La mère du surintendant, et qui lui survécut peu, Mme Fouquet, — une vraie mère de douleurs, — avait la réputation d’une sainte, et toute sa vie s’était passée au service des pauvres : elle inspirait la vénération autour d’elle. […] La douleur du maréchal fut profonde : il perdait son bras droit, son conseil et une moitié de lui-même. […] Il a été pleuré à l’armée des ennemis comme dans la noire. » Dans le premier moment, un sentiment de regret unanime s’associa comme une trop faible consolation et un bien juste hommage à l’immense douleur du maréchal de Belle-Isle ; mais la malignité qui se glisse partout, et qui est si prompte à se venger d’un premier mouvement de sympathie, trouva bientôt mauvais qu’il n’eût point résigné le ministère tout aussitôt après la mort de son fils.
Arraché par le bruit des armes étrangères au silence des bois, aux ombrages profonds du Taygète et de l’Hémus, sous lesquels s’égarait son imagination riante et sensible, il eut un cri sublime de douleur auquel la France entière répondit comme un seul écho. […] Le premier jour se lève, et l’on n’aperçoit rien encore ; Colomb a le cœur qui bat, et ici le poëte décrit en vers élégants ce cœur Qui s’élève, et retombe, et languit dans l’attente, Ce cœur qui, tour à tour brûlant ou sans chaleur, Se gonfle de plaisir, se brise de douleur, etc. […] S’il n’a pas retrouvé dans ses publications lyriques d’une date postérieure la même veine et le même jet, c’est aussi que ce moment de 1819 était unique pour célébrer cette simple douleur patriotique de la défaite, et qu’à moins d’entrer au vif dans la chanson antidynastique avec Béranger, à moins d’oser la satire personnelle avec les auteurs de la Villéliade, on n’avait à exprimer, dans le sentiment libéral, que des thèmes généraux plus spécieux que féconds.
Comment, dans une suite de phénomènes, pourrais-je dire que ces phénomènes sont miens, que ma douleur est mienne, que ma passion est mienne, que mon plaisir est mien, si je n’étais pas intérieurement présent à chacun de ces phénomènes, à cette douleur, à cette passion, à ce plaisir ? […] Cette appréhension impatiente et avide du futur, si souvent signalée par les moralistes, devient une fatigue quand on en prend conscience ; de là, il résulte que la vie est douce dans la jeunesse, malgré toutes les douleurs, parce que, la force de vivre étant toute fraîche, la vie ne coûte aucun effort, tandis qu’elle devient lourde au contraire, même au sein du bonheur, à mesure que l’on avance en âge, par la conscience accumulée de la fatigue passée et la prévision certaine de la fatigue future.
J’en appelle à vous tous, qui l’avez déterré solitairement, depuis ces trente années, dans la poussière où il gisait, qui l’avez conquis comme votre bien, qui l’avez souvent visité comme une source, à vous seuls connue, où vous vous abreuviez de vos propres douleurs, hommes sensibles et enthousiastes, ou méconnus et ulcérés ! […] Voyons, poëte, si tu comprends encore la douleur ; voyons, jeune homme, si tu crois encore à l’amour. » Eh quoi !
Le thème du roman, c’est, au fond, l’immense douleur de vieillir. […] M. de Maupassant, plusieurs fois de suite, a accompli avec sérénité ce tour de force de marquer, dans chacun des innombrables incidents de la journée la plus unie, les progrès lents de la passion et de la douleur dévoratrices au cœur d’Olivier et d’Anne.
Ce livre est, selon moi, le livre supérieur de l’ouvrage, et comme j’en suis pour le moment à faire des découvertes dans les facultés de Masson, j’ai été particulièrement frappé par la puissance avec laquelle il a analysé ce fait, cruel et mortel aux races, de la mésalliance, — de ce sac à hontes et à douleurs de la mésalliance qu’il nous pointille toutes et nous trie sous les yeux, sans nous faire grâce d’une seule de ces hontes et de ces douleurs !
On sent, il est vrai, dans cette obscurité, l’étouffement d’une douleur, mais d’une douleur discrète et pour laquelle l’inconsciente a retrouvé la lucide conscience de ce qu’elle tait.
ce n’est que de la douleur ! […] L’homme est exposé à l’infortune et à la douleur ; le philosophe apprend à l’homme à souffrir. […] Exemples, inutilité de la douleur. […] « La douleur des animaux est violente et courte… » Est-ce une raison pour blâmer la douleur profonde et durable de l’homme ? […] La douleur, quand elle parle, a le ton faible et plaintif ; celui de la colère est véhément.
Charles Fuster Son livre abonde en passion, en couleur intense, en cris de volupté ou de douleur.
Charles Fuster C’est toute la vie d’une âme, d’une âme de poète assoiffée d’idéal, débordant de tendresse ; — ce sont ses aspirations, ses rêves, ses douleurs.
Gustave Téry n’est, d’un bout à l’autre, qu’une litanie d’amour mystique et de douleur.
Ils n’ont rien de « fin de siècle », mais ils ont ce qui est éternel, la poésie, la douleur et la foi.
Mais, pour partir d’une cause semblable, la douleur mâle et silencieuse d’Hermann n’aura rien de commun dans ses effets avec la douleur chagrine et perpétuellement plaintive de Werther. […] Mais sous cette froideur, que de douleurs vraies ! […] Le vulgaire laisse le temps user la douleur. […] Que de noms je citerais, si je ne craignais de réveiller des douleurs encore trop récentes ! […] — Je sais, mon père, que c’est pour toi une grande douleur.
Ta voix consolatrice enchanta ma douleur. […] Comme fonds commun la douleur, parce qu’en effet la douleur est la matière même dont est faite la vie de l’humanité ; mais dans le premier cas la douleur physique subie sans qu’elle soit comprise par l’être déchu ; dans l’autre la douleur morale, plus intense, mais gage de résurrection, résurrection et récompense déjà, parce qu’elle est comprise comme épreuve, savourée comme exercice de notre liberté, et embrassée comme une gloire de notre espèce. […] — C’en est un, affreux, mais sensible, que de jouir de sa douleur même. […] Pourquoi sur votre front tant de douleur empreinte ? […] Douleurs, douleurs, douleurs, fermez vos yeux sacrés !
Au centre, sur le devant, une jeune fille assise sur une chaise, toute rajustée, dans la douleur, retenant d’une main son enfant, qu’on lui enlève, et serrant de l’autre la main du père. […] -l’accouchée est bien ajustée. — Trop bien ; est-ce qu’il ne devrait pas y avoir dans sa coëffure, dans le désordre de ses cheveux et de son vêtement, des vestiges de la scène qui a précédé. — Il y a de la douleur dans sa tête, et les bras en sont bien dessinés. — Mais ses pieds ne sont-ils pas trop petits et décolorés par la vigueur du coussin qui les supporte ?
Je n’en veux pour preuve que cette série de courtes élégies intitulées : Sur une tombe… Ce sont de purs, d’harmonieux sanglots, et l’accent de cette douleur est doux et profond comme une prière.
Eugène Ledrain Louis Fréchette, né au Canada, n’est pas un poète ordinaire, chantant ses impressions fugitives, ses joies et ses douleurs particulières.
Pigeon a dit toutes les grandes douleurs des petites âmes, nous apparaît comme un « document » unique sur une certaine crise d’adolescence.
Il étoit neveu de ce du Perrier à qui Malherbe adresse les belles Stances qui commencent ainsi : Ta douleur, du Perrier, sera donc éternelle, &c.
Il ne laissa jamais de prise sur lui aux douleurs violentes ou éternelles ; il voulait conserver à tout prix le calme olympien de son intelligence. […] Ce dithyrambe, réfléchi et vociféré tout à la fois sur l’instrument aérien qui sonne à la fois les prières, les douleurs, les glas funèbres, les naissances, les effrois de l’homme, est digne de rester dans la mémoire de la postérité. […] ” Afin de ne pas lui faire de mal, je cherchai à surmonter ma douleur. […] C’est ce qui fait que, dans les ouvrages en marbre ou en vers qui nous restent de l’antiquité, la statue ou le personnage dramatique reste toujours beau, même sous les tortures de la douleur physique ou de la douleur morale. […] Conserver la beauté dans la douleur, ne dégrader jamais l’homme intellectuel par le déchirement de ses sensations, montrer toujours l’intelligence impassible survivant au cœur torturé, voilà le comble de l’art antique, voilà la loi du beau ; c’est cette loi du beau dans l’art que quelques grands artistes de notre époque ont voulu nier et renverser en cherchant l’expression dans la seule vérité imitative, en peignant le laid avec autant de recherche que le beau, et en inventant ce paradoxe artistique et littéraire qu’ils ont appelé l’art pour l’art !
Les plus touchantes catastrophes de l’histoire : le meurtre de César, le supplice de Charles Ier, le cachot du Temple, la mort si calme de Louis XVI, priant pour son peuple égaré ; aucune de ces scènes a-t-elle jamais retenti plus profondément dans votre cœur que la chute d’une larme secrète d’une pauvre âme inconnue qui dit à Dieu ses douleurs intimes, sans dire au monde son nom ? […] « Voilà, mon ami, mes soirées et leurs agréments ; ajoute le sommeil, qui n’est pas le moindre. » Quelle mélancolie dans ce dernier mot d’appel au sommeil, qui comble tous les vides et qui calme toutes les douleurs ! […] Le coup l’a étourdie, la pauvre bête est venue à nous au plus vite nous porter ses douleurs. […] Je ne me souviens pas qu’il lui soit échappé une plainte, qu’elle ait crié tant soit peu sous la douleur qui la déchirait : nulle chrétienne n’a mieux souffert. […] Allons encore quelques pas dans cette belle vie, et voyons-la finir comme elle a commencé : dans la douce candeur de la douleur confiante, comme dans la naïve joie de la fleur qui vient d’éclore pour jouir, aimer, souffrir, et embaumer ce qui la foule aux pieds sans la cueillir et sans la voir.
Il me serait très malaisé, je dirai même impossible, de dépeindre quelle sincère douleur produisit sur Cacault cette résolution. […] Il ne pouvait se consoler en réfléchissant qu’une rupture qui aurait de si funestes suites allait éclater, parce qu’on n’avait pu s’entendre réciproquement, et il manifestait une très amère douleur en voyant sacrifier des hommes qui n’affichaient aucune mauvaise intention, — ce sont ses propres termes, — et qui n’agissaient que contraints par leurs propres devoirs. […] J’éprouvais les angoisses de la mort, je voyais se dresser devant moi tout ce qu’on m’annonçait : j’étais (il est permis de l’avouer) comme l’Homme des douleurs. […] Je ne dois pas raconter la douleur du Pape et la mienne à cette séparation. […] Sa mauvaise santé ne lui avait pas permis d’aller au mariage civil ; il s’efforça, malgré ses douleurs, de se rendre à la chapelle, et il assista à la solennité.
Mais sa douleur et son effroi contrastent si bizarement avec la tranquillité des vieillards que si le sujet n’étoit pas connu on auroit peine à le deviner. […] Je sentois toutes ces choses, et j’en étois transporté, lorsque m’étant un peu éloigné du tableau, je poussai un cri de douleur, comme si j’avois été blessé d’un coup violent. […] Son expression est mêlée de douleur et d’indignation. […] Debout, derrière Caesar et ce chevalier, tout à fait à droite, un vieux chef de légion regarde le même objet avec une attention, et une surprise mêlée de douleur. […] Quelle douleur, que celle de cette Dauphine !
Ô douleur ! […] Le prince de Ligne déroba sa douleur de guerrier sous le sourire de l’homme du monde et sous l’indifférence du philosophe. […] C’est le prince de Ligne qui a écrit cette belle pensée : L’incrédulité est si bien un air que, si on en avait de bonne foi, je ne sais pas pourquoi on ne se tuerait pas à la première douleur du corps ou de l’esprit.