Le Nabab, les Rois en exil caractérisent sa deuxième manière, la phrase arborescente et pailletante. […] Alphonse Daudet eut, lui aussi, ses moments de fièvre descriptive, sa passion pour la phrase vagabonde ; mais cette faiblesse fut passagère, et je ne serais pas étonné que les excès de l’école Goncourt eussent contribué à lui donner, après Les Rois en exil, ce besoin de condensation et de raccourci qui aboutit à l’Évangéliste et à l’inimitable Sapho. « Goncourt, nous dit-il, se plaint de l’école décadente. […] Il fallait entendre de quel ton le maître disait : « Le poète fait ceci… Le poète a le droit… Le poète se moque… » On admirait sa fière allocution à l’empereur de Russie : « Car le poète seul peut tutoyer les rois. » Les débutants allaient demander à Heredia des lumières sur leur vocation et des conseils sur leur métier. […] Il fut, à cette occasion, félicité par le roi, qui, étant déjà venu en France quelques années auparavant, lui exprima sa surprise de ne pas l’avoir rencontré à Paris. « Ça ne m’étonne pas, dit tranquillement Moréas, je ne vais voir personne. » Quand il renonçait au paradoxe, il avait des idées droites et justes et de parfait bon sens.
Voici le sommet du Caucase, le seuil du monde, le lieu marqué pour que l’effort de l’homme s’y défasse, voici le lieu de l’échec humain : Ô Roi ! ô Roi ! […] Ta longue agonie, ta révolte, les derniers battements de ton désir, « ô Roi des Hommes135 », nous y assistons dans l’angoisse et la consternation.
. — Un second, trait qui caractérise le drame romantique est l’esprit de révolte dont il est inspiré ; — et que, sans avoir besoin de descendre jusqu’aux élucubrations de Félix Pyat, — on reconnaît assez aisément dans l’Antony de Dumas, 1831 ; — dans Le Roi s’amuse de Victor Hugo, 1832 ; — et dans le Chatterton lui-même de Vigny, 1835. — Et, comme il faut enfin que la liberté la plus déréglée aboutisse à une règle, — un dernier caractère du drame romantique est l’affirmation de la souveraineté de la passion ; — et sous le nom d’énergie, la glorification du crime. […] 2º De Victor Hugo : Cromwell, 1827 ; — Hernani, 1829 ; — Marion Delorme, 1830 ; — Le Roi s’amuse, 1832 ; — Lucrèce Borgia, 1833 ; — Marie Tudor, 1833 ; — Angelo, 1835 ; — Ruy Blas, 1838 ; — Les Burgraves, 1843. […] Rêverie d’un passant à propos d’un Roi, ou Dicté en présence du glacier du Rhône] ; — et des aveux ou des confessions du poète, qui, sans descendre encore Jusqu’au fond désolé du gouffre intérieur, — nous prend cependant pour confidents de ses amours, de ses souvenirs, et de ses regrets [Cf.
« Je ne fais pas appel, en mourant, aux rois sourds de l’Olympe ou du Cocyte, ni à l’indigne terre, ni à la nuit ; je ne t’invoque point non plus, dernier rayon dans l’ombre de la mort, ô conscience de l’âge futur !
quel nom, grand Roi, quel Hector que ce Wurts !
Comme, selon lui, le propre de l’ honnête homme est de n’avoir point de métier ni de profession, il pensait que la cour de France était surtout un théâtre favorable à le produire : « car elle est la plus grande et la plus belle qui nous soit connue, disait-il, et elle se montre souvent si tranquille que les meilleurs ouvriers n’ont rien à faire qu’à se reposer. » Ce parfait loisir constitue véritablement le climat propice : être capable de tout et n’avoir à s’appliquer à rien, c’est la plus belle condition pour le jeu complet des facultés aimables : « Il y a toujours eu de certains fainéants sans métier, mais qui n’étoient pas sans mérite, et qui ne songeoient qu’à bien vivre et qu’à se produire de bon air. » Et ce mot de fainéants n’a rien de défavorable dans l’acception, car « ce sont d’ordinaire, comme il les définit bien délicatement, des esprits doux et des cœurs tendres, des gens fiers et civils, hardis et modestes, qui ne sont ni avares ni ambitieux, qui ne s’empressent pas pour gouverner et pour tenir la première place auprès des rois : ils n’ont guère pour but que d’apporter la joie partout39, et leur plus grand soin ne tend qu’à mériter de l’estime et qu’à se faire aimer. » Voilà les f ainéants du chevalier.
Voyant bien, à ces paroles, qu’ils venaient pour accroître mes maux, mais préparé à tout souffrir, je lui répondis : J’ai tourné vers ce Dieu, roi des cieux, toutes les pensées de mon âme, de sorte qu’il ne reste rien pour vous.
Retourner en tous sens une péripétie et l’allonger à perte de phrase, sans autrement s’inquiéter de la vraisemblance et de la concordance des détails, n’était qu’un jeu pour ce roi des faiseurs.
L’étudiant genevois n’osa pas plus aborder le « critique de la Revue des Deux Mondes » qu’il n’eût fait du roi des Français. […] Le dialogue entre l’âme et le Roi des épouvantements ne réclame pas de témoins. » Il y avait dans les Vosges un prêtre qui autrefois avait envoyé des vers à Sainte-Beuve.
Le regret de ce temps où l’on était général à trente ans, et où l’on passait empereur eu France, ou tout au moins roi en Suède, a été toute sa pensée pendant son enfance. […] Il dépensait beaucoup pour lui, étant très riche, et le pouvoir central, le conseil du roi, s’en effrayait, faisait des représentations. […] La démocratie ne veut pas de roi, c’est-à-dire de chef éternel des fonctionnaires ; d’autre part, par l’intermédiaire de son parlement, elle nomme des ministres qui ne font que passer aux affaires, c’est-à-dire qui ont le temps de prendre en main l’administration, mais n’ont pas celui d’agir sur elle, de la faire agir ou de la modifier. […] Le chef, roi, duc, baron, est un homme, non de délibération lente, interrompue, reprise, à solution tardive et tempérée, utile seulement pour la conservation et le maintien du statu quo, mais un homme de décision, de hardis desseins, d’entreprises ; il est une initiative. […] Ils ont été des chefs du travail, comme rois et ducs étaient chefs de la vie politique et militaire.
Le reptile, le monotrème, le marsupial, furent, chacun à son heure, les rois de la nature. […] Enfin, il admettait, tout comme la Bible, que l’homme était le dernier animal apparu ; il lui conservait son titre traditionnel de roi de la nature. […] Schopenhauer disait : Comportez-vous avec les chefs-d’œuvre comme il est d’usage de se comporter avec les rois.
« Songez-y, là-bas, sur votre rocher, il ne faut pas vous éteindre et mourir comme les rois dans l’exil. […] Ce n’est plus le railleur Méphisto qui l’aiguillonne de ses sarcasmes et l’enivre de voluptés pour le forcer à vivre sous la loi du hasard ; c’est toute l’armée des ténèbres, ce sont les dews d’Ahriman, c’est le roi des démons en personne, qui vient avec Némésis et les funestes destinées entamer une lutte à mort d’où Faust-Manfred sortira vainqueur, mais où des tortures plus affreuses encore que les précédentes assiégeront son agonie. […] Ainsi, qu’on me permette de le dire, lord Byron, cet autre roi légitime qui ne dédaignait pas non plus les succès littéraires et les succès parlementaires, était beaucoup plus préoccupé de la science de Dieu que M. de Lamartine ne l’a jamais été. […] Sa brûlante énergie déborde en accents qui feraient pâlir Dieu même, si Dieu était ce misérable Jéhovah qui joue avec les peuples sur la terre comme un joueur d’échecs avec des rois et des pions sur un échiquier.
Les rois qui vivaient sur de plus beaux rivages, qui cultivaient des terres plus fécondes, qui dormaient dans de plus riches palais, ne comprenaient guère que le prudent Ulysse s’obstinât à chercher ainsi, malgré la destinée, son pauvre royaume.
Bref, je regarde ma famille comme un État patriarcal où je suis, à la fois roi et prêtre… Quand je vois mon petit peuple devant moi, je me réjouis d’avoir fourni des accroissements à mon espèce, à mon pays, à ma religion, en produisant un tel nombre de créatures raisonnables, de citoyens et de chrétiens.
Ses capacités lui firent gagner la couronne des pochards ; après avoir descendu et avoir passé par toutes les dégradations humaines, il fut proclamé empereur des pochards et roi des cochons.
Les premiers poèmes et les premiers romans ont conté les aventures des dieux ou des rois ; dans ce temps-là, le héros marquant de tout drame devait nécessairement avoir la tête de plus que les autres hommes.
Ces pierres sont cependant assez communes pour rapporter aux petits rois du pays un droit important.
Mais après le feu, il se fit un léger murmure dans l’air et en l’entendant Élie se couvrit le visage de son manteau. » Rois III, chap.
Un cabinet de travail, entouré de planches peintes en noir, chargées de gradus de collège, de livres de théologie poudreux, avec, sur une chaise, un tableau de mathématique, avec, au mur, une chronologie : une grande image, où du sein d’une femme sort un arbre, dont les rameaux portent, au milieu de guirlandes de lauriers, les médaillons des rois de France, — le tout encadré dans une bande d’étoffe à losanges rouges et blancs. […] Au milieu d’elles, une vieille édentée, dont le menton est plus saillant que le nez, et toute pareille à la sculpture en buis d’une marotte d’un Roi des Fous, que j’ai vue dans une vente, semble promener une folie agitée.
Les poètes animés de l’esprit nouveau devaient chanter l’Allemagne, comme avait fait, dès 1841, Hoffmann von Fallersleben : Deutschland, Deutschland über alles, Über alles in der Welt… Georg Herwegh, ami du peuple, ennemi des rois, reprochait à Freiligrath d’employer son talent à imiter Byron, romantique démodé ; à imiter Victor Hugo et son orientalisme de pacotille. […] C’est qu’il a étudié la vie physique des êtres ; il a montré comment se reproduisaient les insectes, comment respiraient les plantes ; et qu’il est, dans un certain sens, le contraire d’un métaphysicien : il est le savant, roi des temps nouveaux.
Racontez-moi ce que vous avez vu aux funérailles du roi et tout le reste. […] Le paysan français qui met à sac le château en disant qu’il en est désolé, mais que le roi le veut ainsi, est le frère du Russe qui prétend avoir l’ordre de massacrer les Juifs.
Quand Didon, abordant en Afrique, demanda des terres au roi du pays, celui-ci, par dérision, lui en offrit l’étendue d’une peau de bœuf. […] Loyal à qui les barons d’Auvergne, avant les Grands Jours de Louis XIV, jouaient de vilains tours, mais il recule devant l’idée d’offenser la loi et le roi. […] … Le parfum désert de ces anciens rois … La lourde prison de pierres et de fer Où de mes vieux lions traînent les siècles fauves (Hérodiade.)
Bien qu’avec le grand roi l’ordre et la discipline s’établissent dans les esprits comme dans l’état, cette société si bien réglée recèle encore quelques indices de trouble moral. […] Pasteur ou roi, je me serais également fatigué de la gloire et du génie, du travail et du loisir, de la prospérité et de l’infortune. […] Pasteur ou roi, qu’aurais-je fait de mon sceptre ou de ma houlette ? […] Dans la chaire de Notre-Dame, parlant du siècle même, il avouera « que c’est un siècle dont il a tout aimé. » Et ne pourrait-on pas voir, en même temps qu’une vue élevée des choses humaines, une allusion à des impressions intimes, à de vagues chagrins non effacés, dans ces lignes où le langage de la charité s’empreint à demi d’une sensibilité profane : « Par la charité il n’y a pas de cœur où l’Église ne pût pénétrer, car le malheur est le roi d’ici-bas, et tôt ou tard tout cœur est atteint de son sceptre… Désormais l’Église pouvait aller avec confiance conquérir l’univers, car il y a des larmes dans tout l’univers, et elles nous sont si naturelles qu’encore qu’elles n’eussent pas de cause, elles couleraient sans cause par le seul charme de cette indéfinissable tristesse dont notre âme est le puits profond et mystérieux. » C’est par là que Lacordaire se trouvait en communion de sentiments avec tant d’hommes de sa génération, et c’est, avec son incontestable talent, un des secrets de la séduction qu’il a exercée sur son époque.
Les jeunes ribauds en gilet rouge qui vident des bowls de punch pour imiter lord Byron, qui laissent pousser leurs chevelures comme des rois mérovingiens, qui sacrent avec des jurons du XVe siècle, ne se doutent guère qu’ils sont les pionniers d’un âge d’exégèse et de documents. […] Inférieurs dans la poésie aux subtils poètes anglais, initiés à la musique par les maîtres allemands, et aux arts plastiques par nos voisins du Midi, nous sommes les rois absolus de cette forme de la phrase écrite. […] Lui qui définit l’Etat un organisme, c’est-à-dire un assemblage de centres locaux, tous actifs et progressifs, il ne peut que répugner à l’absolutisme unitaire de Louis XIV, qui, concentrant tous les pouvoirs dans la main du roi et toutes les forces vives de la nation dans la cour, a tari l’existence provinciale.