Anglais avaient mis leurs intérêts intellectuels et matériels, privés et nationaux, dans les meilleures conditions qu’ils pouvaient, ont assuré la diffusion. […] Nombre d’autres écrivains ou écrivassiers français furent alors les correspondants particuliers de souverains, de princes, de gentilshommes dont la France était la patrie intellectuelle. […] Essai sur les rapports intellectuels de la France et de l’Allemagne avant 1789.
Ce n’est pas Mme Sand qui nous aurait fait accepter, avec ce talent qui est une magie, tous les écrivains de l’Allemagne sur le pied des plus hautes puissances intellectuelles, et nous les eût fait avaler, à nous autres railleurs français, pomme des hosties consacrées, alors que la plupart d’entre eux n’étaient guère que des pains à cacheter ! […] Mme de Staël, à qui des critiques aveugles ont voulu imposer cette monstruosité et fait croire, par là, à toute les femmes bas-bleus qui se sont coupé un jupon dans la queue de sa robe, qu’elles pourraient à volonté être des hommes par le cerveau, aussi bien que nous, Mme de Staël, uniquement femme en ses facultés intellectuelles, le fut encore dans l’emploi qu’elle en fit et les sujets auxquels elle les appliqua. […] C’est cette Mme de Staël, la vraie et non plus l’inventée, dont je ne voudrais pas seulement que les œuvres intellectuelles, mais la vie intime, les noblesses, les vertus, les dévouements et les fautes, car elle commit des fautes, sans nul doute, puisqu’elle avait les passions qui font le génie, — c’est cette Mme de Staël qu’il faudrait montrer, non plus dans les prétentions d’une vanité qu’elle n’eut jamais, mais dans sa toute-puissante faiblesse de femme, aux femmes qui se trompent si grossièrement sur leurs facultés, et leur destinée !
Quelle que soit la verbeuse médiocrité du pauvre Ponson du Terrail, ce nain intellectuel et littéraire, le porte-queue du grand Dumas et l’héritier de sa gibecière aux feuilletons, il y a pourtant, dans ce nain, quelque chose qui ne se trouve pas dans les femmes qui font le plus l’homme dans la littérature. […] elle se plaint quelque part de l’abaissement intellectuel de la généralité des ménages militaires. […] Elle croit que tout est dans la culture de l’esprit ; qu’avec de la pisciculture intellectuelle, on ferait des têtes de femme, des têtes d’homme, comme on fait des huîtres ; et cela pourrait bien être, puisque je me suis laissé dire que les huîtres étaient un mêli-mêlo des deux sexes !
Un poète, il est vrai, Lord Byron, mais Lord Byron malade, spleenétique, agacé, mâchant du mastic et buvant du soda-water, a fait un jour l’éloge osé et peut-être ironique de l’avarice, la passion la plus intellectuelle, disait-il ; ce qui n’est pas une recommandation bien forte pour Bellegarrigue, lequel comprend, lui, l’amour de l’or sous des formes moins concrètes et moins immobiles. […] Une telle théorie de haute impudence manquait au Montfaucon intellectuel du xixe siècle, où tant de théories pourrissent. […] Diogène est un spiritualiste ; il n’avait pas pour la matière et ses jouissances les goûts hardis de Bellegarrigue, dont l’unique mesure intellectuelle et morale est l’argent, et dont l’épouvantable théorie nous donnerait le droit de le mépriser lui-même s’il n’est pas, à cette heure, riche comme un nabab.
Car tel est le but, sinon atteint, du moins visé, du nouvel ouvrage de M. de Rémusat Maintenir le fondement de la philosophie rationaliste, de cette philosophie qui n’est pas autre chose que le protestantisme en métaphysique, mais échapper aux conséquences panthéistiques de cette philosophie, devant lesquelles le monde, plus chrétien encore qu’il ne pense, se cabre encore avec effroi, tel est le but que s’est proposé M. de Rémusat dans sa monographie intellectuelle de Saint Anselme. […] Robinson intellectuel d’un désert qu’il a fait autour de sa propre pensée, il a voulu créer tout, dans le vide qu’il avait creusé. […] Il n’a pas écrit une biographie intellectuelle du penseur, et replacé, après coup, les idées de l’homme, sous le jeu de ses facultés bien étudiées et par l’étude redevenues vivantes, pour voir comment ces idées s’étaient formées, développées et fixées, dans l’action et sous la pression de ces facultés.
Triste chose, au fond, que cette fureur de la parole pour elle-même, que cette espèce de sensualisme intellectuel, qu’un tel asservissement à cette Sirène ! […] Comme tous les hommes d’un talent marqué, qui obéissent toujours plus ou moins à une vocation intellectuelle, il les tenait d’une organisation spéciale, mais il les devait aussi aux fonctions de ce merveilleux sacerdoce qui crée réellement des facultés dans l’esprit des hommes, à la confusion de la métaphysique étonnée. […] Pour qui voit l’enchaînement des questions qui doivent logiquement emplir ce cintre immense, il est facile de reconnaître que l’esprit qui l’a projeté a, en conception première, une vigueur intellectuelle dont on n’a pas assez tenu compte, attiré et captivé qu’on était par le style et l’inspiration de l’orateur.
Or, si l’état de la littérature, c’est-à-dire la force intellectuelle d’une époque, se juge par le nombre et la distinction des livres qui sortent de la plume de ses écrivains, la librairie, qui est l’instrument et le véhicule plus ou moins intelligent de la littérature, se juge d’abord par l’état de cette dernière ; mais elle se juge surtout par ce qui est bien davantage son action directe, positive, réfléchie, personnelle, et nous n’entendons plus ici les livres nouveaux qu’elle édite, mais les livres anciens qu’elle réimprime. […] La pensée contemporaine, qui n’est point une reine pour qu’on la flatte, se soucie médiocrement des livres didactiques où la réflexion a remplacé l’action, et dans lesquels l’originalité de la forme heurte ce besoin d’égalité qui est aussi bien dans nos mœurs intellectuelles que dans nos autres mœurs. […] qu’il était roué de combinaisons intellectuelles.
Bourgeois de fausses lumières et d’éducation intellectuelle, peuple par l’instinct et par la fermeté de l’observation, ils se fendaient au centre même de leur être, et leur ouvrage porta l’empreinte de ce déchirement de leur esprit. […] Brucker, c’est autre chose, il n’a encore qu’une célébrité contestée, et il faut l’avoir touché dans la vie littéraire pour savoir quelle flamme peut tout à coup jaillir de cette nature de naphte, de ce volcan intellectuel. […] III Les Intimes furent le commencement de la grande fermentation intellectuelle de M.
Tout autres sont les forces qui constituent les individus vivans, plantes ou animaux, et peuvent se transmettre entières ou graduellement affaiblies des ancêtres aux descendans, et ces énergies morales et intellectuelles qui produisent les formes variées de l’existence des nations. […] Mais cette action indirecte et médiate, si puissante, si variée soit-elle, suppose toujours, qu’on ne l’oublie pas, la réaction de l’activité intellectuelle et morale de l’homme. […] Il est possible que certaines dispositions intellectuelles et morales se transmettent par hérédité ; mais ces dispositions, très vagues à l’origine, peuvent, selon la direction que leur imprimeront plus tard l’éducation, l’habitude, la volonté, devenir avantageuses ou funestes, cause de décadence ou de progrès. […] Si la masse cérébrale se développe et s’augmente par l’exercice de la pensée, il importe assez peu, nous semble-t-il, que le travail intellectuel aboutisse à la vérité ou à l’erreur. […] A la tête se placent les Anglais et les Allemands, qui, par la découverte et le développement de la théorie de l’évolution, viennent de poser les bases d’une nouvelle période de haute culture intellectuelle.
Ce n’est là qu’un accident qui lui serait commun avec plus d’un partisan des idées démocratiques, si un autre événement notable dans son éducation intellectuelle n’avait suivi : cet événement, ç’a été son association temporaire, mais étroite et intime, au groupe saint-simonien. […] Qu’on se représente où en était, en général, le libéralisme sur la fin de la Restauration ; quelle doctrine peu élevée, peu intelligente du passé, et du passé même le plus récent, méconnaissant et méprisant tout de ses adversaires, purement tournée aux difficultés et au combat du moment, pleine d’illusions sur l’avenir, se figurant que, l’obstacle ministériel ou dynastique renversé, on allait en toute chose obtenir immédiatement le triomphe des idées et des talents, le règne du bien et du beau, une richesse intellectuelle et sociale assurée, une gloire facile, une prospérité universelle. […] Littré dont les opinions philosophiques sont connues, et qui est un disciple de Condorcet autant que d’Auguste Comte, de rendre justice à son aise et en toute conscience, comme il le fait dans le Journal des Savants, aux travaux historiques de MM. de Montalembert et Albert de Broglie, traitant des vieux siècles religieux, si ce n’est en vertu de ce notable changement intellectuel qui vint affranchir l’ancien libéralisme de ses préjugés exclusifs, et qui éleva et étendit tous les points de vue ? […] Guéroult, et la seconde éducation intellectuelle qu’il a reçue, ont dû modifier essentiellement ses idées premières de jeune homme confiant et libéral, comme toute sa génération l’était alors.
La Providence ne nous a donné aucune faculté morale dont il nous soit interdit de faire usage ; et plus notre esprit a de lumières, plus il pénètre dans l’essence des choses, du moins si nous avons soumis ces lumières à la méthode qui les réunit et les dirige : cette méthode n’est elle-même que le résultat de l’ensemble des connaissances et des réflexions humaines : c’est à l’étude des sciences physiques que l’on doit cette rectitude de discussion et d’analyse qui donne la certitude d’arriver à la vérité lorsqu’on le désire sincèrement ; c’est donc en appliquant, autant qu’il est possible, la philosophie des sciences positives à la philosophie des idées intellectuelles, que l’on pourra faire d’utiles progrès dans cette carrière morale et politique dont les passions ne cessent d’obstruer la route. […] L’on a employé les formes de la démonstration pour expliquer la théorie des facultés intellectuelles ; c’est une conquête pour l’esprit philosophique. […] La morale est la nature des choses dans l’ordre intellectuel ; et comme dans l’ordre physique, le calcul part de la nature des choses, et ne peut y apporter aucun changement, il doit, dans l’ordre intellectuel, partir de la même donnée, c’est-à-dire de la morale.
L’idée que les étrangers ont eue de Boileau, et qu’ils ont traduite chacun à sa manière, selon son génie et selon les besoins intellectuels de son pays, ils l’ont prise d’abord dans l’opinion que les compatriotes du poète avaient de lui. […] Une radicale impuissance d’imaginer, qui avait concouru à faire prendre en gré le réalisme des classiques, la sécheresse de sentiment où glissent facilement les natures trop intellectuelles, l’impuissance de penser en dehors de certaines conditions générales, l’anéantissement de la spontanéité et le culte de la forme convenue, trois conséquences d’une vie enfermée dans les bienséances du monde, qui défendent à l’homme de se faire remarquer sous peine de ridicule et de mauvais ton, voilà les traits de cette société qui fera la littérature à son image. Bornée du côté des sens, elle développe son activité intellectuelle avec une étonnante énergie, du seul côté que les habitudes sociales laissent ouvert : elle abstrait, déduit, analyse, avec une dépense effrayante de réflexion et de logique. […] Même quand le sensualisme a détrôné le cartésianisme, la logique idéale et l’analyse mathématique continuent de régner : tous ces philosophes qui donnaient tout aux sens et en dérivaient tout, furent les « plus intellectuels » des hommes.
Voilà donc le premier Rabelais176, l’ami de Budé, le contemporain intellectuel de Marguerite et de Marot, et qui achève avec eux d’éclairer la première période du xvie siècle français. […] Car voilà le trait dominant et comme la source profonde de tout son génie : il a aimé la vie, plus largement, plus souverainement qu’aucun de ses ancêtres ou descendants intellectuels, comme on pouvait l’aimer seulement en ce siècle, et à cette époque du siècle, dans la première et magnifique expansion de l’humanité débridée, qui veut tout à la fois, et tout sans mesure, savoir, sentir, et agir. […] Toute l’animalité s’y peint, dans ses fonctions les plus grossières, comme on y trouve les plus pures opérations de la vie intellectuelle. […] Ce n’était pas trop pour rendre une telle abondance et diversité d’invention, et la sagesse antique devait mêler son vocabulaire à celui de la jovialité gauloise, pour que toute la vie intellectuelle et toute la vie animale pussent se refléter dans la même œuvre.
Une servitude nouvelle est intervenue dans la vie des intellectuels, une servitude ignorée de leurs aînés et que la loi permettait d’éluder avant 1870 : le service militaire obligatoire. […] Les effets bienfaisants de leur campagne se sont fait sentir jusque dans les compagnies de discipline et les bagnes militaires où quelques intellectuels comme Dubois-Dessaule et Darien avaient été envoyés, non pour leurs crimes, mais pour leurs attaches libertaires et par simple délit d’opinion. […] En 1892, le procès de Ravachol, à Paris, montre, par les discussions de presse, que la majorité des intellectuels est sinon acquise, du moins sympathique à la doctrine anarchiste et l’effet s’en produit par l’ouverture en 1893, du Théâtre d’art social où les militants du parti se donnent rendez-vous pêle-mêle avec les écrivains nouveaux. […] Au surplus les considérations qui suivent ne s’appliquent guère qu’à une minuscule fraction de l’élite, dès parvenus et des intellectuels.
D’un air de n’attacher aucune importance aux choses tristes qu’il disait, il me conta qu’il avait assez longtemps vécu très malheureux à Londres, pauvre professeur de français, qu’il avait beaucoup souffert dans l’énorme ville indifférente, de l’isolement et de la pénurie, et d’une maladie, comme de langueur, qui l’avait, pour un temps, rendu incapable d’application intellectuelle et de volonté littéraire. […] Est-ce par la seule magie de sa parole qui provoquait chez ses auditeurs « une sorte de griserie intellectuelle » ? […] Et c’est ainsi qu’il en arrivait à déclarer à Edmond de Goncourt qui le rapporte dans son journal : « Le livre, c’est la parole sous la figure du silence » et encore : « Un poème est un mystère dont le lecteur doit chercher la clef. » Il voulut « incorporer l’abstraction » et pour cela imagina de substituer à la musique des instruments, la musique de la « parole intellectuelle à son apogée ». […] Moréas, après avoir admiré Mallarmé, disait vers la fin : « Je ne rouvrirai plus ses livres. » Pourtant, plus d’un quart de siècle après sa mort, la jeunesse intellectuelle qui a enterré d’un cœur joyeux le Parnasse et qui est en train d’enterrer si résolument le symbolisme, se préoccupe toujours de Stéphane Mallarmé.
Le résultat de ce travail est un portrait intellectuel plus ou moins complet, selon la valeur des documents employés et l’application du critique, de l’écrivain placé dans son milieu : les rapports entre l’homme et l’œuvre se trouvent déterminés ceux entre l’homme, l’œuvre et l’époque, sont indiqués. […] Mais avec la méthode historique et psychologique, le problème est tout autre : il s’agit de rattacher le cours à quelque idée générale, de s’en servir pour arriver à la démonstration de quelqu’une de ces lois que la pensée moderne s’efforce de préciser, ou tout au moins pour suivre dans ses diverses phases un grand mouvement intellectuel. […] Je dis l’illusion, Messieurs, car si vous examinez le mouvement littéraire, artistique et intellectuel du Moyen-Âge, vous reconnaîtrez bientôt que cette nuit n’était pas aussi obscure qu’on a voulu le dire et que, si le courant était tout autre que celui qui devait triompher par la suite, il avait sa force, sa grandeur et sa beauté. […] Et pourtant, je viens avec l’espoir qu’il s’établira bientôt, entre vous et moi, un courant de sympathie intellectuelle, qui vous aidera peut-être à suppléer par vous-mêmes à quelques-unes au moins de mes insuffisances.
La méditation de ce mystique intellectuel coïncide avec un moment de la conception chez les Mères, avec les réflexions qui ont précédé l’élan créateur, avec les examens de Dieu. […] Après les années d’Allemagne, il redoutait un milieu intellectuel qu’il pressentait rétréci, défiant, aigri par les haines politiques. […] Il ne pouvait, comme le sujet d’un grand État administré, se retrancher dans la vie intellectuelle ou contemplative. […] * L’aspect d’une vie de célibataire intellectuel n’est pas toujours facile à établir. […] d’être initiée à la vie idéale par la pensée aimante, par l’amour intellectuel ?
» Il repassa ainsi toute la suite de son développement intellectuel, et je ne sais pas de problème psychique sur lequel on possède de meilleurs renseignements que sur cette vie intérieure de l’auteur des Souvenirs d’enfance et de jeunesse. […] Renan sortit de Saint-Sulpice, ce qu’il emportait de cette austère maison, c’était un sentiment ardent des choses de la conscience ; c’était aussi une solide méthode intellectuelle que lui avaient faite ses travaux de philologie.
À cette date, la défaite politique des classes aristocratiques en a rendu toutes les forces intellectuelles disponibles pour l’activité mondaine et littéraire. […] On peut partager le siècle en quatre ou cinq générations : la première, de Richelieu (1583) à Corneille (1606), a disparu, ou vieilli en 1660 ; la suivante, de La Rochefoucauld (1613) à Bossuet (1627), a sa pleine vigueur, alors que la troisième, celle de Boileau, de Louis XIV et de Racine (1636-1639), entre seulement dans la vie, dans l’activité indépendante et consciente ; la quatrième, de La Bruyère (1643) à Regnard (1633), ne s’avancera au premier plan que dans les dernières années du siècle, tandis que la suivante, avec La Motte (1672), formée avant 1713, inaugurera en sa maturité le xviiie siècle intellectuel auquel les Montesquieu (1689) et les Voltaire ( 169 î) appartiendront tout entiers, gardant seulement en leurs esprits quelques reflets de ce xviie siècle, dont les dernières lueurs auront éclairé leur enfance. D’une génération à l’autre, la brutalité, la volonté diminuent ; la raison étend son activité en élargissant son indépendance, et développe un individualisme intellectuel ; les âmes ont moins de ressort, moins de fierté, une étoffe plus fine et plus molle ; les esprits se clarifient en se simplifiant, jusqu’au moment où ils se compliquent de nouveau, non plus pour obéir à des modes du dehors, mais par un effet de leurs multiples acquisitions. […] Un des premiers, et de cela encore son parti lui sut mauvais gré, le duc de la Rochefoucauld350 comprit que la royauté avait partie gagnée contre la noblesse, et se résigna à recevoir la compensation quelle offrait au lieu de l’influence politique annulée, la sécurité oisive de la vie mondaine, brillamment rehaussée de l’exercice désintéressé des forces intellectuelles. […] Corneille l’enivre ; elle est charmée de Molière, réfractaire en somme à Racine, qu’elle ne sent pas ; preuve que sa nature est foncièrement intellectuelle.
De tous les états intellectuels, c’est le plus dangereux et le plus incurable. […] Comment en sortiraient-ils, en effet, ces misérables qui doutent du sérieux et qui, à chaque effort qu’ils feraient pour sortir de cette paralysie intellectuelle, seraient arrêtés par l’arrière-pensée qu’eux aussi vont se mettre au nombre de ces badauds dont ils ont ri jadis ? […] Le scepticisme s’échelonne ainsi aux divers degrés de l’intelligence humaine, alternant avec le dogmatisme selon le développement plus ou moins grand des facultés intellectuelles. […] Ceci explique comment la science formait une partie essentielle du système intellectuel de Goethe. […] Ce n’est pas une blâmable ambition qui a entraîné dans ce tourbillon toutes les sommités intellectuelles de la première moitié de ce siècle ; ces hommes éminents ont fait ce qu’ils devaient faire pour servir la société de leur temps.
Mais les personnes qui l’entreprirent semblèrent ignorer que l’organisme intellectuel se transforme au cours des siècles, et que — comme l’a démontré M. […] C’est que ces vestiges de l’antiquité grecque et de l’esprit hellène ne constituent qu’une minime partie de notre patrimoine intellectuel. […] L’éducation naturelle vaut l’assouplissement intellectuel. […] Ses émotions sont tout intellectuelles. […] Si Euclide est l’homme des lignes, celui-ci demeure bien l’homme des sonorités intellectuelles.
Mais plutôt entraînement spécial à transformer le retentissement émotif en notions intellectuelles, à changer automatiquement les images concrètes — terrifiantes à l’état d’image — en éléments abstraits de diagnostic, éléments intéressants mais non plus émouvants. Ce passage de l’ordre sensitif à l’ordre intellectuel, du monde des images à celui des idées, nous pouvons le prendre sur le fait en comparant les deux séries de vocables sous lesquels un médecin, d’une part, un profane de l’autre, traduiraient les mêmes tableaux de clinique courante.
De la sensibilité considérée comme source du développement littéraire Un des plus grands obstacles à l’effort intellectuel est la croyance qu’il nuit à la sincérité du sentiment ; on s’applique à ne pas employer son esprit, afin que le cœur parle tout seul. […] Ces grands artistes, si épris de vérité, mais si fermes de sens, avaient, par une ingénieuse convention, associé les signes physiques de la passion, confus et déréglés, aux expressions intellectuelles, nettement déduites et bien claires.
On devait se plaire à la peinture d’amours dégagés d’un érotisme grossier, accueillir même l’exagération des plaisirs attachés à des communications purement intellectuelles et morales. […] Rien n’est bon, rien n’est innocent, rien n’est sans danger dans l’ennemi vaincu ; ni ses doctrines, ni ses habitudes morales, ni ses plaisirs intellectuels.
Le travail intellectuel n’a donc toute sa valeur que quand il est purement humain, c’est-à-dire quand il correspond à ce fait de la nature humaine : l’homme ne vit pas seulement de pain. […] Tout acte intellectuel, comme toute équation, se réduit au fond à A = A. Or, à cette limite, il n’y a plus de connaissance, il n’y a plus d’acte intellectuel. […] Quoique le système juif soit entré dans toutes nos habitudes intellectuelles, il ne doit pas nous faire oublier ce qu’il y avait dans les autres systèmes de profond et de poétique. […] En l’âge de la force, quand l’esprit critique est encore dans sa vigueur, que la vie apparaît comme une proie appétissante et que le plein soleil de la jeunesse verse ses rayons d’or sur toute chose, les instincts religieux se contentent à peu de frais ; on vit avec joie sans doctrine positive ; le charme de l’exercice intellectuel adoucit toute chose, même le doute.
. — Si Barrès, a lieu d’être « laid, cagneux et mal bâti », ressemblait à Apollon, et si, au lieu d’être lâche bassement, il montrait, comme d’autres canailles, quelque jolie bravoure extérieure, Tailhade ne verrait peut-être plus sa nullité intellectuelle et son infamie morale. […] Depuis quelques années, nos intellectuels, croyant peut-être comme les écrivains russes aller au peuple, vont aux diverses populaces qui votent. […] … Renan diminué, Renan plus joli, Renan de salon, Renan journaliste, ô gracieux Renanet, tu as plus de vanité intellectuelle que de joie intellectuelle.
Tout comme la vie intellectuelle, la vie morale a son esthétique qui lui est propre. […] Une fois le moment critique passé, la trame sociale se relâche, le commerce intellectuel et sentimental se ralentit, les individus retombent à leur niveau ordinaire. […] C’est à quoi servent les fêtes, les cérémonies publiques, ou religieuses, ou laïques, les prédications de toute sorte, celles de l’Église ou celles de l’école, les représentations dramatiques, les manifestations artistiques, en un mot tout ce qui peut rapprocher les hommes et les faire communier dans une même vie intellectuelle et morale. […] Mais ces idéaux ne sont pas des abstraits, de froides représentations intellectuelles, dénuées de toute efficace.
Cousin, en disparaissant subitement, ne laisse pas un vide ordinaire : ce n’est pas seulement un individu éminent qui nous quitte, c’est une force, une puissance, une grande influence intellectuelle qui s’évanouit. […] Il m’est arrivé souvent de qualifier ce trio célèbre du titre de régents intellectuels de notre âge. « M. […] « C’était un grand voyageur intellectuel que M.
Pour les juger, il s’attache à déterminer la plupart des facteurs qui ont pu influer sur le développement intellectuel de leurs auteurs, c’est-à-dire le milieu physique, les antécédents héréditaires, l’éducation. […] Installé à Paris à partir de 1860, il entre à la rédaction du Temps, puis devient une figure importante de la vie intellectuelle française protestante, comme en témoignent ces lignes combatives de Zola, publiées dans Le Figaro en 1881 : « c’est notre République surtout qui est menacée d’une invasion de protestants. […] Georg Brandès (1842-1927) : critique et penseur danois, il eut une très grande influence sur la vie intellectuelle et littéraire de son pays.
Les idées morales ou intellectuelles mènent bien plus les hommes que les grossiers intérêts de fortune et de subsistance. […] Au reste, qu’il me soit permis de dire d’avance que si la mission de la parole est finie dans le monde intellectuel, elle n’est pas finie dans le monde moral, et qu’elle doit toujours trouver un asile dans les sentiments religieux. Dans l’ordre politique nous sentons encore les bienfaits de la parole, car c’est elle qui a organisé primitivement la société ; et même l’ordre intellectuel, d’où elle est bannie, n’est riche que des idées qui y ont été apportées par elle.
Tout docteur, philosophe et intellectuel qu’il pût être, Goethe aima cette jeune fille à l’âme transparente, tranquille et profonde, qui resta fidèle à Kestner et ne donna, en retour, à Goethe, que sa main fraîche et cette placide amitié qui tue sans croire être cruelle. […] Goethe est un de ces esprits inventeurs qui sont soumis aux lois d’une organisation despotiquement intellectuelle. […] II23 C’est un livre magnifique d’art matériel, mais aussi d’art intellectuel profond et littéraire, que le livre de Paul de Saint-Victor sur les Femmes de Goethe.
La biographie intellectuelle de Saint-Martin n’était qu’une curiosité philosophique, mais, rattachée à l’histoire du dix-huitième siècle, elle prenait presque aussitôt de la consistance et de la valeur. […] L’illuminisme s’étendait comme une longue nuée sur l’horizon intellectuel du temps. […] Caro, ne pouvait secouer le joug de ses croyances que pour tomber sous le joug de ses illusions, il ne monta point sur l’horizon intellectuel de son temps, comme un astre plein de puissance, mais il s’y coula furtivement, comme un rayon qui s’égare.
C’est un homme de talent et de connaissances à coup sûr, un de ces archers intellectuels qui ont plus d’une corde à leur arc et dont l’esprit, à tendances multiples, a trop de mouvement et de vie pour s’enfermer dans le cercle d’une spécialité, — comme nous disons dans le welche du xixe siècle. […] Sa vocation intellectuelle n’est pas de ce côté, malgré la fascination qui l’y entraîne. […] En effet, malgré les quelques mièvreries libertines de son Monsieur de Cupidon, le dessein de ce livre est sérieux, — ou, du moins, il révèle des facultés d’observation qui peuvent un jour faire la fortune intellectuelle de leur auteur.
Une intuition qui prétend se transporter d’un bond dans l’éternel s’en tient à l’intellectuel. […] Chacun d’eux, intellectuel, lui communiquera quelque chose de son intellectualité. […] Mais, intuitive ou intellectuelle, la connaissance sera marquée au sceau de la précision. […] Mais c’est ce que nos habitudes intellectuelles nous empêchent d’apercevoir. […] Telle est la discipline intellectuelle dont il apporta la règle et l’exemple.
L’habitude de la concentration, c’est-à-dire de l’attention exclusivement portée sur la pensée et son expression intérieure, se prend dans le jeune âge, et d’autant mieux que l’âme est naturellement plus calme, plus intellectuelle, moins fréquemment détournée du but qu’elle s’est fixé par l’éveil subit de la passion ou de l’imagination, puissances de caprice et de distraction. […] En effet, les variétés vives de la parole intérieure, c’est la parole intérieure se rapprochant de la forme hallucinatoire sans l’atteindre ; quoi d’étonnant si elle atteint cette forme chez certains tempéraments prédisposés, surtout quand les circonstances et le milieu intellectuel sont favorables à la croyance au merveilleux ? […] Socrate et Jeanne d’Arc ont donc pu avoir confiance en leurs voix et conserver intactes la finesse et la probité natives de leurs facultés intellectuelles ; et il n’est point étrange que dans l’illusion d’une inspiration divine ces facultés aient trouvé un puissant mobile d’activité confiante et sereine. […] Sa nature intellectuelle et, par suite, morale, était, par elle-même, droite et active ; un veto intermittent, qui le garantissait de toute faute involontaire, suffisait à lui assurer la parfaite sagesse et constituait à lui seul une direction morale complète ; Socrate n’avait besoin ni de préceptes positifs ni d’encouragements. […] Aujourd’hui encore, la parole intérieure morale, avec sa soudaineté, sa concision, son silence sur les motifs d’agir ou de s’abstenir, est sans doute chez nos contemporains en raison inverse du développement intellectuel.
Gœthe, ce pauvre sultan intellectuel, n’a jamais que cette femme-là dans tout le sérail de ses œuvres. […] Dans les lieux bas, les lumières s’éteignent quand elles y entrent… Phénomène que le monde intellectuel répète, le monde matériel et le monde moral n’étant que des répétitions de l’un dans l’autre, — des répercussions. […] Aussi, sachant son vide, connaissant son impossibilité d’être par lui-même, il se rejetait et se retrouvait dans sa nature et dans ses habitudes intellectuelles. […] Seulement il n’avait de ce diable de Voltaire ni le mouvement, ni la souplesse, ni l’abondance, ni la facilité, ni la grâce de singe éparpillant la lumière, ni tout ce flou intellectuel qui distingue Voltaire et que n’eut jamais ce grand sec et pédant de Gœthe. […] Marat, esprit logiquement révolutionnaire, avait sans doute voulu préluder au régicide politique par le régicide intellectuel.
Mais, à y regarder de près, on s’aperçoit que la conviction qu’elles visaient à implanter était loin d’être un état purement intellectuel. […] Il y a pourtant une santé intellectuelle solidement assise, exceptionnelle, qui se reconnaît sans peine. […] Et ne pourraient-ils pas servir à la définition même de la robustesse intellectuelle ? […] Les enseignements de la religion s’adressent en effet, comme tout enseignement, à l’intelligence, et ce qui est d’ordre intellectuel peut devenir accessible à tous. […] Elle consiste à remonter, du plan intellectuel et social, jusqu’en un point de l’âme d’où part une exigence de création.
Qu’il s’agisse de l’élection d’un vocable, il le veut unique, précis et tel que chacun ou chaque série réalise des idéaux sensuels et intellectuels nombreux. […] Son amour des mots indéfinis c’est-à-dire tels qu’ils provoquent dans l’esprit non une image, mais la sourde tendance à en former une et le vif sentiment d’effort et d’élation qui accompagne toute tendance intellectuelle confuse le porta aux sujets où il pouvait le satisfaire, aux époques lointaines et vagues, aux mouvements intimes de l’âme féminine, aux scènes lunaires et aux théogonies mortes. […] L’énorme tension intellectuelle qu’exigeait cette sorte de phrase, le fit concentrer en elle, en sa facture et en sa disposition rhythmique, la plupart de ses forces, et le rendit moins attentif à la composition générale. […] Cette réduction de tout un développement intellectuel, en l’ascendant de quelques formes verbales, la contradiclion entre les facultés d’un esprit expliqué, par la contradiction entre les diverses parties d’un système de style, c’est, dans l’investigation du mécanisme intellectuel de Flaubert, passer de la psychologie à la théorie du langage. […] Aucune des particularités intellectuelles de Flaubert, sauf son emportement, n’a d’analogues parmi celles des épileptiques.
La première, la plus saillante, la plus intéressante des deux, le Scarabée d’or, a ces touches extraordinaires qui annoncent et, promettent ce phénomène intellectuel qu’on appelle le génie fantastique, plus rare que tout autre genre de génie. […] Les combinaisons de l’esprit y sont, et nous avons dit avec quelle force ; mais l’auteur n’y descend jamais de son âpre sphère intellectuelle, et on ne s’y détend pas une seule fois avec un de ces mots qui doublent la vie, qui entrent dans le cœur et qui en sortent. […] Quelques grands noms, contestables d’ailleurs, ne constituent pas cet ensemble d’inventions, de traditions et de parentés intellectuelles qu’on appelle une littérature, et encore, parmi ces grands noms (si on excepte Fenimore Cooper, qui a cueilli la virginité de la Nature américaine), tous les écrivains de ce pays vivent sur le fond commun des littératures de l’Europe. […] Le volume que Baudelaire nous met sous les yeux ne contient que les œuvres inférieures de son héros intellectuel. […] Au milieu des énormités qu’il prend tant de peine à arranger pour l’illusion, il a des sourires qui lui traversent la physionomie comme des éclairs de bon sens et de mépris, mais l’industrialisme américain force le don Juan intellectuel à souper, et il obéit, — comme l’autre, — tout en raillant son Commandeur.
Ni l’un ni l’autre ils n’ont part aux accroissements des puissances intellectuelles. […] C’est toujours la même tentation intellectuelle, la même tentation offerte au même glissement, à la même profonde paresse intellectuelle. […] Aux frontières intellectuelles et aux frontières spirituelles. […] Bergson a déblayé le matérialisme en droit, en théorie ; en justice intellectuelle et mentale. […] Je ne suis pas un intellectuel.
Avec cette sensibilité qui ne fut pas toujours en lui une force saine et gouvernée, mais qui est une force puisqu’elle n’a pas péri dans son excès même, Sainte-Beuve, fatigué probablement de l’esprit raffiné des décadences, sybarite blessé par plus que le pli de ces monceaux de roses dans le calice desquelles nous avons écrasé tant de cantharides pour qu’elles pussent mieux nous enivrer, Sainte-Beuve, en un temps donné, devait par sensualité intellectuelle revenir aux suavités vraies, et, de cette plume qui a écrit Volupté, analyser aussi le plaisir divin que nous donne le premier des grands génies chastes. […] Composée surtout de notes ajoutées à des notes, son Œuvre critique me fait l’effet d’un interminable obélisque de notes sur notules et de notules, sur notes, sur la pointe duquel il y aura toujours de la place pour d’autres notulettes qui viendront… Sûr de rien et curieux de tout, comment voulez-vous qu’un homme puisse être jamais un critique, — un juge intellectuel de ce qui fait la beauté ou la laideur des œuvres humaines ? […] Il s’imprègne, et c’est par là que je veux finir la liste de toutes les qualités intellectuelles du critique aimé du xixe siècle… Les qualités intellectuelles ! je n’ai pas parlé des morales, dont les qualités intellectuelles doivent être doublées pour qu’il y ait un grand critique… La sincérité, la sécurité, l’autorité… Sainte-Beuve y tenait peu, et son siècle peut-être y tient encore bien moins que lui !
L’état de transition est obscur sans doute et difficile à se représenter d’une manière définie, par cela même qu’il n’est aucun terme défini et intellectuel ; mais il est réel. […] C’est sans aucune comparaison intellectuelle avec un point fixe de l’espace qu’en tombant on se sent tomber ; pareillement, c’est sans aucune comparaison intellectuelle avec un point fixe du temps qu’on a le sentiment original de changement, de transition continuelle. […] L’aperception de cette différence est le début de la distinction intellectuelle entre le présent et l’avenir ; elle est à la fois constitutive du présent comme distinct et de l’avenir comme distinct. […] En même temps, sous le rapport intellectuel, il est la projection dans le futur d’un passé déjà connu. […] Toutefois, nous croyons que l’attention n’est elle-même qu’une face intellectuelle de l’appétition ; c’est donc à l’appétition que nous demandons les vrais signes temporels.
Faguet, est moins un livre qu’une existence… Il va là non seulement vingt ans de travail, mais véritablement une vie intellectuelle tout entière… » Ce que la lecture de l’Esprit des Lois permettait à M. […] Montesquieu est un esprit actif qui a toujours étudié, qui, par suite, s’est élargi, enrichi, mais aussi modifié, qui a découvert des points de vue nouveaux, changé son orientation : sa vie intellectuelle comprend plusieurs périodes distinctes. […] Il n’y a qu’un moyen de simplifier et d’éclaircir : c’est de dissoudre l’unité factice, de l’ouvrage, de refaire en sens inverse le travail de Montesquieu, et de prendre l’une après l’autre les diverses tendances, et les périodes successives de son activité intellectuelle, selon qu’elles affleurent ou s’étalent dans l’Esprit des Lois. […] De la nature, le jeune magistrat tenait une certaine sensualité que les mœurs contemporaines développèrent en polissonnerie intellectuelle.
(Ainsi l’ouïe et la vue, sens intellectuels par excellence, prêtent à des sensations plus relevées, plus nobles que le goût et l’odorat.) […] Mêmes distinctions à faire quand il s’agit de beauté intellectuelle. […] Les ordres inférieurs de beauté (sensoriel, sentimental, intellectuel) sont en revanche, non seulement les plus accessibles à la généralité des hommes et des artistes, mais encore indispensables à la réalisation des beautés d’ordre supérieur. « C’est une nécessité pour l’œuvre d’art, a dit Sully Prudhomme33, de caresser les sens. » Et de là, pour le dire en passant, l’importance extrême de la forme. […] Supposons après cela qu’une œuvre appartenant à un ordre supérieur soit supérieure elle-même dans cet ordre et qu’elle ait de plus à un degré élevé ou du moins suffisant les qualités d’ordre inférieur qui lui sont nécessaires ; nous pouvons dire qu’elle aura une valeur plus haute que les œuvres les plus parfaites dont la beauté serait purement sensorielle, sentimentale ou intellectuelle.
Ainsi quand on voit, dans notre moyen âge, nos chansons de geste se former comme les poèmes homériques, puis les trois grands genres littéraires, (épique, lyrique, dramatique) se succéder dans le même ordre que dans la Grèce ancienne, comme il est impossible d’attribuer à l’ignorance de nos ancêtres une imitation voulue ou même inconsciente de la civilisation hellénique, il faut bien convenir que la marche de l’évolution en France a dû être déterminée par une similitude des conditions ambiantes ou par une loi générale gouvernant le développement intellectuel des nations dans leur âge primitif. […] Il faut se demander quels individus ont servi d’agents de transmission entre deux peuples ; il faut rechercher quels Français ont résidé à l’étranger et quels étrangers en France ; quels ambassadeurs, commerçants, voyageurs, quels écrivains surtout ont pu importer ou exporter les denrées intellectuelles qui échappent aux douanes ; quels croisements ont été opérés par des mariages ; quels enfants ont été envoyés de part et d’autre faire ou parfaire leur éducation chez le voisin. […] Il semble que, dans les derniers siècles, les principaux peuples de l’Europe occidentale se soient partagé plus encore que disputé l’honneur d’exercer une sorte de suprématie intellectuelle. […] Il y a ainsi un tel entrecroisement d’échanges intellectuels entre les peuples, qu’il faut, pour chacun d’eux, dresser un compte en partie double avec tableau des sorties et des entrées.
Indépendant, paisible, il s’est fait de l’exclusion des passions, de la vie intellectuelle et contemplative une philosophie, une morale, un bonheur : sa carrière nous offre l’unité d’une belle existence de savant, tout dévoué à la science et à son œuvre. […] Il le montrait seul capable de progrès, ayant seul le privilège du génie individuel qui est l’agent actif du progrès, seul fait pour la moralité, et pour trouver le bonheur dans l’exercice continu de ses facultés intellectuelles.
d’une chose : c’est d’avoir, en reculant la ligne d’ombre vers les hautes ténèbres intellectuelles, suscité à nos esprits qui vous ont suivi quelque crépusculaire illusion d’un radieux midi ; c’est d’avoir, levant, d’un geste, nos yeux vers l’éblouissement interdit de l’absolu, d’avoir obscurci en nous le sens de la clarté. […] Il y a, par le monde, sept ou huit mathématiciens d’une grande force intellectuelle.
Quand on pense que le travail intellectuel de siècles et de pays entiers, de l’Espagne, par exemple, s’est consumé lui-même, faute d’un objet substantiel, que des millions de volumes sont allés s’enfouir dans la poussière sans aucun résultat, on regrette vivement cette immense déperdition des forces humaines, qui a lieu par l’absence de direction et faute d’une conscience claire du but à atteindre. […] Celui qui, avec nos besoins intellectuels plus excités, ferait maintenant un tel acte d’abnégation, serait un héros.
Je jouis de leurs économies de pensée ; je suis reconnaissant à ces pauvres gens qui m’ont procuré, par leur sobriété intellectuelle, de si vives jouissances. […] Les brillantes éclosions intellectuelles sortent d’un vaste fonds d’inconscience, j’ai presque envie de dire de vastes réservoirs d’ignorance.
Lyell, n’hésite pas cependant à écrire : « Nous ne devons pas considérer comme admis que chaque amélioration des facultés de l’âme dépende d’un perfectionnement de la structure du corps ; car pourquoi l’âme, c’est-à-dire l’ensemble des plus hautes facultés morales et intellectuelles, n’aurait-elle pas la première place nu lieu de la seconde, dans le plan d’un développement progressif1 ? […] En un mot, s’il n’y avait pas d’autres faits que ceux que nous venons de signaler, on pourrait conclure d’une manière à peu près sûre de l’instrument au musicien, comme du cerveau à la pensée, mesurer le génie musical par la valeur de l’instrument, comme les matérialistes mesurent le génie intellectuel par le poids, la forme, la qualité des fibres du cerveau.
Si la forme intellectuelle de l’être vivant s’est modelée peu à peu sur les actions et réactions réciproques de certains corps et de leur entourage matériel, comment ne nous livrerait-elle pas quelque chose de l’essence même dont les corps sont faits ? […] La connaissance intellectuelle, en tant qu’elle se rapporte à un certain aspect de la matière inerte, doit au contraire nous en présenter l’empreinte fidèle, ayant été clichée sur cet objet particulier.
Il aura du moins une éducation intellectuelle. […] Léon Daudet, qui a commencé sa vie intellectuelle par de fortes études de médecine, est doué supérieurement de l’un et de l’autre don. […] Quoi de plus opposé que la dialectique et l’émotion, la sèche analyse intellectuelle et la frénésie de l’appétit sentimental ? […] On hésite à prendre trop au sérieux un carnaval intellectuel, dont un Rodolphe Salis fut le facétieux chef d’orchestre. […] L’enfant classe les lettres, de ses doigts fins qui révèlent déjà son aristocratie intellectuelle.
Le premier théorique ou, si l’on aime mieux, intellectuel est essentiel : un art qui ne tend pas vers l’absolu se nie. […] Le terrain de communion, c’est le jeu intellectuel et l’innovation esthétique : le spectateur est prévenu ; il sait où il va. […] Et songez que le monde, le demi-monde, le quart de monde, la bourgeoisie, grande et petite, les intellectuels, les artistes et un certain appoint d’artisans, d’employés, composent ce qu’on appelle aujourd’hui « une belle salle ». […] S’ils désespèrent de toucher le public, en même temps, de la même manière au point sensible — esthétique, moral, intellectuel ou religieux — ils viseront plus bas, certains de l’atteindre à coup sûr dans sa sensualité élémentaire. […] L’échange ne sera pas facile ; car l’anarchie morale et intellectuelle n’a fait que croître et embellir.
Or le contentieux n’est pas réglé à l’égard des intellectuels qui n’ont pas su éviter le carnage et qui ont poussé par leur nationalisme toute une génération dans les tranchées. […] Toute poésie, toute vie intellectuelle, morale, est une révolution, car toujours il s’agit pour l’être de briser les chaînes qui le rivent au rocher conventionnelax. […] C’est par le plus grand des hasards en apparence qu’a été récemment rendue une partie du monde intellectuel et de beaucoup la plus importante dont on affectait de ne plus se soucier. […] Crevel récuse tout alibi intellectuel à ce passage à l’acte crapuleux. […] Il fonda en 1920 une école du Savoir ou de Sagesse, ouverte aux sagesses orientales, aux théories jungiennes et aux échanges intellectuels avec la France.
On observe d’ailleurs cette même exagération de la mémoire spontanée chez des hommes dont le développement intellectuel ne dépasse guère celui de l’enfance. […] Dans les « amnésies systématisées » des hystériques, par exemple, les souvenirs qui paraissent abolis sont réellement présents ; mais ils se rattachent tous, sans doute, à un certain ton déterminé de vitalité intellectuelle, où le sujet ne peut plus se placer. […] De ces diverses considérations sur la vie mentale inférieure découlerait une certaine conception de l’équilibre intellectuel. […] S’agit-il d’un travail intellectuel, d’une conception à former, d’une idée plus ou moins générale à extraire de la multiplicité des souvenirs ? […] S’il est vrai que notre vie intellectuelle repose tout entière sur sa pointe, c’est-à-dire sur les fonctions sensori-motrices par lesquelles elle s’insère dans la réalité présente, l’équilibre intellectuel sera diversement troublé selon que ces fonctions seront lésées d’une manière ou d’une autre.
Leurs dieux sont Diderot et Goethe dans leurs parties les plus intellectuelles. […] C’est la plus haute forme de perversité, l’intellectuelle. […] Comment, à un moment donné, un pays tout entier subit-il une invasion intellectuelle ? […] La première est intellectuelle et artistique. […] Il se cherche à travers sa double activité intellectuelle ou sentimentale.
L’amitié tout intellectuelle qui l’unissait à M. […] Il est mort fidèle à lui-même, invinciblement dévoué à la beauté intellectuelle et morale. […] Il professait que les choses intellectuelles sont toutes également saintes. […] Son idéal moral, c’était la perfection intellectuelle. […] Et ce serait l’apanage de l’aristocratie intellectuelle de la nation.
Elle n’était pas protestante : elle ne songea jamais à rompre l’unité ; mais sa foi avait de trop vives sources pour s’accommoder de la sécheresse des scolastiques ; elle engageait dans sa religion de trop nobles aspirations intellectuelles et morales pour ne pas mépriser l’ignorance et la brutalité des moines. […] Et, la première peut-être, la reine de Navarre a noté, entre la passion physique, seule connue aux conteurs bourgeois, et la passion intellectuelle, idée des lyriques courtois, une autre passion, qui est la vraie, la pure passion de l’âme, celle des tragédies de Racine170. […] Tandis que Marguerite, toute mystique, indifférente aux dogmes et aux cérémonies, revenait pour sa sûreté aux pratiques et professions du catholicisme, Marot, un intellectuel à qui il fallait des idées claires, s’engagea à fond dans la Réforme. […] L’indignation est la seule passion où il aille de lui-même chercher une source de poésie : c’est le sentiment le plus accessible à la mollesse épicurienne et à la sécheresse intellectuelle ; l’Enfer s’explique par la révolte d’une chair délicate, et d’un esprit juste, devant la souffrance physique injustement infligée.
Il avait une bonté intellectuelle sans tendresse, et il aimait ses amis solidement, vigoureusement, sans agitation ni expansion. […] Il a eu la superstition du sujet : étant né pour faire de petits tableaux d’une grande intensité d’impression, sans signification intellectuelle ni liaison rationnelle, il a inventé des lieux communs d’une banalité désespérante pour les encadrer, comme dans la satire X. […] D’autres genres, surtout les grands genres, sont définis par le caractère intellectuel et sentimental de leur imitation : satire, ode, épopée, tragédie, comédie. […] Mais la grande loi reste toujours la vérité, d’autant que ces natures tout intellectuelles du xviie siècle ne sauraient se plaire aux objets où leur raison ne trouve point de vérité.
D’abord, il y a des chances pour que l’on soit heureusement doué et, par les qualités physiques et intellectuelles, au-dessus de l’ordinaire. […] On apprend en même temps ce qu’il peut y avoir quelquefois d’originalité intellectuelle et morale sous la misère et l’humilité des apparences. […] Mais enfin l’effort intellectuel qu’exige cette opération ne diffère pas essentiellement de celui que fait un bon joueur d’échecs. […] C’est, du reste, un don moral autant qu’intellectuel.
Elle a son outillage intellectuel, si l’on peut dire. […] Elles donnent un tableau exact des préférences et des préoccupations intellectuelles de cette génération de poètes et d’écrivains. […] Le Symbole est le couronnement d’une série d’opérations intellectuelles qui commencent au mot même, passent par l’image et la métamorphose comprennent l’emblème et l’allégorie. […] Les meilleurs en sont même exactement à cet instant de la vie où l’homme est maître de ses plus amples forces intellectuelles, et s’ils sont les poètes d’aujourd’hui, ils sont encore les poètes de demain.
Dans ce point morbide de son organisation intellectuelle est la cause des disparates de son œuvre et de chacune de ses œuvres, la raison aussi pour laquelle ce sont les femmes et les jeunes gens qui sont le plus touchés par son génie, la cause de ses douleurs amoureuses si vite oubliées et si variables qu’on n’en connaît pas les objets, de ses gaietés subites, des hauts et des bas de son style, des sujets auxquels il s’est appliqué, de son originalité, qui se résume en l’alliage de tous les contraires. […] Mais cette diversité de sentiments préserva d’autre part Heine d’en être totalement envahi, l’état de sa conscience, ce qui constituait son moi, variant sans cesse il fut amené comme toutes les personnes qui ont une vive activité intellectuelle, beaucoup (le pensées, beaucoup de volonté, à éprouver, connaître, distinguer ces changements intérieurs, à s’analyser particulièrement dans ses sentiments, et à en diminuer ainsi non seulement l’intensité, mais la franchise, la vérité, un sentiment n’étant véritable que quand on n’a pas la liberté d’esprit de le discerner, c’est-à-dire de nouveau quand on en a peu et de durables. […] À sa nature de poète plus sensible qu’intellectuelle, il fallait l’illusion d’un être qui écoulât ses plaintes secrètes, avec qui il put entrer en contestation dans ses veilles, qui lui promit au bout de sa lente dissolution, avec une consolante immortalité, la permanence de sa vie personnelle. […] Une race aussi homogène et aussi nettement caractérisée doit laisser dans l’organisation intellectuelle de ses représentants une série d’émotions et d’idées puissamment intégrées.
Après tout, je l’ai dit et j’insiste, c’était un homme d’esprit et de talent, auquel on pardonnait ses prétentions, ses affectations, ses bouches-en-cœur intellectuelles, son cailletage, son maquillage, tout ce qu’il devait aux bas-bleus au sein desquels il a toute sa vie mitonné, et on les lui pardonnait parce qu’il aimait l’esprit avec la passion vraie qui fait tout pardonner, parce qu’il avait l’humeur facile, la bonne humeur, le goût large sans bégueulisme, l’appétit fringant des faits curieux et des idées nouvelles, et la dégustation des nuances. […] VI Et, en effet, mourir n’est rien, quand on meurt dans la logique de son esprit et l’honneur intellectuel de sa vie ; mais être traîné aux gémonies des idées communes qui ont fait, toute une vie, hausser les épaules de mépris, et s’y traîner soi-même, vivant encore, voilà vraiment ce qui nous autorise à dire que Philarète Chasles a vécu un livre trop tard ! […] Philarète Chasles, qui ne comprend plus la critique que comme un quaker, est tellement victime de son attendrissement humanitaire qu’il ne sait plus positivement où il en est quand il s’agit de juger les divers mérites intellectuels des hommes et d’établir, entre ces mérites, la hiérarchie incontestable et nécessaire. […] Mais je prendrai Balzac à part, parce que Balzac, incomparable à tous les autres, grandeur intellectuelle aussi absolue que le peut être la grandeur humaine, est le plus renversant exemple de l’égarement de la pensée de Chasles, toqué et tiqué de moralité.
C’est ainsi que les Baudelairiens, les Parnassiens, les Symbolistes composent une sorte de famille intellectuelle contre qui se trouve disposée à lutter la dernière génération. […] Croit-on donc qu’une pareille invasion compte pour peu de chose dans l’histoire intellectuelle d’un peuple ?
Certaines opérations purement intellectuelles, telles que la mémoire, dépendent des actions matérielles ; fait qui a été admis, quoique à regret, par les partisans d’un principe immatériel. » On en est donc venu à considérer l’union de l’esprit et du corps comme de plus en plus intime et à dire « que l’esprit et le corps agissent l’un sur l’autre ». […] S’agit-il d’un travail intellectuel (l’étude des langues, des sciences, etc.), on voit que le travail d’acquisition est nécessairement une opération qui cause une grande déperdition nerveuse.
Nulle œuvre intellectuelle ne produira un grain de blé. […] Trois hommes au moins l’ont connu depuis que les prétendus intellectuels ont perverti l’intelligence humaine, depuis que les sophistes, vendeurs de fausse science, ont triomphé des Socrate, donneurs de vraie sagesse.
Par son entremise, deux forces ont été mises bout à bout et additionnées, une économie d’efforts a été réalisée ; grâce aux issues qui lui furent ouvertes l’énergie intellectuelle d’une époque, rassemblée jusque-là sur elle-même, put se dépenser en des réalisations immédiates, alors qu’elle eût dû peut-être s’exténuer longtemps encore eu recherches et en inventions de procédés et de moyens. […] Il semble en effet difficile de faire honneur à l’antiquité, si pauvre sous ce rapport, de l’étonnant essor de l’esprit scientifique et il paraît plus équitable de voir, en cette manifestation de l’esprit où excellera l’humanité moderne, le fruit venu à maturité de la discipline et de l’ardeur intellectuelle du moyen âge.
Attiré, entraîné par le besoin chaque jour plus vif des améliorations matérielles, l’esprit public, perdu de sensations, se détacherait-il des travaux purement intellectuels pour appliquer son effort aux choses de la science utile et de l’industrie ? […] Il faut en prévenir le lecteur : avec cette rareté de livres que nous signalions tout à l’heure, et malgré notre dessein de marquer ici dorénavant le mouvement intellectuel, nous ne nous astreindrons pas à l’ordre chronologique des publications.
Il suit donc, en principe, la même direction intellectuelle que les Sainte-Beuve, les Taine et les Renan. […] Fut-il jamais divertissement plus intellectuel ? […] Et par milieu, il n’entend pas seulement le milieu physique, mais aussi le milieu intellectuel et social. […] Une intense ardeur intellectuelle s’exprime chez lui en style volontairement géométrique.) […] Ce peut être une passion intellectuelle, un amour des idées ou du beau, non des créatures vivantes.
Une seule et même pensée de rétrécissement intellectuel circule sous la boîte crânienne des critiques. […] Il a la clarté, l’élégance, la tendresse et l’admirable ironie, qui sont les qualités de votre sol intellectuel. […] Il faut que ceux qui ont quelque chose à dire et à faire supportent toujours la peine de nos timidités intellectuelles et de nos lâchetés morales. […] On peut être un grand poète, sans être toujours un intellectuel. Mais quand on est un intellectuel, on est aussi, toujours, un grand poète.
Pendant deux générations remarquables d’ailleurs par leur activité intellectuelle, l’Angleterre avait abandonné l’étude scientifique de l’esprit humain que cultivaient avec éclat les philosophes du continent. […] Laissant à ce qu’elle appelle la vieille psychologie la contemplation de l’âme elle-même et la solution des problèmes métaphysiques qui s’y rattachent, elle ns regarde, ne voit l’homme que dans les faits, dans les actes, dans les œuvres de sa vie intellectuelle et morale, l’étudié par conséquent dans son histoire, sans chercher à sonder les mystères de sa nature intime. […] Et cette nécessité ne devient ni plus impérieuse ni plus évidente par la fréquence des actes intellectuels dont elle fait le caractère propre. […] Quand elle a montré, par le genre d’observation et d’analyse qui lui est propre, que l’acte volontaire a son antécédent dans un acte intellectuel, tout n’est pas dit sur la cause véritable du phénomène dont elle a constaté la loi. […] S’il existe un monde dont tous les éléments ou les faits échappent à tous nos moyens d’observation extérieurs, et ne tombe que sous un sens intime ; si les faits de cet ordre, supérieurs à tout ce qui se présente à titre de phénomènes, antérieurs à tout procédé artificiel de raisonnement, sont les vrais, les seuls principes de la science, et bien spécialement de celle de l’homme intellectuel et moral ; celui qui se serait livré à cette étude extérieure, qui, travaillant à constater les faits primitifs de sens intime, à les prendre à leur source, à les distinguer de tout ce qui n’est pas eux, et de tout ce mélange du dehors qui les complique et les altère, celui-là ne serait-il pas en droit de s’écrier à son tour, et peut-être avec plus de fondement que Newton : Ô psychologie, gardez-vous de la physique, gardez-vous même de la physiologie23. » Maine de Biran était trop sévère pour une école psychologique qui a donné de précieux résultats ; mais ce sera toujours l’invincible force et l’immortel honneur de l’école dont il est le père, d’avoir rappelé les observateurs de la nature humaine aux enseignements de la conscience.
Nous ne sommes plus, comme autrefois, le centre du monde intellectuel. […] Bourget l’applique aux créations intellectuelles. […] Tout lui est en proie plutôt qu’en aliment de ce qui constitue la nourriture intellectuelle de l’homme. […] C’est une tendance morale qui guide l’un ; c’est une tendance intellectuelle qui conduit l’autre. […] Elle intronise une divinité dialectique dans un ciel intellectuel.
A ce panorama tout intellectuel, la psychologie des idées-forces doit substituer l’action ; elle doit considérer les idées comme des formes non pas seulement de la pensée, mais du vouloir ; ou plutôt ce ne sont plus des formes, mais des actes conscients de leur exertion, de leur direction, de leur qualité, de leur intensité. […] On peut même aller plus loin et dire que tout discernement contient déjà un choix pratique rudimentaire, que toute détermination intellectuelle est en même temps une détermination de l’activité, surtout dans les sens primordiaux, qui sont par essence vitaux, et où la réaction est inséparable de la sensation. […] Les discernements en apparence indifférents sont un résultat ultérieur ; même en ce cas, l’adhésion que nous accordons à ce qui nous paraît tel ou tel est encore une préférence intellectuelle, une détermination en un sens plutôt qu’en un autre, — ce qui, bien entendu, n’implique aucun libre arbitre. […] Nous pouvons donc donner au sujet qu’étudie la psychologie un nom plus précis et d’un sens moins intellectuel ; nous pouvons dire : la psychologie est l’étude de la volonté. […] Le second volume sera consacré plus spécialement à ce qu’on nomme la vie intellectuelle.
Comment s’opère cette transformation d’un trait de plume matérielle, sur un morceau de matière blanche, appelée papier, en une substance immatérielle et tout intellectuelle, appelée pensée ? […] XI Une des circonstances qui grandit en moi ce vague sentiment littéraire m’est encore présente à l’esprit ; j’aime à me la retracer quand je me demande à moi-même d’où m’est venu l’instinct et le goût des choses intellectuelles. […] Sa figure avait la franchise virile du soldat ; mais ses yeux pénétrants, sa bouche pensive, ses joues pâlies par l’étude annonçaient aussi l’homme intellectuel et le cœur sensible jusqu’à la mélancolie. […] C’était l’homme intellectuel couché sur ses œuvres : une litière de pensées humaines sous l’animal pensant ! […] Je ne m’en dédis pas ; il y a dans les affaires humaines, en apparence les plus communes, un aspect intellectuel et oratoire vers lequel les esprits les plus positifs doivent toujours tendre à leur insu ou sciemment pour dignifier leur œuvre ; ce qui ne peut pas être littérairement bien dit ne mérite pas d’être fait.
Le plus grand des mathématiciens, dans ses habitudes d’abstraction philosophique et de pures jouissances intellectuelles, estimait que ces détails d’arrangement et de ménage humain, dont au reste il savait doucement s’accommoder, ne méritent pas qu’on y prenne parti ni qu’on s’en émeuve ; et comme le disait spirituellement M. […] Cuvier, non encore partagé par la politique ou par l’administration et tout entier à la science, à la vie intellectuelle, prolongeait bien avant dans la nuit avec quelques amis dignes de l’entendre, sous les grands arbres du Jardin des Plantes, des entretiens « dignes de Platon ! […] Il est peu d’esprits qui conservent ainsi jusqu’au terme toute leur vivacité d’appétit intellectuel.
Elle portera sur les cinq ordres de qualités qu’une œuvre peut avoir en vertu de la définition précédente : qualités sensorielles, sentimentales, intellectuelles, tendancieuses, idéales ou supra-sensibles. […] On possède en un mot un résumé de son activité et de son évolution intellectuelle. […] Il sera aussi facile de constater laquelle ou lesquelles parmi les facultés intellectuelles a ou ont le plus de part dans une œuvre littéraire.
L’activité intellectuelle était pour lui un besoin intime, très impérieux, une réclamation incessante de sa nature. […] Il est bien, je crois, le premier qui ait dit que la démocratie abaisse le niveau intellectuel des gouvernants. […] Son cas, au point de vue intellectuel, comme au point de vue moral, est un dilettantisme inquiet. […] Il a une formidable curiosité intellectuelle et une terrible curiosité sentimentale. […] C’était une âme faible, malgré son activité intellectuelle et sa puissance de travail.
Notre tradition intellectuelle proteste contre l’esthétique nécessaire du réalisme. […] Si l’on admet qu’il y a des types intellectuels particuliers aux grandes familles humaines, on reconnaîtra aisément dans le type intellectuel slave la survivance du type hindou. […] De par la volonté du fondateur, les académiciens seront les sergents-instructeurs de son peuple pour toutes les disciplines intellectuelles. […] C’est là leur véritable service, leur meilleure contribution au progrès intellectuel du pays. […] Son histoire intellectuelle nous est contée dans toutes ses phases, éducation, jeunesse, stage dans l’administration.
À vrai dire, certains climats sont meilleurs que d’autres pour certaines productions, soit physiques, soit intellectuelles ; à vrai dire aussi, il y a des époques de recul, où les circonstances (guerres, etc.) étouffent les semences naturelles du génie : il naît une foule de Cicérons qui ne viennent pas à maturité. […] Ce rationalisme mondain tire ses principes de la mode, des convenances, de l’opinion ; il n’admet point de vérité, de beauté hors des choses qui ont cours dans la société polie ; et, comme le mouvement général des idées, en France, à cette date, porte vers l’esprit et vers la science, vers l’exercice exclusif des facultés intellectuelles et discursives, l’idéal mondain est forcément l’exagération de cette tendance.
J’admire ici je ne sais quelle légèreté dans l’ampleur et une puissance intellectuelle qui a l’air de n’y pas toucher. […] Les joies de la contemplation intellectuelle, la beauté de l’ordre comme ordre, voilà ce dont on ne veut plus entendre parler. […] Une puissante génération intellectuelle et littéraire s’annonce. […] De là, un certain caractère abstrait de sa personnalité intellectuelle et de son inspiration musicale. […] Baptiste était le cacique et aussi « l’intellectuel » de la famille.
C’était en lui que s’incarnait réellement la force intellectuelle de la France ; c’était pour satisfaire à ses instincts artistiques que pensaient et qu’écrivaient des hommes comme Baudelaire, comme Flaubert, comme M. […] À ne reconnaître pourtant que la compétence d’une sorte d’aréopage intellectuel, on aboutit, il est vrai, par une voie directe, à la constitution de ce qu’on a appelé, non sans une nuance de dédain, le mandarinat. […] Son sang-froid intellectuel ne le quitte pas, même au milieu des spasmes d’un plaisir convulsif ; quand la femme qu’il possède le serre contre son cœur, à quoi songe-t-il ? […] Nos descendants verront en eux la représentation d’un certain état mental qui, s’il n’a pas pénétré dans les masses profondes, s’est à coup sûr assez largement répandu chez l’aristocratie intellectuelle de notre temps. […] Si un ensemble de formules et un corps de théories peuvent, dans une mesure appréciable, peser sur le développement intellectuel d’un artiste, même génial, il est beaucoup moins évident qu’elles aient jamais modifié toute une génération d’écrivains, même secondaires.
Le raisonnement n’est pas le seul mode légitime d’activité intellectuelle. […] J’ai pensé que ce serait peut-être l’occasion d’étudier sa fameuse évolution intellectuelle. […] L’enseignement classique n’est pas un instrument d’obscurantisme, mais d’affranchissement intellectuel. […] Michel trop infecté de poison intellectuel, ne sera qu’un raté. […] Romain Rolland tire de son idée-fixe un absolu mépris de l’élément intellectuel.
Nous verrons plus tard comment, dans la littérature et la poésie, on s’efforce de suppléer à ce défaut de nos deux sens les plus intellectuels et les plus abstraits. […] Vivre d’une vie pleine et forte est déjà esthétique ; vivre d’une vie intellectuelle et morale, telle est la beauté portée à son maximum et telle est aussi la jouissance suprême. […] Un plaisir qui, par hypothèse, serait ou purement sensuel, ou purement intellectuel, ou dû à un simple exercice de la volonté, ne pourrait acquérir de caractère esthétique. […] Les plaisirs plus intellectuels acquièrent au contraire une valeur croissante. […] En effet, un langage où tout est rythmé et régulier économise l’attention, l’effort intellectuel.
Son résultat dernier, c’est que la vie intellectuelle consiste en deux procédés fondamentaux : l’un qui unifie, l’autre qui différencie ; l’un qui saisit les analogies, égalités, identités, l’autre qui s’attache aux oppositions et aux contrastes ; l’un qui assimile les impressions, l’autre qui les désassimile ; l’un qui consiste en une intégration, l’autre en une désintégration. Voyons comment l’auteur arrive à ce résultat ; comment il établit cette unité de composition des phénomènes intellectuels ; et comment ce double processus, par son jeu incessant et ses complications innombrables, constitue notre vie mentale. […] Dans notre marche régressive, nous descendons d’un phénomène intellectuel à celui qui en est la condition immédiate et l’appui. […] L’acte intellectuel le plus complexe, dit M. […] Le fait remarquable, c’est que cette confiance excessive dans la raison, comparée aux modes inférieurs de l’activité intellectuelle, ne se voit pas chez ceux qui sont arrivés avec elle à des résultats si étonnants.
II Il y a dans toutes les choses humaines, matérielles ou intellectuelles, une partie usuelle, vulgaire, triviale, quoique nécessaire, qui correspond plus spécialement à la nature terrestre, quotidienne, et en quelque sorte domestique, de notre existence ici-bas. Il y a aussi dans toutes les choses humaines, matérielles ou intellectuelles, une partie éthérée, insaisissable, transcendante, et pour ainsi dire atmosphérique, qui semble correspondre plus spécialement à la nature divine de notre être. […] la poésie ou l’émotion par le beau, la poésie, cette essence des choses contenue dans une certaine proportion en toute chose créée par Dieu, la poésie cessera d’être ce qu’elle est, parce que le poète doué de ce sens sublime, l’émotion par le beau, ne consentira pas à ravaler ce sens intellectuel à une puérile symétrie et à une vaine consonance de sonorité ? […] La partie sensuelle ou musicale de ce langage poétique devait peut-être prédominer alors sur la partie intellectuelle et immatérielle de la pensée. […] Le titre et la forme d’entretien que nous avons donnés à ce Cours familier de littérature universelle, disent assez d’eux-mêmes que nous ne procéderons pas toujours méthodiquement dans cet inventaire des œuvres intellectuelles de l’homme ; mais que, pour éviter la monotonie, la satiété et l’ennui, ces fléaux de l’étude, nous passerons quelquefois d’un siècle à l’autre, d’un homme à l’autre, d’un livre à l’autre, avec la logique secrète des analogies, mais aussi avec la liberté de la conversation.
L’intelligence, la pensée, la volonté, la conscience, la moralité ou l’immoralité, le choix entre le bien et le mal, la liberté, la perversité ou la sainteté des actes, sont des phénomènes intellectuels de cet être appelé esprit ; phénomènes aussi inexplicables, mais aussi incontestables pour l’homme de bonne foi, que les phénomènes matériels le sont pour nos sens. […] Il s’ensuit, avec la même certitude, qu’il y a pour l’homme immatériel, ou pour l’âme incorporelle de l’homme enfin délivrée de ses sens, une autre destinée, destinée immatérielle toute correspondante aussi à la nature intellectuelle et morale de cet être créé appelé homme ici-bas, et on ne sait de quel nom divin ailleurs. […] Il existe donc un monde invisible où l’homme, après avoir achevé sa destinée matérielle, poursuit sa destinée intellectuelle et morale. […] Il y a des saisons pour ces grands phénomènes de végétation intellectuelle comme pour les plantes. […] J’en excepte les nations où, comme en Espagne, en Italie, en Portugal, au Brésil, en Amérique, les secousses des révolutions et les enfantements de l’indépendance ou de la liberté ont redonné aux forces intellectuelles endormies une vitalité qui commence par l’héroïsme et qui finit par la poésie.
Les sens sont à l’usage de chaque individu, abstraction faite de ses rapports avec la société ; mais chaque individu a été doué d’un sens intellectuel, que j’appellerai le sens social : c’est la parole. […] Au reste, si j’ai employé les mots physiologie et organisation, en parlant du sens intellectuel et moral de la parole, c’est pour me faire mieux comprendre, pour rendre mieux sensible l’analogie de ce sens particulier avec les autres sens de l’homme. […] On a vu des hommes qui, par une suite quelconque d’altérations dans les facultés intellectuelles, en sont venus à perdre absolument la mémoire du substantif ; je puis attester un exemple de ce singulier phénomène physiologique. […] Il s’agit encore de savoir si elles sont fondées sur d’autres éléments que les langues primitives ; et n’est-il pas démontré jusqu’à l’évidence que non seulement elles ne sont pas fondées sur d’autres éléments, mais même que les éléments qui forment la base de nos langues actuelles sont loin d’avoir les mêmes prérogatives et de donner la même puissance à l’exercice de nos facultés morales et intellectuelles ? […] Tout n’aurait sans doute pas été susceptible d’une démonstration rigoureuse, mais on serait parvenu à prouver que la difficulté de réunir tous les faits nécessaires est le seul obstacle réel à cette démonstration : ils auraient pu tirer de là l’induction que la parole est le sens intellectuel et moral, le sixième sens de l’homme.
Il n’y a pas, selon moi, d’autre méthode historique que la divination dont on est capable dans l’interprétation des faits, et l’impression qu’ils font sur un être intellectuel et moral bien organisé. […] Et, en effet, c’est le métaphysicien qu’il est encore, sans le vouloir, contre la métaphysique ; c’est le philosophe, qui, dans les premières années de sa vie intellectuelle, partit de Condillac pour aller à Hegel, où tout le monde philosophique allait alors, comme on va maintenant à Notre-Dame de Lourdes, puis qui revint à Condillac, dégoûté d’allemanderie, en véritable esprit français fait pour le léger et le clair, et qui, s’il a maintenant perdu la légèreté immatérielle de notre race, en a du moins gardé la clarté, sous les accumulations et les épaississements de son style et de sa manière. […] Voltaire, Diderot, Rousseau, qu’il exagère énormément en les décrivant, lui passent moins près du cœur que Condillac et Montesquieu, et on le comprend : Condillac est pour lui le matérialisme de la source, — les premières gouttelettes du fleuve immense ; Montesquieu, le ton de la bonne compagnie dans l’impiété, — si opposé aux engueulades athées et compromettantes de Diderot, — la haute discrétion dans l’audace dangereuse, extrêmement chère aux héros intellectuels d’à présent, et que M. […] comme la plus grande solidité intellectuelle du siècle ! […] Il avait débuté dans le monde intellectuel par de la philosophie, et tout le monde sait que la Philosophie et la Révolution sont deux sœurs jumelles qui se tiennent par la main et dont l’une traîne toujours l’autre après elle.
Le préjugé de l’intellectuel ne s’écroule-t-il ; pas aussitôt ? […] Le monde se divise en intellectuels et en instinctifs. Ces derniers composent le troupeau mortel ; et vrai dire, l’élite intellectuelle existe seule ». […] Ainsi pourrions-nous répondre aux intellectuels dont le cerveau s’est cristallisé dans une adoration puérile.
Pour moi, ce dernier mot d’un esprit, même quand je serais parvenu à réunir et à épuiser sur son compte toutes les informations biographiques de race et de famille, d’éducation et de développement, à saisir l’individu dans ses moments décisifs et ses crises de formation intellectuelle, à le suivre dans toutes ses variations jusqu’au bout de sa carrière, à posséder et à lire tous ses ouvrages, — ce dernier mot, je le chercherais encore, je le laisserais à deviner plutôt que de me décider à l’écrire ; je ne le risquerais qu’à la dernière extrémité. […] Il s’est représenté leur image intellectuelle, il se l’est peinte et nous l’a renvoyée à bout portant, sans aucune précaution, avec crudité et raideur. […] Il vaudrait mieux peut-être ne pas s’en rendre compte et se faire illusion sur son prix ; mais si je suis amené, par ce sentiment même de ma décadence intellectuelle et morale, à chercher plus haut que moi une consolation et un appui, la réflexion et la raison m’auront rendu sans doute, après avoir été cause de souffrances, le plus grand service qu’il soit possible d’en retirer.
Je ne sais pas si le niveau intellectuel de l’Académie a baissé ou monté, je le crois constant. […] Telle quelle, l’Académie ne peut ambitionner que d’offrir, au mieux, une figuration partielle de l’activité littéraire française ; elle qui, en réclamant ce qui appartient à la France, pourrait affirmer l’existence d’un empire intellectuel français plus vaste que celui de Napoléon. […] Elle représente la moyenne de l’esprit et de la culture, et son niveau intellectuel semble constant.
Sully-Prudhomme et Stéphane Mallarmé tentaient, eux depuis longtemps poètes très précieusement intellectuels, une philosophie. […] Puisque « éternellement et infiniment fait effort mâle et femelle pour, éternellement et infiniment, le fruit en qui elle se mieux saura, la Matière » : en une pacifique lutte pour la prépondérance intellectuelle, est donc impliquée l’Inégalité perpétuelle des êtres en route vers le mieux, vers l’égalité harmonique. […] Mais la vie intellectuelle, il me semble, s’activera demain, et les années plus vite se rempliront, et ce n’est pas en vain que mon rêve prend forme en la science… Et qu’importe : j’ai le temps, et mon temps viendra.
Ne dirait-on pas encore qu’il y a des dynasties dans le monde intellectuel et dans celui de l’imagination, aussi bien que dans le gouvernement des sociétés humaines ? […] Ne pourrait-on pas faire un arbre généalogique de toutes les races poétiques ou intellectuelles qui ont mené le genre humain ? […] Maintenant, si nous retournons la supposition, ne pouvons-nous pas admettre que la vie est une sorte d’initiation qui sert à manifester, dans l’homme, l’être intellectuel et l’être moral ?
L’homme qui se la versa et qui nous la verse est de la sensation, et peut-être de la famille, de l’épicurien intellectuel qui disait : « Je sacrifierais toute une hécatombe d’imbéciles pour sauver un rhume de cerveau à un homme d’esprit ! […] c’est un voltairien malgré tout, et, quoiqu’il ait des attractions aimables et élevées pour ce qui est beau et charmant, je ne lui crois pas plus de doctrine, plus de philosophie, plus de principes, que monsieur son illustre parent intellectuel, — magnus parens ! […] Si nous n’étions que des épicuriens intellectuels, nous nous tairions sur les infériorités de ce livre, comme des gens heureux et reconnaissants qui ont bien dîné.
Il est permis, à l’heure qu’il est, de dire son avis sur tout, franchement, vertement, d’inscrire ses restrictions incisives au piédestal de certaines idoles, de siffler des vers fescennins autour de chaque petit ou grand triomphateur ; cela est permis sans soulever contre soi dans la haute compagnie intellectuelle des amas de scandale et d’anathèmes. Il n’y a plus de haute compagnie intellectuelle ; je ne nie pas qu’il ne résulte de cette dispersion quelques désavantages.