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819. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Elle prit une voie contraire: car, étant bien assurée qu’il n’y avait point de lieu dans l’empire de Perse où le roi ne la découvrît, elle alla s’enfermer trois jours durant dans la forteresse de Tiflis: ce qui était proprement se livrer à la merci de celui qui la voulait avoir ; elle se fit voir tout ce temps-là aux femmes du commandant ; et, l’ayant mandé ensuite à son appartement, elle lui fit dire que, sur la foi de ses femmes qui l’avaient vue, il pouvait écrire au roi qu’elle n’était pas d’une beauté à se faire désirer ; qu’elle était âgée, et même un peu contrefaite ; qu’elle conjurait Sa Majesté de lui laisser achever ses jours dans son pays. […] VIII Chardin arrive à Tauris, ville la plus commerçante de l’empire ; il y passe quelques jours, au couvent des capucins. […] Chardin raconte avec la même naïveté et la même grandeur les autres somptuosités de l’empire. […] Les traites du roi ne sont jamais plus longues que cela, et il trouve à chacune une maison qui lui appartient, dans toutes les provinces de son empire.

820. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Un air d’empire et d’autorité qui, même sous le masque, le faisait reconnaître entre ses courtisans les mieux faits185 ; un visage qui remplissait la curiosité des peuples 186 ; une majesté qui n’avait rien de farouche ; un abord charmant ; un air grand et auguste qui tout seul annonçait le souverain187; un roi, tel que les poètes nous représentent ces hommes qu’ils ont divinisés188 ; que sa taille, son port, sa beauté et sa grande mine, et jusqu’au son de sa voix, l’adresse et la grâce naturelle et majestueuse de sa personne, faisaient distinguer jusqu’à sa mort comme le roi des abeilles189 ; c’est ainsi que tous les yeux voyaient la personne de Louis XIV. […] C’est, pour la comédie, qu’à ce moment unique la société française réunissait tous les grands traits de toute société civilisée, tous les rapports des caractères, toutes les diversités des esprits, toutes les physionomies : c’est, pour la tragédie, que le personnage héroïque qui lui servait d’idéal réunissait les principaux traits des hommes à qui Dieu a donné l’empire sur les autres. […] Le jeune homme est simple, parce que chez lui la raison laisse l’empire à l’imagination et à la passion ; et comme il n’y a pas encore de lutte, il n’est pas averti qu’il y a deux combattants. […] En même temps que, par un devoir particulier de sa charge, Bossuet se faisait historien, le spectacle de tous les actes du gouvernement de Louis XIV lui apprenait, avec la langue de la politique, le secret de ces ressorts des empires dont la connaissance fait le grand historien.

821. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

Le vieil Hertfort, le prisonnier de l’Empire, lit, sous Louis-Philippe, La Fille aux yeux d’or, croit reconnaître, dans le type qui a servi à Balzac, une fille qui avait passé dans ses orgies, en un des endroits, où il avait été interné, et demande à Jules Lacroix de le faire dîner avec l’auteur, à la Maison d’Or, où il l’invite. […] Mardi 30 avril Le goût de l’Empire s’impose à tout, aux chaises même de jardin, de la Ménagère. […] Mercredi 22 mai Voici des mots de cette grosse Mme Aubernon, qui semblent vraiment originaires du xviiie  siècle : « Ce qui fait la quiétude de ma vie… c’est d’avoir aboli le souvenir. » « Oui, je regrette souvent ma mère… mais très peu à la fois. » Samedi 25 mai Exposition de la Révolution et de l’Empire. […] Et voici dans « la Famille Pajou » les types, et la mode presque rustique, de la bourgeoisie jeune et vieille de la fin de l’Empire.

822. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par M. Paul De Saint-Victor. »

Son père, dans sa jeunesse, était un des plus agréables poëtes du premier Empire et des mieux promettants.

823. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Pensées »

Contrée, empire, ou individu, ou monde, chacun a eu son jour ; et que ce jour ait eu des milliers d’années, ou des milliers de jours, ou des milliers de minutes, il est passé sans retour, et une fois passé, ce n’est plus qu’un point bientôt imperceptible dans la durée infinie.

824. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alexandre Dumas. Mademoiselle de Belle-Isle. »

Sous la Restauration, l’idéal, c’est-à-dire ce qu’on n’avait pas, se reportait à la gloire de l’Empire et aux luttes de la Révolution ; depuis 1830, c’est-à-dire depuis que nous sommes devenus vainqueurs et glorieux apparemment, notre idéal se repose et semble être aux délices de Capoue, à ce bon xviiie  siècle d’avant la Révolution, que, dès Louis XIV jusqu’après Pompadour, nous confondons volontiers sous le nom de Régence.

825. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

Coordonner en un mot la littérature avec tout l’ensemble des institutions de l’empire, et faire que cette seule chose ne reste pas livrée au pur hasard, voilà le point précis.

826. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rostand, Edmond (1868-1918) »

Cela même eût mieux valu : l’auteur n’eut pas été tenté de défigurer, en un médiocre récit, l’étonnante Histoire comique des États et Empires de la Lune, et n’eût pas commis les interminables plaisanteries sur le nez de son héros.

827. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « F.-A. Cazals » pp. 150-164

» Et il y a dans cette parole du dernier boulevardier, du dernier viveur du troisième Empire, du chroniqueur sceptique, une note imprévue qui attendrit.

828. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

Il me semble qu’il est le premier qui ait mis en vers les préceptes de la raison, en matière de goût et de littérature ; mais La Fontaine a mis en vers les préceptes de la raison universelle, comme Molière y a mis ceux qui sont relatifs à la société ; et ces deux empires sont plus étendus que ceux du goût et de la littérature.

829. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre III. Mme Sophie Gay »

IV Les Œuvres complètes de Mme Sophie Gay ne se composent pas moins, en effet, que de quatorze à quinze volumes, quelques-uns très compacts, comme un Mariage sous l’Empire et les Malheurs d’un amant heureux.

830. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet »

Même plus tard, quand les faits s’affermissent et se clarifient dans son récit, et prennent de ces certitudes qu’il n’est plus permis de discuter ; même au moment de ces merveilleux succès des Jésuites qui firent croire un jour à l’imagination européenne que la croix conquerrait l’Empire du Milieu, on s’enivrait trop d’une religieuse espérance… car trente-six mille chrétiens, au plus, sur trois cents millions d’âmes, n’étaient qu’une faible étincelle du feu qu’on croyait avoir allumé !

831. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Charles Monselet »

Excepté cela et l’analyse de Trialph, qui est Lassailly encore, ces Portraits après décès, où se rencontrent des fronts douloureux et presque égarés comme ceux de Gérard de Nerval et de Jean Journet, manquent de plaisanterie… Et si, comme en certains qui touchent à la caricature exquise, comme celui de M. de Jouy, — un petit chef-d’œuvre, — la bouche qui a tant aimé à rire s’y reprend encore, elle s’y reprend en deux fois, et je sens dans ce rire brisé, comme la corde d’un arc rompue, le commencement de l’amertume qui pourrait bien être le commencement de la sagesse… La caractéristique du talent de M. de Jouy par le carrick de l’Empire, ce carrick qui reparaît tous les cinquante ans, taillé d’une autre façon, mais absolument sur le dos du même homme, cette fatale et éternelle perruque qu’a tout front et qui fait, hélas !

832. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jacques Demogeot » pp. 273-285

Quel empire sur soi !

833. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Sismondi, Bonstetten, Mme de Staël et Mme de Souza »

Ces billets, écrits par la convenance et comme n’importe qui pourrait les écrire, sont aussi adressés à Madame d’Albany, que Madame de Staël appelle « ma reine », cette femme passée du dernier Stuart au poète Alfieri, et qui était allée assez peu royalement avec ce fier républicain demander une pension au gouvernement qui avait chassé les Stuarts d’Angleterre… Quoique écrits en 1815 et en 1817, sous l’empire d’événements publics qui auraient pu faire jeter de magnifiques flammes à ces deux volcans, le cœur et l’esprit de Corinne, je défie qu’on trouve en ces billets un mot qui dise tout bas, si on n’en voyait pas la signature, que ceci fut écrit un jour par Madame de Staël.

834. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IV. Saisset »

Doit-elle définitivement céder la place, l’influence et l’empire au catholicisme, qui nous ramènera au moyen âge, ou au panthéisme, qui nous amènera un âge comme l’histoire n’en a pas encore vu ?

835. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXII. Philosophie politique »

« Personne ne croit, nous dit M. de Beauverger dans sa préface, que la politique spéculative n’ait pas d’influence sur la destinée des empires et qu’il n’y ait pas d’enseignement à retirer de ses travaux. » Personne ne le croit, en effet ; seulement il s’agit de savoir quelle fut cette influence, si elle était nécessaire, si elle a été bonne ou funeste et si tous ses travaux valaient plus ou moins, de la part des esprits qui dominent ces sujets, que les deux lignes de résumé qui pouvaient être l’ouvrage de M. de Beauverger et qui, malheureusement, ne le sont pas.

836. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Chastel, Doisy, Mézières »

Encore une fois, tel fut alors le mérite de l’Académie, et nous voulons le reconnaître, car il y a un autre mérite que nous lui aurions souhaité et qui lui manqua… Après cet éclair de bon sens, rare à l’époque où il brilla, et qui lui fit mettre au concours une question historique dont elle discernait très bien la portée, elle retomba bientôt sous la paralysie des préjugés ambiants et l’empire de cette philosophie dont elle repoussait les dernières conséquences, il est vrai, mais dont elle acceptait les premières, comme si la roue de l’inflexible logique, une fois en branle, s’arrêtait !

837. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gérard de Nerval  »

Ses amis de ce temps-là, devenus maintenant ce que Balzac, qui agrandissait tout, appelait des maréchaux littéraires, se sont souvenus et ont parlé de lui comme de vieux maréchaux de l’Empire auraient pu parler du jeune Marceau, quoiqu’il ne fût, ni par le mérite ni par la jeunesse, un Marceau littéraire quand il mourut.

838. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Il subit l’empire du Dieu. […] Un seul empire là-haut, un monarque de l’univers qui réside dans le ciel ; un seul empire d’institution divine ici-bas, le saint Empire romain, gouverné par l’empereur, qui représente Dieu dans les choses temporelles, et par le saint pontife, qui représente Dieu dans les choses spirituelles, l’un inattaquable dans sa souveraineté politique, l’autre inviolable dans son Église, tous deux entièrement distincts dans leurs attributions, tel était, selon l’Allighieri, et selon l’opinion la plus répandue de son temps, l’ordre éternel et parfait. […] avec son empire céleste et son empire terrestre, son césar et son pontife, Dante n’en garde pas moins pour idéal suprême la liberté. […] Il entend de sa bouche un récit grandiose, fait à la façon de Bossuet, des vicissitudes de l’empire, d’Énée à César, de César à Charlemagne, et de Charlemagne aux temps du poëte. […] Saint Dominique visait à l’empire des consciences par un dogmatisme absolu et par une logique implacable.

839. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Un des secrets de cette énigme ne résiderait-il pas en ceci que ces mœurs ont été pensées par leurs causes, et que ces causes continuent d’exercer leur empire sur la France de 1926 ? […] C’est le cas, plus près de nous, des livres d’Octave Feuillet, si précieux pour l’intelligence des mœurs aristocratiques et bourgeoises du second Empire. — Troisième groupe : les quelques romans qui gardent toute leur actualité à travers les générations, et comme je disais, une actualité agissante. […] Pour Paul de Saint-Victor, cette éducation classique avait été reçue à Rome même, sous la direction de son père, un poète délicat du premier Empire, connu par une traduction d’Anacréon. […] Ainsi s’explique, devant la sécheresse de la littérature classique à son déclin, le dégoût éprouvé par les jeunes gens, nés et grandis pendant la Révolution et sous l’Empire. […] Nous sourions aujourd’hui de lire en sous-titre aux Rougon-Macquart : Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le second Empire.

840. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

. — Et dans le même chant, cette comparaison encore (car les comparaisons ici se succèdent et ne tarissent pas) de la jeune Écossaise, vaguement apparue au chasseur dans la nuée, au sein de l’arc-en-ciel, avec la belle forme vaporeuse de l’ange ténébreux aperçu de loin d’abord par Éloa ; — et au chant III, cette dernière image enfin, cette description si large et si fière de l’aigle blessé qui tente un moment de surmonter sa douleur, et qui ressemble plus ou moins au même archange infernal avec sa plaie immortelle : Sur la neige des monts, couronne des hameaux, L’Espagnol a blessé l’aigle des Asturies, Dont le vol menaçait ses blanches bergeries, Hérissé, l’oiseau part et fait pleuvoir le sang, Monte aussi vite au ciel que l’éclair en descend, Regarde son soleil, d’un bec ouvert l’aspire, Croit reprendre la vie au flamboyant empire ; Dans un fluide d’or il nage puissamment. […] Or M. de Vigny, ayant réfléchi à quelques-unes des objections qu’on lui avait faites devant la Commission sur certains faits graves imputés par lui au premier Empire, avait, tout bien considéré, supprimé au dernier moment une des phrases qu’il devait lire ; il n’en avait point fait part à M.  […] Les Destinées, moyennant détour, ressaisissent donc leur empire, et il reste douteux que, même sous la loi de grâce, l’homme soit plus libre et plus maître de soi qu’auparavant : Oh !

841. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Si, de 1800 à 1813, il domina de sa renommée et décora de ses œuvres abondantes la poésie dite de l’Empire, il ne fut rien moins lui-même qu’un poète de l’Empire. […] Peut-être sa gouvernante, qui avait pris sur lui un empire absolu, espérait-elle, en le retenant à Paris, se faire dès lors épouser.

842. (1929) Dialogues critiques

Sous le Second Empire, la vie fut dure pour les journalistes et les gens qui faisaient de l’opposition. […] Les sujets annexés à un Empire peuvent être esclaves. […] Ce qu’ils veulent conserver et ce qu’ils voudraient consolider dans une Alsace-Lorraine autonome, c’est ce qui existait sous le Second Empire français et ce que l’Allemagne avait maintenu par conservatisme politique : à savoir ce qu’on appelle en termes vulgaires le gouvernement des curés.

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