Tout cela c’est la vie de la critique d’artiste. […] Chez les artistes ? […] Rien, au contraire, de plus dangereux pour l’artiste. […] Le genre, il est derrière l’artiste ; il n’est pas devant lui. […] L’artiste imite la nature, l’imitateur imite l’artiste ; le critique s’efforce d’imiter non la nature qui crée les choses et les hommes, comme fait l’artiste, non l’artiste qui recrée une nature, comme fait l’imitateur, mais bien la nature qui a créé l’artiste, c’est à dire la nature envisagée dans un moment particulier et dans une opération individuelle.
L’artiste est donc obligé de savoir à quoi il aspire. […] Les artistes de génie ne débutent pas autrement. […] Il en est toujours ainsi aux débuts d’un artiste. […] Lettre à M. le directeur de l’Artiste. […] Courbet comme un artiste sérieux.
L’artiste dramatique, par exemple, est toujours forcé, pour donner l’illusion de la réalité, d’outrer certains traits ; il ne représente la vie qu’avec des infidélités calculées. […] Il est très difficile de définir scientifiquement la vie, même en ses manifestations les plus infimes, à plus forte raison la vie mentale et morale que l’artiste s’efforce de nous rendre présente dans ses œuvres. […] Le véritable artiste ne doit pas voir et sentir les choses en artiste, mais en homme, en homme sociable et bienveillant, sans quoi le métier, tuant en lui le sentiment, finirait par ôter de ses œuvres la vie, qui est le fond solide de toute beauté. […] Le grand artiste, simple jusqu’en ses profondeurs, est celui qui garde en face du monde une certaine nouveauté de cœur et comme une éternelle fraîcheur de sensation. […] Recommencer toujours à vivre, tel serait l’idéal de l’artiste : il s’agit de retrouver, par la force de la pensée réfléchie, l’inconsciente naïveté de l’enfant.
Les phénomènes singuliers et subtils dans lesquels se complaît le génie d’Hoffmann, lorsqu’il ne les tire pas d’un concours plus ou moins romanesque d’événements tout extérieurs, et lorsque la nature humaine et l’âme sont sur le premier plan, se rapportent plus particulièrement, comme on peut le penser, à ces âmes sensibles et maladives, à ces natures fébriles et souffrantes, qui peuvent en général se comprendre sous le nom d’artistes : ce sont elles qui font le sujet le plus fréquent et le plus heureux de ses expériences. Aussi personne jusqu’ici, ni critique, ni poète, n’a-t-il senti et expliqué à l’égal d’Hoffmann ce que c’est qu’un artiste. Il sait l’artiste à fond, sous toutes ses formes, dans toutes ses applications, dans ses pensées les plus secrètes, dans ses procédés les plus spéciaux, et dans ce qu’il fait et dans ce qu’il ne fera jamais, et dans ses rêves et dans son impuissance, et dans la dépravation de ses facultés aigries, et dans le triomphe de son génie harmonieux, et dans le néant de son œuvre, et dans le sublime de ses misères. […] Zacharias Werner, Berthold, Kreisler, vous tous artistes de nos jours, au génie inquiet, à l’œil effaré, que l’air du siècle ronge ; inconsolables sous l’oppression terrestre, amoureux à la folie de ce qui n’est plus, aspirant sans savoir à ce qui n’est pas encore ; mystiques sans foi, génies sans œuvre, âmes sans organe ; comme il vous a connus, comme il vous a aimés ! […] Aussi, dès qu’il se borne à peindre l’art et les artistes dans ce moyen âge, où il y avait du moins harmonie et stabilité pour les âmes, quelque chose de calme, de doré et de solennel succède aux délirantes émotions qu’il tirait des désordres du présent ; depuis l’atelier de maître Martin le tonnelier, qui est un artiste, jusqu’à la cour du digne landgrave de Thuringe, où se réunissent autour de la jeune comtesse Mathilde, luth et harpe en main, les sept grands maîtres du chant, partout dans cet ordre établi, on sent que le talent n’est plus égaré au hasard, et que l’œuvre de chacun s’accomplit paisiblement ; s’il y a lutte encore par instants dans l’âme de l’artiste, le bon et pieux génie finit du moins par triompher, et celui qui a reçu un don en naissant ne demeure pas inévitablement en proie au tumulte de son cœur.
L’artiste a encore décoré son extrémité supérieure d’un autre pot de fleurs. […] Au bas d’une petite façade, en retour de cette colonnade, l’artiste a répandu à terre un passager, qui se repose parmi des fragmens de colonnes. […] Ce n’est pas tout ; l’artiste a élevé à chaque extrémité de l’esplanade deux grands obélisques. […] Ce morceau est, ou je suis bien trompé, un des meilleurs de l’artiste. […] Cela n’a pas coûté une matinée à l’artiste, car il fait vîte : il valait mieux y mettre plus de temps et faire bien.
Nul ne connaît les limites de la puissance d’action inhérente à la nature et de la puissance de représentation inhérente à l’artiste. […] Dédoublement voulu, il est vrai, mais qui peut arriver à être si complet que l’artiste devienne dupe du jeu de l’art. […] Sur quoi d’ailleurs travaille l’artiste, le poète, le penseur ? […] En outre, le propre du génie est d’ajouter au fond même, à l’ensemble d’idées, s’il s’agit du penseur, à l’ensemble de sentiments et d’images, s’il s’agit de l’artiste ; et l’artiste est un penseur à sa manière30. […] Taine, mais en subordonnant les nations aux génies, en considérant les peuples par leurs artistes, le public par ses idoles, la masse par ses chefs.
Le beau, en un mot, c’est le rêve de l’artiste achevant par l’imagination l’œuvre de Dieu. […] L’artiste dont les œuvres expriment le plus de ce Sursum corda, de cette réalisation de l’idéal par la parole, les sons, les couleurs, les formes, est le plus véritablement artiste entre tous les artistes. […] Dans tous les arts, tous les suprêmes artistes sont fils d’eux-mêmes. […] On retrouvait là tous les jeunes artistes du matin, confondus, comme du temps de Léon X, avec les puissants de la terre. […] Elle inspirait ses pinceaux, elle attendrissait son cœur comme tous les premiers amours des artistes sensibles, peintres ou poètes.
Les artistes diront bien peinte, mais laissez-les dire. […] Mr le duc, vous avez promis à l’artiste, combien ? […] Un troisième artiste me dit, donnez-moi un sujet d’histoire. […] Et l’artiste ami dit, je vois à peu près mon tableau. […] Pour rompre ce silence, je lui jettai un mot sur le faire de l’artiste.
Il fixe l’attention des artistes par l’ingratitude du sujet ; mais celui de La Rochelle est infiniment plus piquant. […] Et puis, la fécondité de génie et la vitesse d’exécution de cet artiste sont inconcevables. […] Les deux artistes comparés sont également vrais ; mais Le Lorrain a choisi des moments plus rares et des phénomènes plus extraordinaires. […] Pour pallier l’ingratitude de son sujet, l’artiste s’est épuisé sur un grand arbre qui occupe toute la partie gauche de sa composition ; il s’agissait bien de cela ! c’est qu’il ne faut rien commander à un artiste, et quand on veut avoir un beau tableau de sa façon, il faut lui dire, Faites-moi un tableau, et choisissez le sujet qui vous conviendra ; encore serait-il plus sûr et plus court d’en prendre un tout fait.
Son désir de terminer ses quatre tableaux est bien positif : c’est là qu’il semble fixer son vœu d’artiste et borner le plus fort de sa tâche. […] Artiste supérieur en quelques parties, incomplet par d’autres, mais si distingué par son principal cachet et qui mérite de vivre, quel est le rôle de Léopold Robert dans le travail moderne et dans le renouvellement de l’art ? […] Je crois qu’il est plus facile de trouver chez les artistes des choses faites bien spirituellement et vite, que des idées profondes rendues avec science et sentiment. […] Je crois en avoir dit assez sur le genre de moralité et de talent qui s’unissaient pour faire de Léopold Robert un artiste à part entre tous ceux de notre âge. […] C’est à lui qu’il appartient de le faire, choisissant avec goût, coupant à propos, donnant à connaître tout l’artiste, tout l’homme, et ne s’arrêtant qu’en deçà de ce qui paraîtrait redite et satiété.
Il y a un modèle primitif qui n’est point en nature, et qui n’est que vaguement, confusément dans l’entendement de l’artiste. Il y a entre l’être de nature le plus parfait et ce modèle primitif et vague une latitude sur laquelle les artistes se dispersent. […] Certains artistes stériles n’ont qu’un petit nombre de positions de corps, qu’un pied, une main, un bras, un dos, une jambe, une tête, qu’on retrouve partout. […] Il semble que ces artistes n’ont jamais rien vu que par un trou. […] Mais le soleil de l’art n’étant pas le même que le soleil de la nature ; la lumière du peintre, celle du ciel ; la chair de la palette, la mienne ; l’œil d’un artiste, celui d’un autre ; comment n’y aurait-il point de manière dans la couleur ?
Aux Artistes. […] On nous citera en foule des œuvres et des noms d’artistes qui paraissent détruire cette opinion. […] Les artistes, de leur côté, réclament fièrement leur indépendance. […] Cooper est un grand artiste qui symbolise admirablement la nature. […] » Ô malheur à l’artiste d’être ainsi en dehors de son temps !
Les artistes vivaient d’un côté, les lettrés d’un autre. […] Aujourd’hui on est plus avancé ; l’habitude est prise, la partie est gagnée, et presque au-delà ; depuis trente ans et plus, les nouvelles générations de lettrés et d’artistes, qui s’élèvent et se pressent à la file, se mêlent familièrement entre elles, se confondent même volontiers. […] Or, Gavarni est devenu le nom d’un genre ; il est arrivé, sans le chercher, à cette solution la plus essentielle dans la destinée de tout artiste et, je dirai, de tout homme, d’avoir fait ce que nul autre à sa place n’eût su faire. […] Il tenta en 1834 une entreprise qui ne réussit pas et ne. pouvait réussir, étant plus d’un artiste que d’un homme d’affaires, et qui, de si courte durée qu’elle ait été, eut pour effet de grever longtemps sa vie ; il voulut fonder un journal, une publication où il fût maître et chez lui, « et il commença le Journal des Gens du monde, recueil hebdomadaire, dans le genre de l’Artiste, et dont il ne parut qu’une vingtaine de numéros. […] Un peu de violence et de contrariété ne nuit pas à l’artiste, — je dis un peu et pas trop.
Cet artiste a communément le pinceau plus chaud… mais, me direz-vous, qu’est-ce que peindre chaudement ? […] Si au sublime du technique l’artiste flamand avait réuni le sublime de l’idéal, on lui élèverait des autels. […] Jeune artiste, étudiez donc les ciels. […] Je ne sais si, à tout prendre, ils ne sont pas plus faits dans leur genre que les tableaux de l’artiste ; ici il n’y a rien à reprendre. […] C’eût été bien dommage qu’une canne à pomme d’or égarée dans sa maison eût privé l’académie d’un aussi grand artiste, cependant peu s’en est fallu.
Nul artiste, en effet, nul penseur, ne tire de sa tête, si riche qu’elle soit, la notion de l’élégance à l’état pur. […] Un ami du grand artiste qui n’est plus, par admiration pour son génie, par piété envers sa mémoire, est devenu l’éditeur de cette œuvre inachevée. […] Sa gloire profitera, sans nul doute, à celle de ses œuvres que dans sa conscience d’artiste il estimait le plus. […] ce n’est pas assez dire : la crânerie dans l’audace, c’est en réalité ce qui distingue le talent de ce jeune artiste. […] Je l’ai traité comme un artiste qui doit un jour compter ou décompter avec la Gloire.
L’artiste est d’autant plus grand qu’il nous fait deviner plus de choses sous chaque mot qu’il prononce, sous chaque objet qu’il nous montre. […] L’artiste entend la nature à demi-mot ; ou plutôt c’est elle-même qui s’entend en lui. […] Pourquoi l’artiste doit-il tant se préoccuper de la conformité du monde où il nous promène avec le monde réel ? […] Tersite est peut-être au fond pour l’artiste un sujet d’étude valant Adonis ; mais. […] Nous pouvons conclure de tout ce qui précède que le fond le plus solide sur lequel travaille l’artiste, c’est le souvenir : — le souvenir de ce qu’il a ressenti ou vu comme homme, avant d’être artiste de profession.
Griffin poète subjectif ; M. de Régnier artiste plus objectif. […] Si le poète et l’artiste n’existaient pas en chacun d’eux, M. […] Au contraire M. de Régnier, plus artiste, plus soucieux de formes sculpturales. […] Fontainas et sans doute d’autres hommes, sincères et artistes, qui subirent d’abord l’influence du Parnasse et se découvrirent ensuite. […] Il porte la marque durement sigillée de l’artiste qui se profère par ses mille voix et de l’un à l’autre change et se meut comme le moment dont il est le reflet.
Ils ont leur beauté propre, connue des seuls poètes et des fins artistes. […] Souvent l’artiste, sa boîte au dos, s’engage au hasard dans la forêt touffue et profonde. […] Il faut que l’artiste comprenne le poëte et soit pour ainsi dire un littérateur. […] Ma qualité d’artiste m’a fait recevoir du lord haut commissaire, gouverneur de l’île, ainsi que de lady N…, sa femme, qui, artiste qu’elle est, aime les arts, comme toutes les sommités de l’aristocratie (lord N… est le frère du duc de Buckingham). […] Noire artiste, à qui M.
… N’est-ce pas une tâche suffisante que de faire connaître les essais d’artistes aussi curieux que MM. […] Gustave Boulanger, artiste peintre. […] Mais ne devraient-elles pas être une leçon salutaire pour ces critiques qui semblent, avouons-le, connaître très imparfaitement et l’artiste et le philosophe. […] Il fallait, pour accomplir ce travail, être l’habile et sérieux artiste et l’absolu wagnériste qu’est M. de Egusquiza. […] Ce texte eut une influence considérable sur les penseurs comme sur les artistes (Nietzsche, Wagner mais aussi Freud ou Tolstoï).
Taine expose ici comment la part que prend l’artiste à toute la situation de ses contemporains, son imitation des traits marquants de leur état d’âme, sa soumission aux conseils qu’il reçoit et à l’accueil qui est fait à ses œuvres, détruiront dans son esprit les tendances peu conformes au caractère général de l’époque ou l’empêcheront tout au moins de les manifester. […] Saint-Simon est ainsi un gentilhomme féodal contraint à la vie des cours, ambitieux, passionné, artiste par tempérament et écrivain par nécessité ; Tite-Live, un orateur forcé par les circonstances à écrire l’histoire ; Balzac un homme d’affaires, un Parisien, un tempérament expansif, un esprit à la fois savant, philosophique et visionnaire. […] D’autre part, ayant à déterminer d’une façon précise et individuelle, la nature de l’esprit d’artiste qu’elle veut connaître, elle est obligée de recourir aux notions générales sur l’intelligence humaine que donne la psychologie ; et s’appliquant à démêler les groupes naturels d’hommes auxquels un artiste peut servir de type, elle est contrainte de s’adresser à la sociologie et à l’ethnologie. […] Cette critique du déterminisme du « milieu », qui isole le cas singulier de l’artiste, posée ici pour la première fois, sera développée plus loin à propos de la théorie de Taine. […] Auteur de nombreuses monographies consacrées à des artistes modernes (Guys, Monet, Moreau, Lalique), il fut également, à partir de 1908, administrateur de la Manufacture des Gobelins.
Mais Léon Gozlan a cet avantage sur Gautier qu’il possède ce qui doit entrer, à très larges doses, dans la composition des plus grands artistes littéraires, — c’est-à-dire beaucoup d’âme et encore plus d’esprit. […] Elle a étagé au sommet du monde de l’Action les fondateurs de religion, puis au-dessous d’eux les législateurs, puis, au-dessous des législateurs, les grands penseurs et les artistes. […] C’est un utilitaire féroce, mais qui avait des exigences d’artiste, non moins féroces… Léon Gozlan n’est rien de tout cela. […] Homme d’esprit comme il était artiste, sans bonhomie, sans naïveté, sans abandon, mais intensément, avec une ardeur fulgurante, fiévreuse et concentrée, il eut un idéal d’esprit vers lequel il tendit infatigablement. […] … C’est qu’il n’en parlait que pour obtenir des effets d’artiste.
Taine, qui vit dans un petit milieu d’artistes, de penseurs, d’intellectuels, éprouve, à chaque fois qu’il se trouve en contact avec le « philistin », ce même mouvement d’horreur que ressentirent les Gautier et tous les poètes romantiques, les G. […] Taine, qui croyait que par un effort de l’intelligence individuelle on saisit les lois des choses, n’a fait que raisonner et organiser des sensations qui, des cénacles romantiques jusqu’aux brasseries de Montmartre, ont été éprouvées et exprimées par tous les artistes, par les plus minables et par les plus hauts, par les rapins de Murger et par le jeune Ernest Renan. Ce livre qu’on vient de publier, c’est, avec une élévation de ton qui nous éloigne trop des parades fameuses de Rodolphe Salis pour qu’on y songe tout d’abord, une charge à fond contre le bourgeois, contre le philistin, issue exactement de cette même sensibilité qui constitue le dédain « artiste » des cabarets de Montmartre pour les « ronds-de-cuir ». […] Cette espèce d’homme, dans l’imagination du philosophe, joue le même rôle que joue l’artiste dans l’imagination d’Emma Bovary, ou l’Oriental noble et rêveur dans l’imagination d’un Lamartine. […] Taine, ne trouvant pas autour d’eux l’Anglo-Saxon individualiste, l’Oriental noble et rêveur, l’artiste débauché et génial qui contenteraient leur conception de la vie, déclarent que la France est perdue, que les temps modernes sont honteux.
Les artistes au théâtre de Dresde, Gudehus et Mlle Malten tiendront les principaux rôles. […] Dès le début un merveilleux artiste, Racine, a créé la vie artistique sur les éléments de cette vie nouvelle. […] Voltaire, l’admirable Grimm, Helvétius, furent plutôt des philosophes que de véritables artistes. Je me prends à penser qu’ils furent destinés par la Providence à préparer l’exemplaire artiste que fut Stendhal. […] L’artiste devra mêler à la forme du récit, la forme musicale de la Poésie.
Au fond, l’œuvre de l’artiste sera la même que celle du savant ou encore de l’historien : « découvrir les faits significatifs, expressifs d’une loi ; ceux qui, dans la masse confuse des phénomènes, constituent des points de repère et peuvent être reliés par une ligne, former un dessin, une figure, un système. » Le grand artiste est évocateur de la vie sous toutes ses formes, évocateur « des objets d’affection, des sujets vivants avec lesquels nous pouvons entrer en société6. » Le génie et son milieu social, dont les rapports ont tant préoccupé les esthéticiens contemporains et surtout M. […] Le « public », m’ayant pas de personnalité qui résiste à l’artiste, entre plus facilement en société avec lui, et son jugement est souvent meilleur, par cela même, que celui des critiques de profession. […] Guyau passe en revue ces conditions, dont la première et la plus fondamentale, est que l’être représenté par l’artiste soit vivant : « la vie, fût-ce celle d’un être inférieur, nous intéresse toujours par cela seul qu’elle est la vie ». […] Selon Guyau, le moyen, pour l’art, d’échapper à ce qu’il y a de fugitif dans toute convention, c’est la spontanéité du sentiment individuel qui fournit ses inspirations au génie. « Le grand artiste, simple jusqu’en ses profondeurs, est celui qui garde en face du monde une certaine nouveauté de cœur et comme une éternelle fraîcheur de sensation. […] Il s’est peint lui-même et il a peint le véritable artiste, en disant : « Pour comprendre un rayon de soleil, il faut vibrer avec lui ; il faut aussi, avec le rayon de lune, trembler dans l’ombre du soir ; il faut scintiller avec les étoiles bleues ou dorées ; il faut, pour comprendre la nuit, sentir passer sur nous le frisson des espaces obscurs, de l’immensité vague et inconnue.
sa critique ressemble à son œuvre artiste. […] Etre un artiste n’empêche pas d’être un critique, pourvu qu’on soit artiste de talent. […] L’artiste de talent est peut-être l’idéal du vrai critique. […] Il fut un écrivain et un artiste. […] Pierre Loti est un artiste spontané.
Qu’est-ce en soi que la « cathédrale », vers laquelle convergea, issue de points si opposés, la vision des deux artistes ? […] L’écrivain met la Bible au-dessus de l’Univers, l’artiste met l’Univers au-dessus de toutes les Bibles et de toutes les fois. […] Mais encore faut-il ajouter que l’un est un artiste catholique, l’autre un artiste, sans autre qualification ; que ce qui anime la pierre est pour le premier, la foi, pour le second, la vie universelle. […] Et de même, l’artiste qui scrute et interprète la réalité sans intention ni sans feinte, collabore avec l’être d’action révolutionnaire. […] Nous posons cette question : Est-il possible à un artiste de réaliser une œuvre forte avec des matériaux avariés ?
Cela n’est pourtant pas sans mérite pour une femme ; les trois quarts des artistes de l’académie n’en feraient pas autant. […] Ce n’est pas le talent qui lui a manqué, pour faire la sensation la plus forte dans ce pays-ci, elle en avait de reste, c’est la jeunesse, c’est la beauté, c’est la modestie, c’est la coquetterie ; il fallait s’extasier sur le mérite de nos grands artistes, prendre de leurs leçons, avoir des tétons et des fesses, et les leur abandonner. […] Lorsque la tête fut faite, il était question du cou, et le haut de mon vêtement le cachait, ce qui dépitait un peu l’artiste. […] Je lui dis : comment demander, en dépit de ce qu’en pourront penser les artistes de ce pays qui à cet égard en vaut bien un autre, de l’ouvrage pour une étrangère à des ministres qui refusent des àcomptes sur celui qu’ils ont ordonné à des hommes du premier ordre ? […] Le pauvre philosophe a mis à contribution les grands, les petits, les indifférens, ses amis, et a fait gagner à l’artiste dissipatrice cinq à six cents louis, dont il ne restait pas une épingle au bout de six mois.
Et ce thème peut-être ne le reconnaîtrez-vous pas aisément dans la vision des deux grands artistes. […] L’artiste est tenu de savoir, de réfléchir et de prévoir. […] Les mystères religieux ont soudainement acquis, aux yeux des poètes et des artistes dont je parle, un irrésistible charme ; les rites et les décors du culte les passionnent : l’artiste officie. […] La tête de lumière qu’est un artiste n’a pas le droit des ténèbres. […] Élisée Reclus, ici-même, à Genève, un grand artiste, M.
Greuze est l’idéal de Diderot comme artiste ; c’est un peintre sincère, affectueux, de famille et de drame, touchant et honnête, à la fois légèrement sensuel et moral. […] C’est le moment de chaleur de l’artiste, la verve pure, sans aucun mélange de l’apprêt que la réflexion met à tout ; c’est l’âme du peintre qui se répand librement sur la toile. […] Il a dit quelque part des pastels de La Tour, « qu’il suffirait d’un coup de l’aile du Temps pour en enlever la poussière », et pour faire que l’artiste ne fût plus qu’un nom. […] Diderot ne fut pas moins secourable et profitable aux artistes qu’au public. […] Mais, comme correctif et comme adoucissement à ces (regrets mal étouffés de l’écrivain et de l’artiste, le philosophe en lui et l’homme moral répondait : « On ne me vole point ma vie, je la donne ; et qu’ai-je de mieux à faire que d’en accorder une portion à celui qui m’estime assez pour solliciter ce présent ?
J’ignore pourquoi il n’y est plus ; mais il est certain que c’est un grand artiste. […] La robe de chambre de l’artiste fait la soie à merveille. […] Il s’est élevé ici une contestation singulière entre les artistes et les gens du monde. Ceux-ci ont prétendu que le mérite principal d’un portrait était de ressembler ; les artistes, que c’était d’être bien dessiné et bien peint. […] Est-ce le mérite du ciseau de l’artiste ou l’admiration de l’homme ?
Le prieur de ce monastère, pour faciliter au jeune artiste la représentation de la mort divine, prêta à Michel-Ange la clef des salles où l’on exposait les cadavres de la paroisse avant la sépulture. […] Le pape se plaisait à voir le génie du plus grand artiste de l’Europe travailler à sa propre immortalité. […] En artiste souverain qu’il était lui-même, il ne conçut pour toute envie qu’une émulation respectueuse pour un génie qui n’éclipsait pas le sien, mais qui l’illuminait d’une révélation nouvelle. […] Pendant le court pontificat d’Adrien VII, l’artiste découragé ne rentra pas à Rome. […] Ce ne sont pas les œuvres, c’est la bouche que le lecteur veut connaître dans le grand artiste.
Non certes, nous ne recommanderons jamais aux artistes de se faire copistes. […] Celui-là est le but commun de tous les arts, qui est lui-même l’éternel artiste. […] L’inspiration est accordée à l’artiste, comme le génie, par un don gratuit et imprévu. […] L’artiste n’a-t-il aucun moyen de provoquer le retour d’un hôte devenu familier ? […] Mais, plus favorisé que l’artiste, l’homme vertueux a le don de forcer pour ainsi dire la grâce.
Et encore que l’accueil des conjurés pour les artistes visiteurs soit bienveillant, ceux-ci et ceux-là demeurent un peu étonnés de se rencontrer. […] Les romantiques saluaient d’avance la chose nouvelle de 48 ; et, quoique la révolution anarchique sollicitée soit de tout autre ordre, apolitique, social, les artistes, un peu myopes, s’y précipitent sans trop d’information. C’est d’ailleurs la seule voie pour eux ouverte ; car certain socialisme, qui a les sympathies de la jeunesse des écoles pour ce qu’il est une plate-forme moins foulée aux électorats à venir, ce socialisme est odieux à l’artiste qu’il enregimenterait, et plus seulement pour trois ans. […] C’est pour cette cause fondamentale que je me sens, et beaucoup d’artistes mes voisins, sur plus de points en accord avec Béala, dit Biscuit, qu’avec M.
De notre temps, tout le monde, sauf l’artiste, ressemble à un artiste. […] » reprit l’artiste offensé, mais sur un ton plus bas. […] Mais en revanche j’y ai remarqué des choses, qui sont vraiment d’un artiste, et d’un grand artiste. […] Sûrement ce n’est pas un artiste pur-sang. […] Au fond l’artiste et le monde ont le même idéal.
Une autre de leurs pensées est celle-ci : « Malheur aux productions de l’art dont toute la beauté n'est que pour les artistes ! […] On a beau être artiste jusqu’au bout des ongles, on est d’un temps, d’une époque ; on exprime les choses avec art et talent, pour être, apparemment, en sympathie avec quelqu’un, avec le plus d’amateurs ou d’admirateurs possible. […] Quelle lâcheté ou quelle sottise y a-t-il à désirer que l’artiste, supérieur aux autres par ses moyens d’expression, reste d’ailleurs un homme autant qu’il se peut ? […] Je me juge moi-même en parlant de la sorte : je me classe parmi les lettrés plus que parmi les artistes. […] Aussi voudrais-je que l’artiste ne s’en souvînt que de loin, pour lui-même et pour sa gouverne, sans le laisser paraître.
Et encore : entre la prose d’un artiste et les vers d’un poète, il n’y a aucune différence esthétique de qualité. […] Je crains qu’il n’ait pris trop au sérieux les affirmations de certains artistes, tels que Domenico Morelli et Gabriele D’Annunzio. […] Ce rapport intime est-il toujours bien senti par l’artiste lui-même ? […] Bédier n’a jamais prétendu rabaisser en quoi que ce soit l’artiste Chateaubriand. […] Artistes sincères, artistes avant tout, ils ont fait œuvre de beauté.
Il a la culture étroite, l’intelligence exclusive, le préjugé tenace de l’écrivain artiste, pour qui rien n’existe hors de la littérature. […] Tout cela est d’un artiste. […] Rappelons-nous que Flaubert refusait d’en médire : il reconnaissait en Despréaux un artiste, un maître qui avait égalé son exécution à son intention. […] En voici le sens : Boileau n’a garde de poser la moralité comme un des éléments constitutifs de l’œuvre d’art : seulement, il l’exige de l’artiste. […] Jamais Boileau ne fut plus artiste que dans son estime de la technique.
Les propos s’aigrissent, le débat s’envenime, et l’artiste, après avoir livré son œuvre, jette au grand laquais qui le suit la bourse d’or que le baron vient de lui tendre. […] — à Frantz Wagner, le grand artiste qu’il a découvert et auquel il veut faire des loisirs dignes de son génie ! […] Celui qu’elle aime, c’est Spiegel ; et l’artiste, heureux et fier, sa maîtresse au bras, quitte ce château maudit. […] cet homme était un rêveur, un mélancolique, un grand artiste, et, du jour au lendemain, la fortune va le transformer en idiot féroce et grotesque ! […] On arracherait plutôt un sens à l’organisation humaine que d’extirper de l’âme d’un artiste le sentiment, le respect, l’idolâtrie de son art.
Le critique d’art est plus rare que le grand artiste. […] est un artiste d’une rare vaillance ; mais, si grande qu’elle soit, sa vaillance peut être inférieure à son audace… Je n’ai pas besoin de revenir aujourd’hui sur une personnalité dont les mérites incontestables ont été reconnus et mis en relief à la lumière électrique de tant d’articles de journaux, un peu éblouissants je crois. […] le moyen pour un artiste, fût-il le plus grand et le plus sorcier des artistes, de lutter victorieusement contre cela, contre cette première impression de la vie qui nous est restée vivante, flambante, idéale, et qui fait pâlir toute impression présente devant cette force du souvenir qui, elle aussi, a pour loi de se multiplier par la distance ! […] Son Nouveau Testament, où ce qu’il y a de plus beau a été inspiré par l’Apocalypse : la Vision de saint Jean, qui rappelle ce qu’il y a de plus grandiose, de plus pathétique et de plus fulgurant dans l’Ancien, son Nouveau Testament n’a guères de touchant que Jésus guérissant les malades, et encore la tête, l’incompréhensible tête de Notre-Seigneur Jésus-Christ pour tous les artistes, et sur laquelle les plus grands n’ont eu que des lueurs, Doré, qui la change chaque fois qu’il la recommence, la manque toujours. […] La Bible, pour lui, — comme pour tout autre artiste qui aurait eu l’idée de son œuvre, — devait être un Thabor pour son talent, et elle ne l’a pas été.
Les œuvres des grands artistes, tous inspirés par leur époque, se succèdent, et cette succession est le développement de l’art. […] Alors on est artiste comme le fut Goethe. […] Werther sent la Nature, et par là il se sent artiste, il se sent puissant : mais où tourner cette puissance, que faire de son art, que créer ? Créer, c’est aimer ; l’amour universel est le grand artiste et le créateur du monde. […] Cependant, pour ne pas mourir avec son héros, Goethe se fait une résolution : il sera artiste avant tout.
Image, a du fini quand les moyens de forme et de couleur employés par l’artiste sont adéquats à l’expression de l’intention de l’artiste. […] Stevenson, qui est l’artiste humain, et M. […] Cependant, quoiqu’elles soient incapables d’apprécier l’artiste, en tant qu’artiste, elles sont toutes disposées à apprécier l’artiste en tant qu’homme. […] Parfois elles épousent l’artiste. […] Whistler qu’il lui est inférieur comme peintre et artiste.
Venez ensuite chez moi voir la première pensée de ces artistes, c’est le laocoon, tel qu’il est, mais un des enfans est renversé sur sa cuisse le cou embarrassé dans les plis du serpent ; mais l’autre enfant se rejette en arrière et cherche à se délivrer. […] Si ce n’est pas une mauvaise plaisanterie, Bounieu est un artiste sans tête et sans ressource. […] L’artiste a répandu autour de sa statue un vase riche et doré, un pot de porcelaine bleue couvert, des fruits sur un bassin, des raisins, un tambour de basque. […] Je me connais en tableaux presque aussi bien qu’un artiste en littérature. […] Celle du saint est donnée par ses portraits multipliés à l’infini, portraits auxquels l’artiste est forcé de se conformer, celle du Christ est traditionnelle.
G. n’aime pas être appelé artiste. […] G., ou plutôt de l’artiste imaginaire que nous sommes convenus d’appeler M. […] Non seulement l’eau-forte sert à glorifier l’individualité de l’artiste, mais il serait même difficile à l’artiste de ne pas décrire sur la planche sa personnalité la plus intime. […] C’est créer une magie suggestive contenant à la fois l’objet et le sujet, le monde extérieur à l’artiste et l’artiste lui-même. […] À ce point de vue, les artistes peuvent être comparés à des saveurs variées, et le répertoire des métaphores humaines n’est peut-être pas assez vaste pour fournir la définition approximative de tous les artistes connus et de tous les artistes possibles.
Le faux artiste imite toujours, emprunte toujours. […] L’artiste doit être créateur. […] Et voilà toute la morale de l’artiste en tant qu’artiste. […] Il y a l’excellence de l’artiste. […] L’orateur est-il autre chose qu’un artiste littéraire, qu’un artiste en mots, en phrases, en périodes et en cadences ?
Ceci est donc purement un article de philosophe et d’artiste. […] La première est créée par la séparation primitive du comique absolu d’avec le comique significatif ; la seconde est basée sur le genre de facultés spéciales de chaque artiste. […] Ainsi, tel artiste allemand ou anglais est plus ou moins propre au comique absolu, et en même temps il est plus ou moins idéalisateur. […] On disait, et c’étaient les indulgents, pour expliquer l’insuccès, que c’étaient des artistes vulgaires et médiocres, des doublures ; mais ce n’était pas là la question. […] Les artistes créent le comique ; ayant étudié et rassemblé les éléments du comique, ils savent que tel être est comique, et qu’il ne l’est qu’à la condition d’ignorer sa nature ; de même que, par une loi inverse, l’artiste n’est artiste qu’à la condition d’être double et de n’ignorer aucun phénomène de sa double nature.
Cette exposition est faite au profit de la caisse de secours de la société des artistes, c’est-à-dire en faveur d’une certaine classe de pauvres, les plus nobles et les plus méritants, puisqu’ils travaillent au plaisir le plus noble de la société. […] La classique exposition n’a d’abord obtenu qu’un succès de fou rire parmi nos jeunes artistes. […] Il est présumable que l’artiste s’est servi pour le dessiner d’un modèle féminin. […] Nous avons entendu maintes fois de jeunes artistes se plaindre du bourgeois, et le représenter comme l’ennemi de toute chose grande et belle. — Il y a là une idée fausse qu’il est temps de relever. Il est une chose mille fois plus dangereuse que le bourgeois, c’est l’artiste bourgeois, qui a été créé pour s’interposer entre le public et le génie ; il les cache l’un à l’autre.
., est le signe le plus important de l’individualité du poète ou de l’artiste ; elle nous livre directement les premiers caractères à connaître, les caractères mentaux, qu’on serait impuissant à déterminer d’après les données de l’hérédité, de l’ethnologie, etc. […] « C’est de l’examen seul de l’œuvre, déclare-t-il expressément (p. 65), que l’analyste devra tirer les indications nécessaires pour étudier l’esprit de l’auteur ou de l’artiste qu’il veut connaître, et le problème qu’il devra poser est celui-ci : étant donnée l’œuvre d’un artiste, résumée en toutes ses particularités esthétiques, de forme et de contenu, définir en termes de science, c’est-à-dire exacts, les particularités de l’organisation mentale de cet homme. » Je ne mets pas en doute qu’on puisse atteindre à d’excellents résultats par la méthode interrogative de M. […] L’hérédité, la sélection naturelle qui s’opère entre les artistes et les facultés de l’artiste, les lieux ou l’habitat, ces trois facteurs, juge-t-il, ne nous donnent pas grand-chose, même entre les mains de Taine ; leurs influences sont indécises, et les théories de ce puissant critique ne semblent ni justes dans leur rigueur, ni surtout vérifiables. […] S’il nomme des artistes qui auraient été en opposition avec le milieu social (p. 108), c’est donc que le milieu porte sa marque reconnaissable. […] Il admet avec lui « un principe d’individuation, qui crée à mesure les types humains, et, entre autres, les types des artistes et des héros, — et un principe de répétition qui agrège et soulève l’humanité à ces protagonistes, principe qui se ramène, il y insiste, à une constatation ressentie de ressemblance entre les exemplaires et les adhérents ».
Or la natte japonaise mesure 90 centimètres de largeur sur 180 de hauteur, ce qui faisait à l’artiste un champ de peinture de 194 mètres. […] Une impression de la plus grande originalité et où l’artiste japonais eu la bravoure de rendre l’effet qu’il a vu, dans toute sa vérité invraisemblable. […] Mon seul plaisir c’est de devenir un habile artiste. […] Ainsi, si la mode exige que les peignes soient épais, les artistes devront augmenter le dessin pour couvrir l’épaisseur. […] C’était un artiste, qui fit l’illustration de Onna tchôhôki : un livre d’éducation pour la femme, qui traite de la civilité.
Quand on repousse brutalement un artiste hors pair comme Charles-Louis Philippe, on s’offre une faillite carabinée et on n’a plus qu’à fermer boutique. […] Sans cette révélation, on aurait continué à les traiter comme des artistes ! […] Les secours aux artistes, distribués de la façon qu’on sait, sont une aussi brillante invention que la « charité organisée ». […] Car il y a toute chance pour qu’il devienne alors une nourriture empoisonnée et que nous en crevions — en tant qu’artiste véritable, j’entends. […] Quant à l’artiste désintéressé et qui répugne aux mœurs électorales, son compte est réglé.
En Allemagne, de 1830 à 1880, se développait le génie de Wagner : d’artiste il devenait le maître de l’œuvre d’art de l’avenir. […] Il faut donc que les artistes des théâtres français en ce qui regarde leurs rôles deviennent wagnériens. […] L’art n’atteint son but que lorsqu’il est donné au public ; l’artiste a besoin de se communiquer, et de ce même désir na la création de l’œuvre d’art, Ce besoin de se communiquer distingue le vrai artiste de celui qui ne pratique l’art que par des raisons inférieures. […] Wagner représente la parfaite conciliation de ces deux artistes ; sa musique a aujourd’hui déjà une importance universelle et en même temps il est l’artiste le plus national. […] Stanten, le directeur du Métropolitain, serait autorisé à signer avec les principaux artistes d’Autriche et d’Allemagne des contrats de trois ans.
Vous remarquerez qu’il confond précisément ces deux choses, à savoir le caractère artiste et le caractère épicurien. […] Encore un trait du caractère artiste : le goût de la solitude. […] Je trouverai encore un trait d’artiste, et très important, dans son inconstance et sa variabilité continuelles. […] Encore un caractère assez fréquent, je crois, assez fréquent chez les artistes : la distraction. […] Voilà par où je terminerai ce qui ressortit à son caractère d’artiste, car il avait précisément dans le monde ce caractère.
. — Eléments de l’émotion artistique. 1° Plaisir intellectuel de reconnaître les objets par la mémoire ; 2° Plaisir de sympathiser avec l’artiste ; 3° Plaisir de sympathiser avec les êtres représentés par l’artiste. — Rôle de l’expression […] Aussi l’artiste est-il rarement oublié : par nous dans la contemplation de l’œuvre d’art. […] Le troisième élément est le plaisir de sympathiser avec les êtres représentés par l’artiste. […] Le poète ou l’artiste ont pour tâche de stimuler la vie en la rapprochant d’une autre vie avec laquelle elle puisse sympathiser : c’est une stimulation indirecte, par induction. Vous ne savez point ce que c’est que d’aimer, l’artiste vous forcera à éprouver toutes les émotions de l’amour ; comment ?
Et ce n’est pas du temps perdu : la rêverie est un travail latent qui, pour s’accomplir à l’insu de l’artiste, n’en féconde pas moins son cerveau. […] Ce sont bien des artistes, ceux-là, ce sont bien des jeunes gens. […] Je les aime riant, je les aime pleurant, je les aime naïfs et railleurs, ces artistes. […] Mais lequel d’entre vous veut donner sa demoiselle à cet être inutile et paresseux qu’on appelle un artiste ? […] ) Pauvre artiste, qui croyais avoir fait une belle toile !
ô mon ami, la belle occasion que cet artiste a manquée, de montrer l’extravagante barbarie de la question ! […] D’abord je voudrais bien que l’artiste me dît pourquoi cette lampe suspendue au fond de son tableau éclaire fortement le devant et laisse le fond obscur. […] Si cette esquisse m’appartenait, je ne permettrais jamais à l’artiste de l’achever. […] Les artistes préféreront le second et ils auront raison. […] Cela est savant de détails ; contours bien sûrs, dessiné large, à ce que croit l’artiste, c’est plutôt dessiné gros, grosses formes.
il n’y a pas trop de mépris en littérature pour ceux-là qui, plus épris du succès que fermes dans leur conscience d’artistes, renoncent à leur originalité, courbent leur talent jusqu’à des compositions infimes, et détrempent les brillantes couleurs de leur palette dans l’eau des lavoirs où la Vulgarité s’abreuve. […] Mais à cela près de cette nappe de lumière qu’un homme de génie versa, comme un Dieu bienfaisant, sur la tête d’un homme de talent trop obscur, Henri Beyle n’aurait été, aux yeux des hommes de son temps, qu’un dilettante supérieur d’art et de style, et non l’homme qui, dans cette première moitié du xixe siècle, devait, après Balzac, marcher à la tête des artistes, des observateurs et des écrivains. […] Assurément, l’auteur de la notice est trop exercé et trop compréhensif pour ne pas voir, du premier regard, ce qu’il y avait de véritablement grand dans Beyle : aussi marque-t-il bien la descendance de son génie, qu’il fait venir de La Bruyère et de Saint-Simon ; mais après ce large classement, après le rapport de famille spirituelle saisi avec la justesse d’un naturaliste de la pensée, on voudrait de Beyle, d’un si sérieux artiste, un portrait plus étudié et plus sévère. […] Prodigieuses contradictions, du reste, dans un esprit qui comprenait si bien la peinture, cet art exclusivement chrétien, et qui était devenu si féroce d’aristocratie, quand il s’agissait du talent, qu’il demandait des décorations et des crachats pour les artistes afin de les isoler de la foule et de préserver leurs célestes rêveries de l’importunité des sots. […] Ce grand linguiste, qui aimait la langue française comme on aime une personne, et qui, dans les moules vidés de Rabelais, de Montaigne, de Régnier, versait son jeune sang tout bouillant de génie et transfusait sa sève inspirée ; cet artiste désintéressé de tout, excepté de la Beauté possible, de la Beauté cherchée, après laquelle il courait, un flambeau dans la main, comme le Coureur antique, eut la douleur de voir sa perle roulée dans un oubli qui est la fange pour les œuvres de l’esprit humain, sous l’ignoble groin des pourceaux.
L’artiste. […] Ce duc gothique est le plus moderne artiste de la littérature antérieure à la Révolution. […] L’artiste dans Saint-Simon La nature avait mis en ce petit duc d’admirables facultés d’artiste, que son inaction forcée, ses passions rentrées ont développées. […] Rien ne prouve mieux qu’il y a en lui un artiste : la réalité le saisit, en dépit de ses préventions, de ses aversions, de ses théories ; et il lui est aussi impossible de ne pas la rendre que de ne pas la voir. […] Son instinct d’artiste trompe ses sympathies d’honnête homme et jusqu’à ses opinions de duc et pair.
Mais il regarda trop en artiste les maladies, pour pouvoir les comprendre en savant. […] Céard est un artiste si scrupuleux qu’en dehors des chroniques données aux quotidiens il écrit rarement, après d’infinies réflexions, se décide avec peine à prendre la plume. […] À son sens, si la vie qui nous entoure est d’une flottante veulerie, l’artiste doit prendre le temps et la peine de la condenser et de la présenter correctement : c’est un peu un corsetier. […] Et maintenant, dans En route, mieux encore : c’est la foi, la grâce, l’élan chrétien, le baptême et la communion que ce consciencieux artiste a attaqués. […] L’artiste a porté quatre ans son œuvre, avec amour, avec peine.
Dès le début un merveilleux artiste. […] Mallarmé était encore un artiste. […] Mallarmé, nous aura donné l’image d’un artiste véritable. […] La folie de l’artiste est plus haute, elle est plus joyeuse. […] L’artiste est celui qui peut créer une vie.
Ne dit-on pas pour chaque artiste : première, seconde, troisième manière ? […] On y retrouve la complexion, le caractère, les habitudes de l’artiste. […] Ce grand-père était un petit homme robuste, avec des yeux très vifs ; fort estimé comme artiste. […] Il semble que l’artiste ait ressenti lui-même la passion du Christ en la représentant. […] L’artiste prend tel ton et n’en peut prendre un autre ; son tempérament s’y oppose.
L’artiste était très grand chez Dumas, mais l’homme d’action était au moins égal, sinon supérieur, à l’artiste. […] Les artistes objectifs ne peuvent s’échapper à eux-mêmes. […] A eux se rattache une lignée de rares artistes en style, qui va de M. […] Tout artiste puissant est « créé comme un monde ». […] C’est la grande différence entre les artistes critiques et les autres.
Théophile Gautier donne au Moniteur, sa plume brillante sait résumer et figurer avec une précision d’artiste bien des observations et des études que d’autres développeraient et étendraient en analyse. […] Plus je deviens vieux, plus je pense que c’est la meilleure chose pour un artiste qui aime véritablement son art. » — En octobre 1826, au moment d’une réunion avec sa mère, qu’il avait décidée à venir passer quelque temps à Rome, il écrivit au même ami M. […] Léopold Robert est de ces artistes qui avancent et mûrissent avec les années. […] Ingres, duquel on le rapprochait assez naturellement, qu’il admirait comme le modèle des artistes, comme l’artiste de ce siècle le plus classique, et à qui il ne se laissait comparer qu’avec résistance et réserve, il marquait cependant la différence essentielle qui les séparait : Ingres plein de science, d’étude de l’Antiquité, cherchant l’idéal même par le souvenir historique, surtout par la poésie et par l’imagination, et dans la trace de Raphaël, de Phidias ou d’Homère ; et lui, Léopold, n’y voulant arriver, si c’était possible, que par la nature. […] Il croit que la morale dans la vie est bonne pour l’artiste.
Mais où l’artiste prendra-t-il les éléments de cette vie supérieure ? […] J’ai déploré, encore, les heures jadis perdues à espérer un artiste chez M. […] Nul n’est respectable autant que cet artiste, pour la constante sincérité des ambitions et des progrès. […] Point de musiques plus légères, plus spirituelles et plus vivantes, que ces fantaisies d’un délicieux artiste. […] Achevant l’œuvre des sincères artistes Manet et Cézanne, M.
Cependant, malgré cette erreur et un chevrotement trop prononcé, l’artiste tient le rôle avec courage et mérite. […] Toutes les mains applaudissent, on rappelle les artistes, on rappelle M. […] Quant à l’opinion des impartiaux parmi les artistes, qui modifiera-t-elle ? […] La plupart des artistes créateurs nous restent, il est malheureusement à déplorer que M. […] Chœurs de 80 artistes ; orchestre de 90 instrumentistes.
L’innocent artiste se laisse vaincre à force d’instances, et, tandis qu’il travaillait, l’artiste jaloux exécutait le même ouvrage de son côté. […] Homme singulier, mais bon homme, mais galant homme, La Tour ne ferait pas cela aujourd’hui ; et puis il faut avoir quelque indulgence pour un artiste piqué de se voir rabaissé sur la ligne d’un homme qui ne lui allait pas à la cheville du pied. […] C’est que l’œil du peuple se conforme à l’œil du grand artiste, et que l’exagération laisse pour lui la ressemblance entière.
L’artiste peut seulement imprégner cette réalité habituelle d’une vie plus intense, la transposer, volontairement, dans l’Art. […] A mesure que les âmes se développent, elles requièrent davantage, entre elles et l’âme de l’artiste, l’atténuation de tout intermédiaire. […] La perception de l’œuvre est ainsi gênée : un intermédiaire s’est dressé, non senti auparavant, entre ces âmes et l’âme de l’artiste créateur. Alors l’artiste doit employer des signes moins denses, plus différents, par leur aspect sensible, des choses qu’ils signifient : l’artiste plasticien use la peinture, au lieu de la statuaire ; le littérateur remplace le récit oral par le drame, et le drame par le roman. […] Un fait également certain est l’absolue différence du langage musical employé par ces premiers artistes et de notre langage moderne.
Les principaux artistes n’ont demandé que des indemnités, outre le logement ; aucune indemnité n’a dépassé 3, 000 marks ; quelques artistes, mesdames Materna et Sucher, n’ont voulu recevoir aucun argent. […] Le voyage de Munich à Paris est d’ailleurs le plus facile ; et puis c’est à Munich que nous retrouvons le plus grand nombre des artistes bayreuthiens, le capellmeister Levi en tête. […] Vainement l’artiste se retrouve aux discrètes joueries : le chagrin reparaît, demeure ; au milieu de la ’plus joyeuse ondée, voyez-le. […] Sa naïve langue nous est devenus incompréhensible ; mais peu gardèrent un si admirable souci de l’expression rigoureuse, Après lui Rameau, artiste bien moindre, acquit au vocabulaire musical des significations un peu rapides, tôt perdues. […] J’espère sous peu vous annoncer le programme de l’Opéra Américain, dont les artistes, tous nationaux, ont hautement interprété, l’année dernière, plusieurs des œuvres wagnériennes.
Ici, il me reste à esquisser en deux mots la fonction magnifique de l’artiste. Artiste ! […] Plus large : il y a des artistes dont la forme n’est pas cataloguée, ni facile à cataloguer, et dont l’activité n’en contribue pas moins à l’éducation esthétique d’un peuple. Le trottin de Paris, qui se fait pour une somme modique une toilette originale qu’elle porte avec goût, est une artiste ; le fruttivendolo, qui dispose avec amour et avec un sens très sûr des couleurs et des formes ses fruits et ses légumes, est un artiste. Dans un ordre plus élevé, il y a des artistes chez les diplomates, chez les savants, chez les penseurs.
On saisira en quels termes nouveaux nous pensons que la question poétique et littéraire doit se poser pour l’artiste aussi bien que pour le critique. […] Rousseau nous semble un admirable et savant écrivain, un vigoureux philosophe, plutôt qu’un grand poète ; Voltaire, comme artiste, ne triomphe plus que dans la moquerie, c’est-à-dire dans un genre de poésie qui est antipoétique par excellence. […] André Chénier et Bernardin de Saint-Pierre, seuls, demeurent tout à fait à part : vrais et chastes poètes, artistes exquis et délicats, aimant le beau en lui-même, l’adorant sans autre but que de l’adorer, le cultivant avec mollesse, innocence et une ingénuité curieuse, ils étonnent et consolent à l’extrémité de ce siècle, comme des amis qu’on n’attend pas ; ils gardent discrètement et sauvent dans leur sein les dons les plus charmants de la Muse, aux approches de la tourmente sociale. […] Ce qu’il y avait de démesuré et de vaguement instinctif dans son œuvre d’art empêcha madame de Staël d’être comprise alors et d’être appréciée à sa valeur comme artiste et poète. […] La renommée de madame de Staël était due également à l’opposition politique, à la persécution qui la rendait intéressante, et à la philosophie sentimentale qui était en vogue alors dans tout un certain monde ; l’art n’entrait presque pour rien dans leur gloire ; à ce titre d’artistes, on était disposé plutôt à les railler.
Seulement, n’est-ce pas là une raison de plus pour la Critique de glorifier ceux qui ont cette crânerie de prendre pour sujet de livre un prêtre, — qui préfèrent la beauté intrinsèque de leur œuvre à l’argent ou à la renommée qu’elle peut rapporter, et sont assez artistes pour avoir ce désintéressement et cette fierté ? […] Il est trop penseur et trop artiste pour que le type du prêtre ne l’attire pas, et il l’a, je crois, touché plus d’une fois dans ses œuvres. […] Lui, il voudrait que le prêtre restât toujours grand pour l’histoire, et s’il ne l’est pas, il en souffre… Seulement, impartial comme l’artiste sincère, il le peint ce qu’il le voit, par amour de la peinture vraie ; et s’il en souffre, il ne s’en venge même pas en forçant le trait. […] Il est évident qu’il y a ici non plus un romancier à la douzaine, mais un artiste réfléchi, qui cherche des effets élevés et pathétiques et qui les trouve… Ce qui distingue particulièrement Ferdinand Fabre, c’est la force, bien plus grande chez lui que l’éclat. […] Edgar Poe a écrit des Contes fantastiques avec le sentiment frissonnant de leur réalité, et un artiste qui comprend l’Église et le prêtre, et qui aurait dû aller jusqu’au bout et tout comprendre, n’ose pas faire parler franchement et distinctement un crucifix !
3º Lequel préférez-vous, et lequel jugez-vous le plus utile d’un critique dogmatique ou d’un critique impressionniste, d’un académique ou d’un indépendant, d’un universitaire ou d’un artiste ? […] — Peu importe qu’un critique soit dogmatique ou impressionniste, académique ou indépendant, universitaire ou artiste, si c’est un bon critique. […] La mienne s’adresse à un critique avant tout artiste, averti, capable d’aimer et de sentir la beauté ( Beauté, mon beau souci ! […] Marius-Ary Leblond, qui ne croient pas aux catégories, voudraient que le critique fût « à la fois “dogmatique” et impressionniste, académique et indépendant, universitaire et artiste, révolutionnaire et religieux de la tradition, ordonné et fantaisiste ». […] Lamartine. » Ce qui tendrait à prouver que la liste des Marges n’était pas aussi « exhaustive » qu’il apparaissait, et qu’à la série des critiques dogmatiques, impressionnistes, académiques, indépendants, universitaires et artistes, il convenait d’ajouter le créateur.
L’artiste véritable se prolonge en esthéticien, quitte à perdre, sitôt que la fièvre de l’intuition inconsciente le crispe, son beau calme théorique. […] L’artiste, dit M. […] Et de ce côté isse le point de suture entre l’esprit populaire et l’inspiration de l’artiste. […] La caresse spirituelle des mots nous libère, nous achemine au ravissement, vers celui-là même où plane l’artiste. […] qu’il fera bon s’incliner devant l’artiste qui condensera en une œuvre vigoureuse et fière tous ces membra disjecta !
Eh bien, mon ami, voilà ce qu’il plaît à l’artiste d’appeller le repas de Tantale . […] Ce dos est beau et l’artiste le sait bien, car c’est pour la seconde fois qu’il s’en sert. […] Outre les dessins dont j’ai parlé, il y en a d’autres de ce dernier artiste, à la sanguine et sur papier bleu, qui sont jolis et d’un bon crayon, il y a de l’esprit et du caractère. […] Ce moyen serait bien plus sûr que d’appeller des artistes étrangers qui périssent transplantés, comme des plantes exotiques dans des serres chaudes.
Elle savait confusément que si, d’ordinaire, le comédien et l’artiste passent vite, la durée est un des caractères du grand artiste. […] À cette épreuve suprême de l’heure sérieuse, combien de grands artistes ont succombé ! […] Donc honneur à l’artiste habile qui peut cesser d’être jeune, impunément ! […] Or, de tous les artistes de ce temps-ci, l’artiste qui a duré le plus longtemps, qui a vécu d’une vie à la fois plus entière et plus hautaine, à coup sûr, c’est mademoiselle Mars. […] À coup sûr, ce n’était pas là un artiste parfait ; mais bien peu d’artistes ont approché de la perfection plus que n’a fait mademoiselle Mars.
À Monsieur Théophile Silvestre L’auteur des artistes vivants Mon cher Silvestre, L’abîme appelle l’abîme. […] J’ai donc pensé que je dégageais un sentiment et une ressemblance de plus entre nous, en dédiant à l’auteur des Artistes vivants, ces Romanciers vivants, qui sont aussi des peintres ou des sculpteurs, à leur façon, comme vos artistes, puisque, comme eux, mais avec des procédés différents, ils s’efforcent d’exprimer la Vie et veulent atteindre à la Beauté.
Il se trouva que si l’un était une manière de poète et d’artiste, l’autre personne était une grande dame, une femme de qualité, et de ce qu’on appelle le faubourg Saint-Germain. […] Ce livre dispose l’imagination d’une certaine façon, pour la désoler ensuite selon la fantaisie de l’auteur, — grand artiste, mais pauvre philosophe ! […] La Fantaisie est la reine du monde. » C’est l’artiste et le poète qui parle. […] La femme du monde a bien vite senti qu’elle avait affaire à un poète, à un artiste, à un homme d’une autre race. […] L’artiste, quoi qu’il fasse, s’en souviendra toujours.
Gavarni, en ses années de jeunesse, était comme le centre d’un tourbillon ; il vivait dans un monde d’artistes, de joyeux amis ; — joyeux, entendons-nous bien, et n’exagérons pas. La vie d’un artiste sérieux est, avant tout, dans le travail. […] On ouvre les fenêtres et tout est dit. » Voilà bien l’image d’une soirée d’artistes dans l’atelier. […] Encore une fois, que se passa-t-il dans l’esprit de l’artiste ? […] Il était déjà au comble de son succès qu’une distinction à laquelle tout artiste attache du prix lui manquait encore.
Thiers, Stendhal, — Jal, expression de l’opinion moyenne, — avaient pu se rencontrer souvent et causer avec des artistes, mais ils ne l’étaient pas eux-mêmes. […] Une publication à la fois spéciale et répandue, l’Artiste, sous la direction d’Arsène Houssaye, conviait les jeunes plumes et préparait le goût de plus d’un expert. […] D’artiste à artiste, cette oraison funèbre, après tout, en vaut une autre. […] En 1848, la situation de Théophile Gautier, cet artiste et ce feuilletoniste de luxe, avait nécessairement reçu un coup violent. […] C’est un roman-album à l’usage des artistes, des amateurs d’estampes, des collecteurs d’Abraham Bosse ou de Callot.
Lorsqu’il se vit le restaurateur en titre de Notre-Dame, il aurait même pu retrouver, après coup, un signe et comme un présage de sa destinée d’artiste, dans une impression d’enfance qu’il a quelque part racontée : « Il m’est resté, dit-il, le souvenir d’une émotion d’enfant très vive et encore fraîche aujourd’hui dans mon esprit, bien que le fait en question ait dû me frapper à un âge dont on ne garde que des souvenirs très vagues. […] Viollet-Le-Duc, qui démontrera et justifiera dans le détail cette manière de juger et de considérer l’art romain, nous offre, en maint endroit de ses Entretiens, des passages frappants qui font portrait : « Le Romain est avant tout politique et administrateur, il a fondé la civilisation moderne ; est-il artiste comme l’étaient les Grecs ? […] Le Romain ne voit que l’ensemble, la satisfaction d’un besoin remplie ; il n’est pas artiste, il gouverne, il administre, il construit. […] C’est en parlant du Parthénon et des autres monuments de cette date, que Plutarque dans sa Vie de Périclès nous dit : « Pendant que ces ouvrages s’élevaient fiers de grandeur autant qu’inimitables par la beauté et la grâce, les artistes s’efforçant à l’envi de surpasser leur création par la délicatesse du détail, ce qu’il y avait de plus admirable encore, c’était la rapidité. […] Prenant pour exemple, sur l’Acropole même d’Athènes, l’Erechtheïum, « ce groupe de trois temples ou salles dont deux se commandent, avec trois portiques à des niveaux différents », se replaçant en idée dans ce bel âge de la Grèce, il suppose que le monument terminé, au moment où l’échafaud disparaît et où l’effet d’ensemble se révèle, un mécontent, un critique sort de la foule et accuse publiquement l’architecte d’avoir violé les règles au gré de sa fantaisie ; et l’artiste alors, heureux d’avoir à s’expliquer devant un peuple véritablement artiste et qui saura le comprendre, réfute agréablement son contradicteur, non sans flatter un peu son auditoire : « Celui qui vient de parler si légèrement, Athéniens, est probablement un étranger, puisqu’il est nécessaire de lui expliquer les principes d’un art dans l’exercice duquel vous dépassez les autres peuples.
Ces choses-là, je le sais, ne vous effrayent pas ; vous êtes un audacieux et un artiste. […] Les jeunes gens du temps allèrent au théâtre munis de sifflets, avec l’intention de ne pas écouter cet artiste. […] Les artistes avaient pris parti contre l’Empire. […] D’ailleurs, je suis assez artiste pour n’être l’ennemi d’aucune œuvre d’art. […] La question de la réception est plus importance pour les œuvres de Richard Wagner que pour n’importe quel autre artiste.
Les artistes reçoivent dans leur loge comme dans un salon ou dans un bureau. […] De jour en jour, les écrivains et les artistes se livrent à ces réflexions. […] Mais avouons-nous courageusement que les artistes ne le sont pas et n’ont pas intérêt à l’être trop. […] Et la profession d’artiste dramatique n’a pas tardé à les rejoindre. […] Les artistes qui méprisent le Conservatoire et les subventions de l’État ont peut-être raison artistiquement, ?
Ce tableau n’y était pas, et tant mieux pour l’artiste et pour nous. L’artiste Belle n’était pas bastant pour une composition de cette nature, qui demande de la verve, de la chaleur, de l’imagination, de la poésie. […] L’artiste ou le comité académique en excluant du sallon la composition de Belle a fait sagement, il y avait déjà un assez bon nombre de mauvais tableaux sans celui-là.
Le chien blessé hurle et s’agite : l’artiste dolent écrit et se calme. […] Elle n’est pas étouffée : elle subsiste encore en partie à l’état d’Idée-Force ; et l’artiste qui, ayant pleuré, rappelle ses larmes, ayant péché avoue sa faiblesse, est encore, à l’instant même de son aveu, sanglotant et ému. […] On peut souffrir toute une vie sans avoir — fût-ce une minute — fait œuvre d’artiste. […] Il serait dès lors déplacé, inexact et injuste, de s’obstiner à retrouver l’auteur derrière le moindre geste de son protagoniste littéraire : un cas de neurasthénie évoluant dans une mentalité d’artiste et d’érudit peut être initiateur d’un tableau plus complet. […] Car les grands artistes furent le plus souvent de profonds amoureux, et depuis trois cents ans la séméiologie des troubles qu’ils en éprouvèrent se murmure en prose, se déclame en vers, se chante en musique.
Sainte-Beuve M. de Vigny n’a pas été seulement dans Stello et dans Chatterton le plus fin, le plus délié, le plus émouvant monographe et peintre de cette incurable maladie de l’artiste aux époques comme la nôtre, il a été et il est poète ; il a commencé par être poète pur, enthousiaste, confiant, poète d’une poésie blonde et ingénue. […] Grand artiste, il fut aussi un gentilhomme et un homme, partout fidèle ! […] Il repousse avec une sorte de pudeur virile la tentation d’amuser les désœuvrés des secrets de sa vie ou des mystères de son cœur… l’art est toujours chez lui, en un sens, philosophique… Chacun de ses poèmes : Moïse, Éloa, n’est, si l’on veut bien le prendre, qu’un admirable symbole… C’est une succession de petits ou de grands drames dont chaque partie se relie par une pensée unique, mais l’artiste, nulle part, ne se sacrifie au penseur ; il garde tous ses droits, nous enivre et s’enivre lui-même de poésie, orne d’une grâce infinie chaque détail. […] Et, d’une manière générale, jusque dans ses plus belles pièces, — jusque dans Éloa, jusque dans sa Maison du Berger, — sa liberté de poète est perpétuellement entravée par je ne sais quelle hésitation ou quelle impuissance d’artiste. […] Mais les cinq poèmes dont je parle sont la portion la plus nécessaire, la plus inévitable de ses ouvrages, et ils suffisent à évoquer en ses maîtresses lignes cette physionomie d’un des plus nobles artistes qui aient vécu parmi nous.
Malgré l’ignorance des effets et des causes, et les règles de convention qui ont été les suites de cette ignorance, j’ai peine à douter qu’un artiste qui oserait négliger ces règles, pour s’assujettir à une imitation rigoureuse de la nature, ne fût souvent justifié de ses pieds trop gros, de ses jambes courtes, de ses genoux gonflés, de ses têtes lourdes et pesantes, par ce tact fin que nous tenons de l’observation continue des phénomènes, et qui nous ferait sentir une liaison secrète, un enchaînement nécessaire entre ces difformités. […] Si j’étais initié dans les mystères de l’art, je saurais peut-être jusqu’où [l’artiste] doit s’assujettir aux proportions reçues, et je vous le dirais ; mais ce que je sais, c’est qu’elles ne tiennent point contre le despotisme de la nature, et que l’âge et la condition en entraînent le sacrifice en cent manières diverses. […] Ce n’est que dans l’intervalle de ces deux âges, depuis le commencement de la parfaite adolescence jusqu’au sortir de la virilité, que l’artiste s’assujettit à la pureté, à la précision rigoureuse du trait, et que le poco più ou poco meno, le trait en dedans ou en dehors fait défaut ou beauté. […] L’étude de l’écorché a sans doute ses avantages ; mais n’est-il pas à craindre que cet écorché ne reste perpétuellement dans l’imagination ; que l’artiste n’en devienne entêté de la vanité de se montrer savant ; que son œil corrompu ne puisse plus s’arrêter à la superficie ; qu’en dépit de la peau et des graisses, il n’entrevoie toujours le muscle, son origine, son attache et son insertion ; qu’il ne prononce tout fortement, qu’il ne soit dur et sec, et que je ne retrouve ce maudit écorché même dans ses figures de femmes ? […] Toutes les fois que l’artiste prendra ses crayons ou son pinceau, ces maussades fantômes se réveilleront, se présenteront à lui ; il ne pourra s’en distraire et ce sera un prodige s’il réussit à les exorciser pour les chasser de sa tête.
Dès qu’on apprend la mort d’un artiste, ou d’un personnage considérable, et même insignifiant, immédiatement se modifie le jugement latent qu’on en portait. […] Mais le fond de l’œuvre, la-méthode, le système d’écriture, cette probité supérieure dans l’exécution sont l’honneur certain de l’artiste perdu hier. […] La fameuse écriture artiste est plutôt un amalgame. […] En cela semblable à beaucoup d’artistes, il concevait et rédigeait son œuvre sans autre souci que de satisfaire sa conscience artistique ; mais, sitôt le livre édité, il se préoccupait infiniment de l’effet produit.
Ces échevins ne sont que des sacs de laine ; ou des colosses ridicules de crème fouettée ; ou si vous l’aimez mieux, c’est comme si l’artiste avoit laissé une nuit d’hyver sa toile exposée dans sa cour, et qu’il eût neigé dessus toute cette composition. […] Il y a un autre mérite que peu d’artistes auroient eu et que beaucoup moins de spectateurs auroient senti ; c’est dans une multitude de figures, toutes debous, toutes vêtues de même, toutes rangées autour d’une table quarrée, toutes les yeux attachés vers le même point de la toile, des positions naturelles, des mouvements de bras, de jambes, de tête, de corps si variés, si simples, si imperceptibles, que tout y contraste, mais de ce contraste, inspiré par l’organisation particulière de chaque individu, par sa place, par son ensemble ; de ce contraste non étudié, non académique, de ce contraste de nature. […] Le meilleur des trois tableaux qu’il a demandés à nos artistes est médiocre. […] Dans nos campagnes les mieux ravagées par l’intendance et la ferme, dans la plus misérable de nos provinces, la Champagne pouilleuse ; là où l’impôt et la corvée ont exercé toute leur rage ; là où le pasteur réduit à la portion congrue n’a pas un liard à donner à ses pauvres ; à la porte de l’église ou du presbitère ; sous la chaumière où le malheureux manque de pain pour vivre et de paille pour se coucher, l’artiste aurait trouvé de meilleurs modèles.
De Machy Des cinq tableaux que cet artiste a exposés : l’Intérieur de l’église de la Magdeleine, le Péristyle du Louvre vu du côté de la rue Fromenteau et éclairé par une lampe ; les deux Ruines à gouache de la foire Saint-Germain incendiée, et l’Installation de la statue de Louis XV, les quatre premiers ne sont pas sans mérite. […] C’est le mérite, non de l’artiste, mais des règles. […] Je n’en parlerais pas, sans un incident singulier que l’artiste a rappelé dans son tableau.
La prose de Stello si savante, si déliée, a fait acte de poésie, autant par les trois épisodes qu’elle décore, que par cette analyse pénétrante de souffrances délicates et presque inexprimables qu’il n’est donné qu’à une sensibilité d’artiste de subir à ce point et de consacrer. […] L’auteur de Marie pourtant a gardé chaste et noué le long vêtement de la Muse ; espèce de Bion chrétien, de Synésius artiste, en nos jours troublés ; jeune poëte alexandrin qui a maintenant rêvé sous les fresques de Raphaël, et qui mêle sur son front aux plus douces fleurs des landes natales une feuille cueillie au tombeau de Virgile. […] Barbier, artiste, sinon stoïcien, sectateur de Dante et de Michel-Ange, sinon de Chrysippe et de Crantor, il y avait un idéal de beauté et d’élévation qu’il confrontait violemment avec la cohue de vices qu’un brusque orage avait soulevée. […] Quand elle a quelque fonds d’artiste en elle, disions-nous, elle est promptement avertie par un tact chatouilleux de ce qui se remue de poétique alentour ; qu’elle se réjouisse donc d’avoir à le dire ; qu’elle mette sa gloire à saluer la première : sa consolation comme son devoir est de ne se lasser jamais. […] C’est assurément l’artiste le moins chrétien d’aujourd’hui, celui dont le caractère individuel est le plus purgé de toutes réminiscences doctrinales et sentimentales du passé. » — M.
Quand sera-t-on artiste, rien qu’artiste, mais bien artiste ? […] Parce que la foule n’a pas de personnalité qui résiste à l’artiste. […] Le critique, pour ne pas se supprimer soi-même, pour se faire sa place au soleil, se voit souvent forcé de rudoyer le peuple des auteurs et artistes ; aussi une hostilité plus ou moins inconsciente s’établit-elle vite entre les deux camps. […] D’après un auteur contemporain42, c’est dans les moments où le génie sommeille que l’artiste perd de son inconscience, et que, par là même, il permet le mieux au critique d’apercevoir ses procédés de facture et de composition.
Ce sera l’honneur de la critique d’avoir protégé et défendu, obstinément, cette illustre artiste ; tant sur la fin de sa vie elle avait peine à se défendre contre les impatients qui se fatiguent d’entendre dire : — « Aristide est juste », — ou bien : « Mademoiselle Mars est la plus grande artiste de son temps ! » À propos d’une insulte sans nom qui fut faite à notre chère artiste, le feuilleton parlait ainsi : La Couronne funèbre. — Molé. — Fleuri. — Menjaud « Est-il besoin de vous rappeler que nous touchons aux dernières représentations de mademoiselle Mars ? […] ces pauvres grands artistes sont si peu sûrs d’eux-mêmes), que ses amis ne le voudraient pas, moi à leur tête. […] il n’y a qu’elle pour comprendre les grands artistes, pour les aimer, pour les applaudir, pour se prosterner aux pieds des chefs-d’œuvre ! […] quel grand artiste de moins !
Je ne la connais pas personnellement ; et, d’ailleurs, on peut douter de tout, quand on pense que Mme de Sévigné n’aimait sa fille que dans l’absence et qu’elle n’était rien de plus qu’une grande artiste en sentiment maternel… Grande artiste, Mme André Léo ne l’est d’aucune manière ; mais elle n’en a pas moins l’accent maternel, bien plus que Mme Sand, qui a un autre accent moins pur… Mme André Léo, qui a failli (j’en ai vu l’heure) détrôner Mme Sand dans l’opinion, qui l’a sacrée la première femme de son temps, est un bas-bleu foncé, trop conglutiné dans son indigo, pour être jamais la créature, enflammée et inspirée, qu’on appelle une grande artiste. […] Par conséquent pas de grande artiste, et même pas d’artiste du tout ! […] Écrits avec du fusain, qui est une poussière, ils s’en vont, comme la poussière, au moindre souffle… On se rappelle Mme André Léo, bien plus par les idées qu’elle défend que par ses ouvrages… Or, si l’artiste n’y est point, à quoi bon des romans ?
Il faut la main d’un poète ou d’un artiste pour l’en tirer. […] Il est donc tenu d’être dans la vérité, même avant d’être artiste, avant d’être poète, avant d’avoir le talent qu’il a et de le manifester. […] Il faut que les artistes comme lui l’apprennent et le sachent. […] Il n’y a que des jouteurs contre le style, des lutteurs plus ou moins heureux contre la langue, des artistes à doigté et non pas à inspiration. Que n’aurait pas été Leopardi s’il avait eu la foi du Dante, ce Leopardi dont la gloire se raconte à l’oreille de quelques artistes curieux ?
C'est de l’école romantique dont nous sommes, de 1828 à aujourd’hui ; l’auteur, qui a fait le tour du monde en amateur et qui est un homme de près de quarante ans, est artiste dans le vrai sens ; il a médité et mûri ses différentes pièces et descriptions, y mêlant un sentiment moral, et les appropriant par le tour ou le sujet à quelque artiste du jour : L'Etna est dédié à Victor Hugo ; Émile Deschamps a une pièce qui résume heureusement et savamment tout l’art poétique moderne. […] Mais un est si à bout des beaux vers qu’il est plus que possible que ce recueil n’aura qu’un succès limité entre artistes et gens du métier. — Décidément l’École finit ; il faut en percer d’une autre : le public ne se réveillera qu’à quelque nouveauté bien imprévue.
L’artiste qui parle à notre intelligence, qui nous démontre scientifiquement, exactement, froidement, le mécanisme de l’âme humaine ne nous satisfait pas : le théâtre n’est pas une école pratique de psychologie. […] Le naturalisme, par l’importance même qu’il attribue à l’objet, pousse facilement à diminuer la part de l’ouvrier ; et d’autre part les artistes qui ne savent pas très bien leur métier, ou les gens d’esprit qui ne sont pas artistes, oublient facilement que la faculté de sentir n’implique pas toujours une puissance égale d’expression, jet que l’image qu’on a dans l’esprit ne s’objective pas toute seule, sans grand labeur et contention d’esprit. […] Quel que soit son sujet, et quoi que lui fournisse la nature, l’artiste a toujours à créer une forme, la plus vraie, la plus expressive, la plus belle enfin qu’il se pourra. […] Plus la forme d’un poème est fixe, et plus le poète doit être sévère sur la facture : ainsi dans la ballade et dans le sonnet, dont Boileau, en artiste curieux des formes raffinées et difficiles, s’arrête un peu complaisamment à détailler les rigoureuses lois. […] Mais il n’était pas poète : il n’a pas su choisir dans la nature ce qu’un artiste devait rendre, ni le rendre artistement.
N’y reconnaît-on pas tout de suite l’artiste savant et le poète de race ! […] [L’Artiste (1er février 1864).] […] Cent fois digne du grand artiste qui l’emplit non seulement de sa verve charmante, mais encore de son radieux, de son lumineux bon sens, il m’apparaît comme une des expressions les plus définitives de son génie et de sa noblesse, car il n’en est pas une page, il n’en est pas une ligne, un mot, qui ne hurle, ne chante, ne proclame le triomphe et la gloire des Lettres ! […] Il aima à la fois la rudesse des temps barbares, la civilisation affinée de l’antique Grèce et la gracieuse décadence de Paris ; son intelligence et ses sens vibrèrent à toutes les beautés, et s’il nous est cher, c’est parce qu’il ne se confina pas en une manière, parce qu’il fut toujours un artiste sincère et bien vivant. […] Il ne faut pas seulement reconnaître que Fiammette est le meilleur conte qu’un artiste ait porté à la scène, il faut dire que c’est le seul qu’on écoute avec un plaisir vrai et sans une minute d’effort.
À côté de l’artiste, il avait senti en lui dès sa jeunesse un critique et un théoricien. […] Mais ce que maint bachelier pourrait lui dire, c’est que les artistes aussi bien que les écrivains, depuis qu’il y a au monde des écrivains et des artistes, ont toujours eu la prétention de faire usage du « document humain », et de s’inspirer de la réalité. […] Zola a voulu simplement dire que l’artiste devait ouvrir les yeux, regarder autour de lui et s’efforcer de peindre l’humanité telle qu’elle est, il n’a fait que répéter le conseil que formulent tous les critiques depuis qu’il y a des critiques, et qu’ont pratiqué instinctivement tous les artistes depuis qu’il y a des artistes : voilà sa grande découverte réduite à une vérité de la Palisse, et il va rendre jaloux l’ombre de Joseph Prudhomme. […] L’artiste n’est pas un savant qui recherche les causes ; sa tâche à lui c’est de peindre les effets, de faire jaillir de son œuvre l’émotion, douce ou terrible, qui tour à tour nous prend en face de la vie elle-même, de remuer nos cœurs, de nous attendrir, de nous faire sourire ou frémir. […] Les artistes de la démocratie athénienne, celle qui est restée la gloire du monde, s’appelaient Ictinus, Phidias, Myron, Scopas, Praxitèle ; ses poètes s’appelaient Sophocle, Euripide, Ménandre ; ses orateurs Périclès et Démosthène : ils auraient désavoué les naturalistes, et les naturalistes le leur rendent.
L’art que voulait Wagner ne pourrait vivre entièrement, pleinement que « par la volonté de tous les artistes réunis », et par la volonté du public qui se joindrait à celle des artistes, c’est ce que très peu comprennent, tant parmi les artistes que parmi le public. […] Je sais bien qu’on a tenté cette traduction, mais j’ai assez confiance dans le bon goût des Français et dans la sûreté de leur instinct artiste, pour être persuadé qu’ils refuseront d’accepter les produits que MM. […] Glatisenapp, l’auteur de la seule biographie complète, a gâté une œuvre de très grand mérite par l’absence de tout sens critique et de toute vue d’ensemble vraiment vivante, et aussi par un genre d’adulation qui sied mal à un artiste aussi viril que Wagner. […] Se sentir si entièrement compris de si nobles âmes, n’est-ce point le rêve idéal, pour un artiste ? […] Par un cas unique dans l’histoire de l’art, on a, réunis, tous les documents qui peuvent servir à faire la biographie définitive d’un artiste.
La vertu d’un grand artiste, c’est son génie. […] Béranger n’est ni un poète national ni un grand artiste. […] Après Malherbe, les merveilleux artistes de la Pléiade ont été oubliés ; après J. […] Quand la conformité s’accomplit, l’artiste est complet. […] On sent que l’artiste n’est point le maître despotique de son instrument.
C’est le tact qui le fait pénétrer dans l’âme de l’artiste ou du poète. […] Il faut admettre et accepter la délicatesse fragile de ces beaux édifices et laisser faire l’artiste. […] Plein de lui-même, passionné pour son art, il était modeste à sa manière, sous des dehors de présomption qui n’étaient que naïveté d’artiste (les grands artistes sont de grands enfants !) […] Il a paru quelquefois avoir des goûts de parvenu : il n’avait au fond que des goûts d’artiste. […] Certes, il avait senti le beau en grand artiste, il avait même compris la nature en grand maître.
Un étranger de passage, un jeune artiste, — (affamé, comme de raison), — sans ressources, abandonné « même de son chien », se trouvait perdu dans Paris en un taudis glacé de la rue St-Roch. […] — Quels ingrats, tous ces artistes ! […] Il n’y eut même jamais un artiste, assurément, qui réfléchit à son art moins que Beethoven. […] Les artistes qui ont pris part à ces soirées sont MM. […] Wyzewa voit en Beethoven un artiste capable de révéler la « vraie vie » et le précurseur d’un nouvel art dont Wagner est le grand prêtre.
Pour étudier le grand ensemble que forment les œuvres de la seconde partie du xviie siècle, il conviendra de porter d’abord notre attention sur celles qui, appartenant plutôt à des mondains qu’à des artistes, nous font ainsi connaître à la fois le milieu où se formèrent et le public auquel s’adressèrent les artistes. […] C’est la perfection — pour la première fois manifestée — du style mondain, point artiste, qui tire toute sa valeur de ses propriétés intelligibles. […] Elle a ainsi des impressions, des plaisirs d’artiste. […] Dans la seconde partie du siècle, en effet, comme dans la première, aucun artiste ne s’empare encore de cette forme, et c’est une femme du monde qui en fournit le chef-d’œuvre. […] Mais ce n’est pas un artiste : son Roman bourgeois est une collection assez incohérente de portraits et de satires.
Assez d’autres parleront le jargon de l’atelier et se feront valoir au détriment des artistes. […] Si un artiste produit cette année une œuvre qui témoigne de plus de savoir ou de force imaginative qu’il n’en a montré l’année dernière, il est certain qu’il a progressé. […] L’artiste ne relève que de lui-même. […] Jamais artiste ne fut plus attaqué, plus ridiculisé, plus entravé. […] Delacroix me paraît être l’artiste le mieux doué pour exprimer la femme moderne, surtout la femme moderne dans sa manifestation héroïque, dans le sens infernal ou divin.
Il me semble que, quand on a la fantaisie d’occuper de sa personne un art imitatif, il faudrait avoir d’abord la vanité d’examiner ce que cet art en pourra faire, et si j’étais l’artiste et qu’on m’apportât un aussi plat visage, je tournerais tant, que je le ferais entendre, non à la façon du Puget ou de Falconnet, mais à la mienne, et le plat visage parti, je me frotterais les mains d’aise, et je me dirais à moi-même : dieu soit loué ! […] Je vois sortir de la bouche de cet artiste en légende : de contemnenda gloria ; écrit en rouleau autour de son ébauchoir : de pane lucrando ; et sur la frange de son habit : fi de la gloire, et vivent les écus ! […] Je crois que cet artiste est mort il y a quelques mois ; un an plus tôt, on ne l’aurait pas regretté. […] L’artiste aura choisi le jour où Ganimède fut admis au rang des dieux. […] Cet artiste a de l’idée.
Cet homme, qui était suprêmement un artiste par l’enthousiasme et par l’expression, eut toujours la rage d’être philosophe. […] Or, il faut certainement plus que cela pour être un grand artiste littéraire, et il faut bien le dire, si tard que ce soit, Diderot n’est pas ce qu’on peut appeler un grand artiste. Il a des qualités d’artiste, comme il avait des qualités scientifiques. […] Tout grand artiste, en effet, — et Voltaire, malgré l’infériorité qu’il dut aux passions de son siècle et l’abus qu’il a fait de ses talents, a du grand artiste, — tout grand artiste a quelque chose d’élégant, de patricien, d’aristocratique, que n’a jamais Diderot, même les jours où il a le plus de talent. […] Falconet était un artiste avec lequel Diderot pouvait être autre chose que bourgeois.
Ces règles étaient de trois sortes : les définitions des genres nettement séparés entre eux et sans communication ; les lois intérieures de chaque genre, qui faisaient prévaloir l’unité du type sur la diversité des tempéraments ; les préceptes du goût, qui limitaient l’artiste dans le choix des objets d’imitation et des procédés d’expression. […] Il brisera les formes trop arrêtées, trop fixes, qui ne se laissent plus manier par la pensée de l’artiste, ces habitudes tyranniques de composition et de style qui filtrent pour ainsi dire l’inspiration et éliminent l’originalité : en brisant les genres, les règles, le goût, la langue, le vers, il remettait la littérature dans une heureuse indétermination, dans laquelle le génie des artistes et l’esprit du siècle chercheraient librement les lois d’une reconstitution des genres, des règles, du goût, de la langue, du vers. […] La barrière qui séparait écrivains et artistes a été, comme je l’ai dit, abattue par Diderot. Écrivains et artistes ont conscience d’être un même monde, de poursuivre pareilles fins par des moyens divers ; et ces rapports tendent à rendre aux écrivains le sens de l’art, leur rappellent qu’ils sont créateurs de formes et producteurs de beauté. […] Le second Cénacle est celui de 1829, d’où ont disparu les demi-classiques, les précurseurs timides, où les artistes se mêlent aux poètes : chez Nodier se réunissent Hugo, Vigny, Sainte-Beuve, Dumas, les deux Devéria, L.
Et de l’effort que chaque artiste fait à rendre ce qui le frappe et le touche, provient son style individuel, la particularité de son vocabulaire et de sa syntaxe, qui révèle, le plus sûrement la qualité intime de son intelligence. Si l’on compare l’aspect particulier sous lequel M. de Goncourt voit les paysages, les intérieurs, les gens, les physionomies, les attitudes, les passions, la nature psychologique de ses personnages préférés, on extraira de cette collection, la notion d’un artiste épris de mouvement, notant la vie dans son évolution, les visages dans leurs transformations, les émotions dans leurs conflits, chaque âme dans sa diversité. […] Et maintenant cette analyse terminée, il faut imaginer que le mécanisme cérébral dont nous avons essayé d’isoler et de montrer les gros rouages, est vivant et en marche, possédé par une créature humaine, constitue en son engrènement et son travail une unité indivise, la pensée, la raison et le génie d’un artiste et d’une personne. […] Ajoutez encore à ces anomalies individuelles d’organisation cérébrale, les caractères généraux de toute âme d’artiste et d’écrivain, la vive sensibilité, le don plastique du mot expressif, le don dramatique de la coordination des incidents, l’infinie ténacité de la mémoire pour les perceptions de l’œil, toutes les multiples conditions qui permettent de réaliser cette chose en apparence si simple, un beau livre. Enfin le possesseur de cette curieuse intelligence, il faut le figurer jeté dès sa jeunesse, avec son frère et son semblable, dans les remous de la vie parisienne, promenant l’aigu de son observation, la délicate nervosité de son humeur, dans le monde des petits journaux, des cafés littéraires, des ateliers, dans les grands salons de l’empire, habitant aujourd’hui une maison constellée de kakémonos et rosée de sanguines, le cerveau nourri par une immense et diverse lecture : à la fois érudit, artiste et voyageur, au fait de l’esprit des boulevards, de celui de Heine et de celui de Rivarol, instruit des très hautes spéculations de la science, l’on aura ainsi la vision peut-être exacte, en ses parties et son tout, de cet artiste divers, fuyant exquis, spirituel, poignant, solide l’auteur des livres les plus excitants et les plus suggestifs de cette fin de siècle.
L’artiste a placé sur une table, un vase de vieille porcelaine de la Chine, deux biscuits, un bocal rempli d’olives, une corbeille de fruits, deux verres à moitié pleins de vin, une bigarade, avec un pâté. […] Il faut que vous sachiez encore que cet artiste a le sens droit, et parle à merveille de son art. […] On trompe sans peine un artiste impatient, et les animaux sont mauvais juges en peinture.
C’est qu’alors l’artiste sent le besoin d’employer des secousses plus violentes pour frapper des cerveaux engourdis. […] Faut-il alors prétendre qu’il n’a usé du catholicisme qu’en artiste et en rhéteur ? […] Edmond de Goncourt paraît avoir été moins un artiste et un poète qu’un analyste et un psychologue. […] Il n’est pas démontré d’abord que la beauté absolue, idéale, vers qui doit tendre l’artiste, ne soit pas impassible. […] Mais que l’artiste ait voulu modeler une Aphrodite, une Victoire Aptère ou une Polyxène, la question n’a en définitive qu’une importance de second ordre.
Le pauvre salue la Mort comme la consolatrice divine ; l’artiste espère par-delà le tombeau l’achèvement de la destinée et un incorruptible avenir ! […] Baudelaire est un artiste de volonté, de réflexion et de combinaison avant tout. […] L’artiste, vigilant et d’une persévérance inouïe dans la fixe contemplation de son idée, n’a pas été trop vaincu. […] Nos artistes mettent sur leur palette du Rubens, du Rembrandt, du Cuyp, du Van Ostade, etc., etc. […] Nous avons inventé un mode de publication qui s’adresse à tous indistinctement, à l’homme du monde comme à l’artiste, aux jeunes filles comme aux érudits.
Sa longue carrière qui, comme celle des plus glorieux artistes, a eu ses heures inégales et quelques jours nébuleux, a été, somme toute, admirablement remplie et comblée. […] Artiste militaire, ne le dédoublons pas, et sachons-lui gré, dans sa ligne, d’avoir été naïf et peuple. […] Les Grecs tant vantés n’étaient qu’une belle race qui offrait à ses artistes en tout genre de plus heureux modèles. […] Ce portrait qu’il revit à Versailles à une dernière visite, un peu avant sa mort, lui procura une vraie satisfaction d’artiste. […] Sans doute tous les artistes n’ont pas les mêmes habitudes ni les mêmes exigences de travail et de production ; l’atelier d’un Poussin, d’un de ces peintres méditatifs « qui ne sauraient peindre en sifflant », sera d’un tout autre aspect que celui d’un artiste gai, mobile, alerte, s’inspirant et profitant de tout ce qu’il voit et de ce qu’il provoque autour de lui ; et cependant l’étude, aussi, a des lois invariables, et, si prodigieuses que soient la mémoire, la facilité, la dextérité, la verve, rien ne saurait suppléer à l’observation et à un premier recueillement, si court qu’on le suppose.
Mais Caylus n’était pas un érudit seulement, c’était un artiste ; dans l’archéologie il cherchait des leçons pour nos peintres et nos sculpteurs. […] Il essaya de ramener nos artistes de l’idéal spirituel et galant à l’idéal sévère de la Renaissance et de l’antiquité. […] Cette révolution n’est pas sans conséquence pour la littérature : car les artistes et les littérateurs ne sont plus deux mondes fermés, inconnus l’un à l’autre. De plus, l’institution des Salons donnait aux artistes un puissant moyen d’action sur la société ; et désormais, dans la formation du goût général, entrera une certaine dose de tendances et de jugements esthétiques. […] Par ses Églogues gréco-latines, il se rattache au groupe des savants qui, derrière la littérature bruyante des salons et de l’Encyclopédie, retrouvaient l’antiquité, et la représentaient aux artistes.
Mais nos richesses nous rendent ingrats ; nous oublions les hommes laborieux qui se sont ensevelis dans la mine pour nous tirer de l’or, et nous ne louons que l’artiste qui l’emploie. […] Enfin ceux qui sentent tout le prix des talents, et qui ont le goût des arts, voient avec intérêt, à la suite des princes, des généraux et des ministres, les noms des artistes célèbres ; de Lully, de Mansart, de Le Brun ; de ce Claude Perrault, qu’on essaya de tourner en ridicule, et qui était un grand homme ; de la Quintinie, qui commença par plaider avec éloquence, et qui finit par instruire l’Europe sur le jardinage ; de Mignard, dont ses parents voulurent faire un médecin, et dont la nature fit un peintre ; du Poussin, qui, las des intrigues et des petites cabales de Paris, retourna à Rome vivre tranquille et pauvre ; de Le Sueur qui mérita que l’envie allât défigurer ses tableaux ; de Sarrazin, qui, comme Michel-Ange, fut à la fois sculpteur et peintre, et eut la gloire de créer les deux Marsis et Girardon ; de Varin, qui perfectionna en homme de génie l’art des médailles ; enfin du célèbre et immortel Callot, qui eut l’audace, quoique noble, de préférer l’art de graver, à l’oisiveté d’un gentilhomme, et qui imprima à tous ses ouvrages le caractère de l’imagination et du talent. Il n’est pas inutile de remarquer que lorsque ces éloges parurent, quelques hommes trouvèrent mauvais qu’on eût déshonoré des cardinaux et des princes, jusqu’à les mettre à côté de simples artistes. […] Ce sont des dessins ou l’artiste n’a employé que le trait pour dessiner sa figure, et en saisir le caractère et l’attitude.
Sans doute les artistes sont peut-être en partie responsables de cet état de choses. […] Peut-on admettre, dit-on, qu’un artiste s’exprime d’une manière qui soit indigne de lui ? […] Les plus purs n’échappent pas à l’obligation de dissimuler leur personnalité et justement l’artiste moins que tout autre. […] Sincère avec lui-même, l’artiste l’est profondément, intérieurement. […] Elles prouvent une compréhension plus forte du génie particulier à chaque artiste, à chaque nation, à chaque époque.
Les amateurs, dont il ne faut ni surfaire ni dépriser le jugement, les artistes, les seuls vrais juges, mettent la figure d’Allegrain sur la ligne même du Mercure de Pigalle. […] Comme on avait une assez mince opinion du savoir faire de l’artiste, on ne lui laissa pas le choix du bloc, et le ciseau d’où le chef-d’œuvre devait sortir fut employé sur un marbre taché. Le courage et le mérite de l’artiste en redoublent à mes yeux.
C’est aujourd’hui le plus vain et le plus plat de nos artistes. […] Ce n’est pas Aglaure, c’est l’artiste et toute sa composition que Mercure en colère a pétrifiés. […] Il ne faut plus compter Pierre parmi nos bons artistes.
Friedrich Schœn, de Worms ; il était destiné à fournir les moyens, à des artistes ou amateurs pauvres, de venir aux représentations de Bayreuth. […] À la Mélodie qui, sous la direction des musiciens purement artistes, avait perdu son Innocence première, Beethoven voulut rendre cette pure Innocence. […] Aussi cette émotion cruelle qui s’exprime dans ces œuvres doit-elle appartenir à l’idée même du monde que l’artiste perçoit et traduit dans elles. […] Aux noms des artistes que nous avons cités, ajoutons ceux des chanteurs, MM. […] La vision utopiste de l’artiste est à son comble.
Delécluze, connu des gens de lettres et des artistes ne l’est guère du public ; car, bien qu’il écrive depuis tant d’années, il n’est pas, je le répète, un de ces écrivains qu’il suffit de nommer ; il n’a jamais eu de ces rencontres brillantes de plume qui éclatent aux yeux de tous sous forme de talent. […] Il aspirait cependant à avoir un maître, et le nom de David étant alors le plus grand, le plus radieux entre ceux des artistes, celui du dictateur suprême, il ambitionnait d’entrer dans son École, de travailler dans son atelier. […] Delécluze le plus grand bien auprès des jeunes générations d’artistes ou de curieux d’art avec qui il avait été auparavant en guerre sur des points de doctrine. […] Leurs figures paraissaient émues, et d’un air timide, mais où perçait un sourire plein de joie, ces deux jeunes artistes remercièrent leur généreux camarade de manière à laisser entendre à tous les assistants qu’ils attachaient plus d’importance encore qu’eux à ce qui venait de se passer. […] Étienne, tu seras un critique. » On sent de quelle espèce de critique entendait parler le maître : artiste manqué, critique par pis aller.
La femme s’y trouve moins ménagée encore que l’artiste. […] Voici d’abord des réflexions fort sensées, à l’adresse des artistes, que fait sur ce triste sujet M. […] Albéric Second en a inventé une fort agréable à l’usage des abonnés de l’Artiste. […] Albéric Second débutait dans l’Artiste, où il vient remplacer un homme d’esprit et de savoir, M. […] N’oublions pas, un des artistes engagés par Bilboquet, le classique Polichinelle, si admirablement rendu par un jeune artiste du nom de Derudder, qu’on se demande si c’est là un homme ou un pantin.
Seguin, le Wotan de Bruxelles, car cet excellent artiste s’est montré digne d’un éloge sans restriction aucune. […] Oui, nous avons éprouvé un orgueil réel à voir nos artistes faire pareille figure en cette mémorable soirée, à les voir entrer ainsi de plain-pied dans l’art nouveau ! […] Lassalle s’est constitué le chevalier épistolaire… Sigurd est d’ailleurs trop connu et trop admiré de tous les artistes pour que j’aie l’air de le découvrir en 1887, aux environs de l’équinoxe. […] Or, il faut savoir ce qu’on entend généralement par un « artiste » : c’est un être créé uniquement pour produire et non pour penser ; quand il a le malheur de réfléchir avant d’agir, il lui arrive ce qui est arrivé, d’après M. […] Si l’on admet donc que Wagner est un penseur en même temps qu’un artiste, il faut, avant d’étudier une de ses œuvres, rechercher la genèse des idées qui l’ont amené à la produire.
D’où la possibilité de classer les artistes d’après leur mode de vision. […] L’artiste qu’est Mithouard se double d’un critique avisé. […] Ses études critiques ont nui à sa réputation d’artiste créateur. […] L’artiste n’est alors qu’une pure tendance délicieuse, un simple rêve vivant. […] Certains sont plus artistes que poètes, d’autres le contraire.
Les littérateurs et les versificateurs ont gâté les artistes et le métier des artistes, parleur persistance à soutenir le genre noble, à chanter le genre noble, et à s’écrier qu’il fallait poétiser, idéaliser, mots que les artistes ont traduit par : « donner de la tournure » ; c’est-à-dire ne jamais souffrir la nature, et ramener tout à un type archaïque, précieusement conservé dans les musées, et porté à sa perfection par Annibal Carrache. […] Sans la sincérité des artistes que devient l’art ? […] Ces excentriques ne réussiraient qu’auprès des artistes et des journalistes à qui ils font l’effet de ciselures et de travaux d’orfèvrerie. […] Il vaudrait peut-être mieux décidément laisser les artistes libres d’exposer où et quand il leur plairait et sans aucune intervention officielle. […] Le système d’exposition permanente et de ventes qu’il a l’intention de faire adopter, serait utile à beaucoup d’artistes.
Telle est la moralité, inattendue, involontaire peut-être, mais certaine, qui sortira de ce livre, cruel et osé, dont l’idée a saisi l’imagination d’un artiste ! […] Baudelaire est un artiste de volonté, de réflexion et de combinaison avant tout. « Fidèle, dit-il, à son douloureux programme, l’auteur des Fleurs du mal, a dû, en parfait comédien, façonner son esprit à tous les sophismes comme à toutes les corruptions. » Ceci est positif. […] On a beau être un artiste redoutable, au point de vue le plus arrêté, à la volonté la plus soutenue, et s’être juré d’être athée comme Shelley, forcené comme Leopardi, impersonnel comme Shakespeare, indifférent à tout, excepté à la beauté comme Gœthe, on va quelque temps ainsi, — misérable et superbe, — comédien à l’aise dans le masque réussi de ses traits grimés ; — mais il arrive que, tout à coup, au bas d’une de ses poésies le plus amèrement calmes ou le plus cruellement sauvages, on se retrouve chrétien dans une demi-teinte inattendue, dans un dernier mot qui détonne, — mais qui détonne pour nous délicieusement dans le cœur : Ah ! […] L’artiste, vigilant et d’une persévérance inouïe dans la fixe contemplation de son idée, n’a pas été trop vaincu. […] Les artistes qui voient les lignes sous le luxe et l’efflorescence de la couleur percevront très bien qu’il y a ici une architecture secrète, un plan calculé par le poète, méditatif et volontaire.
« Les grands artistes, les grands écrivains, ne sont jamais instantanément populaires », disait Goethe, qui ne l’était pas, et qui s’en vantait. […] L’auteur du Juif Errant et des Mystères de Paris commença par être antiphilanthrope, aristocratique à se faire lapider par les égalitaires ; artiste, oh ! artiste de prétention avec furie, légitimiste, moyen âge, « anticanaille » enfin, comme il le disait. […] Alors le Socialisme, qui avait des doctrinaires, mais qui n’avait pas d’artistes, le prit pour son lauréat, son écrivain et son romancier, et lui jeta au cou cette chaîne d’éloges qu’un homme comme lui a dû impatiemment porter. D’artiste devenu homme de parti, il attaqua l’Église, les gouvernements, les législations, toute la vieille société dont il ne gardait que les vices, et il publia successivement tous ces livres qui ont le plus mordu, vitriol terrible, sur les imaginations de ce temps.
Ce ne fut que dix ans plus tard que j’approchai enfin de ce grand artiste. […] On lui reproche d’avoir trop songé à charmer les yeux ; mais reprocher le charme à un artiste, n’est-ce pas reprocher à la femme la beauté ? […] Les figures symboliques des dieux revêtent une majesté calme qui semble avoir été inspirée aux artistes par le spectacle de la nature. […] Les grands artistes en tout genre ont seuls ce don de la vie, hélas ! […] que l’artiste infusait de sa propre individualité, de son propre sang, dans les formes, dans les veines des êtres qu’il créait, et que c’est encore une partie de sa vie qu’on voit palpiter dans ces formes vivantes, dans ces membres prêts à se mouvoir, sur ces lèvres prêtes à parler.
Tel était son plan ; jusqu’à quel point elle l’a exécuté, dans quelle mesure elle l’a fait sortir d’une demi-réalité, où sont plongés tous les personnages, pour lui confier parfois une réalité choquante, c’est là la part et c’est aussi l’œuvre de l’artiste, la responsabilité de l’artiste. […] Ainsi, ces deux grands artistes se maintenaient justes et tolérants l’un pour l’autre. […] C’est ainsi qu’un grand artiste imite et s’inspire. […] Teverino s’est révélé à Léonce avec sa distinction naturelle ; c’est le plus beau des mortels et le plus éloquent des artistes. […] Ni l’un ni l’autre ne furent des artistes de travail et de volonté ; ils furent des artistes de nature ; ils étaient nés grands écrivains, ils l’étaient dès la première page.
Il n’admettait pas que l’artiste se rendît malade avec son œuvre. […] L’artiste ne sait pas encore son métier. […] Cette confiance gagne l’artiste. […] Corneille est d’abord un artiste visionnaire. […] Il y a lieu, semble-t-il, de l’étendre aux grands artistes littéraires.
Cependant un artiste peut avoir une idée abstraite comme point de départ même et parvenir à l’exprimer ensuite harmonieusement par la musique ou la plastique. […] Mais il appartient au tact de l’artiste de dessiner sa pensée jusqu’à la rendre aisément perceptible en ses lignes générales sans la restreindre à une idée particulière. […] Tout artiste le réclame impérieusement. […] C’est que l’artiste conçut partiellement son œuvre avant d’en saisir à la fois la forme et l’idée générales, d’où toutes les formes auraient dû procéder aussi bien que les idées. […] D’habitude elle naît d’un manque d’imaginative et est le défaut commun des littérateurs moins artistes que poètes.
« Si le désir de la gloire est le premier mobile d’un artiste, c’est un noble désir, qui ne trouve place que dans une noble organisation. « Quelque mépris, quelque disgrâce qu’il puisse encourir, il n’en est pas moins vrai que l’artiste pauvre et ignoré vaut souvent mieux que les conquérants du monde, et qu’il y a de plus nobles cœurs sous les mansardes où l’on ne trouve que trois chaises, un lit, une table et une grisette, que dans les gémonies dorées et les abreuvoirs de l’ambition domestique. […] « Si enfin un artiste obéit au mobile qu’on peut appeler le besoin naturel du travail, peut-être mérite-t-il plus que jamais l’indulgence : il n’obéit alors ni à l’ambition ni à la misère, mais il obéit à son cœur ; on pourrait croire qu’il obéit à Dieu… « Bien que j’aie médit de la critique, je suis loin de lui contester ses droits, qu’elle a raison de maintenir, et qu’elle a même solidement établis. […] Il y avait alors, parmi les jeunes artistes, d’immenses et respectables familles, et des milliers de mains travaillaient sans relâche à suivre les mouvements de la main d’un seul homme.
J’y étudie les grands artistes en littérature. […] Il a été religieux par goût d’artiste. […] L’artiste. — Conception, composition. […] Ce défaut ordinaire des artistes était en lui à ! […] L’artiste. — Comment il conçoit.
Et de profonds soupirs s’exhalaient de nos poitrines d’artistes ! […] Les artistes lisaient les poètes et les poètes visitaient les artistes. […] Il est vrai que l’artiste avait donné d’assez atroces têtes aux bourreaux de Bailly. […] Ce sont là les vrais chagrins de l’artiste au grand cœur. […] Il n’en reste plus qu’un seul de ces fiers artistes, le plus grand peut-être, Frédérick.
Dubochet, et pour lesquelles l’éditeur s’était procuré le concours d’habiles artistes et particulièrement de l’excellent paysagiste genevois Calame, avaient nationalisé en France le nom de l’auteur. […] Topffer, sans rien changer à sa vie modeste, avait fini par percer, par obtenir son rang, et il jouissait avec douceur des suffrages de cette estime publique qui, même de loin, ne séparait pas en lui l’homme de l’artiste et de l’écrivain. […] L’exemple d’une telle destinée d’artiste est d’ailleurs trop rare, et, malgré la terminaison précoce, trop enviable, en effet, pour qu’on n’y insiste pas un peu. […] Ce merveilleux talent d’artiste ne se réservait en rien pour le public, et il continuait de se dépenser en nature autour de lui. […] Ses yeux, qui s’étaient opposés dès sa jeunesse à ce qu’il continuât, il n’avait plus à les ménager désormais, et il leur demandait comme une dernière sensation d’artiste ce jeu, cette harmonie des couleurs vers laquelle il se sentait irrésistiblement appelé ; il s’enivrait d’un dernier rayon.
S’il ne fallait, pour être artiste, que sentir vivement les beautés de la nature et de l’art, porter dans son sein un cœur tendre, avoir reçu une âme mobile au souffle le plus léger, être né celui que la vue ou la lecture d’une belle chose enivre, transporte, rend souverainement heureux, je m’écrierais en vous embrassant, en jetant mes bras autour du cou de Loutherbourg ou de Greuze : Mes amis, son pittor anch’io. […] Mais ceux qui parlent ainsi, ne sont pas artistes. […] Il faut à chaque coup de pinceau ou plutôt de brosse, ou de pouce, que l’artiste s’éloigne de sa toile pour juger de l’effet.
La prétention qu’affectent sur ce point quelques artistes purs est à bon droit suspecte. […] « Un artiste, dit Flaubert, qui serait vraiment artiste et pour lui seul, sans préoccupation de rien, cela serait beau15. » Et M. […] Le désintéressement absolu de l’artiste, de l’écrivain et du savant lui-même n’existe pas, puisqu’ils sont hommes. […] Mais tu es artiste et je ne veux rien te proposer d’illibéral. […] Mais une doctrine si plate fait bondir de colère le véritable artiste.
… C’est là, en effet, qu’il faut en venir, puisqu’il s’agit de Heredia, de ce grand coloriste en prose inconnu encore, même dans le coloriste en vers qu’on connaissait, et qui rayonne et se projette en ces deux morceaux historiques comme une promesse, faite à l’Histoire, d’un artiste pour plus tard de la plus singulière puissance de plasticité. […] Je ne crois pas qu’en fait de coloristes on pût remonter beaucoup plus haut qu’à l’historiographe Mathieu, un artiste énorme et oublié, dont Lemerre, qui a eu la hardiesse d’éditer un Agrippa d’Aubigné intégral, et qui publie la Chronique de Diaz del Castillo, devrait bien éditer le Louis XI, lequel, par le pittoresque, ferait pâlir le Louis XI de Michelet. […] Lui, c’est un artiste en histoire bien plus qu’un historien, et il faut être précis dans le maintien de cette distinction… Les historiens ont des jugements, et des passions, et des convictions, et des partis pris et des polémiques… Ils font incessamment acte de cerveau, à chaque minute de la durée ; mais le coloriste que voici ne fait, lui, qu’acte de pinceau. […] Il m’a fait admirer un artiste auquel je ne m’attendais pas. […] … Alors, au lieu d’un grand artiste, nous compterions un grand historien, et, toujours conquistador, il aurait planté son pennon dans l’Histoire, comme Pizarre sur la terre des Incas, et, pour finir par un mot de sa connaissance : Et le vent des hauteurs, qui souffle par rafales, Tordrait superbement ses franges triomphales !
Et cependant, elle est la plus importante de toutes ; c’est à elle que nous devons l’artiste que nous honorons. […] Evidemment, l’Allemagne et les artistes allemands. […] Artiste eut-il jamais pareil bonheur ? On sait quelle énorme influence Wagner attribuait au public ; c’est-à-dire au public que l’artiste a en vue lorsqu’il écrit. […] On ne saurait, en effet, assez répéter que Wagner a toujours été artiste, et que jamais il n’a été autre chose qu’artiste.
Vous diriez le chant d’un cygne plumé par une oie… le râle d’un grand artiste asphyxié par la fumée d’un pot-au-feu. […] La coquetterie agressive et presque impérieuse de la comtesse est déconcertée par la réserve du jeune artiste. […] Il s’agit de bien prouver à l’artiste que ce n’est pas un amant qui rentre, mais un importun qui se trompe. Alors la grande daine se redresse, et, devant l’artiste caché dans la chambre voisine, elle éconduit le malencontreux visiteur ; et de quel air ! […] A peine l’artiste a-t-il le temps de fuir par une porte secrète, que le mari apparaît, grave, sérieux, glacé, poli, comme toujours.
C’est elle que la Critique, qui est une alchimiste aussi, doit, comme l’alchimiste de Rembrandt, montrer d’abord dans son œuvre, à travers ce flacon rose et noir taillé et orné par sa main d’artiste ; plus précieuse qu’elle est à elle seule, l’originalité, que tous les détails charmants du flacon, puisqu’elle en est la vie et l’âme ! […] Parce qu’il fait petit, cet artiste spécial, à qui Pascal a très bien pu souffler tout bas que l’infini est dans l’atome aussi bien que dans un monde. […] L’auteur ne s’occupe que de ses peintures : c’est l’artiste qui ne voit que son art ; mais le penseur, qui voit plus loin, a-t-il jamais trouvé quelque chose de plus formidable contre l’instruction obligatoire, par exemple, — cette sottise de l’orgueil moderne, — que cette affreuse histoire des Ratés ? […] Mais Daudet, qui a l’entrain et la bravoure d’esprit d’un artiste, et d’un artiste qui se sent de la vie depuis la pointe des cheveux jusqu’au bout des ongles, n’a pas reculé devant la double difficulté d’une Étude de mœurs parisiennes après les Études de mœurs parisiennes de Balzac. […] Alphonse Daudet, dont l’esprit aurait toujours raison s’il n’avait pas d’amis littéraires, a très bien su voir qu’il y avait un magnifique roman qui dormait, enveloppé dans une grande question d’histoire agitée souvent par des penseurs, mais laissée là par des artistes… et il l’a traitée dramatiquement.
C’est l’âme des choses que l’artiste devra saisir, s’il veut en exprimer la réalité poétique. […] Si le ciel nous prête vie, nous espérons le retrouver dans quelques années aussi grand artiste que nous le quittons artiste délicat. […] Est-ce la race qui lui communique sa beauté, ou la doit-il au génie de l’artiste ? […] Cet idéal consiste dans le sentiment qui anime l’artiste, et ce sentiment, c’est la sympathie. […] Ainsi l’amour est l’âme même de l’art, et plus cet amour est fort, plus l’artiste est grand ; plus il est étendu, plus l’artiste est universel.
Cet artiste considère comme absolument méprisable et nul le jugement de la foule. […] Je pense que cela est évident pour les artistes ; si quelqu’un en doute encore, tant pis ! […] Voilà deux hommes que j’aime beaucoup et que je considère comme de vrais artistes, Tourgueneff et Zola. […] Chez les grands artistes, cette humeur est singulièrement intransigeante. […] Les artistes, du moins, ont l’orgueilleuse franchise de leur propre inutilité.
Ses premières années d’émancipation se passèrent à vaguer dans les ateliers des artistes et à baguenauder à tort et à travers ; il voyait aussi quelques-uns des poètes dits du Cénacle, et il en tirait la plupart de ses jugements littéraires futurs. […] Qui que vous soyez, grand génie, beau talent, artiste honorable ou aimable, tout éloge juste et mérité sera retourné contre vous. […] Cependant j’accepte tout pour être à même de m’arrêter comme bon me semblera sur la route, et même de m’en écarter pour visiter certaines localités intéressantes… » Horace Vernet participait au prestige et aux honneurs qui s’attachent volontiers en France à tout ce qui est militaire : on essaya de le lui faire payer comme artiste. […] Rien ne venge mieux du pédant que l’artiste, le véritable artiste. […] Paul Mantz pour son article, d’ailleurs si étudié, de l’Artiste 22 novembre 1857.
Quelle pléiade d’artistes et d’écrivains ! […] Voltaire sait de la littérature, mais Diderot est artiste, un artiste qui peint avec la plume. […] La génération présente le dédaigne avec excès en oubliant ses mérites d’artiste. […] Les romans de Zola sont des figues d’un autre panier ; et son auteur, en dépit de toutes les réserves, est un grand artiste, un très grand artiste, un artiste extraordinaire. […] Les plus illustres artistes sont classés.
Parce que l’artiste était étrangère ? […] Je n’ai pas encore eu le temps de le montrer aux grands artistes. […] L’artiste femme est tout aussi intéressante que l’artiste homme. […] Bastien-Lepage, un artiste que je vénère et dont j’aime le talent. […] Ceux qui ne sont pas artistes sont bien heureux.
Le journaliste est dans le vrai quand il dit que César Birotteau a été « composé, écrit et corrigé à quinze reprises par M. de Balzac en vingt jours, et déchiffré, débrouillé et réimprimé quinze fois dans le même délai. » Il est des artistes qui ne sont jamais contents de leur œuvre : d’eux on a dit qu’il fallait enlever de force la peinture du chevalet. […] Étonnez-vous de la gêne d’argent du grand artiste qui, pour obéir à sa conscience, jeta quelques cent mille francs dans la gueule des correcteurs d’imprimerie ! […] Quand il s’adresse au public, il prend des tons de général Bonaparte à la bataille des Pyramides ; en particulier, l’homme se montrait parfois aussi inquiet sur la durée de son œuvre qu’un grand artiste qui constate que les couleurs qu’il emploie détruiront sa toile et ne laisseront guère plus de traces du tableau que si un liquide corrosif y avait été jeté. […] Le critique, dans sa superbe, ne comprenait pas l’humilité d’un grand artiste.
On eût dit qu’un artiste habile en corruptions avait disposé sur sa nuque la torsade de ses cheveux ; ils s’enroulaient en masse lourde négligement et selon les hasards de l’adultère qui les dénouait tous les jours. […] Leur caractère commun est aisé à démêler, et rarement, du style à la composition, de la description à la psychologie, des « mots aux faits, un artiste a fait preuve d’une plus rigide conséquence. […] Par ces dernières œuvres, Flaubert restera l’artiste, de ces temps qui sut assembler les mille éléments épars de beauté matérielle et sensible, en de plus ravissants ensembles. […] L’incohérence faible de Flaubert, terme extrême de celle de tous les artistes qui « font le morceau » est l’antécédente de celle du rêve, qui précède celle du délire, et celle des maniaques. […] D’autres enfin, et ce sont les plus artistes des artistes, réussissent par des miracles d’adresse à exprimer une énorme portion de réalité, des idées absolument adventices et variées, en une langue toujours la même et qui joint une beauté propre au rendu de la vérité ; les de Goncourt et M.
. — création de l’artiste. — m. arsène houssaye. — la revue des deux mondes reste aux mains de m. buloz. — les bretons, de brizeux. — poésies de théophile gautier. — orgueil de la vie. […] La Revue de Paris, par suite d’un arrangement ultérieur, va se confondre avec un journal d’art et de littérature intitulé l’Artiste, qui aura désormais le droit d’ajouter à son titre celui de Revue de Paris. L'Artiste est dirigé par M.
Le plus grand n’a pas plus de trois pieds de haut sur deux de large ; mais l’artiste a bien fait voir dans sa Sainte Genevieve du dernier Salon, son Icare qui est à l’Académie et d’autres morceaux, qu’il pouvait tenter de grandes compositions et s’en tirer avec succès. […] Entre l’esclave et la femme assise l’artiste a placé une table sur laquelle on voit des fleurs dans un vase, quelques autres éparses sur le tapis, avec un collier de perles. […] L’artiste est comme Apelle ressuscité au milieu d’une troupe d’Athéniennes.
George Sand a été préservée dès tortures de la vie d’artiste par sa conception de l’art. […] Aucun homme n’a représenté à un degré supérieur les hautes vertus du grand artiste littéraire. […] Nécessaire à la sensibilité de l’artiste qui s’y consacre. […] Le germanisme intense de Richard Wagner ensorcelait plusieurs des artistes du groupe. […] Qu’est-ce qu’un artiste ?
Deux hommes, deux écrivains, deux admirables artistes, M. […] Il établissait ainsi la distance qu’il y a souvent entre un artiste et un immortel. […] Me permettra-t-on de faire une exception en faveur d’artistes précieux, qui, comme MM. […] Si ce doux et grand artiste avait été d’humeur à cela, M. […] Peut-être est-il le pur artiste, l’artiste essentiel.
Elles sont presque toutes marquées par la naissance ou par la prédilection d’un grand artiste, Chambéry par J. […] Ce n’est pas la philosophie qu’il faut chercher dans cette sainte famille d’artistes chantants, c’est la nature. […] La mère et la sœur Nanerl se séparent des deux artistes et rentrent seules et désolées à Salzbourg. […] Ces charmantes lettres sont le commentaire des notes les plus gaies ou les plus pathétiques du jeune artiste. […] Ce déchirement de famille empoisonne tous les succès des trois artistes séparés de ce qu’ils aiment.
C’est à lui qu’il pensait quand il écrivait : « L’artiste, l’écrivain, le philosophe doivent avoir toutes les facultés plus une : le génie. […] Les grands maîtres de la Renaissance, dont on ne peut assez proposer l’exemple, étaient des hommes d’abord, des artistes ensuite. […] Être artiste, c’est-à-dire faire de belles phrases sonores et creuses, tel était son rêve. […] En effet, il y a dans son genre de travail non point de l’artiste, mais du bureaucrate. […] Les hommes de la race de Nietzsche sont surtout des artistes.
Cela n’empêcha pas l’Association des Artistes musiciens de tenter, le 10 décembre 1853, un essai de musique wagnérienne par l’ouverture du Tannhaeuser. […] Charles Hanssens, compositeur et chef d’orchestre du théâtre de la Monnaie, la fait entendre soit aux concerts de l’Association des Artistes Musiciens, soit aux concerts du Vaux-Hall. […] XV : Mort et funérailles de Wagner ; continuation de son œuvre : ses revirements intéressés ; son attitude envers les compositeurs ; l’homme dans l’intimité, l’artiste en public. […] Jullien distingue en Wagner l’artiste et l’homme : l’artiste est présenté comme un musicien de génie. […] Jullien n’a pas cru devoir se contenter de juger l’homme, après l’artiste : il a porté des jugements sur quelques personnes tout en dehors de la vie publique qui eurent leur existence mêlée à celle de Wagner, et qui vivent encore.
Si le choix m’en avait été laissé, j’aurais choisi d’abord d’être un grand saint, puis une femme très belle, puis un grand conquérant ou un grand politique, enfin un écrivain ou un artiste de génie. […] Vous mettez, je suppose, au commencement du premier : « Paris est la capitale de l’art. » Puis, vers le milieu du second : « Paris est véritablement la ville des artistes » Puis, quelque part dans le troisième : « Le centre de l’art est à Paris. » Et à la fin du quatrième : « Je ne crois pas trop m’avancer en affirmant que Paris est le foyer des arts. » Et dans l’intervalle de ces phrases, rien, des mots. […] Rochefort (La Gloire à Paris) : 1° « L’action très grande de Rochefort est dans cette belle gaieté qui est le fond de son tempérament vraiment français » 2° « Rochefort est un des rares Parisiens de l’ancien temps qui ait conservé dans l’âge mûr cette belle insouciance et cette bonne humeur qui furent autrefois les qualités maîtresses de la race française. » (Je pense qu’il faut entendre : « Rochefort est un Parisien le l’ancien temps, un des rares Parisiens qui aient conservé », etc. ) 3° « Chacun dans sa sphère plisse le front… Je ne vois plus guère que Rochefort qui ait conservé la gaieté de la vieille race française » 4° « Après avoir exaspéré beaucoup de ses contemporains par la violence excessive de ses écrits, il les ramène aussitôt à lui par les éclats de sa gaieté si française. » Pour Offenbach, le refrain est : « Quel artiste ! […] Ainsi, dans Bouvard et Pécuchet, le médecin dit à Pecuchet en lui donnant une petite tape sur la joue : « Trop de nerfs…, trop artiste ! » Artiste !
Le mystère sans un peu de clarté, c’est le néant absolu, et la beauté sans la vie, c’est une forme inconsistante qui échappe à l’étreinte de l’artiste. […] Ils n’ont voulu être que des artistes, et ils furent tels. Ils n’ont pas songé que ce qui nous intéresse dans l’artiste, c’est l’homme, car c’est l’humanité qui est la commune mesure entre lui et nous. […] Tous les grands poètes de tous les temps, en même temps que des artistes, étaient des hommes, c’est-à-dire des pères, des fils, des amants, des citoyens, des philosophes ou des croyants. […] Il signifie bien que nous voulons réaliser une poésie humaine ; après la poésie trop strictement artiste du Parnasse ou trop obscurément abstraite du Symbolisme.
II Or, c’est la vérité que M. de La Madelène a voulu exprimer, la vérité locale, qui n’est jamais que locale en matière de paysan, la vérité des mœurs, des traditions et du langage d’une contrée entre toutes les autres, la vérité étroite, exacte, mais vivante cependant, car M. de La Madelène est un artiste qui a puissance de vie, et l’analyse chez lui double l’action sans l’étouffer. […] Impersonnel et désintéressé de tout, excepté de la perfection dont l’idée est à l’état d’étoile fixe dans son esprit, l’auteur du Marquis des Saffras est un artiste d’une sérénité infinie, que le temps n’a pas rendu spectateur comme le vieux Goethe, car il est jeune, mais qui est né contemplateur. […] Espérit y avait creusé des caves d’abord, puis des serres, puis des escaliers… Il avait creusé, creusé toujours, poussant devant lui son terrier à droite, à gauche, en haut, en bas, niche sur niche, jardinets sur jardinets. » Artiste de nature, ayant des dons, comme eût dit le Bas-de-Cuir de Cooper, Espérit avait élevé « au plus haut de ces constructions une sorte de tourelle en bois, à balustres crénelés, où grinçaient des girouettes et des horloges à vent. […] IV Et il n’y avait d’ailleurs qu’un artiste enfant à son aurore, et charmant comme tous les enfants et comme toutes les aurores, qui pût naïvement s’encharmer, — et à ce point, — d’une tragédie de Voltaire ; et un initiateur de vocation, qui pût s’atteler à ce projet de la faire jouer, cette tragédie, dans son village, malgré l’indifférence, les railleries, les routines, l’inintelligence, les obstinations des circonstances et des hommes, toujours plus bêtes qu’elles… Pour que la donnée du livre de M. de La Madelène fût admissible, il fallait Espérit ; il fallait cette perle de poésie éveillée, d’enthousiasme, de candeur, de finesse, de douceur infatigable ; il fallait ce lunatique irrésistible qui finit par les emporter dans sa nuée, les plus récalcitrants, les plus lourds à soulever, les plus attachés à la terre, et qui fait jouer un jour, et qui qu’en grogne, sa tragédie devant dix villages rassemblés ! […] M. de La Madelène, lui, est un artiste d’une sérénité presque inaltérable.
Il n’est pas mauvais de s’être essayé à la tragédie dans les conservatoires ou la peinture d’histoire dans les athénées, même si l’on doit fleurir comme « artiste de genre ». […] Étaient-ils des ouvriers, étaient-ils des artistes, les hommes à qui l’on doit les demeures sculptées des Athéniens ou des Flamands, les bahuts et les cheminées de la Renaissance, les carrosses, les dentelles et les tapisseries ? […] France (j’ai conservé les numéros du Temps) accusa successivement ces deux artistes d’être mal intelligibles. […] » Qu’un artiste pourvu d’outils variés, comme dit Coppée, produise des travaux subtils, voilà qui est dans l’ordre. […] L’un et l’autre signifient la lumière, qu’on parle de l’artiste ou de son visiteur.
Viollet soit un grand artiste et M. […] Cette fois, l’homme à système disparaît dans l’artiste, et le roman est bien un roman. […] Il y faut une grâce, une légèreté de main qu’ont seuls quelques artistes élus. […] De même, évidemment, pour l’artiste. […] Nous sommes tous égaux devant l’artiste moderne.
— l’artiste le plus délicat. […] Je n’admire jamais un artiste au détriment de ses égaux et je goûte souvent chez l’un le contraire de ce que je goûte chez l’autre. […] Or, l’artiste exerce une influence d’autant plus vaste qu’il consent davantage à s’abstraire, au profit d’idées générales. […] Mais pourquoi le feraient-ils, ceux qui, venus après tant d’expériences, savent que tout est vain, hors d’être humain en demeurant un artiste ? […] Artiste enlumineur d’anciens contes naïfs !
L’art, pour arriver à son plein développement, exige autour de l’artiste comme chez l’artiste même un culte de la beauté dont le peuple grec nous a donné l’exemple. […] La vérité est que la forme des gouvernements n’a pas d’influence directe sur le cerveau de l’artiste. […] Rien de tel n’étant à craindre aujourd’hui, l’artiste peut faire bon marché de tout le reste. […] Les romantiques demandaient autrefois à l’artiste d’avoir, comme disait Th. […] C’est le penseur qui fait le véritable artiste.
L’artiste a placé sur l’une des éminences un paysan avec un cheval. […] Autre petit morceau de la même école flamande ; mais je suis bien fâché contre ce mot de pastiche qui marque du mépris et qui peut décourager les artistes de l’imitation des meilleurs maîtres anciens. Quoi donc, s’il arrivait que l’on me présentât un morceau si bien fait de tout point dans la manière de Raphaël, de Rubens, du Titien, du Dominiquin, que moi et tout autre s’y trompât, l’artiste n’aurait-il pas exécuté une belle chose ? […] Il en est d’une bataille, d’un paysage, ainsi que du portrait d’une femme absente, plus vous donnerez de ses traits à l’artiste, plus vous le rendrez perplexe.
Je suis franc, le côté faible d’Horace en critique d’art s’y trahit : « Je ne connais pas, dit-il, l’histoire de ce grand artiste ; mais, à juger de sa vie privée par ses œuvres, il ne devait pas avoir les goûts fort élevés. […] La multitude au jugement de laquelle on en a appelé conserve plus longtemps que les coteries la reconnaissance qu’elle vous doit pour le soin que vous avez mis à lui plaire… » Horace était d’avis qu’un peintre doit exposer, que c’est un devoir surtout pour un artiste aimé et accepté du public. Depuis plusieurs années, des artistes de réputation (Ingres, Delaroche) n’exposaient plus : « Moi, Horace Vernet, je suis heureux d’avoir osé présenter ma poitrine en remplissant un devoir et en payant une dette de reconnaissance au public… Tant que ce même public voudra de moi, je serai sur la brèche. […] Cet artiste si ingénieux et si littéraire par l’esprit était de ceux, en effet, qui se tourmentent eux-mêmes et qui le laissent trop voir ; il s’inquiétait des autres comme de lui ; il se comparait et se tâtait sans cesse ; il avait ce qu’on peut appeler l’organisation douloureuse. […] Les qualités morales d’Horace Vernet pourraient gagner à être observées à ce demi-jour des dernières années et du déclin ; mais le public, en général, demande moins à l’artiste des vertus que des preuves de talent, et l’instant est venu d’ailleurs de nous séparer de lui.
Le papier est muet sous l’effort d’une passion vulgaire ; pour qu’il parle, il faut que l’artiste ait crié. […] Il attend le duc « d’un air allumé de crainte et d’espérance. » Son désir l’enflamme ; en véritable artiste, il s’échauffe à l’œuvre. […] Le génie de l’artiste consiste à découvrir vite, aisément et sans cesse, non ce qui est applicable, mais ce qui est vraisemblable. […] Au xviie siècle, les artistes écrivaient en hommes du monde ; Saint-Simon, homme du monde, écrivit en artiste. […] Cette impétueuse passion est la grande force des artistes ; du premier coup, ils ébranlent ; le cœur conquis, la raison et toutes les facultés sont esclaves.
Cette manie va si loin qu’elle a passé des écrivains et des artistes jusqu’au grand public. […] Empressons-nous de reconnaître que les plus artistes d’entre eux furent exempts de ces arrière-pensées d’apostolat. […] Notons d’abord que cette formule facilite en quelque sorte la tâche de l’artiste. […] La logique de l’artiste se ramène à une question de juste convenance et d’opportunité. […] Rappelons-nous que les grands classiques ont été avant tout de consciencieux artistes.
Comment l’artiste en a-t-il obscurci la transparence !… jusque-là, le cher abbé avait eu la patience de me laisser dire ; mais à ce mot d’artiste me tirant par la manche, est-ce que vous extravaguez ? […] Ce n’est point un port de mer que l’artiste a voulu peindre. l’artiste ! — Oui, mon ami, l’ artiste.
Fixer à des époques certaines la naissance, l’accroissement, la perfection, la décadence & le renouvellement de chaque art & de chaque science ; tracer avec netteté les principales actions & les traits les plus marqués du caractère de chaque auteur ou de chaque artiste, tel est le but de l’Histoire Littéraire. […] C’est plûtôt un recueil d’éloges historiques des gens de lettres, des savans & des artistes du dernier siécle, avec un catalogue de leurs ouvrages. […] Le Necrologe des hommes célébres qu’ils publient tous les ans, renferme les éloges historiques des gens de lettres & des artistes morts dans l’année.
L’artiste peut se vanter de posséder le secret de faire d’une couleur qui est d’elle-même si douce que la nature qui a réservé le bleu pour les cieux, en a tissu le manteau de la terre au printemps, d’en faire, dis-je, une couleur à aveugler si elle était dans nos campagnes aussi forte que dans son tableau. […] Nos artistes sont fatigués dans leurs ateliers d’une vermine présomptueuse qu’on appelle des amateurs, et cette vermine nuit beaucoup à leurs travaux. […] Ce n’est pas sans peine que l’artiste a rendu sa terrasse d’un vert aussi dur.
Il avait jusque dans le plus mauvais de son talent, laborieux et déréglé, comme dans son caractère, quelque chose de magnanime, et pourtant il ne sera point compté parmi les grands artistes ; car qui n’a pas de style doit périr. Mais les grands artistes ne l’oublieront pas, et c’est pour eux encore plus que pour la foule qui le lit qu’une réimpression de ses œuvres était nécessaire. Les grands artistes étudieront Soulié comme on étudie certains torses, certains raccourcis, certains écorchés, toutes ces choses qui ne sont en elles-mêmes que des fragments tourmentés de la vie et de la nature, mais qui servent à les exprimer !
Donato qui a été l’artiste, le seul artiste, le fascinateur adoré d’un public bien digne de lui. […] Voyant en lui la plus remarquable nature d’artiste, je l’invitais à ne pas se livrer à la prostitution. […] Un remous de boutiquiers me porta à la sortie des artistes où s’empilait la matière gouvernable. […] Quelques artistes commencent, il est vrai, à l’apercevoir un peu, Dieu sait avec quels sentiments ! […] Mais, séparés, ils n’auront pas toute la vie que ce profond artiste a voulu souffler en eux.
Elle est le résultat des réflexions d’un artiste sur la nature et les conditions de son art. […] Ce sont des hommes, et ce sont surtout des artistes. […] Quand il se propose de partir pour Paris : « Il y mènerait une vie d’artiste ! […] Mais l’artiste qu’était Flaubert a voulu écrire, de façon absolue, en Madame Bovary, le roman des êtres qui ne sont pas artistes, et Rodolphe n’échappe pas à ce caractère. […] Mais, comme tous les regards d’artiste relèvent en somme d’une même physiologie, celle de l’œil d’artiste, cela ne l’empêchera pas de créer, lui aussi, des types, et de faire naître des idées.
L’artiste qui la réalisera sera le dichter, le créateur parfait. […] J’arrivai par cette voie à la conception réfléchie de l’idéal qui s’était obscurément formé en moi, vague image à laquelle l’artiste aspirait. […] Ne pourrait-il avoir entre le peuple même et l’artiste sincère, entre le réalisme et l’idéalisme, une entente plus parfaite que par le passé ? […] Soulacroix n’a pas moins bien fixé le type de Beckmesser, qui comptera dans sa carrière d’artiste comme un succès vraiment sérieux. […] Il voit en Mallarmé, le poète wagnériste par excellence, l’artiste complet attendu en poésie.
Et tandis que ces récits pénétraient dans les bibliothèques de famille, plus d’un artiste s’éprenait de ce qu’ils ont de caricatural, de fantastique, d’outré, de trépidant, ressentait le curieux attrait de leur excentricité de facture, du dessin bizarre et contourné de leurs personnages, des surprenantes déformations que l’écrivain opère, des milieux, des gens, des mœurs qu’il entreprend passionnément de décrire ou de dénaturer. […] Taine, à la fin de son Histoire de la littérature anglaise, a excellemment défini en Dickens l’artiste, encore qu’avec trop de sévérité ; cette étude peut être complétée sur de nouveaux renseignements, et l’on trouvera que les notions psychologiques qui en seront déduites sur la nature même de cet homme essentiellement affectif présenteront quelque intérêt autant que la connaissance précise de son génie vigoureux et défectueux. […] Il ne faut chercher chez lui ni une psychologie profonde ni de vastes sujets ; il n’est ni un romancier de notre école réaliste ou idéaliste, ni même un romancier véritable, ni surtout ce que nous avons appris à considérer comme un artiste. […] Si l’on examine minutieusement les moyens qu’emploie Dickens pour faire apparaître et vivre la multitude d’êtres divers qui peuplent ses livres, on reconnaîtra que ses caractères et ses portraits sont tracés par le dehors, à gros traits et de premier aspect, comme par un artiste improvisateur qui note et peint sur un coup d’œil. […] D’autre part, pour que l’image soit une caricature, il faut qu’elle éveille par elle-même le sentiment de dérision ou d’aversion que l’artiste désire susciter, souvent à propos de gens qui ne sont ni ridicules, ni haïssables ; il faut donc que la représentation de ces gens qui doit être véridique, soit en même temps déformée, de telle sorte qu’elle force par elle-même à formuler le jugement que l’artiste entend suggérer.
L’artiste, chez lui, n’a guère de défaillance. […] Car l’artiste ne doit mépriser aucun des moyens d’expression usités jusqu’à lui ; il faut au contraire qu’il puisse les faire servir tous au glorieux mystère de la Beauté. […] Il est homme avant d’être artiste ; pour lui, vivre c’est agir, regarder est une joie puissante, puisqu’en l’action, puisqu’en les images se développe et se précise le moi. […] Mais l’étude des proportions révélées par les traditions, l’entente progressive des manières d’art et des règles admises par autrui peuvent développer ce goût et faire du poète un artiste. […] Vielé-Griffin qui est un bel et pur artiste peut se livrer à son goût ; il choisira sans doute des choses pures et belles.
Les moyens contraires sont le style expressif, la peinture poussée, la mélodie à contours précis ; dans ceux-ci l’artiste accomplit lui-même le travail que le suggestif laisse à ses admirateurs. […] A force de délicatesse et de nuances, on peut arriver à transcrire en son intégrité le tableau des mouvements d’âme que suscite tout artiste. […] Le genre d’émotion que ressent un classique à propos d’un roman de Zola, d’une toile de Delacroix ou d’une partition de Wagner n’a rien d’esthétique et vient d’un conflit latent entre sa personnalité et celle de l’artiste novateur. […] (NdE)] (Esthétique) admet ce fait et l’explique eu disant que l’admiration pour le génie de l’artiste fait passer par-dessus la répulsion causée par les objets représentés. […] Véron, et où l’élément émotionnel, sur lequel nous insistons, se trouve indiqué : « Toutes les fois qu’un artiste vivement frappé d’une émotion quelconque… exprime cette impression par un procédé quelconque… l’œuvre est belle dans la mesure de… la profondeur d’impression qu’elle exprime, et de la contagion qui lui est communiquée. » M.
Au-dessous de la gloire dont l’éclat frappe le visage de la sainte, dans des nuages rougeâtres, l’artiste a placé deux groupes d’anges et de chérubins entre lesquels il y en a qui semblent se disputer l’honneur de porter la houlette de la bergère de Nanterre, petite idée gaie qui va mal avec la tristesse du sujet. […] Elle n’inspire que la terreur, et c’est la faute de l’artiste, qui n’a pas su rendre les incidents pathétiques qu’il avait imaginés. […] Si cette figure vous appartenait, et qu’il n’y eût que ce mérite dans tout votre tableau, vous ne seriez pas un artiste commun. […] L’artiste s’y montre un homme et un homme qu’on n’attendait pas ; c’est sans contredit la meilleure de ses productions. […] J’ai vu l’artiste ; vous ne le croiriez pas, il joue la modestie à merveille ; il fait tout ce qu’il peut pour réprimer la bouffissure de l’orgueil qui le gagne ; il reçoit l’éloge avec plaisir, mais il a la force de le tempérer ; il regrette sincèrement le temps qu’il a perdu avec les grands et les femmes, ces deux pestes du talent ; il se propose d’étudier.
Alphonse Daudet avance dans son oeuvre, Paris, c’est-à-dire la modernité, l’attire davantage : d’abord le Paris tragique, touchant ou grotesque du siège ; puis le Paris de tous les jours et tous les étages de Paris, du haut en bas (Voyez Mœurs parisiennes et les Femmes d’artistes). […] l’artiste ! […] Parlez-moi des grands artistes outranciers qui manquent décidément de goût par quelque côté et qui abondent follement dans leur sens ! […] — Les Femmes d’artistes Robert Helmont. […] Femmes d’artistes.
Huysmans est seul à posséder, l’art de rendre véridiquement la conversation, d’écrire en style parlé les dires d’un concierge, ou les bavardages de deux artistes ; assurément le réalisme de M. […] Attentif aux conversations qu’il a entendu bruire autour de lui, renseigné par ses observations sur les termes techniques des métiers, il a retenu et su employer tout un vocabulaire populacier, populaire, bourgeois et artiste, amasser et déverser un trésor de mots d’argot et d’atelier qui lui permet de noter des sensations et des émotions dans la langue même des personnes qui la ressentent, lui fournit le mot exact ou pittoresque qui illumine toute une phrase du charme de la bonne trouvaille. […] Il tire de l’observation des comparaisons étonnamment justes : « Elle eut à la fin des larmes, qui coulèrent comme des pilules argentées, le long de sa bouche. » Comme pour tous les artistes, le commerce avec la réalité, avec ce que l’on peut saisir par les sens, revoir, tâter et montrer avec les spectacles familiers de l’humanité et du, monde, lui a été profitable. […] Il se mit à l’aise dans En Ménage et eut recours aux artistes. […] Dans les réactions et les mélanges de toutes ces énergies et ces capacités, dans leur ajustement et leur coordination, réside, il me semble, la physionomie intime d’un des jeunes artistes les plus originaux de notre temps.
Mais il ne cherchait pas le « style artiste ». Le style artiste, à cette époque, n’était pas inventé. […] Il a prétendu, lui aussi, à l’écriture artiste : espèce d’imitation, article de bazar. […] C’est d’un très grand artiste, original, inimitable. […] L’artiste semble vouloir suggérer : « Vous savez, ce n’est pas arrivé.
L’artiste n’est pas impeccable : aux impuissances naturelles de son talent, Musset ajouta les dédains de son dandysme. […] Il était trop artiste, trop objectif, pour ne pas enfermer au fond de lui-même un classique. […] Par la structure de ses chansons, Béranger est artiste, comme Scribe par la structure de ses pièces. […] Ce fut un esprit original et chercheur, un artiste insuffisant. […] Ils servent à accuser plus vigoureusement la qualité de l’objet, l’accident sur lequel l’artiste veut fixer notre regard.
R…, riche propriétaire aux colonies, venu à Paris pour y passer quelque temps, dînait aux Provençaux en compagnie d’artistes de tous les arts. […] En excuse à la longueur du temps, l’artiste alléguait plaisamment la longueur du nez de son modèle. […] le domino, lâchant le bras du cavalier. — Monsieur est artiste !!! […] Le placement de ces billets ne s’opère point, d’ailleurs, sans qu’il en résulte certains dérangements pour les artistes qui veulent bien s’en charger. […] Après lui avoir offert des bonbons, l’artiste s’informa du motif qui lui valait cette visite.
C’est une prétention d’user des mots en artiste, non pour penser et sentir, ni pour provoquer des pensées et des sentiments, mais pour produire les impressions les plus spéciales qui appartiennent aux autres arts, à la musique, à la peinture, à la sculpture, des impressions de son, de couleur et de forme. […] De la pensée, il n’en est pas question, et autant le peintre, le sculpteur, le musicien se piquent d’être des penseurs, autant l’artiste en fait de mots, le styliste s’offenserait qu’on lui prêtât le vulgaire dessein de faire servir les mots à traduire des pensées. […] Il y a là ce respect des grands mots, des mots hors de l’usage commun, qu’on retrouve chez tous les hommes médiocrement lettrés et médiocrement artistes.
Mais il est peut-être d’autres lecteurs qui n’ont pas trouvé inutile d’étudier la pensée d’esthétique et de philosophie cachée dans ce livre, qui ont bien voulu, en lisant Notre-Dame de Paris, se plaire à démêler sous le roman autre chose que le roman, et à suivre, qu’on nous passe ces expressions un peu ambitieuses, le système de l’historien et le but de l’artiste à travers la création telle quelle du poëte. […] Cependant il y a aujourd’hui dans la jeunesse artiste tant de vie, de puissance et pour ainsi dire de prédestination, que, dans nos écoles d’architecture en particulier, à l’heure qu’il est, les professeurs, qui sont détestables, font, non seulement à leur insu, mais même tout à fait malgré eux, des élèves qui sont excellents ; tout au rebours de ce potier dont parle Horace, lequel méditait des amphores et produisait des marmites. […] Nous ne pouvons résister au besoin de signaler, pour terminer cette note, quelques-uns de ces actes de vandalisme qui tous les jours sont projetés, débattus, commencés, continués et menés paisiblement à bien sous nos yeux, sous les yeux du public artiste de Paris, face à face avec la critique que tant d’audace déconcerte.
C’est de l’Histoire faite en artiste, un grand et rapide récit qui va de Byzas, le fondateur de Byzance, jusqu’à Mahmoud, le réformateur de l’Empire turc, enfin une espèce de biographie de Stamboul, majestueusement et colossalement individualisée sous le regard de l’historien, immense statue faite de pierres et d’hommes, comme les statues de Phidias étaient faites d’or et d’ivoire, qui a pour turban ses coupoles, et aux bras victorieux ou blessés de laquelle l’historien append, durant tout le cours de son histoire, les médaillons sanglants de ses maîtres et de ses vainqueurs ! […] Mais ces qualités éminentes de coloriste et de poète, qui sont le fond de l’être artiste de Méry, ne nous ont donné qu’une volupté sans surprise ; nous les connaissions. […] Méry a la vérité, en toutes choses, des artistes sincères.
Par un heureux hasard, qui groupe de temps en temps les hommes comme les chênes, deux grands et charmants artistes dans des arts divers étaient en ce moment en visite ou plutôt en villégiature avec nous, sous ce même toit, sous ces mêmes chênes qui avaient abrité ensemble autrefois le génie adolescent de Victor Hugo et l’esprit péripatéticien et discinctus de Charles Nodier. L’un de ces artistes était le jeune Allemand Liszt, ce Beethoven du piano, pour qui la plume du premier Beethoven était trop lente, et qui jetait à plein doigté ses symphonies irréfléchies et surnaturelles au vent, comme un ciel des nuits sereines d’été jette ses éclairs d’électricité sans les avoir recueillis dans la moindre nuée. […] Decaisne était las de mesurer l’infranchissable distance qui sépare la main de l’artiste de la réalisation de sa pensée ; il était dégoûté d’un monde qui a pour les artistes des engouements ou des aversions, et point de jugement juste et impartial. […] Si l’artiste ami regarde de là-haut ceux qui souffrent de leur génie, avec la compassion d’un homme qui a tant souffert du sien, qu’il jette un de ses regards sur cette demeure muette de Saint-Point, vide aujourd’hui de ceux qu’il aima tant, et qui ne cesseront de l’aimer eux-mêmes qu’en cessant de se souvenir. […] on lui reprochait, dans sa jeunesse, de n’avoir que des cordes de métal à son instrument lyrique : il a aimé, il a mûri, il a été amant, époux et père comme nous ; il n’arrachait que des applaudissements, il arrache maintenant des larmes ; l’émotion de son cœur, jusqu’alors trop impassible, a passé dans ses vers ; l’artiste s’est fait homme, et l’homme a grandi l’artiste.
Cette impassibilité qu’on ne saurait nier, on voudrait savoir si elle est bien l’état naturel de l’âme de l’artiste. […] Il mit dans ce poème ce qu’il avait de plus sincère en lui, la protestation obstinée contre le mal physique et moral, et aussi la sérénité de l’artiste paisiblement enivré de visions précises. […] Leconte de Lisle sera celle d’un artiste attaché surtout aux manifestations extérieures de l’histoire et de la nature. […] On comprend que le moyen âge féroce, misérable et éblouissant, ait arrêté un artiste impie et amoureux des bizarreries plastiques de l’histoire. […] Leconte de Lisle, le choix des sujets et la manière de l’artiste s’expliquant par un pessimisme originel.
Avec ce sans-gêne méprisant que les artistes qui ne sont pas de race ont pour leurs œuvres, M. […] Zola, avec tant d’adoration précise et de détails idolâtres, les charcutiers, qui sont, au bout du compte, des artistes en cochon ! […] Émile Zola croit qu’on peut être un grand artiste en fange, comme on est un grand artiste en marbre. […] Ici, l’artiste en fange a manqué son coup… par trop de fange ! […] Il a laissé celle de l’artiste.
Si le monde est une manifestation de beauté, il suppose un artiste, au-dessus de lui, au-dessous de lui, en lui, mais encore quelque part ; ou il suppose le monde lui-même artiste, artiste de lui-même. […] Un artiste doit être l’ennemi né de la morale et aussi bien, d’instinct, les artistes sont très souvent immoralistes. […] L’artiste est exceptionnel et dans un état particulier qu’on peut appeler maladie de surexcitation : « Ce sont des conditions exceptionnelles qui créent l’artiste, à savoir tous les états intimement liés aux phénomènes maladifs, de sorte qu’il ne semble pas possible d’être artiste sans être malade. […] Ceci est à l’honneur de l’artiste qu’il est incapable de critique. […] Pauvres artistes qui ont un pareil public !
Ô artiste parfait ! […] Artiste, certes, il l’était et parfait jusqu’au prodige ! […] Le génie d’un artiste peut tenir dans la main. […] Mais voilà, il n’est pas un artiste. Seuls, les artistes, les vrais artistes demeurent.
Mais l’artiste crée tout, sa méthode, sa matière et son œuvre, et l’auteur d’un système philosophique est comme l’artiste. […] Deux ou trois esthéticiens sont de grands artistes retournés ; mais la plupart, l’ignobile vulgus, sont d’infimes artistes retournés.
Mais, léger comme l’esprit même, si dangereux quand il est seul dans la tête d’un homme, nerveux comme une femme encore plus que comme un artiste, proie sans résistance du milieu embrasé dans lequel allait flamber et pétiller sa jeunesse, Camille était de tous les hommes à la fois le plus armé et le moins armé pour cette guerre civile de la presse, à laquelle il dévoua sa vie et pour laquelle il la perdit. […] Camille, en sa qualité d’artiste qui n’est qu’un artiste, était sensuel et vaniteux. […] — le monde et les mois de la Révolution française dans le monde d’Athènes et de Rome, ce que Chateaubriand fît aussi dans son Essai sur les Révolutions et ce qui devint chez Desmoulins un procédé presque monotone, tout cela suffit-il pour mériter réellement ce nom glorieux de grand artiste qu’on lui prodigue ?
. — Ce n’est pas là du reste le seul point sur lequel l’artiste et l’esthéticien devaient se rencontrer. […] John Ruskin prit la défense de l’artiste dans une lettre chaleureuse à laquelle l’agresseur ne sut ou n’osa rien répondre. […] Il me raconta que plusieurs artistes distingués avaient récemment travaillé dans le voisinage ; Clint était parti la semaine dernière. […] Leighland, l’ami intime et fidèle de l’artiste. […] Artiste réfléchi, il connaît ses facultés, il évite autant que possible de leur demander ce qu’elles ne peuvent rendre.
La Revue Wagnérienne, chaque mois, envoie un petit nombre d’exemplaires, mais elle les envoie partout où il y a des gens, artistes ou amateurs, faisant profession de wagnérisme ; et ses articles — n’est-ce pas la moindre récompense de beaucoup d’efforts ? […] Tout artiste les gêne, les bouscule, les soufflète, par le seul fait de son existence, et cela quel qu’il soit, jeune ou vieux, simple ou complexe, romantique ou réaliste, Barbey d’Aurevilly ou Zola, Manet, Roll ou Rodin, Hector Berlioz ou Richard Wagner. […] car, en faisant mourir l’artiste de faim, en le couvrant de boue, ils se proclament vaincus par lui, sans combat, et le sacrent de suite en pleine gloire. […] Une foi brûlante, sacrée, précise, inaltérable, est le signe premier qui marque le réel artiste : — car, en toute production d’Art digne d’un homme, la valeur artistique et la valeur vivante se confondent : c’est la dualité mêlée du corps et de l’âme. L’œuvre d’un individu sans foi ne sera jamais l’œuvre d’un Artiste, puisqu’elle manquera toujours de cette flamme vive qui enthousiasme, élève, grandit, réchauffe et fortifie ; cela sentira toujours le cadavre, que galvanise un métier frivole.
Artiste est devenu souvent synonyme d’écrivain. […] Il écrit : « Ce talent, si essentiel et si rare, quoiqu’il paraisse à la portée de tous les artistes, c’est le sentiment. […] Inventeurs et propagateurs de « l’écriture artiste », ils ont, eux aussi, commencé par des études de peinture ; ce sont des dessinateurs et des aquarellistes convertis et relaps. […] Les artistes lisaient les poètes et les poètes visitaient les artistes. […] Voir à ce sujet Maurice Spronck : Les artistes littéraires.
3 janvier Au bureau de L’Artiste. […] À cinq heures, rencontré à L’Artiste, Gautier, Feydeau, Flaubert. […] Sur cent personnes qui liront votre Venise, à peine deux se douteront de ce que vous avez voulu faire. » Ici, Edouard Houssaye et Aubryet sont enragés contre l’article… Et cela tient à une chose, c’est que le sens artiste manque à une infinité de gens, même à des gens d’esprit. […] Tenez, voilà X… qui entre, il ne verra pas si cette table est ronde ou carrée… Maintenant, si, avec ce sens artiste, vous travaillez dans une manière artiste, si à l’idée de la forme vous ajoutez la forme de l’idée, oh ! […] — mettent L’Artiste à mes pieds, Aubryet me salue comme un succès, m’adresse la parole comme à un grand homme, et moi-même, je me mets à lui parler comme du haut d’un piédestal.
» C’était enfin une œuvre de grand artiste où se révélaient des facultés, pour cette fois, nettement supérieures et incontestables. […] Seulement il aurait fallu que la pensée de l’homme d’État dominât la pensée de l’artiste, et c’est au contraire la pensée de l’artiste qui domine, dans Audin, celle de l’homme d’État. […] C’est un savant relevé d’un artiste, qui, pour la première fois peut-être, a fait entrer un agrément prodigieux dans les matières les plus hautes sans les abaisser jamais et sans nuire à leur solidité. […] De même que Roscoë, il a été séduit par ce qu’il y a de lettré, d’artiste et de grand seigneur dans le Médicis, mais, de plus que Roscoë, par la moralité élevée et pure du pontife. […] Quoique chaque détail historique soit très soigné chez Audin comme chez toute intelligence artiste, néanmoins, c’est principalement par l’ensemble et par l’ampleur de ses travaux qu’il sera classé dans la littérature contemporaine.
Renan n’est pas seulement un critique, c’est un artiste : on ne saurait assez soigneusement démêler en lui cette association délicate ou ce mélange. […] Il est sensitif comme un artiste. […] Ce que je dis de l’artiste en M. […] Le critique chez lui prépare les voies à l’artiste. […] Renan le critique se transforme, se termine visiblement, — s’émousse un peu, diront quelques-uns, — s’épanouit certainement et se couronne en artiste, diront, les autres ; et ils s’en applaudiront.
Le malheur est que le xviiie siècle n’a pas le sens artiste en littérature : c’est même pour cela qu’il arrive si peu à bien goûter les anciens. […] Ses vrais artistes et ses grands poètes, un Marivaux, un Buffon, un Rousseau, se créent une prose, et laissent le vers, dont ils ne savent l’emploi. […] À la fin du xviiie siècle, en vérité, on se trouve si loin du vrai Boileau et des grands artistes auxquels la haute partie de sa doctrine s’appliquait, que quand nous y rencontrons un classique, mais un pur classique au grand et beau sens du mot, selon l’esprit profond de l’Art poétique, un artiste capable de sentir la nature et de créer la beauté, nous sommes tentés d’en faire un révolutionnaire et le précurseur d’un art nouveau. […] Ce pur poète, qui lit Virgile, Homère et Théocrite avec un si exquis sentiment de la nature antique, et qui sait s’éprendre aussi de Malherbe, cet artiste curieux de la forme, qui fait rendre au vers classique dégradé par tant de spirituels rimeurs de si délicats ou puissants effets de rythme et d’harmonie, voilà justement l’écrivain qui entendait l’Art poétique comme l’avaient entendu Racine et La Fontaine, et qui réalisa en son temps les théories originales de Boileau. […] Enfin la liberté règne dans l’art : toutes les barrières, tous les freins sont ôtés ; nuls objets ne sont interdits, nuls moyens prescrits à l’artiste, pourvu que le résultat de sa libre activité soit une œuvre vraie et une œuvre d’art.
Ce n’est pas seulement à Vernet, c’est à eux-mêmes que ces artistes sont inférieurs ; l’un a fait les figures par-dessous jambe, et Le Bas, les ciels. […] Wille a le burin net et d’une sûreté propre à l’artiste.
La bonhomie simple est ici la ruse savante de l’artiste, qui, peu à peu, va gagner à la main. […] S’ils ne sont préoccupés que de vérité, ils ne sont plus des artistes. […] Visiblement, l’artiste s’est dit : « Ce groupe est si caractéristique, si complet ! […] Elle signifie qu’un artiste littéraire, s’il a choisi entre telle et telle méthode, tel et tel procédé de présentations, telle ou telle sorte de sujet à traiter, que cet artiste, dis-je, s’est déterminé d’après une décision réfléchie. […] Il était un mathématicien, et il était un artiste.
Des artistes d’un très réel mérite, des œuvres très intéressantes ne trouveront point leur place, — et je le regrette, — dans cette sorte de vue perspective qu’il m’a paru intéressant d’ébaucher sous la forme d’un résumé rapide et synthétique. […] Et sa palette d’artiste lui offre toujours, à point nommé, des couleurs entre toutes adéquates et reconnaissantes. […] Maurice Barrès, artiste de grande envergure, qui pourrait être réclamé tout à la fois par les romanciers d’histoire collective, les romanciers sociaux, les régionalistes et les tenants de la tradition ! […] Artiste délicat et sensitif, assuré d’une influence durable parce que la puissance de son art n’est point violente, — ni même toujours très apparente, — mais qu’elle tient à une observation profonde de l’âme humaine et des mouvements du cœur, M. […] Demandons plutôt son opinion à l’un des artistes les plus pénétrants de la nouvelle génération, parmi ceux que déjà la mort a fait disparaître.
Dès que l’artiste eut des admirateurs, il eut aussi des juges. […] L’artiste s’élève sur l’aile du génie jusqu’à la sphère supérieure où les objets réels apparaissent dans leurs types, plus complets et plus beaux. […] L’artiste se confie à la vertu de la beauté ; il la fortifie de toute la puissance, de tout le charme de l’idéal : c’est à elle de faire son œuvre ». […] Voyez-vous le sceptre du bon goût, la réputation des poètes, des romanciers, des historiens, des artistes, donnés comme un hochet à ce Geoffroy de vingt ans ! […] Si le monde est indifférent pour les arts, c’est à nous qu’est la faute, à nous artistes, à nous surtout critiques.
Alors l’homme élu. dans les entrailles duquel toutes les souffrances de l’humanité doivent retentir ; qui doit sentir en son sein s’amasser douloureusement un amour immense ; qui doit concevoir en sa tête féconde la forme nouvelle, plus large et plus heureuse, de l’association humaine ; cet homme vraiment divin, ce poëte, cet artiste, ce révélateur fils de Dieu, est déjà né ; que ce soit Moïse, Orphée, Jésus, Confucius ou Mahomet, il grandit, se développe miraculeusement, se perfectionne avant tous ses contemporains ; véritable fruit providentiel, il mûrit et se dore sous un soleil encore voilé pour d’autres, mais dont la chaleur lui arrive déjà, à lui, parce qu’il est au foyer de l’univers, et qu’il ne perd pas un seul des rayons de Dieu. […] L’inspiration réelle des grands artistes révélateurs ne consiste pas le moins du monde dans quelques phénomènes d’hallucinations auxquels leur nature fortement sentimentale est parfois sujette. […] Le grand artiste, le prêtre révélateur, qui a la solution sentimentale et sociale de l’époque future, celui-là fonde une religion, parce qu’il a cette solution même, et non, parce que la conception en est accompagnée de symptômes plus ou moins irréguliers ; celui-là est véritablement inspiré, parce qu’il est de son temps l’individu le plus sympathique pour aimer l’humanité, le plus intelligent pour la comprendre, le plus fort pour la transformer ; il pressent et proclame le premier la forme d’association la mieux adaptée, selon le temps, au bonheur du plus grand nombre ; il accouche le présent de l’avenir dont il est gros et si le présent, comme une mère que la douleur de l’enfantement égare, le repousse avec outrage et colère, l’avenir pieux s’incline et le bénit. […] En effet, tout progrès nouveau est une révélation de Dieu à l’homme, une ascension de l’homme à Dieu ; le savant qui invente y est soumis comme l’artiste le plus sentimental ; il y a, dans toute conception nouvelle du génie, une sorte d’influence électrique, irrésistible, indéfinissable, un acte de foi de nous à Dieu, une volonté de Dieu en nous. […] Il ne serait pas difficile de le surprendre en contradiction avec lui-même dans le cours de ses développements ; le sentiment profond et sympathique qui appartient à sa nature d’artiste donne le démenti à son rationalisme dès qu’il aborde la réalité.
Un autre Artiste, non moins étonnant que le premier, est Germain Pilon. […] On peut les opposer aux plus grands Artistes des autres Nations. […] Je vis les Artistes s’en emparer, & mes regards se fixerent d’abord sur les Peintres. […] Il adressa aux Artistes & aux Ecrivains de nos jours cette exhortation très-nécessaire. […] Il y parle moins à l’Artiste qu’à l’homme de génie.
— Il se compare encore à l’artiste grec qui composa sa Vénus de traits divers empruntés à diverses beautés ; et c’est ainsi qu’il a fait dans Werther, dit-il, tout en y laissant à sa Charlotte le caractère dominant du principal modèle. […] La vraie conclusion de Werther pour les artistes (car Werther est un artiste ou veut l’être), ce serait la conclusion qu’a choisie Goethe lui-même, s’occuper, produire, se guérir en s’appliquant ne fût-ce qu’à se peindre ; et si tous, dans cette tâche, n’atteignaient pas aussi haut qu’un Goethe le peut faire, ils y gagneraient du moins de sortir de leur mal, de le traverser, et de se rattacher bientôt derechef aux attraits puissants de la vie. […] Il est difficile à un artiste de résister à l’à-propos, et de renoncer à un grand succès. […] L’artiste sain, vigoureux, généreux, avait substitué à sa propre méthode de guérison dont il gardait le secret, une solution maladive et banale à l’usage du vulgaire. […] Mais de fait, et même chez un artiste de tout temps si réfléchi, si maître de soi dès sa jeunesse, les choses se passèrent plus au hasard et plus confusément.
Renan lui a ôté le talent de peindre, car un peintre d’histoire est, hors des lettres ou dans les lettres, un grand artiste, et un grand artiste ne peut être un sceptique, un trembleur qui tremble de la tête et qui tremble de la main. […] car comment un grand artiste pourrait-il être jamais inconscient d’une chose qui tient autant de place en lui que son art ? […] et un grand peintre, un grand artiste, un grand écrivain, peut dire et penser des choses insensées, cela s’est vu ! […] Ils connaissent l’insenséisme des choses intenses, mais celui des choses lâches qui supprime l’artiste, ils ne le connaissent pas. […] Renan veut expliquer Néron, et, pour cela, il appuie sur le côté de Néron qui devait le plus impressionner un homme de lettres comme lui, le côté du Trissotin énorme, du faux artiste effréné, de l’impérial cabotin, et il tombe — et nous avec lui — dans une immense caricature.
Un soir, j’ai prié Dieu, lui, le grand artiste, de me rendre capable de faire le travail qu’il veut que je fasse. […] En vérité, madame X. et madame Y. sont deux artistes de genre différent, et elles font véritablement école. […] Nos couleurs sont riches, vives ; les mélanges de tons ont fait sa réputation par leur hardiesse ; on ne recule devant aucun mélange extraordinaire, on heurte, on oppose : mais tout cela en artiste. […] Elle refusait l’argent pour demeurer artiste. […] L’héroïne, ce serait l’une des ouvrières les plus artistes de la mode parisienne, non l’une quelconque, mais celle-ci, qui avait les yeux couleur d’eau de mer, un air d’aristocrate, un sourire si facile et si vite retenu.
Quelques-uns des médaillons de dix vers qu’il a intitulés : Promenades et intérieurs, sont de petits chefs-d’œuvre, et telle est la puissance de la forme, que cela existe et palpite de vie et resplendit dans la lumière, bien que la matière qu’il a mise en œuvre se réduise au plus bas minimum possible ; mais l’artiste est vraiment le créateur qui tire des êtres du néant. […] Pareil à ces « petits maîtres » flamands et hollandais avec lesquels il a tant de ressemblances, il a rapproché l’art de la foule sans l’éloigner des artistes. […] Et quand l’artiste est, comme M. […] Gustave Larroumet Artiste toujours soucieux de perfection, et pourtant romancier et journaliste, en même temps que poète, M.
Il importe de distinguer entre les procédés intellectuels du psychologue et du critique et ceux de l’artiste. La vision de l’artiste est une lumière qui, projetée sur les réalités, les fait émerger de l’ombre. […] Flaubert fut, dans toute la force du terme, un artiste. […] L’Éducation sentimentale, a dit Flaubert, désignant sous ce titre, un groupe de phénomènes où sa vision d’artiste s’est exercée dans un champ volontairement restreint ; c’est, par un raccourci de cette formule, l’éducation qu’il faut dire, si l’on veut fixer le lieu, où d’une façon générale, l’homme est le plus en danger de prendre de lui-même, des ressources et de l’emploi de son énergie une fausse conception.
Le volume qui contient Atala, René et Le Dernier Abencerage, renferme à peu près tout le génie de Chateaubriand artiste : si l’on y joignait, entre René et le Dernier Abencerage, la confession d’Eudore, extraite des Martyrs et contenant l’épisode de Velléda, on aurait toute son œuvre d’art en abrégé, exquise. […] Dans la pensée de l’artiste, c’était moins un roman qu’un poème, un poème moitié descriptif, moitié dramatique, renchérissant sur les anciens, sur les modernes, sur le poème de Paul et Virginie, le dernier en date. […] Tel est l’effet magique de ces petits chefs-d’œuvre venus à leur moment : ils sont comme un miroir où chacun se reconnaît et apprend, pour ainsi dire, à se nommer ; on se fût cherché sans cela vaguement, bien longtemps encore, sans se bien comprendre ; mais voilà qu’on se regarde à l’improviste dans un autre, dans le grand artiste de la génération dont on est, et l’on s’écrie tout à coup : C’est moi, c’est bien moi !
Je vais jusqu’à penser que, même comme artiste, l’impassible est impuissant et reste inférieur. […] Et c’est vraiment pitié de voir que, sous prétexte de le maintenir pur de tout alliage, on ait voulu lui retirer ce qui fait sa véritable grandeur. » 12 ⁂ Jusqu’à présent nous avons constaté dans la marche vers le vrai des professionnels d’une part, des artistes de l’autre, un grand parallélisme. […] L’artiste au contraire qui estime chacun des faits constatés non point en fonction d’un diagnostic inutile13, mais pour sa beauté plastique, sa force expressive et l’intensité d’émotion qu’il peut en retirer, sera moins accueillant.
Or, Rimbaud avait avisé sur le coin d’une commode une pile de livraisons de l’Artiste. […] Francis Poictevin est un artiste sincère et ému. […] Tout artiste qui ne plaide ni ne prêche l’allocution morale, l’exemple, le conseil pratique, est un féal de l’art pour l’art. […] Il y a des artistes évidemment qui les tirent de livres déjà publiés ; mais ceux-ci appartiendraient à une autre catégorie que les grands artistes, ce seraient des manières d’érudits, des vulgarisateurs doués pour l’exposition verbalement rafraîchie de choses connues, nature d’esprits en somme peu nécessaire ; mais les vrais artistes, les trouveurs, se développent surtout grâce à leur sensibilité au contact des choses. […] Mais pour rendre bien sensible la différence de l’artiste pur à l’artiste sociologue, supposons-les tous les deux devant le même sujet, pratique, quotidien, politique.
On dirait de ses sonnets, des bouquets de pierreries dont les pieds tremperaient dans des vasques d’ivoire ciselées jusqu’à l’outrance par un artiste du Japon. Je voudrais citer quelques-unes des pièces de cet artiste étrange : Paysage lorrain, Automne, Vieux coin, Novembre, la Grosse Femme ; faute de place, je me borne à transcrire ce très rajeunissant et très bizarre triolet qui ferme le livre : Salamalec de gai sonneur Onc ne sera sonnet d’alarme !
Le futur dira comme l’Église saura glorifier sa propre vitalité ou témoignera de sa mort, en laissant le poète très pur, qui ne peut être effacé déjà dans le très pieux lévite, authentiquer sa foi par l’art inoublié, ou en éteignant l’art et l’artiste. […] Alphonse Germain Ses dons merveilleux d’artiste, il ne lui suffit point de les concrétiser en harmonies, il veut les faire servir à la gloire du Créateur des Harmonies, il médite des poèmes qui soient des doxologies.
Son Livre est à la portée des Artistes, des Amateurs, de ceux même qui ne seroient ni l’un ni l’autre ; c’est l’Ouvrage tout à la fois le plus agréable & le plus instructif que nous ayons en ce genre. Jean-François Felibien, son fils, Historiographe des Bâtimens du Roi, Membre de l’Académie des Inscriptions, mort en 1733, est Auteur d’un Recueil historique de la Vie & des Ouvrages des plus célebres Architectes, qui est estimé des Artistes.
Zola, c’est beaucoup moins l’artiste que le descripteur sans vergogne. […] Nos artistes n’y ont point manqué. […] i’ sont artistes, ces Grecs et ces Romains ! […] Il est artiste, et son style est pourtant le moins plastique qui se puisse voir. […] Oui, cet artiste a une merveilleuse puissance d’entassement dans le même sens.
Et alors l’artiste intervient avec ses images simplifiantes. […] Le marin était né en lui, et l’artiste. […] Rêveur encore, enclin aux extases d’artiste ; il le restera toujours. […] Il est artiste, il est poète. […] Spronck dans ses Artistes littéraires.
Ce tableau n’y était pas non plus ; et je répéterai, tant mieux pour l’artiste et pour nous. Voilà un assez bon artiste perdu sans ressource.
Il reste un artiste probe. […] Barrès a moins de scrupules d’artiste qu’autrefois. […] C’est un grand écrivain artiste. […] De tout temps les moralistes ont dit aux artistes : « À quoi servez-vous ? […] Votre enfant n’est pas un artiste par cela seul qu’il fait frémir.
Mais, de plus, Boileau et Racine, et La Fontaine, et Molière étaient des artistes : ce que n’étaient ni les Chapelain, ni les Scudéry, ni les Desmarets, ni les Cotin, ni tous les prétentieux rédacteurs d’emphatiques épopées, ni tous les ingénieux rimeurs de petits vers, ni tous les pédants qui estimaient que l’usage des règles, par une vertu secrète, suffit sans la matière et sans le génie à la perfection des œuvres, ni enfin tous les inspirés qui écrivaient en courant, sans réflexion et sans retouches, au hasard de leur fantaisie. […] Ils prennent les lois et les règles comme des conditions données à leur activité, comme une sorte de cahier des charges imposé à l’artiste qui entreprend de faire une œuvre, tout au plus comme une méthode qui permet d’obtenir économiquement et sûrement la plus grande somme de perfection. […] Car les poètes anciens sont bien en effet avant tout des naturalistes inconscients, qui, dans leurs plus libres créations, ne s’emportent jamais hors de la nature, et ce sont non moins essentiellement des artistes scrupuleux dont l’art n’est jamais vulgaire ni la facture lâchée. […] Sur ce xviie siècle essentiellement précieux et galant, très noble et très raffiné, très ingénieux et plus sensible à l’extraordinaire qu’au simple beau, capable de donner Scarron et Quinault, Voiture et Benserade, et tout au plus peut-être la moitié de Corneille, sur ce xviie siècle qui laissé à lui-même eût produit sans intervalle et sans arrêt Fontenelle après Balzac, l’étude de l’antiquité, retardant l’éclosion de l’art mièvre tout prêt à succéder à l’art pompeux, fit fleurir des poètes capables de la perfection qui n’étonne pas, de cette perfection qui, semblant d’abord de plain-pied avec nos esprits, se révèle plus haute et inaccessible à mesure qu’elle nous devient plus familière, et nous donne des jouissances infinies que nous n’arrivons pas à épuiser : des artistes enfin tels que Racine et La Fontaine. […] Mais en ne regardant que la technique, il ne s’apercevait pas que ni l’évolution d’un art ne coïncide toujours avec le progrès de la technique, ni le génie d’un artiste et la valeur d’une œuvre ne sont constamment proportionnés à la perfection des moyens mécaniques et de procédés matériels que l’artiste emploie à réaliser sa pensée.
Mais on y sent surtout le philosophe moral, le poète moral, qui semble n’être artiste que pour relever et purifier le cœur de l’homme, qui est toujours occupé du problème de la destinée de l’homme, et amoureux de son perfectionnement. […] Hugo veut caractériser la variété qu’il aime à trouver dans les productions d’un artiste, et qu’il désirerait voir dans ses propres ouvrages. […] Rousseau veut peindre cette espèce d’obsession de l’artiste à l’approche du génie, ces longs travaux qui précèdent la création, ces fureurs, ces transports pour arriver aux traits de vive flamme : M. […] Toutes les parties de l’objet spirituel que l’artiste contemple maintenant se produisent, non pas abstraites, mais sous la forme même des parties similaires de l’image, comme autant d’emblèmes harmonieux qui se répondent entre eux et au tout. […] Que fait le poète, en effet, que fait tout artiste, et que font en général tous les hommes, sinon substituer continuellement le sensible aux conceptions pures, ou en d’autres termes saisir des rapports et leur substituer des rapports identiques pris dans un autre ordre d’idées, de même que le géomètre substitue à volonté des nombres aux surfaces, des surfaces aux nombres ?
Telle est la moralité, inattendue, involontaire peut-être, mais certaine, qui sortira de ce livre, cruel et osé, dont l’idée a saisi l’imagination d’un artiste. […] Dans ce livre, où tout est en vers, jusqu’à la préface, on trouve une note en prose qui ne peut laisser aucun doute, non seulement sur la manière de procéder de l’auteur des Fleurs du mal, mais encore sur la notion qu’il s’est faite de l’Art et de la Poésie ; car Baudelaire est un artiste de volonté, de réflexion et de combinaison avant tout. « Fidèle — dit-il — à son douloureux programme, l’auteur des Fleurs du mal a dû, en parfait comédien, façonner son esprit à tous les sophismes comme à toutes les corruptions. » Ceci est positif. […] L’artiste, vigilant et d’une persévérance inouïe dans la fixe contemplation de son idée, n’a pas été trop vaincu. […] Les artistes, qui voient les lignes sous le luxe ou l’efflorescence de la couleur, percevront très bien qu’il y a ici une architecture secrète, un plan calculé par le poète, méditatif et volontaire. […] C’est une organisation d’artiste réfléchie qui sait plonger également dans la rêverie et la réalité à je ne sais combien de brasses, et nous en rapporter parfois des choses effrayantes ou charmantes, inconnues à la lumière des livres communs… Seulement, il n’a besoin de se mettre derrière personne : ni derrière Quincey, ni même derrière Poe.
André Lefèvre, avec cette pensée philosophique qu’il met en avant (la croyance à la vie des choses), est un artiste, un savant artiste de forme.
En un mot, si André Chénier eût vécu, je me figure qu’il aurait pu être le grand poëte régnant depuis 95 jusqu’en 1803 ; réaliser admirablement ce que son frère, et Le Brun, et David dans son genre, tentèrent avec des natures d’artiste moins complètes et avec une sorte de sécheresse et de roideur ; exprimer poétiquement, et sous des formes vives de beauté, ce sentiment républicain à la fois antique et jeune, qui respire dans quelques écrits de Mme de Staël à cette époque, et surtout dans sa Littérature considérée par rapport à la Société. […] Cette influence n’atteignit pas non plus Béranger, dont les moules merveilleux étaient déjà fondus et les refrains de toutes parts voltigeants ; mais, s’il ne profita pas des perfectionnements de l’artiste, nul mieux que lui n’était fait pour entendre ce mélange d’étude et de passion, d’élaboration ingénieuse et d’enthousiasme147. […] On voit que l’influence posthume du poëte eut lieu sur les artistes plutôt que sur le public.
Je sais seulement qu’aucun homme n’est plus inconnu que lui, et je sais aussi qu’il a fait un chef-d’œuvre, non pas un chef-d’œuvre étiqueté chef-d’œuvre à l’avance, comme en publient tous les jours nos jeunes maîtres, chantés sur tous les tons de la glapissante lyre — ou plutôt de la glapissante flûte contemporaine ; mais un admirable et pur et éternel chef-d’œuvre, un chef-d’œuvre qui suffit à immortaliser un nom et à faire bénir ce nom par tous les affamés du beau et du grand ; un chef-d’œuvre comme les artistes honnêtes et tourmentés, parfois, aux heures d’enthousiasme, ont rêvé d’en écrire un et comme ils n’en ont écrit aucun jusqu’ici. […] Son évolution l’y entraîne ; et cet homme, qui a commencé par être un parfait artiste de légendes, finira par renoncer aux drames et aux œuvres imaginatives pour se consacrer exclusivement aux sciences morales. Ce qu’il en a esquissé présage un métaphysicien peut-être inattendu de l’Europe intellectuelle, un surprenant continuateur de la philosophie imagée et artiste de Carlyle.
Le Zélislas du Blessé de Novare est, malgré son rang et ses habitudes, un personnage assez vulgaire, et dont un artiste qui pense ne pouvait tirer parti qu’en forçant son genre d’individualité. […] Il a tout ce qui fait de l’existence un honneur, la seule félicité sur laquelle les âmes fières puissent compter ici-bas, quand Dieu leur est bon… Riche d’ailleurs, instruit, éloquent, beau, chevaleresque, artiste même (artiste !
Ce magnanime prophète consent à être un artiste parfait. […] Elle a ridé le front de tous les artistes dignes de ce nom. […] Il ne restait qu’à dégager l’artiste de l’improvisateur. […] L’artiste, c’est l’imitateur qui invente, le copiste qui crée ! […] On n’est pas un vrai artiste pour quelques bonnes strophes.
Le Vinci et l’Angelico ne sont-ils pas de plus purs artistes que Gérard Dow ou Véronèse ? Pourtant Gérard Dow et Véronèse sont encore des artistes. […] L’artiste se cantonne à tort dans les extrêmes : idéalisme ou positivisme. […] Les pages blanches de l’œuvre à créer seront les hosties des artistes nouveaux. […] La difficulté même excite le génie de l’artiste.
Il y a partout une grande mollesse de chair ; et par-ci par-là des vérités de détail qui font croire que cet artiste ne s’épargne pas y les modèles. […] Nous avons beaucoup d’artistes ; peu de bons ; pas un excellent ; ils choisissent de beaux sujets ; mais la force leur manque ; ils n’ont ni esprit, ni élévation, ni chaleur, ni imagination.
Que peuvent peser auprès de cette raison un scrupule d’érudition ou un respect d’artiste ? […] Pour tous les esprits qui ne sont pas artistes, en dehors de la précision scientifique, la beauté du style ne peut consister qu’à exercer l’intelligence par la désignation indirecte de l’objet, ou la désignation simultanée de plusieurs objets. […] Les artistes, tels que La Bruyère, regretteront de vieux mots savoureux. […] Comme après tout il est impossible de vider les mots de toute qualité sensible, comme ils restent sons, et recèlent toujours quelque possibilité d’image, de grands poètes, de grands artistes sauront organiser ce langage intellectuel selon la loi de la beauté, ils en exprimeront des formes esthétiques ; mais il en est d’autres, et non les moins grands, qui refuseront de souscrire aux arrêts de l’Académie, et qui, pour épancher leur riche imagination, iront rechercher les éléments d’un plus copieux et substantiel langage.
S’il a parfois, comme les rivages qui ont des anses et les forêts qui ont des clairières, de petits coins de descriptions bornées qui ravissent les contemplateurs au microscope comme Sainte-Beuve, il n’en est pas moins vrai qu’il est particulièrement le poète du mystérieux et de l’immense ; quand, au contraire, André Chénier, le graveur sur onyx avec un poinçon d’or, le faiseur de camées en deux vers et qui en incruste ses plus longues pièces, cet artiste puissamment fin, qui fait tenir tout un combat de Lapithes et de Centaures ou tout un univers émergeant des ondes sur une facette de saphir, est le poète de la ligne ramassée et du contour, cette borne de l’âme à laquelle, pour l’en consoler, Dieu, et l’Art qui répète Dieu, ont donné cette forme divine du contour ! […] Il y a certainement de très grands artistes qui ont été ou qui sont populaires, mais ce sont les grands artistes par la force, que tout le monde comprend toujours. Ce ne sont pas les grands artistes par la délicatesse et par la beauté pure de l’idéal, bien plus difficile à comprendre… Assurément cet idéal, que Guérin souffrait tant de ne pouvoir saisir comme il le voyait, pour l’emprisonner dans la forme vive et diaphane d’une langue digne de le contenir, cet idéal rayonne, comme un ciel lointain, à travers les paysages qu’il nous a peints ; mais il n’y rayonne que pour ceux qui savent l’y voir ; tandis que pour le plus grand nombre, que la réalité visible attire, ce qui constituera le grand mérite de ces paysages, c’est leur vie, c’est la vérité d’impression de ces aperçus, transposés de la vision plastique dans la vision littéraire… et qui nous effacent presque du coup les paysagistes les plus vantés : Bernardin de Saint-Pierre, Chateaubriand, madame Sand, dont la seule qualité qui n’ait pas bougé dans des œuvres déjà passées est d’être une paysagiste !
Aussi fut-ce alors pour Barbier une entrée d’artiste consommé dans la gloire. […] Eh bien, Auguste Barbier est un grand artiste d’élan qui ne sait pas son métier, et qui ne le sait pas à une époque où le métier est devenu plus obligatoire que jamais pour l’artiste, puisqu’il est la seule chose dans l’artiste que le temps puisse perfectionner !
Ceux qui admiraient son art et sa force sentaient pourtant quelques-uns de ses défauts, cette description trop continue, cette tension perpétuelle qui faisait que chaque objet venait saillir au premier plan et tirer le regard ; on aurait voulu aussi que, sans renoncer à aucune hardiesse, à aucun droit de l’artiste sincère, il purgeât son œuvre prochaine de tout soupçon d’érotisme et de combinaison trop maligne en ce genre : l’artiste a bien des droits, y compris celui même des nudités ; mais il est besoin qu’un certain sérieux, la passion, la franchise de l’intention et la force du vrai l’absolvent et l’autorisent. […] Flaubert une telle œuvre : le siècle a, depuis des années, besoin d’un grand artiste nouveau, il le réclame ; de désespoir il se montre parfois tout prêt à l’inventer. […] On se le demandait, et bientôt on sut qu’en artiste ironique et fier, qui prétend ne pas dépendre du public ni de son propre succès, résistant à tout conseil et à toute insinuation, opiniâtre et inflexible, il laissait de côté pour un temps le roman moderne où il avait, une première fois, presque excellé, et qu’il se transportait ailleurs avec ses goûts, ses prédilections, ses ambitions secrètes ; voyageur en Orient, il voulait revoir quelques-unes des contrées qu’il avait traversées et les étudier de nouveau pour les mieux peindre ; antiquaire, il s’éprenait d’une civilisation perdue, anéantie, et ne visait à rien moins qu’à la ressusciter, à la recréer tout entière. […] Respectons la volonté de l’artiste, son caprice, et après avoir exhalé notre léger murmure, laissons-nous docilement conduire où il lui plaît de nous mener.
Artiste, cette nouvelle forme en crédit autour d’elle avait de quoi la tenter ; femme, cette confidence, à demi parlée, à demi murmurée, devait lui sourire. […] La forme atteste une main habile et presque virile d’artiste ; le fond exprime une âme de femme délicate et ardente, mais qui a beaucoup pensé, et qui ne prend guère l’harmonie des vers comme un jeu. […] Mademoiselle Bertin, artiste et femme, est faite pour le sentir. […] Chateaubriand donc régnant au fond et apparaissant dans un demi-lointain majestueux comme notre moderne buste d’Homère, on a : 1° Hors ligne (et je ne prétends constater ici qu’une situation), Lamartine, Hugo, Béranger, — par le talent, la puissance, le renom et le bonheur ; 2° Un groupe assez nombreux, artiste et sensible, dont il serait aisé de dire bien des noms, même plusieurs de femmes ; de vrais artistes passionnés, plus ou moins originaux, mais qui n’ont pas complétement réussi, qui n’ont pas été au bout de leurs promesses, et qu’aussi la gloire publique n’a pas consacrés.
C’est un artiste en plaisirs, qui excelle à s’en fabriquer de toutes sortes et de toutes qualités, avec tous ses sens et tout son esprit. […] Hardiment naturaliste, il estimait qu’il n’y a pas d’interprétation artistique de la nature qui n’y manifeste de l’agrément et de la grâce ; mais, comme c’était le plus loyal et le moins truqueur des artistes, il ne rendait ainsi que parce qu’il sentait d’abord : sa forme d’esprit était un délicat épicurisme, de plaisir qui y étaient enveloppées. […] De l’Italie, et de l’antiquité, même de l’antiquité grecque qu’il eut le rare talent de percevoir à travers les insuffisantes traductions, il a tiré son goût délicat, et ce sens de la forme, ce besoin d’une perfection difficile, qui ont réglé l’emploi de ses facultés poétiques : c’est par là qu’il est devenu un artiste, et qu’il a travaillé sa matière en œuvre d’art. […] Par là il manifeste son entière communion de goût avec les grands artistes classiques, chez qui nous avons trouvé la même conception originale de la véritable invention. […] Mais le bonhomme avait son idée : il ne se voyait pas savant, mais poète et artiste, et derrière chaque vérité conçue par son esprit il sentait se lever toutes les émotions de son cœur, toutes les images de ses sensations.