En janvier 1790, Morris a-t-il à faire parvenir au roi un avis sur la marche à suivre, en désapprouvant son idée de se rendre à l’Assemblée pour y déclarer qu’il se met lui-même à la tête de la Révolution, ce qui paraît à Morris d’une faible et dangereuse politique : « Cette note, dit-il dans son Journal, fut remise à la reine par son médecin Vicq d’Azyr. » Deux ans après, en janvier 1792, Morris est-il sur le point de partir pour Londres : « Vicq d’Azyr, le médecin de la reine, est venu ce matin, dit-il encore, pour me demander de la part de Leurs Majestés de communiquer au roi et à la reine tout ce que je pourrai apprendre en Angleterre de nature à les intéresser. » Ce ne sont que des indications, mais qui donnent le sens de tout un rôle suivi que l’on peut assez conjecturer. […] Depuis ce moment, point de repos, point de sommeil ; il croyait toujours voir un glaive arrêté sur sa tête. […] En d’autres temps Vicq d’Azyr avait montré plus d’un genre de courage : il avait fait preuve du courage du médecin en combattant hardiment l’épizootie de 1774 et en se plongeant, pour les purger, dans les foyers d’infection ; il avait fait preuve de courage civil lors de la fondation de la Société royale, en tenant tête de si bonne grâce aux attaques et aux assauts de la Faculté irritée : mais ici, dans un état social sans garanties et où toutes les passions sauvages étaient déchaînées, il se trouva faible et sans défense devant un nouveau genre de périls. […] Semblable à ce météore terrible qui, formé de mille courants divers, menace du haut de la nue les sommets escarpés et semble être destiné par la nature à maintenir l’égalité physique sur le globe, la foudre révolutionnaire qui est en vos mains, et que dirige habilement votre génie, continuera de renverser les trônes, fera tomber les têtes superbes qui voudraient s’élever au-dessus du niveau que vous avez tracé ; elle établira l’égalité politique et (l’égalité) morale, qui sont les bases de notre liberté sainte… Voilà jusqu’où l’exaltation de la peur et l’espoir de se faire pardonner de Couthon, Saint-Just et consorts, pouvaient conduire le ci-devant médecin de la reine, un écrivain académique élégant.
L’Empire et l’Allemagne, la Hollande, l’Espagne, l’Angleterre, la Savoie tout à l’heure, on a à tenir tête à toutes ces puissances, et on y réussit d’abord sans trop de fatigue et sans presque qu’il y paraisse au-dedans. […] Louis XIV part le 17 mars 1691 pour se mettre en personne à la tête de son armée de Flandre. […] Chacun s’empresse d’en être ; nous avons la composition de cette brillante armée, dont la tête est formée de princes et des plus beaux noms de noblesse et de guerre. […] J’avouerai que cette lecture un peu prolongée, quand on s’y applique, produit une fatigue et un cassement de tête par cette succession de faits sans rapport et sans suite qui font l’effet d’une mascarade.
Vous ne serez sûrement pas fâché d’apprendre que je commanderai une des têtes de colonnes de 12000 (?) […] Je me risquerai donc, à propos de cette singulière modestie de Joubert, à rappeler la pensée d’un moraliste de l’école de La Rochefoucauld : Une modestie obstinée et permanente est un signe d’incapacité pour les premiers rôles, car c’est déjà une partie bien essentielle de la capacité que de porter hardiment et tête haute le poids de la responsabilité ; mais de plus cette modestie est d’ordinaire l’indice naturel et le symptôme de quelque défaut, de quelque manque secret ; non pas que l’homme modeste ne puisse faire de grandes choses à un moment donné, mais les faire constamment, mais recommencer toujours, mais être dans cet état supérieur et permanent, il ne le peut, il le sent, et de là sa modestie qui est une précaution à l’avance et une sorte de prenez-y-garde. […] Je les ai reconnus qui se tenaient à vingt pas de moi, détournant la tête quand je les regardais, en s’extasiant sûrement de voir des pays si loin. […] Langlois, mon intime ami, blessé en tête de sa colonne, et la balle dans le corps, élevait encore son épée en avançant et en excitant le soldat, jusqu’au moment où il est tombé de faiblesse.
Comme ils sont naturellement penseurs et méditatifs, ils placent leurs idées abstraites, et les développements et les définitions dont leurs têtes sont occupées, dans les scènes les plus passionnées ; et les héros, et les femmes, et les anciens, et les modernes tiennent tous quelquefois le langage, d’un philosophe allemand. […] Leurs historiens, à la tête desquels il faut mettre Schiller et Müller, sont aussi distingués qu’on peut l’être en écrivant l’histoire moderne. […] Nous n’avons fondé que des haines, et les amis de la liberté marchent au milieu de la nation, la tête baissée, rougissant des crimes des uns et calomniés par les préjugés des autres. […] Voyez ce que fait le crime au milieu d’une nation ; des persécuteurs toujours agités, des persécutés toujours implacables ; aucune opinion qui paraisse innocente, aucun raisonnement qui puisse être écouté ; une foule de faits, de calomnies, de mensonges tellement accumulés sur toutes les têtes, que, dans la carrière civile, il reste à peine une considération pure, un homme auquel un autre homme veuille marquer de la condescendance ; aucun parti fidèle aux mêmes principes ; quelques hommes réunis par le lien d’une terreur commune, lien que rompt aisément l’espérance de pouvoir se sauver seul ; enfin une confusion si terrible entre les opinions généreuses et les actions coupables, entre les opinions serviles et les sentiments généreux, que l’estime errante ne sait où se fixer, et que la conscience se repose à peine avec sécurité sur elle-même.
Il s’en pare, en disant qu’il en vendra mieux son bois à la ville, quand Trivelin paraît à la tête de quelques soldats, reconnaît l’habit de l’homme qui a blessé Ottavio, fouille dans ses poches, trouve une lettre d’Aurelia, se confirme dans l’idée qu’il arrête Valerio, et emmène Arlequin. […] Le rôtisseur part de là pour lui demander sa pratique et surtout le payement du repas qu’il a fait servir chez lui à douze francs par tête. […] Il pose sa guitare à terre, et, pendant qu’il tourne la tête d’un autre côté, l’Arlequin butor met sa guitare auprès de la première et se retire. […] Allez vous promener. » Dans Le Médecin volant, le capitan vient consulter Arlequin qui fait le médecin, et lui demande un remède pour le mal de dents : « Prenez une pomme, répond Arlequin, coupez-la en quatre parties égales : mettez un des quartiers dans votre bouche, et ensuite tenez-vous ainsi la tête dans un four, jusqu’à ce que la pomme soit cuite, et je réponds que votre mal de dents se trouvera guéri. » Voilà qui prouve bien ce que dit un de ses panégyristes : « qu’il avait plusieurs connaissances particulières des secrets de la nature52 ».
Sans m’attacher à prouver cette assertion, il me suffira d’observer que l’esprit du clergé catholique, qui s’est emparé de tout temps de l’instruction publique, est entièrement opposé aux progrès des lumières et de là raison que tout favorise dans les pays protestants, et qu’il ne s’agit pas dans cette question d’examiner s’il n’a pas existé dans les pays catholiques de très-grands hommes depuis la renaissance des lettres ; mais si le grand nombre, si le corps de la nation est devenu plus éclairé et plus sensé : car le privilège du petit nombre de grandes têtes consiste à ne pas ressembler à leur siècle, et rien de leur part ne peut faire loi. […] Cette littérature a une consistance, un attrait, une énergie, qui feront toujours le charme des grandes têtes. […] Dans les universités d’Ecosse, il y a aussi d’excellentes têtes à consulter. […] C’est-à-dire que le grand nombre des nations savantes et policées obligea les hommes éclairés de chaque nation d’étudier une multitude si prodigieuse de langues nécessaires à la circulation des connaissances acquises, que leur tête en péta.
M. de Barante a mis en tête du volume une notice qui est un chapitre intéressant d’histoire. […] — On demandait un jour à un homme considérable qui avait beaucoup connu Louis XVIII, si, vers la fin, lorsqu’il accepta et subit les ultra-royalistes et le parti du comte d’Artois, il avait bien toute sa tête ; cet homme considérable, et que nous pourrions nommer (Royer-Collard), répondit : « Il avait un peu baissé ; vers la fin il n’y avait plus en lui que ce qu’il était tout d’abord, le bel esprit, le petit esprit du XVIIIe siècle ; tout ce que l’expérience lui avait donné d’acquis dans l’intervalle s’en était allé. » — Ainsi cela arrive souvent en vieillissant ; on perd ce qui n’était qu’acquisition et emprunt ; on retombe au point de départ. — Eh bien, Louis XVIII, dans cette Correspondance avec M. de Saint-Priest, en est encore à ce point de départ, avant l’expérience acquise.
Même aux jeunes garçons, sous l’airain des combats, La boucle à flots tombants, certes, ne messied pas : Qu’Euphorbe si charmant, la tête renversée, Boive aux murs d’Ilion la sanglante rosée, C’est un jeune olivier au feuillage léger, Qui, tendrement nourri dans l’enclos d’un verger, N’a connu que vents frais et source qui s’épanche, Et, tout blanc, s’est couvert de fleurs à chaque branche ; Mais d’un coup furieux l’ouragan l’a détruit ; Il jonche au loin la terre, et la pitié le suit. […] (et sur les beaux cheveux D’une enfant là présente et sur sa brune tête Il étendait la main en façon de conquête), Pour dix francs tout cela !
Il était devenu tout à fait sauvage ; des arbustes, des herbes poussaient sur sa tête. […] Le kuohi fit couper les herbes et les arbustes qui lui avaient poussé sur la tête ; on lui rasa les cheveux.
J’avais vu tout cela du haut d’une échelle, en balayant avec une tête de loup le plafond de la chapelle et les vitraux peints qui garnissaient la fenêtre. […] — Pardonnez-moi, monsieur, me dit-elle enfin, rien qu’en y pensant je pleure toujours les yeux de ma tête. […] Son oncle pressait sa tête contre ses genoux chancelants d’émotion ; moi, je pleurais sans rien lui dire que son nom dans mes sanglots, en tenant sa main toute mouillée dans la mienne. […] Jugez donc ce que quatre personnes qui ne font qu’une, et qui sentent le cachot sous leurs pieds et la mort sur leur tête par le supplice prochain d’un seul d’entre eux, prêt à les tuer tous d’un seul coup, peuvent se dire ! […] Je me jetai tout habillée sur mon lit ; je fermai les yeux et je recueillis en moi toutes mes forces dans ma tête pour inventer le moyen de nous sauver ensemble ou de le faire sauver au dernier moment, en le trompant innocemment lui-même et en mourant pour lui toute seule.
Le clocher solitaire s’élevant au loin dans la vallée a souvent attiré mes regards ; souvent j’ai suivi des yeux les oiseaux de passage qui volaient au-dessus de ma tête. […] Je sortis précipitamment de ces lieux, je m’en éloignai à grands pas, sans oser tourner la tête. […] Ma sœur profite de mon trouble ; elle avance hardiment la tête. […] La supérieure ajoutait que, depuis trente ans qu’elle était à la tête de la maison, elle n’avait jamais vu de religieuse d’une humeur aussi douce et aussi égale, ni qui fût plus contente d’avoir quitté les tribulations du monde. […] Quiconque a reçu des forces, doit les consacrer au service de ses semblables ; s’il les laisse inutiles, il est d’abord puni par une secrète misère, et tôt ou tard le ciel lui envoie un châtiment effroyable. » Troublé par ces paroles, René releva du sein de Chactas sa tête humiliée.
Le poète, terrible et terrifié, a voulu nous faire respirer l’abomination de cette épouvantable corbeille qu’il porte, pâle canéphore, sur sa tête, hérissée d’horreur. […] Baudelaire, qui salue, à la tête de son recueil, M. […] Les solitaires ont auprès d’eux des têtes de mort, quand ils dorment. Voici un Rancé, sans la foi, qui a coupé la tête à l’idole matérielle de sa vie ; qui, comme Caligula, a cherché dedans ce qu’il aimait et qui crie du néant de tout, en la regardant ! […] Tout le monde peint bien parce que tout le monde a été à l’école, a visité les musées et a la tête meublée de souvenirs.
Si vous aviez la tête solide, vous vous en iriez et vous laisseriez faire le temps. […] Ma tête est un peu grosse pour ma taille. […] Une bonne tête pour finir : Ormin, l’homme à inventions. […] La petite coquine s’approche, sa tête dans ses deux mains. […] Coupée, la tête légère de l’aimable comte ; coupées, la tête rêveuse de la comtesse et la tête charmante de Chérubin ; coupée sans formalités, la vilaine tête de ce bon formaliste de Bridoison !
Ma tête était montée : je ramasse à la hâte trois chemises et quelques bas, et je pars sans autre habit, veste, culotte ou mouchoir, que ceux que j’avais sur moi. […] La foudre grondait sur ma tête, Et je l’écoutais sans terreur. […] Cependant je puis vous assurer que si ma tête n’est pas blanche, elle sera bientôt chauve. […] J’y ai vu que vingt-quatre millions d’êtres ont beaucoup travaillé pour mettre à la tête de je ne sais combien de millions de leurs semblables un être comme eux. […] Laissant toute autre préoccupation, s’arrachant d’auprès de sa jeune femme, il courut en Hollande pour faire tête à l’orage.
Enfin grâce à des juifs et à un bon pourboire, il y en a eu un qui nous permit de passer la tête par-dessus la terrasse pour regarder, au risque de recevoir pour sa complaisance une centaine de coups de bâton. […] Ben-Abou est un homme superbe ; il était monté sur une mule blanche et environné d’une vingtaine de jeunes pages de l’empereur, le fusil haut, la tête découverte, une longue tresse de cheveux courts pendant sur l’oreille gauche, et vêtus de robes de toutes couleurs ; les chevaux richement équipés : le tout formait un groupe éclatant. Le reste de la troupe était occupe à conduire le troupeau de bœufs qui semblaient se révolter d’être faits prisonniers, tandis que les hommes qui se trouvaient dans le même cas marchaient tristement la tête baissée, comme attendant et se préparant au coup qui devait bientôt la faire rouler dans la poussière. […] Que m’importent leurs injures, s’ils ont tort ; et qu’y a-t-il de mieux à faire qu’à baisser la tête, s’ils ont raison28 ? […] Celui-ci l’emporte tout content et rencontre dans la rue un camarade : « Ça ne m’a coûté que trente sous, lui dit-il ; mais je crois que j’ai eu tort de ne pas marchander, il me l’aurait laissé pour vingt. » Il faisait à Versailles un tableau pour le roi Louis-Philippe, et un gendarme venait poser pour une tête.
La tête était, au physique comme au moral, immense, le jugement sain, le cœur sec, froid. […] Son génie, cet acte et sa brochure de Bonaparte et des Bourbons le placèrent naturellement, en 1814, à la tête de ceux que le nouveau gouvernement adopta pour illustrer son retour par la popularité du premier nom religieux et poétique de l’Europe, et à la tête de ceux qui saluèrent les Bourbons. […] « J’avais une tête très froide et très bonne, dit l’auteur d’Atala, et le diplomate, aussi grand que juste et ambitieux dans ses vues, avait le cœur cahin-caha pour les trois quarts et demi du genre humain. » Voici le cri du commentaire, cette fois plus juste que bienséant, arraché à M. de Marcellus par la flagrante ingratitude envers l’âme de Juliette (madame Récamier), oubliée si cruellement pour des affections légères à l’âge du poète : « Je crois, dit-il, qu’il faut rétablir ainsi cette phrase : J’avais une très froide et très bonne tête, et, après, le cœur cahin-caha pour les trois quarts et demi du genre humain. […] XIV Le livre finit par une réflexion touchante et haute que M. de Marcellus prit ou imputa à Massillon, et qui fit relever la tête de M. de Chateaubriand vieilli, qui ne pouvait supporter sa verte vieillesse.
On apprend qu’il va se jouer au Théâtre-Français un Philopœmen, tragédie d’un jeune homme de dix-sept ans, et là-dessus une jeune fille s’est déjà montée la tête pour l’auteur. […] Lui qui a tant parlé de sa retraite de paysan au sein de sa vallée, il avait bien souvent la tête à la fenêtre pour écouter de là-bas ce qui se faisait à Paris, et si ce vague bruit auquel il prêtait l’oreille n’était pas celui de la gloire qui lui venait. […] L’épître à double fin fut imprimée en tête du recueil de M. […] Ma tête est déjà si enflammée de cet ouvrage, que je le ferais ou le dicterais en quinze jours, si j’en avais la force. […] On eût dit alors, je le sais par d’autres que moi, que son cœur et sa tête s’emplissaient par degrés de fumée, — d’une fumée qui étouffait l’élan, l’abandon, le fluide de l’inspiration.
De ces petits triomphes de vanité dont les gens de lettres sont si épris, j’en ai par-dessus la tête. […] Chamfort était l’homme qui fournissait le plus d’idées et de vues à ses amis en causant ; il suffisait de le mettre sur un sujet et de l’animer un peu : « Je ne puis me refuser, lui disait Mirabeau, au plaisir de frotter la tête la plus électrique que j’aie jamais connue. » Je n’ose répéter tous les éloges de Mirabeau, qui sembleraient exagérés. […] Chamfort, au reste, pensait de même : « J’ai, disait-il, du Tacite dans la tête et du Tibulle dans le cœur. » Ni le Tibulle ni le Tacite n’ont pu en sortir pour la postérité. […] M. de Lauraguais, qui raconte cela, n’a aucun intérêt à surfaire Chamfort aux dépens de Sieyès ; il est donc à croire que Chamfort fut pour celui-ci ce qu’il fut tant de fois pour Mirabeau, c’est-à-dire la « tête électrique » qui, au moindre frottement, rend l’étincelle. […] Cet article m’a valu toute une réfutation en règle, qui se trouve en tête d’un petit volume de Chamfort publié par M.
Je lui lavai la tête. […] Mademoiselle de Montpensier rapporte à la page déjà citée que peu après les propos dont elle réprimanda Montespan, « madame de Montausier étant dans un passage derrière la chambre de la reine, où l’on met ordinairement un flambeau en plein jour, elle vit une grande femme qui venait droit à elle, et qui, lorsqu’elle en fut proche, disparut à ses yeux, ce qui lui fit une si vive impression dans la tête et une si grande crainte qu’elle en tomba malade. » Le duc de Saint-Simon raconte ce fait singulier et mystérieux d’une manière plus significative. […] On prétendit que sa tête se troublait souvent, et l’on ne sut si cette femme qui lui avait parlé en était une ou un fantôme. » On conçoit pourquoi mademoiselle de Montpensier a l’air de croire à la simple apparition d’un fantôme de femme qui s’évanouit sans rien dire à madame de Montausier.
. — et encore un philosophe qui n’est pas un chef de file, une première tête, mais un homme de la file dans laquelle vient aussi se ranger, pour le dire en passant et à mon grand regret, son traducteur. […] Taine, qui a oublié sa théorie et a jugé, comme tous les juges, d’après des principes établis dans sa tête, qu’après tout Carlyle était au-dessous de lord Macaulay. […] Je l’ai déjà dit au commencement, de ce chapitre, Stuart Mill n’est pas une première tête en philosophie, un de ces hommes, comme on en trouve à certaines distances dans l’histoire de la pensée humaine, qui renversent l’échiquier et forcent ceux qui jouent à modifier les lois du jeu, jusqu’à ce qu’un autre, aussi puissant qu’eux, vienne les modifier à son tour.
L’avenir se moque très bien de ceux qui le prédisent, mais il n’en est pas moins vrai que le génie grec est cette raison avec laquelle les têtes païennes de ce temps, qui rabâchent le mot de Socrate, prétendent expliquer l’univers. […] Si le mot superbe de Napoléon est profondément vrai : « La main qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit », cela n’est-il pas bien plus vrai encore de la tête qui juge ? […] la tête de M.
C’est une chrétienne comme on ne peut se dispenser de l’être quand on est femme et à une certaine hauteur de société, mais c’est une chrétienne au type effacé, et nous savons bien pourquoi : elle ressemble à la tête d’où elle est sortie ; elle fait partie de cette triste majorité de chrétiens involontaires que nous sommes tous, malgré nos systèmes, nos passions, nos sottises et nos vices. […] Corne a tout dit quand il nous a parlé de la vie sociale sans nous montrer en quoi elle consiste, et du monde, cette notion aplatie entre les deux tempes d’une tête de femme ; car le monde, c’est six mille ans de tradition, d’influences et d’Histoire que nous portons tous plus ou moins sur notre pensée, — c’est cent cinquante générations d’un milliard chaque, et non pas le xixe siècle tout court, et à Paris ! […] C’est un chapeau qui garde une place, mais il y aura une tête au chapeau !
Mais Southey, l’épique de beauté menteuse, l’épique de vignette à la tête de ses Œuvres complètes, n’avait ni l’imagination assez grande, ni l’œil assez perçant pour être l’historien de Nelson. […] Son oncle, capitaine de vaisseau, en le voyant arriver sur son bord, avait dit en haussant les épaules de pitié : « À la première action, un boulet lui emportera la tête, et c’est toute la fortune qu’il peut espérer ! […] Avec cette profondeur de tendresse qui lui fut sa Fatalité, avec sa rêverie amoureuse de la mort, même dans la vie la plus intense de sa gloire, avec cette fantaisie si noire qui plaça de si bonne heure dans sa chambre le cercueil où il se rêvait et coupa dans le combat même, sur la tête d’un ami, des cheveux pour en tapisser ce cercueil, Nelson, le Mélancolique intrépide, est bien du pays de Shakespeare et méritait certes, le coup de pinceau shakespearien.
Les professeurs de notre temps ont trop d’antiquité dans la tête pour ne pas se payer, en la vantant, de la peine de l’avoir étudiée. […] En polémique, c’est un sanglier qui va droit devant lui, tête baissée, et qui, brusquement, vous découd son homme. […] Il y est un rieur d’esprit qui a pris l’histoire officielle, l’histoire majestueuse, par le bas bout, pour nous la montrer, comme il faut la voir, cul sur tête.