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1573. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Il le reconnaît du premier ordre pour la marche lumineuse de l’ensemble, pour la puissance de l’action et les principaux effets que le théâtre se propose, pour « ce grand fonds d’intérêt qu’il semble interrompre lui-même volontairement, et qu’il est toujours sûr de relever avec la même énergie ». […] Mais, encore une fois, Grimm, en y voyant les défauts, ne sacrifie pas la tragédie française à celle de nos voisins ; il reconnaît que chaque théâtre est approprié à la nation et à la classe qu’il émeut et qu’il intéresse : « L’un (le théâtre anglais) ne paraît occupé qu’à renforcer le caractère et les mœurs de la nation, l’autre (le théâtre français) qu’à les adoucir. » Grimm va plus loin ; il pense que ces mêmes tableaux que l’une des deux nations a pu voir sans aucun risque, quelque terrible et quelque effrayante qu’en soit la vérité, pourraient bien n’être pas présentés sans inconvénient à l’autre, qui en abuserait aussitôt : « Et n’en pourrait-il pas même résulter, se demande-t-il, des effets très contraires au but moral de la scène ? 

1574. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Je pourrais relever bien d’autres singularités de pensée et d’expression dans ce discours ; je me hâte d’ajouter que, malgré tout, il réussit fort tant à l’Académie que devant le public ; les juges les plus difficiles, en s’accordant à reconnaître « que la langue semblait manquer à tout moment à l’auteur », le lui passèrent en faveur de ce qu’on appelait l’énergie ou la nouveauté de ses pensées. […] Ce joli chapitre, qui tient de Fontenelle et de Marivaux encore plus que de La Bruyère, amusa beaucoup au xviiie  siècle, et chacun crut y reconnaître son voisin.

1575. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

Qu’on relise dans leur suite ses lettres à Voltaire, à d’Alembert, et, au milieu de quantité de choses qui font tache et qu’on regrette d’y trouver, on reconnaîtra dans le fond des sentiments un sage et un roi. […] En les lisant, je m’imagine qu’elles s’adressent à d’autres qu’à moi, et je ne me reconnais du tout point aux traits sous lesquels vous me dépeignez.

1576. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Est-il téméraire de conjecturer d’après cela que Bonaparte, tout en comptant désormais avec raison Arnault parmi les gens de lettres qui lui étaient dévoués et qu’il préférait, ne lui reconnut point cette ardeur et cette trempe qu’il voulait dans les grands instruments de son Empire, et qu’il rencontra en d’autres hommes qui avaient également débuté par les lettres, dans les Maret, dans les Daru ? […] Zaïre, d’après son opinion, n’était qu’une comédie. — Un jour, à la suite d’une discussion sur la tragédie, il avait dit à Arnault : « Faisons une tragédie ensemble. » Le poète avait répondu avec plus de fierté et de malice que de curiosité et de confiance : « Volontiers, général, mais quand nous aurons fait ensemble un plan de campagne. » Revenu en France avant que Bonaparte fût de retour d’Égypte, Arnault avait fait représenter sa tragédie des Vénitiens qui eut beaucoup de succès (16 octobre 1799) ; il la dédia « à Bonaparte, membre de l’Institut », et reconnut dans la dédicace que l’idée du cinquième acte était due au général.

1577. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Nous avons dit qu’à ses qualités autant qu’à son voile, on reconnaissait l’auteur des Horizons prochains pour une femme. À ses défauts et aux faiblesses de son livre, on la reconnaîtrait pour telle encore, car elle y manque de ce qui manque à toutes les femmes, même à celles que le monde, toujours un peu séduit quand il s’agit de femmes, appelle galamment des génies, je veux dire de force constructive et de grande originalité.

1578. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

il en a aussi le diamant taillé à facettes, et je crois même qu’il se reconnaît en se mirant dans la facette, ce qui explique par de la fatuité son amour si vif pour Montesquieu. […] Pourquoi M. de Lescure, très digne par son érudition, par la hardiesse et la sûreté de son goût et surtout par son enthousiasme pour Rivarol, de nous le donner intégral, a-t-il imité, — avec des qualités nouvelles, je le reconnais, — mais a-t-il imité cependant les éditeurs par fragments qui l’ont précédé, au lieu de nous enrichir d’une Édition complète des Œuvres de Rivarol qui va manquer encore, — qui peut-être manquera toujours ?

1579. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

Si vous étiez disposé à la longue à trouver ce dilettantisme un peu voulu, hâtez-vous de reconnaître dans cette volonté, qui de toute manière serait méritoire, un fond bien touchant de tendresse. […] Chacun, catholique, protestant ou juif se recueille, et les véritables croyants se reconnaissent à leur calme, qui, à ce moment, ne peut être feint.‌

1580. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

Pour ma part, quand je repasse dans ma mémoire les résultats de l’admirable enquête poursuivie inlassablement par vous pendant plus de trente ans, quand je pense aux précautions que vous avez prises pour éviter l’erreur, quand je vois comment, dans la plupart des cas que vous avez retenus, le récit de l’hallucination avait été fait à une ou plusieurs personnes, souvent même noté par écrit, avant que l’hallucination eût été reconnue véridique, quand je tiens compte du nombre énorme des faits et surtout de leur ressemblance entre eux, de leur air de famille, de la concordance de tant de témoignages indépendants les uns des autres, tous analysés, contrôlés, soumis à la critique — je suis porté à croire à la télépathie de même que je crois, par exemple, à la défaite de l’Invincible Armada. […] Je reconnais d’ailleurs que cette mimique est de première importance.

1581. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XX. Le Dante, poëte lyrique. »

Si notre Montaigne croyait la reconnaître dans la chanson du cannibale Iroquois célébrant une couleuvre, dont il voudrait dérober les vives couleurs pour en parer le collier de sa maîtresse, si ce chant barbare semble au philosophe français tout anacréontique, même passion, même fantaisie ne dut-elle pas cent fois se produire dans les épreuves de la vie du moyen âge ? […] Dans la féconde originalité du Dante reconnaissons, en effet, la double inspiration qu’il a reçue.

1582. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVI » pp. 100-108

. — A propos de cette distribution des prix de l’Université, qu’on veuille bien nous excuser d’avoir discouru un peu au long sur les trois chefs qu’elle est accoutumée dès longtemps à suivre et à reconnaître.

1583. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « [Addenda] »

Je dois reconnaître toutefois qu’à un certain moment de la discussion, M. 

1584. (1874) Premiers lundis. Tome I « [Préface] »

Sainte-Beuve y raconte succinctement, mais avec précision, ses relations avec la nouvelle rédaction du Globe, jusqu’au moment où le journal devint saint-simonien « Je ne le quittai point pour cela, dit-il, et j’y mis encore quelques articles. » Mais, à partir de l’année 1831, il est tellement impossible de s’y reconnaître, à cause du manque de signatures, que nous avons cru prudent de nous abstenir tout à fait, à défaut d’indications suffisantes sur les véritables auteurs d’articles qui ne laissaient pas d’être très-tentants sur Mérimée, Balzac, Eugène Sue, Charles Nodier, M. 

1585. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — II »

Il est curieux de la voir, dans cette correspondance, protester à tout propos contre l’idée qu’on pouvait avoir de son crédit : « Je ne suis qu’une particulière assez peu importante ; je ne sais pas les affaires, on ne veut point que je m’en mêle, et je ne veux point m’en mêler. » Tantôt elle se compare avec pruderie à une ingénue de quinze ans : « Je suis un peu comme Agnès, je crois ce qu’on me dit, et ne creuse pas davantage. » Tantôt elle se vieillit avec une complaisance qui fait sourire : « Si vous me voyiez, madame, vous conviendriez, que je fais bien de me cacher : je ne vois presque plus ; j’entends encore plus mal ; on ne m’entend plus, parce que ma prononciation s’en est allée avec mes dents, la mémoire commence à s’égarer ; je ne me souviens plus des noms propres, je confonds tous les temps, et nos malheurs joints à mon âge me font pleurer comme toutes les vieilles que vous avez vues. » Sans croire tout à fait à ce renoncement absolu au monde, on est pourtant forcé de reconnaître qu’il y a dans ce langage de madame de Maintenon plus de manie que d’hypocrisie, et qu’à force de se faire, en paroles, insignifiante et inactive, elle l’était sur la fin réellement devenue.

1586. (1874) Premiers lundis. Tome I « Vie, poésies et pensées de Joseph Delorme. Deuxième édition. »

Sans doute vers la fin de sa carrière il en était venu à chérir ses amis et à reconnaître Dieu ; mais c’était chez lui amitié domestique et religion presque mystique ; c’était une tendresse de solitaire pour quelques êtres absents et un mouvement de piété monacale vers le Dieu intérieur.

1587. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

Dans les pièces même telles que L’Avare, Le Tartufe, Le Misanthrope, qui peignent la nature humaine de tous les pays, il y a des plaisanteries délicates, des nuances d’amour-propre, que les Anglais ne remarqueraient seulement pas ; ils ne s’y reconnaîtraient point, quelque naturelles qu’elles soient ; ils ne se savent pas eux-mêmes avec tant de détails ; les passions profondes et les occupations importantes leur ont fait prendre la vie plus en masse.

1588. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De la tendresse filiale, paternelle et conjugale. »

L’éducation, sans doute, influe beaucoup sur l’esprit et le caractère, mais il est plus aisé d’inspirer à son élève ses opinions que ses volontés ; le moi de votre enfant se compose de vos leçons, des livres que vous lui avez donnés, des personnes dont vous l’avez entouré, mais quoique vous puissiez reconnaître partout vos traces, vos ordres n’ont plus le même empire ; vous avez formé un homme, mais ce qu’il a pris de vous est devenu lui, et sert autant que ses propres réflexions à composer son indépendance : enfin, les générations successives étant souvent appelées par la durée de la vie de l’homme à exister simultanément, les pères et les enfants, dans la réciprocité de sentiments qu’ils veulent les uns des autres, oublient presque toujours de quel différent point de vue ils considèrent le monde ; la glace, qui renverse les objets qu’elle présente, les dénature moins que l’âge qui les place dans l’avenir ou dans le passé.

1589. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

Après avoir écouté les diverses doctrines, je reconnus qu’il y avait sans doute une lacune dans mon esprit.

1590. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « George Sand. »

Si George Sand a paru reconnaître, dans ses premiers romans, le droit absolu de la passion, c’est uniquement de celle qui est « plus forte que la mort » et qui la fait souhaiter ou mépriser.

1591. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Guy de Maupassant »

J’aurais dû reconnaître, dans le cas de Maupassant, autre chose qu’un plaisir d’orgueil et d’ironie à constater que le monde est inintelligible et mauvais ; autre chose qu’un plaisir de langueur à s’abandonner aux mélancolies que versent certains crépuscules ou que distillent certains brouillards ; bref, autre chose que de la littérature.

1592. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre X. Zola embêté par les jeunes » pp. 136-144

. — N’empêche que ce dernier ne demeure, derrière le personnage aigri et diminué dont les superficiels s’étonnaient à la fin, « l’artiste divers, exquis, poignant, solide » que Régnier a reconnu qu’il est, et l’unique signataire de l’intéressante Faustin.

1593. (1890) L’avenir de la science « XX »

Chez nous, on accorde à l’art quelques subventions péniblement marchandées, non par le besoin qu’on éprouve de voir la pensée nationale traduite en grandes œuvres, non par l’impulsion intime qui porte l’homme à réaliser la beauté, mais par une vue réfléchie et critique, parce qu’on reconnaît, on ne sait trop pourquoi, que l’art doit avoir sa place et qu’on ne veut pas rester en arrière du passé.

1594. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVIII » pp. 198-205

On est ravi de découvrir ce qu’il y peut avoir à redire ; et, pour tomber dans l’exemple, il y avait l’autre jours des femmes à cette comédie, vis-à-vis de la loge où nous étions, qui, par les mines qu’elles affectèrent durant toute la pièce, leurs détournements de tête, et leurs cachements de visage, firent dire de tous côtés cent sottises de leur conduite, que l’on n’aurait pas dites sans cela ; et quelqu’un même des laquais cria tout haut, qu’elles étaient plus chastes des oreilles que de tout le reste du corps 59. » L’autorité que je reconnais à Molière ne m’empêchera pas de dire qu’il y a peu de bonne foi à reprocher aux critiques d’avoir donné un sens criminel aux plus innocentes paroles et de s’offenser de l’ombre des choses.

1595. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre II. Bovarysme essentiel de l’être et de l’Humanité »

Ce vœu de l’existence se voit donc réalisé d’une façon concrète et saisissable selon deux modes dans l’humanité : sous son aspect le plus haut et le plus dramatique, ainsi qu’on l’a déjà montré, avec le héros qui, parvenu à l’émotion esthétique, se reconnaît le propre créateur de la suggestion qui lui fit accomplir sa destinée, sous un autre aspect moins mystique, avec le savant qui, désintéressé des applications déduites par les autres hommes de ses découvertes, fait sa joie du seul fait de connaître, du seul spectacle de toutes les choses créées par l’activité objective de l’être.

1596. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

Il sembloit que Clopinel les eût offensées personnellement ; qu’elles se reconnussent à ses peintures.

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