Dans la seconde, les mots suivent, pour disparaître, un ordre méthodique et grammatical, celui-là même qu’indique la loi de Ribot : les noms propres s’éclipsent d’abord, puis les noms communs, enfin les verbes 61. […] Comment expliquer que l’amnésie suive ici une marche méthodique, commençant par les noms propres et finissant par les verbes ? […] C’est ainsi qu’il nous arrive, ayant retenu l’initiale d’un nom oublié, de retrouver le nom à force de prononcer l’initiale 68. — Ainsi, dans les faits du second genre, c’est la fonction qui est atteinte dans son ensemble, et dans ceux du premier genre l’oubli, plus net en apparence, ne doit jamais être définitif en réalité. […] Ils raisonnent comme si une phrase se composait de noms qui vont évoquer des images de choses. […] Graves cite le cas d’un malade qui avait oublié tous les noms, mais se souvenait de leur initiale, et arrivait par elle à les retrouver.
c’est lui qui, après avoir gémi dans ses écrits pendant vingt ans au seul nom d’invasion, et avoir demandé sur tous les tons, avec des cris de prophète, avec des cris d’aigle, qu’on relevât la France d’un humiliant désastre auquel il attribuait tous les maux, même civils, n’est pas content d’elle aujourd’hui qu’elle a, ce me semble, la tête assez haute et qu’elle s’est assez bien revanchée ! […] Ce dernier volume, par la vivacité des impressions, par la quantité de faits curieux qui y sont rassemblés et qui se déploient dans une trame facile, par la clarté qui y circule et qui y répand une sorte de sérénité inespérée, la seule possible avec Waterloo en perspective, par le talent enfin (car il faut appeler les choses par leur nom), mérite d’être signalé tout spécialement, même après les récents volumes, à l’attention et à la haute estime du public. […] Thiers fait mieux comprendre que personne cette époque convulsive, en partie énigmatique, qui évoquait et entrechoquait tant de noms étonnés de se retrouver ensemble, qui ralliait autour du nouveau trône impérial, dans un sentiment patriotique et sincère, les Sieyès, les Carnot, les Lecourbe, les Benjamin Constant.
Le nom de Jean-Jacques revient inévitablement dès qu’il s’agit d’un maître à qui dignement le comparer. […] Le nom de l’auteur, proclamé à la fin au milieu des applaudissements, a réduit à néant les quelques murmures passagers et comme honteux d’eux-mêmes qui s’étaient çà et là essayés. […] On a compris du moins que, devant le masque à demi levé, l’entier respect recommençait, et que ce nom-là, pour tous, en ce temps-ci, c’était une gloire.
Ils ont toutes les qualités nécessaires pour exciter le développement de l’esprit humain ; mais on n’éprouve point, en les voyant disparaître de l’histoire, la même douleur qu’inspire la perte du nom et du caractère des Romains. […] On ne trouve pas un seul portrait de femme dans les caractères de Théophraste ; leur nom n’y est jamais prononcé comme celui d’un être faisant partie des intérêts de la société. On m’a objecté l’éclat du nom d’Aspasie.
Un ton imposant, des maximes éblouissantes, des sentimens hyperboliques, des sentences miraculeuses exaltoient les têtes, donnoient des convulsions philosophiques, & faisoient retentir le nom de Philosophe, des Académies jusque dans les Coches. […] Instruits à fond de leurs sentimens & de leurs manœuvres, nous les voyons déjà se déchaîner contre nous dans les Sociétés, ne rien épargner pour décrier notre travail, notre personne, nos mœurs : nous entendons déjà les noms de Polisson, de Méchant, de Fripon, de Scélérat, de Monstre, &c. […] Les Auteurs vivans, si nous en avons passé quelques-uns sous silence (comme cela est très-vraisemblable), ne doivent pas nous savoir mauvais gré de cet oubli : leur nom ou leurs Ouvrages ont échappé à nos recherches.
De tous les poëtes qui se sont acquis un grand nom, Lucain est le seul, autant qu’il m’en souvient, qui dès sa jeunesse ait pû vivre dans l’abondance. […] Delà naissent tant d’ouvrages ennuïeux, qui font prendre en mauvaise part le nom de poëte, et qui empêchent que personne veuille s’honorer d’un si beau titre. […] Mais ces peines et ces contradictions ne sont point capables de dégoûter de la poësie un jeune homme qui tient sa vocation d’Apollon même, et qu’excite encore le desir de se faire un nom et une fortune.
Eugène Talbot, dont le nom rappelle celui d’un héros encore plus crâne que lui, me produit cependant l’effet d’un héros de goût d’avoir fait cela, et, pour mon compte, je lui sais un gré infini d’avoir, en publiant cette édition qui est soignée et très belle, remis les choses en leur place naturelle, — c’est-à-dire Larcher au sépulcre et Saliat hors de son tombeau ! […] Et, de fait, la langue du seizième siècle allait d’elle-même, faceva da se, quand il s’agissait de traduire les ondoyances, la force tempérée de grâce, la gravité riante, toutes les poésies, tous les ionismes de ce poète en prose qui était d’Ionie, de cet Homère de l’Histoire à qui les Grecs firent cet honneur, qui fut une justice, de nommer du nom de chaque Muse les neuf chapitres de ses Histoires, pour eux, un Parnasse tout entier ! Ce rapsode, qui mérite d’autant plus son nom que les ennemis de l’histoire légendaire ont traité brutalement ses histoires de rapsodies, a d’autant plus besoin pour sa traduction d’une langue poétique qu’il est plus poète.
Cependant, jusqu’ici, c’est beaucoup plus un nom retentissant qu’une vie creusée, que le cardinal Ximénès. Vingt fois des hommes qui valaient beaucoup moins que lui ont occupé l’attention des historiens modernes, et pour ce moine il semblait qu’on avait tout dit quand on avait écrit son nom. […] Il parlait peu, mais il ne disait jamais que ce qu’il voulait, avisé comme l’animal dont on aimait à lui donner le nom.
Laïs, comme toutes les courtisanes grecques qui ont laissé leur nom aux imaginations libertines de la postérité, — Phryné, Rhodope, Thaïs, Aspasie, Callixène, — Laïs n’est guère qu’un nom, une renommée, une fumée vague, qu’aucune recherche, aucune histoire, ne parviendront à condenser. […] Mais que mademoiselle de Lenclos ait été honorée dans son infamie par le siècle même de l’honneur, que cette déesse Raison, qui précéda les autres déesses de ce nom et de ces mœurs, soit allée de pair avec les plus illustres dames de la cour de la Convenance, que la prude madame de Sévigné en ait rêvé, que la comtesse de Sandwich l’ait recherchée, que la reine Christine ait voulu l’emmener à Rome comme son amie, que madame de Maintenon ait été liée avec elle, que Louis XIV ait eu la pensée de se la faire présenter, c’est là un de ces spectacles qui font croire à l’enivrement de tout le monde, mais le philtre qui a produit cette ivresse, ce n’est pas Ninon qui l’avait versé !
Parfois même il n’est pas besoin d’une filiation directe ; il suffit du même nom, pour que la mystérieuse et redoutable loi s’accomplisse… Habitué, par l’histoire religieuse qu’il a souvent écrite, aux idées générales et aux conclusions providentielles, Crétineau-Joly devait être nécessairement plus frappé que personne du rôle invariablement funeste qu’a joué dans nos annales tout ce qui porta jadis le nom d’Orléans, et il n’a pas voulu qu’on l’oublie. […] Ainsi, un Macbeth manqué et dépareillé, un Macbeth bourgeois, qui n’a jamais senti, comme l’autre, entre ses deux épaules, l’inflexible bras tendu de la vigoureuse femme qui le pousse à l’action, voilà le Louis-Philippe que Crétineau-Joly a entrevu, mais qui, s’il l’avait regardé plus longtemps, lui aurait expliqué ce piètre règne qu’on a appelé le règne du juste milieu pour en dissimuler, sous ce nom-là, les pusillanimités et les tristesses !
Dynastie de gazetiers, dynastie de médecins, dans la personne de ses deux fils, Eusèbe et Isaac Renaudot, et dans celle de son petit-fils Eusèbe, deuxième du nom, connu, au temps de Louis XIV, sous le nom d’abbé Renaudot. […] Qu’il cite moins et pense davantage en son nom personnel.
», dit-il quelque part, écrasant le nom sous l’épithète, en parlant de ce bonhomme si parfaitement coulé maintenant dans l’océan révolutionnaire et qui présida, je crois, un jour, l’Assemblée nationale. […] On éprouve celui qu’on aurait pour une femme, et qui change de nom quand il s’applique aux femmes ; car alors, c’est de la pitié ! […] — le monde et les mois de la Révolution française dans le monde d’Athènes et de Rome, ce que Chateaubriand fît aussi dans son Essai sur les Révolutions et ce qui devint chez Desmoulins un procédé presque monotone, tout cela suffit-il pour mériter réellement ce nom glorieux de grand artiste qu’on lui prodigue ?
Attaché à cette œuvre ingrate et présentement stérile qu’on appelle la Poésie, il n’a pas encore sur son nom l’éclat de renommée qui serait dû à son talent, à ses travaux et à ses efforts. […] Il est trop long pour que nous puissions le citer dans la variété de toutes ses modulations, mais dites si depuis les roucoulements des chœurs d’Esther ou d’Athalie vous avez vu des strophes de cette transparence tomber, avec ce mouvement de vapeur, dans un air léger : Une Vierge de Galilée Du nom de Marie appelée En ses deux lianes vous portera, Et dans une étable naîtra Le roi de la sphère étoilée ! Et quel nom aura-t-il, Seigneur, Votre enfant, l’enfant de Marie ?
Il n’en faut pas davantage ici… » Veuillot s’arrête, il n’a pas d’anecdote à rapporter, pas de billets scandaleux à transcrire, pas de nom à citer. […] Ces noms-là leur conviennent mieux. […] Il s’appelait de son nom patronymique Thibault. […] On a souvent cité, à cette occasion, le nom de Saint-Simon. […] Voyez le père se redresser contre l’outrage, et tout d’abord sacrifier à l’honneur du nom ce domaine que les siens ont fait.
Depuis, elle devint grosse d’une fille, à laquelle la mère de mon père donna son nom de Rose. […] Toutes les personnes qui étaient présentes lui demandèrent, en le félicitant, quel nom il voulait donner à cet enfant ? […] Il entre alors chez un fameux orfèvre du nom de Marioni, comme ouvrier sans gages. […] Celui-ci lui dit mon nom : c’est donc le fils de maître Jean Cellini, répondit le pape ? […] Alors je l’appelai par son nom, parce que je le connaissais.
Hésiode nous a laissé quelques-uns de leurs noms, qui reflétaient la couleur ou qui exprimaient la qualité de leurs flots. […] Océanos, dans la mythologie primitive, ne représentait point la Mer universelle, comme son nom pourrait le faire croire. […] Elle a traversé à la nage la mer qui portera désormais son nom, et elle est arrivée au pied de la montagne expiatoire. […] Ce nom d’Éphémères qu’on lui jette toujours à la face, en parlant des hommes, ses fils d’adoption, il le retourne contre ceux qui se proclament immortels. […] Prométhée, converti au dieu transformé, lui révélait en échange le nom de la déesse dont l’hymen l’aurait renversé du trône.
Il y a deux Poëmes fameux qui portent son nom l’Iliade & l’Odyssée. […] Ici il enleve au Poëte plusieurs vers qui avoient paru sous son nom. […] M. de Sacy publia, sous le nom de St. […] Nous avons divers ouvrages sous le nom de ce célébre voluptueux. […] sous le nom de Boispréaux.
On trouve sous le nom de saint Bonaventure, dans les Extraits des poètes chrétiens de M. […] Et l’on conclut : Salamine, à nom phénicien, a été fondée par des Phéniciens. […] Pétersbourg est un nom allemand, Syracuse en Amérique un nom grec. Il faut d’autres conditions pour être sûr que le nom soit lié à la nationalité des fondateurs. […] Quelle place doit-on faire aux noms propres et aux dates ?
Dominique, c’est l’histoire de l’enfance, des premiers sentiments et de la jeunesse du personnage qui porte ce nom ; lui-même raconte à un ami cette histoire toute simple, tout intérieure, en partie délicieuse, en partie douloureuse, et lui fait de vive voix sa confession. […] Dominique de Bray (c’est son nom complet) est un noble qui, par sa simplicité, oublie et fait oublier qu’il l’est. […] Et quelquefois, à la fin de juin, par un jour brûlant, dans la robuste épaisseur d’un arbre en pleines feuilles, je voyais un petit oiseau muet et de couleur douteuse, peureux, dépaysé, qui errait tout seul et prenait son vol : c’était l’oiseau du printemps qui nous quittait. » Augustin, le précepteur de Dominique, est un très jeune homme, d’une nature tout opposée à celle de son élève : c’est un homme de livres, de logique, de science, un cerveau ; après bien des labeurs, après des âpretés et des difficultés sans nombre de carrière et de destinée, il arrivera un jour à se faire un nom parmi les écrivains sérieux de son pays, à se faire une haute situation même ; ce sera un politique, un économiste, un conseiller d’État, un ministre, que sais-je ? […] Du premier jour, pourtant, Dominique s’y fait un ami d’un jeune gentilhomme du nom d’Olivier d’Orsel, venu récemment de Paris, qui en a déjà respiré le souffle, qui n’a rien de provincial ni de scolaire, et qui n’est et ne sera jamais qu’un charmant mauvais écolier, puis un charmant mauvais sujet fort aimable et naturel. […] Dominique s’enivre de sa vue ; il ne se nourrit plus que d’une pensée unique, et, dans son reste d’enfance, il ne conçoit pas la moindre crainte pour l’avenir ; il ne s’est pas aperçu que parmi les objets de voyage qu’on déballait, près d’un bouquet de rhododendrons rapporté de quelque ascension lointaine et enveloppé avec soin, une carte d’homme s’est détachée, dont Olivier s’est emparé aussitôt, et qu’un nom inconnu a été prononcé pour la première fois : Comte Alfred de Nièvres.
Sur la fin de ce séjour et pendant l’exercice de cette garnison si bien établie et consolidée, Louis XIV jugea à propos de le détacher pour lui confier le commandement de la petite armée qu’il envoya en 1686 au duc de Savoie : elle devait l’aider à chasser des vallées des Alpes les religionnaires désignés sous le nom de Vaudois et qui vivaient là cantonnés depuis des siècles ; on les appelait aussi Barbets les jours de mépris et d’insulte, à cause de l’ancien nom de leurs pasteurs (barbas). […] Trente ans auparavant, d’atroces exécutions, des massacres connus sous le nom de Pâques piémontaises (1655) n’avaient amené d’autre résultat qu’une vaste effusion de sang, un cri d’horreur dans toute l’Europe protestante, des réclamations énergiques, et la haute intervention de Cromwell, dont le bras protecteur s’étendit jusqu’à ceux qu’on immolait. […] La proposition des députés suisses fut faite dans une assemblée générale convoquée au Chiabas le 23 mars ; la séance s’ouvrit par une prière que prononça le pasteur Arnaud ; retenez ce nom, déjà porté avec tant d’honneur en France depuis plus de quarante ans par un illustre persécuté : ici, dans les vallées, cet Arnaud n’est pas seulement un théologien, c’est un homme pratique, un grand caractère en action ; né dans le Dauphiné et d’abord pasteur français, il était devenu pasteur Vaudois, et de pasteur il devint capitaine quand il le fallut, et plus tard, comme Josué, conducteur de peuple. […] C’est pourtant là une affreuse conséquence de la guerre, qu’il y ait un lieu au monde où le nom de Catinat soit en exécration, comme celui de Mélac dans le Palatinat.
Mais ce fut surtout lorsqu’une école nouvelle s’éleva en littérature, lorsque certains esprits, bien peu nombreux d’abord, commencèrent de mettre en avant des théories inusitées et les appliquèrent dans des œuvres, ce fut alors qu’en haine des innovations on revint de toutes parts à Boileau comme à un ancêtre illustre et qu’on se rallia à son nom dans chaque mêlée. […] Il est bon, à chaque époque littéraire nouvelle, de repasser en son esprit et de revivifier les idées qui sont représentées par certains noms devenus sacramentels, dût-on n’y rien changer, à peu près comme à chaque nouveau règne on refrappe monnaie et on rajeunit l’effigie sans altérer le poids. […] Cette rigueur, surtout celle de Boileau, peut souvent s’appeler du nom d’équité ; pourtant, même quand ils ont raison, Malherbe et Boileau ne l’ont jamais qu’à la manière un peu vulgaire du bon sens, c’est-à-dire sans portée, sans principes, avec des vues incomplètes, insuffisantes. […] Que si maintenant on nous oppose qu’il n’était pas besoin de tant de détours pour énoncer sur Boileau une opinion si peu neuve et que bien des gens partagent au fond, nous rappellerons qu’en tout ceci nous n’avons prétendu rien inventer ; que nous avons seulement voulu rafraîchir en notre esprit les idées que le nom de Boileau réveille, remettre ce célèbre personnage en place, dans son siècle, avec ses mérites et ses imperfections, et revoir sans préjugés, de près à la fois et à distance, le correct, l’élégant, l’ingénieux rédacteur d’un code poétique abrogé. […] Mais ces accidents champêtres, et toujours et avant tout ingénieux, sont rares chez Boileau, et ils le devinrent de plus en plus avec l’Age. — Puisque nous en sommes à ce détail, ne laissons pas de remarquer encore que la fontaine Polycrècne, dont il est question dans la même épître et qui arrose la vallée de Saint-Chéron, près de Bàville, fontaine chantée en latin par tous les doctes et les beaux-esprits du temps, Rapin, Huet, etc., est restée connue dans le pays sous le nom de fontaine de Boileau.
. — Agni — Ignis, — c’est le nom qu’il prend en se fixant sur la terre. […] On voit alors Pramâthyus, sous le nom de Mâtarichvan, arracher Agni d’une caverne où il s’était endormi. […] Il est absent de l’Iliade et de l’Odyssée, Homère n’a pas prononcé son nom. […] Chez Hésiode, comme dans le Rig-Véda, le Soleil et l’Air, le Feu et l’Eau, la Foudre et les Vents transparaissent sous les noms sacrés qui les désignent, sans les personnifier tout à fait. […] Leurs noms définissent ce contraste, Prométhée est « le prescient », le « prévoyant », celui qui sait d’avance ; tandis qu’Épiméthée signifie « celui qui ne réfléchit qu’après coup », qui regrette trop tard le mal survenu.
Quel monde contient ce nom gros de tous les germes et de tous les ferments de l’avenir ! […] A son nom bourgeois, elle a cousu un oripeau de noblesse, « Huguet de Champsableu », et elle se croit parée avec ce blason de hasard, qui luit faux à cent pas. […] Ce qui fait cette simonie abominable entre toutes, c’est le déshonneur tout spécial qu’elle inflige au mari, le rôle sans nom qu’elle lui fait jouer. […] S’il est complice, il fait un métier plus honteux que la honte ; c’est au lazaret du dictionnaire qu’il faut chercher le nom qu’il mérite. […] La lionne pauvre du Vaudeville s’appelle Séraphine, de son petit nom.
De loin, sans les confondre, on tient compte volontiers de leur double gloire, on les voit un peu l’un dans l’autre, et l’éclat du nom y a gagné. […] On ajoute que, dans un sentiment plus élevé, il s’écria à l’instant de la mort : « J’ai été infidèle à mon Dieu, à mon Ordre et à mon Roi : je meurs plein de foi et de repentir39. » On aime à penser qu’en ce moment de suprême équité, un autre nom, une autre infidélité lui serait revenue encore en mémoire, et qu’il se serait dit quelque chose de plus à lui-même s’il avait pu prévoir que, quelques mois après, sa femme, cette modeste, charmante et vertueuse femme dont il a si indignement parlé, et dont tous, excepté lui, ont loué l’inaltérable douceur, la raison calme et soumise, et les manières toutes pleines de timidité et de pudeur, monterait à son tour sur l’échafaud. […] De tout temps, des âmes passionnées ou mercenaires ont abusé des facilités que leur offraient des mémoires particuliers, inédits, pour répandre, sous le nom d’autrui, le venin dont elles étaient remplies. […] Et après avoir proposé un projet de loi assez vague et assez peu intelligible contre la diffamation et contre toute espèce d’imputation ayant un caractère personnel, M. de Talleyrand continuait : Mais, ces lois n’existant point encore, je crois devoir à la mémoire d’un homme dont je fus l’ami, de déclarer qu’il n’a point fait, qu’il était incapable de faire et qu’il aurait eu horreur d’écrire les Mémoires qu’on a osé mettre sous son nom. […] Mais ici on a droit d’interrompre la personne du monde qui juge de la sorte si à la légère, et de lui dire : « Non, madame, il n’est au pouvoir d’aucun homme, si élevé qu’il soit par son nom et son influence, de récuser ainsi et de mettre à néant d’un trait de plume des indiscrétions, fussent-elles scandaleuses et préjudiciables à tout un ordre de la société.