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812. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Joséphine de Saxe dauphine de France. (Suite et fin.) »

Aucune faiblesse ni enfanterie n’a paru dans aucune de ses actions, mais une fermeté noble et tranquille a accompagné toutes ses actions : et certes il y a des moments où il faut toute l’assurance d’une personne formée pour soutenir avec dignité ce rôle. […] Le maréchal rêva un instant pour elle le rôle d’une duchesse de Bourgogne auprès de Louis XV : les circonstances s’y prêtèrent encore moins que le caractère de la princesse.

813. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

… » Ce mot de l’Empereur, l’ordre de Berthier dicté du champ de bataille et enjoignant au colonel Franceschi du 8e hussards d’achever la déroute de l’ennemi en coupant, détruisant ou prenant ses débris de colonnes, ce rôle principal et actif en un si grand jour, semblaient assurer désormais la destinée militaire de Franceschi et fixer son étoile. […] Toujours alerte, infatigable, se montrer partout, paraître et disparaître, se diviser, se rejoindre, se multiplier comme par enchantement ; à la tête d’une vaillante élite, simuler le nombre, décupler le chiffre par la qualité et la vélocité ; en couvrant les siens, en les éclairant, tromper l’ennemi, lui donner le change, lui faire craindre un piège, lui faire croire qu’on est appuyé ; dans les retraites profiter des moindres replis, d’un ruisseau, d’un mur, du moindre obstacle, pour le chicaner, pour le retarder, « pour l’obliger à mettre trois ou quatre heures à faire une lieue de chemin » ; victorieux, le soir ou le lendemain des grandes journées, fondre et donner sans répit, à bride abattue, s’imposer à force d’assurance, et avec une poignée de braves ramasser des colonnes entières d’infanterie, les ramener prisonnières ; à chaque instant, à nouveaux frais, sur un échiquier nouveau, proportionner son jeu à l’action voulue, y faire des prodiges de coup d’œil, d’adresse, de tactique non moins que d’élan et d’intrépidité : — si tel est le rôle d’un parfait officier de cavalerie légère, nul n’y surpassa Franceschi.

814. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

ils ne viennent que trop nous chercher le cœur à travers les portes et les murailles. » Mme Valmore usa de son influence sur Balzac, et surtout de l’influence qu’avait alors sur Balzac une autre personne qu’elle désigne sous le nom de Thisbè , pour obtenir du grand romancier devenu dramaturge, qu’il donnât une de ses pièces à l’Odéon et promît l’un des rôles à Mme Dorval. […] Mme Dorval a un rôle immense. » Je l’ai entendu rire !

815. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Ç’a toujours été un rôle embarrassant que d’arriver le cadet d’un grand écrivain et de tout homme célèbre ou simplement à la mode, qui vous prime, qu’on soit un vicomte de Mirabeau, un Ségur sans cérémonies 25, ou Quintus Cicéron, ou le second des Corneille. […] Mais, pour lui, il ne s’est jamais posé le rôle, il ne s’est jamais dit que c’était embarrassant ; il a senti que c’était doux, près de soi, d’avoir un haut abri dans ses pensées ; et cependant il s’en est tiré mieux que tous les cadets de grands hommes en littérature : il a trouvé sa place par le naïf, le sensible et le charmant26.

816. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

Comment ne me resterait-il pas dans l’esprit un léger nuage sur le rôle que remplira près d’elle le pasteur Empeytaz, depuis qu’on me l’a fait voir prenant si résolument le docteur Gay pour compère ? […] Les événements de 1815 surtout, et le rôle qu’y prit Mme de Krüdner par son influence sur l’empereur Alexandre, sont présentés sous un jour intéressant, dans un détail positif et neuf, emprunté aux meilleures sources.

817. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Il n’y a pas de grandeur dans un rôle ; il n’y a de grandeur que dans la foi. […] On glorifie la France dans son intelligence, dans son rôle, dans son âme, dans son sang !

818. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Peut-être aussi ce livre était-il destiné à être, au moment de l’avénement du jeune prince à la couronne, la proclamation d’une politique nouvelle, le programme d’un gouvernement fénelonien ; c’était aussi une sorte de candidature indirecte au rôle de premier ministre, dont Fénelon pouvait avoir le pressentiment sans s’en avouer à lui-même l’ambition. […] Mais le dévouement de Fénelon ne se borna pas à des actes particuliers ; il put s’élever au noble rôle d’assistance publique.

819. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

A-t-on réfléchi que lorsque Boileau rejette le fatras des rimes banales, chères aux copistes maladroits de Malherbe, et déclare Qu’il ne saurait souffrir qu’une phrase insipide vienne à la fin du vers remplir la place vide, c’est la preuve qu’il ne comprend pas le rôle de la rime autrement que M. de Banville et tous nos Parnassiens, qui en font l’élément constitutif du vers, et s’efforcent de la faire porter sur les mots caractéristiques de la phrase ? […] N’ayant pas le tempérament oratoire, cette faculté qui perçoit la distance entre deux idées et toute la série des raisonnements par où l’on s’avance de l’une à l’autre, incapable de suivre un principe dans ses conséquences les plus lointaines et d’emporter l’une après l’autre toutes les défenses d’un auditeur par la marche savante des preuves, Boileau se trouve assez mal à l’aise dans son rôle d’orateur moraliste.

820. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Mais cette protection ne sentit jamais l’opposition : Marguerite put jouer le noble rôle de protectrice des lettres, sans donner d’ombrage à son frère, n’excitant pas la résistance, mais aidant ou consolant la fuite, Elle trouva dans sa bonté ingénieuse et éclairée le moyen de rester le plus fidèle sujet de François Ier, tout en favorisant ce qu’il suspectait, et en protégeant ce qu’il opprimait32. […] Ils se réfugient au monastère de Notre-Dame de Servance, « persuadés, dit Marguerite, — qui ne laisse pas échapper l’occasion d’une épigramme contre les moines, — que s’il y a moyen de se sauver d’un danger, les moines doivent le trouver. » Pour prendre patience, en attendant que les chemins soient redevenus libres, on convient de s’assembler tous les après-midi dans un pré du couvent, sous le feuillage d’un ormeau, à l’abri du soleil de septembre, et de raconter à tour de rôle quelque historiette de galanterie.

821. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

Les Parnassiens ; au fond, étaient parfaitement conscients de leur rôle de continuateurs. […] Mais, ce serait en revenir à prendre un rôle pour lequel je ne suis pas fait et dont je me défendais au début même de cette conférence.

822. (1890) L’avenir de la science « II »

Dès lors, elle n’aura été qu’une forme transitoire du progrès divin de toute chose, et du fieri de la conscience divine, Car, lors même que l’humanité n’influerait pas directement sur les formes qui lui succéderont, elle aura eu son rôle dans le progrès gradué, comme rameau nécessaire pour l’apparition des rameaux plus élevés. […] Hegel est insoutenable dans le rôle exclusif qu’il attribue à l’humanité, laquelle n’est pas sans doute la seule forme consciente du divin, bien que ce soit la plus avancée que nous connaissions.

823. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

Or, qualités et défauts tiennent à l’idée qu’ils se font du rôle de l’écrivain. […] En ces moments où le mouvement de l’évolution, comme l’oscillation régulière d’un balancier, ramène les esprits vers les croyances et les institutions ébranlées, la littérature change de rôle.

824. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IV, Eschyle. »

Sans doute, le rôle du Chœur paraît encore démesuré dans ses tragédies. […] Souvent leur rôle n’est qu’une clameur indéfiniment prolongée. « Le vent des hymnes lugubres », comme il a dit quelque part, les enroule dans son tourbillon.

825. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Il va jouer dans le drame un rôle plus sérieux que ne comporte sa mine. […] Et puis, s’il faut le dire, Pierre Champlion, malgré sa modestie apparente, semble poser un peu dans son rôle de voyageur héroïque.

826. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

Abbé tonsuré dès l’enfance, mais surtout voué à la cornette et aux chiffons, coquette comme une nonne de Vert-Vert et libertin comme un perroquet, tour à tour comtesse de Sancy dans la paroisse Saint-Médard, et comtesse des Barres en Berry, puis pénitent, mais toujours léger, une manière d’apôtre à Siam converti et convertisseur sans tristesse, écrivain agréable et même délicat, finalement historien de l’Église, et doyen de l’Académie française, sa carrière, qui dura quatre-vingts ans, compose une mascarade complète, et, dans chacun de ses rôles, il fut au naturel, au sérieux, avec sincérité, et à la fois avec un air d’amusement et de badinage. […] Plus tard, et seulement après son retour, Choisy s’aperçut qu’il n’avait joué là-bas qu’un rôle de parade, et que le père Tachard, jésuite, était celui qui avait noué avec Constance la négociation secrète et réelle.

827. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Nullement galante d’humeur, nullement coquette, d’une froideur qu’on a pu comparer longtemps à celle de la vierge Pallas, elle ne voyait dans le mariage que matière à un beau rôle et à des destinées glorieuses, et, romanesque comme elle était, elle aimait presque autant s’en bercer en idée que de l’accomplir. […] Tout cela n’était qu’un prélude pour le rôle qu’elle devait jouer dans la seconde Fronde : « Je ne prévoyais pas alors, dit-elle, que je me trouverais dans un parti considérable où je pourrais faire mon devoir et me venger en même temps ; cependant, en exerçant ces sortes de vengeances, l’on se venge bien contre soi-même. » Ce petit mot de repentir final n’empêche pas Mademoiselle d’être très fière et très glorieuse de ce qu’elle fit en 1652, quand elle put à la fois obéir aux ordres de son père et se livrer à ses instincts d’aventure.

828. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mademoiselle de Scudéry. » pp. 121-143

Ce fut son rôle et, en grande partie, son dessein. […] Ce qui nous frappe chez elle à première vue, c’est qu’elle prend tous les personnages de sa connaissance et de sa société, les travestit en Romains, en Grecs, en Persans, en Carthaginois, et leur fait jouer quant aux principaux événements le même rôle à peu près qui leur est assigné dans l’histoire, tout en les faisant causer et penser comme elle les voyait au Marais.

829. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Histoire » pp. 179-240

L’homme d’État, l’homme de guerre, le poète, le peintre, le grand homme de science ou de métier étaient montrés seulement en leur rôle, et comme en leur jour public, dans cette œuvre et cet effort dont hérite la postérité. […] J’ai trouvé aussi qu’en cette étude, on ne sentait pas la succession des temps, que les années ne jouaient pas en ces pages le rôle un peu lent qu’elles jouent dans les événements humains ; que les faits, quelquefois arrachés à leur chronologie et toujours groupés par tableaux, se précipitaient, sans donner à l’esprit du lecteur l’idée de ces règnes et de ces dominations de femmes.

830. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1881 » pp. 132-169

La Céline Montaland joue très bien son rôle de grue, mais un incident : elle a perdu les faux cils, que seule sa mère sait lui poser. […] Parmi les loges d’hommes : celle de Coquelin aîné a quelque chose d’un atelier de peintre, avec ses divans fabriqués de verdures, et les esquisses accrochées aux murs ; celle de Delaunay, de l’amoureux à la voix de musique, est curieuse, par l’affichage un peu enfantin de ses triomphes, par des coussins brodés, des couronnes de fleurs artificielles, un buste, au cou duquel pend une guirlande, sur laquelle on lit sur des bouts de ruban sale, imprimés en lettres d’or les rôles joués par lui, dans quelque ville de province.

831. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

Mais l’union sociale à laquelle tendent la métaphysique, la morale, la science de l’éducation, n’est pas encore complète : elle n’est qu’une communauté d’idées ou de volontés ; il reste à établir la communauté même des sensations et des sentiments ; il faut, pour assurer la synergie sociale, produire la sympathie sociale : c’est le rôle du grand art, de l’art considéré au point de vue sociologique. […] Hugo, et le mot a toujours servi ; de là l’impossibilité d’exprimer l’émotion. » — « Eh bien non, répond Guyau, et c’est là ce qu’il y a de désolant pour le poète, l’émotion la plus personnelle n’est pas si neuve ; au moins a-t-elle un fond éternel ; notre cœur même a déjà servi à la nature, comme son soleil, ses arbres ses eaux et ses parfums ; les amours de nos vierges ont trois cent mille ans, et la plus grande jeunesse que nous puissions espérer pour nous ou pour nos fils est semblable à celle du matin, à celle de la joyeuse aurore, dont le sourire est encadré dans le cercle sombre de la nuit : nuit et mort, ce sont les deux ressources de la nature pour se rajeunir à jamais. » La masse des sensations humaines et des sentiments simples est sensiblement la même à travers la durée et l’espace, mais ce qui s’accroît constamment et se modifie pour la société humaine, c’est la masse des idées et des connaissances, qui elles-mêmes réagissent sur les sentiments. « L’intelligence peut seule exprimer dans une œuvre extérieure le suc de la vie, faire servir notre passage ici-bas à quelque chose, nous assigner une fonction, un rôle, une œuvre très minime dont le résultat a pourtant chance de survivre à l’instant qui passe.

832. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

A la vérité, tous les organes peuvent exercer les uns sur les autres le rôle d’excitants, ce qui semblerait donner à l’organisme vivant, considéré dans son ensemble, une sorte d’indépendance et de spontanéité générale ; ce n’est cependant qu’une apparence. […] En définitive, même dans une machine brûle, toutes les parties ont un rôle à remplir dans l’ensemble, et se correspondent en quelque sorte sympathiquement : cependant on peut analyser cette machine, isoler l’action de chacune de ces pièces distinctes, sauf à les replacer ensuite toutes dans leur action totale.

833. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Première partie. Écoles et manifestes » pp. 13-41

« Le rôle de la poésie est d’agrandir la conscience humaine au-delà même des vérités contrôlées : la poésie réalisée est la forme transcendante du savoir. […] « Croire qu’en imitant certaines qualités de pureté, de sobriété, de correction et d’élégance, indépendamment du caractère même et de la flamme, on deviendra classique, c’est croire qu’après Racine père, il y a lieu à des Racine fils, rôle estimable et triste, ce qui est le pire en poésie.

834. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

Réduire le critique à n’être plus que le conseiller dogmatique, ou que le prophète enthousiaste, ou que le libelliste, ou même que le simple metteur en pages de documents, c’est, nous semble-t-il, comprendre imparfaitement ce rôle de critique. […] Voilà son rôle.

835. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Cette sorte d’esprit n’est pas plus nécessaire pour joüer le rôle d’Ariane, qu’il ne l’a été pour composer les fables de la Fontaine & les tragédies de Corneille. […] Rien n’est plus difficile que d’être naturel dans un rôle qui ne l’est pas. […] Que ceux qui reprochent à un acteur de négliger le geste dans les rôles pathétiques de pere, ou dans les rôles majestueux de rois, apprennent que la dignité n’a point ce qu’ils appellent des bras. […] Et c’est-là que triomphe l’actrice, qui joue ce rôle avec autant de vérité que de noblesse, d’intelligence que de chaleur. […] Dans l’épopée, le premier de ces rôles est celui des héros, le poëte est chargé des deux autres.

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