Quoi qu’il en soit, et de quelque manière qu’ils s’y amusassent (ce qui ne regardait qu’eux), on aurait peine à se figurer, si les faits notaient présents, que c’eût été après dix années d’une existence voluptueuse et casanière, ainsi menée au grand jour, que le ministère fût allé faire choix du comte de Clermont pour le créer général en chef d’une armée dispersée en pays ennemi et qui avait déjà usé deux maréchaux.
Celui que le sort ne place point dans les circonstances analogues à son caractère et propres à l’exécution de ses desseins est comme un architecte dont les conceptions hardies restent inconnues de la postérité, parce qu’aucun grand monument n’est construit de son temps, comme un statuaire qui pourrait faire l’Apollon, mais qui n’a pas de quoi acheter un bloc de marbre. « Il y a, dira-t-on, des hommes qui savent créer les circonstances.
A ne prendre que l’ensemble, on a véritablement créé le lyrique en France, non plus par accident, mais par une production riche et profonde.
Il ne faut pas que ce qui reste de la doctrine s’égare aux mains des empiristes, Le plus pressé est de rétablir les textes, de créer le conservatoire ou, pour mieux dire, le Collège de France de l’occultisme.
Emprunte-t-il à la tradition ses vieilles croyances ou crée-t-il, en s’aidant de la science la plus récente, des êtres inconnus nés de sa propre imagination ?
Tarde193 a bien saisi, sans en tirer tout le parti possible, cette vérité indéniable : que dans une société l’affirmation crée la négation, la thèse l’antithèse, et qu’ainsi s’engagent en tous les domaines une quantité de « duels logiques », comme il les appelle.
C’est parmi eux qu’il s’agit pour vous de se créer des amis fidèles, sincères, qui vous aiment pour vos belles qualités, non pour vos défauts ; qui ne vous admirent point par mode, et qui sauront vous défendre contre la mode un jour, quand elle tournera.
Si l’on mesurait uniquement le mérite à la difficulté vaincue, souvent il y en aurait moins à créer qu’à traduire.
, excessivement intéressante en soi, et se raccordant à merveille au genre de génie qui a créé Tristram Shandy, cette bouffonnerie sérieuse, encore plus que le mariage, comme disait cet évangéliste de Beaumarchais.
Le but essentiel de ceux qui s’aiment est de créer et de connaître ensemble, par la conjonction physique et charnelle, l’élan vers la mort, vers la dépersonnalisation intense : et comme leurs forces physiques leur défendent la constance de cet élan vers lequel ils tendent sans cesse, leurs existences ne sont que des conversations reliant quelques instants de vertige suprême. " le caractère tragique de Don Juan implique une grande puissance de cristallisation instantanée jointe à une impuissance à cristalliser dans le temps.
Il créa en lui un goût de magnificence et de luxe, qui s’accorde rarement avec une âme élevée, et qui, cependant, chez lui ne l’excluait pas ; goût qui se répandit sur ses bâtiments, sur ses jardins, sur ses fêtes, et trop souvent substitua des dépenses de faste à des dépenses utiles.
L’esprit aime surtout les idées qu’il paraît se créer à lui-même ; plus vous ferez penser, et plus l’espace qu’on parcourra avec vous s’agrandira.
L’homme a été créé pour l’action, et non pour le rêve. […] Il me fallait un monde de fictions, et je n’ai jamais cessé de m’en créer un que je portais partout avec moi ! […] About se donne le plaisir de créer monsignor en faisant de lui le secrétaire laïque d’un cardinal, Lello Coromella se laisse persuader par cet intrigant à la solde de son oncle de suivre son frère dans un voyage à Londres, où celui-ci se rend pour épouser une riche héritière. […] Ce sont les lois et les mœurs qui créent artificiellement une damnation sociale. […] Il a cédé peu à peu à la tentation d’y faire entrer toutes ses idées sur le rôle qu’il appartient aux évêques de remplir ; il nous a donné son idéal épiscopal ; et je soupçonne qu’il a eu la prétention de créer un évêque modèle, afin qu’il devînt un reproche pour l’épiscopat contemporain.
Ce n’est pas nous qui l’aurons créé : il sortira du sein de la multitude pour la dominer. […] Il n’a pas inventé la famille et la patrie, il n’a pas créé de toutes pièces les sentiments qu’il met aux prises. […] Comment, après avoir proclamé à son de trompe l’avènement de l’histoire au théâtre, en est-il venu à créer, pour la curiosité oisive, des personnages qui ne sont d’aucun temps ni d’aucun pays ? […] En imposant à l’Italie du seizième siècle des mœurs qui ne sont d’aucune date, il se donne de son plein gré le droit de créer des personnages qui n’ont jamais pu vivre nulle part. […] Depuis qu’il a choisi parmi les noms célèbres des annales européennes le baptême de ses fantaisies, il n’a jamais tenu compte de la réalité pour la poétiser, mais il a créé volontairement des types indépendants de la réalité, pour leur imposer ensuite des noms choisis au hasard dans l’histoire.
Chaque jour les grands emplois faisaient entrer dans la noblesse des hommes, qui obtenaient ainsi une illustration marquée, sans devenir pourtant tout d’un coup les égaux des gentilshommes de race : « La noblesse est une semence précieuse que le souverain peut créer, mais son pouvoir ne s’étend pas plus loin ; c’est au temps et à l’opinion qu’il appartient de la féconder. » Suivent des détails de l’ancienne organisation locale. — Le roi de Sardaigne avait publié un célèbre édit du 19 décembre 1771, pour l’affranchissement des terres en Savoie et l’extinction des droits féodaux. […] Eugène, selon l’usage, entre au sortir de l’enfance dans la carrière militaire : « Il ne dépend point de nous de créer les coutumes ; elles nous commandent. […] Il ajouta : « Je ne veux point décider s’il faut une religion aux hommes…, s’il faut créer pour eux des illusions et laisser des opinions erronées devenir la règle de leur conduite. […] C’est également pour avoir méconnu ce quelque chose de mixte qu’elle avait tant contribué à créer et à organiser, que la Restauration a péri ; c’est parce qu’il le respecte, qu’il l’accommode, et qu’en gros il le contente, que le régime présent est en train de vivre.
Une personnalité charmante et fantasque, se jouant avec mille grâces juvéniles dans un petit monde créé à son image, et qu’elle fait miroiter sans cesse sous le rayon de ses poétiques caprices : voilà le théâtre de M. de Musset. […] Vous ne réussirez pas mieux à faire de ces fouilles archaïques une création nouvelle et vivante que lord Elgin n’eût réussi à créer, sous le ciel britannique, un monument grec a l’aide des fragments de statues et de bas-reliefs que lui livraient l’Attique et l’Ionie. […] Depuis, nous en avons vu bien d’autres qui doivent nous rendre très indulgents, même pour Fontenelle ; mais enfin, quand on est soi-même un maître, quand on écrit un livre destiné, à son tour, à devenir classique, il n’est peut-être pas bien sage de créer ainsi deux siècles dans le grand siècle, et de nous dire que le second, celui de Louis XIV, « a substitué, en tout genre, la simplicité à la naïveté, la noblesse à la grandeur, la dignité à la force, l’élégance à la grâce ». — Ne vaudrait-il pas mieux voir dans ces transformations et cet assouplissement successifs l’effet naturel de la marche du temps, le progrès de la civilisation littéraire, de la recherche du beau, de la perfection du langage, s’exerçant sur des génies de même race et de même trempe ? […] Ce n’est pas tout encore : au lieu de voir dans cet acte volontaire, spontané, de l’âme qui s’élève vers Dieu, une preuve qu’il y a là deux termes distincts, l’âme et Dieu, l’être créé et le Créateur, il les confond en un seul être ; et de cette prise de possession de la divinité par l’âme, il déduit sa doctrine, qui fait de l’âme une portion intégrante de la Divinité. […] Jules Janin — il a le droit d’en être fier et de le dire, — n’a pas manqué une seule fois à sa tâche ; il a fait plus que créer un feuilleton, il a créé un jour ; il a créé le lundi ; ce lundi qui devait, vingt ans après, porter bonheur à une plume plus savante peut-être, mais moins vivante que la sienne.
Avant moi il n’y eut point de choses créées, Sinon éternelles ; et éternellement je dure : Laissez toute espérance, vous qui entrez. […] Que la puissance divine ait créé des tortures sans fin pour la pauvre créature d’un jour, admettons-le ; la sagesse et la justice…, passe encore, quoique cela devienne assez peu compréhensible ; mais l’amour ! […] L’enfer créé, comme nous l’avons vu, à la chute des anges, est l’œuvre du Dieu en trois personnes, de ce Dieu qui est amour autant que sagesse et puissance. […] En effet, dans le Paradis perdu, Adam seul est créé pour Dieu ; tout au contraire de Béatrice, Ève reste subordonnée et ne saurait voir Dieu que dans Adam. […] Cette beauté ineffable, dit-il, est au-dessus de toute vision mortelle ; il croit même que les anges n’en sauraient supporter toute la splendeur, et que Dieu seul, lui qui l’a créée, en peut jouir entièrement.
Une fois cette figure rêvée et trouvée, Shakespeare a créé son drame. Shakespeare, portant Cordelia dans sa pensée, a créé cette tragédie comme un Dieu qui, ayant une aurore à placer, ferait tout exprès un monde pour l’y mettre. […] Il les crée et les laisse faire. […] Il concède Falstaff ; mais on sent, du reste, qu’il ne serait pas très flatté d’avoir créé le caractère de Falstaff. […] Les poètes, en qui se déclare le plus évidemment cette souveraine manière de créer, on les nomme déjà : Shakspeare, Molière, Walter Scott, Gœthe en partie.
Il avait manqué son entrée dans le monde comme Élias Wildmanstadius ; mais, plus heureux que lui, il avait su se créer avec l’art un milieu qui lui convenait et trouver des contemporains dans l’école romantique. […] Plus on considérait cet excellent dessin, plus on admirait la grandeur d’intelligence de l’artiste, qui n’avait pas créé une seule figure semblable à une autre, et qui dans chacune d’elles présentait un nouvel instant de l’action. […] Cela tient à ce que ces deux grands maîtres créent par une sorte de vision intérieure qu’ils ont le don de rendre sensible avec les moyens qu’ils possèdent, et non par l’étude immédiate du sujet. […] Pendant sa seconde période, Bocage créa avec beaucoup de succès le rôle de Brute dans la Lucrèce de Ponsard. […] Elles sont entrées, quoique réelles, dans ce monde des types créés par les poètes où l’âge, le temps, les dates n’existent plus ; l’ombre de la retraite ne peut pas éteindre leur éclat.
Nos manufactures ont été créées par enchantement ; elles ont jeté, un grand éclat, et puis elles se sont éteintes. […] Le cœur humain veut plus qu’il ne peut ; il veut surtout admirer : il a en soi un élan vers je ne sais quelle beauté inconnue, pour laquelle il fut peut-être créé dans son origine. […] Mais c’est une chose étrange que ce toucher sûr, par qui une chose ne rend jamais que le son quelle doit rendre, soit encore plus rare que la faculté qui crée. […] » Il dit ailleurs : « Shakspeare créa le théâtre anglais. […] Tout est machine et ressort, tout est extérieur, tout est fait pour les yeux, dans les tableaux du paganisme ; tout est sentiment et pensée, tout est intérieur, tout est créé pour l’âme dans les peintures de la religion chrétienne.
Je ne nierai point que l’on ne puisse créer de belles choses, même aujourd’hui, en suivant le système classique ; mais elles seront ennuyeuses. […] Il est donc utile que quelques écrivains modestes, qui ne se reconnaissent pas le talent nécessaire pour créer une tragédie, consacrent chaque année une semaine ou deux à faire imprimer un pamphlet littéraire destiné à fournir à la jeunesse française des phrases toutes faites. […] Je vois avec plaisir que vous ne croyez pas qu’un système dramatique quelconque soit capable de créer des têtes comme celles de Molière ou de Racine.
41 » Il repousse cette conséquence, pourtant inévitable, de son système, que l’esprit serait l’esclave de la mémoire verbale ; celle-ci « offre ses expressions », mais « l’esprit les demande, les cherche, la raison les examine… ; l’esprit fait plus : il les crée lorsque la mémoire… ne lui en présente que d’insuffisantes… ; la mémoire n’est qu’un dictionnaire à l’usage de l’esprit…, un dépôt d’expressions où chaque esprit choisit celles qui peuvent le mieux rendre sa pensée » ; c’est pourquoi « chaque écrivain a son style, expression de son esprit »42. […] L’habitude de parler intérieurement serait donc une synthèse de deux habitudes, l’habitude de la parole et l’habitude du silence, et celle-ci serait une conquête de la volonté sur la nature, tandis que la première serait un instinct confirmé par la volonté. — Faut-il croire que l’action seule est naturelle à l’homme et qu’il crée son imagination, sa mémoire des sensations ? […] Mais l’effort mental n’est pas le même chez tous les hommes ; l’empire que nous exerçons sur la parole intérieure est « proportionné à l’habitude », — c’est-à-dire aux habitudes que nous lui avons données, — et par conséquent à l’effort mental que nous avons déployé pour créer ces habitudes103. — Rien n’est plus juste.
» Puis, à d’autres jours, la patience manque ; un mauvais vent du désert se remet à souffler ; à force de guerroyer et de courir, de mener de razzia en razzia sa colonne infernale, de s’ingénier (périlleux problème) à soumettre les Arabes par les Arabes, de vouloir créer et fonder par tout le pays de petits forts de sûreté où les chefs amis, les agas et les caïds puissent se maintenir et se défendre au besoin, et brider les tribus rebelles ; à force d’être sur pied nuit et jour, et de se ronger au gîte quand on y est retenu, à force de se passionner pour tout, on se consume, on s’use avec une rapidité effrayante : « Je veux trop bien faire et trop de choses, et je prends tout trop à cœur ; c’est le propre des âmes généreuses, mais ces âmes-là ne vivent pas longtemps ; elles s’usent trop vite, et je le sens, mais il n’est plus temps de se changer. » Quelques visites de France apportent des diversions dans cette vie locale si dévorante. […] Ducos, son ancien collègue) : « Mais l’illustre Ducos, qui a créé un nombre indéfini d’escadres dans tous les coins humides du globe, ne m’a pas donné malgré mes cris le plus petit moyen de débarquement. » ac.
Le souvenir représentatif du temps où, si soigneuse de lui, sa mère entrait toujours la première dans sa chambre, suffisait pour créer invinciblement l’illusion. […] Ballanche n’a été conduit là, au moins à ce qu’il me semble, que par suite d’une erreur de goût qui l’a porté à convertir et à traduire en poésie une opinion créée par la réflexion et l’analyse. » Nous croyons qu’il ressort de la biographie psychologique de M.