Ses pièces sont des tableaux délicats, fins, ambrés, pleins d’une lumière si pure, si lumineuse, que la Grèce tout entière nous apparaît dans sa splendeur première, telle que l’ont vue ses héros et ses poètes.
Ces trois parties essentielles du poète n’étaient pas arrivées à une pleine et entière fusion.
En le courbant sous le sceptre de fer de la nécessité, en promettant au trépas son être tout entier, l’incrédulité laisse le Raisonneur en proie au désespoir le plus affreux.
Peut-être a-t-on eu raison de lui reprocher trop de penchant à la critique, trop d'affectation à combattre certaines traditions accréditées par la multitude & le poids des témoignages, trop de facilité à tourner les textes à l'appui de ses idées, trop de complaisance dans les tableaux qu'il trace des abus qui lui déplaisent, trop d'amertume dans les censures ; mais en convenant de quelques-uns de ces défauts, il n'en est pas moins vrai, que si une plus longue carriere lui eût permis d'exécuter l'Ouvrage en entier, il auroit eu la gloire de nous avoir laissé une Histoire aussi estimable par la recherche des faits, leur ordonnance & leur variété, que par le mérite du style, qui est simple, aisé, naturel, & piquant, sans jamais s'éloigner de l'élégance & de la pureté, qui sont le partage d'un excellent Ecrivain.
Et mon ambition, quand vient sur la frontière L’étranger, La voici : part aucune au pouvoir, part entière Au danger.
Chez eux on trouve, pour ainsi dire, des ébauches de sentiments, mais rarement un sentiment achevé : ici, c’est tout le cœur : C’est Vénus tout entière à sa proie attachée !
Dans son admiration pour Louis XII, il s’est plu à développer ce point de vue d’une entière liberté accordée à la scène. […] Ces missions sont d’une nature trop particulière pour être exposées soit en entier, soit incomplètement. […] C’est alors que, retiré absolument des affaires, au seuil d’une robuste vieillesse, vivant de préférence en sa charmante habitation du Bois-Roussel (dans l’Orne), au milieu des libertés champêtres ou des joies de la famille, il se livra à ses goûts d’étude et de société combinés, et à la composition d’ouvrages moitié littéraires, moitié historiques, où il se développa avec une originalité entière.
Les contemporains de Marivaux ont dit de lui à peu près tout ce qu’on en peut dire : si l’on prend la peine de recueillir ce qu’ont écrit à son sujet Voltaire, Grimm, Collé, Marmontel, La Harpe, et surtout d’Alembert dans une excellente notice, on a de quoi se former un jugement précis et d’une entière exactitude : et pourtant il vaut mieux, même au risque de quelque hasard, oublier un moment ces témoignages voisins et concordants, et se donner soi-même l’impression directe d’une lecture à travers Marivaux. […] Aussi qu’il est rare qu’un auteur le soit véritablement, et qu’il se donne au public avec sa valeur propre et sa physionomie entière ! […] Marivaux a, sur les portraits, une théorie comme sur tout ; il est d’avis qu’on ne saurait jamais rendre en entier ce que sont les personnes : Du moins, cela ne me serait pas possible, nous dit-il par la bouche de Marianne ; je connais bien mieux les gens avec qui je vis que je ne les définirais ; il y a des choses en eux que je ne saisis point assez pour les dire, et que je n’aperçois que pour moi et non pas pour les autres… N’êtes-vous pas de même ?
Et la raison qu’il en trouvait, c’est que l’élève se donne toujours tout entier, tandis que le maître se réserve par un côté et se dissimule toujours. […] Lavater, en louant le meilleur ouvrage de Saint-Martin, L’Homme de désir, avouait ingénument qu’il ne l’entendait pas tout entier : « Et dans le vrai, dit Saint-Martin, Lavater eût été fait pour tout entendre, s’il avait eu des guides. […] Ce jour-là, sans y avoir songé, il sortit de l’ombre, il tira nettement le glaive et se dessina tout entier.
Il a parlé de la Révolution française, dans quelques-uns de ses écrits, en des termes grandioses et magnifiques : il est bon de voir comment il la prend et l’accueille dans le détail, avec une entière simplicité : Pendant la Révolution de France, dit-il, me trouvant à Amboise qui est mon lieu natal et ma commune domiciliaire, je me rendis comme les autres, avec les citoyens de ma compagnie, dans les bois de Chanteloup, au mois de thermidor l’an II de la République, pour y travailler à couper, porter et brûler de la bruyère, dont les cendres sont employées à faire de la poudre à tirer. […] La nouvelle de la victoire de Fleurus par Jourdan (26 juin 1793) le comble de joie, et il en consigne l’expression dans son Journal en homme qui, à cette date déjà bien sanglante, était pour la Révolution tout entière, sans marquer ses réserves : De même qu’on a fait apporter aux prêtres leurs lettres de prêtrise, et aux nobles leurs lettres de noblesse, de même nous ne devrons accorder la paix à nos ennemis qu’autant que tous les rois faux auront apporté leurs lettres de royauté. […] Malgré cela on me laissa lire jusqu’au bout, et le professeur ne me répondit que par des assertions et des raisons collatérales, de manière que mes trois observations restent encore dans leur entier, et je puis dire qu’il s’y trouve des bases neuves que je n’aurais pas eues sans cette circonstance.
Il éprouvait qu’une maison de campagne sans domaine était bien plus délicieuse qu’un château au milieu d’une terre ; car il y était exempt des soins de l’administration et tout entier à son cabinet et à ses livres. […] Vous ne le croiriez pas, les Anglais, ces grands approfondisseurs, manquent totalement de jugement… Ici il est près de passer d’un extrême à l’autre dans l’expression, comme il arrive lorsqu’on écrit tout entier sous l’impression du moment ; mais, en continuant, il va toucher de main de maître un défaut que nous savons très bien combiner avec l’inconstance, celui d’être routiniers et dociles à l’excès pour les autorités que nous avons adoptées une fois et les admirations que nous nous sommes imposées : Pour nous frivoles, jolis, légers, nous avons tout, mais nous nous tenons à trop peu de chose ; notre inconstance est notre seul tort, elle nous emporte si bien qu’elle nous dégoûte de nous-mêmes plus que de personne, et nous lasse de nos propres idées au lieu de nous plonger dans l’admiration de nous-mêmes comme ces vaniteux Espagnols et Portugais ; nous avons une docilité d’enfants qui nous rend disciples et admirateurs des autres nations du monde. […] Il porte en lui 89 tout entier et même un peu au-delà.
Ce rappel lui fut accordé d’ailleurs dans les termes d’une entière satisfaction. […] Ainsi nous voyons insensiblement se dessiner tout entier Villars et par ses actes et par ses paroles. […] Au milieu de la rigueur nécessaire, il s’y montre assez humain, bon politique, observateur éclairé et curieux des cerveaux en délire, nullement présomptueux : « Quand on a, dit-il, à ramener un peuple qui a la tête renversée, on ne peut répondre de rien que tout ne soit consommé. » Témoin des phénomènes physiologiques les plus bizarres, des tremblements convulsifs des prophètes et prophétesses, il est un de ceux dont la science invoquera un jour le témoignage : J’ai vu dans ce genre des choses que je n’aurais jamais crues si elles ne s’étaient passées sous mes yeux : une ville entière, dont toutes les femmes et les filles, sans exception, paraissaient possédées du diable.
Poirson l’a tiré en entier de l’observation directe des circonstances et des actes de son règne. […] Quant aux particularités de son naturel, il l’a extrêmement vif et si actif, que, à quoi qu’il s’adonne, il s’y met tout entier, ne faisant jamais guère qu’une seule chose à la fois. […] On ne se plaignait point des impositions excessives ; chacun payait sa taxe avec gaieté, et je n’ai point de mémoire d’avoir ouï dire qu’alors un passage de gens de guerre eût pillé une paroisse, bien loin d’avoir désolé des provinces entières, comme il ne s’est vu que trop souvent depuis, par la violence des ennemis.
Elle connaît la route du n° 5817, où nous nous embrasserons comme des pauvres. » À Malte, qu’il croque en deux traits et qu’il définit « un rocher imprenable gâté par des fortifications qui demandent quarante mille hommes pour les défendre », ou encore « une belle maison encombrée de meubles dans laquelle on ne peut pas entier », — à Malte, Horace a un crève-cœur : « Les Anglais font la pluie et le beau temps, et exercent de ce point une influence effroyable. […] Que le canon chasse devant lui des populations entières, qu’il les extermine, ce n’est que le moyen qui a changé, mais non la chose. […] Ou m’accorderez-vous bien quelques pages encore en faveur de celui dont le nom répandu est à la fois si européen et si français, et qui a couvert des murailles entières de ses peintures ?
Ces fonctions extraordinaires ayant cessé l’année suivante par l’organisation régulière et l’entière annexion de ces nouveaux départements, il fut et resta préfet de l’un d’eux, de celui du Mont-Tonnerre, qu’il administra jusqu’à sa mort. […] La maladie de ce digne magistrat affecte on ne peut pas plus péniblement tous ses administrés, qui le chérissent comme un père et oublient un moment leurs propres malheurs dans la crainte de perdre un préfet qui s’est tout entier consacré au bonheur du département… » Jean-Bon Saint-André rendit le dernier soupir le 10 décembre 1813. […] Le feu de la Montagne et le nombre de morts et de blessés, parmi lesquels je déplore la perte de mon capitaine de pavillon, de l’agent comptable maritime et de la moitié de mes officiers et trois cents hommes enfin de mon équipage, tant tués que blessés, prouveront à la République entière que les événements seuls ont causé le résultat malheureux de cette journée.
Il en parlait admirablement et de manière à la faire revivre tout entière sous les yeux avec tout son monde de théologiens, de professeurs, d’érudits et de poètes. […] Villemain excita en lui jusqu’à l’exaltation tout ce qu’il avait d’inclination littéraire ; il eut au plus haut degré le sentiment de sa vocation en ce genre ; il eut comme une vision de tout l’avenir qui lui était réservé s’il eût cultivé exclusivement les Lettres ; il lut page à page toute cette histoire de travaux, d’émotions, de succès, d’influence, qui aurait pu être la sienne aussi, et que son dévouement à des devoirs religieux avait tout entière annulée ; il vit à la fois tout ce qu’il avait sacrifié, et fut tenté (car c’est bien ainsi qu’il voyait la chose) d’un amer et indicible regret. Deux nuits entières il lutta, les mains jointes, contre cette vision ; elle disparut enfin et le laissa meurtri, brisé, mais saintement humilié et persuadé qu’il avait choisi la bonne part13. » Voilà des miracles de la littérature exquise, de celle qui ne brille que par l’étendue et la rapidité des aperçus, la justesse heureuse des touches, les ménagements et le choix des couleurs et du langage.
En me remettant à la lecture de Du Bellay et en reprenant de lui ce premier écrit par lequel il a ouvert, pour ainsi dire, l’ère de la Renaissance française, je me suis senti saisi d’un regret, et j’ai comme embrassé d’un seul regard la période tout entière, le stade littéraire où il entrait en courant, le flambeau à la main, stade glorieux, et qui, coupé, continué, accidenté et finalement développé pendant près de deux siècles et s’y déroulant avec bien de la variété et de la grandeur, n’a été véritablement clos et fermé que de nos jours. […] Son livre second est tout entier consacré à cette Poétique. […] Dans ce même chapitre, il s’adresse aussi aux prosateurs et les exhorte, en recueillant les fragments de vieilles chroniques françaises, à en bâtir le corps entier d’une belle histoire à la Tite-Live, à la Thucydide.
La littérature entière est déclassée. […] Le moment d’entière fraîcheur pour le genre ne dura que tant que Madame donna au théâtre son nom. […] Dites, ô vous qui vous montrez les plus sévères, une telle comédie ne ressemble-t-elle pas assez bien aux femmes de Paris elles-mêmes, à ces femmes délicates, élégantes, de haut comptoir ou de boudoir, qui n’ont rien de l’entière beauté à les regarder en détail, grêles, pâles, de complexion peu franche ?
Ce qui est moins à nier que jamais en lui, c’est la masse immense du talent : seulement cette masse entière s’est déplacée. […] Et à lui-même il lui importe assez peu maintenant de perdre la bataille là où il n’est plus tout entier. […] Lorsque mon âme, en soi tout entière enfoncée, A son être pensant attache sa pensée, Sur cette scène intime où je suis seul acteur, Théâtre en même temps, spectacle et spectateur, Comment puis-je, dis-moi, me contempler moi-même Ou voir en moi le monde et son Auteur suprême ?
Mais ces éloges qui, à les serrer de près, ont leur entière justesse, n’offrent rien qui se grave assez au vif et qui caractérise assez distinctement l’auteur. […] Tandis que les poëtes et les écrivains qui se croient créateurs passent très-vite et meurent tout entiers, s’ils ne sont excellents, le critique accrédité et fidèle vit, c’est-à-dire (oh ! […] Lors même que le feu des premières illusions est passé, lorsqu’on n’épouse plus ardemment une cause et qu’il n’y a plus de cause, la jouissance de la curiosité et de l’expression critique reste tout entière.
Elle était divinement heureuse quand elle avait pu, durant une absence de Mme de Noyon, passer une journée entière avec lui sous prétexte d’aller à la Visitation de Chaillot voir une amie d’enfance, et elle désirait alors avec passion jours et nuits semblables. Elle n’était pas moins heureuse divinement, quand elle l’avait vu une demi-heure de soirée au milieu d’une compagnie qui empêchait toute confidence, et ce bonheur dû au seul regard et à la présence de la personne chérie la possédait tout entière sans qu’elle crût manquer de rien. […] Et, pour continuer sa plainte et la tirer tout entière, il aurait fallu les pleurs d’Orphée.
Eynard, qui se soucie moins que nous de l’intérêt poétique, et qui croit que l’aimable romancier a fini par guérir radicalement de sa chimère, par obtenir en don l’entière vérité. […] Je m’étais imposé une entière réserve sur des faits qui pouvaient humilier un vieillard… » Que l’excellent biographe me permette de l’arrêter ici pour un simple mot : humilier un vieillard ! […] Elle aimait à parler d’amour ; ce mot chéri allait déborder plus que jamais de ses lèvres, et des foules entières affluaient déjà à ses pieds.
Mais, au début du xve siècle, l’ignorance est encore si entière que Jean de Mon-treuil ne peut déchiffrer dans Juvénal et dans Boèce le fameux γνώθι σεαυτόν. […] De là son amour fraternel : elle se donne au roi comme à Dieu, d’une pure ferveur, par un entier sacrifice. […] Demandez-lui son rêve de bonheur : il tient tout entier dans la Facile existence d’un château des bords de Loire.
Si maintenant Corneille a souvent besoin de prendre plus que la formule des doctes n’accorde, s’il n’arrive guère à faire coïncider dans le temps et l’espace l’action réelle et la représentation de l’action, tandis que Racine n’a jamais subi la gêne des règles, la raison principale en est que les passions se manifestent tout entières par des impulsions instantanées, tandis que la volonté se reconnaît surtout à la constance des effets, et il n’y a pas de constance sans une certaine durée. […] Ce qu’on doit retenir du fameux récit pour comprendre la pièce est peu de chose, et la pièce tout entière est le conflit de deux caractères durs, entre lesquels sont tiraillés, écrasés deux caractères faibles. […] Même Polyeucte, le saint, l’extatique, l’illuminé, même Horace, le patriote furieux, même Camille, l’amoureuse fanatique, manifestent surtout la volonté : tous les trois ont cette forme supérieure de l’amour qui est la dévotion, et dans laquelle la raison attribue une perfection, donc une valeur infinie à l’objet aimé, en sorte que la volonté s’applique tout entière et ramasse toutes les énergies de l’âme au service de l’amour.