Son instinct le poussait vers de plus vastes entreprises ; il se préoccupait de l’évolution sociale ; il aimait l’atmosphère orageuse des réunions publiques ; il brûlait d’y prendre la parole et de conquérir les foules.
On avait pu lire, de Verlaine, les Fêtes galantes, les Romances sans paroles, et Sagesse.
Il y a des raca inexpiables ; il y a des paroles extrêmes qui sont des faits accomplis.
Cette pétulance gesticulante qui paraissait d’abord si curieuse à Paris, et qui le distinguait aussitôt, était vulgaire dans la rue de Tolède et aux environs ; Galiani manquait d’écouteurs et de cercle à lui tout seul : « Paris, s’écriait-il souvent avec l’accent du désespoir après l’avoir quitté, Paris est le seul pays où l’on m’écoutait. » Une fois retiré dans sa patrie, cette patrie qu’il aime pourtant, et dont il est une des curiosités vivantes, il se meurt de paroles rentrées et non écoutées.
Jamais pressé de parler, il examinait, il pénétrait les caractères et les pensées ; mais, comme il était sage et qu’il savait combien les paroles des rois sont pesées, il renfermait souvent en lui-même ce que sa pénétration lui avait fait découvrir.
Il est certain, disait Mlle de Scudéry, qu’il y a des femmes qui parlent bien, qui écrivent mal, et qui écrivent mal purement par leur faute… C’est, selon moi, une erreur insupportable à toutes les femmes, ajoute-t-elle, de vouloir bien parler et de vouloir mal écrire… La plupart des dames semblent écrire pour n’être pas entendues, tant il y a peu de liaison en leurs paroles, et tant leur orthographe est bizarre.
Mais Voltaire ne voulait pas seulement réparation et justice, il voulait du bruit ; dans une lettre à d’Alembert de cette date, il nous dit le secret de son acharnement, lorsqu’il écrit cette affreuse parole : « Je m’occupe à faire aller un prêtre aux galères. » Après avoir cherché assez inutilement à mettre M. de Brosses en mouvement pour cette affaire qui flattait sa passion dominante et sa haine, Voltaire revint à sa passion plus sourde, aux quatorze moules de bois et à l’avarice.
dit-il, ce sont nos maîtres qui siègent là : nous ne sommes que leurs ouvriers, ils ont le droit de nous censurer et de nous applaudir. » On reconnaît dans ce dernier mot l’imprudente parole qui, au début, était échappée à Volney, et qui demeurait attachée à son nom ; en la répétant, on la résumait avec plus de force encore qu’il n’en avait mis en la proférant.
Les actions particulières — comme lever le bras, mouvoir les jambes, prononcer telles ou telles paroles — ne sont en effet que des spécifications, des concentrations de notre conscience motrice continue.
Nous avons vu que, selon lui, nous devons sympathiser avec l’œuvre d’art comme avec les œuvres de la nature, « car la pensée humaine, comme l’individualité même d’un être, a besoin d’être aimée pour être comprise ; » jusque dans la lecture d’un simple livre soyons donc de bonne volonté : « l’affection éclaire » ; et il ajoute ces belles paroles, qu’on peut appliquer à son propre ouvrage sur l’art : « Le livre ami est comme un œil ouvert que la mort même ne ferme pas, et où se fait toujours visible, en un rayon de lumière, la pensée la plus profonde d’un être humain. » Alfred Fouillée 1.
. — « Ta parole est un poignard !
» Ces paroles sont excellentes, mais prenons garde cependant qu’elles ne nous rendent injustes.
En Italie plusieurs musiciens composent sur les mêmes paroles ; en Grèce plusieurs poëtes dramatiques traitaient le même sujet.
Ils me font revenir en mémoire cette parole d’un ami : « Dieu nous a donné la nature pour nous consoler des petits jeunes gens. » Et, les montrant d’une main, mon ami m’indiquait de l’autre la Maladetta avec ses effets de neige étincelants, ses arêtes aiguës qui prennent sous le soleil des teintes ardoisées, — et ses précipices aussi pittoresques et aussi dangereux que peut les souhaiter un Anglais atteint d’un spleen à son dernier période.
Il a pris au sérieux des paroles légères.
Probablement et d’après ce qui se pratiquait par une sorte d’échange entre la Barbarie et la Civilisation, tandis que Aétius faisait ses premières armes chez les Huns, Attila faisait les siennes chez les Romains, étudiant les vices de cette société comme le chasseur étudie les allures d’une proie : faiblesse de l’élément romain et force de l’élément barbare dans les armées, incapacité des empereurs, corruption des hommes d’État, absence de ressort moral sur les sujets, en un mot, tout ce qu’il sut si bien exploiter plus tard et qui servit de levier à son audace et à son génie. » La phraséologie moderne à part, il y a l’éclair du vrai dans ces paroles.
Nettement en quelques paroles : Plus de lymphe que de sang, plus de sang que de muscles et plus de muscles encore que de nerfs !
……………………………………………… Je lus dans leur regard, j’écoutai leur parole, ……………………………………………… Tel qu’un enfant, au pied d’une haie et d’un mur, Entendant les passants vanter un figuier mûr, Une rose, un oiseau qu’on aperçoit derrière, Se parler de bosquets, de jets d’eau, de volière, Et de cygnes nageant dans un plein réservoir, Je leur dis : « Prenez-moi dans vos bras, je veux voir !
Celui même qui a dressé dans son cerveau, avec des assises dans l’être entier, un autel au dieu des voluptés secrètes, contemplant sa propre image que des rides précoces lui interdisent seules de comparer à l’éclatante beauté d’un Narcisse, s’adresse à lui-même ces paroles dans la mystérieuse solitude de son être : « Restons de plus en plus en nous-mêmes, d’essence toujours plus rare et sans cesse plus précieuse ; ne troublons pas ce qui doit rester pur, pour dominer les vains fantômes illusoires des réalités et l’immense troupeau des apparences.
Les pensées intimes et profondes d’un individu se traduisent dans sa conduite : parfois, pour les deviner, mieux vaut interpréter ses actes qu’écouler ses paroles, et s’en tenir à ce qu’il fait qu’à ce qu’il dit.
Quelles paroles retrouver qui soient dignes de sa grandeur sereine ? […] Quand il commença de briller au-dessus de la tourbe des littérateurs embrigadés, quand, avec sa parole ardente, qui donne la foi, il se mit à prêcher l’évangile de la doctrine nouvelle, une immense clameur d’indignation s’éleva autour de lui. […] *** Je me rappelais ces paroles en lisant, l’autre jour, dans un journal la phrase que voici : « La politique est un art d’expérience et d’observation, appliqué à créer, pour les hommes, la plus grande source de bonheur possible ». […] Le spectacle journalier de cette déchéance eût pu inspirer l’énergique parole d’un homme de courage comme est M. […] Et nul n’a le droit de le lui demander, puisque, par l’écrit, par la parole, par le fait, il n’a montré aucune préférence politique et ne s’est livré à aucune œuvre de propagande.
Ecrire en vers était pour lui ce que parler est à un méridional : « Je chantais, mes amis, comme l’homme respire » Où allait donc se porter cette faculté naturelle de s’épancher en paroles harmonieuses ? […] Il regarda la Révolution de 1830 en spectateur sceptique, ne se croyant lié par ses traditions de famille qu’à la personne des princes, se donnant à lui-même sa parole qu’il descendrait dans la rue si le roi montait à cheval, manque de cela restant chez soi, et voyant le nouveau gouvernement s’installer sans en prendre grand souci. […] Ensuite il faudrait se taire ; car il n’y a pas de vanité plus vaine que la parole. […] » Il voit Homère ; et pour donner un exemple de cette forme de critique trop souvent imitée (Paul de Saint-Victor), et saisir en même temps l’occasion de citer une page attrayante, voici comment il le voit : « Le chaos, le ciel, la terre, Géo et Céto, Jupiter, dieu des dieux, Agamemnon, roi des rois, les peuples, troupeaux dès le commencement, les temples, les villes, les assauts, les moissons, l’océan ; Diomède combattant, Ulysse errant ; les méandres d’une voile cherchant la patrie ; les cyclopes, les pygmées, une carte de géographie avec une couronne de dieux sur l’Olympe ; et çà et là des trous de fournaise laissant voir l’Érèbe ; les prêtres, les vierges, les mères, les petits enfants effrayés des panaches, le chien qui se souvient, les grandes paroles qui tombent des barbes blanches ; Vulcain pour le rire d’en haut, Thersite pour le rire d’en bas, les deux aspects du mariage résumés d’avance pour les siècles dans Hélène et dans Pénélope ; le Styx, le Destin, le talon d’Achille, sans lequel le Destin serait vaincu parle Styx, les monstres, les héros, les hommes, les mille perspectives entrevues dans la nuée du monde antique ; cette immensité, c’est Homère. […] J’ai déjà cité le « cheval effort qui hennit dans les deux » (Châtiments, VI, 5). — Voyez encore Paroles sur la dune (Contemplations, II) : Tristesse.
La Harpe a cherché malice et philosophie dans quelques paroles d’Arlequin refaisant des hommes selon le procédé mythologique, et intervertissant le rang de ces nouvelles poupées, mettant le laboureur en tête, puis l’artisan, l’homme d’épée ne venant que le troisième ; avec cet homme d’épée qui tranche du capitan, Arlequin commence par lui jeter bas d’un revers de main le chapeau à plumet qu’il a insolemment sur la tête : « Chapeau bas devant ton père, quand tes deux aînés sont dans leur devoir. […] Sur toutes ces gaîtés et joyeusetés du temps jadis, nous en sommes réduits à être des échos et à répéter nos devanciers, à les croire sur parole.
Au genre purement poétique appartient le comique arbitraire45, j’entends par là les inventions gaies qui procèdent de l’imagination libre du poète, les situations impossibles, les figures fantastiques et surtout les fous de cour46, avec leur sottise et leur esprit, leurs excentricités et leur sagesse, l’insignifiance de leur action dramatique et l’audace sensée de leurs paroles. […] Mon rôle modeste s’est borné à en développer quelques conséquences, à produire au grand jour une faible partie du trésor de vérités qu’ils renferment, et je n’ai pas négligé une occasion de répéter les propres paroles du maître, certain qu’elles charmeraient mon auditoire.