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850. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — Q. — article » pp. 570-571

Quillet eut la bassesse d’accepter ce bienfait de la part d’un homme qu’il n’aimoit ni n’estimoit, & dont il avoit dit du mal ; & le Cardinal, la foiblesse d’accepter la dédicace de la seconde édition d’un Ouvrage si peu analogue à la gravité de son état & de celui de l’Auteur.

851. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Voilà l’état où le latin était tombé, aux septième et huitième siècles, dans tous les lieux où il était encore parlé officiellement. […] Il nous reste l’état actuel de ces langues. […] L’état du monde rendait inévitable cette guerre. […] Tel était encore l’heureux état de cette secte à la fin du douzième siècle. […] Dans la France du Nord, comme dans la Provence, c’était l’état de certains hommes de savoir ces contes et de les réciter.

852. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 52-53

Ses Discours Latins, couronnés par l’Université de Paris, prouvent qu’il est très-versé dans la Langue que son état l’oblige d’enseigner ; deux autres Discours François prouvent encore qu’il sait écrire dans la sienne.

853. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 362-361

Plus d’un Philosophe a souvent reproché à ses Adversaires leur naissance, leur état, leur peu de fortune.

854. (1900) Molière pp. -283

L’état du manuscrit semble indiquer que, sa conférence faite, J. […] L’impiété, en 1665, n’existait nulle part (pas plus que la dévotion outrée) comme mal social, comme vice social, comme état général, ou répandu, des esprits. […] Non ; Regnard a pris la sœur et le frère à l’état normal ; l’un et l’autre ont bon cœur ; mais le droit d’aînesse a tué entre eux l’amitié fraternelle. […] Dans toutes les conditions, dans tous les états de la vie, nous pouvons tous, perpétuellement et continuellement, en faire notre profit. […] ——— Jadis, en France, on ne voyait pas seulement trois états.

855. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 388-389

Après avoir professé & défendu par ses Ecrits le Calvinisme, il embrassa la Religion Catholique, d’après plusieurs conférences qu’il eut avec le grand Bossuet, entra ensuite dans l’état ecclésiastique, écrivit platement contre les Protestans, & fut pensionné jusqu’à sa mort par Louis XIV & par le Clergé.

856. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 89-91

Ses liaisons avec le Comédien Baron ont pu le faire soupçonner d’avoir un goût plus decidé pour le Théatre, que son état ne le permettoit : on étoit même persuadé, de son temps, comme on l’est encore aujourd’hui, que l’Andrienne & l’Homme à bonnes fortunes devoient beaucoup à ses talens.

857. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

C’est pour rendre la corrélation des noms & des adjectifs plus palpable encore, qu’on a introduit dans ces langues la concordance des genres, dont les adjectifs prennent les différentes livrées selon l’exigence des conjonctures & l’état des noms au service desquels ils sont assujettis. […] Consultons de bonne foi ces décisions, & comparons y sans préjugé les pratiques usuelles ; nous serons bientôt en état d’apprécier l’opinion du P. […] La Grammaire considere la parole dans deux états différens, ou comme prononcée, ou comme écrite : la parole écrite est l’image de la parole prononcée, & celle-ci est l’image de la pensée. […] La premiere est de suivre l’analogie d’une langue, pour se mettre en état d’y introduire des mots nouveaux, selon l’occurrence des besoins : c’est ce qu’on appelle la formation ; & elle se fait ou par dérivation ou par composition. […] Je crois donc que bâillement exprime particulierement l’état de la bouche pendant l’émission de ces sons consécutifs, & que le nom hiatus exprime, comme je l’ai déjà dit, la cacophonie qui en résulte : en sorte que l’on peut dire que l’hiatus est l’effet du bâillement.

858. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Là se bornèrent d’abord ses travaux d’installation ; avant d’en faire d’autres, il avait besoin d’examiner attentivement ses ressources et l’état de ses domaines. […] Boris s’assit près de Viéra, engagea avec elle la conversation à voix basse, et d’abord lui parla de l’état de son père. […] Il faut dire qu’il était dans un état d’ivresse. […] Un jour sa maîtresse, qui venait de le rencontrer dans un piteux état, se mit à parler de lui avec son intendant Gabriel, un homme qui, à en juger par ses yeux fauves et son nez en bec de corbin, était évidemment destiné à l’état d’intendant. […] Il finit par tomber dans un état de prostration si grand qu’il n’eût pas même la force de mettre son bonnet ; une âme charitable le lui enfonça jusqu’aux yeux.

859. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

c’est son devoir d’état ; ce maximum est limité. […] Il est des cas d’espèce dont nous ne pouvons pas faire état et sur lesquels nous reviendrons. […] Si le livre ne souffrit pas de ce coup d’état d’une élite, le théâtre tel qu’il se formait ne pouvait, hélas ! […] Cet état de communion non assuré, non préétabli, il faudra que l’auteur le crée de toutes pièces. […] Découverte sans prix : l’état de communion expressément requis entre la salle et la scène existait encore quelque part ?

860. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Voyons dans quel état il trouvait la cour. […] Le duc, pendant que je parlais, se tournait tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, et semblait m’écouter avec peine ; et moi, je m’affligeais en pensant à l’état magnifique que j’avais laissé en France. […] Je fis des amas de bois de pin, je revêtis de terre convenable la carcasse de ma statue, et je l’armai de bons ferrements ; enfin, je préparai tout pour me mettre en état de la jeter en fonte. […] « Je commençai donc, dit-il, à mettre ma statue en état d’être montrée ; et, comme il me manquait un peu d’or et certaines choses pour la perfectionner, je murmurais, je me plaignais, je maudissais le jour où j’avais quitté la France et son grand roi ; et je ne prévoyais pas encore tout ce qui me devait arriver avec un prince qui me laissait travailler pour lui, aux dépens de ma propre bourse. […] Quand ils eurent fini leurs longs discours, je leur répondis que j’étais au service d’un prince plus amateur des talents que tout autre, et dans le sein de ma patrie, qui était celle des beaux-arts ; que si l’intérêt me faisait agir, je n’avais qu’à rester auprès du grand roi François, qui me donnait un traitement de mille écus d’or, sans compter la facture de mes ouvrages ; de sorte que, tous les ans, il m’en revenait plus de quatre mille ; que cependant j’avais renoncé à cet état magnifique, et laissé en France le fruit de quatre ans de travail.

861. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

Or, dans l’état où est l’agriculture, le décimateur et le roi prennent la moitié de ce produit net si la terre est grande, et ils le prennent tout entier si la terre est petite657. […] Mais les commis sont alertes, soupçonneux, avertis, et fondent à l’improviste sur toute maison suspecte ; leurs instructions portent qu’ils doivent multiplier leurs visites et avoir des registres assez exacts « pour voir d’un coup d’œil l’état de la cave de chaque habitant691 ». — À présent que le vigneron a payé, c’est le tour du négociant. […] En Bourgogne699, toutes les dépenses de la maréchaussée, des haras et des fêtes publiques, toutes les sommes affectées aux cours de chimie, botanique, anatomie et accouchements, à l’encouragement des arts, à l’abonnement des droits du sceau, à l’affranchissement des ports de lettres, aux gratifications des chefs et subalternes du commandement, aux appointements des officiers des états, au secrétariat du ministre, aux frais de perception et même aux aumônes, bref 1 800 000 livres dépensées en services publics, sont à la charge du Tiers ; les deux premiers ordres n’en payent pas un sou. […] Un intendant, visitant la subdélégation de Bar-sur-Seine, remarque « que les riches cultivateurs parviennent à se faire pourvoir de petites charges chez le roi et jouissent des privilèges qui y sont attachés, ce qui fait retomber le poids des impositions sur les autres712. » — « Une des principales causes de notre surtaxe prodigieuse, dit l’assemblée provinciale d’Auvergne, c’est le nombre inconcevable des privilégiés qui s’accroît chaque jour par le trafic et la location des charges ; il y en a qui, en moins de vingt ans, ont anobli six familles. » Si cet abus continuait, « il finirait par anoblir en un siècle tous les contribuables le plus en état de porter la charge des contributions713 ».

862. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Examinons l’état de l’Europe à la minute juste où le temps et les événements nous ont porté. […] Prenons pour exemple la France, et, sans remonter trop haut et sans utilité dans le vague de l’histoire, examinons quel était le système de ses alliances avant la révolution, et quel système d’alliance lui serait réellement le plus profitable aujourd’hui, dans l’état tout différent où se trouve maintenant l’Europe. […] Quoi de plus indiqué par l’état réel du reste du monde ? […] XXXII Il aurait commencé, sans doute, selon sa puissante méthode analytique, par considérer d’un coup d’œil et par caractériser sans illusion l’état de l’Europe, afin d’y faire prendre à la France la position juste, forte et pacifique, sur ce champ de manœuvre de la diplomatie ; il aurait cherché, en méprisant les préjugés populaires et les forfanteries soldatesques, quel était et où était le système d’alliance actuel le plus propre à assurer l’existence, la durée, la prépondérance légitime de la France, tout en maintenant le plus longtemps possible à l’Europe l’inappréciable bienfait de la paix.

863. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Non ; aucun homme d’État ne pouvait, de bonne foi, se faire une illusion pareille ; la guerre à mort entre l’ordre public, qui est l’intérêt et le droit de tous, et la presse libre, qui n’est que l’intérêt d’un petit nombre d’hommes de plume sans mandat et sans responsabilité, était évidemment l’état sauvage, au lieu de l’état régulier d’une nation en état légal. […] L’ennui est le mal du génie ; c’est l’état des grandes âmes ; c’est la sensation du vide dans l’homme.

864. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

Couché, il recevait des amis, rasé, la toilette faite, dans l’état d’un homme qui aurait une légère indisposition. […] Vous ne savez donc pas ce que Verneuil a dit à l’autopsie : « Mes enfants, quelle grâce d’état que nous ne soyons pas intervenus !  […] Samedi 27 octobre Les attentes, dans les petites gares de chemins de fer, aux heures entre chien et loup, après une journée de courses au grand air : ce sont des heures de la vie, comme passées dans un morne rêve, où s’entendrait un monotone tic-tac d’horloge, et où derrière un grillage rougeoyant apparaîtrait une silhouette fantastique de buraliste, à l’état d’ombre chinoise. […] Et la pauvre tata était renvoyée dans sa province, où elle mourait quelques mois après, dans un état d’enragement, et déchirant et mettant en pièces tout ce qui tombait sous ses vieilles mains.

865. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

Et si cette troupe n’est pas sans analogie avec une bande de sauvages, il ne faut pas oublier que ces pauvres sauvages possèdent en germe le principe des développements et des transformations qui en feront une société politique avec le temps et sous l’influence de milieux différents, tandis que jamais aucune espèce animale n’est parvenue à un véritable état politique, malgré les changements de conditions géographiques ou domestiques. […] S’il est bien vrai que la science et la philosophie remplacent définitivement la religion chez un certain nombre d’esprits d’élite, n’est-ce point le cas d’en conclure que la religion est un état transitoire plutôt qu’un principe éternel ? […] En recueillant les particularités des mœurs qui se retrouvent chez les différentes peuplades nègres à l’état naturel et primitif, on a pu dégager ce qui fait la nature propre de cette race, à savoir la prédominance marquée de la sensibilité sur la volonté et l’intelligence : d’où le défaut d’initiative et d’originalité, l’incapacité radicale pour les idées et les spéculations abstraites, pour les arts et les œuvres de grande création qui réclament une puissante volonté, pour les institutions de self-government qui demandent une forte personnalité ; d’où, au contraire, une aptitude marquée pour toute œuvre de passion violente, de sentiment tendre, d’imagination grossière. […] « Dans cet état, dit Jouffroy, dont le caractère est la beauté, les capacités sont tellement rompues à l’obéissance par l’effet d’une longue et sévère discipline, qu’elles plient sans résistance à tous les ordres de la volonté, et jouent sous sa main avec la même facilité que les touches d’un instrument sous les doigts d’un musicien habile.

866. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 366-368

L’état de la Grece, du temps de Démosthène, y est présenté avec autant d’érudition que d’habileté.

867. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — W. — article » pp. 524-526

Il sera toujours honorable pour les Lettres, que des hommes, occupés par état à des Emplois qui exigent une attention sérieuse, trouvent encore le moyen de consacrer aux Muses la plus grande partie du temps dont ils peuvent disposer.

868. (1913) Le bovarysme « Deuxième partie : Le Bovarysme de la vérité — I »

Un pareil verdict répond donc à un état de sensibilité, réel chez certains êtres, et qui parvient d’ailleurs à se complaire à lui-même en des attitudes de détachement religieux ou esthétique : des hommes qui ressentent la vie comme une souffrance trouvent en ces postures une méthode et un moyen anticipé pour se soustraire à la vie.

869. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

C’était un état d’abattement, de désespoir et de terreur qui le laissait en proie aux plus sinistres pensées et aux images lugubres. […] Cowper, alors âgé de vingt-deux ans, ne tint pas compte de ce qu’il jugea plus tard avoir été un appel et un avertissement ; il attribua bientôt l’amélioration de son état au simple changement d’air et aux divertissements du lieu, et il retourna à Londres reprendre sa vie, non pas licencieuse, mais gaiement dissipée et diversement légère. […] Il continuait de vivre ainsi de cette vie sans règle et sans excès apparent, lettré amateur, agréable à sa société, badin, d’une espièglerie spirituelle et vive, semblant avoir pris pour devise ce mot d’un poète : « Dilecto volo lascivire sodali », et, pour tout dire, le plus aimable des compagnons, lorsque arriva le grand événement qui l’arracha à la société, le plongea en d’inexprimables angoisses et l’amena graduellement, et par des épreuves douloureuses, à un état de rajeunissement et de maturité d’où sortirent des productions de génie.

870. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

qu’il est doux, disait-il quelque part, dans la retraite (d’un soir d’hiver), à travers le trou de sa serrure, de guetter le monde tel qu’il est fait, de voir tout le remuement de cette Babel et de ne point sentir la foule. » Mais il avait trop de sensibilité, de patriotisme, de mouvements humains et chrétiens pour en restera cet état de spectateur amusé, et il s’échappait à tout instant en élancements et en effusions douloureuses qui peuvent sembler aujourd’hui toucher à la déclamation, mais qui, à les bien prendre et à les saisir dans leur jet, étaient surtout des à-propos éloquents. […] Un assaut de la même maladie qui ne faisait que sommeiller, en quelque sorte, aux heures riantes, le reprit en 1787 ; il en sortit encore ; mais l’abattement et la mélancolie devinrent son état habituel et constant depuis 1793. […] Sa maladie ne ressemble point à celle de Pascal : ce dernier, qui peut avoir eu à certains moments des visions et des hallucinations, dominait en général par l’intelligence son état nerveux.

871. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Les premiers mots qu’elle vous disait, et par lesquels elle croyait vous honorer, concernaient votre croyance et l’état de votre âme : elle essayait d’un premier grapin à jeter sur vous. — «  Quand on a fait Volupté, me dit-elle la première fois que je la vis, on a une responsabilité. » Je m’inclinai en silence. — J’ai beaucoup vu, dans un voyage qu’elle fit à Paris, cette charmante Roxandre, cette amie de jeunesse de Mme Swetchine et qui était devenue la comtesse Edling : elle s’est plainte à moi bien souvent (j’en demande bien pardon à ceux qui ont écrit le contraire) d’un certain fonds de froideur ou de réserve qu’elle rencontrait désormais dans son ancienne amie et qu’elle attribuait à la différence de communion. […] Mais il n’y avait pas en cela de motif de rivalité ; on mettait cette prédilection sur le compte de la Russie et de la reconnaissance ; et la gloire de M. de Maistre, d’ailleurs, était encore chez nous à l’état de paradoxe. […] Elle partit seule, alla plaider auprès du czar la cause deson vieux mari, traversa le Nord par la saison la plusrigoureuse, et dans un état de santé déplorable, sans un murmure, sans une plainte : une lettre d’elle, admirable de sentiment (tome I, page 377), témoigne de ses dispositions morales, de sa résignation au devoir, de sa soumission prête à se laisser conduire jusqu’aux dernières conséquences : elle eût tout quitté, Paris et son monde, s’il l’avait fallu et si le czar avait maintenu son arrêt, pour aller habiter dans quelque ville obscure de la Russie, à côté du triste et taciturne exilé.

872. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Il appréhendait que « ces discours qui avaient charmé dans sa bouche n’eussent pas le même succès quand ils seraient sur le papier. » Legendre, qui avait eu l’idée de les rédiger, est forcé de convenir que le prélat avait raison : « J’ai de lui des sermons qui avaient charmé quand il les avait prononcés et qui réellement ne m’ont paru, en les lisant, que des pièces assez ordinaires. » Les fameuses Conférences restèrent donc à l’état de pure renommée et de souvenir ; si glorieuses qu’elles fussent pour le prélat, elles avaient cessé du jour où il avait pensé que l’effet était produit et son nom remis suffisamment en honneur. […] leur dit-il, vous ne vous étudiez dans vos discours qu’à trouver des moyens d’accuser les autres, et vous vous jetez sur un homme accablé… Contentez-vous de voir l’état où je suis réduit, et mettez le doigt sur votre bouche. […] Un homme qui connaissait bien les hommes, le cardinal de Forbin-Janson, avait tiré son horoscope : « M. de Noailles, avait-il dit, sera un jour chef de parti, mais ce sera sans le vouloir ni le savoir. » Encore une fois, au point de vue politique et ecclésiastique extérieur, et comme archevêque dirigeant tout un Ordre auguste et vénérable, M. de Harlay n’avait qu’un défaut, celui qui fit tort au sage roi Salomon ; et La Bruyère, ce grand et excellent juge, l’a dit avec bien de la modération et de la finesse ; car c’est très probablement à l’archevêque de Paris qu’il pensait lorsqu’il a tracé ce Caractère : « Il coûte moins à certains hommes de s’enrichir de mille vertus que de se corriger d’un seul défaut ; ils sont même si malheureux que ce vice est souvent celui qui convenait le moins à leur état et qui pouvait leur donner dans le monde plus de ridicule : il affaiblit l’éclat de leurs grandes qualités, empêche qu’ils ne soient des hommes parfaits et que leur réputation ne soit entière.

873. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Dans ses premières lettres elle insiste beaucoup sur ce qu’elle est Française, sur ce qu’elle l’est devenue « jusqu’au bout des ongles. » Elle ne demandait pas mieux que de l’être ; sa bonne envie est évidente : « Il faut avoir, disait-elle, les vertus de son état. » Mais à la contradiction, à l’incrédulité qu’elle rencontra sans cesse sur ce point irritant, il ne faudrait pas s’étonner si elle se redressait quelquefois et si elle redevenait en définitive la pure fille de Marie-Thérèse. […] Il fallut tourner la difficulté et rompre le courant en lui donnant avant l’âge un état princier et une maison. […] Au fond, ce n’est point une méchante femme, c’est plutôt une bonne personne, et l’on m’a dit qu’elle fait beaucoup de bien à de pauvres gens. » Et trois ans après, lors du renvoi de Mme Du Barry, et quand Louis XVI, à son avènement, juge à propos de la faire renfermer quelque temps dans une abbaye pour la mettre hors d’état de commettre quelque indiscrétion, le même mot revient sous la plume de Marie-Antoinette, et avec la nuance précise : « Il paraît que si c’était une vilaine femme, ce n’était pas au fond une femme méchante. » Mais le plus beau mot de Marie-Antoinette au sujet de cette favorite, et qui ne se lit pas dans une lettre, est celui qui courut dans le temps même et qui se trouve partout cité.

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