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39. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

La porte s’ouvrait, et Pierre Vasilitch entrait dans son négligé habituel. […] Que de rêves ne fit-il pas jusqu’à ce qu’il arriva à la porte de sa maison ? […] Il est sourd, et n’entend pas résonner les coups qu’il porte. […] Le postillon raconta qu’il avait été le regarder par une fente de la porte. […] Mais, d’un geste, elle les arrêta à la porte.

40. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

La porte s’ouvre ; un vieillard entre, le visage sévère, le front indigné : c’est M.  […] Chaque trait frappe, chaque mot porte coup. […] avec quelle impertinence de déesse mettant un dévot attardé à la porte de son temple ! […] Paul Aubry, et, pour que Paris ne l’ignore, elle envoie son équipage armorié stationner à la porte de sa maison. […] Tout d’un coup, la porte s’ouvre et la comtesse envahit la chambre, avec la fougue d’une lionne échappée rentrant dans son antre.

41. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Il restait toujours à la porte, et semblait ne pas vouloir entrer. […] Ce n’est pas assez d’ouvrir une porte ; il faut franchir le seuil et marcher. […] La sensibilité se porte hors d’elle, et se répand vers la cause qui l’affecte agréablement : c’est le second degré. […] Dire que la sensibilité se répand et se porte vers la pêche, c’est faire une métaphore fausse. C’est la connaissance qui, appliquée d’abord à la sensation, se porte ensuite vers la pêche, et la connaissance est une action de l’intelligence.

42. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

On croit voir cette ville, jadis si commerçante et si peuplée, debout encore avec ses tours et ses édifices, tandis qu’aucun être vivant ne se promène dans ses rues solitaires, ou ne passe sous ses portes désertes. […] « Joseph les salua aussi en leur faisant bon visage, et il leur demanda : Votre père, ce vieillard dont vous parliez, vit-il encore, se porte-t-il bien ? » Ils lui répondirent : Notre père, votre serviteur, est encore en vie, et il se porte bien ; et, en se baissant profondément, ils l’adorèrent. […] Par là nous espérons (du moins aussi loin que s’étendent nos lumières) avoir fait connaître aux lecteurs quelques-unes des innombrables beautés des livres saints : heureux si nous avons réussi à leur faire admirer cette grande et sublime pierre qui porte l’Église de Jésus-Christ ! […] La Vulgate porte, la mort aînée, primogenia mors .

43. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Auguste de Chatillon. À la Grand’Pinte ! »

Seulement, cet Ivanhoë de la poésie, ce chevalier de la race des premiers Croisés, porte une autre croix que ses ancêtres. Il porte la croix de la vie moderne sans la rejeter et sans la maudire, et il est plus calme, ce fils des preux, qui a tout perdu, fors l’honneur, et qui, par la poésie ou l’art, rentrera peut-être quelque jour dans l’héritage de gloire des ancêtres, il est plus calme que ce va-nu-pieds d’Hégésippe, qui n’a jamais rien eu que ses beaux pieds nus de pasteur grec. […] maison à porte close Ouverte sur mon rêve d’or. […] Mais, s’il est sentimental par l’inspiration, — et un sentimental exquis, même quand il est gai, écoutez plutôt : Vous voulez savoir la cause, La cause de ma douleur J’ai frappé chez le bonheur, Et j’ai trouvé porte close. […] S’il résiste, on lui fera Sauter les gonds de sa porte !

44. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre X. Machines poétiques. — Vénus dans les bois de Carthage, Raphaël au berceau d’Éden. »

« Pour ombrager ses formes divines, le Séraphin porte six ailes. […] » Il s’avance dans le jardin du bonheur, au travers des bocages de myrtes, et des nuages de nard et d’encens ; solitudes de parfums, où la nature, dans sa jeunesse, se livre à tous ses caprices… Adam, assis à la porte de son berceau, aperçut le divin Messager. […] Ce char enveloppé de vapeurs, ce voyage invisible d’un enchanteur et d’un héros au travers du camp des chrétiens, cette porte secrète d’Hérode, ces souvenirs des temps antiques jetés au milieu d’une narration rapide, ce guerrier qui assiste à un conseil sans être vu, et qui se montre seulement pour déterminer Solyme aux combats, tout ce merveilleux, quoique du genre magique, est d’une excellence singulière.

45. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Malheureusement, il n’y a pas de ces cris-là, il n’y a pas de ces beautés dans l’œuvre posthume qu’on a publiée de Charles de Rémusat, tête, en somme, de peu de poésie, lettré philosophique à sang blanc et froid, et dont la froideur et la blancheur se retrouvent dans l’Abélard du drame comme dans l’Abélard du traité qui porte ce nom. […] Il manque même de haine philosophique, quoique de Rémusat doive avoir, tapies quelque part, les haines de sa philosophie, et quoique le scepticisme du temps et la glace de son tempérament aient bien diminué cette rage contre l’Église qu’ont tous, au fond du cœur, les philosophes, et que Cousin, lâche, mais indiscret, révélait en la couvrant de ce mot, dit justement à propos d’Abélard : « Il avait déposé dans les esprits de son temps le doute salutaire et provisoire, qui préparait l’esprit à des solutions meilleures que celles de la foi. » Charles de Rémusat n’a jamais eu de ces imprudentes et impudentes paroles d’un homme dont l’espérance trahit l’hypocrisie, mais à quelque coin, dans cet esprit moyen, dans cette âme de sagesse bourgeoise, il y a toujours, prête à se glisser au dehors, l’hostilité contre toutes les grandes choses que nous croyons… Comme Abélard, le héros de toute sa vie, comme Bacon, qu’il a aussi commenté, de Rémusat s’est toujours plus ou moins vanté d’être un écrivain de libre examen et de libre pensée, un philosophe contre la théologie, un adversaire de l’autorité sur tous les terrains, en religion comme en politique, — et comme l’Église est l’autorité constituée de Dieu sur la terre et qu’elle a le privilège divin « que les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre Elle », de Rémusat, qui est une de ces portes-là, — non pas une porte cochère, aux cuivres insolemment luisants et aux gonds tournant à grand bruit, mais une petite porte, discrète et presque cachée à l’angle et sous les lierres prudents de son mur, — de Rémusat entend bien prévaloir contre l’Église et lui prouver que son privilège divin n’est qu’une prétention ! En attendant ce jour-là, de Rémusat a toujours fait son métier de petite porte plus ou moins secrète, s’ouvrant, s’entrebâillant aux mauvais sentiments et aux idées ennemies.

46. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Quelquefois aussi les enfants de la ville se présentent à la porte de mon jardin. […] c’était ma sœur qui priait Dieu en dehors sur le seuil de ma porte. […] Je me mis à genoux près de la porte, et, sans l’interrompre, je suivis mentalement ses paroles. […] Ils s’acheminèrent ensemble vers la porte du jardin. […] Le Lépreux ferma la porte et en poussa les verrous.

47. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Guy de Maupassant »

Il est extraordinaire qu’on ne soit pas plus gai sur un yacht qui porte le joyeux nom de Bel-Ami ; et M. de Maupassant, schopenhauérisant sur son bateau, « nous en monte un » dirait quelque mauvais plaisant. […] Que tel assemblage de drames porte le nom de Shakspeare et que tel entassement de vers lyriques porte celui de Victor Hugo, qu’importe ? […] Mais on souffre ; et, par la porte de la souffrance, entrent la réflexion, la curiosité, l’inquiétude et l’appréhension de l’inconnu et, sous une forme ou sous une autre, l’idéalisme, et le rêve, et des besoins d’expliquer ce qui échappe aux sens… À partir d’un certain moment, cela est visible, Maupassant s’attendrit.

48. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1851 » pp. 1-9

Le matin donc, lorsque, paresseusement encore, nous rêvions d’éditions, d’éditions à la Dumas père, claquant les portes, entrait bruyamment le cousin Blamont, un ci-devant garde du corps, devenu un conservateur poivre et sel, asthmatique et rageur. […] La vieille portière de la rue de Verneuil, une vieille larme de conserve dans son œil de chouette, nous disait : « Messieurs, je lui avais bien dit de ne pas y aller… mais il s’est entêté… on l’a arrêté à la mairie du Xe arrondissement. » Nous voilà à la porte de la caserne d’Orsay, où avaient été enfermés les représentants arrêtés à la mairie. […] — Mais, Messieurs, nous dit assez brutalement la femme qui nous ouvre la porte, vous savez bien qu’on ne dérange pas M.  […] * * * Mardi 23 décembre Assis sur une banquette de l’escalier du théâtre et palpitants et tressaillants au moindre bruit, nous entendons, à travers une porte qui se referme sur elle, Mme Allan jeter de sa vilaine voix de la ville : « Ce n’est pas gentil, ça ! 

49. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre III. Parallèle de la Bible et d’Homère. — Termes de comparaison. »

Considérons ces deux monuments qui, comme deux colonnes solitaires, sont placés à la porte du temple du Génie, et en forment le simple péristyle. […] Ces deux conjugaisons hébraïque et grecque, l’une si simple et si courte, l’autre si composée et si longue, semblent porter l’empreinte de l’esprit et des mœurs des peuples qui les ont formées : la première retrace le langage concis du patriarche qui va seul visiter son voisin au puits du palmier ; la seconde rappelle la prolixe éloquence du Pélasge qui se présente à la porte de son hôte. […] Le grec ne porte qu’une idée politique et locale, où l’hébreu attache un sentiment moral et universel. […] Une noce a des flambeaux, des épithalames, des couronnes suspendues aux portes : une armée, un peuple entier, assistent aux funérailles d’un roi : un serment se fait au nom des Furies, avec des imprécations terribles, etc.

50. (1834) Des destinées de la poésie pp. 4-75

Seulement, de quart d’heure en quart d’heure les deux battants ferrés de toutes les portes de Jérusalem s’ouvraient, et nous voyions passer les morts que la peste venait d’achever, et que deux esclaves nus portaient sur un brancard aux tombes répandues tout autour de nous. […] Nous arrivâmes à la porte d’une cabane basse et à demi cachée par des pans de marbre dégradés, et dont la porte et les étroites fenêtres sans vitres et sans volets étaient construites de débris de marbre et de porphyre mal collés ensemble avec un peu de ciment. […] L’évêque, averti par le bruit de notre caravane, arriva bientôt, et, s’inclinant sur sa porte, m’offrit l’hospitalité. […] On n’apercevait que la porte surmontée d’une ogive vide où pendait la cloche, et quelques petites terrasses taillées sous la voûte même du roc où les moines vieux et infirmes venaient respirer l’air et voir un peu de soleil, partout où le pied de l’homme pouvait atteindre. […] Le drame va tomber au peuple ; il était né du peuple et pour le peuple, il y retourne ; il n’y a plus que la classe populaire qui porte son cœur au théâtre.

51. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

. — Orné par le sacrifice, je viens prendre l’holocauste que je porte aux dieux. […] Hermès le porte, emmaillotté de lierre, aux nymphes de Nysa, qui l’élèvent et qui le nourrissent. […] Le taureau, dont il porte déjà les cornes, est une de ses métamorphoses habituelles. […] Mais Pallas a recueilli le cœur encore chaud du petit martyr ; elle le porte à Zeus, qui en tire un nouveau Bacchus. […] Sacrificateurs ambulants, diseurs de bonne aventure, marchands d’amulettes, de charmes, de remèdes miraculeux, de rites et d’orviétans expiatoires, ils le menaient quêter de porte en porte, comme un vagabond.

52. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Madeleine, Jacques (1859-1941) »

. — La Petite Porte feuillue (1900). […] Pauvre Richesse de la Muse ; je vous ai vu naître, mignonne… et peut-être est là l’un des secrets motifs de la grosse tendresse que je vous porte. […] Pierre Quillard Le Sourire d’Hellas : Un hymne homérique, le huitième, bref comme une épigramme, honore Aphrodite : « … Sur son désirable visage toujours elle sourit et elle porte la désirable fleur ».

53. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIe Entretien. Le 16 juillet 1857, ou œuvres et caractère de Béranger » pp. 161-252

Une armée entière prend position ou poste depuis la porte de la maison jusqu’à la porte de l’éternité, dans le champ des morts. […] Un large et long corridor, sur lequel s’ouvraient des portes nombreuses et uniformes, semblables à des portes de cellules dans les cloîtres d’un monastère ou à des portes d’infirmeries séparées dans un vestibule d’hospice, servait d’avenue à l’appartement du sage. […] La porte en restait toujours ouverte. […] L’air populaire qui court les rues en sortant du Vaudeville, et que les bornes apprennent d’elles-mêmes à force de l’entendre répéter par les orgues ambulants, est un véhicule nécessaire pour porter la poésie narquoise ou politique de porte en porte, comme le facteur quotidien y porte une lettre, à cent mille adresses. […] Quand le navire qui vous porte vogue sur le fleuve, voyez-vous donc toujours le même rivage ?

54. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

Le clocher, en flèche aiguë de granit bruni et moussu par les siècles, porte sa date de 1300 dans ses ogives. […] La paille et le foin débordent çà et là des lucarnes pleines de fourrages ; les portes des étables, des fenils, des basses-cours, s’ouvrent sur le gazon autour du puits ; à côté de la porte des maîtres, les chars de récoltes se chargent et se déchargent sous les fenêtres des chambres hautes ; des sacs d’orge, de blé, de pommes de terre, se tassent sur les marches en spirale du large escalier aux dalles usées par les souliers ferrés des laboureurs ; les vaches paissent sous les groupes de vieux arbres écorcés dans les vergers ; on voit les jardiniers, les bergers, les jeunes vachères, tirer les seaux du puits, emporter les arrosoirs, accoupler leurs bœufs, traire leurs vaches dans la cour qui sert de pelouse à l’habitation ; on y est en pleine rusticité, comme en pleine nature. […] Car j’ai pour les forêts des amours fraternelles ; Poète vêtu d’ombre et dans la paix rêvant, Je vis avec lenteur, triste et calme, et, comme elles, Je porte haut ma tête et chante au moindre vent. […] La terre avec amour porte la blonde enfant ; Des rameaux par la brise agités doucement Le murmure et l’odeur s’épanchent sur sa couche ; Le jour pose, en naissant, un rayon sur sa bouche. […] Tous ceux sur qui le fort met ses pieds triomphants ; Les faibles sont les siens, sa force les relève ; Il porte dans ses mains la grâce et non le glaive.

55. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

Chaque année du siècle porte ses nécessités avec sa date : Louis XVIII et la charte valaient un peu mieux que le comité de salut public et la guillotine en permanence ! […] De là misère, nécessité d’abandonner son enfant, retours de sa pensée vers son pays natal, où cependant elle n’avait d’autre famille que les noms du pays, les rues et les portes des maisons. […] Il hésite à entrer dans le prétoire, il regarde le loquet et la porte derrière laquelle est son éternelle infamie ; il recule, près de faiblir. […] « Il se dirigea vers la porte de sortie. […] On n’a jamais su qui ouvrit la porte, mais il est certain que la porte se trouva ouverte lorsqu’il y parvint.

56. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

lui qui porte sur ses lèvres tout le miel et peut-être le poison du philosophe. […] Il y a de la paille devant les portes. […] Quelques heures après, j’entendis frapper à la porte de ma chambre. […] D’une voix lamentable, il se met à dire : — Porte, ouvre-toi, ô porte hospitalière du Château de la Belle, de la belle reine aux noirs sourcils. […] À la fin, la Dame fit ouvrir la porte.

57. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

Puis, il la distrait par des scènes continuelles, des consignations de gens à la porte, des sacrifices de toutes sortes, et la boude, la gronde, l’insulte, fait amende honorable, puis la réinsulte, — maintenant son adorée, tout le temps, dans l’émotion fiévreuse d’une liaison toujours au bord d’une rupture ou d’une réconciliation. […] Une porte derrière laquelle on entend, pendant plusieurs secondes, des pas avant qu’elle ne s’ouvre. […] Je devais m’introduire chez elle par la porte du potager. […] Il nous emmène chez lui, pour nous faire voir les porcelaines de Sèvres, les tabatières guillochées, les bibelots qu’il touche et retouche avec la fièvre des mains tâtillonnantes d’un enfant, qui aurait hérité d’une boutique de jouets. « Voyons donc, ce service gothique dont on m’a tant parlé dans mon enfance », s’écrie-t-il, et il fait sonner l’argenterie, et il déficelle le linge, et dans les fouilles que ses doigts font au hasard dans les ténèbres des fonds d’armoire, il sort triomphalement à la lumière une bouteille d’eau-de-vie qui porte, oui, qui porte la date de 1789. […] Une porte s’ouvre, et un homme paraît, à la grosse tête carrée, aux gros traits, aux grosses moustaches, à la forte figure des portraits de Frédéric Soulié ; il est en robe de chambre de velours noir, aux grandes manches pendantes d’astrologue.

58. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

Ce petit bruit me porte sommeil. […] c’est bien vrai ; mon cœur n’est pas muet au milieu de ces agonies, et ne sent que plus vivement tout ce qui lui porte vie. […] Un coup de marteau se fait entendre, tout le monde accourt à la porte. […] Celles du dehors, souvent ce n’est pas la peine d’en parler, à moins qu’elles n’aillent retentir au dedans comme le marteau qui frappe à la porte. […] Dieu le sait, et je suis là à la porte de l’avenir, me résignant à tout ce qui peut en sortir.

59. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

Jeudi 18 mars Je trouve aujourd’hui sur la porte de Robert Caze : Porte fermée par ordre de médecin. […] Quand on descend l’escalier, d’une pièce silencieuse, dont la porte est ouverte, tout à coup s’élève une plainte sanglotante de femme, qui nous accompagne jusqu’en bas. […] De son atelier du boulevard de Vaugirard, Rodin nous mène à son atelier près de l’École-Militaire, voir sa fameuse porte, destinée au palais futur des Arts décoratifs. […] Et prenant, au hasard, dans un tas de moulages répandus à terre, Rodin nous fait voir de tout près un détail de sa porte. […] Tout le boulevard devant les bureaux du Gaulois, était plein de juifs, et, à toute minute des coupés, comme on en voit à la porte de l’église Saint-Augustin, jetaient un israélite sur la chaussée.

60. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Gaston Boissier » pp. 33-50

il en a pour forcer la porte de toutes les classes de l’Institut. […] S’arrêterait-il aux bagatelles de la porte ? — Et c’est le mot, ici, puisque le Christianisme va faire son entrée (veut-il nous faire croire) dans le monde, par la porte du paganisme. […] On introduisait chez soi, par la porte dérobée, — (la porte dérobée, c’est vous, qui voulez faire entrer par là le Christianisme dans l’Histoire !)

61. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

On voit les femmes et les jeunes filles sortir à demi vêtues des portes des chaumières, et peigner leurs longs cheveux avec le peigne aux dents de buis qui les lisse comme des écheveaux de soie. […] « Pendant que les troupeaux montent ainsi vers les cimes, on voit briller dans les chaumières, à travers les portes ouvertes, la flamme des fagots allumés par les femmes pour tremper la soupe du matin à leurs maris avant d’aller ensemble à la vigne. […] « Le jeune homme et la jeune femme sortent les derniers de la maison en glissant la clef par la chatière sous la porte ; l’homme tient à la main ses lourds outils de travail, le pic, la pioche ; sa hache brille sur ses épaules ; la femme porte un long berceau de bois blanc dans lequel dort son nourrisson en équilibre sur sa tête ; elle le soutient d’une main, et elle conduit de l’autre main un enfant qui commence à marcher et qui trébuche sur les pierres. […] Elles fermèrent à grand bruit l’une des deux portes de la maison qui ouvrait sur le péristyle ; les chèvres effarouchées les suivirent. […] Les années ne me pèsent pas encore, mais elles me comptent ; je porte plus péniblement le poids de mon cœur que celui des années.

62. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XIV. Parallèle de l’Enfer et du Tartare. — Entrée de l’Averne. Porte de l’Enfer du Dante. Didon. Françoise de Rimini. Tourments des coupables. »

Porte de l’Enfer du Dante. […] Bientôt il arrive à la porte, où se lit la fameuse inscription : Per me si va nella città dolente, Per me si va nell’ eterno dolore : Per me si va tra la perduta gente. […] « L’autre forme, si l’on peut appeler de ce nom ce qui n’avait point de formes, se tenait debout à la porte.

63. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XI. De la littérature du Nord » pp. 256-269

Les poètes anglais qui ont succédé aux Bardes écossais, ont ajouté à leurs tableaux les réflexions et les idées que ces tableaux même devaient faire naître ; mais ils ont conservé l’imagination du Nord, celle qui plaît sur le bord de la mer, au bruit des vents, dans les bruyères sauvages ; celle enfin qui porte vers l’avenir, vers un autre monde, l’âme fatiguée de sa destinée. […] Sans doute les diverses circonstances de la vie peuvent varier cette disposition à la mélancolie ; mais elle porte seule l’empreinte de l’esprit national. […] Elle entretient une rêverie céleste qui fait aimer la campagne et la solitude : elle porte souvent le cœur vers les idées religieuses, et doit exciter dans les êtres privilégiés le dévouement des vertus et l’inspiration des pensées élevées. […] La religion chrétienne, qui, séparée des inventions sacerdotales, est assez rapprochée du pur déisme, a fait disparaître ce cortège d’imagination qui environnait l’homme aux portes du tombeau.

64. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Japonisme » pp. 261-283

Il simula la débauche, l’ivrognerie, à ce point, qu’un homme de Satzuma, le trouvant étendu dans un ruisseau, à la porte d’une maison de thé, et le croyant ivre-mort, lui cria : « Oh ! […] Puis brusquement : Je sors. » Il se dirigea vers la porte. […] Ils enfoncent à coups de marteau la porte intérieure. […] Et je me mis à fouiller mes albums, et je trouvai le recueil qui porte pour titre : Sei tû Guishi deu (Les Chevaliers du devoir et du dévouement), ou le peintre Kouniyoshi nous représente les ronins dans l’action de l’attaque du yashki de Kotsuké : l’un portant une bouteille d’alcool « pour panser les blessures et faire de grandes flammes afin d’épouvanter l’ennemi », l’autre « tenant deux chandelles et deux épingles de bambou pour servir de chandeliers », celui-ci éteignant avec de l’eau les lampes et les braseros, celui-là ayant aux lèvres le sifflet « dont les trois coups prolongés » doivent annoncer la découverte de Kotsuké ; et presque tous dans des poses de violence et d’élancement, brandissant à deux mains des sabres et des lances, et tous enveloppés d’un morceau d’étoffe de soie bleue, avec leurs lettres distinctives sur leurs uniformes, leurs armes, leurs objets d’équipement, et tous ayant sur eux un yatate, écritoire de poche, et dans leur manche un papier expliquant la raison de l’attaque57.

65. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VI. Jules Simon »

Il y a le Dieu de la conscience naturelle que chacun porte avec soi et en soi, comme le sauvage porte son manitou à sa ceinture. […] Platon mettait les poëtes à la porte de sa république avec des couronnes ; le Platon de la maison Hachette veut mettre toutes les religions à la porte de tous les cœurs en se prosternant devant tous les sanctuaires.

66. (1911) Études pp. 9-261

Mais les sentiments que porte cette musique, ont l’élan pur et direct des larmes qu’on ne peut empêcher. […] La volonté qui le porte ne cesse de faiblir et toujours retombe à l’océan des sens. […] Nous nous y évadions, connaissant la porte secrète, et le monde ne nous était plus rien. […] entre ceux de La Porte Étroite, sinon qu’ils s’entendent tous pour rendre de plus en plus sensible le renoncement d’Alissa ? […] La Porte Étroite est l’histoire de deux âmes timides qui font leur bonheur de leur impuissance même à atteindre le bonheur.

67. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

La foule, d’ailleurs, hurlait dans les couloirs, écrasée à des portes closes, et deux pauvres petites danseuses brûlaient dans leurs loges, cernées par l’envahissement de la fournaise. […] Schuré porte un toast et lit une adresse ; un second toast est porté par M.  […]   Les affiches : La première affiche posée sur les colonnes Morris, porte « très prochainement première représentation… » elle est du 21 avril. La seconde porte « mardi prochain 26 avril première… », du 23. […] Il est intéressant de voir que Wagner n’a jamais condamné l’homosexualité et porte même l’amour grec des athéniens au plus haut étant hors procréation, donc «  non égoïste  » dans son texte L’Œuvre d’art de l’avenir publié en 1849 (III-2 chapitre sur la sculpture).

68. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Elle mit son vainqueur à la porte. […] Elle lui montre la porte, elle va lui montrer la fenêtre, lorsque ce bon jeune homme lui demande humblement sa main. […] » dit-elle au valet qui se présente à la porte. […] Si Catherine avait un père ou un frère, ce n’est point par la porte que le baron ferait sa sortie. […] Alors à quoi bon ce siège gratuit, ces mines inutiles, pour s’emparer d’une fortune qui mettra son assaillant à la porte aussitôt qu’il y aura installé le prétendant pour lequel il lutte ?

69. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

Huit jours après avoir publié ce volume, qui devait lui ouvrir les portes de l’Académie française, but mondain de sa vie d’étude, il n’était plus. […] De distance en distance des portes d’allées, souvent solitaires et silencieuses, sur des cours tortueuses au fond desquelles on entrevoit de vieilles portes grillées comme des restes d’anciens couvents, de longues files d’enfants et d’habitants y entrent et en sortent muets, sous la garde sévère d’un homme en robe noire, pauvre troupeau qui se disperse de seuil en seuil, à mesure qu’il s’éloigne de l’école. L’homme noir, ou le chien de garde, regarde alors derrière lui, et, ne voyant plus personne, regagne seul son domicile, referme la porte de la cour et remonte, un livre à la main, dans sa chambre haute. […] Adieu, je vous laisse à votre excellent frère, et je vous confie aux souffles du printemps, que vous allez respirer sur le seuil de sa porte avec ses petits enfants. […] Un chien de boucherie, un chien l’a dévorée         À la porte de ma maison.

70. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1874 » pp. 106-168

On voit les machinistes, qui n’ont pas terminé leur service, se hâter avec des gestes hagards, les yeux fixés sur la porte de sortie. […] En sortant du cimetière, je me suis croisé à la porte, avec Dubois de l’Estang qui, en me donnant la main, m’a dit : « Vous revenez de chez votre frère ?  […] La galerie du bureau porte, entre deux bouquets de violettes artificielles, un minuscule bronze du grand Empereur en César romain. Devant la porte qui mène au lac d’Enghien, un vrai capharnaüm. […] Ces deux grands tableaux, placés aux deux côtés de la porte de sortie, représentent tous deux des paons : l’un est de Philippe Rousseau, l’autre de Monginot.

71. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

» Dante la lit en lettres noires sur la porte. […] « Et moi j’entendis fermer et sceller pour jamais, à l’étage inférieur de la tour, la seule porte par laquelle on y pénétrait, d’où je regardai au visage mes pauvres petits enfants sans révéler d’un mot mon angoisse. […] Ils sont dans l’angoisse muette qui saisit le père jusqu’à le pétrifier au bruit inusité des verrous de la porte basse qu’on scelle et qu’on rive pour jamais. […] Ils sont dans ce silence des deux jours et des deux nuits suivantes, où les cinq victimes se taisent de peur que le son de leur voix ne porte un coup de plus au cœur les uns des autres. […] M. de Chateaubriand lui-même, dans son poème chrétien des Martyrs, cite l’autorité des Pères de l’Église pour expliquer en ce sens l’éternité des peines et pour effacer de la porte de l’enfer ce vers infernal du Dante : Abandonnez toute espérance, vous qui entrez !

72. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVIII. La bague aux souhaits »

Vous y trouverez porte close, mais cela ne fait rien ! […] Le chat est parti avec le chien qui reste à faire le guet devant la porte. […] Le chat se place près du lit et le chien devant la porte à l’intérieur de la case.

73. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

N’y a-t-il pas une Providence derrière la porte ? […] On peut mourir de faim à la porte des palais, jamais à la porte des chaumières. […] Sa mauvaise mine et son air de loup parqué lui font fermer toutes les portes : c’est naturel ; à qui s’en prendrait-il ? […] Azaël, l’ange mahométan du sépulcre, eût rebroussé chemin, et eût cru se tromper de porte….. […] Si la maison ne payait pas, il faudrait en forcer les portes pour loger les dix millions de prolétaires qui n’en ont pas, pour abriter leur famille, car c’est l’impôt payé par le propriétaire de murailles, de portes et de fenêtres, qui sert à salarier le travail du prolétaire, et qui lui permet de payer son loyer sans faire violence à personne.

74. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Peu de jours après, Alphonse vint en effet ouvrir lui-même la porte au poète, et, pour hâter sa convalescence, il l’envoya, libre et suivi d’amis et de médecins, dans son délicieux palais d’été de Bello Sguardo. […] Tout porte à croire qu’elle fut favorisée par la tendre pitié de Léonora et de sa sœur, la bonne duchesse d’Urbin, qui n’eurent qu’à faire fermer les yeux aux deux domestiques du palais. […] C’est dans ce costume, que sa barbe négligée et son teint hâlé par le soleil rendaient plus complet et plus vraisemblable, qu’il arriva enfin quelques jours après à la porte de sa sœur. […] À l’entrée était un salon assez grand et presque carré ; deux portes à droite et deux portes à gauche conduisaient à différents appartements ; la même disposition était répétée dans les autres étages. Vis-à-vis de la porte par laquelle nous étions entrés, il se trouvait une autre porte qui donnait sur un escalier par lequel on descendait dans une cour autour de laquelle régnaient les offices et les chambres des domestiques.

75. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Seconde partie. » pp. 35-56

Or, l’homme de Lettres amoureux dès l’enfance, de tout ce qui porte l’empreinte de la pensée & du sentiment, s’éclaire à la lumiere de l’une, & s’échauffe à la douce chaleur de l’autre. […] Là, tu me réprésentes les esprits de révolte étendus sur le lac enflammé ; leur Chef porte sur son front cicatrisé l’empreinte de la foudre ; j’entends les blasphêmes respectueux qu’il vomit dans son audace, aussi étonnante que coupable ; soudain tu me ravis aux Cieux, je vois les légions aîlées qui entourent le trône de l’Eternel ; il parle, tout s’ébranle ; les milices du Dieu vivant s’élancent pour venger sa puissance outragée. […] Je les vois tomber dans le gouffre immense de la désolation ; j’entends les portes de l’effroyable abîme se refermer pour jamais, & je te vois un instant près du vainqueur, couronné des rayons de sa gloire, & environné de l’éclat de mille Soleils. […] Aimable imagination, souveraine de nos esprits, dès qu’on se livre à ton vol enchanteur, l’infortune fuit, les rayons de l’espérance dorent la perspective du bonheur ; l’homme de génie échauffé par toi, se trouve dans son malheureux destin au-dessus de ses revers, & même il les oublie ; il porte en lui un trésor que ne peut lui arracher la Fortune : Animé d’un feu céleste, il exerce sa pensée, elle se repose sur les objets les plus sublimes ou les plus rians, & l’image de ses maux est effacée. […] Chantre de Tancrede & d’Armide, je te suis dans tous les lieux où t’entraîne le destin le plus bizarre, je vois le charme de la Poësie, comme un baume vivifiant, ranimer ton ame flétrie par la douleur ; tu braves le sort & les ennemis en te jettant dans les bras des Muse ; la mort s’avance & tu ne l’apperçois pas ; ton œil ne se porte que vers l’immortalité.

76. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XV, l’Orestie. — les Choéphores. »

Oreste, Electre, le Chœur ne cessent de converser avec lui, comme on parle du dehors, à travers la porte, à un homme enfermé dans sa maison close. […] » — « Ne laisse point périr en nous la race de PéIops : ainsi tu vivras, bien que tu sois mort. » — « Les enfants sauvent la renommée du père qui n’est plus, pareils au liège qui porte le rets et l’empêche de s’enfoncer dans l’abîme. » Cette fois l’Ombre est assurément réveillée ; sortie du sépulcre, elle enveloppe son vengeur ; le spectre ne fait plus qu’un avec le vivant. — Avant d’agir, Oreste veut savoir pourquoi ces libations envoyées au mort, « don misérable si fort au-dessous du crime ». […] — résonne comme un marteau d’airain sur une porte d’où des condamnés vont sortir. […] La mort l’attend debout derrière la porte où il l’a embusquée dix années avant : Égisthe entre et il est frappé. […] Les portes rouvertes, deux cadavres étalés sous les yeux du peuple ; devant eux, le meurtrier arborant son glaive : rien ne manque à cette copie vengeresse.

77. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Sternay, qui se porte à la députation, voit dans ce fils arrivé un protecteur donné par la nature, et c’est lui maintenant qui sollicite humblement la faveur de le reconnaître. […] Toutes les portes du succès et de la faveur s’ouvrent, à deux battants, devant lui. […] Quand on entre dans le paradis, on laisse à la porte les ressentiments et les haines. […] Nous apprenons, à l’acte suivant, que Clara Vignot doit ses cinq cent mille francs, et la terre de Boisceny, dont son fils porte le nom, à ce personnage élégiaque. […] Il a cinquante ans, mais il porte haut sa tête grisonnante, que l’âge semble poudrer plutôt que blanchir.

78. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

De même que dans un des derniers tableaux de Gérôme au Salon, en voici un tas, comme à la porte d’une mosquée. […] Renan, dont une femme d’esprit disait : « Dieu s’est vengé de lui par avance, en lui donnant sa figure », mais, comme les pages, il porte les queues… Cette fois, c’est celle de Platon, dans la forme extérieure de son livre, en attendant qu’il porte celle de bien d’autres dans le courant de ce même livre, répétition d’idées connues, mais qu’il renouvelle, çà et là, par une hardiesse d’absurdité ineffablement supérieure. […] Renan tire tant sur celles qu’il porte, qu’il les fait grimacer et les rend ridicules et grotesques… Jusqu’alors, M.  […] Les gens de son Institut lui trouvaient du goût littéraire assez pour entrer à la porte à côté, dans l’autre Académie. […] Renan, qui porte toutes les queues humaines, porte celle du diable par-dessus toutes les autres. « Quand vous aurez mangé de ce fruit-là, vous serez comme des dieux ! 

79. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

Son talent se porte bien ; seulement, je lui trouve un peu de sécheresse. […] C’est l’Archange de feu blanc qui tient à la main le glaive de feu rouge que tenait l’autre Archange à la porte du Paradis, quand Dieu en chassa Adam et Ève. Il a gardé l’Église et ses portes comme l’autre les portes du Paradis.

80. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Hallé » p. 199

Sara écoute derrière une porte. […] Et cette figure mesquine de femme derrière la porte, c’est une servante que vous ne me ferez jamais prendre pour une Sara.

81. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

La calèche s’arrêta devant la porte. […] Le forestier conduisit mon cheval jusqu’au perron, et frappa à la porte. […] Puis, il s’approcha de la porte : mais il s’arrêta et se retourna de mon côté. […] Il sortit en tirant avec force la porte après lui. […] Le seuil de la porte est ordinairement très-haut.

82. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

Dès le 7 octobre 1789, la reine, à peine installée aux Tuileries, lui écrivait, comme si sa lettre pouvait être vue, ou du moins dans une intention évidente de le rassurer : « Je me porte bien, soyez tranquille. […] Je me porte bien, et malgré toutes les méchancetés qu’on ne cesse de me faire, j’espère pourtant ramener la partie saine et honnête de la bourgeoisie et du peuple. […] À la porte de Paris, M.  […] L’assassinat est à nos portes. […] Pourquoi, d’ailleurs, dans aucun des deux recueils, chaque lettre imprimée ne porte-elle pas avec elle l’indication précise de la provenance et du lieu où l’on pourrait, à la rigueur, vérifier sur l’original ?

83. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

J’habitais porte à porte avec un jeune médecin rue Mazarine, et depuis six mois, presque tous les soirs, nous philosophions ensemble. […] Je vois d’ici la scène ; les gens frappaient à la porte de M.  […] Leur doctrine porte l’empreinte de leurs facultés ; leur méthode manifeste leur genre d’esprit. […] L’action de la volonté ne porte point sur le muscle, mais sur le cerveau ; l’objet de la volonté n’est point le mouvement du muscle, mais la sensation musculaire. […] La nature apparaît telle qu’elle est, comme un ensemble de faits observables, dont le groupement fait les substances, dont les rapports fondent les forces ; et la science, ramenée dans le lit où elle coule depuis deux siècles, se porte entière et d’un élan vers son terme unique et magnifique, la connaissance des faits et des lois.

84. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « Mme DESBORDES-VALMORE. (Pauvres Fleurs, poésies.) » pp. 115-123

Si votre livre au temps porte une confidence, Vous n’en redoutez pas l’amère pénitence ; Votre vers pur n’a pas comme un tocsin tremblant ; Votre muse est sans tache, et votre voile est blanc ; Et vous avez au faible une douceur charmante ! […] Témoin des troubles civils de Lyon en 1834, Mme Valmore a pris part à tous ces malheurs avec le dévouement d’un poëte et d’une femme : Je me laisse entraîner où l’on entend des chaînes ; Je juge avec mes pleurs, j’absous avec mes peines ; J’élève mon cœur veuf au Dieu des malheureux ; C’est mon seul droit au ciel, et j’y frappe pour eux Elle frappa à d’autres portes encore ; et son humble voix, enhardie dès qu’il le fallut, rencontra des cœurs dignes de l’entendre quand elle parla d’amnistie. Qu’on lise la pièce qui porte ce titre, et celle encore qu’elle a adressée, après la guerre civile, à Adolphe Nourrit à Lyon, à ce généreux talent dont la voix, née du cœur aussi, répond si bien à la sienne : cela s’élève tout à fait au-dessus des inspirations personnelles de l’élégie.

85. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 18, que nos voisins disent que nos poëtes mettent trop d’amour dans leurs tragedies » pp. 132-142

De là sont nées les extravagances de tant d’amans dont la plûpart n’étoient point amoureux ; les uns se sont fait assommer en écrivant le nom des belles qu’ils pensoient aimer sur les murailles des villes assiegées ; d’autres sont allez de vie à trepas pour avoir voulu rompre dans les portes d’une ville ennemie leur lance enrichie des livrées d’une maîtresse qu’ils n’aimoient point, ou qu’ils n’aimoient gueres. […] Un autre s’est mis au hazard de se rompre vingt fois le col, parce qu’il trouvoit plus galand de se guinder à l’aide d’une échelle de corde dans l’appartement de sa femme, que d’y entrer par la porte. […] Telle est l’églogue de Virgile qui porte le nom de Gallus.

86. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

À propos de la rentrée de Chelles, en courant, au troisième acte, il dit : « Ils ne sont pas observateurs pour un sou, on court au chemin de fer, mais quand on l’a manqué, on revient tout lentement. » Et encore à propos des portes, qu’ils ne ferment jamais : « Ils sont toujours des élèves de la tragédie, des gens qui ont grandi dans des maisons, où les portes se ferment par procuration. […] Elles nous ont jeté à la porte du théâtre, où certainement nous aurions fait quelque chose, et quelque chose de neuf ; elles ont tué mon frère, — et ces haines ne sont pas désarmées. […] Et l’on soupe au milieu d’une douce gaîté, et de l’espérance de tous que mon succès va ouvrir à deux battants la porte au théâtre réaliste. […] Il est vêtu d’une redingote à jupe, qui lui fait des hanches, comme s’il avait une crinoline, et porte un pantalon de laine blanche, qui semble un caleçon de molleton à sous-pieds. […] La barricade prise, il la relève, et la porte lui-même à l’ambulance, et s’intéressant à la blessée, va la voir tous les deux ou trois jours.

87. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Mais ils se parlent à travers les portes fermées. […] Le vieillard s’est décidé à frapper à la porte de la maison. […] Maeterlinck ; et, quand ce n’est pas un mur, c’est une porte ; et, quand ce n’est pas une porte, c’est une fenêtre voilée de rideaux… Dans la Mort de Tintagiles, il y a deux portes. […] Elle arrive devant la porte de fer. […] La vieille juive, indignée, mec l’ivrogne à la porte.

88. (1880) Goethe et Diderot « Introduction »

c’était nous-mêmes qui lui avions ouvert nos portes. […] Cousin, ce grand indigent philosophique, qui avait demandé l’aumône à la porte de la philosophie écossaise, la demanda à la porte de la philosophie allemande, et Hégel lui donna ; et ce fut Cousin, lui plus que personne (était-ce de reconnaissance ?) […] Immédiatement justice fut faite, et la porte du journal où il écrivait fut fermée à l’auteur de l’article, pour avoir manqué, dans l’auguste personne de Gœthe, à la littérature française et au gouvernement français3 !

89. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « José-Maria de Heredia »

Je sais bien que José-Maria de Heredia a composé beaucoup de vers que je pourrais citer et dans lesquels il a su mêler au marbre impassible de Gautier une veine de sentiment superbe que Gautier ne connut jamais, — la veine rouge de la fierté humaine, — mais il n’en est pas moins certain que l’ensemble des poésies de ce poète, qui a cette noble veine, porte la trace ou le souvenir d’une admiration que je ne voudrais pas voir dans ses œuvres pour le grand pétrificateur de la poésie passionnée. […] Mais il n’est point, d’après le commun proverbe, de porte de fer que ne brise un marteau d’argent. […] Une porte s’ouvre. […] Les ruffians de Séville, dit Ambrosio de Salazar, dans son Miroir général de la Grammaire, ont toujours été réputés vaillants mâles, plus lestes qu’aucun moine à expédier un chrétien avec le viatique d’un blasphème et du sang frais en guise d’huiles saintes. » Voilà la manière de José-Maria de Heredia, — de ce peintre qui ne porte pas pour rien, comme vous voyez, un nom espagnol.

90. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Dans une époque comme la nôtre, sans force de principe et sans force de volonté, je sais bien que ce misérable type d’homme ou de femme à deux amours, indésouillable du premier, ayant pris corps avec cette fange, est le type commun et presque universel ; que c’est le cri du sang, de ce sang que nous avons gâté, et que de son temps tout romancier, qui en porte le joug comme un autre homme, peut jeter ce cri à son tour ! […] peut-être : les imitateurs, qui cherchent leur vie à toute porte finissent bien toujours par trouver quelqu’un ou quelque chose à imiter. […] Le livre qu’il publie aujourd’hui ne porte pas ce nom de L’Illustre Docteur Mathéus pour marquer un ensemble commun de récits, reliés sous une idée qui les embrasse dans un but unitaire de composition, mais tout simplement L’illustre Docteur Mathéus est la plus grosse pièce du recueil. […] Avoir fait d’Hoffmann et d’Edgar Poë une combinaison honnête, avoir fait d’Hoffmann, l’halluciné de fumée de pipe, le nerveux suraigu, le labes dorsal qui vécut des années avec une moelle épinière à feu, et d’Edgar Poë, plus étonnant encore, d’Edgar Poë, l’ivresse la plus noire et la plus rouge qui se soit allumée jamais dans une tête humaine sans la faire éclater, le mangeur d’opium arrosé d’eau-de-vie, le delirium tremens devenu homme jusqu’à ce que l’homme fût entièrement tué par le delirium tremens, faire de ces deux puissants génies malades une petite créature qui ne se porte pas trop mal, et qui nous trempe l’esprit comme une mouillette dans une mixture… sans inconvénient, n’est-ce pas un début magnifique ?

91. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Il entra donc avec son écuyer. — Ayant franchi les portes de métal, ils se trouvèrent devant une grande porte de cristal. […] L’édition qu’il place en tête est de Leipzig, 1602, in-4°, mais elle porte sur le titre : Neulich gedruckt zu Leyden. […] C’est ainsi que porte l’imprimé ; le manuscrit a Wanbanbourg. […] Meisel (2e éd., Pest, 1860), 21e porte. […] Dans l’édition donnée à Paris en 1824 par la Société des Bibliophiles, ce conte porte le n° XX.

92. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Il dîne bien ; un laquais vient lui dire qu’on le demande ; il descend, va à la porte et trouve trois messieurs garnis de cannes qui lui régalèrent les épaules et les bras gaillardement. […] Mais en voici bien d’une autre : le mort avait déposé, avant de mourir, son testament aux mains de M. de Sacy, avocat au Conseil, avec un autre papier cacheté, et la suscription du testament porte qu’il sera ouvert en présence de ses créanciers. […] Du reste, je ne sais point encore comment les portes fermées se sont rouvertes… » Les portes s’étaient, en effet, rouvertes à Montesquieu. […] Le pauvre Marais n’y entend plus rien, et ce brusque revirement l’intrigue : « On m’a assuré que le président de Montesquieu est rentré à l’Académie ; je ne sais par quelle porte… Aurait-il désavoué ses enfants ?… » Montesquieu n’avait rien désavoué ; il était rentré par la grande porte du mérite, et du droit du génie, déjà visible à tous et manifeste dans sa personne.

93. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Je la consacre comme une libation solennelle à l’aurore du jour. » Il porte la coupe à ses lèvres. […] Tourne maintenant, du haut de ces sommets, les regards vers la ville ; hors de la sombre porte, toute une foule variée se penche ; chacun veut s’ensoleiller aujourd’hui. […] Il entre, suivi de Wagner et du chien, par la porte sombre de la ville. […] S’il se montre à la porte, il a toujours l’air si ricaneur et presque fâché. […] Il porte écrit sur son front qu’il ne peut aimer personne.

94. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

» On ouvre la porte du cabinet de Thierry, fermé à double tour, et sans une minute de discussion, ni débat, sans un bruit de voix en notre faveur, nous entendons les boules tomber, et par une porte entr’ouverte sur le corridor, nous voyons tout le comité disparaître avec un bruit de pas qui se sauvent. Presque aussitôt, la porte se rouvre, Thierry entre muet, plus pénétré de componction qu’un aumônier qui entre dans la cellule d’un condamné à mort, à cinq heures du matin, et il nous nasille : « Messieurs, j’ai le regret de vous annoncer que vous êtes reçus à correction. » Et il ajoute : « Oh ! […] Edmond ouvre la porte, me tend une dépêche : « Accepté 48 000. […] La porte de la grille était entr’ouverte. […] 2 novembre Un roulement, deux voitures à notre porte.

95. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Il se jeta alors sur moi, plus furieux encore ; mais cette arme, que je tenais assez haut, partit d’elle-même, et la balle, ayant frappé l’arc de la porte, rebondit sur sa tête, et l’étendit par terre. […] Comme je me défendais vivement, peu à peu ils se retirèrent en disant en français : “C’est un brave Italien, et ce n’est pas celui que nous cherchions ; car il ne porte rien avec lui.” […] Je trouvai la porte entr’ouverte ; je le vis avec une épée et un poignard à son côté, assis auprès de sa belle et de sa mère, et j’entendis qu’ils parlaient de moi. […] Il choisit Benvenuto pour fortifier les portes principales de Florence. […] Nous nous accordâmes si bien que mon travail fut beaucoup mieux fait à cette porte qu’à l’autre.

96. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Ma douleur regarde la mort, Car l’espoir a fermé sa porte Et tristement, le vent du Nord Souffle sur ma chandelle morte. […] Ce sont tes frères les Espoirs, Qui heurtaient à la porte au travers de la haie, Les doux-venants de l’aube gaie, Les fiancés de la Belle Dame de Tyr, Les favoris de la Dame folle et gaie Qui s’accoudait au balcon pour les voir. […] Ce sont tes frères les Souvenirs ; Ils marchent sur des feuilles mortes Et portent des miroirs où leurs faces pâles Se confrontent à d’autres faces, les mêmes et plus pâles, Ils savent tous les coins des vieux jardins et les ombres, Et les clefs de toutes les portes Et l’âtre doux en reflet aux dalles, Et la maison filiale d’aïeules graves, Et d’autres qui teillaient le chanvre sur les portes Auprès de celles qui sont mortes. […] M. de Régnier symbolise encore d’une plus subtile manière : ses œuvres éclairent souvent de vastes décors, en cohésion parfaite avec ce qu’ils contiennent et, comme dans les rêves les personnages des tentures descendus auprès de nous, de grandes figures paraissent s’en détacher à peine, et s’y mouvoir selon une tranquille noblesse qui porte en soi toute l’harmonie. […] Chante de ta voix qui porte Le message de tout amour Car tu diras le chant des fastes Si tu dis ton intime émoi : Il n’est pas de fatals désastres, Toute la défaite est en toi.

97. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXI » pp. 338-354

Elle lui écrivait d’Anvers, le 18 avril 1674100 : « Madame, notre voyage a été fort heureux, et le prince se porte aussi bien que la marquise de Suger, tous deux également inconnus, tous deux très fatigués, tous deux fort surpris de ne pas trouver ici vos ordres. […] Je me porte bien101. » C’est dans le même temps qu’eut lieu un premier don de 100 000 fr. fait par le roi à la gouvernante. […] Viette pour en aller visiter une104… »« M. le comte de Vexin se porte un peu mieux, le duc du Maine fait pitié. […] Je me porte fort bien.

98. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1852 » pp. 13-28

Ce vieillard à la tête où il y a du cabotin et du conventionnel, porte un col large, rabattu à l’enfant, une cravate chamois à bouquets roses et verts, et une chaîne de montre s’échappe de son gilet pour se perdre dans la poche extérieure d’une redingote vert bouteille, pendant qu’une de ses mains ornée d’une bague en turquoise, pose sur un manteau plié sur ses genoux, un manteau raisin de Corinthe. […] » Et nous reconduisant jusqu’à la porte de son cabinet, il nous dit : « Voyez-vous, jeunes gens, il ne faut pas trop, trop de conscience !  […] Dans ce mur fruste, une porte à la sonnette de tirage cassée, dont le tintement grêle éveille l’aboiement de gros chiens de montagne. […] Il nous fait traverser les grandes pièces du rez-de-chaussée, décorées de peintures sur les murs représentant des vues locales : la porte d’Auteuil en 1802.

99. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers populaire  »

Le marié la prend, Dessus son lit la porte, Ô beau rossignolet, Le marié la prend, Dessus son lit la porte. […] Celui de ma mie, le mien, Celui de l’enfant qu’elle porte, Ô beau rossignolet, Celui de ma mie, le mien, Celui de l’enfant qu’elle porte.

100. (1860) Ceci n’est pas un livre « Le maître au lapin » pp. 5-30

Il avait déjà levé le loquet de la porte, il allait emménager, lorsque le propriétaire, qui bêchait non loin de là, accourut en sacrant. […] Tout, depuis les trois arbres morts jusqu’au squelette, révèle cette science inouïe d’observation que j’ai déjà signalée ; tout, depuis l’homme affaissé et les diables guillerets jusqu’à cette chauve-souris qui se noie, tout porte l’empreinte d’une merveilleuse habileté de main autant que d’une pensée philosophique profonde. […] Un chariot immense porte entassés pêle-mêle les blessés, les mères et les petits suspendus aux mamelles des mères. […] Lorsqu’un talent aussi rare est ignoré, n’est-ce pas un devoir pour le premier qu’un hasard amène sur le seuil désert de l’artiste d’ouvrir sa porte toute grande aux admirations publiques ?

101. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

Seulement, cette fois, au lieu d’escalader nuitamment les balcons pour photographier — à travers les persiennes — les intérieurs d’alcôve, il se contente de glisser son regard par les fentes des cloisons et les entrebâillements des portes. […] Prudhomme en lisant Daniel ; et, si ça continue, je refuse l’impôt des portes et fenêtres. […] -J. ou Mousqueton, qui se dirigeait vers la porte, M.  […] Il tournait déjà le bouton de la porte, lorsque, faisant tout à coup volte-face : — Un conseil, mon cher Calino : prenez bien garde de faire du bruit en dormant — de peur de vous réveiller !

102. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

II Comme Saint-Maur, dont il doit être, à bien peu d’années près, le contemporain, Achille du Clésieux porte aussi sur son front la flamme, l’inextinguible flamme de 1830. […] Byron, accusé d’être immoral par tous les Tartuffes de l’Angleterre, n’admettait pas les esthétiques athées que nous admettons très bien maintenant, et qui, moins polis que Platon, jettent, sans couronne, la morale à la porte de la poésie. […] il en est si près, que le critique, très bienveillant pour l’auteur, dont j’ai parlé en commençant,  Armand de Pontmartin, estime que l’amant d’Armelle, ce héros de la vie privée, qui a ses héros comme la vie publique, diminue, dans l’intérêt que lui porte le lecteur, précisément de ce qui fait son héroïsme… Oui ! […] Il porte, d’une main qui ne laisse rien déborder, cette coupe de larmes… Et elle est pleine jusqu’aux bords !

103. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Laurent Tailhade à l’hôpital » pp. 168-177

Par les portes ouvertes, on voit des mains crisper furieusement les draps ; une toux obstinée claque dans un coin ; une porte s’ouvre ; un infirmier, les manches retroussées, passe dans un courant d’air, en sifflotant, et, par les hautes fenêtres, le soir tombe en pluie de cendres… Tout à coup, un charme, une grâce, un rayon. […] Quand le jour tombe, les alcarazas se balancent, tout embués, aux fenêtres, le ciel verdit, la paix descend, et les amoureux s’embrassent la bouche derrière les portes… » Et encore : « Sur la route qui va vers la fontaine, on se promène les jours d’orage après la pluie ; les cailloux brillent, les pas résonnent réguliers.

104. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

Je sais que toute fausse opinion se trouve condamnée à l’avance, qu’elle porte en elle le principe de sa corruption, que sa substance même est mortelle, qu’elle se dissipera comme une cendre aux vents. […] Combien je sens qu’ils s’appliqueront à s’emparer de nos pensées, et à prendre enfin cette riche aptitude qui nous porte à être extasiés, perpétuellement, ici et là, au sujet d’une coquille marine, d’une belle demoiselle dénouant sa ceinture, ou bien d’un rouge grain de grenade. […] L’admiration me porte vers celui-ci, et je voudrais qu’elle me menât vers celui-là.

105. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

« À la nuit tombante, la porte à claire-voie est remplacée par une porte pleine. […] Le peuple se tuait à la porte des boulangers, tandis que certaines personnes allaient chercher sans émeute des pâtes d’Italie chez les épiciers. […] À cinq ans je m’envolais dans une étoile, à douze ans j’allais frapper aux portes du sanctuaire. […] En pensant qu’elle pouvait se rappeler ma figure, je voulus m’enfuir ; il n’était plus temps, elle apparut sur le seuil de la porte, nos yeux se rencontrèrent. […] Chez une maîtresse de maison, cette façon d’agir atteste un manque d’éducation ou son mépris pour celui qu’elle met ainsi comme à la porte du discours ; mais ce fut embarras chez la comtesse.

106. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Un homme ou une bête qui porte l’Etat dans sa tête peut-il être autre chose qu’imposant et sévère ? […] Le lendemain on dresse le catafalque, et l’on porte le corps à Saint-Denis. […] comme doit être un ours. » Et promptement il tranche la controverse en mettant les gens à la porte. « Te déplais-je ? […] Si vous n’êtes contents, Nous rendrons à chacun son argent à la porte. […] Cela touche au vif l’homme qui, pour rendre son âne « plus frais et de meilleur débit », l’a lié par les pieds et le porte comme un lustre.

107. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

Où voulez-vous encor que je porte mes pas ? […] À droite, la porte de la chambre à coucher de Kitty Bell. Au fond, une grande porte vitrée : à travers les petits carreaux on aperçoit une riche boutique ; un grand escalier tournant conduit à plusieurs portes étroites et sombres, parmi lesquelles se trouve la porte de la petite chambre de Chatterton. […] Elle porte la main à son cœur. […] Il porte la main à sa tête.

108. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

C’était au mois de février ; elle avait mouillé ses souliers de soie puce en descendant dans la neige à la porte de l’hôtel. […] Cet entretien aparté se prolongeait un peu plus que la bienséance ordinaire ne l’autorise, le pied sur le seuil entre les deux portes. […] Je restai debout entre les deux portes, d’où l’on voyait à la fois les deux pièces pleines de spectateurs silencieux ou bourdonnants. […] Quel est donc, entre nous, le motif vrai qui vous porte à décliner de si hautes avances, et qu’attendez-vous donc de mieux ? […] Je me levai enfin pour me retirer ; il me suivit, en me retenant par le pan de mon habit, jusque vers la porte.

109. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Voici l’histoire de Gerson : Jean-Charles de Gerson, né au commencement du quinzième siècle, était né à Gerson, dont il porte le nom. […] On dirait qu’on écoute aux portes du ciel et qu’on entend les chuchotements de l’esprit à travers le grand murmure des sphères. […] La nature a toujours pour fin de se satisfaire elle-même, et la grâce nous porte toujours à nous faire violence. […] et ferme la porte de tes sens, afin que tu puisses entendre ce que le Seigneur ton Dieu dit en toi. […] Il porte son fardeau sans en sentir le poids, et rend doux ce qu’il y a de plus amer.

110. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Mais il y eut une poussée à la porte de la rue. […] » crie-t-elle à son amant à chaque nouveau coup qu’elle lui porte. […] Et sans attendre de réponse, il se dirigea vers la porte. […] À la fin Monpavon, impatienté, marcha droit à une porte, la seule qu’ils n’eussent pas encore ouverte. […] Quand la chambre fut pleine, la porte se referma, et Bagrianof se mit brusquement sur son séant.

111. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

L’ingratitude porte malheur aux rois comme aux peuples. […] Sa porte que je salue toujours d’un sourire reconnaissant au coin de la rue Bellechasse et de la rue de Lille, vis-à-vis de la Légion d’honneur, fut la première porte par laquelle j’entrai dans le monde. […] Royer-Collard me prit à part dans l’embrasure d’une des douze portes et me fit signe qu’il désirait s’entretenir avec moi en particulier. « J’ai cru remarquer, me dit-il, que vous vous éloignez de moi avec une certaine réserve. […] Il parut alors changer de principes en changeant de rôle : il émigra, non pas pour combattre son pays, mais pour se réfugier dans les larmes de ceux qui, en voulant faire beaucoup de bien, ont ouvert la porte à beaucoup de mal.

112. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

Le théâtre italien de l’Hôtel de Bourgogne montre un goût tout particulier pour la peinture des coutumes locales : il donne des pièces sur les Promenades de Paris58, sur les Bains de la Porte Saint-Bernard59. […] L’été, les dames de Paris dirigent de préférence leurs promenades vers la Porte Saint-Bernard, c’est-à-dire sur les bords la Seine, où les Parisiens se changent en tritons, où les dames elles-mêmes se livrent au plaisir de la natation sous des tentes closes, où les bateliers offrent aux compagnies joyeuses leurs bachots pour aller aux Carrières, à l’Épée-Royale ou au Port-à-l’Anglais. […] Le mardi 4 mai 1697, M. d’Argenson, lieutenant-général de police, en vertu d’une lettre de cachet du roi à lui adressée, et accompagné d’un nombre de commissaires et d’exempts et de toute la robe courte, se transporta à onze heures du matin au théâtre de l’Hôtel de Bourgogne et y fit apposer les scellés sur toutes les portes, non seulement des rues Mauconseil et Française, mais encore sur celles des loges des acteurs, avec défenses à ces derniers de se présenter pour continuer leurs spectacles. […] Les Bains de la Porte Saint-Bernard, comédie en trois actes, par Boisfranc, 12 juillet 1696. […] Les Bains de la Porte Saint-Bernard, acte III, scène ii.

113. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

» annonça d’une voix aiguë un petit cosaque aux joues rouges, apparaissant derrière la porte. […] » dit Antoine à une petite fille de deux ans qu’il porte sur les bras. […] En bas, la porte du balcon était restée ouverte. Lavretzky s’assit sur un banc de bois, s’accouda et se mit à regarder cette porte et la fenêtre de Lise. […] Elle se détacha de la porte et entra au jardin.

114. (1933) De mon temps…

Il est coiffé d’un feutre et porte au col son habituel foulard de soie blanche. […] Elles s’achevaient ordinairement par d’interminables conduites et reconduites de porte à porte qui les prolongeaient fort tard, mais je ne craignais pas alors les rentrées matinales et j’acceptai la proposition. […] Ouvrons une des portes qui s’offrent à nous et pénétrons dans le bureau où elle donne accès et qui est meublé de casiers et d’armoires. […] La séance commence ; mais la porte s’est ouverte, quelqu’un entre. […] Le mal qui l’a défiguré, et dont son visage porte les traces l’a isolé dans une docte et sévère retraite.

115. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

Quoique l’auteur ait dit dans une note que ce portrait est le seul qui s’applique réellement à une personne déterminée, je ne saurais croire que le portrait d’Ismène ou de la beauté sans prétention, à qui il n’a manqué pour être célèbre que de mettre enseigne de beauté ; que celui de Glycère, la femme à la mode, et qui « s’est fait jolie femme il y a vingt ans sans beauté, comme on se constitue homme d’esprit sans esprit, avec un peu d’art et beaucoup de hardiesse » ; — je ne puis croire que le portrait d’Herminie si entourée, si pressée d’adorateurs, si habile à les tenir l’un par l’autre en échec, et qui n’aime mystérieusement qu’un seul homme sans esprit, sans figure, qui n’est plus jeune, qui se porte très bien toutefois, et qui est… son mari ; — que le portrait d’Elvire, la femme de cinquante ans, qui s’avise soudainement d’un moyen de se rajeunir en s’attachant à un homme de soixante-quinze ; — que tous ces portraits si nets et si distincts n’aient pas eu leur application dans le monde d’alors. […] L’aspect des monuments le porte à la réflexion, ranime ses désirs de gloire et réveille aussi sa sensibilité en lui rappelant la multitude des races disparues. […] Il veut que les causes aient été purement et simplement politiques : On pourrait comparer, dit-il, la Constitution de la France à un vaste édifice dont on a laissé tous les abords ouverts : peu importe qu’on soit entré par une porte ou par une autre pour en dévaster l’intérieur ; on y aurait toujours pénétré du moment où la surveillance en avait été abandonnée à des gardiens négligents ou infidèles. — Un homme est-il assassiné chez lui par un voleur, dit-il encore, le principe de ce crime est l’avidité des richesses ; la cause de l’événement, le voleur ; et si la porte de la maison se trouve ouverte, elle a été l’occasion favorable à l’assassin. […] Je fais un mémoire, un calcul, une combinaison comme un poète fait des vers, et, comme lui, je parais inepte, si je ne suis pas en verve… Ma conversation est très variée, parce que rien ne remplit en général mon esprit et ne me porte à m’appesantir sur les objets. […] [NdA] Comme pendant et contrepartie de cette idée qu’on doit faire peu de confidences à l’âge où l’on vieillit et où l’on perd, M. de Meilhan avait dit, une autre fois, avec beaucoup de justesse : « L’homme a besoin, quand il est jeune, de se répandre ; il se plaît à faire des confidences ; il ne se connaît pas et se croit un être curieux et rare ; il n’a pas enfin la force de garder son secret, et la présomption le porte à croire qu’il inspire un intérêt sincère qui le fera écouter avec plaisir. »

116. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Note »

Victor Hugo ne fermait jamais sa porte, même pendant ses repas. […] Or, précisément, je demeurais porte à porte, et sans le savoir, près de Victor Hugo, non pas encore rue Noire-Dame-des-Champs, mais bien rue de Vaugirard.

117. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Dans ce salon, qu’il faudrait peindre, où tout dispose à ce qu’on y attend, dont la porte reste entr’ouverte sur le monde qui y pénètre encore, dont les fenêtres donnent sur le jardin clos et sur les espaliers en fleur d’une abbaye, on a donc lu les Mémoires du vivant le plus illustre, lui présent. […] » Et cela n’empêche pas cependant, tant la nature de l’homme est mobile et associe les contraires, de sourire gaiement à quelque réveil de mai, de sortir par la petite porte de son parc avec une fleur encore humide de rosée, de sourire d’un air de fête au passant qu’on aimerait éviter peut-être, au jeune homme qui rougit et salue, et dont cette rencontre va enflammer la journée. […] Certes, nulle vie n’a été plus traversée, semée sur plus de mers, sillonnée de plus de sortes d’orages ; et quand, après tant d’incomparables vicissitudes, on porte sa douleur sans fléchir, comme ces personnages de rois et d’empereurs qui, outre leur diadème de gloire au front, portent un globe dans la main, on en mesure mieux tout le poids. […] On voit çà et là, l’hiver, venir de rares hôtes à cheval avec le porte manteau en croupe ; ce sont ceux que le père reçoit tête nue sur le perron. […] On suit les trois belles nièces de Grétry avec la foule dans les allées des Tuileries ; on reconnaît la belle madame de Buffon à la porte d’un club, dans le phaéton du duc d’Orléans. 

118. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

Aucune ne porte le signe des êtres observés et pris à même la vie : divers et incomplets. […] Une vision en plein Océan polaire après d’étranges aventures dans une île inconnue, une maison qui s’abîme singulièrement par une tempête, la résurrection d’un cataleptique, des ressemblances bizarres, une ombre sur une porte, un corbeau qui répond merveilleusement juste ; en ces faibles atteintes au vraisemblable, consiste tout le fantastique mesuré de Poe, qu’atténue encore une science exacte des transitions, du milieu et du moment propices. […] Laisse inviolé mon abandon, quitte le buste au-dessus de ma porte, ôte ton ber de mon cœur et jette ta forme loin de ma porte Le corbeau dit : Jamais plus. Et le corbeau sans voleter, siège encore, — siège encore, sur le buste, pallide de Pallas, juste au-dessus de la porte de ma chambre, et ses yeux ont toute la semblance des yeux d’un démon qui rève, et la lumière de la lampe ruisselant sur lui, projette, son ombre à terre ; et mon âme, de cette ombre qui gît flottante à terre, ne s’élèvera jamais plus 8. […] Cette seconde supposition est plus probable ; car tout l’art de Poe porte la marque d’une clarté, d’une volonté, d’une pleine conscience qui en constitue le troisième élément primitif.

119. (1890) L’avenir de la science « IV » p. 141

Ce qui avilit, ce qui dégrade, ce qui fait perdre le sens des grandes choses, c’est le petit esprit qu’on y porte ; ce sont les petites combinaisons, les petits procédés pour faire fortune. […] Ce penchant, qui, aux époques de civilisation, porte certains esprits à s’éprendre d’admiration pour les peuples barbares et originaux, a sa raison et en un sens sa légitimité. […] Les jugements que l’on porte sur la vie ascétique partent du même principe : l’ascète se sacrifie à l’inutile ; donc il est absurde ; ou, si l’on essaye d’en faire l’apologie, ce sera uniquement par les services matériels qu’il a pu rendre accidentellement, sans songer que ces services n’étaient nullement son but et que ces travaux dont on lui fait honneur, il n’y attachait de valeur qu’en tant qu’ils servaient son ascèse. […] Mais n’importe ; il tient le dépôt sacré, il porte l’avenir, il est homme dans le grand et large sens.

120. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. de Lacretelle » pp. 341-357

Mais je me soucie de Lamartine ; et quand on fait un livre qui porte son nom, on est tenu à ne voir que lui, — à ne parler que de lui, — à ne creuser que dans cette âme et dans ce génie. […] Elle soulève, enlève et porte ! […] Il dit bien quelque part que Lamartine est Virgile, Cicéron et Washington tout à la fois ; mais, comme les Muets qui étouffent leur homme entre deux portes de bronze, le Virgile n’est mis là que pour être étouffé entre Cicéron et Washington. — pour M. de Lacretelle, deux portes d’or !

121. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Léon XIII et le Vatican »

Et quelque nom qu’il porte et à quelque date qu’il soit entré dans la chronologie papale, c’est la Papauté elle-même tout entière, dans sa plénitude souveraine et son action universelle. […] En restant dans l’ordre purement humain de la logique, cette biographie est évidemment une promesse, et qui ne sera suivie d’aucune surprise, car, avant d’être Léon XIII, celui qui porte maintenant ce nom a, toute sa longue vie, montré l’aptitude la plus haute, la plus appliquée et la plus soutenue au gouvernement moral et politique des hommes. […] » À Turin, à Rome, au Capitole, jusqu’aux portes du Quirinal, des bandes surgissent aux cris de : « Vive Garibaldi ! […] Il se souvient que les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre elle, mais il pourrait se souvenir aussi, pour se rassurer, que l’Église n’est pas que terrestre, et qu’elle est l’Église dans l’éternité.

122. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Sur les Jeune France. (Se rapporte à l’article Théophile Gautier, page 280.) »

Ce n’est pas ainsi, ce me semble, qu’il faut juger des hommes tels que Hugo ; ce n’est pas avec cette obstination qu’il faut refuser de franchir leur porte, quand ils veulent bien nous l’ouvrir. […] L’article qui porte la date du 29 mai 1833 et qui commence par ces mots ; « L’art est aujourd’hui à un bon point.

123. (1891) Esquisses contemporaines

Paul Bourget ne porte du dilettante que le masque, et sans doute il convient de l’en féliciter. […] tu étais à la porte et je ne le savais pas ; tu frappais et je ne t’ai point ouvert. […] La conscience interdit d’interpréter le mal en dehors du jugement qu’elle porte sur lui. […] Scherer ne les porte certainement pas toutes. […] Ainsi la science porte en soi sa critique.

124. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

» dit mon oncle sur le pas de la porte. […] À la porte de l’audience, l’huissier ne voulant pas le laisser entrer : « Mais, criait Villedeuil, je suis bien plus coupable qu’eux, je suis le propriétaire du journal !  […] À droite de l’allée, tout en entrant, la porte d’une petite boutique ayant sur la rue une devanture grillagée de fer de la largeur d’une fenêtre, et voilée par un rideau du jaune sale d’un drap d’enfant qui pisse au lit. Trois marches à monter, et derrière la porte un établi hors de service, sur lequel, les coudes posés à plat, une vieille dormichonne, brinqueballant de la tête comme les gens sommeillant en voiture. […] La porte de la salle à manger ouverte, fermée plus vite qu’on ne peut dire, la portière du salon vivement écartée.

125. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Malherbe consomme cette rupture en rejetant, en supprimant autant qu’il peut tout ce qui a précédé ; il biffe de sa main Ronsard et jusqu’à Des Portes, à qui (dînant chez lui) il dit crûment « que son potage vaut mieux que ses Psaumes ». […] de quelque soin qu’incessamment il veille, Quelque gloire qu’il ait à nulle autre pareille, Et quelque excès d’amour qu’il porte à notre bien, Comme échapperons-nous en des nuits si profondes, Parmi tant de rochers qui lui cachent les ondes, Si ton entendement ne gouverne le sien ? […] …………………………………………… Toutes les autres morts n’ont mérite ni marque ; Celle-ci porte seule un éclat radieux, Qui fait revivre l’homme et le met de la barque     A la table des Dieux. […] « Sa Majesté, au soin qu’elle a eu de le garantir des méchants, a encore ajouté celui de le délivrer des importuns, et pour cet effet a mis auprès de lui un gentilhomme, avec charge expresse de faire indifféremment fermer la porte à ceux qui pour leurs affaires le viendront persécuter. […] La brouillerie à l’occasion et à la suite du mariage de Gaston avec Mademoiselle de Montpensier, la prison d’Ornano, le procès de Chalais, tous ces événements qui remplissent l’année 1626 : la lettre de Malherbe porte la date d’octobre.

126. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Jusque-là il ferme sa porte, et laisse à sa porte les gens trop curieux qui s’obstinent à y frapper. […] La même faculté nous porte à la gloire ou nous jette dans un cabanon. […] Il revient, et se glisse en pâlissant jusqu’à la porte de sa chambre. […] L’esprit fixé avec une frénésie d’attention sur la porte, il finit par croire qu’on l’ouvre, il l’entend grincer. […] Le jeu de ces raisons délabrées ressemble au grincement d’une porte disloquée : il fait mal à entendre.

127. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Cette porte de miséricorde a été ouverte à la face des peuples. […] La porte, qui a douze pieds de hauteur et six de largeur, est de marbre transparent. […] Le capitaine de la porte, qu’on appelle Ichic-Agasi-Bachi, le prit là, et le conduisit au baiser des pieds du roi. […] Je fus bien une heure à la porte, avec le grand maître, à attendre le roi. […] Il y a plusieurs coffres dans le trésor dont il n’a point le maniement, et qui sont scellés du sceau que le roi porte pendu à son cou.

128. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Jules Laforgue » pp. 36-47

« De taille moyenne et assez spontanément épanoui, il porte, pas trop haut, une longue tête enfantine ; cheveux châtains s’avançant en pointe sur un front presque sacré et retombant, plats et faibles, partagés par une pure raie droite, celer deux mignonnes oreilles de jeune fille ; masque imberbe sans air glabre, d’une pâleur un peu artificielle mais jeune ; deux yeux bleu-gris partout étonnés et timides, tantôt frigides, tantôt réchauffés par les insomnies ; un nez sensuel ; une bouche ingénue, ordinairement aspirante, mais passant vite du mi-clos amoureux à l’équivoque rictus des gallinacés… Il ne s’habille que de noir et s’en va, s’en va, d’une allure traînarde et correcte, correcte et traînarde5. » Il dit encore : Mon père (un dur par timidité) Est mort avec un profil sévère ; J’avais presque pas connu ma mère, Et donc vers vingt ans je suis resté. […] poursuit Gustave Kahn, dans un jour saumâtre, fumeux, un matin jaunâtre et moite ; enterrement simple, sans aucune tenture à la porte, hâtivement parti à huit heures, sans attendre un instant quelque ami retardataire, et nous étions si peu derrière ce cercueil : Émile Laforgue, son frère, Th.  […] Ce n’est plus le bon Pierrot d’autrefois « qui riait aux aïeux dans les dessus de portes » et qui se dédommage de ses infortunes de cœur en dégustant une bonne bouteille ou un pâté friand.

129. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

Un esprit ordinaire n’aurait pas manqué de renverser le monde, au moment où Ève porte à sa bouche le fruit fatal ; Milton s’est contenté de faire pousser un soupir à la terre qui vient d’enfanter la mort : on est beaucoup plus surpris, parce que cela est beaucoup moins surprenant. […] « Ève, l’espoir que tu fondes sur le tombeau, et ton mépris pour la mort, me prouvent que tu portes en toi quelque chose qui n’est pas soumis au néant. » Le couple infortuné se décide à prier Dieu, et à se recommander à la miséricorde éternelle. […] Il est certain que l’amour des lecteurs se porte sur les Troyens, contre l’intention du poète, parce que les scènes dramatiques se passent toutes dans les murs d’Ilion.

130. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XI. Mme Marie-Alexandre Dumas. Les Dauphines littéraires »

Or Mme Marie-Alexandre Dumas, qui n’a point de nom en religion, et qui n’oublie pas en public de prendre celui de son père, est Dumas et n’est que Dumas de pied en cap, depuis la pointe de ses beaux cheveux qu’elle n’a probablement pas coupés, jusqu’à la pointe de ses bottines, si elle en porte encore, au lieu de sandales ! […] L’art dramatique porte en dehors, avec calcul, avec coquetterie, avec éclat, avec effraction ! Contrairement à l’art dramatique, la sainteté porte-t-elle en dedans ?

131. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Il ouvre la porte. […] La porte regarde vers l’Orient. […] Il ne porte plus aucun fruit. […] Il arrive à la porte. […] La porte s’ouvre.

132. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 94-98

Son Ouvrage porte le caractere d'une ame vraiment Françoise, & d'un esprit au dessus de la Cabale, de ses vengeances & de ses applaudissemens. […] & les coups qu'on leur porte si directs & si accablans !

133. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XVII. La flûte d’ybilis »

La flûte d’ybilis (Bambara) Un enfant qui était sorcier, mais que sa mère portait encore sur le dos, dit un jour à celle-ci : « Mère, porte-moi chez mon oncle ; j’ai envie de le voir ». […] Adolescent qui porte encore le « bila » ou caleçon.

134. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Au moment où j’allais sortir de ma chambre pour aller dîner chez le restaurateur Doyen, où je prenais mes repas, dans la même rue, près de la rue de la Paix, un domestique en riche livrée de fantaisie frappa à ma porte et me remit un billet de Talma. […] Une très belle femme, en peignoir d’indienne à fleurs bleues, les cheveux épars sur un cou de Clytemnestre et la ceinture dénouée laissant entrevoir des épaules et un sein de statue antique, m’ouvrit la porte. […] La belle personne qui m’avait introduit entrouvrit la porte du cabinet contigu au salon. […] Il attribue injustement ses malheurs au gouvernement qui en porte le premier le poids. […]            Quelle Jérusalem nouvelle Sort du fond du désert, brillante de clartés, Et porte sur le front une marque immortelle ?

135. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Il se porte si bien que, sans les flammes de la Commune qu’il voit toujours fumer un peu depuis qu’elles sont éteintes, il se croirait immortel. […] Stérilité presque imbécile, M. de Goncourt, après la mutilation irrémédiable de son pauvre clown, coupé en deux par un accident dont son frère est la cause, ne trouve rien de mieux, pour nous attendrir, que de le faire un jour asseoir à la porte du Cirque, d’où il entend de loin des applaudissements qui le désespèrent. Il s’y assied, à la porte, mais il n’y entre pas ! […] Il n’a conduit son clown qu’à la porte du Cirque, de cet Enfer qui fut un jour, pour lui, le Paradis. Diderot, que M. de Goncourt, l’amoureux du xviiie  siècle, admire certainement plus que moi, aurait osé, lui, faire franchir cette porte au sien.

136. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXIXe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (2e partie) » pp. 321-384

Une mouche, un bruit de porte, une pensée qui vient, que sais-je ? […] Tu ne verras plus le blanc pigeonnier de la côte, ni la petite porte de la terrasse, ni le corridor et le fenestroun où nous mesurions notre taille quand nous étions petits. […] C’est plus joli, ces choses nouvelles, mais pourquoi est-ce que je regrette les vieilles et replace de cœur les portes ôtées, les pierres tombées ? […] Quel sera le premier cercueil qui sortira par ces portes neuves ? […] En arrivant j’ai reconnu l’église sous son grand ormeau où j’allais sauter à l’ombre, puis la grande cour et puis la petite avec son puits, la porte à vitres du salon, et, dans ce salon, les grandes belles dames que j’aimais tant à voir ; une à côté d’un capucin en méditation qui fait contraste, chose que je n’avais pas tant remarquée qu’à présent.

137. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

Si je pouvais m’en aller en haut ; si je trouvais dans ma poitrine ce souffle qui vient le dernier, ce souffle des mourants qui porte l’âme au ciel, oh ! […] Quand on se porte au Calvaire, on voit ce que coûte le ciel. […] que cela dépend de toutes choses et porte l’âme affligée loin de cette vie, vers le lieu où n’est pas la mort ! […] J’ai vécu heureusement loin du monde, dans l’ignorance de presque tout ce qui porte au mal ou le développe en nous. […] Le cidre ou le vin du pays coule modérément dans le verre des hommes ; les femmes ou les filles ne boivent que l’eau puisée dans une tasse de cuivre au seau de la porte.

138. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Là, nous retrouvons madame d’Ange, qui porte, dans le salon de la Vernières, les airs et la hauteur d’une duchesse à un bal bourgeois ; puis les deux nouveaux amis Olivier et Raymond. […] Pour toute réponse Olivier dépose, sur une table, le paquet de lettres à l’adresse de Suzanne, et il sort : sortie douteuse qui ressemble à l’évasion d’une conscience en peine, par la porte dérobée d’un faux subterfuge. […] Il a gagné six millions au jeu des affaires, et il porte cet insolent bonheur sans trop d’insolence ; s’il péchait, ce serait plutôt par gloriole de roture et de modestie. […] René, qui écoutait aux portes, vient jeter à la face du faiseur toutes sortes d’injures infamantes. […] Durieu et la comtesse, dont il emporte les fonds, se regardent déjà avec des mines allongées, lorsque la porte s’ouvre et Jean Giraud reparaît, les mains pleines de billets de banque.

139. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

Dans la seule petite ville de Châtellerault (qui est de quatre mille habitants), il y avait dix-huit cents pauvres cet hiver sur ce pied-là… La quantité des pauvres surpasse celle des gens qui peuvent vivre sans mendier… et les recouvrements se font avec une rigueur sans exemple ; on enlève les habits des pauvres, leurs derniers boisseaux de froment, les loquets des portes, etc. […] Les collecteurs, avec les huissiers, suivis de serruriers, ouvrent les portes, enlèvent les meubles et vendent tout pour le quart de ce qu’il vaut, et les frais surpassent la taille… » — « Je me trouve en ce moment en Touraine, dans mes terres. […] J’ai plusieurs de mes paroisses où l’on doit trois années de taille ; mais, ce qui va toujours son train, ce sont les contraintes… Les receveurs des tailles et du fisc font chaque année des frais pour la moitié en sus des impositions… Un élu est venu dans le village où est ma maison de campagne, et a dit que cette paroisse devait être fort augmentée à la taille de cette année, qu’il y avait remarqué les paysans plus gras qu’ailleurs, qu’il avait vu sur le pas des portes des plumages de volaille, qu’on y faisait donc bonne chère, qu’on y était bien, etc  Voilà ce qui décourage le paysan, voilà ce qui cause le malheur du royaume. » — « Dans la campagne où je suis, j’entends dire que le mariage et la peuplade y périssent absolument de tous côtés. […] À Lyon, il y a plus de vingt mille ouvriers en soie qui sont consignés aux portes ; on les garde à vue, de peur qu’ils ne passent à l’étranger. » À Rouen616 et en Normandie, « les plus aisés ont de la peine à avoir du pain pour leur subsistance, le commun du peuple en manque totalement, et il est réduit, pour ne pas mourir de faim, à se former des nourritures qui font horreur à l’humanité »  « À Paris même, écrit d’Argenson617, j’apprends que le jour où M. le Dauphin et Mme la Dauphine allèrent à Notre-Dame de Paris, passant au pont de la Tournelle, il y avait plus de deux mille femmes assemblées dans ce quartier-là qui leur crièrent : Donnez-nous du pain, ou nous mourrons de faim. » — « Un des vicaires de la paroisse Sainte-Marguerite assure qu’il a péri plus de huit cents personnes de misère dans le faubourg Saint-Antoine depuis le 20 janvier jusqu’au 20 février, que les pauvres gens expiraient de froid et de faim dans leurs greniers, et que des prêtres, venus trop tard, arrivaient pour les voir mourir sans qu’il y eût du remède. » — Si je comptais les attroupements, les séditions d’affamés, les pillages de magasins, je n’en finirais pas : ce sont les soubresauts convulsifs de la créature surmenée ; elle a jeûné tant qu’elle a pu ; à la fin l’instinct se révolte. […] Une femme avec deux enfants au maillot, « sans lait, sans un pouce de terre », à qui l’on a tué ainsi deux chèvres, son unique ressource, une autre à qui l’on a tué sa chèvre unique et qui est à l’aumône avec son fils, viennent pleurer à la porte du château ; l’une reçoit douze livres, l’autre est admise comme servante, et désormais « ce village donne de grands coups de chapeau, avec une physionomie bien riante »  En effet, ils ne sont pas habitués aux bienfaits ; pâtir et le lot de tout ce pauvre monde. « Ils croient inévitable, comme la pluie et la grêle, la nécessité d’être opprimés par le plus fort, le plus riche, le plus accrédité, et c’est ce qui leur imprime, s’il est permis de parler ainsi, un caractère de souffre-douleur. » En Auvergne, pays féodal, tout couvert de grands domaines ecclésiastiques et seigneuriaux, la misère est égale.

140. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

Toute l’imagination du théâtre de ces jours-ci, consiste à convertir la lettre en télégramme, et à remplacer le rideau par quelque chose comme la porte d’un cabinet d’aisance. […] * * * — Des jours hostiles et de malechance, où l’on voudrait, ainsi que dans un gros temps, fermer les sabords de sa maison, et se dérober aux gens qui frappent à votre porte, aux lettres que le facteur dépose dans votre boîte. […] En ce moment la porte s’ouvre, un gros homme entre, et butant, tombe en plein sur l’armée française, qu’il écrase et démolit presque entièrement. […] Et Bracquemond l’a su, en voyant, dans la nuit, le factionnaire qui était au bas de sa porte, enfoncer sa baïonnette dans le ventre d’un insurgé, qui se trompant, s’était avancé à l’ordre du versaillais. […] Une épreuve du Haut d’un battant de porte, épreuve du premier état, avec le fond blanc, a été, sous le nº 30, de la vente Burty, poussée par moi à 350 francs, et achetée 400 francs par M. 

141. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

Un voile immense, immobile, sans le moindre pli, couvre toute la face du ciel ; l’horizon porte une couronne de vapeurs bleuâtres ; pas un souffle dans l’air. […] Après neuf mois de séjour, « les portes du petit paradis de La Chênaie se fermèrent derrière lui ». […] Un homme pieux et poète, une femme dont l’âme va si bien à la sienne qu’on dirait d’une seule âme, mais dédoublée ; une enfant qui s’appelle Marie, comme sa mère, et qui laisse, comme une étoile, percer les premiers rayons de son amour et de son intelligence à travers le nuage blanc de l’enfance ; une vie simple, dans une maison antique ; l’océan qui vient le matin et le soir nous apporter ses accords ; enfin un voyageur qui descend du carmel pour aller à Babylone, et qui a posé à la porte son bâton et ses sandales pour s’asseoir à la table hospitalière : voilà de quoi faire un poème biblique, si je savais écrire les choses comme je sais les éprouver. […] Tous ces menus détails de la vie intime, dont l’enchaînement constitue la journée, sont pour moi autant de nuances d’un charme continu qui va se développant d’un bout de journée à l’autre : — le salut du matin qui renouvelle en quelque sorte le plaisir de la première arrivée, car la formule avec laquelle on s’aborde est à peu près la même, et d’ailleurs la séparation de la nuit imite assez bien les séparations plus longues, comme elles étant pleine de dangers et d’incertitude ; — le déjeuner, repas dans lequel on fête immédiatement le bonheur de s’être retrouvés ; — la promenade qui suit, sorte de salut et d’adoration que nous allons rendre à la nature, car à mon avis, après avoir adoré Dieu directement dans la prière du matin, il est bon d’aller plier un genou devant cette puissance mystérieuse qu’il a livrée aux adorations secrètes de quelques hommes ; — notre rentrée et notre clôture dans une chambre toute lambrissée à l’antique, donnant sur la mer, inaccessible au bruit du ménage ; en un mot, vrai sanctuaire de travail ; — le dîner qui s’annonce non par le son de la cloche qui sent trop le collège ou la grande maison, mais par une voix douce qui nous appelle d’en bas ; la gaieté, les vives plaisanteries, les conversations brisées en mille pièces qui flottent sans cesse sur la table durant ce repas : le feu pétillant de branches sèches autour duquel nous pressons nos chaises après ce signe de croix qui porte au ciel nos actions de grâces ; les douces choses qui se disent à la chaleur, du feu qui bruit tandis que nous causons ; — et, s’il fait soleil, la promenade au bord de la mer qui voit venir à elle une mère portant son enfant dans ses bras, le père de cet enfant et un étranger, ces deux-ci un bâton à la main ; les petites lèvres de la petite fille qui parle en même temps que les flots, quelquefois les larmes qu’elle verse, et les cris de la douleur enfantine sur le rivage de la mer ; nos pensées à nous, en voyant la mère et l’enfant qui se sourient ou l’enfant qui pleure et la mère qui lâche de l’apaiser avec la douceur de ses caresses et de sa voix, et l’océan qui va toujours roulant son train de vagues et de bruits ; les branches mortes que nous coupons dans le taillis pour nous allumer au retour un feu vif et prompt ; ce petit travail de bûcheron qui nous rapproche de la nature par un contact immédiat et me rappelle l’ardeur de M.  […] Les vents se taisent, et l’océan paisible ne m’envoie, quand je vais l’écouter sur le seuil de la porte, qu’un murmure mélodieux qui s’épanche dans l’âme comme une belle vague sur la grève.

142. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

Il voit passer un vieillard en fauteuil, qu’on porte ; il le reconnaît : c’est son grand-père que la famille environne. […] non, fille qui est en faute ne porte pas le front si haut. […] il porte malheur, n’est-ce pas ? […] Coutume du pays : on va chercher au bois des branches d’arbres, et surtout de laurier, qu’on jette ensuite sur le chemin de l’église et à la porte des conviés. […] Ainsi, en lisant celte énergique et gracieuse peinture de sa Marguerite, je ne puis m’empêcher de me reporter à la Simétha de Théocrite, lorsque, racontant le jour où le beau Delphis vint la visiter pour la première fois, elle s’écrie : « Dès que je le vis franchissant le seuil de la porte d’un pied léger, je devins tout entière plus froide que la neige, et la sueur me découlait du front à l’égal des humides rosées ; je ne pouvais rien articuler, pas même de ces petits cris que les enfants poussent en songe vers leur mère ; mais tout mon beau corps resta figé, pareil à une image de cire.

143. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Après quelques légers changements qu’elles firent exécuter, la distribution du bureau se présentait ainsi : la pièce, avec deux fenêtres, n’avait point d’entrée par la rue ; la porte extérieure était celle de l’ancienne allée, dont la cloison, du côté de la chambre, avait été à moitié abattue, et où l’on avait placé une grille de bois à travers laquelle se faisaient les échanges de lettres. Comme suite à la grille, vers le fond de l’allée, une porte grillée aussi, et non fermée, donnait entrée dans le bureau. […] Dès que la porte de la rue s’ouvrait et qu’un visage paraissait à la grille, la jeune fille était debout, élancée, polie, prévenante pour chacun (comme si elle n’avait été élevée qu’à cela), recevant de sa main blanche les gros sous des paysans qui affranchissaient pour leur pays ou payse en condition à Paris. […] Christel, au moment où la porte de la rue s’était ouverte, avait brusquement quitté sa place et était déjà debout, à demi élancée, comme elle faisait pour tous (craignant toujours, la noble enfant, de ne pas assez faire). […] Elle apporta le paquet entier des lettres restantes sur la petite tablette en dedans de la grille, et là tous deux penchés, dans leur inquiétude si diverse, suivaient une à une les adresses ; leurs têtes s’effleuraient presque à travers les barreaux ; mais, même ce jour-là, il n’eut pas l’idée de franchir la porte tout à côté pour chercher plus près d’elle, avec elle.

144. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

C’est ce qui arrive toutes les fois que la métaphore porte sur un verbe ou un adjectif. […] Montrer des canons accroupis à la porte des Invalides peut paraître bizarre : la figure cependant est d’une justesse saisissante dans le vers de V. Hugo : Les canons monstrueux à la porte accroupis. […] Parfois, devant ses portes, Quelque Crassus, vainqueur d’esclaves et de rois, Plantait le grand chemin de vaincus mis en croix….. […] C’est une porte qu’on lui ouvre sur des espaces illimités dont elle visitera ce qu’elle voudra, selon son humeur paresseuse ou vagabonde.

145. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Doué non pas simplement d’une extrême ardeur personnelle de connaître et de savoir, mais de l’amour dû vrai et de « cette grande curiosité » qui porte avec elle son idée dominante, et qui se règle aussi sur le besoin actuel et précis de l’œuvre humaine à chaque époque, il s’est dit de bonne heure que ce qu’il désirait le plus de savoir, d’autres le désiraient également ; et il s’est assigné, pour rendez-vous et pour terme éloigné, mais certain, au milieu même de la variété et de la dispersion apparente de ses travaux, l’Histoire des origines du christianisme. […] En général, le procédé de critique qu’il applique en toute branche d’étude, et qu’il a élevé jusqu’à l’art, est celui-ci : Il s’attache à tirer la formule, l’idée, l’image abrégée de chaque pays, de chaque race, de chaque groupe historique, de chaque individu marquant, pour l’admettre à son rang, à son point, dans cette représentation idéale que porte avec elle l’élite successive de l’humanité. […] Renan, on voit les différentes nations tributaires du roi de Perse représentées par un personnage qui porte le costume de son pays et tient entre les mains les productions de sa province pour en faire hommage au souverain. […] Renan porte un bien grand respect et une bien haute révérence à sa majesté l’esprit humain, Mais dans un pays comme la France, il importe qu’il vienne de temps en temps des intelligences élevées et sérieuses qui fassent contrepoids à l’esprit malin, moqueur, sceptique, incrédule, du fonds de la race ; et M. 

146. (1863) Molière et la comédie italienne « Textes et documents » pp. 353-376

., et autres frais… 180 3 À Paysan, pour la poudre, pommade, y compris ses peines, celles de ses garçons, et les frais de leur voyage à Chambord… 210 » Pour toutes les voitures généralement quelconques… 9008 » Pour trois bannes qui ont servi à couvrir les charrettes où étaient les habits… 50 8 Pour tous les Suisses qui ont servi, tant à Chambord qu’à Saint-Germain, à garder les portes du théâtre… 153 » Au sieur de Lulli, pour ses copistes, leur entretien et nourriture, la somme de… 800 » Pour les ports, rapports et entretiens d’instruments… 196 » Pour les dessins et peines du sieur Gissez… 483 » Pour les peines d’avertisseurs, huissiers et autres gens nécessaires… 300 » Aux concierges de Chambord et de Saint-Germain, à raison de 100 liv. chacun… 200 » Pour tous les menus frais imprévus, suivant le mémoire ci-attaché… 403 » Somme totale du contenu au présent état… 49404 18 Nous, Louis-Marie d’Aumont de Rochebaron, duc et pair de France, premier gentilhomme de la chambre du roi, certifions avoir ordonné la dépense contenue au présent état, et l’avoir arrêtée pour Sa Majesté à la somme de quarante-neuf mille quatre cent quatre livres dix-huit sous. […] Arlequin, pour le récompenser, lui donne sa nièce et lui cède, par acte notarié, sa maison ; Bernagasso lui donne des coups de bâton, et veut le mettre à la porte. Arlequin déchire l’acte, s’empare du bâton et met Bernagasso à la porte à son tour. […] Mais il ajoute que depuis quelque temps, s’étant fort modéré et ne craignant plus le même inconvénient, il porte du linge comme tous les autres.

147. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre IV. Critique »

Ensuite, la vierge grosse est un Christophe, puisqu’elle porte le Christ ; enfin, la croix est un Christophe ; elle aussi porte le Christ. […] La fée, traînée sur le nez des hommes endormis dans son carrosse plafonné d’une aile de sauterelle, par huit moucherons attelés avec des rayons de lune et fouettés d’un fil de la vierge, la fée atome, a pour ancêtre le prodigieux Titan, voleur d’astres, cloué sur le Caucase, un poing aux portes Caspiennes, l’autre aux portes d’Ararat, un talon sur la source du Phase, l’autre talon au Validus-Murus bouchant le passage entre la montagne et la mer, colosse dont le soleil, selon que le jour se levait ou se couchait, projetait l’immense profil d’ombre tantôt sur l’Europe jusqu’à Corinthe, tantôt sur l’Asie jusqu’à Bangalore.

148. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre IV. Trois espèces de jugements. — Corollaire relatif au duel et aux représailles. — Trois périodes dans l’histoire des mœurs et de la jurisprudence » pp. 309-320

Nous avons déjà vu que chez les Grecs, ἄρα signifiait la chose ou la personne qui porte dommage, le vœu ou action de dévouer, et la furie à laquelle on dévouait ; chez les Latins ara signifiait l’autel et la victime. […] On ne peut croire que Plaute ait voulu mettre sur le théâtre des dieux qui enseignassent le parjure au peuple ; encore bien moins peut-on le croire de Scipion l’Africain et de Lélius, qui, dit-on, aidèrent Térence à composer ses comédies ; et toutefois dans l’Andrienne, Dave fait mettre l’enfant devant la porte de Simon par les mains de Mysis, afin que si par aventure son maître l’interroge à ce sujet, il puisse en conscience nier de l’avoir mis à cette place. […] L’Empereur était à la porte, les lances baissées, les épées nues, tout prêt à user de la victoire ; cependant malgré sa colère, il laissa échapper tous les habitants qu’il allait passer au fil de l’épée.

149. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XII. Suite des machines poétiques. — Voyages des dieux homériques. Satan allant à la découverte de la création. »

Les portes de l’enfer s’ouvrent… vomissant, comme la bouche d’une fournaise, des flocons de fumée et des flammes rouges. […] À mesure qu’il avance vers le jour, l’empyrée, avec ses tours d’opale et ses portes de vivants saphirs, se découvre à sa vue.

150. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Julliart » pp. 176-177

Moi, Monsieur Juliart, dont ce n’est pas le métier, je montrerais sur une colline les portes de Thèbes ; on verrait au devant de ces portes la statue de Memnon ; autour de cette statue des personnes de tout état attirées par la curiosité d’entendre la statue résonner aux premiers rayons du soleil ; des philosophes assis traceraient sur le sable des figures astronomiques ; des femmes, des enfans seraient étendus et endormis, d’autres auraient les yeux attachés sur le lieu du lever du soleil ; on en verrait dans le lointain qui hâteraient leur marche, de crainte d’arriver trop tard.

151. (1896) Hokousaï. L’art japonais au XVIIIe siècle pp. 5-298

Terrasse du temple d’Inari à Mimégouri, où un Japonais porte sur ses épaules son petit garçon. […] Une charmante impression est une impression où un amoureux joue de la flûte à la porte d’une habitation, et où l’on voit une servante, envoyée par sa maîtresse qui l’entend de son balcon, traverser le jardin et lui ouvrir la porte. […] Paysanne en train de nettoyer une étoffe sur une porte détachée de ses gonds. […] Serviteurs japonais attendant leur maître à la porte d’un jardin impérial. […] Le dessin n’est pas signé, mais porte un cachet où il y a le nom de Tokimasa (vers 1798).

152. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XX » pp. 215-219

Le duc de Saint-Simon, dans une de ses notes sur les mémoires de Dangeau, sous la date du 10 mai 1690, reproche à madame de Montausier d’avoir accepté la place de dame d’honneur de la reine, dont la duchesse de Navailles avait été dépouillée pour avoir, dit Saint-Simon, fait murer une porte secrète par où le roi se rendait de nuit dans la chambre des filles de la reine. « On eut lieu, dit Saint-Simon, d’être surpris de ce qu’un élève de l’hôtel de Rambouillet, et pour ainsi dire l’hôtel de Rambouillet en personne, et la femme de l’austère Montausier, succédât à madame de Navailles si glorieusement chassée. » Le reproche d’avoir succédé à madame de Navailles, si glorieusement chassée pour avoir fermé au roi la porte des visites nocturnes, est absolument dénué de fondement, cette clôture, vraie ou supposée, n’a point été la cause de la disgrâce de madame de Navailles : ce fut l’imputation d’un fait qui, par sa gravité, était de nature à motiver la disgrâce et non à la rendre glorieuse.

153. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

On dira peut-être qu’il disparaît du souvenir de la parole intérieure, parce que notre attention le néglige et se porte uniquement, durant la production de la parole intérieure, sur l’élément sonore. […] Deux choses seront admises sans contestation : la première, c’est que la parole intérieure, à mesure qu’elle se produit en nous, est écoutée ; en d’autres termes, que nous y faisons attention ; — la seconde, c’est que l’attention porte sur la parole intérieure comme image sonore, nullement sur l’image tactile. […] Je ne m’aperçois qu’il est un de mes états que s’il est l’objet de mon attention ; on dit : « je vois », quand on regarde ; mais je, en pareil cas, désigne plutôt l’attention que l’esprit porte au visum que le visum lui-même en tant qu’il fait partie de mes états. […] VI, § 8 et suiv.] ; mais l’idée est la chose essentielle ; pour le jugement, pour l’entendement, le mot, comme tel, est sans valeur, et nous rappeler le mot, c’est nous rappeler l’idée ; le mot est l’occasion, ou, si l’on veut, l’instrument de la reconnaissance ; mais il n’en profite pas : l’affirmation du moi et du passé porte sur l’idée seule. […] Mais cet intérêt pour Maury concerne ici assez peu son travail qui porte sur toutes les manifestations ordinaires et conscientes de la parole intérieure.

154. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

Il est vraisemblable, avons-nous dit, qu’un canevas italien, intitulé Il Ritratto (le Portrait), très différent de celui des Gelosi qui porte le même titre, fut utile à Molière pour la composition du Cocu imaginaire, mais il est impossible de déterminer dans quelle mesure, le canevas primitif ne nous étant pas connu, et les Italiens ayant, à coup sûr, profité de ce qu’il y avait à leur convenance dans la pièce française. […] Quand il fut à la porte de la chambre, il heurta ; en entrant il jeta son manteau à terre et, s’étant coiffé du petit chapeau, il courut, sans rien dire, d’un bout de la chambre à l’autre en faisant des postures plaisantes. […] Il ne porte pas non plus de masque et a le visage enfariné.

155. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’Âge héroïque du Symbolisme » pp. 5-17

Dans cette même année, Antoine, qui n’a pas encore trouvé de scène fixe pour son Théâtre libre, fait applaudir à la Porte Saint-Martin La mort du Duc d’Enghien de Hennique et, çà et là, l’École des Veufs de Georges Ancey, La Meule de Lecomte, Le Canard Sauvage d’Ibsen et le Père Goriot, tandis que Paul Fort crée le Théâtre d’Art et annonce qu’à partir du mois de mars « les soirées seront terminées par la mise en scène d’un tableau des peintres de la jeune école. […] Un flot de visiteurs frappe à sa porte à toute heure du jour. […] On le vit, un soir, se lever soudain, éclater en jurons, prendre sa canne et son chapeau et gagner la porte.

156. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Il est proche d’une porte vitrée qui éclaire la chambre de la sage-femme où l’on voit des lits numérotés. […] Est-ce ainsi qu’on porte et qu’on donne un nouveau-né ? […] la chaumière. à droite, grande porte de grange.

157. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Pélisson et d’Olivet »

En rééditant leurs histoires avec un impayable sérieux, en les accompagnant d’une introduction animée, d’un enthousiasme presque tendre, en devenant mélancolique lorsque son livre finit et qu’il est obligé de renoncer à cette douce familiarité avec des hommes l’orgueil, à juste titre, de la littérature, Livet, qui a quêté partout des annotations pour la plus grande gloire de l’Académie, a cru évidemment que cette assemblée discoureuse, fondée pour discourir et ouvrir ou fermer la porte aux mots nouveaux qui se risqueraient dans la langue, enfin que cet hôtel de Rambouillet sans femmes avait le privilège de créer véritablement des grands hommes, parce qu’il pouvait, pour le récompenser de son zèle, le faire un jour académicien, lui, Livet ! […] Lui, Boileau, le rare jugeur, l’énergique bon sens, qui ne cherchait pas des arbres et des fontaines pour dire la vérité sur ses confrères, a dit la seule qui restera ; et les compilations de Livet, qui ne sont pas les portes de l’enfer, mais les portes de l’ennui, ne prévaudront pas contre elle.

158. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Une preuve de force encore plus grande, c’est que son érudition ne nuit point à sa verve ; si lourde que soit la masse dont il se charge, il la porte sans fléchir. […] Aussitôt deux délateurs qu’il a cachés derrière la porte se jettent sur Sabinus en criant : « Trahison contre César », et le traînent, la face voilée, au tribunal d’où il sortira pour être jeté aux Gémonies. —  Un peu plus loin le sénat s’assemble. […] Macron seul sait le secret de Tibère, et l’on voit les soldats se ranger à la porte du temple, prêts à entrer au premier bruit. […] Il a mis à la porte son valet, dont les souliers neufs faisaient du bruit ; le nouveau valet, Mute, porte des pantoufles à semelles de laine, et ne parle qu’en chuchotant à travers un tube. […] » Elle commande aux valets de parler haut ; elle fait ouvrir les portes toutes grandes à ses amis.

159. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Mais la nuit porte conseil : il réfléchit au danger de son voyage, et il pense que mieux vaut le différer et partir, non pour Paris, mais pour Reims et Vervins, afin de se rendre de là à la Chartreuse du Val-Saint-Pierre-en-Thiérarche, où il avait un parent, dom Barthélemy Effinger, qu’il n’avait jamais vu, mais qui lui destinait une cure : « Je resterai, se disait-il, au monastère sous prétexte d’en vouloir connaître l’intérieur, les pratiques, et peut-être d’en devenir un des moines ; sous ce prétexte, j’exigerai et j’obtiendrai le secret. » il ne serait allé à Paris qu’un peu plus tard et quand déjà sa famille, inquiète de son absence, l’y aurait fait chercher vainement. […] Une muraille très élevée en masquait et en fermait l’intérieur ; une porte, une vraie porte de ville, que surmontait un pavillon sans jour sur la campagne, donnait entrée sur une cour, ou plutôt sur une place magnifique. […] La porte donnait sur un péristyle élevé de douze marches au-dessus du sol de la cour, et au-dessus s’élançait un élégant clocher renfermant l’horloge et le carillon, qui, tous les quarts d’heure, se mettait en mouvement et sonnait des hymnes. » « Telle était, pour le dehors, cette somptueuse maison… » Cela, convenons-en, est d’une parfaite et sensible vérité, d’une sobre et magnifique description ; quoique sorti d’une plume conventionnelle. […] Chaque chartreux avait devant lui un pot d’étain, d’une pinte, rempli de bière, un autre de même dimension, rempli de vin de Champagne ordinaire, et une bouteille cachetée de vin vieux ; et ce qu’il ne buvait pas était porté par les frères lais dans le tour placé à côté de la porte de la cellule ; on servait à chacun une tranche d’esturgeon d’une livre, du poisson de rivière en pareille quantité, une omelette de six œufs, du pain frais à volonté, du fromage et les plus beaux fruits.

160. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Ici, il voit éclater le réverbère à la porte de cet hôtel, dont les habitants, plongés dans les plaisirs, ignorent qu’il est un misérable, occupé seul à regarder de loin la lumière de leurs fêtes, lui qui eut aussi des fêtes et des amis ! […] Comme si l’on craignait que quelqu’un ne vînt ravir ce trésor, fermant mystérieusement la porte sur soi, on se met à faire l’analyse de sa récolte, blâmant ou approuvant Tournefort, Linné, Vaillant, Jussieu, Solander. […] Bientôt on entend le bruit sourd des assassins qui brisent les portes extérieures ; Agrippine tressaille, s’assied sur son lit, prête l’oreille. […] Pour moi, j’ai vu, et c’en est assez, j’ai vu le soleil suspendu aux portes du couchant dans des draperies de pourpre et d’or. […] Sous leurs pinceaux, les accidents de la nature se transformèrent en esprits célestes : la Dryade se joua dans le cristal des fontaines ; les Heures, au vol rapide, ouvrirent les portes du jour ; l’Aurore rougit ses doigts, et cueillit ses pleurs sur les feuilles de roses humectées de la fraîcheur du matin ; Apollon monta sur son char de flammes ; Zéphire, à son aspect, se réfugia dans les bois, Téthys rentra dans ses palais humides, et Vénus, qui cherche l’ombre et le mystère, enlaçant de sa ceinture le beau chasseur Adonis, se retira avec lui et les Grâces dans l’épaisseur des forêts.

161. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

L’expérience, le crédit, la renommée, le talent, toutes les clefs des portes fermées ne s’enlèvent qu’après des luttes, livrées à nu, contre mille obstacles. […] Philippe porte l’empreinte de cette compression. […] L’enseigne est sur la porte. […] On comprend l’ennui de cette pécore, mariée, sous le régime paternel, à un homme dont les cheveux sont presque aussi blancs que la plume qu’il porte à l’oreille. […] La porte s’ouvre ; madame Séraphine apparaît coiffée d’un chapeau à la Marie Stuart, attifée d’une robe de velours rouge flambant neuf, conforme, des pieds à la tête, au signalement de la terrible facture.

162. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

La douleur de la pauvre abandonnée, son changement de couleur, son attitude, ses discours, ses projets, le tout encadré dans la fraîcheur du printemps et dans l’allégresse riante d’alentour, porte un caractère de nature et de vérité auquel les maîtres seuls savent atteindre. […] Un factionnaire veillera à la porte. […] Elle vend sa maison, et, légère, elle court porter au curé la somme complète : « Monsieur le curé, lui dit Marthe à genoux, je vous porte tout ce que j’ai ; maintenant vous pourrez écrire ; achetez sa liberté, puisque vous m’êtes si bon ; ne dites pas qui le sauve ; oh ! […] Et la nouvelle de sa touchante action faisant bruit déjà dans les prairies, tout le pays s’était pris d’amour pour elle : « C’étaient, la nuit, de longues sérénades, des guirlandes de fleurs à sa porte attachées, et le jour, des présents choisis que les filles enfin à sa cause entraînées venaient lui présenter avec des yeux tout amis. » Annette surtout était en tête de cette bonne jeunesse. […] ce que j’ai dérobé, je le rends, et je le rende avec usure ; à ma vigne, je n’ai pas de porte ; deux ronces en barrent le seuil ; lorsque des picoreurs, par les trouées, je vois le nez, au lieu de m’armer d’une gaule, je m’en retourne, je m’en vais pour qu’ils y puissent revenir.

163. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Elle est coiffée d’un filet couleur feu, elle porte une robe agrémentée de dessins légèrement cabalistiques, et est couverte de bijoux pareils à des amulettes : un costume de nécromancienne vivant dans le monde des peintres. […] Le soir chez la princesse, je me trouve, côte à côte, dans un entre-deux de porte, avec le duc de Morny, pâle, et la lèvre inférieure toute tremblotante. […] Croquis de femmes pris par une porte de salon, entre les épaules de deux habits noirs. […] Sur le seuil de la porte, il nous fait son admirable personnage de Boireau en société : c’est vraiment la photographie de la fange. […] Le procureur du roi l’enlève, l’amène à Autun dans un hôtel, et l’y enferme sous clef, avec un domestique à sa porte, pendant ses absences.

164. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Un faubourg à toits de chaume ou d’ardoises ébréchées, une place irrégulière où sont les halles et les auberges, une large rue presque toujours déserte, un lourd et noir clocher de cathédrale, à l’extrémité de la rue une porte gothique ouvrant sur la campagne ; à gauche de la place, une plate-forme entourée d’un parapet, plantée de tilleuls séculaires et servant de promenoirs aux oisifs et aux enfants, complète la capitale de province. […] Enfin le rouge-gorge répète sa petite chanson sur la porte de la grange, où il a placé son gros nid de mousse. […] Effrayé et ravi, il se précipite parmi ses frères, qui n’ont point encore vu ce spectacle ; mais, rappelé par la voix de ses parents, il sort une seconde fois de sa couche, et ce jeune roi des airs, qui porte encore la couronne de l’enfance autour de sa tête, ose déjà contempler le vaste ciel, la cime ondoyante des pins et les abîmes de verdure au-dessous du chêne paternel. […] L’approche de la mort, qui attendait le poète à la porte de sa prison sur l’échafaud, avait changé le diapason de ce jeune Grec en diapason moderne. […] J’ai trouvé l’autre jour cette inscription au crayon, et signée seulement d’une initiale, sur la vieille porte vermoulue de ma maison de village, à Milly.

165. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

On la soutient, on la délace, on la porte au lit. […] Les chiens se mirent à aboyer furieusement devant la porte. […] En tâtonnant, il enlève la pierre de la porte et s’assied sur le seuil. […] Ce rocher porte les ruines d’un château-fort, nid d’aigle des Carafa, anciens seigneurs du pays. […] La porte, large, massive, d’une couleur vert-bouteille, a conservé son marteau.

166. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Miserey fit halte devant la porte de l’écurie. […] Miserey ouvrit la porte de l’écurie et le tira dehors. […] Zola a exécuté pour se faire ouvrir les portes de l’Académie ! […] Toute la porte resplendissait, dans la pureté du grand froid. […] C’était, nécessairement, celui où la clef était restée sur la porte !

167. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Sur ce refus, nous jetions, assez découragés, notre pièce dans un tiroir, nous promettant de revenir plus tard à la scène par le roman, et de ne plus frapper à la porte d’un directeur qu’avec un de ces noms qui se font ouvrir le théâtre. […] — Et ses portes fermées. — Pourquoi ? […] Les messieurs de Goncourt se sont trompés de porte, ils ont pris la rue Richelieu pour la rue Montpensier ; c’est à recommencer ! […] Nous sonnions à la porte du comique ainsi qu’on sonne à la porte d’un dentiste. […] Un coupé nous jette chez Lireux. « Mais, Messieurs, nous dit assez brutalement la femme qui nous ouvre la porte, vous savez bien qu’on ne dérange pas M. 

168. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Il porte une épingle de cravate, formée de deux cœurs, reliés par une croix : l’épingle de la haute gomme du faubourg Saint-Germain. […] Gambetta s’est calé dans l’entre-deux d’une porte et entend toute la pièce debout, en la pose d’une cariatide. […] Et là, mourant de soif, et n’osant entrer nulle part, elle envoyait Julie sa femme de chambre chercher un verre de groseille, chez un marchand de vin à la porte de son hôtel, — un marchand de vin, devant lequel, au temps de sa prospérité, elle était passée si souvent. […] Le jour, où elle est venue donner la leçon à Léon, et qu’il lui a donné les deux numéros parus du journal : « Aujourd’hui, a-t-elle dit à son élève, il n’y aura pas de leçon, vous allez me traduire le roman de M. votre père. » Et derrière la porte, Daudet l’entendait rire à « Oh ! […] » c’est, de haut en bas, une ouverture de toutes les portes, et la réunion et l’assemblage de toutes les femmes mêlées, et se faisant faire les ongles sur le palier, au milieu des autres locataires groupées et étagées sur les marches de l’escalier.

169. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

elle que le pur esprit Brahma a formée de ses mains pour la maison d’un époux, elle qui me fait participer par sa pureté, moi et mes ancêtres, à sa virginité ; elle aussi pure que le jour où elle fut engendrée, elle qui porte dans son sein une longue postérité et des mondes à venir ? […] On vérifie au premier coup d’œil ce caractère de virilité dans l’antique, de raffinement et d’afféterie dans le moderne, en comparant le poème antique de Sacountala avec le drame relativement plus moderne qui porte ce nom. […] « Va, céleste enfant, en quelque lieu que tu portes tes pas loin de moi, toujours tu resteras attachée à mon cœur. […] L’anachorète apprend d’elle-même qu’une union secrète, mais approuvée par la religion et les lois, l’unit au héros, et qu’elle porte dans son sein un gage de son union, roi futur du royaume. […] « Ô père », dit-elle à l’ermite, « lorsque cette charmante gazelle, qui n’ose se hasarder loin de l’ermitage, et dont la marche est ralentie par le poids du petit qu’elle porte dans ses flancs, sera devenue mère, ah !

170. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

(La ville, avec la porte de la prison.) […] Il frappe à la porte de la prison. […] Arlequin met dans sa poche la clef de sa porte et celle de la chambre de Trivelin, sans s’apercevoir de l’échange, et part. […] Il découvre enfin que Trivelin a ordonné le repas ; il se doute que la clef inconnue est celle de la chambre du fourbe ; il va l’essayer, ouvre la porte, entre, trouve une montre d’or, la vend et invite ensuite Pantalon avec toute sa famille à souper.

171. (1864) Études sur Shakespeare

Telle eût été en effet la promotion graduelle par laquelle le commissionnaire de la porte aurait pu s’élever jusqu’à l’entrée des coulisses. Mais, en tournant ses idées vers le théâtre, est-il vraisemblable que Shakespeare les eût arrêtées à la porte ? […] À Noël, devant la porte des châteaux, le héraut, portant les armes de la famille, criait trois fois : « Largesse ! […] L’intervention du peuple, qui porte une si lourde part du poids de l’histoire, est assurément légitime, au moins dans les représentations historiques. […] Le personnage qui fait marcher le drame est aussi celui sur qui se porte l’agitation morale du spectateur.

172. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Début d’un article sur l’histoire de César »

Ce César-là, qu’on le blâme ou qu’on l’approuve, porte en lui toutes les foudres et les flammes, comme les séductions et les grâces : il est bien véritablement le fils de Vénus ! […] Et cela, jusqu’à un certain point, est vrai : car, même avec tous ces défauts, avec toutes ces lacunes et ces creux qui se révèlent dans leurs pensées habituelles et dans la forme de leur caractère, la société ébranlée est encore trop heureuse de les avoir rencontrés un jour et de s’être ralliée à deux ou trois des qualités souveraines qui sont en eux : elle doit désirer de les conserver le plus longtemps possible, et tant qu’il porte et s’appuie sur leurs épaules même inégales, il semble que l’État dans son penchant ait encore trouvé son meilleur soutien.

173. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Objections d’un moraliste contre l’exposition de 1900. » pp. 162-167

Une Exposition (et l’Exposition, ce sera tout Paris, de la Porte Saint-Martin au Bois de Boulogne) est essentiellement un endroit où les étrangers et les provinciaux viennent tirer des bordées. […] Une année d’Exposition, c’est l’hégire sainte pour tout ce qui porte une âme de maquignon, de négrier ou de forban cosmopolite.

174. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Augier, Émile (1820-1889) »

Vous êtes poète, j’ai voulu surtout marquer votre place, à ce titre, dans la grande littérature, honorer en vous cette constance qui vous porte à chercher les succès difficiles, et vous inviter à marcher résolument dans ce véritable domaine de l’art, que les auteurs comme le public semblent tentés d’abandonner : non que je porte à la comédie en vers une préférence académique et que je lui croie plus de dignité qu’à la comédie en prose ; une grande comédie en prose est assurément une œuvre très littéraire, surtout si elle est l’œuvre d’un seul auteur ; mais la comédie en vers a cet avantage d’une langue particulière qui parle à la mémoire, et d’un art choisi, précis, délicat, et d’autant plus difficile que les esprits auxquels il s’adresse sont plus cultivés.

175. (1929) Amiel ou la part du rêve

Se porte-t-il plus violemment vers ce quatrième quart : les femmes ? […] On eût dit que l’avenir lui ouvrait ses portes à deux battants. » C’est Genève qui ferme sur lui ses portes à deux battants. […] À l’hôtel leurs chambres sont voisines : sans doute la lettre n’a qu’à passer sous une porte. […] De la porte sous laquelle cette lettre a passé, un seul des deux verrous est mis. […] Un jour, il trouve dans des papiers de famille des lettres de ses grands-parents, et il les porte à sa sœur.

176. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

Valjean se montre à propos, porte le seau de l’enfant, et rentre à l’auberge des Thénardier. […] Ce logis communiquait, par derrière, par une porte masquée et ouvrant à secret, avec un long couloir étroit, pavé, sinueux, à ciel ouvert, bordé de deux hautes murailles, lequel, caché avec un art prodigieux et comme perdu entre les clôtures des jardins et les cultures dont il suivait tous les angles et tous les détours, allait aboutir à une autre porte également à secret, qui s’ouvrait à un demi-quart de lieue de là, presque dans un autre quartier, à l’extrémité solitaire de la rue de Babylone. […] Il avait fait rétablir les ouvertures à secret des deux portes de ce passage. […] On mettait le bois et le vin dans une espèce de renfoncement demi-souterrain tapissé de rocailles qui avoisinait la porte de la rue de Babylone et qui autrefois avait servi de grotte à M. le président ; car, au temps des Folies et des Petites-Maisons, il n’y avait pas d’amour sans grotte. « Ni Jean Valjean, ni Cosette, ni Toussaint, n’entraient et ne sortaient jamais que par la porte de la rue de Babylone.

177. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

— Moâ, bien content — reprend l’Anglais qui parle très mal le français — je ne suis pas un astronome, je ne suis pas un géologue… les choses que je ne sais pas, ne me regardent pas… je suis un naturaliste… Donc, puisque la Bible dit que c’est un ruminant, et que c’est une erreur… la Bible n’est pas un livre révélé… Moâ bien content… » Et il repasse la porte là-dessus, débarrassé tout à coup de sa religiosité. […] Un jour qu’il était amené par son désir de voir les deux sœurs devant la maison, tout le monde était en émoi sur la porte. […] Enfin m’y voici, et de l’autre côté de la porte, fouillant de l’œil le dessus de la barrière, pour voir s’il y a des rangées d’exemplaires. […] Il sent qu’un nouveau livre le laisse où il est, ne le porte plus en avant. […] * * * — Je rapporte de la Porte chinoise, un petit foukousa rose, de ce ton adorablement faux, qu’on appelle rose turc.

178. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

Habitués, depuis des siècles, à promener de porte en porte notre individualité littéraire, nous avions pris pour nous conduire cette accorte femme, madame de Staël, et nous nous tenions à la porte du pays de Lessing et de Schiller, lui demandant la charité d’une littérature et d’une philosophie.

179. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

Le poète, terrible et terrifié, a voulu nous faire respirer l’abomination de cette épouvantable corbeille qu’il porte, pâle canéphore, sur sa tête, hérissée d’horreur. […] Depuis le coupable cousu dans un sac qui déferlait sous les ponts humides et noirs du Moyen Age, en criant qu’il fallait laisser passer une justice, on n’a rien vu de plus tragique que la tristesse de cette poésie coupable, qui porte le faix de ses vices sur son front livide. […] Sensualiste, mais le plus profond des sensualistes, et enragé de n’être que cela, l’auteur des Fleurs du mal va, dans la sensation, jusqu’à l’extrême limite, jusqu’à cette mystérieuse porte de l’infini à laquelle il se heurte, mais qu’il ne sait pas ouvrir, et de rage il se replie sur la langue et passe ses fureurs sur elle.

180. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Nous nous disions qu’ils étaient sortis du dix-huitième siècle par cette grande porte sanglante et qu’ils n’y rentreraient pas par la porte basse de quelque petite maison pour chercher le mouchoir oublié de quelque comédienne du temps, avec ces mains qui s’étaient purifiées en touchant pieusement les reliques de la reine de France. […] Ils la plaquent de rouge, cette pauvre imagination, qui est née très-fraîche, et ils la flétriront, s’ils continuent, car il n’y a pas de mensonge innocent, et on porte la peine de son fard comme de ses autres menteries, mais enfin ils en ont !

181. (1925) Proses datées

La porte de l’escalier ouvrait sur une minuscule antichambre. […] Aussi, reportons-nous encore au jugement qu’en porte Alfred Capus. […] Leur phrase porte sa marque distinctive. […] Dans le mur est ménagée une porte basse qu’une glycine enguirlande. […] Une cloison nous arrête où est pratiquée une petite porte basse.

182. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

La garnison chinoise se rangea tout aussitôt pour laisser passer le Francis sâheb avec sa troupe, et les portes de Bekar (si Bekar a des portes) s’ouvrirent respectueusement devant lui. […] Runjet-Sing n’est pas mort ; il vivait à l’époque du voyage de Jacquemont, en 1831, et tout porte à croire qu’il vit encore. […] Runjet-Sing a 51 ans ; il est de moyenne stature et porte une longue barbe blanche. […] Après quoi, la princesse le fit mettre à la porte par les deux épaules. […] Vraiment, la révolte, la révolte à main armée (Quintilia porte toujours un poignard !)

183. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

De telles pièces où peut pâlir la couleur, mais où chaque mot fut dicté par le sentiment, ne devraient jamais vieillir : Quelle faveur inespérée M’a rouvert les portes du jour ? […] Je porte dans mon sein le poison qui me tue ; Changerais-je de sort en changeant de soleils ? […] « Ce dernier point est pour moi, dit-il, de première nécessité ; je n’y tiens pas moins que le favori de Mécène : encore veux-je qu’il soit enclos, non pas d’un fossé seulement ou d’une haie vive, mais d’un bon mur de hauteur avec des portes solides et bien fermées. […] Une urne cinéraire, placée sur un tertre de gazon, porte le nom de Tibulle, et sur l’écorce du bouleau voisin on lit ces deux vers de Domitius Marsus : Te quoque Virgilio comitem non æqua, Tibulle, Mors juvenem campos misit ad Elysios. […] Il était un peu de ces gens dont on dit bien du mal quand ils sont loin, et qu’on embrasse, qu’on se remet à aimer irrésistiblement sitôt qu’on les revoit ; de même pour ses vers : la meilleure manière d’adoucir le jugement raisonné qu’on en porte, c’est de les revoir et de les introduire en personne.

184. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

Je porte envie aux gamins qui entendent ces chefs-d’œuvre, destinés sans doute, comme les vrais chefs-d’œuvre, à rester toujours inédits. […] — Il attend queje lui porte mes souliers ; je les lui porterai quand la leçon sera finie, et il entendra l’histoire. […] On les retire évanouis, presque asphyxiés ; Édouard était couvert d’affreuses brûlures, dont il porte encore la trace profonde. […] Cadet Simian est la providence des jours sombres ; on vient frapper à sa porte toutes les fois que la vie se montre à Maillane par ses côtés austères. […] Elle n’a pas, comme les autres jeunes filles de la campagne, suivi le changement des modes ; elle a gardé son costume et sa coiffure de villageoise ; elle le porte avec une rare distinction ; car voici la silhouette exquise que M. le curé de Château-l’Évêque nous a envoyée d’elle : « Un trait vous fera comprendre l’impression profonde que l’on ressent en voyant Emmeline Nadaud.

185. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Quelquefois, à un moment donné, le type sort tout fait d’on ne sait quelle collaboration du peuple en masse avec un grand comédien naïf, réalisateur involontaire et puissant ; la foule est sage-femme ; d’une époque qui porte à l’une de ses extrémités Talleyrand et à l’autre Chodruc-Duclos, jaillit tout à coup, dans un éclair, sous la mystérieuse incubation du théâtre, ce spectre, Robert Macaire. […] il frappe gravement à la porte de l’infini, et dit : Ouvre, je suis Dante. […] Il est à distance de la catastrophe dans laquelle il se meut, du passant qu’il interroge, de la pensée qu’il porte, de l’action qu’il fait. […] Le fardeau de Hamlet est moins rigide que celui d’Oreste, mais plus ondoyant ; Oreste porte la fatalité, Hamlet le sort. […] Il porte d’abord l’empire, puis l’ingratitude, puis l’isolement, puis le désespoir, puis la faim et la soif, puis la folie, puis toute la nature.

186. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Plan, d’une université, pour, le gouvernement de Russie » pp. 433-452

Une université est une école dont la porte est ouverte indistinctement à tous les enfants d’une nation et où des maîtres stipendiés par l’État les initient à la connaissance élémentaire de toutes les sciences. […] C’est que rien ne lutte avec tant d’opiniâtreté contre l’intérêt public que l’intérêt particulier ; c’est que rien ne résiste plus fortement à la raison que les abus invétérés ; c’est que la porte des compagnies ou communautés est fermée à la lumière générale qui fait longtemps d’inutiles efforts contre une barrière élevée pendant des siècles ; c’est que l’esprit des corps reste le même tandis que tout change autour d’eux ; c’est que de mauvais écoliers se changeant en mauvais maîtres, qui ne préparent dans leurs écoliers que des maîtres qui leur ressemblent, il s’établit une perpétuité d’ignorance traditionnelle et consacrée par de vieilles institutions ; tandis que les connaissances brillent de toutes parts, les ombres épaisses de l’ignorance continuent de couvrir ces asiles de la dispute bruyante et de l’inutilité. […] Je suppose que celui qui se présente à la porte d’une université sait lire, écrire et orthographier couramment sa langue ; je suppose qu’il sait former les caractères de l’arithmétique, ce qu’il doit avoir appris ou dans la maison de ses parents ou dans les petites écoles. Je suppose que son esprit n’est pas assez avancé, et que la porte de l’université ne lui sera pas encore ouverte, s’il n’est pas en état de saisir les premiers principes de l’arithmétique, de toutes les sciences la plus utile et la plus aisée. […] Darcet, connu par l’alliage fusible qui porte son nom, était l’élève et l’ami de Rouelle.

187. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

On y discerne, on est frappé par un cavalier vu par le dos et par la croupe de son cheval blanc et vigoureux ; il porte un étendart qu’un fantassin, qui est à sa gauche, cherche à lui enlever avec la vie ; mais ce cavalier a saisi la garde de l’épée du fantassin, et va lui plonger la sienne dans la gorge. […] Dans une espèce de détroit ou d’anse formée par ces dernières, une mer qui s’y porte avec fureur. Sur leur penchant dans la demi-teinte, homme assis soutenant par la tête une femme noyée qu’un autre, sur la pente en dessous, porte par les pieds. […] Sur un plan entre les chevaux et le bouc, un autre pâtre ; proche de celui-ci, un ânon ; autour de l’ânon, en allant vers la droite, quelques moutons ; au-dessus des moutons, sur le fond, vaches s’acheminant avec le reste des animaux vers une grande porte ouverte à droite à l’angle intérieur du mur latéral droit. Tout à fait de ce côté, attenant à la porte sur le devant, fabrique de bois ; au pied de cette fabrique, des sacs debout, un crible et d’autres ustensiles.

188. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre IV. Le rêve »

Et, tous ensemble, ils courent à la porte qui vient de s’entr’ouvrir. […] Enfin résonnent de toutes parts, scandés sur un rythme régulier, les cris : « A la porte ! à la porte !  […] Un chien aboyait dans le jardin voisin, et avec chacun des « Ouâ, ouâ » du chien un des cris « A la porte t » se confondait. […] Si tu insistes, si tu exiges qu’on t’explique quelque chose, demande comment ta volonté s’y prend, à tout moment de la veille, pour obtenir instantanément et presque inconsciemment la concentration de tout ce que tu portes en toi sur le point qui t’intéresse.

189. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Restout » pp. 187-190

Sur le devant, au-dessous du trône de Pluton, les portes sombres du Ténare. À côté de ces portes, les trois Parques.

190. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

— C’est vrai… Donnez-moi la canne à épée qui est là, et ouvrez tout doucement la porte. Pélagie entrebâille la porte, et aperçoit trois horribles chenapans… dont l’un lui crie aussitôt : « N’ayez pas peur, Madame !  […] Balzac mort, les créanciers se précipitaient dans la maison, mettaient à la porte par les épaules la femme, se ruaient contre les meubles, dont ils jetaient par terre tout le contenu, tout le papier écrit, qui dans une vente savante, aurait pu faire, dit M. de Lovenjoul, 100 000 francs. […] Il nous peignait les transactions du pays, au moyen d’une barre d’or qu’on porte sur soi, avec une paire de petites balances ; barre sans alliage, et qui se coupe presque aussi facilement qu’un bâton de guimauve. […] Il parle comme autrefois, et semble, par miracle, être revenu à la lucidité de l’intelligence, à la clarté de la parole ; toutefois de son individu qui porte sur son front une grande fatigue, s’échappe une profonde mélancolie.

191. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

La porte ouverte, à la vue de la femme de chambre, crac ! […] Des marchandes commençaient à se montrer en papillotes, sur la porte de leurs magasins. […] Aux portes des restaurants, on chargeait dans des tombereaux les écailles d’huître. […] Au troisième, une porte à un seul battant, ressemblant à la porte d’un commerçant en chambre. […] Nous nous sommes levés ; il nous a reconduits jusqu’à sa porte.

192. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Le Français porte mal le mensonge. […] Ouvrez la porte. La porte du verger à mon époux royal ! […] Les portes étaient enfoncées et l’escalier à moitié démoli. […] Sa Majesté sourit, et, me prenant le menton, daigna me dire : — « Tu n’as pas choisi la plus mauvaise porte.

193. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

De petites filles passent sur le boulevard, de petites filles de sept à huit ans, qui déjà, inconsciemment, font l’œil aux messieurs attablés à la porte des cafés, et je vois une mère obligée de ramener à elle l’attention de sa fifille, en l’enveloppant de la caresse de sa main. […] Huysmans porte sur lui le bonheur du succès de son roman : Là-Bas ; et ce bonheur chez l’auteur d’ordinaire contracté nerveusement sur lui-même, se traduit par le gonflement dilaté d’un dos de chat, quand il ronronne. […] Il le jetait cinq fois par terre, et à la cinquième le boxeur ne pouvait se relever, et restait assis dans un rentrant de porte. […] Il est arrivé aussi que, comme la porte fut laissée toute grande ouverte, des corps en bon état ont beaucoup souffert de la part des loups, qui les ont en partie dévorés. […] Et aujourd’hui encore chez le Japonais Hayashi, la vente se fait aux clients, dans une chambre à la porte fermée, et on ne peut absolument aborder Hayashi, qu’après ambassade.

194. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

Vénus toute seule, assise devant sa porte, est occupée à se peigner et à partager ses beaux cheveux sur ses épaules avec un peigne d’or. […] Ici je traduis aussi exactement qu’il m’est possible : « Cependant l’Amour, à travers l’air blanc, arriva invisible, aussi âpre que l’est aux tendres génisses le taon que les pasteurs appellent la mouche des bœufs ; et bien vite, sous la porte, dès le vestibule, ayant tendu son arc, il tira de son carquois une flèche toute neuve, source de gémissements. […] « Elle dit, et, se levant, elle ouvrit les portes de la chambre, nu-pieds, vêtue d’un simple vêtement ; et elle voulait aller vers sa sœur, et elle avait déjà franchi le seuil. […] Les gardiens des portes avaient de la considération dans la haute antiquité : Homère les appelle sacrés. […] Un seul et dernier trait : c’est au moment où elle se décide à fuir au milieu de la nuit : « … Elle baisa son lit et les deux côtés de la porte, elle embrassa jusqu’aux murailles, et, ayant coupé de ses mains une longue tresse, elle la laissa dans la chambre pour sa mère comme souvenir de sa virginité, et elle s’écria d’une voix gonflée de sanglots : « Cette longue mèche de mes cheveux, je te la laisse en ma place, ô ma mère !

195. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

Simple artisan, ou plutôt artiste, mais artiste d’un talent bien inférieur aux grands statuaires de son temps à Athènes, il sculptait dans son atelier à peine autant qu’il était nécessaire pour nourrir sa femme et ses enfants ; sans cesse distrait du ciseau par la pensée, ouvrant sa porte à tout le monde, interrompant son travail pour répondre aux questions qu’on lui adressait sur toutes choses, courant ensuite de porte en porte et accostant lui-même les passants pour leur parler des choses divines, consumé du zèle de la vérité, missionnaire des foules, semant le bon grain à tout vent de la rue ou de la place publique : homme qu’on aurait considéré comme un fou, s’il n’avait pas été un modèle de toute vertu et un oracle de toute sagesse. […] Quand on vient de lire un ou deux dialogues de Platon, et qu’on a l’esprit véritablement assourdi par ce roulis d’un océan de paroles pour dire la vérité philosophique la plus usuelle, on se dit à soi-même : Il faut que ces Grecs d’Athènes eussent bien des heures de loisir à dépenser par jour sur le seuil de leurs portes, ou sous les platanes de leurs jardins ; il faut qu’ils eussent un bien grand amour de ces escrimes d’idées de leurs sophistes, pour perdre tant de temps et tant de paroles à écouter ce Socrate ou à lire ce Platon ! […] Un jeune homme d’Athènes, plus politique que religieux, nommé Mélitus, qui voulait se faire un nom populaire en se posant en vengeur des dieux chers à l’ignorance et au fanatisme du bas peuple, porte l’accusation contre Socrate ; il l’accuse de corrompre la jeunesse par des doctrines qui sapent le ciel. […] Le geôlier, qui leur ouvre les portes, les prie d’attendre un peu, parce qu’on ôte en ce moment les fers du condamné : les fers tombés, ils sont introduits. […] Le type suprême et universel de ces idées, l’exemplaire primitif et sans autre exemplaire que lui-même de ces idées, c’est Dieu, idée par excellence, qui a tout imaginé et créé à son image, âme et matière, il porte en lui les essences, c’est-à-dire les qualités essentielles, fondamentales, de tous les êtres animés ou inanimés.

196. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Les manches à gigot, par exemple, on en porte depuis quinze ans ! […] Porte close ! En vain il frappe, il frappe à la porte de son ami, rien ne bouge ! […] La porte s’ouvre, et M.  […] c’est lui qui décrochait les enseignes, plaçant la sage-femme à la porte du cabaret, et le bouchon du cabaret à la porte du conseiller !

197. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Un des plus beaux sonnets de Ronsard, et qui le caractérisent le mieux dans son feu d’étude, dans sa lièvre de poésie et de travail, c’est celui qui commence par ces vers empressés, impétueux : Je veux lire en trois jours L’Iliade d’Homère, Et pour ce, Coridon, ferme bien l’huis sur moi… Il y ordonne à ce laquais, Corydon, de tenir sa porte exactement close et de ne le déranger pour rien au monde, sous peine d’éprouver à l’instant sa colère. […] alors la consigne tomberait à l’instant ; mais, hormis pour elle, il est invisible à l’univers : Au reste, si un dieu vouloit pour moi descendre Du ciel, ferme la porte et ne le laisse entrer. […] et, selon que cette lecture directe et familière leur a été possible ou non, n’y aurait-il pas un certain trait à en déduire par rapport à chacun, une certaine réflexion qui porte sur l’ensemble du talent ? […] Ce n’est pas des Portes, déjà tout Italien et déchu des grandes sources ; ce n’est pas le doux et languissant Bertaut ; ce n’est pas le vigoureux Regnier, purement participant des satiriques italiens et latins.

198. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

Un aperçu piquant qu’on saisit en l’air et qu’on attrape à la volée, une anecdote d’alcôve, n’est point une raison sérieuse, et il faudrait laisser à la porte de la sévère histoire toutes ces sciences conjecturales et qui sont à naître ou à peine nées encore. […] Souvent il porte ses coups en l’air, comme un taureau furieux, qui, de ses cornes aiguisées, va se battre comme les vents16. […] qu’il porte dans son cœur l’audace d’Achille, sans en avoir la férocité ! […] C’est par politesse que Fénelon dit de Mélanthe qu’il est comme un taureau qui porte ses coups en l’air : le duc de Bourgogne portait souvent ses coups moins à faux et battait son valet de chambre pendant que celui-ci était eu train de l’habiller.

199. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Le premier Recueil de Loyson, publié en 1817, porte tout à fait le cachet du temps. […] De même qu’une conférence sur Millevoye serait privée de son plus gracieux ornement si l’on n’y récitait la Chute des feuilles, de même un article sur Loyson serait sans sa couronne si l’on n’y mettait cette élégie du Retour à la vie ; il y répond à des amis qui, le voyant revenu d’une terrible crise, lui conseillaient d’aller respirer l’air natal :    Quelle faveur inespérée    M’a rouvert les portes du jour ? […] pour mon âme abattue    Tous lieux sont désormais pareils : Je porte dans mon sein le poison qui me tue ; Changerai-je de sort en changeant de soleils ? […] La pointe finale est purement fortuite et due au hasard du nom ; elle porte à faux et n’atteint pas le faible du talent, car si Loyson a un défaut, ce n’est pas la lourdeur, c’est la pâleur.

200. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Ô porte du jardin qui grince sur ses gonds Et s’écarte en chassant des graviers autour d’elle, Cependant qu’apparaît, plein de lys et d’ombelles, Le verger vert avec son odeur d’estragon. […] On entend si bien cette porte du jardin qui, en s’ouvrant, balaie les graviers que le vent ou les pluies accumulent toujours contre son vantail. Et cette porte où conduit-elle ? […] De ce qui précède, on peut donc inférer qu’à l’origine la loi de la succession des rimes a été dictée par la musique, et ce qui porte à croire cette assertion, c’est la phrase de Joachim du Bellay : « Il y en a qui fort superstitieusement entremeslent les vers masculins avec les vers féminins… afin que plus facilement on les peust chanter sans varier la musique pour la diversité des mesures qui se trouveroient en la fin des vers. » Ronsard, qu’on ne peut jamais trop consulter, s’exprime ainsi sur la rime dans son Art poétique : « La Ryme n’est autre chose qu’une consonance et cadance de syllabes, tombantes sur la fin des vers, laquelle je veulx que tu observes tant aux masculins qu’aux féminins, de deux entières et parfaictes syllabes, ou pour le moins d’une aux masculins pourveu qu’elle soit résonante et d’un son entier et parfaict. » Mais nulle part, il ne promulgue une règle à suivre sur l’alternance des rimes.

201. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Tallemant des Réaux »

Si le mot est vrai qu’« il n’est pas de héros pour les valets de chambre », on dirait le livre de Tallemant écrit sur le rapport de laquais qui ont écouté aux portes et qui l’auraient renseigné. […] Fut-ce un instrument à l’aide duquel il put crocheter tout doucement et sans faire de bruit la porte de certains salons qui, sans cela, ne se seraient jamais ouverts devant sa mince personne et l’obscurité de son nom ? […] Malgré la beauté de ses attitudes et le diadème de toutes ses gloires, variées comme les feux du diamant, et qu’il porte sur le front de son Louis XIV, le xviie  siècle n’est pas seulement coupable des crimes et des vices du XVIIIe en vertu de la solidarité qui lie entre elles les générations.

202. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Balzac, dont le nom surgit fatalement quand on parle des romanciers du xixe  siècle, — mesure terrible qui montre combien ils sont petits en comparaison de cette grandeur, — ne fut point de cette Académie, dont la porte, à peine poussée par M.  […] Ils sont sains… Ils nous apportent beaucoup de rafraîchissement, peu de lumière, et la paix ; — et, pour la peine qu’ils n’ont pas eue en nous donnant tout cela, tout leur est de velours, même les gonds de la porte des Académies. […] L’enfant, durement chassée par l’implacable, va disparaître… Elle est presque à la porte, quand le cœur fond à Renée de Penarvan, qui se jette à l’enfant comme une lionne : et le charme de l’orgueil est rompu !

203. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

—  « Alors, dit Luther, je me sentis comme rené, et il sembla que j’entrais à portes ouvertes dans le paradis. » Que reste-t-il à faire après cette rénovation du cœur ? […] La sombre imagination a tressailli, comme une femme enceinte, et son fruit grossit chaque jour déchirant celui qui le porte. […] Un quaker vint à la porte du Parlement avec une épée tirée, et blessa plusieurs personnes présentes, disant que le Saint-Esprit lui avait inspiré de tuer tous ceux qui siégeaient à la Chambre. […] —  Et je vis dans mon rêve que ces deux hommes arrivaient à la porte. […] Il y en avait aussi qui avaient des ailes, et se répondaient l’un à l’autre sans interruption, disant : Saint, Saint, Saint est le Seigneur. —  Et ensuite ils fermèrent les portes.

204. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Il ouvrit toutes grandes ses petites portes à presque tous les jeunes amis du maître de Médan. […] Par une rencontre assez bizarre, il y a, au ciel et dans les livres d’astronomie, une étoile qui porte ce nom. […] Il a gravi les Alpes, changeant contre un bâton de touriste la branche d’aubépine que l’on porte à la main au retour de Clamart. […] Quiconque détruit une croyance ne se borne pas à détruire cette croyance, il porte atteinte à la foi elle-même. […] Le vieillard, en sursaut, se dresse vers la porte !

205. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XI. Suite des machines poétiques. — Songe d’Énée. Songe d’Athalie. »

Porte au-delà des mers leur image chérie, Et fixe-toi près d’eux dans une autre patrie. » Il dit ; et dans ses bras emporte à mes regards La puissante Vesta qui gardoit nos remparts, Et ses bandeaux sacrés, et la flamme immortelle Qui veilloit dans son temple, et brûloit devant elle80. […] Ici, c’est un tombeau, là, une aventure attendrissante, qui déterminent la limite d’un pays ; une ville nouvelle porte une appellation antique ; un ruisseau étranger prend le nom d’un fleuve de la patrie.

206. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Nous n’osâmes pas frapper à la petite porte verte. […] Un moment après, l’habit noir reparut sur le seuil de la maison, et referma la porte. […] Ils gardaient la porte de la gloire et de l’opinion. […] Une porte ouverte laissait voir une salle d’étude. […] … Ne vous avons-nous pas obéi quand vous nous avez fait garder les portes des riches pendant les nuits de Février, et éteindre l’incendie des Tuileries et de Neuilly ?

207. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

Van Dyck ; mais, auprès du grand public, le théâtre porte seul. […] Le jour baisse, des portes se ferment avec un bruit qui se perd peu à peu sous les voûtes. […] Elle porte une robe troussée très haut pour pouvoir courir ; sa chevelure noire voltige, dénouée ; une ceinture, faite de peaux de serpents, entoure sa taille. […] Quand la plainte d’Amfortas atteint sa plus grande intensité, il porte la main à son cœur28, comme s’il venait d’y recevoir une nouvelle blessure, puis reste sans mouvement. […] Octave Maus, que l’on est sûr de rencontrer à Bayreuth chaque fois que le Buhenfestspielhaus rouvre ses portes.

208. (1879) À propos de « l’Assommoir »

A droite de la porte, au-dessus d’un sofa en velours rouge, on remarque surtout le portrait de M.  […] A droite et à gauche de la porte de communication, deux armoires Louis XVI sont remplies des ouvrages favoris de M.  […] qu’a-t-il donc à fermer les portes si fort ? […] (Elle s’en va en laissant la porte ouverte) SCÈNE XII. […] Tout porte à croire qu’il triomphera : il a pour lui des écrivains de talent ; M. 

209. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Introduction » pp. 2-6

La critique est à l’histoire de la littérature ce que la politique est à la sociologie, la médecine à la physiologie ; l’une applique ce que l’autre a trouvé et prouvé ; l’une veut agir immédiatement sur les hommes et les choses ; l’autre porte dans l’étude des lois de la vie un désintéressement absolu et une sérénité toute scientifique. […] Sur la porte par où l’on y pénètre devrait se lire cette inscription : Vous qui entrez ici, mettez bas toute passion autre que l’amour de la Vérité d’abord et de la Beauté ensuite.

210. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Hallé » pp. 71-73

Dans ce mauvais tableau il y a pourtant de la perspective, et les figures fuient bien du côté de la porte du fond. […] Dans nos campagnes les mieux ravagées par l’intendance et la ferme, dans la plus misérable de nos provinces, la Champagne pouilleuse ; là où l’impôt et la corvée ont exercé toute leur rage ; là où le pasteur réduit à la portion congrue n’a pas un liard à donner à ses pauvres ; à la porte de l’église ou du presbitère ; sous la chaumière où le malheureux manque de pain pour vivre et de paille pour se coucher, l’artiste aurait trouvé de meilleurs modèles.

211. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

NUCK indique déjà en 1682 les conduits de la glande qui porte son nom, mais il n’en annonce la découverte complète qu’en 1685. […] GEORGE WIRSUNG trouva le premier sur l’homme le conduit qui porte son nom. […] Le même chien porte également une bouteille attachée à un conduit salivaire, sans que l’auteur parle de la salive. […] On dirait que le petit conduit pancréatique est une sorte de bifurcation du gros conduit, qui se porte en retour dans la tête du pancréas, et qu’il a plus de tendance à rapporter les fluides dans le gros conduit qu’à les déverser dans l’intestin. […] Le pancréas se gonfla, devint comme emphysémateux ; et je vis en même temps une grande quantité de cet air ainsi poussé dans le conduit pancréatique passer par grosses bulles dans les veines du pancréas et aller ainsi dans la veine porte.

212. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Quelle que soit l’estime que l’on porte à un homme ou à un peuple, le moment de le louer n’est pas celui où l’on est injustement accusé par lui ; la justice même en pareil cas ressemblerait à de la crainte. […] Jusqu’à l’indien rivage Le ramier porte un message Qu’il rapporte à nos climats ; La voile passe et repasse : Mais de son étroit espace Leur âme ne revient pas. […] — Car les hôtes de ces solitudes sont bien rares, et il faut bien s’en défier, ajouta-t-elle avec grâce ; mais il y en a dont l’arrivée porte bonheur à une maison. […] Mais le rocher, le châtaignier, la pelouse, aussi large que ses racines s’étendent et que son ombre porte, et ce verger entre ces pierres grises avec ces vingt pas d’herbe autour de la maison, et les trois figuiers, tout cela est à nous ; et cela nous suffit bien pour nous cinq, tant que le bon Dieu et la Madone ne nous auront pas envoyé d’autres petites bouches de plus pour sucer le rocher qui nous nourrit tous. […] Le père soupira ; la jeune sposa ne dit rien, mais elle se leva de table et inclina involontairement la tête hors de la porte, comme si elle avait pu reconnaître, de l’oreille, les pas de son amant dans la nuit ; puis elle rentra tristement, sourit à son enfant, lui fit couler deux ou trois gouttes de lait sur les lèvres, et revint s’asseoir à côté de la vieille aïeule.

213. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Sur quoi sa veuve inconsolable pousse un léger soupir et porte un mouchoir de dentelle à ses yeux brillants. […] Ce bon jeune homme si mal déguisé égayerait décemment une comédie de genre ; mais il n’est pas à sa place dans une pièce qui porte le titre effrayant de la Contagion. […] Cantenac est bien mort, mais d’Estrigaud se porte à merveille : sa blessure était apocryphe, le médecin était un compère, et cette agonie contrefaite n’est qu’une mise en scène romanesque destinée à faire passer son mariage scandaleux avec Navarette et ses trois millions. […] Il déclare que le mourant se porte à merveille et qu’il en est quitte pour une bande de taffetas d’Angleterre appliquée sur une écorchure. […] D’un jour à l’autre, cet homme est ruiné, déshonoré, déclassé ; il sera demain mis au ban de tous les clubs et consigné à la porte de tous les salons ; il reçoit, pour dernier affront, le coup de pied de la biche, plus rude encore à endurer que celui de l’âne.

214. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1855 » pp. 77-117

Il porte une casquette de loutre dont la visière est relevée. […] Par la baie d’une porte ouverte, un garçon étendant un tapis sur un billard, et derrière lui un autre entrant dans la pièce avec un matelas roulé sur sa tête. […] Un marchand de vin dont la lanterne porte, sur un fond bleu, un pierrot en blanc avec au-dessus : Au vrai Pierrot. […] Puis, de temps en temps, dans le silence de la rue, le bruit d’une porte à contrepoids qui s’entrouvre violemment et donne passage à deux ou trois hommes, coiffés de petits bonnets de toile, traversant au pas de course la chaussée, et entrant chez un marchand de vin. […] Aujourd’hui j’ai poussé la petite porte verte de derrière la serre, jadis l’entrée des artistes.

215. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

» jette Hébrard, — et comme on cherche à voir dans le blanc de ses yeux, s’il est sérieux ou s’il blague, — le directeur du Temps improvise une théorie, éloquemment paradoxale, dans laquelle il proclame que le café, est une sorte d’école normale d’humanité très parfaite, où l’on arrive de suite au ferraillement et au corps à corps, sans les salamalecs et les exordes de la porte. Du Mesnil raconte ensuite, comment Gambetta a eu l’œil crevé, c’est par la pointe d’un couteau qu’un repasseur, établi à la porte de sa maison, promenait sur sa meule, et dont l’enfant s’était trop approché, pour voir les étincelles. […] Au premier, les magasins : des pièces basses au plafond noirci par la lumière du gaz ; aux portes et aux plinthes peintes en noir, dans des encadrements dorés, aux murs tendus de verdures du vert le plus triste, et comme choisi exprès, à l’effet de faire ressortir la fraîcheur et la gaieté des soies et des satins pour robes. […] Il porte un veston à large collet de velours ouvrant en cœur sur la poitrine, un collet, où sont toujours piquées deux ou trois épingles pour les besoins de son métier. […] Le fils aîné de Daudet avait entendu jeudi, à travers la porte, son père me dire qu’il avait envoyé des témoins à Delpit.

216. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

À défaut de la protection dont vous n’avez plus besoin aujourd’hui, ce qui vous reste acquis de ma part, c’est l’affection que je vous porte, etc. […] Elle ne porte dans aucune de ces deux vies si distinctes ni regret, ni fatigue, ni ennui de l’autre. […] Elle a fondé un établissement qui porte son nom, destiné aux jeunes filles incurables. — Il faut l’avoir vue, me dit-on, au milieu de cette enfance, partout ailleurs aimable, ici disgraciée, qui n’a que des laideurs et des misères à offrir : elle apparaît et console. — Sa maison est une sorte de ministère des grâces.

217. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française, par M. D. Nisard. Tome iv. » pp. 207-218

Il s’établit au fond de nous une sorte d’intelligence et de connivence presque forcée entre notre talent et notre jugement, surtout quand ce jugement porte sur l’objet même auquel se rapporte notre talent habituel. […] Tel est trop souvent le bon sens de Voltaire, et son goût en porte la peine. […] Nisard, terminé ainsi qu’il a été conçu et sans que l’auteur ait jamais dévié de sa ligne principale, peut être considéré, d’après le point de vue didactique et moral qui y domine, comme une protestation contre le goût du temps, il en est à la fois un témoignage, et il en porte plus d’un signe par la nouveauté du détail, par la curiosité des idées et de l’expression : ce dont je le loue.

218. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens I) MM. Albert Wolff et Émile Blavet »

Il y a, a la première page, une vignette qui représente un long poète en redingote sur un promontoire, les cheveux dans la tempête, ou un ange en robe blanche qui porte une harpe. […] Admirable journal d’ailleurs, à l’affût de tout ce qui surgit un moment sur l’horizon de Paris ; le journal-barnum, le mieux informé des journaux, c’est-à-dire rempli jusqu’aux bords de choses superflues ; souple et accommodant comme l’aimable valet de comédie dont il porte le nom ; étalant en première page les opinions politiques du comte Almaviva et entr’ouvrant la quatrième aux menues industries du mari de Rosine. […] S’il parcourt les églises pendant le carême, il sait qu’il est convenable d’y porter une âme religieuse, et il l’y porte… Mais comme on sent que tout cela lui est égal !

219. (1811) Discours de réception à l’Académie française (7 novembre 1811)

Laujon, y est venu prendre séance le jeudi 7 novembre 1811, et a prononcé le discours qui suit :   Messieurs, Cette imposante solennité porte dans mon âme un trouble dont je cherche en vain à me défendre ; glorieux de vos suffrages, étonné de mon bonheur, j’éprouve l’embarras d’un disciple qui s’assied pour la première fois parmi ses maîtres. […] L’homme a beau varier ses compositions, l’écrivain a beau s’exercer dans les genres les plus différents, tout ce qui sort de sa plume porte le cachet de son talent naturel. […] Le dix-huitième commence, et les mœurs se dépravent encore ; mais ce n’est point ce désordre seul qui afflige les regards de l’observateur ; une plaie cruelle porte ses ravages jusque dans le cœur, de l’État.

220. (1824) Notice sur la vie et les écrits de Chamfort pp. -

Les deux ouvrages imprimés eurent, devant le public, le même sort qu’à l’académie de Marseille : on en porte encore aujourd’hui le même jugement ; et celui de Chamfort est resté comme un des morceaux les plus précieux que le genre de l’éloge nous ait fournis. […] Étonné de vivre et résolu de mourir, il saisit un rasoir, essaie de se couper la gorge, y revient à plusieurs reprises, et se met les chairs en lambeaux ; l’impuissance de sa main ne change rien aux résolutions de son âme ; il se porte plusieurs coups vers le cœur, et commençant à défaillir, il tâche par un dernier effort de se couper les deux jarrets, et de s’ouvrir les veines. […] Les personnes qui se trouvaient chez lui, et avec lesquelles il venait de dîner, averties de ce qui se passait par le bruit du coup de pistolet et par le sang qui coule à flots sous la porte, se pressent autour de Chamfort pour étancher le sang avec des mouchoirs, des linges, des bandages ; mais lui, d’une voix ferme, déclare qu’il a voulu mourir en homme libre, plutôt que d’être reconduit en esclave dans une maison d’arrêt, et que si, par violence, on s’obstinait à l’y traîner dans l’état où il est, il lui reste assez de force pour achever ce qu’il a commencé.

221. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

La France étant à la tête de la civilisation, il ne faut jamais oublier que ce que je dis porte, dans son sens le plus général, sur toute l’Europe. […] Ils devraient cependant être bien rassurés à présent ; car il ne peut plus être question de rétablir notre vieille religion sociale, mais d’affaiblir la haine qu’on lui porte, et d’établir que ses dogmes nous furent utiles. […] Il porte uniquement sur ce qu’on a voulu faire une révolution, et que la révolution était faite ; il ne s’agissait que de la constater.

222. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des Pyrénées »

Cette publication importante, cet âpre travail où les faits tiennent une si grande place, et malheureusement toute la place, ce précis rapide, serré, virilement écrit, d’une, histoire à peu près inconnue, — car l’Espagne et la France, en se pressant l’une sur l’autre dans leurs luttes, l’avaient étouffée, cette histoire de peuples intermédiaires étranglés, écrasés entre les portes des deux pays, — on se demande, quand on la lit ou qu’on l’a lue, au profit de qui ou de quoi la voilà écrite, avec cette science et cette conscience, si ce n’est au profit isolé de l’auteur ? […] Mais pourquoi n’allume-t-il pas plus souvent sa torche à ce foyer de doctrines que tout homme, avant de toucher à l’Histoire, porte en soi, comme un a priori sublime, — qui n’est pas toujours un parti pris, comme le croient de sceptiques imbéciles, mais qui est souvent la prise de l’homme par la vérité ! […] Or, cette espèce d’histoire-là, ce ne sont pas les renseignés, les savants, les attachés et les attelés aux faits qui la composent, tous ces gens qui, voulant faire un livre exact et impartial, n’ont qu’à barrer leurs portes et rester assez indifférents pour ne jamais mentir ; mais bien ceux plutôt qui impriment leur pensée et leurs doctrines sur la face brute de l’Histoire.

223. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Peyrat que d’abord je ne suis pas normand, et que sa demi-épigramme porte à faux. […] que de choses affectueuses, intimes, il m’a dites entre quatre-z-yeux et les portes closes ! […] Biot jusqu’à la porte de ce dernier, a dit tel bon mot, — comme si Alfred de Musset avait jamais pu accompagner M.  […] Victor Hugo ne fermait jamais sa porte, même pendant ses repas. […] Le hasard voulait que je demeurasse, sans le savoir, porte à porte avec lui : il habitait alors rue de Vaugirard, au n° 90, et moi, je demeurais avec ma mère même rue, au n° 94.

224. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

On se battit fort et ferme à la porte des marionnettes-Godard. […] c’est une raison de plus pour le mettre à la porte, répond la délicatesse française. […] Sa porte est une porte mercenaire ; qui en doute ? […] voilà notre Don Juan qui porte la main à son front et qui s’écrie : — Statue ! […] Justement elle s’arrêta à la porte du jeune homme.

225. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

La pièce qui porte cette adresse, très-belle, mais assez amère, et où il exprime ses plaintes encore plus que ses espérances, semble prouver qu’il n’avait guère prospéré dans l’intervalle, et que la confraternité d’études avec Ptolémée Philadelphe ne lui avait pas beaucoup profité. […] Plus on porte vivant au dedans de soi le sentiment de poétique immortalité, plus on est prêt à se révolter contre cette insensibilité de la nature, et contre cette immortalité suprême qui la laisse indifférente à notre départ, et aussi belle, aussi jeune après nous que devant. […] Ménalcas le premier jette ce ravissant couplet : « Partout le printemps, partout de frais pâturages, partout les mamelles se gonflent de lait, et les petits se nourrissent, là où la belle enfant porte ses pas. […] Voilà le douzième jour depuis que le malheureux n’est plus venu, ni qu’il ne s’est informé si nous sommes morte ou vivante, ni qu’il n’a frappé à la porte, l’indigne ! […] Il donne presque sa parole d’honneur que, si elle ne l’eût mandé, il venait de lui-même à sa porte et pas plus tard que cette nuit ; il y venait avec trois ou quatre amis, dans tout l’appareil d’un vacarme nocturne ou d’une sérénade ; et si on l’avait reçu, c’était bien, il n’aurait demandé que peu pour cette première fois ; mais si on l’avait repoussé et si la porte avait été fermée au verrou, oh !

226. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

Ces rumeurs sont nées à l’occasion de la souscription nationale qui porte mon nom. […] Aussi porte-t-elle la conviction jusqu’au fond de l’âme, et semble-t-elle moins révéler le vrai que le faire jaillir du fond du cœur. […] Le glaive qu’il a à la main le blesse dès qu’il le porte à faux, et tout l’éclat de sa couronne ne doit pas coûter un soupir au dernier de ses sujets. […] Je sens tout le poids du fardeau que je porte, mais je continuerai de le porter autant de temps que les forces me le permettront. […] Ce que dit à ce sujet le lettré porte avec soi sa réfutation, ne mérite aucune réponse et n’est digne que de mépris.

227. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLe entretien. Littérature villageoise. Apparition d’un poème épique en Provence » pp. 233-312

Plus de paroles, plus de repos (brebis qui bêle perd sa dentée d’herbe) ; le mûrier qui les porte est à l’instant dépouillé tout nu ! […] On porte l’infortuné vannier à la grotte des Fées, dans le vallon d’enfer, pour qu’il soit guéri par les sorcières. […] XXIII Au septième chant Vincent est guéri : il travaille tout pensif à côté de son vieux père, sur la porte de leur cabane, au bord du Rhône. […] » À ces mots le vannier reprit son sac et son bâton derrière la porte. […] Mais son chapeau de Provençale, son petit chapeau à grandes ailes pour défendre des mortelles chaleurs, elle oublia, par malheur, de s’en couvrir la tête… « Cela fini, l’ardente fille prend à la main sa chaussure ; par l’escalier de bois, sans faire de bruit, descend en cachette, enlève la barre pesante de la porte, se recommande aux bonnes Saintes, et part, comme le vent, dans la nuit qui transit le cœur.

228. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIe entretien. Ossian fils de Fingal, (suite) »

Trois fois Caïrbar jette sa lance sur la bruyère, trois fois il porte la main à sa barbe. […] Ossian, porte-moi sur mes collines ; élève le monument de ma gloire. […] Ouvrez leurs portes de nuages, Malvina est prête à vous rejoindre. […] Le vent du nord ouvre tes portes, ô Fingal ; je te vois assis sur les vapeurs au milieu du faible éclat de tes armes. […] Dargo s’avance, semblable au nuage qui porte le tonnerre : ses yeux creux s’enfoncent sous des sourcils épais et menaçants.

229. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

George Sand, à Genève, entendant Liszt jouer un rondo intitulé le Contrebandier, tâche de rendre les impressions qu’elle a éprouvées et compose un conte lyrico-fantastique qui porte le même titre126. […] Le poète y souhaite « pour la France une littérature qu’on puisse comparer à une ville du moyen âge », et si on lui demande ce qu’il a voulu faire lui-même dans son livre, il répond : une mosquée, « la mosquée orientale, au dôme de cuivre et d’étain, aux portes peintes, aux parois vernissées, avec son jour d’en haut, ses grêles arcades, ses cassolettes qui fument jour et nuit, ses versets du Koran sur chaque porte, ses sanctuaires éblouissants, et la mosaïque de son pavé et la mosaïque de ses murailles ; épanouie au soleil comme une large fleur pleine de parfums ». […] Il lui fallait, pour recevoir, plusieurs chambres se faisant suite de plain-pied et communiquant par des portes à deux battants. […] Tout porte la marque d’un siècle voluptueux, de mœurs douces et sensuelles. […] Les robes, agrémentées de bouillonnés, de larges manches pagodes, ont je ne sais quoi de vaporeux, d’aérien, et l’écharpe dont les bouts flottent au vent achève de donner à celle qui la porte l’air d’un oiseau aux grandes ailes.

230. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre II. Les génies »

Éluder un phénomène, lui refuser le payement d’attention auquel il a droit, reconduire, le mettre à la porte, lui tourner le dos en riant, c’est faire banqueroute à la vérité, c’est laisser protester la signature de la science. […] Dans tous les autres poètes, on devine cette communication ; dans Jean, on la voit, par moments on la touche, et l’on a le frisson de poser, pour ainsi dire, la main sur cette porte sombre. […] Sur l’ouverture que Paul avait faite au ciel, l’Église a écrit : Porte condamnée. […] Ces deux génies, Homère et Shakespeare, ferment les deux premières portes de la barbarie, la porte antique et la porte gothique. […] La troisième grande crise humaine est la Révolution française ; c’est la troisième porte énorme de la barbarie, la porte monarchique, qui se ferme en ce moment.

231. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Quant à nous, nous restons tristement au pied de l’échelle, bien convaincu qu’elle porte à faux, et que son sommet n’est qu’un vertige. […] Ne porte point envie à des destins plus beaux ! […] Les larges portes de ce palais étaient ouvertes à deux battants, et laissaient voir les cours, les escaliers, les portiques. […] Je frappai le marteau d’une porte élevée de deux marches au-dessus du quai. La porte s’ouvrit, et je me trouvai tout balbutiant en face d’un serviteur vêtu de noir, dans un petit corridor qui conduisait à un escalier tournant.

232. (1926) L’esprit contre la raison

De Valéry aux surréalistes, tous se réclament de « l’esprit », mais se trouvent pourtant sur des positions antagonistes : ainsi L’Esprit contre la raison peut-il apparaître comme une tentative de résolution philosophique d’une contradiction personnelle qui place Crevel en porte à faux : on le sent à la fois épris de rêve et de conséquence dans la pensée et le discours ; agacé par les attractions irrationnelles des surréalistes autant que par l’apologie de la rationalité occidentale, qu’il voit lui aussi comme une « rationalité restreinte ». […] Un réveil, qu’il s’agisse du réveil pour la vie quotidienne ou de l’autre, le vrai, le réveil dans la nuit, à la porte du rêve et du mystère, ne va jamais sans lutte. […] André Breton ne nous rapporte-t-il point, et non sans raison, dans le Manifeste du surréalisme, que Saint-Pol Roux avait écrit sur la porte de sa chambre à dormir, de sa chambre à rêver : « Le poète travaille. »cg Et ce travail n’a rien à voir avec les festons, astragales et petits mensonges multicolores qui décidaient Pascal à comparer les soi-disant poètes de son siècle à des brodeursch. […] Se suicident ceux-là qui n’ont point la quasi universelle lâcheté de lutter contre certaine sensation d’âme si intense qu’il la faut bien prendre, jusqu’à nouvel ordre, pour une sensation de vérité. […]/ J’ai voulu ouvrir la porte et n’ai pas osé. […] Les tours d’ivoire seront démolies, toutes les paroles seront sacrées et l’homme, s’étant enfin accordé à la réalité, qui est sienne, n’aura plus qu’à fermer les yeux pour que s’ouvrent les portes du merveilleux. » Éluard procède d’une façon proche de Crevel, reprenant les mêmes éléments, citations, notes de lecture qu’il cite parfois de mémoire, recycle et ajuste en des contextes différents, avec des variantes.

233. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Son ciseau conduit par l’ignorance ou la passion vacille et se porte tantôt trop en dedans, tantôt trop en dehors. […] Mais me répond l’artiste, vous ne scavez donc pas que ces vertus sont des dessus de porte, pour un receveur général des finances. […] Je verrois un des enfants qui feroit le guet à la porte. […] J’y porte mes lèvres et je couvre de baisers, tous ces charmes. ô Mercure que fais-tu ? […] Qu’on me porte cela sous les charniers des innocents.

234. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset. »

Rousset, deux cavaliers s’arrêtent à la porte d’un obscur cabaret de Franche-Comté ; bientôt après deux autres cavaliers arrivent ; les uns et les autres portent à leur chapeau du ruban bleu et jaune : c’est un signal ; ils se rapprochent, ils murmurent quelques mots ; une certaine cassette est échangée contre un certain billet ; après quoi les inconnus se séparent, remontent à cheval et disparaissent. […] La foudre, pour être tombée sans bruit et sans éclair, n’en parut que plus prodigieuse. « Tout le monde, écrivait-on de Wurizbourg quelques jours après au baron de Montclar, ne peut revenir de la consternation où l’on est de ce que les Français ont pris Strasbourg sans tirer un seul coup ; et tout le monde dit que c’est une roue du chariot sur lequel on doit entrer dans l’Empire, et que la porte de l’Alsace est fermée présentement. » Cette roue de chariot peut paraître un peu hardie et hasardée : mais ce qui est certain, c’est que la porte, hier encore ouverte sur la terre française, se fermait pour ne se rouvrir désormais que dans le sens opposé. […] La lettre de M. de Chamilly, par laquelle il essaye de disculper sa femme de ce trop de zèle, porte les apostilles suivantes de la main même de Louvois, et c’est en ce sens qu’il dut lui être répondu ; on croit entendre une de ces lettres impératives et sensées comme nous en connaissons, écrites sous une dictée puissante : « Il est bon que Mme de Chamilly se mêle de son domestique et de rien autre chose sur les affaires de cette nature.

235. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre II. Du goût, de l’urbanité des mœurs, et de leur influence littéraire et politique » pp. 414-442

Sous ce rapport, il n’est pas dépourvu d’une sorte de philosophie ; mais cet esprit décourageant arrête le mouvement de l’âme qui porte à se dévouer ; il déconcerte jusqu’à l’indignation ; il flétrit l’espérance de la jeunesse. […] Le mauvais goût, tel qu’on l’a vu dominer pendant quelques années de la révolution, n’est pas nuisible seulement aux relations de la société et à la littérature ; il porte atteinte à la morale. […] L’on dira peut-être que la politesse est un avantage si léger, qu’on peut en être privé sans que ce défaut porte la moindre atteinte aux grandes et véritables qualités qui constituent la force et l’élévation du caractère. […] Si l’on porte la moindre atteinte à sa réputation, on ne peut plus, comme dans la monarchie, relever son existence par son rang, par sa naissance, par tous les avantages étrangers à sa propre valeur.

236. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « La génération symboliste » pp. 34-56

Et si le jeune homme s’obstine, la porte est là. […] Qu’il aille à la bohème ou à l’administration, le germe maladif qu’il porte en lui l’avertit qu’il n’échappera pas à son destin. […] Toute la France, vouée à son culte, s’y porte en pèlerinage, tandis que M.  […] Il faillit être jeté à la porte.

237. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Un pareil masque salit le front qui le porte. […] Le Code français a muré cette porte ; il ne lui offre qu’une triste et sombre impasse, pleine de risques et de scandales : un procès en séparation. […] Le laquais diplomatique qui circule dans la pièce, espionnant des deux yeux, rusant des deux mains, tantôt pour la princesse, tantôt pour le prince, vient lui apprendre que M. de Terremonde, après un faux départ, est rentré chez lui, qu’il s’est embusqué, un pistolet au poing, derrière la porte de son hôtel, et qu’il attend là, à l’affût, l’amant annoncé. […] Tout l’excite à le pousser vers le châtiment : son ressentiment, sa nature ardente, l’idée de justice et de talion conjugal qu’elle n’a, jusqu’ici, cessé de poursuivre ; l’espoir, à jamais perdu, de ramener cet homme perverti par une passion basse… A peine a-t-il fait un pas vers la porte qu’elle se jette au-devant de lui et, de ses bras ouverts, qui bientôt l’enlacent, lui barre le passage. — « N’y va pas !

238. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Une lecture bien faite porte son commentaire avec soi. » Cette dernière observation est vraie, moyennant quelque amendement toutefois. […] Elles ne mordent pas assez directement et ne trouvent pas d’avance dans l’auditoire un fond de connaissances générales qui les porte. […] Il faut beaucoup d’art pour tirer de ces lectures tout le parti moral possible, un art honnête et loyal, qui porte dans les esprits la conviction de son entière impartialité. […] On lisait pour inscription sur la porte du sanctuaire : « Odi profanum vulgus !

239. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Fervaques et Bachaumont sont les chroniqueurs du high life actuel, une des plus amusantes contradictions de cette piètre société démocratique, qui crève si comiquement des plus aristocratiques prétentions, les messieurs Jourdain sont maintenant à toutes portes ! […] Le nouveau la regarde à tous les étages, depuis la lucarne jusqu’au soupirail, par le trou des serrures et la fente des portes. […] Il porte un étonnant bon sens dans les choses frivoles, cet historiographe de salon qui s’est dévoué à ce labeur, mélancolique pour un homme d’esprit, de nous raconter les minuties vaines d’une société usée, érosée, épuisée. […] C’est un miroir, mais un miroir qui a des opinions, et on les voit parfois discrètement réfléchies dans les rayonnements de sa glace ; car la fonction est terriblement délicate de ce chroniqueur, qui ne peut pas vouloir qu’on ferme la porte au nez de sa chronique, et qui soutient, depuis je ne sais combien de temps, cette gageure de tact et de tenue d’être un chroniqueur accepté, un chroniqueur à la journée et à la soirée, marchant sur plus pointu que la pointe des clochers : à travers les prétentions de tous les genres et tous les genres de vanité !

240. (1908) Après le naturalisme

Aussi, remplaçant l’idée par la sensation, il se fermait la porte de l’entendement humain, qui n’est qu’esprit. […] Il porte un centre de lois sur lesquelles il agit selon elles-mêmes — ou bien se laisse emporter non par elles mais par les énergies brutales qui continuent de l’attaquer dans son milieu. […] Le rationalisme de Descartes porte ses fruits. […] Elle porte toutes ses énergies à soi : son œuvre se fait universelle. […] Tant que la solution n’est pas donnée à la question du jour, tant que le sésame exact n’a pas fait s’ouvrir les portes des destins proches, la marche du progrès reste suspendue.

241. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LVIII » pp. 220-226

. — Cette loi, au reste, ne pourra être discutée cette année à la Chambre des députés et tout porte à croire qu’elle y sera modifiée. […] Le fait est que la pièce a sincèrement réussi : le monde s’y porte ; on comprend rien qu’à voir, on devine, on est touché : la grandeur, la simplicité de Sophocle éclatent malgré tout.

242. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1861 » pp. 361-395

De cette folie générale, de cette manie partout répandue dans le bas de la société de jeter ses enfants par-dessus soi, de les porter au-dessus de son niveau, comme on porte les enfants au feu d’artifice, il s’élève une France de plumitifs, d’hommes de lettres et de bureau, une France où l’ouvrier ne sortant plus de l’ouvrier, le laboureur du laboureur, il n’y aura bientôt plus de bras pour les gros ouvrages d’une patrie. […] — Tout droit et à gauche. » Nous montons un escalier et nous poussons une porte. […] Nous frappons à la porte, et nous trouvons, dans une loge toute noire, les deux femmes qui nous attendent, lumineusement blanches, en une pénombre de crépuscule. […] Un jour Salvandy, invité à dîner, se met à sonner à la porte de l’Anglais, à côté d’un monsieur qui y avait déjà sonné. […] » Il nous quitte, en nous donnant une main grasse, douce, froide, et, sur le pas de la porte, nous dit : « Venez me voir, les premiers jours de la semaine… après cela, j’ai la tête dans un sac. » 19 octobre Non, non, jamais je ne trouverai dans Paris une femme réunissant les qualités de ma maîtresse : ne pas me demander de me faire la barbe, et ne jamais m’adresser une question au sujet du livre que je fais.

243. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Jamais le lointain des lieux et des temps ne fut plus merveilleusement rapproché de l’œil et de l’imagination ; on porte l’Italie d’Horace dans sa main. […] Porte-le en sûreté, je t’en adjure, aux rivages de l’Attique, et garde-moi en lui la moitié de ma propre vie !  […] Après ce sacrilège du feu enlevé aux demeures célestes, les fléaux vengeurs, de nouvelles fièvres et des maigreurs décharnées, furent infligés à la terre ; la mort, jusque-là tardive, précipita ses pas contre les vivants : c’est ainsi que, sur des ailes refusées à l’homme par les dieux, Dédale osa tenter le vide des airs, le bras d’Hercule força les portes de l’Achéron. […] Il personnifie dans cette ode Rome dans un vaisseau qui porte les Romains, image neuve et belle alors, devenue banale et usée aujourd’hui dans tous les discours de nos mauvais orateurs et de nos vulgaires publicistes : le temps use les images comme il use tout. […] si la blonde Chloé était écartée de ma mémoire et que ma porte se rouvrît pour cette Lydie que j’ai contristée par mon abandon ?

244. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

Attendez-moi ici près de la porte de la ville, et faites la plus grande attention à votre prisonnier, jusqu’à ce qu’ayant pris à la cour les informations nécessaires, je revienne vous trouver. […] sa petite main porte distinctement les lignes mystérieuses, pronostic certain de la souveraineté : je les vois briller, ces lignes, légèrement entrelacées en réseau le long de ses doigts délicats, tandis qu’il les étend pour saisir avec avidité l’objet qu’il désire. […] L’intérêt y porte sur les malheurs mais non sur les crimes des hommes. […] Ne repousseriez-vous pas la prière de celui qui chasse son épouse, l’honneur de sa maison ; qui condamne au désespoir celle dont le sein porte le fruit de sa tendresse, qui la sacrifie comme la victime offerte pour les apaiser aux mauvais génies. […] Je n’ose pas non plus éteindre en moi cette étincelle de vie ; car l’enfer le plus profond, où ne brille jamais le soleil, attend le misérable qui porte sur lui une main homicide.

245. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

… ainsi, le mien, par exemple… ou, pour parler plus exactement, celui que je porte… RAOUL. — Ah ! […] Encore ce nom n’est-il point à elle, c’est celui qu’elle trouva cloué sur sa porte au bout de l’escalier d’un garni où elle vint loger. […] Des hommes s’avancent ; l’un conduit un cheval en bride, l’autre porte des armes, un autre des vêtements. […] « Mazelin, voyant que l’armateur ne lui répond pas, ouvre la porte et sort. […] Il y ajoute un peu d’eau ; d’une main tremblante il porte le verre à ses lèvres et d’un trait il avale le contenu.

246. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVI. Jésus au tombeau. »

Comme ces grottes étaient creusées dans le flanc de rochers inclinés, on y entrait de plain-pied ; la porte était fermée par une pierre très difficile à manier. On déposa Jésus dans le caveau ; on roula la pierre à la porte, et l’on se promit de revenir pour lui donner une sépulture plus complète.

247. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 17, quand ont fini les représentations somptueuses des anciens. De l’excellence de leurs chants » pp. 296-308

Ce sac plus cruel dans toutes ses circonstances que les précedens, et qui fut la cause qu’on vit des femmes patriciennes mandier à la porte de leurs propres maisons, dont les barbares s’étoient rendus les maîtres, est la véritable époque de l’anéantissement presque total des lettres et des arts, que du moins on cultivoit toujours, quoique ce fut sans beaucoup de fruit. […] L’article vingt-quatriéme de cet édit, porte : défendons à tous joüeurs de farces, bâteleurs et autres semblables… etc. ce qui prouve que cette loi ne fut point exactement observée, c’est qu’elle fut renouvellée dans l’édit que publia le roi Henri III sur les remontrances des états géneraux assemblez à Blois en mil cinq cens soixante et seize.

248. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VI. Autres preuves tirées de la manière dont chaque forme de la société se combine avec la précédente. — Réfutation de Bodin » pp. 334-341

. — Qu’on dise après cela que les premiers fondateurs des villes furent ceux qui marquèrent par un sillon le contour des murs ; qu’on juge si les étymologistes ont raison de faire venir le mot porte, a portando aratro, de la charrue qu’on portait pour interrompre le sillon à l’endroit où devaient être les portes.

249. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Mais autre chose est de mépriser ce public, de le décourager, de lui rabattre sur le nez la porte et de refuser le contact. […] Il a étudié dans quelles conditions porte le mot, porte le geste ; dans quelles conditions de rythme, de volume, de style, et aussi par quels sentiments son œuvre peut atteindre à la fois l’élite et la foule. […] Il porte dans le sang la plus aimable tradition française, mi-chrétienne, mi-galante, chevaleresque. […] Par quelle porte rentrera le style, partant la poésie, partant l’art dramatique de toujours ? […] Le devoir du producteur, qu’il écrive des pièces ou les porte à la scène, ne saurait être moins impérieux.

250. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

C’est un dessin dédié à Eugène Sue, et qui porte au revers la note suivante : Portrait de Mlle *** qui a servi pour la création de la Mayeux, dans les Mystères de Paris . […] Ce soir, le sculpteur Lenoir se présente chez moi, avec deux journaux à la main, dont l’un dit que le banquet a lieu, dont l’autre dit qu’il n’a pas lieu, et demande à Pélagie, quel est le journal qui dit vrai, et je pense, un peu anxieusement, aux gens, qui vont avoir le nez cassé, à la porte du Grand-Hôtel. […] Là, il s’interrompt, voyant la porte ouverte, et me demande à être entendu par moi seul. La porte fermée, alors il me raconte qu’il a été chargé d’un recouvrement, qu’il a mangé, et que là-dessus il a été mis dehors. […] » Il allait encore frapper à la porte d’un autre hôtel, dont la patronne refusait de le recevoir, en dépit de l’offre de 300 francs.

251. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

Il a de ces débuts enflammés qui tiennent des deux ivresses : ainsi, dans cet élan d’orgie ou de sérénade (c’était un peu la même chose chez les Anciens, comessatio), il veut courir à la porte de sa maîtresse, et s’adresse tour à tour à son serviteur pour qu’il allume le flambeau, et à lui-même pour s’enhardir : « Le dé en est jeté : allons, enfant, j’irai. — Allons, courage !  […] C’est à une suivante qu’il est en train de parler pour qu’elle porte à sa maîtresse un message : il la presse, il la rappelle, il court après ; le mouvement est celui de l’entraînement même et de la naïve impatience : « Dis-lui cela, Dorcas, dis-lui et redis-lui, ô Dorcas, deux et trois fois toutes choses. […] Au-dessus de sa porte, alors, je suspendrai ces couronnes suppliantes, non sans les avoir fanées auparavant de mes larmes, et j’y inscrirai ces mots : A toi, Cypris, Méléagre, l’initié de tes jeux, a suspendu ici ces dépouilles de sa tendresse130 !  […] Cette épigramme ne porte pas le nom d’Héliodora, mais elle est toute pareille à d’autres où cette maîtresse est nommée, et dont elle peut tenir lieu. […] Mais, sitôt que vous le verrez entr’ouvrir la porte, distillez sur sa tête ma fraîche rosée, afin que sa blonde chevelure s’abreuve en plein de mes larmes. » — Mot à mot : boive mieux mes larmes.

252. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

Dans sa chambre de l’hôtel Liancourt, à un dessus de porte, M. de La Rochefoucauld avait un portrait du jeune prince. […] Les lieux les plus vantés de la terre sont tristes et désenchantés lorsqu’on n’y porte plus ses espérances. […] Dans l’amour même, à le prendre au vrai, et si quelque vanité étrangère ne s’y mêle, on est beaucoup plus sensible à ce qu’on y porte qu’à ce qu’on y trouve. De là vient qu’à l’instant où l’on sent qu’on y porte moins, on s’en dégoûte souvent avec un cœur fier, et qu’on résiste si aisément à celui qu’on inspire. […] Ce mot d’humiliant ne semblera pas trop fort à ceux qui ont lu sur son compte les Mémoires de la duchesse de Nemours, le récit surtout de cette triste scène au Parlement, où il tint Retz entre deux portes, et les propos qu’il y lâcha et qu’il essuya.

253. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

Cependant les canards passent devant la porte en dandinant leur gros ventre, l’air curieux et content ; ils vont le long des murs, comme innocemment, et tout d’un coup, retournant la tête, ramassent d’un coup de bec les mouches malencontreuses qui sont à portée. […] Leur cou ne porte pas les marques de la déformation que nous impose le métier, ni des flétrissures dont nous salit l’expérience. […] D’ailleurs il a le front vaste du monarque qui porte tout l’Etat dans sa tête, et sa crinière l’élargit encore. […] A la porte de cette nouvelle galerie se tient le singe, le plus bruyant de tous. […] On en sait assez sur la tortue quand on l’a vue « aller son train de sénateur. » « Porte maison l’infante » est ventrue comme « ma commère la carpe », et aussi bonne dame qu’elle, un peu vaniteuse et « de tête légère », mais rusée parfois.

254. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

La mer porte tout, et le vaisseau ne s’enfonce pas d’une ligne dans ses flots mugissants. […] Ce bruit tranquille et continu retentit entre les deux colonnes, et porte à la rêverie. […] Quand une des cinq portes de ce portique s’ouvre, l’édifice apparaît tout entier. […] Une porte basse y conduit ; l’on se trouve forcé de se courber et de grimper entre deux voûtes parallèles, l’une extérieure, l’autre intérieure, artifice de l’architecture que je n’ai pas compris, mais qui a été adopté comme une nécessité de l’art dans plusieurs autres voûtes à cathédrale, soit pour consolider la construction de ces dômes portant sur eux-mêmes, soit pour rectifier à l’œil du spectateur les lignes harmonieuses de leurs dômes aériens. […] Une échelle de fer aux échelons tremblants sort du dernier sommet et vous porte au tronc de la croix, que vous embrassez convulsivement comme un brin de mousse embrasse une aiguille d’un chêne ; vos yeux se troublent, et vous ne voyez plus que le vide ondoyant à cinq cents pieds au-dessous de vous !

255. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

Joinville nous raconte ses impressions successives et ses émerveillements qui commencent dès le port, et qui nous instruisent d’ailleurs des détails de la navigation à ces époques : Au mois d’août, dit-il, nous entrâmes en nos nefs à la Roche de Marseille, et le jour que nous y entrâmes, on fit ouvrir la porte de la nef et l’on mit dedans tous nos chevaux que nous devions mener outre-mer : et puis referma-t-on la porte, et on la boucha bien ainsi qu’on fait d’un tonneau, parce que quand la nef est en mer, toute la porte est sous l’eau. […] Cette scène d’arrivée et de débarquement en vue de l’ennemi est vive chez Joinville, et pleine de couleur : Le jeudi après Pentecôte arriva le roi devant Damiette, et trouvâmes là toute l’armée du Soudan sur la rive de la mer, de très belles gens à regarder ; car le Soudan porte les armes (armoiries) d’or, sur lesquelles le soleil frappait, qui faisait les armes resplendir.

256. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

Cependant, tout en errant de porte en porte avec l’air d’abandon d’un mauvais sujet et là démarche incertaine d’un homme ivre, je me retrouvai tout à coup, sans le savoir, dans le marché aux comestibles… » Et quand, errant ainsi à travers la ville, il est venu à rencontrer une dame de qualité, Byrrhène, qui se trouve être une amie de sa famille ; quand cette dame, l’ayant conduit jusque chez elle et le voulant retenir pour hôte, essaye du moins de le mettre en garde contre l’hospitalité du vieux ladre chez qui il est descendu et dont la femme, lui dit-elle, est une magicienne du premier ordre et de la pire espèce, Lucius, à cette nouvelle inattendue, qu’il se trouve logé chez une magicienne, est saisi d’un plus violent désir de chercher précisément ce qu’on lui recommande defuir ; il ne sait que prendre, comme on dit, ses jambes à son cou pour courir de toutes ses forces au danger. […] Une jolie aventure qui arrive au Lucius-Apulée avant sa métamorphose, c’est celle qui termine le joyeux souper qu’il est allé faire chez Byrrhène : rentrant de nuit et la tête troublée de vin, il s’imagine voir devant la porte de son hôte trois terribles brigands contre lesquels il dégaine et qu’il transperce à coups d’épée. […] Lucius a obtenu de la petite Fotis de voir après minuit dans son belvédère, par la fente de la porte, la magicienne à l’œuvre et en plein exercice de ses incantations.

257. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Louvois voulait acquérir Casai du duc de Mantoue et y mettre une garnison française pour s’ouvrir une porte sur le Milanais. […] La porte d’ivoire par laquelle, selon le poète, s’échappent les songes faux, est toujours plus agréable que la porte de corne qui seule donne passage à la vérité. […] Sa présence y porte ombrage à Louis XIV ; sa conduite n’y donne lieu toutefois à aucune remarque importante.

258. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Les dames de la bande, des protestantes bien entendu, se sont hasardées après quelque hésitation à sonner à la porte du couvent ; elles se présentent comme pour faire des emplettes (on sait que les religieuses occupent leurs loisirs à mille petits travaux et à des objets de dévotion qui se vendent au profit de la communauté ou au profit des pauvres) : on fait monter les dames au premier étage. […] Derrière la grille, on soupçonne une salle immense et noire… Après un moment d’attente, on entend crier les verrous : une porte doit s’ouvrir à l’extrémité de la salle, on ne la voit pas, tout est plein de ténèbres ; seulement un souffle glacé frappe nos visages et deux formes blanches s’approchent à pas lents. […] Et si son frère (dans les pages magnifiques du Centaure) porte mieux au front le sceau du génie, la flamme, combien Eugénie lui est supérieure par la vraie grandeur : l’oubli de soi, constant, sans recherche, le don du cœur à un autre cœur ! […] l’abattement fait trop souvent courber ce front que je porte si haut !

259. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

Il faut donc se bien garder d’abjurer le talent qu’on a acquis, le sens particulier qu’on a aiguisé, l’instrument subtil et sûr dont la main sait tous les secrets, mais aviser seulement à l’appliquer là où il porte à propos et où il atteint son effet. […] Voici un petit rêve d’élégie bien française, bien moderne, qui vaut certes toutes les réminiscences des Ovide et des Tibulle : c’est léger, délicat, d’une tendresse de dilettante, d’un regret de xviiie  siècle dans le xixe  ; un idéal rapide de bonheur d’après Fragonard et Denon : « J’ai toujours rêvé ceci, — et ceci ne m’arrivera jamais : Je voudrais, la nuit, entrer par une petite porte que je vois, à serrure rouillée, collée, cachée dans un mur ; je voudrais entrer dans un parc que je ne connaîtrais pas, petit, étroit, mystérieux ; peu ou point de lune ; un petit pavillon ; dedans, une femme que je n’aurais jamais vue et qui ressemblerait à un portrait que j’aurais vu ; un souper froid, point d’embarras, une causerie où l’on ne parlerait d’aucune des choses du moment, ni de l’année présente, un sourire de Belle au bois dormant, point de domestique… Et s’en aller, sans rien savoir, comme d’un bonheur où l’on a été mené les yeux bandés, et ne pas même chercher la femme, la maison, la porte, parce qu’il faut être discret avec un rêve… Mais jamais, jamais cela ne m’arrivera ! […] Cette porte secrète, ce kiosque, ce mystère, ç’a été le roman de plus d’un rêveur et rôdeur mélancolique dans nos générations de 1830 et environ.

260. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Il avait un appartement attenant au palais, avec une porte de communication dans le jardin privé du roi. […] Mahmoud pourvut à ce que personne ne pût l’interrompre dans son travail, en défendant la porte à tout le monde, à l’exception d’un seul ami et d’un esclave chargé du service domestique. […] Au moment où les chameaux chargés d’or arrivaient à l’une des portes de Thous, le convoi funèbre sortait par une autre. […] La nuit était presque écoulée, lorsque la porte de la chambre où il reposait s’ouvrit doucement, et il vit s’approcher une beauté merveilleuse, guidée par une esclave.

261. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Le premier roman qu’on a d’elle, et qui date de ce temps, porte également témoignage de ses opinions et de ses couleurs. […] Ce premier commis impérial, laborieux, infatigable, donnait chaque nuit, après les représentations du jour, un certain nombre d’heures au travail, mais il trouvait là des veilleurs encore plus infatigables et plus intrépides que lui : Lorsque vers deux heures du matin, dit Mme Gay, après en avoir donné trois ou quatre au travail, il entendait parler encore dans mon salon, nous voyions s’entrouvrir la porte de son cabinet, et il nous demandait s’il n’était pas trop tard pour qu’il vînt causer avec nous. […] J’ai lu d’elle de très spirituels et très mordants couplets de cette époque, et qui emportaient la pièce, sur des ennuyeux et des ennuyeuses qui n’étaient pas de son monde : on ne les disait que portes closes. […] Alfred, dès qu’il se porte mieux, fait des sorties à cheval et court les champs ; au retour, il a mille bonnes raisons pour s’excuser : En sa présence, dit Léonie, j’accueillais toutes ses raisons, et j’allais même jusqu’à me reprocher de l’avoir accusé ; mais, dès qu’il me laissait longtemps seule, je m’ennuyais, et c’est un malheur dont on se venge toujours sur celui qui le cause, et quelquefois sur ceux qui en sont innocents.

262. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Il s’y montre en son haut rang, au centre du groupe des illustres poètes du siècle, calme, équitable, certain, puissamment établi dans son genre qu’il a graduellement élargi, n’enviant celui de personne, distribuant sobrement la sentence, classant même ceux qui sont au-dessus de lui… « his dantem jura Catonem » ; le « maître du chœur », comme dit Montaigne ; un de ces hommes à qui est déférée l’autorité et dont chaque mot porte. […] Les peintres, en sortant le soir, n’avaient pas songé à fermer les portes ; ceux qui ont soin de cet appartement avaient eu autant de négligence que les peintres : ainsi les ours, trouvant les portes ouvertes, entrèrent, et, toute la nuit, gâtèrent tout. […] Ceux qui devaient avoir fermé l’appartement furent grondés, mais de telle sorte qu’ils résolurent bien de fermer les portes de bonne heure.

263. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Sur les portes non vernies, des trumeaux vides, où l’araignée pend déjà son hamac, et qui attendront vainement le pinceau, — le pinceau au bout duquel la couleur, fraîchement broyée, sèche et se cristallise ! […] Ils demeureront toujours ainsi, immobiles et debout, la bouche entrouverte comme pour laisser échapper une parole qui ne sortira point — devant une porte qui restera inflexiblement fermée ! […] Vous leur fermez la porte au nez, — et vous leur demandez gravement pourquoi ils n’entrent pas ! […] Si j’ai des lunettes à verres concaves, il y a mille à parier que mon voisin porte un binocle à verres convexes.

264. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Elle porte la casquette de velours de l’étudiant d’Heidelberg et doit fumer dans une pipe infinie. […] Au moins, quand un homme cesse d’être un homme, on sait ce qu’il devient, et, parfois encore, c’est Narsès, Abeilard, Origène ; mais quand une femme cesse d’être femme et que dans l’impiété d’un travail terrible et la folie d’une ambition, elle porte sur elle-même des mains suicides, ce qu’elle devient n’a plus de nom que celui qu’elle se donne, et voilà pourquoi, hors la mascarade, ce n’est pas vraiment plus madame Daniel Stern qu’il faut dire aujourd’hui que monsieur ! […] mais patricien au fond, et patricien involontaire, — elle était faite pour mieux que pour vouloir être l’entremetteuse politique d’un sexe qui sait bien, d’ailleurs, faire ses affaires tout seul. — Pendant le bon temps, quand elles sont jeunes, les émancipées le sont de fait et n’en demandent pas plus ; et lorsque la vieillesse et la laideur fondent sur elles, c’est en vain qu’elles mendient le suffrage des portefaix et des prolétaires, à la porte des mairies, une sébile électorale à la main ! […] Elle l’a signée encore Daniel Stern, tout court, tenant à garder les culottes que le monde et le temps commencent à lui ôter… Madame la comtesse d’Agoult doit être, si je ne me trompe, la petite-fille, par mariage, ou la petite-nièce, de ce capitaine des gardes-françaises qui mit si prestement à la porte les premiers polissons parlementaires de la Révolution, féconde depuis en polissons du même genre, et qui, s’il revenait au monde, ce capitaine Haut-la-Main !

265. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

Ceux-ci n’iront pas, à leur exemple, s’emplir de viandes et de boissons brûlantes pour inonder leurs veines par un afflux soudain de sang grossier, pour porter dans leur cerveau la stupeur ou la violence ; on les voit à la porte de leur chaumière, qui mangent debout un peu de pain et leur soupe ; leur vin ne met dans leurs têtes que la vivacité et la belle humeur. […] Ces bourgeois, sur le pas de leur porte, clignent de l’oeil derrière vous ; ces apprentis derrière l’établi se montrent du doigt votre ridicule et vont gloser. […] Je crois même que l’homme, ayant plus de facilités, reçoit des impressions plus profondes ; le dehors entre en lui davantage, parce que les portes chez lui sont plus nombreuses.

266. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

Trois sortes de journaux, qui ne paraissaient pas destinés par leur nature à se faire écho l’un à l’autre, se signalent par plus d’acharnement contre ce qui porte mon nom : Un journal d’exagération religieuse, qui donnerait la tentation d’être impie si l’on ne respectait pas la piété jusque dans les aberrations du zèle ; Les revues et les journaux des partis de 1830, qui ne pardonnent pas leurs revers à ceux qui ont préservé la France et eux-mêmes des contrecoups de leur catastrophe ; Enfin un journal de sarcasme spirituel, à qui tout est bon de ce qui fait rire, même ce qui ferait pleurer les anges dans le ciel : la dérision pour ce qui est à terre. […] Est-ce que nous n’avons pas fait respecter, au péril de notre popularité et de notre vie, à la porte des journaux menacés, le droit de nous injurier nous-même ? […] On dit que d’écrivain tu t’es fait jardinier ; Que ton âne au marché porte un double panier ; Qu’en un carré de fleurs ta vie a jeté l’ancre Et que tu vis de thym au lieu de vivre d’encre ?

267. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Les jeunes gens et les jeunes filles s’expliquent sur tout cela avec une simplicité tout italienne, et nous rappellent ces dames romaines dont parle Stendhal, qui, fermant leur porte à tous les visiteurs, font dire pour excuse que la signora est innamorata. […] Il y fait entrer Isabelle, et se tient à la porte pour écarter les importuns. […] Pedrolino, déguisé en mendiant, s’arrête à la porte de l’hôtelier.

268. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Une soirée chez Paul Verlaine » pp. 18-33

Heureusement, sa mère était là, qui veillait et barricadait sa porte aux liqueurs et aux mauvaises influences. […] Sa ténacité laborieuse et son intrépide désintéressement méritent tout au moins le respect… Nous n’étions pas encore remis de la secousse nerveuse, de l’ébranlement que donnent les beaux vers, lorsque la porte s’ouvrit timidement, laissant se profiler dans la pénombre une figure fiévreuse et inquiète. […] » Et, continuant à bousculer son prédécesseur, il franchit le seuil à son tour, claqua la porte pour lui couper la retraite, courut au lit de Verlaine, lui serra les mains plein d’effusion et, avec l’enthousiasme d’un assaillant qui déploie un drapeau sur la citadelle enfin conquise, jeta triomphalement son nom en l’air : « Louis Le Cardonnel ! 

269. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

Tous les impuissants qui ont usé infructueusement leur belle jeunesse à casser des cordons de sonnettes à la porte des journaux et des théâtres de la capitale — l’académie de province les reçoit, les prend et les fait sauter maternellement sur ses genoux, en leur recommandant bien de ne plus aller vers ces méchants, qui n’ont eu garde de les écouter — craignant d’être obligés de les admirer. […] Si leurs pièces ne sont pas jouées au Gymnase, c’est que Dumas fils monte la garde à la porte, avec la consigne de ne laisser passer que lorsqu’on répond « Dumanoir ou Barrière » à son qui-vive. […] madame, comment pouvez-vous admirer les Romans de galanterie d’un homme qui porte de la flanelle et quitte, chaque soir, ses dents en même temps que son pantalon !

270. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Théodore de Banville »

La poésie de Banville ne lui porte pas bonheur. […] Dans la préface de ses Odelettes, un peu musquée d’affectation et d’érudition qui porte à la tête, il dit à Sainte-Beuve : « Soyons les derniers de notre ordre, les derniers des délicats », et il en est un… de la main, comme Siméon Pécontal16 l’est de l’âme. […] Sa poésie, quelque nom qu’elle porte : Cariatides, Stalactites, Erato, Sang de la coupe, etc., n’est jamais de la poésie sentie ou pensée ; mais c’est de la poésie peinte ou sonore, et encore plus sonore que peinte.

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