Lorsqu’un grand nombre des habitants de la même contrée se sont modifiés et perfectionnés, il ressort du principe de concurrence vitale, et des rapports d’organisme à organisme, si nombreux et si importants, que toute forme qui ne se modifie pas de quelque manière ou en quelque degré, doit être sujette à extermination. […] Il est évident qu’elles se groupent toutes ensemble dans un grand système naturel ; et ce fait s’explique tout d’abord par le principe de filiation généalogique. […] D’après le principe de continuelle divergence des caractères, dont cette figure a servi à démontrer les conséquences, plus une forme est récente, plus elle doit généralement différer de son ancien progéniteur. […] Il ne faudrait cependant pas considérer le principe général de la divergence des caractères comme une loi nécessaire ; il n’a de valeur qu’autant que les descendants modifiés d’une espèce deviennent ainsi plus capables de s’emparer de stations plus différentes et plus nombreuses dans l’économie de la nature. […] Passant condamnation sur ces quelques difficultés, les autres faits principaux de la science paléontologique me semblent se déduire aisément des principes de la théorie de descendance modifiée par sélection naturelle.
C’est sur ce principe que repose l’histoire de l’humanité. […] Michelet, Quinet, Lanfrey, protestent non-seulement au nom de la conscience, mais aussi au nom de la science, contre les principes et les conséquences du fatalisme. […] Toute fatalité qui blesse au contraire les lois de la conscience a ceci de désastreux qu’elle énerve la vertu de la révolution la plus légitime en principe, et en compromet les résultats. […] L’ordre se reconnaît à de tout autres caractères : à la vérité des principes, à la justice des actes, à la beauté et à la bonté des œuvres. […] Vico, Principes d’une science nouvelle relative à la nature commune des nations.
Duclos, en l’usurpant, semble avoir obéi encore plus à son tempérament qu’à ses principes. […] Un mot de meilleur ton, et trop joli pour ne pas être rappelé, est celui de la comtesse de Rochefort à Duclos, un jour que, causant avec elle et Mme de Mirepoix, il avait posé en principe qu’une honnête femme peut tout entendre, et que ce sont seulement les malhonnêtes qui font les bégueules. […] Sans se dissimuler aucun des abus de l’administration, il est arrivé à sentir les avantages et les douceurs de la vie romaine : « Le séjour que j’y ai fait, dit-il, et les habitudes que j’y ai eues m’ont confirmé ce que le président de Montesquieu m’en avait dit, que Rome est une des villes où il se serait retiré le plus volontiers. » À Naples où il reste près de deux mois et où toutes les facilités lui sont données, Duclos visite les antiquités, alors toutes neuves, de Pompéi et d’Herculanum, et s’y applique également à bien connaître les rouages et les principes de l’administration. […] C’est ainsi que, dans son Essai sur la voirie et les ponts et chaussées, il n’est pas absolument contre la corvée, contre le travail de réparation des chemins par les communautés : il croit seulement qu’il serait bon de régulariser ce service imposé au peuple des campagnes, établissant en principe que l’État a le droit de l’exiger comme tous les genres de services pour la grande cause de l’utilité publique.
C’était lui sans doute qui avait le plus fait dans le principe pour l’asservissement de l’Allemagne, et ayant préparé par une politique artificieuse l’immense prépondérance de la France sur le continent, il s’était ôté lui-même les moyens d’arrêter l’ambition insatiable de celui qui gouvernait… Néanmoins, au risque même de déplaire au maître, il s’opposa toujours aux projets qui, au milieu de la paix, tendaient à engager la France dans de nouvelles guerres interminables. […] Trop épris peut-être de quelques idées brillantes qui, n’étant point appuyées sur des bases assez solides pour entrer dans les plans des cabinets, ne méritaient que le nom de projets, et manquant en général de fixité dans ses principes, ses conceptions portaient néanmoins l’empreinte du génie. […] Le duc d’Otrante reconnut que, dans la branche du gouvernement qui lui était commise, la plus grande faute est de faire un mal qui n’est pas nécessaire à la sûreté de l’État ; et ce grand principe, appliqué dans toute son étendue sous un règne despotique, toutes les fois que la volonté absolue de l’Empereur, à laquelle il a souvent osé opposer de la résistance, n’est pas intervenue d’une manière directe, ce principe a rendu son administration bienfaisante pour la France et l’a fait chérir particulièrement des classes les plus exposées à la persécution. » N’oublions pas encore une fois que cela est écrit en 1814 et avant le rôle de Fouché en 1815, rôle que les honnêtes gens d’aucun parti ne sauraient, je pense, envisager sans dégoût.
Le romantisme, à ses débuts, fut tout monarchique et chrétien : Chateaubriand avait établi entre l’idéal artistique et les principes pratiques une confusion qui égara les premiers romantiques : épris du moyen âge chrétien et féodal, ils s’estimèrent obligés d’être en leur temps, réellement, catholiques et monarchistes. […] Hugo et de Lamartine ; et même avant 1826, l’abbé de Frayssinous avait reconnu la liaison des doctrines classiques aux principes conservateurs719. […] Mais le romantisme, pour Stendhal, se réduit à ce qu’un disciple de Montesquieu peut accepter : il combat l’imitation, c’est-à-dire le principe classique, qui empêche une littérature d’être ce qu’elle doit, l’expression exacte du climat et des mœurs. […] Deschamps727, romantique de la première heure, essayait de concilier le principe de l’originalité personnelle, et celui de l’imitation des Espagnols, Allemands et Anglais.
On apprend aussi dans ces écoles son catéchisme, c’est-àdire les premiers principes de sa religion, et l’on fait d’une pierre deux coups en se servant de ces livres pour y apprendre à lire. […] Dans les basses classes on enseigne le rudiment ou les premiers principes de la grammaire. […] Ordinairement chaque professeur a un livre élémentaire imprimé qui sert de fondement à ses leçons, qu’il explique à ses auditeurs, et aux principes duquel il ramène toutes les digressions dont il se sert pour rendre les éléments de chaque science plus frappants et plus sensibles. […] Le tribunal, qui consulte ainsi la faculté (ou même les facultés de plusieurs universités sur le même procès), n’est pas obligé de suivre leur décision, il reste le maître de prononcer suivant ses principes et ses lumières ; mais dans les villes impériales, par exemple, où le magistrat est intéressé à convaincre ses sujets de la plus grande intégrité et impartialité dans l’administration de la justice, il s’en tient volontiers, et surtout dans les cas criminels, à la décision d’une faculté.
Nous examinerons d’abord les lois de la traduction, eu égard au génie des langues, ensuite relativement au génie des auteurs, enfin par rapport aux principes qu’on peut se faire dans ce genre d’écrire. […] Les principes de l’art de traduire, exposés dans ce discours, sont ceux que j’ai cru devoir suivre dans la traduction que je donne de différents morceaux de Tacite : quelques-uns de ces morceaux avaient déjà vu le jour ; le public m’a paru les avoir goûtés et en désirer davantage ; c’est pour le satisfaire que j’en ajoute ici un beaucoup plus grand nombre ; c’est le fruit de quelques moments de loisir que m’ont laissé des travaux très pénibles et d’un genre tout différent. […] Persuadé de ces principes, j’ai fait d’abord cet essai de traduction avec beaucoup de rapidité, et je l’ai revu ensuite avec toute l’exactitude et la rigueur dont je suis capable. […] Je me trouverais fort heureux, si celle-ci pouvait obtenir le suffrage du petit nombre de gens de lettres, qui, par une connaissance approfondie du génie des deux langues, de celui de Tacite et des vrais principes de l’art de traduire, sont capables d’apprécier mon travail ; à l’égard de ceux qui croiront seulement l’être, je n’ai rien à attendre ni à exiger d’eux.
Que les phénomènes à expliquer soient chimiques ou, sociaux, ces principes conservent leur valeur. […] * ** Ces principes rappelés, comment l’étude des formes sociales peut-elle contribuer à l’explication du phénomène que nous venons de constater : le succès des idées égalitaires ? […] Elles sont donc loin de barrer la route à toute autre hypothèse ; et si nous en rencontrons une qui, découvrant une relation constante entre l’expansion des idées égalitaires et certains phénomènes déterminés, montre aussi comment, suivant quelles lois générales, ces phénomènes peuvent contribuer au succès de cette idée, — nous aurons le droit de dire, au nom des principes rappelés plus haut, qu’elle satisfait, mieux que les précédentes, à notre soif d’explication. […] Si nous voulons donc résoudre le problème que nous posions tout à l’heure, notre méthode devra être, conformément à ces principes, d’essayer tour à tour, dans les chapitres qui vont suivre, l’induction et la déduction, — c’est-à-dire, dans l’espèce, les constatations historiques et les démonstrations psychologiques.
Il fait juger des choses par les principes, & non par les succès ; il se rappelle, dans ces momens de délire général, que les alimens les plus contraires sont quelquefois agréables aux estomacs dépravés, que la disette ou l’amour de la nouveauté donne du prix à la médiocrité, au vice même ; & connoissant tout à la fois les sources de la bizarrerie dominante, de la nature des objets qui l’entretiennent, le génie de la Nation qui l’encense, il attend, & pourroit prédire avec certitude, le moment de la révolution qui doit guérir de cette frénésie. C’est en vain qu’on abuse ; les regles développées par le goût, sont appuyées sur des principes invariables.
Malheureusement, il est plus aisé d’admettre cette règle en principe et théoriquement que de l’appliquer avec persévérance. […] Or notre méthode n’est en partie qu’une application de ce principe aux faits sociaux.
C’est le second principe de la Science nouvelle, lequel dérive du premier (la croyance à une Providence). […] Aussi est-ce un principe du droit des gens, que la femme suive la religion publique de son mari. — La seconde solennité consiste dans le voile dont la jeune épouse se couvre, en mémoire de ce premier mouvement de pudeur qui détermina l’institution des mariages. — La troisième, toujours observée par les Romains, fut d’enlever l’épouse avec une feinte violence, pour rappeler la violence véritable avec laquelle les géants entraînèrent les premières femmes dans leurs cavernes.
Ici Edgar Poe, ayant posé en principe que la matière n’existe qu’en fonction de répulsion et d’attraction, conçoit, par un magnifique coup de déduction, que ces deux forces satisfaites ou anéanties, cessant d’être, entraînent dans leur disparition la matière qu’elles constituent. […] Le darwinisme est pressenti, ailleurs la loi du rythme et celle du principe d’hétérogénéité de Spencer exposées, que le panthéisme original de ce poème ne procède ni de Hegel, ni de Spinoza, ni des Alexandrins. […] Il faut qu’ils sachent et qu’ils montrent comment ils s’y sont “pris”. » Cédant à cette faiblesse, Poe nous a révélé, en plusieurs de ses Essais, les principes de son esthétique rationaliste, par laquelle il avoue exclure de l’art toute émotion et tout enthousiasme. […] Principes de psychologie […] Principes de psychologie, § 214.
C’est ici, pour le dire en passant et d’abord, le principe même de tout changement, et de tout progrès, par conséquent. […] Ne pose-t-elle pas, en effet, ce principe, ou, si l’on veut, ce sous-entendu, qu’il n’y a rien derrière la nature ? […] Il relie l’homme à la nature, et tous les deux à leur principe caché. […] Mais, sous le nom trompeur de conventions, il leur faut prendre garde à ne pas envelopper les principes mêmes de l’art. […] Voilà le premier principe de toute rhétorique.
Voilà des gens qui, comme nous, parlent le français de naissance et d’enfance, qui ne sont pourtant pas le moins du monde obligés d’être Français de sentiments, puisqu’ils appartiennent à une autre nation ; ils ne nous ont vus que de loin ou en passant ; depuis les guerres de la Révolution et par nos annexions ou conquêtes, nous les dérangeons dans leur vie, nous les blessons dans leur nationalité, dans leurs convictions ou leurs habitudes les plus chères ; nous troublons tout chez eux ou autour d’eux ; s’ils sont liés intimement avec des Français, c’est avec des personnes de la haute société et de l’aristocratie, qui demeurent hostiles aux principes du nouveau régime et qui sont peu sensibles à ses gloires. […] Ce système d’indifférence qu’elle pratiquait désormais n’avait pourtant pas son principe dans l’égoïsme ; ce n’était en elle que le culte constant du passé ; et, comme le lui disait délicatement Sismondi : « Vous avez aimé ce qu’il y a eu de plus grand et de plus noble dans votre génération, et ce sentiment vous suffit encore. […] Nature chaleureuse, prompte à l’espérance, plus occupée des principes que des personnes, il prit feu à l’idée d’un réveil de la France, d’une conversion de l’Empire à la liberté, et se fit fort de défendre dans le Moniteur l’efficacité des garanties accordées aux citoyens français par l’Acte additionnel. […] Jamais mon gouvernement n’a dévié du système de la Révolution ; non des principes comme vous les entendiez, vous autres ! […] Elle l’accusait de trop de jeunesse dans les impressions, de voir le monde trop en beau, de juger trop indulgemment les hommes ; il lui répondait de Paris, le 2 mars 1815 ; « Notre dissentiment tient à ce que vous vous attachez aux personnes, et moi aux principes.
Dumoulin retrouvait les véritables sources et posait les règles fondamentales du droit français ; Bodin mêlait à des rêveries pythagoriciennes deux principes excellents, et qui sont devenus du droit public, l’inaliénabilité du domaine royal et la nécessite du consentement des sujets pour la levée des impôts. […] Il fait justice de la Ligue au nom des principes éternels qui condamnent toute anarchie, il oppose à sa politique la vraie politique de la France, et il retrouve, pour peindre les horreurs de la guerre civile, les accents de Démosthène dévoilant Philippe, et de Cicéron accablant Antoine. […] Mais qui donc s’attache aux principes eux-mêmes, c’est à savoir à la moelle même de la science ? […] En politique, nous tâtonnons entre différents principes, tous mal notés, soit à cause des excès qui en ont déshonoré l’application, soit à cause de leur impuissance à retenir les nations sur cette pente qui les précipite vers le mal, par l’ardeur du mieux. […] La Réforme avait invoqué contre le catholicisme le principe du libre examen ; mais à peine conquis, elle l’avait étouffé dans son sein, ne le trouvant bon que contre ses ennemis.
A chaque grande révolution politique et sociale, l’art, qui est un des côtés principaux de chaque société, change, se modifie, et subit à son tour une révolution, non pas dans son principe tout à fait intérieur et propre, qui est éternel, mais dans ses conditions d’existence et ses manières d’expression, dans ses rapports avec les objets et les phénomènes d’alentour, dans la nature diverse des idées, des sentiments dont il s’empreint, des inspirations auxquelles il puise. […] Diderot s’élevait à de hautes théories, et atteignait plus d’une fois dans ses méditations au principe éternel de l’art ; mais il échouait trop souvent dans l’exécution. […] Ils se trompaient ; mais leur erreur, honorable dans son principe, ne resta pas stérile dans ses résultats.
L’admirable traité « De la maladie sacrée » d’Hippocrate, qui posa, quatre siècles et demi avant Jésus, les vrais principes de la médecine sur ce sujet, n’avait point banni du monde une pareille erreur. […] Des faits, aujourd’hui morbides, tels que l’épilepsie, les visions, ont été autrefois un principe de force et de grandeur. […] Si l’on part de ce principe que tout personnage historique à qui l’on attribue des actes que nous tenons au XIXe siècle pour peu sensés ou charlatanesques a été un fou ou un charlatan, toute critique est faussée.
Il était en cela conséquent avec son principe : « Si ta main ou ton pied t’est une occasion de péché, coupe-les, et jette-les loin de toi ; car il vaut mieux que tu entres boiteux ou manchot dans la vie éternelle, que d’être jeté avec tes deux pieds et tes deux mains dans la géhenne. […] Le Père leur enverra d’en haut son Esprit, qui deviendra le principe de tous leurs actes, le directeur de leurs pensées, leur guide à travers le monde 880. […] La perfection étant placée en dehors des conditions ordinaires de la société, la vie évangélique complète ne pouvant être menée que hors du monde, le principe de l’ascétisme et de l’état monacal était posé.
Les principes de Prévost-Paradol, je ne les connais pas. […] Mais ses principes ! […] J’ai dit déjà que nulle métaphysique, nulle théorie, aucun principe vaillant et ferme, ne gisait au fond de ces phrases transparentes où le moi de l’auteur se voit seul.
Joseph de Maistre et Fréron, c’étaient gens de même race, de même religion, de mêmes principes ; mais Janin, le Janin des Débats, qui fut d’abord le petit Janin et puis après le gros Janin, ce gros petit Janin qui roulait le cerceau de sa fantaisie dans tous les chemins en spirale d’un feuilleton sans direction, — mais qui parfois rencontrait le bon sens, — et que ce fût précisément celui-là qui, comme le rat rongeant le filet du lion, se portât fort, pour Fréron contre cet énorme démon de Voltaire, c’était vraiment là de l’inattendu et du frappant ! […] Il nous a donné l’homme des principes et du goût, — le législateur du Parnasse, comme on disait du temps de Boileau, — mais j’aurais voulu l’exécuteur des hautes-œuvres, dont ne peut se passer aucune législation. […] Fréron, lui, avait des principes, et son enthousiasme se recueillait pour être plus profond ; Diderot était un des enfants perdus d’un siècle qui allait aux abîmes, comme l’astrologue allait au puits… À proprement parler, Fréron n’était pas de ce siècle-là.
Ce n’est point une guerre de principe que les cabinets lui ont déclarée : c’est une guerre d’intérêts, d’ambition, de conquête. […] Selon quels principes généraux ? […] La lutte entre les deux esprits et les deux principes continuait. […] Royer-Collard aurait voulu donner un principe pour fondement. […] Il put, pendant le cours de 1808, développer les grands principes de la religion naturelle.
Cela ne le rend pourtant pas injuste pour nous Français, ni aveugle sur les défauts de nos voisins, et il met des correctifs énergiques à ce grand sens qu’il leur reconnaît : Ce sont des sauvages philosophes et avares ; leur profondeur en philosophie est même une passion ; mais la douceur et la politesse qui leur manquent, et que les Français ont naturellement, les rendent inférieurs à nous pour faire passer les bons principes jusques à l’action. […] Cela nous rend circonspects et craintifs ; nous nous sommes remis au rudiment, nous étudions les premiers principes avec détail et invita Minerva. […] Si j’étais en ce moment plus soigneux de la renommée de d’Argenson que de la vérité, j’omettrais de dire que, tout en appelant L’Esprit des lois un « grand livre », il mettait bien au-dessus, pour la solidité du raisonnement, plus d’un ouvrage oublié de ce temps-là, par exemple un livre qu’on croyait alors traduit de l’anglais et qui était du maître des comptes Dangeul, intitulé Remarques sur les avantages et les désavantages de la France et de la Grande-Bretagne par rapport au commerce ; et même un livre bien autrement radical et qui nous ferait peur aujourd’hui, intitulé Code de la nature ou le véritable esprit des lois, qu’il croyait de Toussaint et qui est de Morelly : « Excellent livre, s’écriait d’Argenson (juin 1756), le livre des livres, autant au-dessus de L’Esprit des lois du président de Montesquieu, que La Bruyère est au-dessus de l’abbé Trublet, mais contre lequel il n’y aura jamais assez de soufre pour le brûler, etc. » Morelly, dans cet ouvrage, dénonce la propriété comme le principe de tous les maux et de tous les vices existants. […] Du premier coup d’œil on les rejette, et, en les approfondissant, on voit qu’il n’y en a aucun qui ne soit sûr et fondé sur les principes les seuls vrais. » Telle est, à l’offrir sans déguisement, la véritable pensée du marquis d’Argenson. […] mais de dessous une aristocratie odieuse, — non une aristocratie de noblesse qui penserait plus généreusement, — mais une satrapie de roture qui a tout mis en formes, en mauvaises règles, en méchants principes et en ruine. » Il avait donc pensé que, « pour mieux gouverner, il ne s’agissait que de gouverner moins », et d’organiser la monarchie elle-même à l’aide d’une démocratie bien entendue, très divisée, non périlleuse, c’est-à-dire d’un système municipal et cantonal ; il en forme le plan détaillé, essayant en quelque sorte de provoquer un second établissement des communes par le bienfait direct de la royauté.
Son libéralisme toutefois, qui n’est point précisément celui des libéraux français de cette date, qui est plutôt, ne l’oublions pas, le libéralisme d’un aide de camp d’Alexandre, se rattacherait à l’école gouvernementale éclairée et aux principes d’une bonne monarchie administrative. […] Jomini, dans son zèle infatigable pour la vérité stratégique, fut appelé à énoncer les mêmes principes à propos de la Belgique, où il s’était retiré après la révolution de 1848. […] Ce fut dans ce but qu’il rédigea son Tableau analytique des principales Combinaisons de la Guerre et de leurs rapports avec la Politique des États, qui est devenu dans les éditions suivantes le Précis de l’Art de la Guerre (2 vol.), un résumé condensé de tous les principes posés et démontrés dans ses divers ouvrages. […] Habitant volontiers dans ses souvenirs, en même temps qu’il suivait toujours de son regard le plus attentif les progrès de la science militaire et l’application des principes qu’il avait posés, ses dernières œuvres furent un Précis inédit des campagnes de 1812, 1813, 1814, et quelques brochures sur des questions militaires spéciales. […] Il maintenait les grands principes stratégiques, sans se dissimuler toutefois que les chemins de fer avaient apporté un élément tout nouveau et imprévu dans les opérations des armées.
Il a l’esprit naturellement tourné au droit, à la jurisprudence ; en même temps qu’il aime à remonter aux principes, il excelle à suivre et à distinguer les applications et les conséquences, à raisonner sur les cas divers et les espèces, à y pourvoir en détail ; il a le goût du droit. […] Mais, enfin, il commençait, bien qu’à regret et à son corps défendant, à faire la part des circonstances jusqu’au sein des principes. […] Lucas sur le système pénal, et en particulier sur la peine de mort, il essaie de fixer dans ses limites et de rattacher à son principe le droit qu’a la société de punir, qu’il recherche les raisons qui rendent la vie humaine respectable encore jusque chez les criminels, et qu’il s’inquiète des moyens de régénérer ceux mêmes qu’on châtie ; soit que, réfutant la théorie brutalement matérialiste de Broussais, il se complaise à rétablir les titres authentiques, selon lui, et irréfragables, de la spiritualité et de l’énergie propre de l’âme ; soit enfin qu’abordant, à propos de l’Othello de M. de Vigny, la question de l’art dramatique en France, il se félicite de la disposition du public, et que, de ce côté aussi, il marque sa foi en un certain bon sens général qui semble mûr pour le vrai et pour le beau. […] Et en général, quel que soit le sujet qu’il traite, l’auteur remonte aux origines, aux causes ; il s’y complaît ; il reprend tout dès le principe, et il redescend de là jusqu’à l’extrême conclusion sans passer un seul anneau de la chaîne. […] Ce fut lui qui, après l’attentat de Fieschi, vint proposer aux Chambres, dans la séance du mardi 4 août, les lois dites de septembre, dont le but était de faire rentrer forcément tous les partis dans la Charte, et de ne plus souffrir qu’on en remît chaque jour en question le principe.