« L’abbé Raynal est fort mal à son aise partout où il ne pérore pas colonies, politique et commerce. » C’est Diderot qui dit cela dans une lettre à Mlle Voland (4 octobre 1767). […] Il a eu un beau mot pour définir la Société de Jésus, qu’il connaissait bien : « C’est, disait-il, une épée dont la poignée est à Rome, et la pointe partout. » Ce qui ne l’empêcha pas, quand les Jésuites furent supprimés, de se faire honneur de prendre jusqu’à un certain point leur parti.
La patrie suisse exceptée, le pays d’ailleurs et le théâtre n’y font rien ; la belle école (comme il la conçoit), l’école de la grande guerre, est partout où il y a des capitaines capables de la comprendre et de la pratiquer. — C’est trop d’indifférence, dira-t-on. — J’exprime le fait sans blâmer ni approuver. […] Napoléon vient de le nommer ; voilà l’ennemi secret, celui qu’il eût voulu supprimer partout autour de lui, et auquel il trouvait à redire chez Jomini, chez Saint-Cyr, chez un certain nombre de raisonneurs clairvoyants et judicieux.
La religion sans âme, la beauté vénale et souillée, ce n’est pas seulement Rome ou Venise ; le peuple méprisé et fort, c’est partout la Terre de labour ; Juliette assoupie et non pas morte, Juliette au tombeau, appelant le fiancé, c’est la Vierge palingénésique de Ballanche, la noble Vierge qui, des ombres du caveau, s’en va nous apparaître sur la plate-forme de la tour ; c’est l’avenir du siècle et du monde. […] Les rimes sont partout réduites à leur minimum, griser et lévrier par exemple, Danaé et tombé : le poëte en cela a trouvé moyen de renchérir sur Voltaire.
On retrouverait en lui partout et dans le meilleur sens l’élève des jésuites et du Père Du Cerceau ; quand les jésuites ne se mêlaient pas de théologie, mais seulement de littérature, ils avaient de ce genre d’esprit dont Gresset représente la fleur la plus brillante et la plus mondaine : il suffit de nommer Commire, Cossart, Rapin, Porée, Bougeant et tant d’autres. […] Car enfin, même en se retirant au bout du monde, on emporte des préservatifs avec soi : Voltaire se fit un Paris et un Versailles partout où il alla, et tout en se vantant par coquetterie d’être Suisse et très-Suisse.
Si M. de Glouvet n’est peut-être pas partout un écrivain accompli, il s’est montré, comme j’ai dit, poète en plus d’un endroit, et, une fois, poète puissant dans le Berger. […] Ce n’est qu’à regret qu’il écrase la mouche qui menace ses ouailles ; et quand il a pris le loup il n’ose le tuer, il le laisse partir ; car Fleuse sait que partout, dans les animaux, dans les insectes, dans les plantes, dans les choses, dans le vent, dans la nuit, il y a des âmes, des esprits inconnus auxquels il ne faut pas toucher : Son idée, que l’analyse n’avait pas affaiblie, qui, en l’absence de toute formule, s’était changée en sentiment, vivait robuste dans ce crépuscule intellectuel : l’idée de l’homme chétif soumis à son grand gardien, l’Invisible.
Le peintre abonde et surabonde ; il nage et s’en donne partout à cœur joie. […] Mais, ici, l’Hippocrate ne sait pas garder son sang-froid ; il laisse échapper la joie qu’il y prend et à quel point sa curiosité se délecte ; il s’écrie, en présence de cette multitude de sujets de son observation : La promptitude des yeux à voler partout en sondant les âmes à la faveur de ce premier trouble de surprise et de dérangement subit, la combinaison de tout ce qu’on y remarque, l’étonnement de ne pas trouver ce qu’on avait cru de quelques-uns, faute de cœur ou d’assez d’esprit en eux, et plus en d’autres qu’on n’avait pensé, tout cet amas d’objets vifs et de choses si importantes forme un plaisir à qui le sait prendre, qui, tout peu solide qu’il devient, est un des plus grands dont on puisse jouir dans une cour.
Mais toutes les grandes et principales parties de l’ouvrage sont de Buffon ; il y a partout la haute main ; chaque volume porte son cachet et son empreinte par quelque page immortelle ; les derniers volumes ne se distinguent des précédents et ne se font remarquer que par une ordonnance plus exacte et une plus grande perfection d’ensemble. […] Il aime l’ordre, il en met partout. » Avec cette justice parfaite et cette bonté qui dérivait de la règle et du tempérament, il ne cessa de faire du bien dans ses alentours, et les gens de Montbard l’adoraient.
Partout où il eût été, on l’eût distingué d’abord et reconnu comme on reconnaît « la reine parmi les abeilles ». […] Quand il se sent une passion principale et dominante, si noble qu’elle soit, Louis XIV cherche à ne pas écouter qu’elle seule, mais à la contrebalancer par d’autres qui soient également en vue de l’État : « Il faut de la variété dans la gloire comme partout ailleurs, et en celle des princes plus qu’en celle des particuliers ; car qui dit un grand roi, dit presque tous les talents ensemble de ses plus excellents sujets. » Il est des talents où il ne pense point qu’un roi doive trop exceller ; il lui est bon et honorable d’y être surpassé par les autres ; mais il doit les apprécier dans tous.
Marmont, mis hors de combat par de si graves blessures, fut transporté à Burgos et jusqu’à Bayonne, et reçu partout avec les honneurs dus à sa dignité : « Spectacle imposant, dit-il, de cette entrée en pompe d’un général d’armée mutilé sur le champ de bataille, porté avec respect devant les troupes, entrant au bruit du canon et escorté de tout son état-major. » Et comme il faut que l’esprit français se trouve partout, même dans les revers : « Je fis la plaisanterie, ajoute-t-il, de dire que j’avais, pendant ce voyage, assisté plusieurs fois à l’enterrement de Marlborough. » Sur la foi de son chirurgien Fabre, Marmont résista à toutes les insinuations qu’on lui faisait de se laisser couper le bras (qui était le bras droit) ; il aima mieux souffrir et obtenir une lente guérison.
Non seulement Richelieu ne signait jamais une lettre qu’il n’eût écrite ou dictée, mais ce Premier ministre, dont l’esprit voulait être partout présent, dictait souvent des lettres, instructions ou dépêches qu’il ne signait pas, et que signaient les secrétaires d’État ou ministres des divers départements. […] L’infidélité et le peu de loyauté se trahissent partout.
Mettez des sentinelles partout. […] Entrer en passion pour le bon, pour le vrai, pour le juste ; souffrir dans les souffrants ; tous les coups frappés par tous les bourreaux sur la chair humaine, les sentir sur son âme ; être flagellé dans le Christ et fustigé dans le nègre ; s’affermir et se lamenter ; escalader, titan, cette cime farouche où Pierre et César font fraterniser leurs glaives, gladium gladio copulemus ; entasser dans cette escalade l’Ossa de l’idéal sur le Pélion du réel ; faire une vaste répartition d’espérance ; profiter de l’ubiquité du livre pour être partout à la fois avec une pensée de consolation ; pousser pêle-mêle hommes, femmes, enfants, blancs, noirs, peuples, bourreaux, tyrans, victimes, imposteurs, ignorants, prolétaires, serfs, esclaves, maîtres, vers l’avenir, précipice aux uns, délivrance aux autres ; aller, éveiller, hâter, marcher, courir, penser, vouloir, à la bonne heure, voilà qui est bien.
Newmann dit que, près des villages et des petites villes, il a trouvé des nids de Bourdons en plus grand nombre que partout, ce qu’il attribue au grand nombre de Chats qui détruisent les Mulots. […] En Russie, la petite Blatte d’Asie (Blatta orientalis) a partout chassé devant elle sa grande congénère.
Malgré cela, je ne saurais me dissimuler que l’ouvrage de Doyen n’ait l’air tourmenté, qu’il n’y ait ni naturel ni facilité dans la distribution des figures et des incidens, et qu’on n’y sente partout l’homme qui s’est battu les flancs. […] Je gage que son effet vous fatiguera ; qu’il n’y a point de plans, mais point ; rien de décidé ; qu’on ne sait toujours où posent les figures du parvis ; que cette grosse suivante à énorme derrière rouge, au lieu d’être large, continue d’être monstrueuse et mal assise ; qu’il n’y a point de repos, que vous y ressentez partout la furia francese ; qu’à juger de la figure qui tient le petit enfant, par le plan qu’on lui suppose, elle est d’une grandeur colossale, etc., etc.
On voudrait citer davantage ; l’espace manque, mais partout de la première page jusqu’à la dernière, c’est du Michelet qu’on croirait sincère, tant il est réussi ! […] Il y a encore le Forçat dont le dénoûment est d’une réalité si profonde, et où vous trouvez ce que l’auteur ne cesse de mettre partout dans ses récits, du reste, — les délicatesses surhumaines de la charité.
… Que lui, l’étincelant Rivarol, ce bel esprit dans toute la splendeur du mot, cette mitrailleuse d’épigrammes qui en faisait un feu roulant à propos de tout et partout, soit devenu journaliste à une époque où toute la France se ruait aux journaux et que les lettres françaises s’enfonçaient dans la fondrière de la politique, qui les souille toujours et qui les étouffe, c’était là un malheur, sans doute, mais ce n’est pas ce qui peut surprendre. […] Partout ailleurs, il est éclatant, débordant, imagé, asiatique, comme disaient les Latins pour marquer la magnificence de ces espèces de génies ; mais, en histoire, l’asiatique redevenait romain.
En ce qui touche au reste de l’Europe, on n’en parle pas, parce qu’il faut s’en faire, parce que, partout ailleurs qu’en Allemagne, ces prétentions rencontreraient un démenti trop cruellement éclatant pour qu’on osât seulement les y exposer. […] Il y a là, comme partout, des écrivains à fantaisie et à système, plus capables d’admirer le passé que de dire ce qui conviendrait au présent ; mais l’Allemagne n’est pas plus catholique que jamais et que le reste de l’Europe.
Il en a marqué la différence dans une phrase sur les femmes, qui les classe d’un seul trait, du reste : « Les femmes aiment ce qui brille, — dit-il, — elles n’aiment pas ce qui resplendit. » Le livre de l’Homme est partout semé de mots semblables. […] Lacordaire moulait tout un homme, en s’y reprenant avec la lenteur de l’art qui veut faire ressemblant et de l’amour qui veut qu’on reconnaisse et qu’on adore, tandis que l’auteur de la Physionomie de Saints ébauche du pouce seulement quelques traits, mais partout où le pouce a passé, il est resté de la lumière !
Mais ici toute prétention exclusive est vaine ; la poésie lyrique est née partout, avec les premiers et les plus vifs sentiments de l’âme. […] ne diffère pas d’accorder merci, si tu le peux ; car je vois déjà le ciel s’ouvrir, et les anges de Dieu venir dans ce bas monde pour emporter l’âme sainte. » On sait combien cette image de Béatrix occupa la pensée du Dante, et revient partout dans ses premiers vers, avant d’être divinisée dans son grand poëme.
Laubardemont, qui revient partout, et qui semble poursuivre Cinq-Mars, depuis que celui-ci l’a frappé au front d’un crucifix ardent dans l’affaire de Loudun, est un héros ignoble de mélodrame ; son fils devenu brigand et contrebandier, sa nièce religieuse devenue folle, cette scène entre tous les trois, la nuit, au milieu des Pyrénées, tout ce luxe de conceptions bizarres fait tort à la vérité.
Mais partout où nous avons acquis la preuve matérielle qu’un article, un bulletin littéraire, une chronique étaient de M.
il s’est exprimé sur tous points avec convenance et franchise ; il n’a manqué ni à ses convictions politiques ni à sa haute position littéraire, et, dès le premier jour, il a pris dans l’Académie, avec une noble aisance, la place que son génie lui assure partout.
L’éducation, sans doute, influe beaucoup sur l’esprit et le caractère, mais il est plus aisé d’inspirer à son élève ses opinions que ses volontés ; le moi de votre enfant se compose de vos leçons, des livres que vous lui avez donnés, des personnes dont vous l’avez entouré, mais quoique vous puissiez reconnaître partout vos traces, vos ordres n’ont plus le même empire ; vous avez formé un homme, mais ce qu’il a pris de vous est devenu lui, et sert autant que ses propres réflexions à composer son indépendance : enfin, les générations successives étant souvent appelées par la durée de la vie de l’homme à exister simultanément, les pères et les enfants, dans la réciprocité de sentiments qu’ils veulent les uns des autres, oublient presque toujours de quel différent point de vue ils considèrent le monde ; la glace, qui renverse les objets qu’elle présente, les dénature moins que l’âge qui les place dans l’avenir ou dans le passé.
L’antithèse de mots est toujours et partout détestable, et d’autant plus dangereuse qu’elle offre plus de tentation et de facilité.
Puis de tous les côtés, sur toutes les frontières, à mesure que les rois rattachaient de nouveaux territoires à leur couronne, la langue française faisait, elle aussi, des conquêtes, disputant leur domaine avec plus ou moins de succès tantôt au celtique, tantôt à l’allemand, tantôt à l’italien, et tantôt au basque : de langue officielle et administrative, tendant partout à être langue de la littérature et des classes cultivées.