N’y a-t-il pas de l’injustice à chercher à obscurcir la gloire des Hommes de génie, en relevant avec affectation & avec amertume, de légeres imperfections, presque inévitables dans le genre tragique, celui de tous qui offre le plus à une critique même raisonnable ?
Il est moins connu par son Histoire Romaine, son Histoire des Indes, celle des Amazones, celle des Empires, & son Essai critique sur celui d’Occident, que par l’Oracle des nouveaux Philosophes.
La Critique du Philosophe n’a ainsi servi qu’à faire sentir la supériorité du Génie, qu’il vouloit ravaler.
Il s’étoit attendu à des critiques du moins spécieuses, & on n’a publié contre lui que des Libelles, où l’invective, le sarcasme, l’injure, & les traits de mauvaise foi, tiennent la place des raisons.
Peut-être a-t-on eu raison de lui reprocher trop de penchant à la critique, trop d'affectation à combattre certaines traditions accréditées par la multitude & le poids des témoignages, trop de facilité à tourner les textes à l'appui de ses idées, trop de complaisance dans les tableaux qu'il trace des abus qui lui déplaisent, trop d'amertume dans les censures ; mais en convenant de quelques-uns de ces défauts, il n'en est pas moins vrai, que si une plus longue carriere lui eût permis d'exécuter l'Ouvrage en entier, il auroit eu la gloire de nous avoir laissé une Histoire aussi estimable par la recherche des faits, leur ordonnance & leur variété, que par le mérite du style, qui est simple, aisé, naturel, & piquant, sans jamais s'éloigner de l'élégance & de la pureté, qui sont le partage d'un excellent Ecrivain.
Gaston Paris me permettra de citer ici quelques lignes de son écriture, car elles sont une critique et elles disent ma pensée même, depuis que je les ai lues : « Sur quelques points (comme ce qui regarde l’orthographe) je ne serais pas tout à fait d’accord avec vous, et en thèse générale je ne sais si dans l’évolution linguistique on peut faire autre chose qu’observer les faits ; mais après tout dans cette évolution même toute volonté est une force et la vôtre est dirigée dans le bon sens. » Ma pensée c’est cela même, c’est que je ne suis qu’une force, aussi petite que l’on voudra, qui voudrait se dresser contre la coalition des mauvaises forces destructives d’une beauté séculaire.
La critique serait suspecte de rivalité, l’éloge paraîtrait une adulation aux deux plus grandes puissances que nous reconnaissons sur la terre, le génie et le malheur.
La critique peut éclairer, les lecteurs. […] La critique anecdotique, par complaisance — dirais-je démocratique ? […] Et de même un critique renseigné, M. […] Mauclair en conclut à une nécessaire Critique des Identités, le contraire exactement de la critique au sens pur du mot. […] Mais une de ses conséquences serait d’ouvrir à la critique une perspective neuve.
Il expose ses raisons en judicieux critique et en bon académicien. […] Il ne regrette point le ministère aux conditions où il l’a laissé, et il résume lui-même sa situation politique par un de ces mots décisifs qui sont à la fois un jugement très vrai, et un aveu honorable pour celui qui les prononce : « Je sens avec vous combien il est heureux pour moi de n’être plus en place ; je n’ai pas la capacité nécessaire pour tout rétablir, et je serais trop sensible aux malheurs de mon pays. » Et il essaye de se consoler de son mieux, de se recomposer, dans cette oisiveté, quoi qu’il en dise, un peu languissante, un idéal de vie philosophique et suffisamment heureuse : « La lecture, des réflexions sur le passé et sur l’avenir, un oubli volontaire du présent, des promenades, un peu de conversation, une vie frugale : voilà tout ce qui entre dans le plan de ma vie ; vos lettres en feront l’agrément. » Ce dernier point n’est pas de pure politesse : on ne peut mieux sentir que Bernis tout l’esprit et la supériorité de Voltaire là où il fait bien : « Écrivez-moi de temps en temps ; une lettre de vous embellit toute la journée, et je connais le prix d’un jour. » La manière dont Voltaire reçoit ses critiques littéraires et en tient compte enlève son applaudissement : « Vous avez tous les caractères d’un homme supérieur : vous faites bien, vous faites vite, et vous êtes docile. » Bernis n’a pas, en littérature, le goût si timide et si amolli qu’on le croirait d’après ses vers. […] Il lui fait d’abord quelques critiques sur sa tragédie des Scythes.
Quand, vers le milieu du xviiie siècle, Marmontel ou Le Brun (le poète), ou tout autre jeune littérateur pauvre, voulait créer quelque petite feuille de littérature et de critique, il ne le pouvait qu’en contrebande, faute d’avoir de quoi payer 300 francs au Journal des savants : c’était un tribut qui était dû à ce père et seigneur suzerain des journaux littéraires. […] Le journal L’Illustration du 14 novembre 1846 a fait de cette édition une critique sévère et qui est encore trop indulgente. […] [NdA] On lit dans les Mémoires historiques et critiques de Mézeray, à l’article Avocat : « Jean Patin, avocat du roi au présidial de Beauvais, pensa être assommé par la populace ligueuse.
Cependant je n’ai point suivi son plan ; j’ai encore moins adopté ses vues. » Il se flattait d’avoir apporté dans son travail plus de critique et de justesse. […] Celle qu’obtint d’abord le Louis XI de Duclos fut grande : « Le livre a été lu de tout le monde avec avidité, surtout des dames, dont il a mérité l’approbation » ; c’est ce qu’écrivait l’abbé Desfontaines, assez favorable d’ailleurs à l’ouvrage58 : ce critique nous fait remarquer que des dames illustres et aimables s’intéressaient même au débit matériel et en plaçaient des exemplaires. […] Il passe aussitôt à la critique.
Moreau, de la bibliothèque Mazarine, apportant sur ce sujet une critique exacte et bienveillante, a depuis considéré Saint-Martin dans le fond même et le principe de ses doctrines, et s’est attaché à montrer comment il avait servi la vérité à son heure, et en quoi aussi il y avait manqué, en quoi c’était un chrétien peu orthodoxe, un hérésiarque qui en rappelle quelques-uns du temps d’Origène46. […] Saint-Martin y apporta un zèle pur et candide, aucun esprit de critique, la docilité de l’agneau ; il ne douta point de la réalité des opérations plus ou moins magnétiques dont il fut témoin. […] Tout en admettant sans contrôle et sans critique le merveilleux qui faisait le fond et l’attrait de ce genre d’opérations, Saint-Martin, plus tourné au moral, ne se livrait pas sans réserve à des procédés où la curiosité s’irritait sans cesse et où le cœur profitait si peu ; et lorsqu’en 1792, à Strasbourg, il lui fut donné auprès d’une amie, Mme Boechlin, de connaître les ouvrages allemands de Jacob Boehm, qu’il appelle le Prince des philosophes divins, il crut pouvoir renoncer absolument à toute cette physique périlleuse et pleine de pièges, pour ne plus cultiver que la méditation intérieure.
L’éminent critique crut devoir défendre de tout point l’aperçu de Boileau et l’appuya par des raisons réfléchies : il voyait dans Villon un novateur, mais utile et salutaire, un de ces écrivains qui rompent en visière aux écoles artificielles, et qui parlent avec génie le français du peuple ; contrairement à l’opinion qui lui préférait l’élégant et poli Charles d’Orléans, il rattachait à l’écolier de Paris le progrès le plus sensible qu’eût fait la poésie française depuis le Roman de la rose. […] La page de critique conjecturale où il se répand à ce sujet, et où il se laisse aller à quelques regrets sur son auteur favori, est trop heureuse de développement et d’une trop bonne venue pour que nous en privions le lecteur : On ne peut, nous fait-il remarquer, afficher plus de mépris pour la campagne que n’en montre Villon dans cette pièce. […] Trêve maintenant à toutes ces discussions critiques !
. — Critique dramatique. — Romans : Le Capitaine Fracasse 47. […] Gautier critique, Gautier auteur des charmants feuilletons qu’on lit chaque jour, a fait tort à Gautier poète. […] Bonnes gens, je vous arrête, vous êtes devancés ; la critique est faite, elle l’est de main de maître : et par qui ?
Il y écrivit une foule de vers politiques et d’articles critiques qui n’ont jamais été reproduits et qu’il est difficile aujourd’hui de reconnaître sous les initiales diverses et les noms empruntés dont les signait l’auteur. […] Je ne puis résister à en donner quelques phrases ; le critique vient de faire une citation : « À de pareils vers, dit-il, qui ne s’écrierait avec La Harpe : Entendez-vous le chant du poëte ? […] Les nombreux articles de critique dans lesquels il juge les ouvrages et drames nouveaux respirent une conscience profonde, et accusent un retour pénétrant sur lui-même, un souci comme effaré de l’avenir.
Il les touche de biais, il s’y glisse comme obliquement, et les idées les plus fécondes de sa critique éclatent comme des saillies au milieu d’un discours dont l’idée générale est peu intéressante. […] Et nous sommes ramenés toujours au même point : ce qu’il y a de poésie dans sa critique a la même origine que le réalisme de sa poésie descriptive. […] Boileau de la Grande Encyclopédie ; l’Esthétique de Boileau, dans la Revue des Deux Mondes du 1er juin 1889 (article destiné à servir de préface à l’édition de luxe des Poésies de Boileau publiée par la librairie Hachette) ; Histoire de l’évolution de la critique, chap.
Il chicane les formules absolues des critiques érudits, qui concèdent vingt-quatre heures, et en refusent trente, qui reconnaissent l’unité d’un palais, plutôt que l’unité d’une ville. […] Il en cherche l’illusion plutôt que la réalité, avec une minutieuse patience, dans le dépouillement des textes, dans la collection des petits faits et des noms locaux ; et cela lui a réussi, puisqu’il a trompé jusqu’aux critiques. […] Il ne faut pas non plus s’arrêter trop à ces reproches contradictoires de déclamation et de trivialité que des critiques ont adressés à son style, non plus qu’à celui d’incorrection ou d’impropriété que Voltaire ne lui a pas ménagé.
Mais sous cette oppression s’éveille le désir de la liberté ; des abus de pouvoir provoquent le mécontentement ; et ce sont d’abord des attaques sourdes, des railleries légères ; l’ironie, l’arme des faibles, est tournée contre les prêtres, les moines, les prélats ; puis les attaques se font plus vives, plus hardies, plus franches ; de la satire contre les personnes et la discipliné ecclésiastique, on passe à la critique du dogme ; on vise ainsi la religion au cœur. […] Critiques sévères, ils déclarent qu’il faut viser au cœur, non à l’esprit ; ils blâment ces gens qui auraient laissé déborder le torrent des vices et périr le christianisme sans s’échauffer, de peur qu’un mot bas ou familier ne vînt à leur échapper ou que la symétrie de leurs périodes ne fût rompue. […] Le critique Schérer en fut un exemple frappant.
Les critiques, ses émules, dressent la liste des « machines poétiques », dont l’emploi est dûment autorisé. […] Les poètes ont sauté par-dessus les barrières qu’avaient élevées les critiques d’autrefois. […] La critique de l’École des femmes.
Musc et ail, concetti et lazzi, drogues et dragées, épices et fadeurs, une casserole de parfums, une sauce aux mille fleurs… Maintenant, toute part faite à la critique, et nous l’aurions voulue moins entière, il serait injuste de ne pas reconnaître, dans la comédie de M. […] La toile tombe, et l’acte est charmant malgré toutes nos critiques ; il amuse, il intéresse, il a la beauté du diable et la gaieté de la jeunesse, et, si la suite tenait tout ce qu’il promet, nous aurions là, à coup sur, une très piquante et très agréable comédie. […] Il me semble qu’après tant de critiques et de contestations, vous pourrez nous croire lorsque nous vous répéterons que cette comédie mal faite est née viable, malgré tout, et qu’elle contient des scènes charmantes, d’heureux détails et des fusées de saillies qui étincellent aux oreilles.
On pourrait continuer cette manière de critique sur la plupart des pièces, et je ne fais qu’indiquer la voie. […] Son filet de voix est continu, intarissable et agréable autant qu’une voix aussi fluette et aussi fêlée peut l’être ; et, comme le dit de lui le poète Barbier, « il a de la parlotte en critique ». M. de Pontmartin peut croire que j’aime quelquefois à monter à l’assaut, et il se pourrait bien que, sous mon air de prudence en critique, j’y fusse monté plus souvent que lui.
Cet Asmodée eut un succès fou ; on ne lui donnait pas seulement le temps de s’habiller, disent les critiques d’alors ; on venait en poste l’enlever en brochure. […] Que dire de Gil Blas qui n’ait pas déjà été dit, que n’aient pas senti et exprimé tant de panégyristes ingénieux, de critiques délicats et fins, et que tout lecteur judicieux n’ait pas pensé de lui-même ? […] Le juge le plus compétent en pareille matière, Walter Scott, a très bien caractérisé l’espèce de critique vive, facile, spirituelle, indulgente encore et bienveillante, qui est celle de Gil Blas : « Cet ouvrage, dit-il, laisse le lecteur content de lui-même et du genre humain. » Certes, voilà un résultat qui semblait difficile à obtenir de la part d’un satirique qui ne prétend pas embellir l’humanité ; mais Lesage ne veut pas non plus la calomnier ni l’enlaidir ; il se contente de la montrer telle qu’elle est, et toujours avec un air naturel et un tour divertissant.
Voltaire n’est ni un poëte lyrique, ni un poëte comique, ni un poëte tragique ; il est le critique indigné et attendri du vieux monde ; il est le réformateur clément des mœurs ; il est l’homme qui adoucit les hommes. […] Le ton d’une certaine critique puritaine vis-à-vis de Shakespeare s’est, à coup sûr, amélioré, pourtant la convalescence n’est pas complète. […] Ô critique, ce Shakespeare n’est pas viable, il n’est qu’immortel !
Comme écrivain il était critique outré et faux critique, censurant à tout propos ceux qui l’avaient précédé dans la carrière. […] Les critiques dont je parle plus haut n’ont, certes, rien d’une pareille humeur, mais seulement l’habitude, insupportable, de faire bon marché de la Poésie en soi. […] Il s’agissait de rétorquer les arguments qu’un critique du nom de Fremy cherchait à faire valoir aux dépens du poète. […] Si Lebrun avait eu plus de temps, il aurait peut-être trouvé moyen de la gâter. » Le critique avait sans doute raison d’appliquer à Lebrun ces remarques. […] Et tous ces critiques et historiens se mettent à chanter en chœur les louanges de Pixérécourt et de Ducange.