Comme ils le font tous, quand il le faut, ces admirables possesseurs d’eux-mêmes et de la lumière, il y tait ses contemplations intérieures, et la critique est d’autant plus à l’aise vis-à-vis de lui qu’il n’a voulu faire qu’un livre de voyage et d’histoire, et qu’il a traité le public français comme il avait traité le public chinois, quand il ne craignit pas de revêtir la magnificence orientale et quand ces humbles pieds, dont il est dit dans nos livres saints : « Qu’ils sont blancs et beaux, les pieds des envoyés du Seigneur ! […] En plusieurs circonstances de son voyage, il rappelle presque la belle scène des coups de cravache chez le pacha, dans l’Itinéraire de Chateaubriand. […] on ne peut pas dire que jamais, dans aucun temps, la Chine ait été absolument jolie, mais si l’expression proverbiale a raison en parlant de belles laideurs, il doit y avoir de jolies laideurs aussi. […] « Les beaux chemins ne vont pas loin.
Moins encore que Pascal, qui songeait peu à faire de la littérature lorsque dans ses Pensées il essayait de se faire de la foi, sainte Térèse, dont la littérature espagnole a le très juste orgueil, n’était pas littéraire, et c’est pourquoi peut-être ce qu’elle nous a laissé est si beau ! […] Sainte Térèse est toujours pour l’imagination ou l’ignorance françaises le fameux portrait de Gérard : la belle Sainte à genoux, avec sa blancheur de rose macérée, son œil espagnol qui garde, sous la neige du calme bandeau, un peu trop de cette mélancolie qui ne vient pas de Dieu, car il n’en vient nulle mélancolie, et ces mains de fille noble qui, jointes très correctement sur le sein, disent aussi un peu trop à la bure sur laquelle elles tranchent qu’elles étaient faites pour la pourpre. […] Sa Vie, comme elle nous l’a laissée, cette longue poésie écrite tout en élans, est un des plus beaux livres assurément de la littérature espagnole, mais elle est aussi le plus beau traité de psychologie appliquée qu’il y ait dans quelque littérature que ce soit.
Il a beau raffiner et, comme ils le prétendent, spiritualiser la matière, c’est un matérialiste au premier chef. […] II On s’étonnera peut-être de ce titre de Poésies complètes, sous lequel l’éditeur Poulet-Malassis a publié le beau volume de Théodore de Banville. […] Nous indiquerons le grand morceau : Le triomphe de Bacchus à son retour des Indes, pris, sauf erreur, au vieux Baïf : Le chant de l’Orgie avec des cris au loin proclame Le beau Lyœus, le Dieu paré comme une femme, Qui, le thyrse en main, passe rêveur et triomphant, A demi couché sur le dos nu d’un éléphant, etc., etc, et, avec plus d’éloges encore, la pièce appelée Désespérance, où l’assonance la plus inattendue a presque sur l’esprit puissance de pensée, et dissout les nerfs dans la plus noble des mélancolies : Tombez dans mon cœur, souvenirs confus, Du haut des branches touffues ! […] Les amis et les admirateurs de Banville (car il y en a), les puritains passionnés du style pour le style, les haïsseurs de la cheville, les sacrificateurs à la rime sévère, tous les hommes qui aiment la langue comme un beau vase, dût-on ne mettre rien dedans, trouveront ici leur théorie de la forme et du travail volontaire un peu compromise.
Le livre est là… Ces lettres de tant d’âme ont été envoyées à l’impression comme de la copie littéraire, et le cœur a beau me saigner de faire de la critique sur un pareil livre, de disséquer une vivante d’hier, — si ce n’est même pas une vivante d’aujourd’hui, — je suis bien obligé de vous en parler. […] Victimes, toutes deux, de cette loi ironique et terrible qu’il n’y a que la perfection rêvée qui puisse inspirer de l’amour aux âmes capables d’amour, et que « hors l’Être existant par lui-même, il n’y a de beau que ce qui n’est pas ! […] Je me suis dit que l’amour n’était pas le couteau mutilateur d’Origène, et que la magie du plus beau sentiment qui puisse diviniser l’existence ne supprimait pas d’un seul coup, de sa baguette enchantée, la femme qui vivait intellectuellement avant l’amour. […] Mais le caprice de cet être troublé et ambulatoire ne dura que le temps de bouleverser et de blesser la femme qui lui avait tout donné, et qui ne pouvait plus lui offrir qu’un martyre accepté par elle avec des furies de résignation entremêlées des furies du souvenir et du regret qui la rendent sublime dans quelques lettres, — selon moi les plus belles du recueil, — et d’autant plus sublime qu’il ne faut pas oublier, pour mieux comprendre sa sublimité, que Réa Delcroix est une femme de ce malheureux xixe siècle, où l’on n’a plus que le Dieu qu’on se fait dans sa tête, quand on en a un !
Il est remarquable, en effet, que dans les deux pays qui ont connu avant nous la gloire des lettres, l’Espagne et l’Italie, la fondation des académies soit postérieure à la belle époque de leurs littératures. […] Au reste, Richelieu eût-il eu tout seul l’honneur de la pensée et de la fondation, le fait d’une institution publique de langage antérieure aux plus beaux monuments de la littérature n’en serait pas moins un fait caractéristique, particulier à notre pays. […] Les mêmes qualités, un charme particulier de douceur et d’onction, font aimer les écrits de Nicole, cette autre plume de Port-Royal, et, comme l’appelle Bayle, une des plus belles plumes de l’Europe. […] « Devinez ce que je fais, écrit Mme de Sévigné à sa fille : je recommence ce traité, et je voudrais bien en faire un bouillon et l’avaler », Le jugement de Voltaire n’est qu’un bel éloge de cet écrit ; la phrase de madame de Sévigné nous en donne comme la saveur. […] Il n’est pas d’ouvrages où l’on ait mieux traité, ni plus à fond, de ce qui fait le plus beau privilège de l’homme parmi tous les êtres créés, la parole et la pensée.
Parsifal pénètre sous de beaux ombrages et voit des hommes graves en manteaux blancs qui se promènent. […] Soudain un beau cygne passe à grand vol sur un étang. […] La voilà réveillée tout à fait. « Il est beau l’enfant, le voici qui vient » dit Klingsor, et la femme a disparu. […] Ce sont les belles qui ont vu leurs chevaliers blessés et renversés par un farouche envahisseur. […] Voyant que le beau naïf ne leur fait ni mal ni injure, elles rient de leur peur et passent de la gaieté à la coquetterie.
Cette belle phrase est depuis des siècles dans la bouche de tous les maîtres qui enseignent leur art et dans l’oreille de tous les enfants ; je ne vous la répéterai pas, toute belle qu’elle soit, parce qu’elle ne laisserait qu’une vaine rotondité de période et une vaine cadence de mots dans votre mémoire. […] Ces professeurs aimés me cultivèrent avec une tendre sollicitude, comme un enfant qui promettait au moins un amour instinctif pour les lettres : ils étaient idolâtres du beau dans le style. […] Dès qu’il y était assis, son livre ouvert dans la main, je m’occupais agréablement au pied des créneaux à choisir, parmi les pierres roulées, les plus belles pétrifications marines, ou à tresser des paniers pour mes sœurs, avec ces joncs qui croissent à sec sur les pelouses arides. […] Bientôt je voyais se dessiner en sombre sur le ciel bleu la redingote noire d’un beau jeune homme qui, sous l’habit d’un ecclésiastique, avait la taille, la stature et la contenance mâle d’un militaire. […] J’aurais voulu que la vie publique mêlât le talent littéraire à tout ; rien ne me paraissait réellement beau, dans les champs de bataille, dans les vicissitudes des empires, dans les congrès des cours, dans les discussions des tribunes, que ce qui méritait d’être ou magnifiquement dit, ou magnifiquement raconté par le génie des littérateurs.
Un beau rôle est celui de Tullie, femme de Brutus, qu’elle a quitté pour Tarquin Sextus, femme adultère et galante, insultée par son amant, son don Juan, son Ramon de Ramière, et morigénée alors en termes touchants et sévères par son mari. — Ce rôle a été senti, applaudi, avec une intelligence morale que l’auditoire semblait retrouver après tant d’excès et de fatuités dramatiques dont on l’a rassasié jusqu’au dégoût. […] Le hasard du génie y pourvoira… Un bel âge littéraire complet, ou du moins une vraie gloire de poëte du premier ordre, serait un bonheur et un coup de fortune pour tous ceux de valeur qui l’auraient précédé.
Il a voulu seulement sur ce fond constant, éternel, et qui pourra servir bien souvent encore, tracer quelques caractères intéressants et jeter quelques beaux discours d’une brillante facture et d’une langue riche… Je serais donc content des « beaux discours », n’était qu’il y en a de trop et qu’ils sont trop longs.
Beau côté de l’Histoire moderne. […] Les Anglais ont l’esprit public, et nous l’honneur national ; nos belles qualités sont plutôt des dons de la faveur divine que les fruits d’une éducation politique : comme les demi-dieux, nous tenons moins de la terre que du ciel.
Pareillement son tableau de la plaine de Sparte est un des plus beaux de l’Itinéraire. […] Les tableaux d’Italie et surtout ceux du Northumberland sont peints dans une assez belle manière. […] Fréquenter Fontanes, dans la belle édition qu’en a donnée, avec une introduction plus belle encore, Sainte-Beuve, est aujourd’hui amusant au sens où les œnophiles parlent d’un vin amusant. […] Sa doctrine célèbre du langage don direct de Dieu est d’une belle audace rectiligne. […] Ce romantisme en belle humeur finit dans la Ballade à la Lune.
Là-dessus, je ne sais comment la conversation saute aux infirmes, et il soutient qu’il y aurait un beau livre à faire avec l’infirme, qui est presque toujours un vicieux, un chauffe-la-couche. […] C’est fini des belles grosses roses bourgeoises, bien portantes, à la façon de la Baronne Prévost. […] le beau mépris que j’ai pour elle. […] La femme, de beaux yeux et un air aimable, l’homme, une tête à la détermination froide, et s’exprimant avec une netteté de la pensée et une correction de paroles, remarquables. […] la belle allée pour un duel à l’épée. » Et comme on causait ces jours-ci d’un mariage pour lui, n’a-t-il pas dit, à un moment, en souriant : « Oui, très bien, très bien, c’est parfait ce que vous me dites de la jeune fille… mais croyez-vous qu’elle s’émotionnera à l’entrée chez moi, le matin, de deux messieurs ?
Une belle envolée lyrique fait ainsi de la raison un abri médiocre, une masure à toit de chaume qui permet de se garder de l’aventure d’être. […] Et le plus beau de toute cette aventure, c’est que les idolâtres de l’apparence à tout prix mènent sabbat, chantent pouille, s’agitent, parlent de sauver l’esprit, alors que, sous couvert de raison, ils ne négligent rien pour aider à sa décomposition. […] Une épingle piquait au beau milieu pour les dégonfler les creuses bedaines, et la transparence de leur ennui permettait de voir, intestins monstrueux, leurs chapelets de nauséabonds motifs. […] Mais France, Angleterre, Russie… ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom.
» et, quelque effort que nous fassions pour en échapper, il nous fatigue, mais il nous y rengage de plus belle. […] C’est encore ce que Bourdaloue, dans le beau sermon que nous citions plus haut, a éloquemment développé. […] Dans ce beau poème du Bonheur, et en dépit de trop nombreuses défaillances, M. […] C’est peu de posséder la plus belle voix du monde, et il faut encore savoir s’en servir, la diriger, la ménager. […] Ils avaient donc beau la mépriser, ils faisaient de la rhétorique !
Sa première femme, Marguerite de France, y est pourtraite à sa belle heure ; mais elle est tellement masquée par sa toilette et engoncée dans sa fraise, qu’on a besoin de savoir tout son charme pour être sûr que cette figure pouparde n’en manquait pas. […] Elle était blanche et blonde ; elle avait les cheveux blonds et d’or fin, relevés en masse ou mi-crêpés par les bords, le front beau, l’entrœil (comme on disait alors) large et noble, le nez droit et régulier, la bouche petite, souriante et pourprine, la physionomie engageante et tendre, un charme répandu sur les contours. […] Et se faisant gausseur à son tour, il propose pour dernier moyen de faire publier par tout le royaume « que tous les pères, mères ou tuteurs qui auraient de belles filles de haute taille, de dix-sept à vingt-cinq ans, eussent à les amener à Paris, afin que sur icelles le roi élût pour femme celle qui plus lui agréerait ». […] Bref, le roi insistant toujours sur ces trois conditions dont il veut être sûr à l’avance, que la femme en question soit belle, qu’elle soit d’humeur douce et complaisante, et qu’elle lui fasse des fils, Sully, de son côté, tenant bon et se retranchant à dire qu’il n’en connaît pas avec certitude de telles, et qu’il faudrait en avoir fait l’essai au préalable pour savoir ces choses, Henri finit par livrer son mot, le mot du cœur : « Et que direz-vous si je vous en nomme une ? […] C’est sans doute ce que voulait dire Sully lorsque, quittant Paris pour passer à Rosny la Semaine sainte de 1599, il disait à sa femme que la corde était bien tendue, et que le jeu serait beau si elle ne rompait, mais que le succès, selon lui, ne serait pas tel que se l’imaginaient certaines personnes.
Fénelon l’avertit toutefois de prendre garde et de ne pas trop se livrer à sa pente : il croit utile que le bon duc ait quelquefois entretien avec un autre que soi, avec quelqu’un de simple, de pieux, de sincère : « Cette personne, lui dit-il, vous consolerait, vous nourrirait, vous développerait à vos propres yeux et vous dirait vos vérités. » On a beau se persuader qu’on se dit à soi-même ses vérités, on n’y atteint jamais complètement ni par le coin le plus sensible : « Une vérité qu’on nous dit nous fait plus de peine que cent que nous nous dirions à nous-même : on est moins humilié du fond des vérités que flatté de savoir se les dire. » En attendant que le duc de Chevreuse ait trouvé de près ce quelqu’un pour lui rendre ce service, Fénelon le lui rend de loin tant qu’il peut, en lui parlant sans réticence, sans ménagement ; il lui expose d’une manière sensible son grand défaut, ce beau défaut tout curieux, tout intellectuel ; il le lui étend avec ses replis et le lui fait toucher au doigt : Plus une vie est profonde, délicate, subtile et spécieuse, plus on a de peine à l’éteindre. Elle échappe par sa subtilité ; elle se fait épargner par ses beaux prétextes ; elle est d’autant plus dangereuse qu’elle le paraît moins. […] Dans une lettre du 15 février précédent, Fénelon était encore mécontent et très en méfiance : Ne vous contentez pas, écrivait-il au duc de Chevreuse, des belles maximes en spéculation et des bons propos de P. […] On a beau lui en dire du bien, il ne sera content que « lorsqu’il le saura libre, ferme et en possession de parler (même au roi) avec une force douce et respectueuse… S’il ne sent pas le besoin de devenir ferme et nerveux, il ne fera aucun véritable progrès ; il est temps d’être homme ».
J’ai beau chercher dans ma mémoire, je ne trouve rien à comparer, même de loin, au spectacle que nous offre la Chambre des députés… Jamais on n’avait vu une dégradation si burlesque, ni une corruption si bête. » (28 mars 1825.) […] Le cauchemar domine ; l’Enfer tient plus de place que le Paradis. — « La société voyage dans les cercles de Dante. — Je vois comme une voûte de fer s’abaisser sur les peuples. — La société est idiote quand elle n’est pas frénétique, — cette pauvre société idiote qui s’en va à la Morgue en passant par la Salpêtrière. » C’est lui qui dit ces choses, et on peut imaginer quelle perspective lui composent ces belles images. […] A tout moment, de belles paroles, des paroles élevées, pénétrantes, en même temps que suaves, lui échappent, et l’on s’étonne que l’on puisse avoir tant de talent, tant de ressorts dans l’âme (car il n’est pas si monotone qu’on l’a dit) avec si peu de bon sens pratique. […] Chaque flot a sa voix dans cette vaste mer : le souverain de l’Océan se tait seul dans sa grotte. » Prêt à sortir de Rome en 1832, il s’écriait : « J’espère que mon séjour à Rome ne se prolongera pasdésormais longtemps, et l’un des plus beaux jours de ma viesera celui où je sortirai de ce grand tombeau, où l’on netrouve plus que des vers et des ossements. […] Il avait beau les prévenir, ces amis tendres, et leur dire comme à l’oreille : « Peut-être, avant peu, entendrez-vous parler de quelque chose qui fera crier… Il va paraître un petit livre qui vous déplaira fortement.
« Comme il y a un beau sens enveloppé sous des tours fins, une seconde lecture en fait mieux sentir toute la délicatesse. […] Il se mettait parfois à danser subitement et à chanter, bien qu’il n’eût pas une belle voix. […] On sait les beaux portraits du Riche et du Pauvre, auxquels il n’y a qu’à admirer : c’est mieux encore que du Théophraste. […] On cite une madame d’Aligre de Boislandry, dont il a fait un portrait charmant, d’un tour inattendu : « Il disait que l’esprit dans cette belle personne… » C’est un diamant pur que ce petit fragment, comme il l’intitule. […] Destailleur, l’histoire d’une belle et superbe indifférente, d’une insensible qui cesse de l’être, qui devient passionnée par jalousie, puis folle de cœur, puis tout à fait furieuse et qui s’emporte aux derniers dérèglements, nous montre que La Bruyère eût été, s’il eût voulu, un excellent auteur de nouvelles ou de romans.
Le mot Dieu est toujours pour lui le signe représentatif de toutes les belles et suprêmes idées que l’humanité conçoit, pour lesquelles elle s’exalte et qu’elle adore ; mais il semble que ce soit quelque chose de plus encore à ses yeux qu’une expression ; il semble prêter décidément à l’intelligence, à la justice indéfectible et sans bornes, une existence indéfinissable, inconnue, mais réelle. […] Dans son beau livre sur Averroès, sur ce philosophe arabe dont le nom signifiait et représentait, bien qu’à tort, le matérialisme au Moyen-Age, il a parlé excellemment de Pétrarque, de ce prince des poëtes et des lettrés de son temps, qu’il proclame le premier des hommes modernes en ce qu’il a ressaisi et inauguré le premier le sentiment de l’antique culture, et « retrouvé le secret de cette façon noble, généreuse, libérale, de comprendre la vie, qui avait disparu du monde depuis le triomphe des barbares. » Il nous explique l’aversion que Pétrarque se sentait pour l’incrédulité matérielle des Averroïstes, comme qui dirait des d’Holbach et des Lamettrie de son temps : « Pour moi, écrivait Pétrarque cité par M. […] Il lui est échappé un jour de dire à M. de Sacy, au risque de scandaliser ce fidèle et religieux admirateur des belles œuvres d’autrefois, que s’il lui était permis par faveur singulière de choisir entre les notes que Tite-Live avait eues à sa disposition, et l’histoire elle-même de Tite-Live, il donnerait toute cette magnifique composition et cette prose des Décades pour les simples notes. […] L’article est très-spirituel, le sujet était beau, mais, si beau qu’il fût, la méthode de M.
C’est ainsi qu’au temps où se composait la Nouvelle Héloïse, lui parlant du prochain mariage d’une jeune fille, il la montrait dans sa pudeur, se désolant à l’approche d’un époux : « C’est, disait-il, une eau pure qui commence à se troubler au premier souffle du vent. » Et il ajoutait, comme pour le piquer au jeu : « Dites de belles choses là-dessus. » Rousseau, en effet, répondant à l’appel, s’emparait de cette pensée et de cette image virginale, et l’employait dans la Nouvelle Héloïse à l’occasion du mariage de Claire (deuxième partie, lettre XV) : « Et, en vérité, elle est si belle, disait-il, que j’aurais cru la gâter en y changeant autre chose que quelques termes. » Il aurait même mieux fait de n’y pas changer un seul mot. […] » Je le demande, se peut-il de plus belle, de plus délicate manière de sentir ? […] Il a beau se contenter des dons du sort et de la médiocrité du sage, il y a des moments où il sent le besoin pourtant d’un peu plus de fortune pour la variété et pour le renouvellement de la vie ; il a conscience de ce qui lui manque, tant pour l’entière satisfaction du cœur et de l’esprit que pour les excitations légitimes du talent : « Il nous faudrait à tous deux (à Thomas et à lui), mais surtout à moi, dit-il, un peu plus de fortune : cela me mettrait à même de couper, par quelques parties agréables, la monotonie d’une existence qui n’a point assez de mouvement pour un homme né penseur, que la vue des mêmes visages et du même horizon ramène trop facilement sur son état et sur la misère des choses humaines. » Puis il se repent presque aussitôt d’avoir trop demandé, et faisant allusion à quelque image mélancolique que lui suggérait une lettre de Deleyre (malheureusement nous ne possédons aucune de celles qui sont adressées à Ducis) : « Hélas ! […] mon ami, que la nature est belle à étudier, quand c’est un chemin pour arriver à son Auteur !
N’aura-t-on eu décidément que de beaux commencements, un entrain rapide et bientôt à jamais intercepté, cette verve courageuse d’esprit que donne la jeunesse ? […] Ne sera-t-on en masse, et à le prendre au mieux, qu’une belle déroute, un sauve qui peut de talents enfin ? […] avec plus de produit dans le talent et avec un dégagement à tout prix, le résultat de l’œuvre a été moins beau que d’abord : la loi de l’ensemble, l’unité, a été violée ; le fonds entier s’est vu compromis. […] Hugo a donné à la fois les plus belles marques de son génie lyrique dans les Feuilles d’Automne, et de son talent de prosateur dans sa Notre-Dame de Paris ; Marion Delorme aussi (une œuvre dramatique véritable) n’a paru à la scène que depuis 1830. […] Ce n’est que dans une collaboration un peu étroite et continue qu’un beau jour ce programme, s’il prenait envie de le déduire, se pourrait à toute force préciser : et qu’aurait-il besoin de se tant préciser jamais, puisqu’il se pratiquerait avant tout et qu’il vivrait ?
Une Visite de noces « Hors du temple et du sacrifice, ne montrez pas les intestins. » Je me rappelais ce beau précepte d’un ancien, en écoutant, l’autre soir, une Visite de Noces, où M. […] Lebonnard l’arrête en ce beau chemin, et lui apprend qu’il a été dupe d’une scène bien jouée : madame de Morancé n’a, dans sa vie, que la triste faute de l’avoir aimé. […] Une sourde menace gronde, par moments, à travers tant de douces paroles ; un éclair luit sous ses yeux humides, où brillent les belles larmes des réconciliations amoureuses : mais il passe et s’éteint, bientôt, dans une effusion de tendresse. […] Séverine aura beau pardonner, — et le pardon est pour elle l’abjuration de son être, — le prince aura beau se repentir, — et il paraît incapable d’un sérieux retour, — toute intimité est, entre eux, à jamais détruite.
Droz a été marqué et comme gravé sur sa tombe dans un très beau discours de M. […] Il garda de cette éducation commencée sous les belles années de Louis XVI, la faculté d’espérance sociale et de bienveillance universelle, une vue riante de l’humanité, une teinte de philanthropie dont il avait en lui le principe et le foyer, mais dont la couleur se ressentait de la date de son enfance et de sa première jeunesse. […] Dans cet Essai sur l’art oratoire, il est disciple de Blair : dans les autres discours de cette date, il semble être en philosophie disciple de Condillac, de Garat, des maîtres du jour ; mais, à je ne sais quoi d’affectueux et de pur, à ce que les Anglais appellent feeling, on sent que, pour peu qu’il se développe, il aura bien plus de rapports d’affinité avec ces compatriotes de Blair, les Stewart, les Fergusson, les Beattie, avec cette école morale, économique, tour à tour occupée de l’utile et du beau, à la fois philosophique et religieuse. […] « Je me suis tenu constamment, dit-il, dans la situation d’esprit où se place un juré pour écouter les dépositions des témoins ; et maintenant j’oserais, comme lui, prononcer· la formule solennelle dont le verdict est accompagné. » L’Introduction qui résume l’histoire de France depuis Louis XIV et pendant tout le xviiie siècle jusqu’au moment où Louis XVI monta sur le trône, offre un beau et grave tableau plein de vérité et de précision. […] Il s’éteignit un jour sans douleur dans les bras des siens, et sembla justifier en tout cette belle pensée de Marc Aurèle : « Il faut passer cet instant de vie conformément à notre nature, et nous soumettre à notre dissolution avec douceur, comme une olive mûre qui, en tombant, semble bénir la terre qui l’a portée, et rendre grâces au bois qui l’a produite. » En ces temps de mélange et de turbulence, cette vie et cette nature de M.
Trouvez-moi, je vous en défie, dans quelque poëte et dans quelque livre qu’il vous plaira, une belle chose qui ne soit pas une image ou une antithèse ! […] vous croyez aux droits de l’homme, à l’émancipation, à l’avenir, au progrès, au beau, au juste, au grand, prenez garde, vous vous arriérez. […] Le beau existe tellement par lui-même qu’il n’a, certes, nul besoin d’orgueil ; mais qu’importe, la médiocrité humaine étant donnée, il humilie en même temps qu’il enchante ; il semble que naturellement la beauté soit un vase à orgueil, on l’en suppose remplie, on cherche à se venger du plaisir qu’elle vous fait, et ce mot, superbe, finit par avoir deux sens, dont l’un met en défiance contre l’autre. C’est la faute du beau, nous l’avons dit déjà. […] Le feu intérieur s’accommode de l’hiver dehors, le glacier ne demande pas mieux que d’être cratère, et il n’y a point pour la lave de plus belle sortie qu’à travers la neige.
Il me semble au contraire, que c’est par les principes mêmes du véritable enthousiasme, c’est-à-dire, de l’amour du beau moral, qu’on peut aisément montrer, combien la résignation à la destinée est d’un ordre plus élevé que la révolte contre elle. […] On trouve de très belles choses en fait de morale sociale et dans les prophètes hébreux et dans les philosophes païens : mais c’est pour prêcher la charité, la patience et la foi que J. […] Les belles âmes par leurs écrits ou par leurs actions dispersent quelquefois les cendres qui couvraient le Feu sacré. […] Enfin, l’Être suprême dans toute sa splendeur pourra-t-Il faire à sa créature un plus beau présent que l’amour ? […] Certes, notre imagination même peut concevoir mieux que cette terre, mais quand elle n’y parviendrait pas, est-ce à nous de considérer la Divinité comme un poète qui ne saurait créer une seconde œuvre plus belle que la première ?
Il y a de lui trois paroles fameuses, d’un très beau sens, et qui, continuellement citées, entretiennent sa mémoire dans un éternel renouveau. […] Sa vie est vraiment « humaine », toute pleine de belles larmes, et de faiblesse, et d’héroïsme. […] Il a de très larges vues d’historien et de belles pénétrations. […] Comme son aïeul, il connut plus d’un tour et valut à son maître un beau château. […] Il y a celles dont le mari fut un homme essentiellement élégant et qui eut de belles relations.
Le plus bel écrit de direction qui soit sorti de sa plume est l’Examen de conscience sur les devoirs de la royauté. […] La liberté qui anime les belles pages du traité de l’Existence de Dieu est d’une autre sorte. […] Ce n’est pas dommage que de tels hommes nous donnent leur goût particulier pour la règle du beau. […] Par la création du personnage de Mentor, il l’instruisait à rapporter tout l’honneur de ses belles actions à la protection divine. […] Quelques pièces d’André Chénier, douces et savoureuses comme le miel de l’Hymette, et qui reflètent le beau ciel sous lequel était née sa mère, ont rendu son nom immortel.
Ne sont-ce pas là de beaux représentants de la science ! […] Jean Jaurès une belle matière de discours français. […] Et finalement, un si beau banquet, à cent sous par tête, café, cognac et tabac compris ! […] ou n’avons-nous jamais lu les Soirées de Saint-Pétersbourg; et rappellerai-je ici la belle page de Joseph de Maistre sur les indulgences ? […] Et j’ajoute que tout effort que les protestants feront pour le nier ne pourra que les rengager eux-mêmes de plus belle dans l’affirmation de l’individualisme.
Trop beau, trop vrai, révolterait le goût d’aujourd’hui. » Je n’exagère point, on le sait, et je crois que j’atténue […] C’est le plus beau pays du monde. […] Tout cela est un beau champ d’activité, sans doute, mais est humiliant et mortifiant. […] Le détail est encore plus beau que la conception générale. […] Que les femmes belles et intelligentes tiennent une place immense dans les sociétés monarchiques.
Saisset a beau dire des injures (car il en a dit) aux sceptiques, aux matérialistes ; il a beau dire que ces systèmes n’ont de prise aujourd’hui que sur les âmes basses et les esprits obtus (page 472), il échappe très-difficilement lui-même et les siens à ce scepticisme qui ne diffère pas notablement du matérialisme quant au résultat moral ; de plus il viole les droits de la philosophie qu’il prétend défendre en s’exprimant de la sorte sur des doctrines peu hautes et peu consolantes à coup sûr, mais envers qui les philosophes proprement dits n’ont pas à se montrer si injurieux.
Il l’a fait avec une singulière pureté de forme, dans ce beau poème des Noces corinthiennes, qui, par-delà les Poèmes antiques, rappelle ceux du divin Chénier, avec plus de spontanéité et une science plus complète. […] Les beaux vers, où se montre l’influence de M.
Vous pouvez sans vous gêner, vous procurer de beaux modèles et faire tant d’études qu’il vous plaira. […] Le Polyphème de Virgile fait horreur ; mais il est beau.
Ce n’est ni une étude vraie de la vie moderne, ni un recueil de belle écriture, et il n’y a là dedans qu’un travail d’écureuil, et une dépense de fausse imagination autour d’une situation, tirée par les cheveux. […] Je n’ai pas besoin de dire que, sauf sa belle et grande fierté littéraire, il y a peut-être autant de convention dans ce récit, que dans le costume du narrateur. […] Un peu au-dessous de ce rebord, il y avait le beau crâne d’un vieillard, assis au balcon. […] » — C’est un beau mot de savant. […] Je m’en vais dîner, ce soir, chez la princesse, à pied, par un beau froid noir.
Il vient de faire, pour sa santé, le voyage d’Ischia où il a pris les eaux, il est revenu par Florence, et rapporte, dit-on, des fruits nouveaux de son inspiration dans ces contrées déjà chantées par lui et gardiennes de ses plus beaux souvenirs43. […] Au reste, tout ce métal sonne creux, n’est pas de bonne trempe : je ne sais qui disait que cela lui faisait l’effet d’un beau fusil à deux coups, mais en fer blanc. […] Giraudeau de Saint-Gervais, homme d’esprit, qui a vu là un beau sujet d’enseigne.
Cette belle raisonneuse de madame Legendre y prêtait assez ; c’était la sœur de mademoiselle Voland, prudente, sérieuse, réfléchie, de réputation sévère, ne méritant pas mal le sobriquet d’Uranie qu’on lui avait donné. […] Il en jettera de plus clairs que vous n’entendrez pas davantage ; et l’impatience et le moment amèneront une scène, je ne sais quelle, peut-être des larmes, peut-être une main prise et dévorée, peut-être une chute aux genoux, et puis des propos troublés, interrompus de votre part, de la sienne. — Le beau roman ! […] Ce qu’Horace disait à un ami qui était devenu amoureux de son esclave : “Il est beau, il est adroit, il a des mœurs, de l’esprit, des connaissances, c’est un enfant parfait de tous points ; mais je vous en préviens, il est un peu fuyard…” ».
Il a mérité que le caractère d’individualisme, si fortement prononcé dans notre âge égoïste et littéraire, s’effaçât ici, en quelque sorte, sous la sanction sacerdotale, sous l’adoption solennelle qui fait de ces lettres, non pas un opuscule philosophique, non pas un legs posthume d’un jeune homme de belle espérance, mais une pierre désormais indestructible du temple qui s’élève, une parole mémorable de l’Évangile toujours vivant, un chapitre de plus destiné à illustrer la troisième période des saintes Écritures. […] La papauté, aux plus beaux jours du catholicisme, n’a fuit que tester, depuis, ce que le dogme chrétien ne permettait, avec sa division du spirituel et du temporel, que dans une mesure imparfaite. […] Il rejeta la matière, méprisa l’industrie, se passa des beaux arts ; il abdiqua le royaume de la terre pour atteindre plus vite, à travers l’espace et les lieux, à travers l’empire de César, au but de ses conquêtes spirituelles.
Ses beaux volumes, magnifiquement imprimés, ne le sont pas à ses frais (chose rare parmi les poètes modernes). […] J’en citerai une fort belle, traduite avec un grand bonheur par le prince Mestscherski. […] La chute, comme on voit, doit être un peu oubliée dans les hymnes de cette jeune et belle âme.
Sous des apparences d’humilité, elle change la religion en astuce et se rend maîtresse des biens, de l’honneur et de l’esprit des gens… C’est un beau trait que celui du démon se faisant adorer comme un saint… Ceux qui me nourrissent, je les loue de leurs œuvres pies, de leurs vertus, de leur charité ; je les rassure sur leurs débauches, sur leurs usures ; rentrant la tête dans les épaules avec un petit ricanement, j’allègue la fragilité de la chair. […] Décidément, vous me rendrez docteur avec vos beaux raisonnements. […] Il finit, chose étrange, par avoir le beau rôle ; il pacifie la maison troublée.
L’emploi qu’il faisoit des figures de rhétorique, son affectation à prodiguer l’antithèse & l’hyperbole, son attention ridicule à courir après l’esprit, ses grands mots, ses longues phrases, eussent gâté le plus beau génie. […] Il les appelloit belles dames. […] En même temps qu’il faisoit de si belles exhortations, il envoyoit des émissaires dans toutes les coteries dévouées à l’ordre, pour décrier Balzac.
On voit avec peine ces marques de ressentiment à côté des plus belles leçons de morale & de philosophie. […] Il est des bornes que doivent toujours respecter les belles ames. […] Une dame disoit à M. de Voltaire, qu’il devoit goûter une grande satisfaction, d’avoir fait tant de belles choses.
Toute forme belle ou laide a sa cause, et de tous les êtres qui existent, il n’y en a pas un qui ne soit comme il doit être. […] Nous disons d’une statue qu’elle est dans les proportions les plus belles. […] Toute attitude est fausse et petite ; toute action est belle et vraie.
Mais elle a beau me parler de l’héroïque sincérité de l’âme ardente et forte dont elle recommande le volume présent au public ; elle a beau m’exalter cette âme indépendante et fidèle, qui n’oublie aucun de ses amours en les variant et qui ne combat rien dans son âme par la très morale raison que le temps qu’on perd à combattre contre soi, on ne fait pas Corinne, si on fait Mme de Staël, je me connais trop en logomachie pour ne pas reconnaître les idées, les façons de dire, les affectations du bas-bleu moderne, cette espèce à part et déjà si commune et pour être infiniment touché du spectacle que me donnent, à la fin de cette préface sur laquelle on a compté, ces deux antiques Mormones du bas-bleuisme contemporain dont l’une couronne l’autre de roses à feuilles de chêne, avec un geste tout à la fois si solennel et si bouffon ! […] Mais, à défaut de respect, si Prudence, — puisque Prudence il y a, — avait eu le moindre brin de délicatesse, elle n’eût pas, par ses indiscrétions travaillées, dégradé ce vieillard de génie amoureux dont elle a dit d’une plume impertinente et corrompue « qu’il avait les dents belles et le transport agréable et amusant ».
I Henri Rochefort est un des plus beaux fils de cette Chronique que j’accusais récemment d’être un genre mortel à la littérature et au talent, et qui, comme la Révolution française, comparée par Vergniaud à Saturne, doit dévorer tous ses enfants… La Chronique ne coupera point la tête aux siens, comme la Révolution française, mais elle leur videra le cerveau. […] Il y a un passage dans son livre où l’auteur des Français de la décadence se moque, comme il sait se moquer (à tort ou à raison, ce n’est pas la question), des percements de rue qui ont lieu à Paris en ce moment ; et, pour exprimer les ironiques inquiétudes que lui causent tous ces percements de rues nouvelles (pages 290 et suivantes), non seulement il parle avec effroi d’une rue qui traverserait les tableaux du Titien et de Raphaël : Les Noces de Cana et La Belle Jardinière, lesquels sont actuellement au Louvre, mais encore d’une « autre rue, qui traverserait à son tour, d’outre en outre, les deux pots de réséda posés sur sa fenêtre, et qui continuerait jusqu’à son lit de plumes, en passant sur sa table de nuit ». […] Je suis bien bon de l’appeler Armide, cette méchante fée de la Chronique, qui prend les plus belles facultés et qui les broie dans son petit moulin à phrases et à paroles, lequel tourne, tourne sans jamais s’arrêter !
Mais il a beau l’éviter, il a beau se surveiller, il a beau dire, à la fin de son ouvrage, qu’il n’est encore arrivé qu’au seuil de la métaphysique après douze cents pages, car après tout il pourrait bien se faire qu’il y eût une métaphysique, aveu tardif qui renferme une contradiction, le matérialisme saute à chaque page en propositions s’élançant comme des jets d’une source qui crèveraient le sol !
On ne trouve pas, il est vrai, non plus, dans ces vers d’un enthousiasme austère et d’une tristesse ardente, le flot incessant de magnifiques images que roule le Livre Surnaturel, toujours allumé, comme le chandelier d’or à sept branches, devant la pensée du poète ; mais on y trouve l’âme, l’élancement, le plus beau mouvement de la poésie lyrique, — le mouvement haletant vers Dieu, — la brièveté forte, la flamme courte, tout cela sur un fond de grande naïveté orientale très étonnante venant d’une plume moderne. […] Mais c’est encore beau d’être turquoise, surtout quand il semblait qu’on n’était qu’un fragment de ruine, imposante et calcinée, dans les chemins pierreux de Jérusalem à Jéricho ! […] Les vers se font partout, car le sang et les larmes coulent partout, et les vers, quand ils sont beaux, ne sont que cela, — sang et larmes !
— dit-il — peut cependant être regardé par la pensée, comme par les yeux l’abime et le soleil. » Car ils ont beau se mettre un instant les pieds en l’air, comme Hérodiade dansant devant Hérode, ces culs-de-plomb, pour se faire légers ! […] « Tu es belle. Les autres ne savent pas comme tu es belle.
Sans doute la charité est une belle chose ; mais ne pourrait-elle pas opérer ses bienfaits, sans autoriser ces razzias redoutables dans la bourse des travailleurs ? […] Il y a là une esquisse de Gros, le Roi Lear et ses Filles, qui est d’un aspect fort saisissant et fort étrange ; c’est d’une belle imagination. […] Nous avons entendu maintes fois de jeunes artistes se plaindre du bourgeois, et le représenter comme l’ennemi de toute chose grande et belle. — Il y a là une idée fausse qu’il est temps de relever.
Et à l’autre extrémité du globe, l’Indien chante sous son beau ciel : Je te loue, ô toi qui fais croître des moissons de riz dans mes plaines, et qui fais fleurir le citronnier et l’oranger au bord de mes ruisseaux ; tandis que vers les bords de la Russie orientale, un autre peuple sauvage chante auprès de ses volcans : Je t’adore et te loue, ô être puissant et terrible qui habites ces souterrains enflammés, et qui, de là, roules tes feux parmi nos neiges et nos glaces. […] ils cherchent le bonheur, et ils n’aperçoivent point la loi universelle qui, en les éclairant, les rendrait tout à la fois bons et heureux : mais tous s’écartant du beau et du juste, se précipitent chacun vers l’objet qui l’attire ; ils courent à la renommée, à de vils trésors, à des plaisirs qui, en les séduisant, les trompent. […] Il ne faut donc pas s’étonner si les premiers peuples du monde, qui étaient presque tous des peuples pasteurs, et surtout les Orientaux qui, habitant un plus beau climat, doivent plus aimer et sentir la nature, ont donné à leurs éloges religieux un caractère que l’on ne trouve point parmi nous.
C’est un je ne sais quoi dont on est transporté ; Et moins on le comprend, plus on est enchanté, J’en ai fait l’autre jour une épreuve cruelle : J’étais dans un salon, dont la dame encor belle Depuis dix ou trente ans tient un bureau d’esprit, Et fait de nos auteurs la gloire ou le crédit. […] C’était un beau jeune homme, une tête à caprices ; Son front à demi chauve, et le désordre heureux Où tout l’art d’Hippolyte avait mis ses cheveux, Son cou penché, son air tendre et mélancolique, Ses yeux à peine ouverts, et son regard oblique, Tout en lui décelait une peine de cœur, Que de son teint fleuri démentait la fraîcheur. […] Tout est beau, tout est grand ; tous ses mots sont sublimes !
Il serait bien peu vraisemblable que, dès le temps où ces images étaient incessamment sous les yeux des Romains, la fête de Vénus, placée par la tradition à une des époques les plus riantes de l’année, à la saison des belles nuits et des aurores matinales, n’ait pas été embellie du charme des vers, ou même qu’on n’ait eu, pour célébrer ces gracieux souvenirs, que quelque vieux débris du rituel païen. […] Car les arts qui parlent aux sens peuvent être pervertis, s’ils ne remontent sans cesse à la source divine de l’âme ; et l’image impérieuse du beau moral les protège autant qu’elle les élève. […] Mais alors même Stace, reprenant avec une verve plus simple, trouve de belles et dernières paroles vraiment dignes de la lyre.
Le récit de la prise de la Bastille par Mévisto blessé, soutenu par deux hommes, forme un groupe d’un beau dessin. […] le bel article à faire sur la lourde bêtise et l’ignorance des jeunes blagueurs de première. […] Devant cette toile que je n’avais jamais vue, je dois faire amende honorable à Courbet : ce ventre c’est beau comme la chair d’un Corrège. […] Il a une Via Appia, sous un nocturne de ciel argenté, derrière de noirs cyprès, du plus grand effet et du plus bel art. […] De ces beaux tons, qui ont du gris fauve des tons de peaux de daims mégissées.
Mais on a beau ne pas donner au soldat de raison, il en imaginera une. […] L’humanité a beau s’être civilisée, la société a beau s’être transformée, nous prétendons que les tendances en quelque sorte organiques à la vie sociale sont restées ce qu’elles étaient à l’origine. […] Ce qui est beau, ce n’est pas d’être privé, ni même de se priver, c’est de ne pas sentir la privation. […] Les stoïciens ont donné de fort beaux exemples. […] Qu’elle ait une valeur éminente, au sens où une belle oeuvre d’art a de la valeur, on l’accordera également.
Quel beau supplément à la générosité et aux princes ! […] Il s’y est aussi fourré, et je vous en demande pardon, trois billets de ma belle Genevoise, de Bruxelles. […] Pendant sept mortelles heures, enveloppé dans mon domino, un masque sur le nez et un beau chapeau avec une belle cocarde sur la tête, je me suis assis, étendu, chauffé, promené. « Vous ne tanze pas, monsieur le baron ? […] Elle a la gorge belle, elle le sait et s’en pare un peu trop au gré de la modestie. […] Adolphe eut beau faire, il fut toujours ira peu étranger à ces choses.
Mais, j’ai beau l’évoquer, les nuits sont vides de lui, de son souvenir, de son image. […] Rien n’est beau, rien n’a du style, rien n’est sculptural, rien n’est pictural comme ces éreintés d’une bataille. […] Saint-Cloud, avec ses étages de maisons dans la verdure, sous le rayonnement du plus beau jour, fait peur avec son silence : on dirait une ville morte, sous l’azur implacable d’un beau ciel de choléra. […] Jamais le décor de septembre ne fut si riant, jamais bleu du ciel ne fut si pur, jamais beau temps ne fut aussi beau. […] Qu’est-ce, au fond, que nos sauveurs, un général beau parleur, un littérateur distingué, un procureur onctueux, enfin une copie bourgeoise de Danton ?
Il y a trois belles choses, disait saint Paul : la foi, l’espérance, la charité ; la plus grande des trois, c’est la charité. […] Vous aurez largement contribué, cher ami, à ce progrès de l’esprit, où la part de notre siècle, quoi qu’on dise, sera belle.
Les Philosophes ont beau employer toute sorte de moyens pour se venger des courageux adversaires de leurs systêmes ; ils ont beau se montrer, dans la pratique, les plus fiers ennemis de la tolérance qu’ils prêchent, nous n’en serons pas moins disposés à les plaindre, quand ils seront malheureux ; & plus nous aurons mis de zele & de chaleur à combattre leurs erreurs, plus on nous trouvera empressés à réclamer, pour leur personne, l’indulgence de l’autorité & la protection du crédit.
La propriété des biens et celle de la personne, ou la liberté civile, supposent de bonnes lois et avec le temps amènent la culture des terres, la population, les industries de toute espèce, des arts, des sciences, le beau siècle d’une nation. […] Elle publie de beaux recueils que personne n’achète et ne lit, parce que personne ne les entend ; de ces recueils il en passe au loin quelques exemplaires qui ne compensent pas les dépenses, et la nation reste au même point d’ignorance ou d’instruction.
C’est ainsi qu’on done le nom du peintre au tableau : on dit j’ai vu un beau Rembrant, pour dire un beau tableau fait par le Rembrant. […] La cervèle se prend aussi pour l’esprit, le jugement ; ô la belle tête ! […] Sanadon fasse sur moi un plus bel éfet, je regrète le sentiment tendre qu’elle me fait perdre. […] Les énigmes sont aussi une espèce d’allégorie : nous en avons de fort belles en vers françois. […] Nous avons sur ce point un beau passage de Varron que l’on peut voir ici au bas de la page.
André Bellessort a publié, depuis quelques années, de beaux livres de voyages, rapportés de pays divers. […] C’est un fantastique pétrifié, mais si beau par les étés sans nuit, même quand les étés sont froids et entrecoupés de bourrasques ! […] On arriverait à démontrer que chez Paul Bourget les plus belles échappées de prose ont pour point de départ un vers. […] L’appétit du beau, qui déjà s’y manifestait, s’accroîtra plus tard jusqu’à devenir une exclusive ferveur. […] les beaux jours de bonheur indicible Où nous joignions nos bouches !
Des strophes de très belles romances, à la manière dont on entendait la belle romance sous le second Empire et les premières années du régime actuel, époque de son enfance et de sa jeunesse si merveilleusement sensibles. […] Le saint tombe sur un beau cavalier, qu’il assomme. […] Mais quel talent, et quelle belle place, légitime, ce talent a pris dans la littérature de nos jours ! […] » Cela est beau, à ses yeux, et il veut encore surenchérir. […] Qu’on lise Un homme de lettres, cette belle nouvelle d’une cruauté si poignante.
Janin dans son très bel appartement de la rue de Tournon, qu’il n’occupait pas seul. […] Finies, les belles inventions ; finis, les beaux coups d’audace. […] Beau jour que je ne verrai pas, M. […] que n’ai-je étudié, et la belle chose que de savoir toutes ces choses ! […] Écart de degrés, chaleur cérébrale, spectateur individuel, un cas mis en forme, et vous, beaux messieurs de l’orchestre, belles dames du balcon devenant des mâles et des femelles !
Il traversa Paris, le plus beau Paris, le monde, et le plus beau monde, et en fut aimé, sans cesser de rester provincial, ce qui n’est pas mauvais du tout, et de sa province, ce qui est peut-être moins bon. […] Le beau est un besoin de l’homme, et le beau est religieux. […] Ce fut une belle intuition de sa part et un bel effort de la part de ses successeurs. […] Mais l’idée n’en est pas moins belle, et peut-être en est-elle plus juste. […] Et d’abord, comme livre descriptif, il est très beau.
Sa Nuit de Mai restera un des plus touchants et des plus sublimes cris d’un jeune cœur qui déborde, un des plus beaux témoignages de la moderne Muse. […] Ce naturel-là, qui est un charme, ne doit pas aller pourtant jusqu’au découragement intérieur et à la négligence de si beaux dons.
Philippe Gille Je ne puis passer sous silence le beau livre, Poèmes de Provence, que vient de publier M. […] Jean Aicard de nous dire, avec son éloquence, le beau et charmant poème de la naissance, de la vie et de la mort du Christ.
Il est vrai que, parfois, ils y gagnent toute une valeur suggestive, que ce sont comme quelques beaux accords frappés, comme une phrase initiale donnée dont on nous laisse libre de nous figurer le développement. […] Il a embelli son âme de toute la Beauté intérieure, et son âme a transformé en beauté tout ce qu’il lui a donné ; elle lui a fait trouver en lui-même « une possibilité particulière de vie supérieure dans l’humble et inévitable réalité quotidienne », et c’est cette vie profonde que le poète a vécu et dont il nous révèle la précieuse essence en ce beau livre de poèmes.
J’ai pensé toutefois que quelques jeunes âmes, amoureuses du beau et du vrai, trouveraient dans cette confidence consolation et appui, au milieu des luttes que doit livrer à un certain âge tout esprit distingué pour découvrir et se formuler l’idéal de sa vie. […] En écoutant vos leçons sur la plus belle des langues et des littératures du monde primitif, j’ai rencontré la réalisation de ce qu’auparavant je n’avais fait que rêver : la science devenant la philosophie et les plus hauts résultats sortant de la plus scrupuleuse analyse des détails.
Mais cette abstraction m’est ensuite apparue comme si irrévérencieuse envers l’histoire, si partielle, si négative de tout ce qu’il y a de plus sublime dans la nature humaine, que, dussent les inquisiteurs et les philosophes s’en irriter, j’ai résolu de prendre l’esprit humain pour ce qu’il est et de ne pas me priver de l’étude de sa plus belle moitié. […] Telle était aussi la belle et poétique manière de Platon ; tel est le secret du charme inimitable que l’usage demi-croyant, demi-sceptique des mythes populaires donne à sa philosophie. […] Nous croyons à tout ce qui est vrai ; nous aimons tout ce qui est beau 47 ; et vous, les yeux fermés sur les charmes infinis des choses, vous traversez ce beau monde sans avoir pour lui un sourire. […] N’était-elle pas plus belle et plus forte au XVe et dans la première moitié du XVIe siècle, alors qu’elle devançait l’Europe dans les voies de la civilisation et ouvrait ses ailes au plus hardi rationalisme ? […] Mais ce beau mouvement fut comprimé par la persécution des musulmans rigides.
Aujourd’hui, comme dans un obi, une ceinture d’une beauté exceptionnelle, je me plaignais d’une terrible tache qui la déparait : « Oui, oui… mais vous posséderez peut-être, me répondit Hayashi, un peu de la transpiration d’une très belle Japonaise. » Ce soir chez Daudet, le petit Hugues Leroux me donne ce plaisant et réconfortant détail. […] Cet instinct de la destruction était peut-être encore plus féroce, plus inhumain, plus enragé chez un enfant beau, chez un enfant intelligent, chez le petit de Béhaine, mort d’une méningite. […] Un beau front, des yeux limpides d’enfant, quelque chose de bon, de souriant, de calme, fait par une vie de plein air méridional, du bon vin ; et l’enfantement facile de chants et de poésies troubadouresques. […] Fromentin a apporté l’oreille, et fait son beau morceau sur le silence dans le désert. […] Thiers, la plus belle pendule en marbre, qu’il avait jamais possédée.
Wilhelm Schlegel, son ami et son compagnon de voyage en Allemagne, lui fournit deux de ses plus belles pages ; la première est un sonnet sur l’attachement à la vie. […] J’étais belle aussi, c’est ce qui a fait ma perte ; mon ami était alors près de moi ; il est maintenant bien loin. […] Il eut peu de lecteurs comme ce qui dépasse le vulgaire, mais il forma entre ceux qui le lurent et qui le comprirent, la famille intellectuelle de madame de Staël, la secte du beau, la religion de l’esprit. […] C’est dans ces beaux lieux, époque troublée mais culminante de sa vie, que nous entrevîmes une seule fois la figure de la femme historique, dont nous retraçons aujourd’hui l’image. […] L’une, on m’a dit le soir que c’était madame Récamier, m’éblouit comme le plus céleste visage qui ait jamais éclairé les yeux d’un poëte, trop beau comme un éclair pour être autre chose qu’une apparition !
Un abbé de cour, d’une société lettrée et licencieuse, qui avait brigué autrefois les préférences de la belle trésorière, qui était resté l’ami de la famille et qui était le parrain du jeune homme, dirigea ou égara plutôt ses premiers pas dans le monde. […] Ce n’était qu’une belle imitation de Sophocle, on crut avoir retrouvé Racine ; il en avait bien l’imagination, il était loin d’en avoir le style. […] Il eût été mille fois plus beau de représenter ce grand caractère du martyr inspiré, persécuté et triomphant que de représenter dans Mahomet un incrédule de sa propre religion qui se moque de Dieu et des hommes. […] Celui qui concevra la tragédie de Mahomet comme l’histoire, reproduira un des plus beaux phénomènes de l’esprit humain, une foi sincère dans une âme héroïque, bravant le martyre et s’élevant par le martyre à l’empire d’un continent entier. […] Socrate mourant est plus beau que Voltaire riant à l’abri des Alpes et lançant des flèches sans découvrir la main.
Comme Odry, plus amusant encore que lui dans les Balayeurs, il nettoie de cette façon sa belle patrie. […] Grün fut ravi et le trouva beau ! […] Il n’y a dans le démocrate Proudhon rien qui rappelle ce bel oiseau aristocratique, qu’il faut laisser, pour objet de comparaison, aux reines et aux impératrices. […] C’est là même l’infériorité de ce livre posthume, auquel la dernière main a manqué et que j’ai l’audace de trouver beau. […] Il a vu le Bas-Bleu, — le Bas-Bleu dont lord Byron riait, mais dont Proudhon s’indigne, parce qu’il voit plus loin que ce beau dandy impertinent de lord Byron !
Un paysage pourra être beau, gracieux, sublime, insignifiant ou laid ; il ne sera jamais risible. […] Dira-t-on que toute expression habituelle du visage, fût-elle gracieuse et belle, nous donne cette même impression d’un pli contracté pour toujours ? […] Tout à l’heure, le vêtement habituel avait beau être distinct de la personne ; il nous semblait faire corps avec elle, parce que nous étions accoutumés à le voir. Maintenant, la coloration noire ou rouge a beau être inhérente à la peau : nous la tenons pour plaquée artificiellement, parce qu’elle nous surprend. […] Ici c’est un orateur dont les plus belles périodes sont coupées par les élancements d’une dent malade, ailleurs c’est un personnage qui ne prend jamais la parole sans s’interrompre pour se plaindre de ses souliers trop étroits ou de sa ceinture trop serrée, etc.
Quand le roi, quand Monsieur serraient Madame mourante de si tendres et de si vains embrassements, nul cri aigu, nul sanglot rauque ne venait rompre la belle harmonie de cette douleur suprême ; les yeux un peu rougis, avec des plaintes modérées et des gestes décents, ils pleuraient, pendant que les courtisans, « autour d’eux rangés », imitaient par leurs attitudes choisies les meilleures peintures de Lebrun. […] Les belles façons et le superbe cérémonial couvrent les bassesses et les trahisons ; on est là comme à Versailles, contemplant des yeux la magnificence du palais, pendant que l’esprit compte tout bas les exactions, les misères et les tyrannies qui l’ont bâti. […] Chaque siècle joue la sienne et fabrique un beau type : celui-ci le chevalier, celui-là l’homme de cour. […] Il en donna encore de petites à différentes personnes. » La belle curée ! […] Comptez d’abord son beau titre ; ses grandes amitiés, ses alliances, M. de Lorge, M. de Beauvilliers, le duc d’Orléans, le duc de Bourgogne.
M. de Talleyrand avait eu beau se mêler à la Révolution, il était resté, lui, un homme de race, gardant au fond beaucoup des idées ou des instincts aristocratiques. […] il eût fait beau voir un prêtre venir redemander à Talleyrand expirant de rendre tout le bien mal acquis (comme on disait autrefois), de le restituer au moins aux pauvres, de faire un acte immense d’aumône — une aumône proportionnée, sinon égale, au chiffre énorme de sa rapine ! C’est pour le coup que tout le monde n’eût point applaudi et n’eût pas été content, que la famille n’y eût point poussé avec un si beau zèle peut-être, que le confesseur aurait eu un rôle difficile et rare. […] Mignet est des plus belles en son genre, des plus spécieuses, mais dans un ton nécessairement adouci, et ne montrant que les côtés présentables. […] Il est assez piquant de remarquer que M. de Talleyrand a été peint deux fois, et pas en beau, par les deux femmes supérieures de ce siècle : Mme Sand a fait de lui un portrait affreux, d’un parfait idéal de laideur.
Faible femme en ses plus beaux élans, vase débordé d’amour, où puisa-t-elle sa doctrine ? […] Elle était assez jeune et belle toujours, délicieuse de grâce ; petite, blanche, blonde, de ces cheveux d’un blond cendré qui ne sont qu’à Valérie, avec des yeux d’un bleu sombre ; une voix tendre, un parler plein de douceur et de chant, comme c’est le charme des femmes livoniennes ; une walse enivrante, une danse admirée. […] Le style de Valérie a, comme les scènes mêmes qu’il retrace, quelques fausses couleurs de la mode sentimentale du temps : je ne saurais aimer que le Comte envoie, pour le tombeau de son fils, une belle table de marbre de Carrare, rose (dit-il) comme la jeunesse, et veinée de noir comme la vie. […] Le malheur de certaines âmes, le tort de Mme de Krüdner n’est peut-être que d’avoir conçu le beau dans les choses humaines à un certain moment décisif et terrible, où il suffisait, en effet, d’un grand homme pour l’opérer. […] Marmier (Revue de Paris, 2 avril 1837), et ce fragment d’André Chénier, sans doute d’origine grecque : J’étais un jeune enfant qu’elle était grande et belle, etc.
On allait parfois, par un beau jour, à Meudon, à Versailles : et c’est là qu’après s’être bien promenés, ils s’asseyaient pour écouter la lecture de Psyché. […] Ils se faisaient expliquer les traités et les campagnes, interrogeaient Vauban, Luxembourg, Chamlay, Louvois, ramassaient de tous côtés des mémoires, et sans s’embarrasser d’une haute philosophie, tâchaient de mettre les faits dans un bon jour et en bel ordre. […] Il faut peu de chose, et rien de complexe ou de raffiné, pour les mettre en belle humeur. […] Et vous, au contraire, allez au diable, et en enfer, vous les maudits de mon Père, parce que vous m’avez aimé de tout votre cœur, et que vous avez sollicité et pressé tout le monde de m’aimer.” » Cette prosopopée, sous laquelle le Père demeura comme étourdi, devint un des beaux morceaux de l’Épître sur l’Amour de Dieu. […] Il n’y passa plus l’hiver après 1687, mais chaque année, aux beaux jours, il s’y installait avec joie.
Enfin elle s’est rappelée qu’elle avait abandonné, il y a quelques six ans, en pleine fleur, un merveilleux sujet ; elle l’a repris, simplement : et elle a retrouvé de beaux jours, cotre vieille gaîté française. […] Ils se sont dit que, la musique devant traduire des émotions définies, les œuvres dramatiques des grands poètes antérieurs pouvaient leur fournir les indications les plus nettes et les plus belles des émotions à traduire. […] Chez nous d’ailleurs, à côté de l’école musicale Nationale, il y a quelques artistes plus entièrement wagnériens, et auxquels semble assuré le plus bel avenir musical. […] Mais cette forme étrangère ne pouvait s’acclimater, puisque, pour les appliquer, il fallait forcer la langue outre mesure et se priver d’autres formes poétiques plus belles et plus variées. […] (probablement en contraste au « chatouillement des yeux », qui nous est causé par la lecture de mainte partition de nouveaux opéras allemands) ; mais que même l’amateur de musique allemand enlève les lunettes de ses yeux fatigués et pour une fois se donne sans réserve à la joie d’un beau chant, cela nous montre plus profondément son cœur et nous fait connaître un profond et ardent désir de respirer de nouveau pleinement et fortement pour se faire le cœur libre tout à coup, jeter loin de lui tout le bagage de préjugés et de méchantes pédanteries qui le força si longtemps à être un amateur de musique allemande, et, au lieu de cela, devenir enfin un homme heureux, libre et doué pleinement de cette admirable conception de tout ce qui est beau, sous quelle forme que cela se montre.
Après un extraordinaire début, où il a rempli un programme entier des œuvres les plus belles et les plus ignorées de Beethoven, M. […] Tel est le vivant mais grossier épisode qui est devenu, dans Rheingold, la belle scène du rachat de Freia, avec ce cri si touchant de Fasolt : « Je vois encore briller l’œil de la douce déesse ! […] Joseph Dupont, l’habile chef d’orchestre, nous avait initié depuis longtemps aux scènes principales des Maîtres Chanteurs, par la belle transcription symphonique, digne pendant de celle de Lohengrin, qui, avec cette dernière, a fait de tout temps partie du répertoire des concerts d’été à Bruxelles, au même titre que l’intéressante transcription du Vaisseau fantôme, par M. […] Le projet de représenter la Walkyrie est près de se réaliser ; ce sera pour les directeurs actuels un titre à la reconnaissance des partisans du Beau. […] Ce rapport devient insensiblement un pamphlet contre la science en général, que l’auteur accuse de violer grossièrement les plus sacrés mystères de la nature et d’offenser le sentiment du beau en observant la vie dans sa pleine activité et dans son développement.
Mais c’est le plus souvent un beau nom qu’on donne à ce qui est le moins raisonnable. […] C’est de cet enthousiasme que doit naître ce beau désordre dont M. […] J’entens par ce beau désordre, une suite de pensées liées entr’elles par un rapport commun à la même matiére, mais affranchies des liaisons grammaticales, et de ces transitions scrupuleuses qui énervent la poësie lyrique, et lui font perdre même toute sa grace. […] On dit contre les commencemens de poëme trop enflés, qu’un exorde doit être simple, et que cette régle est générale : mais si elle étoit aussi générale qu’on le prétend, le début des plus belles odes seroit vicieux, on y promet toujours des miracles. […] Aussi n’est-ce pas contre une admiration éclairée que je m’éleve, mais contre un sentiment aveugle que l’on s’impose sur la foi d’autrui, qui ne discerne point comment et jusqu’où les choses sont belles, et qui prodigue aux défauts mêmes les éloges qui ne sont dûs qu’aux vraies beautés.
Aux États-Unis donc, on regarde l’exécution d’une belle prison comme la pyramide de Chéops, ni plus ni moins, et, par contre-coup, nous qui passons en quelque sorte pour le système pénitentiaire fait homme, quand on nous place à côté de la pyramide, nous sommes des espèces de géants. […] Voyez la belle chose que la logique. […] Une lettre fort belle, de ce temps, écrite par lui d’Amérique à un jeune homme que travaillait le mal du siècle, le mal de Werther ou de Rem, nous le montre déjà mur et tel qu’à cet égard il sera toute sa vie : « Vous vivez, mon cher ami, si je ne me trompe, dans un monde de chimères : je ne vous en fais pas un crime ; j’y ai vécu longtemps moi-même, et en dépit de tous mes efforts je m’y trouve encore ramené bien des fois. […] Évidemment, c’était un type, un noble exemplaire idéal qu’il eût été beau et glorieux de reproduire, en le renouvelant, même dans un cadre diminué et moins favorable. […] Sentiments, pensée, langage, tout cela est grand, fier et beau : « (Châteauvieux, 28 septembre 1837.)
Rien n’y faisait, son incurable pessimisme résistait à tout, même au succès. « Le plus beau jour de ma vie sera celui où je cesserai d’écrire » : c’est ce qu’il se plaisait à répéter, même en plein triomphe. […] J’ai beau me dire à cet égard ce qu’on souhaite, ce qui peut-être est raisonnable au fond, le sentiment l’emporte, il m’écrase. […] En définitive, le public y retrouve à peu près son compte. — Je ne finirai point sans citer de La Mennais une belle pensée admirablement exprimée ; car je n’ai en tout ceci aucun but de sévérité ni d’indulgence ; je ne tiens qu’à montrer l’homme d’après nature, et je voudrais avoir le temps d’extraire tout ce que j’ai noté de remarquable. […] J’aime mieux M. de Bonald, chêne vigoureux qui va chercher sa sève à travers les rocs primitifs, jusque dans les entrailles de la terre. » Il changea probablement d’avis sur M. de Bonald avec les années 124 ; mais peu importe, l’image reste belle. […] Béranger (c’était là son faible) ne perdait aucune occasion de se donner le beau rôle, le rôle du sage, et il passait même toutes les limites du sans-gêne lorsque, rentrant chez lui après une visite à La Mennais, il disait à qui voulait l’entendre : « Je viens de voir ce vieux grigou… » On aurait du reste à citer de pareils propos de Béranger sur tous ses amis, Thiers, Mignet, Cousin, etc.
« À cette époque, dit le philosophe allemand Herder dans sa belle Histoire de la Poésie des Hébreux, à cette époque de l’âge du monde, la poésie et la musique étaient étroitement unies ; les poètes et les musiciens n’étaient presque toujours qu’une même personne. […] Les chefs amènent leurs fils, les premiers nés, les plus beaux, les plus forts, devant le prophète. […] Le Tasse et l’Arioste n’ont rien d’aussi romanesque dans leurs aventures de chevalerie que la rencontre de David et de la belle Abigaïl, son second amour, sur la montagne du Carmel. […] La belle Abigaïl, épouse de Nabal, apprend, en l’absence de son mari, que David s’avance vers sa demeure. […] On sent l’art partout sous l’inspiration, dès le début de ses plus belles odes.
De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) I La découverte d’un beau buste grec de Platon fut un événement pour l’âme platonique de Laurent. […] Son maître, le peintre Ghirlandaio, obtint pour lui de Laurent la permission d’aller dans ses jardins étudier les beaux vestiges d’art qui arrivaient de Grèce. […] » Ajouterai-je qu’à la première veille, des nuages ayant tout à coup assombri le ciel, le dôme de cette magnifique basilique, dont la coupole, par son admirable travail, surpasse la plus belle du monde entier, fut frappé d’un tel coup de foudre, que de grandes portions s’en détachèrent, et que des marbres énormes furent ébranlés par une force et un choc horribles, et principalement dans cette partie qui est en vue du palais des Médicis ! […] Vous parlerai-je encore de ce couple des plus beaux lions gardés dans une cage pour un jardin public, et qui en vint aux prises avec une telle férocité, que l’un d’eux fut horriblement maltraité et l’autre tué ? […] Mais je m’aperçois que même en passant sous silence beaucoup d’autres et de belles choses, je suis plus long dans mon récit que je ne voulais en le commençant.
Ferdinand Fabre 103 Voici un solitaire dans la littérature d’aujourd’hui, un homme qui n’est pas de Paris, qui vient d’un pays perdu, un montagnard robuste et sérieux, un sauvage à l’imagination puissante qui ne raconte pas les histoires de tout le monde, qui écrit avec labeur et conviction des livres drus, imparfaits et beaux, et d’une saveur si forte que peu de personnes les goûtent du premier coup. […] Je ne parlerai pas du beau roman de mœurs ecclésiastiques où M. […] Parmi tant de belles et vivantes figures ecclésiastiques, je n’en prendrai que quatre : du côté des saints, l’abbé Courbezon et l’abbé Célestin ; du côté des ambitieux et des violents, l’abbé Capdepont et l’abbé Jourfier. […] Mais Sévéraguette a deux amoureux, Fumat et Pancol ; et, comme ce ne sont pas des paysans de bergerie, Pancol, une belle nuit, se débarrasse de Fumat ; peu après, voyant les écus de Sévéraguette fondre à la cure, il guette un soir le curé et s’apprête à l’envoyer rejoindre Fumat ; mais le pauvre saint homme, qui a le poing lourd, assomme son agresseur en se défendant. […] Certes, c’étaient toujours les belles lignes sculpturales, pleines de noblesse, qui nous ont arrêté dès le commencement de cette étude… » Cette espèce d’ingénuité s’explique par la vigueur même et la profonde sincérité de la conception.
Il ne cherchait qu’une porte pour sortir : la mort du duc d’Enghien lui en offrait une, belle et magnifique, une sortie éclatante, comme il les aimait ; il n’y résista pas, et, le lendemain de cette démission, il se trouva, on peut l’affirmer, bien autrement royaliste qu’il ne l’avait jamais été jusque-là. […] Aujourd’hui les mâles occupations qui remplissaient l’existence d’un Romain, et qui rendent la carrière d’un Anglais si belle, s’offriront à nous de toutes parts. […] il a eu sa part, ce qu’il voulait avant tout, les plus beaux rôles, et le plaisir d’en faire fi, et de dire qu’il en aurait eu un bien plus beau encore si l’on avait voulu. […] La Restauration tombée, M. de Chateaubriand, dans cet amour des beaux rôles, crut se devoir à lui-même de lui demeurer fidèle, tout en proclamant, dans l’oraison funèbre qu’il prononça sur elle à la Chambre des pairs, qu’elle s’était perdue par la conspiration de l’hypocrisie et de la bêtise. […] Ceux pourtant qui continuent d’aimer les phrases, les belles pensées détachées, les fragments spécieux de théorie, les prédictions inutiles et frappantes, les fantaisies poétiques dont on peut faire collection, trouveront amplement encore, en le lisant, de quoi se satisfaire ; mais les esprits qui demandent de la suite, de la raison, un but, quelque conséquence dans les actes et dans la conduite, savent désormais à quoi s’en tenir sur la valeur de l’écrivain éminent qui, avec de si hautes parties, n’a été en politique qu’un grand polémiste toujours personnel, et un agent lumineux de dissolution.
(Voir aussi contes de Grimm et La belle au bois dormant). […] Ntyi vainqueur du boa — La femme de l’ogre — La protection des djihon — Le cheval noir et Die Bienenkoenigin (Bechstein et Grimm) (Cf. aussi La belle aux cheveux d’or.) […] La Fontaine (Fables) —La biche au bois — La belle au bois dorman. […] La belle aux cheveux d’o. […] Pas de meurtres simulés dont l’exécution serait prouvée par la présentation des organes de certains animaux, comme on le voit dans Geneviève de Brabant, Camaral-zaman (1001 nuits) ou la 2e partie de la Belle au bois dormant (épisode d’Aurore et du petit Jour).
Toute littérature qui voudra mériter le beau nom de populaire, doit être inspirée par l’amour du peuple. […] Le combat intérieur qui la précède est plus magnifique encore, et il est conduit, ravivé, mené à son terme avec un art prodigieux. » De nos jours, un critique, l’un des plus sagaces et aussi l’un des plus sévères qui aient jugé Victor Hugo, — j’ai nommé Edmond Biré, — n’hésite pas à écrire ces lignes : « Si les Misérables avaient été continués et terminés dans le même esprit qui avait présidé à leur conception ; s’ils n’avaient pas été dénaturés, envenimés par les passions de l’auteur devenu démagogue et socialiste ; s’ils n’avaient pas été démesurément enflés par des épisodes qui débordent le cadre primitif, … l’œuvre du poète, qui reste encore très puissante et très belle, serait la plus admirable qu’il eût écrite, une des plus belles de notre littérature. » Tout le monde connaît la thèse, l’idée maîtresse des Misérables. […] Payez-nous. » Le fonctionnaire réplique : « Bel argument ! […] Ceux qui bâtissaient les cathédrales, les sculpteurs et les verriers qui les faisaient si belles, je veux bien qu’ils eussent l’intention d’honorer le ciel, mais ils voulaient aussi orner la terre, et ravir les yeux des hommes. […] On peut souhaiter surtout que des hommes nouveaux, sur qui n’aura pas pesé le joug des écoles anciennes, comprennent la mission très belle qui s’offre à eux.
Il est bien certain qu’on n’écrit pas des mémoires pour s’humilier ni pour se donner tort ; même lorsqu’on a l’air de vouloir confesser ses défauts, on a soin de les montrer par le beau côté. […] Mais, pendant l’expédition, survint une dépêche de la Cour, par laquelle Joyeuse apprenait que le vent avait tourné et que Henri III refaisait la guerre au roi de Navarre et à ceux de son bord : s’adressant à Rosny qui était présent quand le paquet arriva, il lui dit en riant qu’il espérait bien que cela ne changerait rien à son projet, et qu’il ne serait pas assez fou pour s’embarquer avec le roi de Navarre et perdre de gaieté de cœur sa belle terre de Rosny. […] Une bonne parole, une gaieté du roi le rappelle et le remet en belle humeur. […] Revenant alors en toute hâte, Rosny et ses compagnons trouvent le roi réveillé, « se promenant dans un jardin et venant de hocher un prunier de damas blanc, qui portait les plus belles et meilleures prunes (à ce que vous me dîtes me contant tout ceci, écrit le fidèle secrétaire), que vous ayez jamais mangées ; auquel, en l’abordant, vous criâtes : “Pardieu, sire, nous venons de voir passer des gens qui semblent avoir dessein de vous préparer une collation de bien autres prunes que celles-ci, et un peu plus dures à digérer, si vous ne montez promptement à cheval pour aller donner ordre à votre armée…” ». — Toute cette scène, le cri soudain de Henri IV, « Des chevaux ! […] C’est ce qu’il fit dans le cas présent : sa réponse à Henri IV est très belle politiquement.
La correspondance, commencée en mai 1761, pendant les beaux jours du ministère de M. de Choiseul, se continue et dure sans interruption, sans ralentissement, jusqu’au 20 août 1780, un mois avant la mort de Mme du Deffand. […] Et encore, dans une des lettres suivantes : La duchesse de Choiseul n’est pas très jolie, mais elle a de beaux yeux ; c’est un petit modèle en cire, à qui l’on n’a point permis pendant quelque temps de parler, l’en jugeant incapable, et qui a de la timidité et de la modestie : la Cour ne l’a pas guérie de cette modestie ; la timidité est rachetée par le son de voix le plus touchant, et se fait oublier dans le tour élégant et l’exquise propriété de l’expression. […] Mais comme, d’un autre côté, la cause en est belle, j’écarte comme je puis ces idées, et je me laisse entraîner par ma destinée. […] On a beau dire et faire pour la rassurer, pour la calmer ; Mme de Choiseul a beau lui insinuer ses excellents préceptes de sagesse pratique : « En fait de bonheur, il ne faut pas chercher le pourquoi ni regarder au comment ; le meilleur et le plus sûr est de le prendre comme il vient.
Elle me peint l’avenir de la France et de l’humanité en beau. […] Et cette page encore (car aux incrédules il faut des preuves), ce début de lettre à Mme Cauchois-Lemaire, pour un autre anniversaire de naissance, le jour où il a ses 54 ans, un bel âge assurément : « J’ai à dîner, ce triste jour, quelques vieux amis, les seuls qui vous pardonnent de vieillir, parce qu’eux-mêmes ne sont plus jeunes. […] La science m’a toujours manqué : l’instinct du bon et du beau m’en a quelquefois tenu lieu, et, si je ne craignais d’être accusé de vanité, je dirais qu’il m’a fait, dans mes bons jours, aller en avant de la science. […] C’est une belle variante de ce mot des plus doctes et des plus humbles : O Altitudo ! […] » On ne saurait mieux dire. — Tout ce qui a touché au romantisme, du temps des belles ardeurs, doit lui savoir gré de la manière dont il remet au pas une de ses plus vieilles connaissances, un classique maussade et saugrenu, à qui l’envie était venue un peu tard d’entrer en lice, satire ou comédie en main, et de pulvériser les modernes.
« Nous avions beau nous attendre, écrivait-elle à sa mère, à l’événement devenu inévitable depuis deux jours, le premier moment a été atterrant, et nous n’avions pas plus l’un que l’autre de parole. […] Au moment le plus beau et le moins endommagé encore de son règne, Louis XVI, pénétré de la lecture des Voyages de Cook et jaloux pour la France de cette gloire des conquêtes géographiques, voulut donner lui-même à Laperouse, en le chargeant d’une expédition lointaine, des instructions en quelque sorte morales, et, dans sa sollicitude de philanthrope, il les rédigeait ainsi : « Si des circonstances impérieuses, qu’il est de la prudence de prévoir, obligeaient jamais le sieur de La Peyrouse à faire usage de la supériorité de ses armes sur celles des peuples sauvages, pour se procurer, malgré leur opposition, les objets nécessaires à la vie, telles que des subsistances, du bois, de l’eau, il n’userait de la force qu’avec la plus grande modération et punirait avec une extrême rigueur ceux de ses gens qui auraient outrepassé ses ordres. […] Elle disait de lui cette belle parole : « Son estime est ma protection. » Détail singulier pourtant, presque incroyable et inimaginable, mais qui depuis la publication des Mémoires de Mme Campan est devenu l’un des points avérés de l’histoire : après six ou sept ans de mariage, Marie-Antoinette n’était pas encore mère et n’avait pas lieu d’espérer de l’être. […] Feuillet de Conches, Joseph II écrivait à Louis XVI avec une véritable cordialité et de l’effusion : « Vous savez que je ne suis pas un diseur de belles phrases ; mais ce n’en sont certainement point, si je vous assure que je vous aime de tout mon cœur et que mon estime et amitié la plus sincère vous sont vouées pour la vie. […] Le personnage au-dessus de moi n’en est pas en état, et moi, quelque chose qu’on dise et qui arrive, je ne suis jamais qu’en second ; et malgré la confiance du premier, il me le fait sentir souvent. » Nous dirons les belles qualités de Marie-Antoinette, son courage surtout, sa fermeté, sa générosité d’âme quand le moment sera venu ; mais ici on la surprend dans toute la misère et l’inexpérience de son apprentissage politique.
Au retour du printemps, dès que la terre ne suffisait plus à ceux qui en vivaient, dès que la famille humaine devenait trop nombreuse, un essaim de jeunesse prenait son essor et s’envolait à la découverte, à l’aventure, vers des pays ou le soleil s’annonçait plus beau. […] C’est aussi, avec les progrès amenés par le temps, c’est la méthode de Volney, en son beau Voyage de Syrie et d’Égypte, que je retrouve appliquée dans l’ouvrage de M. […] Notre conquête de l’Algérie lui a fourni une belle matière et un point de mire excitant. […] Duveyrier a tracé de lui une vie abrégée et un beau portrait en ces termes : « … Héritier de la réputation de ses ancêtres, Othman, dès son enfance, s’est fait remarquer par sa perspicacité. […] Il est vrai qu’il suffit de quelques journées de pluie abondante (le voyageur en fut témoin) pour transformer de vastes espaces, nus la veille, en pacages de la plus belle verdure.
Cet historien avait fait ses preuves d’avance et comme gagné son titre en tirant des papiers conservés dans le Dépôt de la guerre sa belle et solide Histoire de Louvois. […] Appelé au Conseil et ministre d’État depuis 1743 et pendant treize années, il donnait de bons avis, il avait de belles maximes et, ce qui était déjà à la mode, il trouvait, au sujet des affaires du Parlement et sur ces interminables conflits où il y avait matière à popularité, des paroles et des démonstrations de citoyen. […] Saint-Simon nous l’avoue, il fut charmé, ensorcelé par ce beau diseur : il s’employa à le servir avec feu ; il brisa pour lui la glace et le mit en bons rapports avec M. de Beauvilliers qui était l’entrée de faveur auprès du Dauphin ; plus tard il ne travailla pas moins à l’ancrer auprès du duc d’Orléans et à le faire un des présidents des Conseils pour la prochaine Régence. […] De quelque côté qu’on la prenne et qu’on essaye de la retourner, l’action n’est pas belle ; c’est une perfidie, et si l’espèce de fureur dont est saisi Saint-Simon toutes les fois qu’il y revient peut faire sourire, n’oublions pas qu’il est meilleur juge que personne de la noirceur du tour, puisqu’il savait seul à quel semblant de bonne grâce, d’émotion et de tendresse à son égard s’était portée, dans le tête-à-tête, la reconnaissance du duc de Noailles pour les offices généreux qu’il lui avait rendus. […] Et que l’on croie, après cela, aveuglément aux paroles écrites du duc de Noailles, et que l’on s’en tienne aux belles protestations enregistrées dans ses Mémoires.
« Écoutez, consultez votre Conseil, mais décidez. » Toute cette suite d’avis et de vues, proposés d’abord par le maréchal de Noailles au roi en plusieurs Mémoires ou lettres développées, est à la fois fort sensée et fort noble, donnée dans un assez beau langage, qui a de l’ampleur et sent son Louis XIV. […] Louis XV lui-même le savait ; il donne implicitement raison à ce jugement de Mme de Tencin dans les lettres qu’il écrit au maréchal de Noailles, et comme ce dernier avait allégué à l’appui de son opinion celle du comte de Saxe, lequel, tout attaché qu’il était au maréchal de Broglie, disait ne rien comprendre à sa conduite, le roi répond : « Il n’est pas étonnant que le comte de Saxe n’ait pu se persuader ce qui est ; tous ceux qui n’ont pas vu le dessous des cartes sont dans le même cas, et effectivement cela est incroyable ; pourtant l’on dit déjà qu’il (le maréchal de Broglie) a sauvé l’armée par cette belle retraite ; mais j’en dirais trop et en ferais trop, si je me laissais gagner à ma mauvaise humeur ; mais vous savez que je n’aime pas les grandes punitions, et que souvent, en punissant peu et en récompensant de peu, nous en faisons plus qu’avec les plus grandes rigueurs et les plus lucratives récompenses. » Louis XV couvre ici sa faiblesse d’une belle maxime qui n’a pas son application ; pour produire tant d’effet avec un simple remuement de sourcils, il n’avait pas encore assez fait ses preuves de roi. […] Cette dernière affaire notamment, cette belle occasion manquée en Alsace et la fâcheuse impression qu’on en reçut à Paris, sont bien senties et rendues. — Un contrôle d’un tout autre ordre et qui se rapporte à l’histoire la plus sévère, à la science même, nous est fourni par la Relation de la Guerre de Succession, que le général Jomini a ajoutée à celle de la Guerre de Sept ans, dans la 4e édition de son Traité des grandes Opérations militaires. […] Et pourtant tous les contemporains qui en valent la peine sont d’accord là-dessus : le maréchal est homme à donner d’admirables conseils, même au comte de Saxe (voir Lettres et Mémoires tirés des papiers de ce dernier) ; il a de l’entrain quand il écrit ; il appelle le maréchal de Saxe son fils : il a des effusions et des démonstrations qui ne déplaisent pas : mais en tout il écrit mieux qu’il n’agit, ; il fait de beaux mémoires pour justifier ses lenteurs (Journal du duc de Luynes, tome VI, page 73) ; il a des quantités de projets et des infinités d’idées à la fois, qui donnent de l’éblouissement et qui se nuisent (ibid.
L’abbaye donnait un beau logement à Paris et un aux champs, qui était le château de Berny : c’est ainsi que la respectable villa abbatiale devint, trente années durant, la maison de plaisance du comte de Clermont, son lieu de délices, le Choisy et le Bellevue de Mlle Leduc, qui en faisait les honneurs sous le nom de la dame de Tourvoie (Tourvoie était un petit castel tout voisin de Berny). […] On a beau être modéré par nature, un jour ou l’autre la tentation est la plus forte, et l’on y succombe. […] Le public sera le sol de cette affaire, car quand un prince est brave et s’expose, lui qui pourrait s’en dispenser par sa qualité d’abbé de Saint-Germain-des-Prés, il lui est permis de faire ce qu’il veut à la ville, sans que de petits particuliers, qui auraient peur d’une fusée dans les rues, ou des femmes qui enragent de voir une fille dans une belle calèche, soient en droit d’y trouver à redire. » Bravo, monsieur Prudhomme ! […] Lœwendal à pied, braquant sa lunette, lui répondit : « Vous savez les ordres de M. le maréchal ; nous les avons remplis ; il faut attendre l’effet des attaques de la gauche. » — « Mais si notre gauche n’attaque pas, répliqua le comte d’Estrées, nous manquons une occasion unique ; le jour s’avance, nous donnons à l’ennemi tout le temps de se rassurer, et la nuit couvrira sa retraite. » — « Voilà de beaux raisonnements, dit Lœwendal ; mais vous êtes aux ordres du prince, et je suis votre ancien. » — « Oui, dit le comte d’Estrées, je suis le cadet, dont j’enrage, mais je suis Français », en se retirant furieux de colère. […] « Mademoiselle de Sens, disait-il, possédait une île de la Seine près Puteaux ; elle y passait quelques semaines dans la belle saison, et aimait à se baigner pendant les chaleurs.
J’accorde qu’ils sont rares — comme tout ce qui est vraiment beau. […] En même temps que des romans qui ne choquent personne, des romans dont les vieilles revues proclament l’élégance, il fait de la critique, de cette bonne critique « courtoise » qui conquiert successivement les éloges des gens influents, la légion d’honneur, les prix à l’Académie et, un beau jour, l’Académie elle-même. […] Voici une de ses meilleures phrases, une des vingt qui paraîtront belles à la lecture sommeillante d’un voyageur de sleeping-car : « Comme les conquérants qui agrandissent leurs conquêtes par l’imagination, il faisait du présent victorieux le piédestal d’un avenir de gloire. » Il n’est pas besoin d’un psychologue profond (Paul Bourget lui-même suffirait à la tâche) pour remarquer qu’aux yeux d’un jeune ambitieux l’avenir n’est pas une statue précise, mais une succession de degrés qu’une lumière de féerie soulève l’un après l’autre et où monte un vertige joyeux. […] Il épouse la veuve belle et riche. […] s’écrie un solliciteur comblé, mais une bougie de l’Étoile… C’est un cierge, un vrai cierge… » Toutes ces belles choses nous sont dites dans la langue la plus plate, la plus encombrée et la plus impropre.
Rousseau est le premier qui ait forcé tout ce beau monde d’en sortir, et de quitter la grande allée du parc pour la vraie promenade aux champs. […] Il aura sans doute de délicieux moments alors et depuis jusqu’à la fin ; il retrouvera dans l’île de Saint-Pierre, au milieu du lac de Bienne, un intervalle de calme et d’oubli qui lui inspirera quelques-unes de ses plus belles pages, cette cinquième promenade des Rêveries, qui, avec la troisième lettre à M. de Malesherbes, ne saurait se séparer des plus divins passages des Confessions. […] Ce n’est qu’alors, nous assure-t-il, « quand il faisait route à pied, par un beau temps, dans un beau pays, sans être pressé », ayant pour terme du voyage un objet agréable qu’il ne se hâtait pas trop d’atteindre, c’est alors qu’il était tout entier lui-même, et que les idées, froides et mortes dans le cabinet, s’animaient et prenaient leur essor en lui : La marche a quelque chose qui anime et avive mes idées ; je ne puis presque penser quand je reste en place ; il faut que mon corps soit en branle pour y mettre mon esprit. […] Qu’on se rappelle cette nuit qu’il passe à la belle étoile au bord du Rhône ou de la Saône, dans un chemin creux près de Lyon : Je me couchai voluptueusement sur la tablette d’une espèce de niche ou de fausse porte enfoncée dans un mur de terrasse ; le ciel de mon lit était formé par les têtes des arbres ; un rossignol était précisément au-dessus de moi, je m’endormis à son chant ; mon sommeil fut doux, mon réveil le fut davantage. […] S’il lui manque par moments une plus chaude lumière et les clartés d’Italie ou de la Grèce ; si, comme autour de ce beau lac de Genève, la bise vient quelquefois refroidir l’air, et si quelque nuage jette tout à coup une teinte grisâtre aux flancs des monts, il y a des jours et des heures d’une limpide et parfaite sérénité.
« Elle était jeune, belle, de beaucoup d’esprit, avec beaucoup de monde, de grâce et de langage. » Elle recourut à la protection des cardinaux français, dont plus d’un ne fut pas insensible. Saint-Simon, qui nous l’a peinte à ravir dans sa première forme, nous la montre encore dans le plein de sa beauté et dans la grandeur de sa représentation, qu’elle sut soutenir à travers toutes les fortunes : C’était une femme plutôt grande que petite, brune avec des yeux bleus qui disaient sans cesse tout ce qui lui plaisait, avec une taille parfaite, une belle gorge, et un visage qui, sans beauté, était charmant ; l’air extrêmement noble, quelque chose de majestueux en tout son maintien, et des grâces si naturelles et si continuelles en tout, jusque dans les choses les plus petites et les plus indifférentes, que je n’ai jamais vu personne en approcher, soit dans le corps, soit dans l’esprit, dont elle avait infiniment et de toutes les sortes ; flatteuse, caressante, insinuante, mesurée, voulant plaire pour plaire, et avec des charmes dont il n’était pas possible de se défendre quand elle voulait gagner et séduire ; avec cela un air qui, avec de la grandeur, attirait au lieu d’effaroucher ; une conversation délicieuse, intarissable, et d’ailleurs fort amusante par tout ce qu’elle avait vu et connu de pays et de personnes ; une voix et un parler extrêmement agréables, avec un air de douceur ; elle avait aussi beaucoup lu, et elle était personne à beaucoup de réflexion. […] « C’était un beau et grand drôle très bien fait et très découplé de corps et d’esprit », et non une « bête brute », comme dit Louville. […] Une de ses plus belles lettres est adressée au ministre M. de Torcy, à la date du 6 novembre 1705. […] Mme de Maintenon, en effet, qui, avec son bon esprit, se tourmentait et se lamentait toujours, lui faisait un perpétuel éloge de cette tranquillité naturelle qu’elle enviait, de ce courage mêlé d’aimable humeur, de cette douceur et de ce beau sang qui ne laissait rien d’âpre et de chagrin en elle .
Il y a une manière plus poétique, plus généreuse peut-être, plus magnifique, qui consisterait à voiler les défauts, à faire ressortir les belles et grandes qualités, à l’en envelopper et à l’en couvrir, à l’accepter selon l’attitude si chevaleresque et si fière dans laquelle il aimait à se présenter à tous, à ses amis, au public, aux adversaires, et dans laquelle la mort l’a saisi. […] Parlant du beau caractère de ce colonel piémontais Pacchiarotti, qui avait succombé devant Figuières dans sa protestation impuissante pour les souvenirs de l’Empire : Les choses, disait Carrel, dans leurs continuelles et fatales transformations, n’entraînent point avec elles toutes les intelligences ; elles ne domptent point tous les caractères avec une égale facilité, elles ne prennent pas même soin de tous les intérêts ; c’est ce qu’il faut comprendre, et pardonner quelque chose aux protestations qui s’élèvent en faveur du passé. Quand une époque est finie, le moule est brisé, et il suffit à la Providence qu’il ne se puisse refaire ; mais des débris restés à terre, il en est quelquefois de beaux à contempler. […] Pour mieux dégoûter du suicide, l’ami ne craint pas de nous montrer l’impression d’horreur que cause même aux indifférents la vue d’un homme jeune et beau, d’une noble créature qui a ainsi attenté contre elle-même, et qui a tout fait pour dégrader et dévaster son image (jusque dans les traits qu’une mort ordinaire et naturelle sait respecter. […] C’est un bel article, sombre, fier, tendre sans faiblesse, moral sans déclamation, et comme avait seul le droit de l’écrire un homme qui avait sondé la vie et vu plus d’une fois en face la mort. — J’ai suivi jusqu’à présent Carrel un peu au hasard, et je me suis essayé comme lui : j’ai hâte de me recueillir à son sujet et de rejoindre sa vraie ligne, comme il fit bientôt en devenant tout à fait lui-même.
Avant 1815, on a un autre Courier, qui a devancé l’autre et qui l’explique, mais qui n’a rien encore de l’homme de parti ; soldat déjà trop peu discipliné sous la République, devenu incompatible et tout à fait récalcitrant sous l’Empire, mais curieux de l’étude, amateur du beau en tout ; un Grec, un Napolitain, un Italien des beaux temps, le moins Gaulois possible ; s’abandonnant tant qu’il peut à tous les caprices de sa libre vocation ; indépendant avec délices ; délicat et quinteux ; misanthrope et pourtant heureux ; jouissant des beautés de la nature, adorant les anciens, méprisant les hommes, ne croyant surtout pas aux grands hommes, faisant son choix de très peu d’amis. […] Que Courier laisse donc l’histoire à laquelle il n’a pas confiance et qui est trop vaste pour lui ; mais l’art, mais la nature, mais le beau sous la forme classique et antique, voilà à quoi il excelle. […] Il vit dans ces beaux lieux, il s’y naturalise, il s’y oublie ; et, dès qu’il a quitté son « harnais », comme il dit, et laissé son vil métier, il retourne y vivre et y passer les dernières années de la sécurité et du loisir (1810-1812). […] [NdA] La colonne Trajane elle-même l’avait échappé belle ; on avait songé à l’enlever et à la transporter à Paris.
Près d’un siècle avant, le Voyage de Charlemagne avait amusé Paris et l’Ile-de-France ; c’est un poème, presque parodique, d’une belle langue et d’une versification sûre : douze syllabes et la césure médiale : Trancherai les halbers | et les helmes gemez Aux mêmes époques, un vers latin était fort usité par les poètes de cloître ou de grand chemin : Plena meridie | lux solis radiat. […] Sa mère l’aime, et rit ; elle le trouve beau. […] La belle laine d’or que le safran jaunit. […] Mais ce qui donne à son alexandrin un ton si nouveau, c’est qu’il est presque toujours incomplet ; dans la si belle prière C’est la fête du blé, si on laisse de côté la dernière strophe volontairement écrite en vers pleins, sur seize vers il y en a deux de dix syllabes, cinq de douze, et neuf de onze ; dans la pièce xvi (Sagesse) sur douze vers, il n’y en a que trois de réguliers. […] Ou bien ce sera un rythme dont les brisures multipliées sembleront à merveille adoptées à une idée de légèreté et de grâce : L’universel baiser court sur les hautes tiges comme un menu vol de papillons, tendresse brève, espoir long sur la plaine humaine voltigent coquelicots, pivoines, pavots, l’heur est léger, longue est la peine mais partout partent les pollens pour de futurs étés toujours beaux.
Je n’en vois qu’un seul où une marâtre ait le beau rôle. […] Il ne lui demande que de rester belle. […] Chez eux ils regardent comme les plus beaux et les plus belles ceux dont les traits du visage et la couleur de la peau se rapprochent le plus de la race blanche ». […] Dans le conte de Bilâli encore, deux des personnages, Bilâli et Sanio, promettent leur vie contre la possession éphémère de la femme désirée ; un troisième fait cet échange contre des bœufs et un beau cheval.
… Il a les jambes du paon mais il n’en a pas la queue, et cependant il ne se plaint ni à Junon, ni à personne ; car il a fait un assez beau chemin sur ces jambes-là. […] Pauvre homme maltraité et vexé, il se contente de grogner éternellement contre sa belle, d’un grognement monotone qui n’a jamais pu l’amener à changer de façons et à devenir bonne fille pour lui, seulement une fois ! […] Pour être plus digne de lui, il veut qu’Henriette devienne une Bélise, et cette nature de Trissotin, qui n’a cessé d’exister, tant qu’il vécut, en Mérimée, malgré ses airs d’homme du monde en cérémonie et de dandy dégoûté, est encore la meilleure raison pour qu’il n’ait jamais été capable de ce bel oubli de tout, excepté d’une seule chose, qu’on appelle l’amour ! […] Il est des gens qui peuvent tout dire, parce qu’ils relèvent tout et poétisent tout en l’exprimant, parce qu’ils jettent sur les moindres choses de la vie une couleur, un rayon, un charme ; mais ce n’a jamais été Mérimée, même par ses plus beaux jours de talent. […] C’est alors qu’on voit dans toute sa vérité, dans toute la naïveté première de sa nature, l’écrivain qui, dans son livre, fera le beau avec toutes les recherches de l’art et quelquefois de l’artifice.
Baudelaire, qui les a cueillies et recueillies, n’a pas dit que ces Fleurs du mal étaient belles, qu’elles sentaient bon, qu’il fallait en orner son front, en emplir ses mains, et que c’était là la sagesse. […] On a beau être un artiste redoutable, au point de vue le plus arrêté, à la volonté la plus soutenue ; et s’être juré d’être athée comme Shelley, forcené comme Leopardi, impersonnel comme Shakespeare, indifférent à tout excepté à la beauté comme Gœthe, on va quelque temps ainsi, misérable et superbe, comédien à l’aise dans le masque réussi de ces traits grimés ; mais il arrive que tout à coup, au bas d’une de ses poésies le plus amèrement calmes ou le plus cruellement sauvages, on se retrouve chrétien dans une demi-teinte inattendue, dans un dernier mot qui détonne, — mais qui détonne pour nous délicieusement dans le cœur : Ah ! […] l’autre enfer était plus beau sans doute. […] D’un autre côté, L’Enfer du Dante, pour être plus beau, est aussi un poème, dans toute la splendeur de cette difficulté immense et vaincue, écrit en tercets qui ressemblent à des rayons tordus de foudre, de soleil et de lune, tandis que Les Paradis artificiels de Baudelaire sont un livre de prose, de description et d’analyse psycho-physiologique qu’il a faits sur souvenir, absolument comme un naturaliste étudie à la loupe les fibrilles d’une feuille de mûrier. […] Otez de ce livre de Quincey, que Baudelaire invente et vante, quelques fragments où le traducteur se sent par-dessus le traduit, par exemple : Les Trois NotreDames de tristesse, dont le développement allégorique est très beau et très poignant, et vous n’avez plus dans ce mangeur d’opium, — qui est plus intéressant quand il parle de lui sans opium que quand il s’en bourre des huit mille gouttes, — vous n’avez plus qu’un humouriste, hâve et déformé, du pays des humouristes noirs.
Cela est aussi beau qu’une formule de Newton. […] On est content de voir cette belle source jaillir abondamment, à flots clairs et rapides, et lancer son eau impétueuse entre les rives solides du lit le plus régulier et le mieux construit. […] Personne n’eut une plus belle armée pour faire la conquête des opinions humaines. Personne n’eut une plus belle occasion pour faire la conquête des opinions françaises. […] Au printemps, que les clairières sont belles !
Le beau livre ! […] Le beau style ! […] Son premier livre est beau et restera. […] Quand un beau tableau est brûlé, sa beauté ne subsiste plus. […] Vous avez beau regarder votre bras, connaître les muscles convenables, leur donner ordre, vouloir atteindre le but, si vous ne voulez rien d’autre, vous n’atteindrez pas le but avec cette pierre.
Ils étaient couverts de belles figures peintes, brodées. […] Ce n’est point Palafox qui menait les affaires et les esprits à Saragosse ; Palafox est un jeune homme de vingt-huit ans, fort beau, sans expérience. C’était un chanoine et un autre ecclésiastique qui avait été précepteur de Palafox, qui gouvernaient la canaille et la convoquaient au son de la cloche en assemblée générale ; à la fin du siège, la cloche avait beau sonner, il ne venait plus personne100. […] le général thiébault, à moi. — Il avait là une belle à qui il donnait des sérénades en plein jour !
J’aurais eu regret cependant que l’auteur eût complètement supprimé dans le volume offert à notre public deux ou trois morceaux. « La crise de la foi » est un beau chapitre intérieur, et qui rappelle, à quelques égards, le touchant monologue de Jouffroy au moment où il s’aperçut que la foi première sur laquelle il s’appuyait s’était écroulée dans son cœur. […] comme il s’en est bien corrigé, et que ceux qui lisent aujourd’hui son livre Du vrai, du bien et du beau, auraient peine à comprendre qu’il ait pu hésiter à se montrer à tous si naturellement éloquent ! […] le rideau va se déchirer ; le présent ne compte pas ; il marche dessus avec mépris, ce n’est que boue et fange : mais l’avenir, que ce sera beau ! […] La conclusion de ce beau travail de M.
Je connais que pauvres et riches, Sages et fols, prêtres et lais (laïques), Noble et villain, larges et chiches, Petits et grands, et beaux et laids, Dames à rebrassés (hauts et plissés) collets, De quelconque condition, Portant atours et bourrelets, Mort saisit sans exception. Et mourut Pâris et Hélène…… Puis vient la fameuse ballade : Dites-moi où, n’en quel pays, Est Flora la belle Romaine, …. […] Qui aurait soutenu naguère que les Grecs appliquaient des couleurs vives sur certaines parties de leurs statues et de leurs temples, on eût ri de son absurde croyance : on lui eût répondu qu’évidemment ce badigeonnage était indigne du sentiment esthétique de ce peuple d’artistes, qu’ils ne pouvaient pas gâter ainsi la pure blancheur du marbre, si simplement belle : cela était évident alors, et pourtant c’était faux ; et les faits sont venus depuis témoigner en faveur de la polychromie. […] Il y a là, si l’on veut, une sorte de contradiction nécessaire et innocente, qui fait que le pessimiste, épris du néant, a droit de vivre, de jouir, d’aimer les bonnes et belles choses ; que le déterministe délibère tout comme le croyant au libre arbitre, et accepte devant les hommes la responsabilité de ses actes : tout comme on se sert dans le langage de mots et d’images qui impliquent mille croyances et une conception de l’univers que nos pères des antiques tribus aryennes s’étaient faites, et que nous avons réformées depuis des siècles.
Mais, j’ai beau faire, rien ne me semble moins chrétien que le catholicisme de M. d’Aurevilly. […] » — « Elle était jeune, riche, d’un nom superbe, belle, spirituelle, d’une large intelligence d’artiste, et naturelle avec cela, comme on l’est dans votre monde, quand on l’est … » Mais cette illusion se rattache à une autre plus générale et qui a été celle de tous les romantiques. […] Il a beau avoir de terribles trompettes dans la voix et faire des gestes tout à fait sublimes, je suis effrayé de voir à combien peu se réduit le noyau substantiel de ces œuvres redondantes. […] Et si c’est de l’héroïsme inutile et incompris, c’est d’autant plus beau.
C’est un beau type de gentilhomme que le comte de la Rivonnière. […] Il n’en reste plus qu’une belle ruine, au milieu de laquelle il tient toujours table ouverte. […] car les cinquante printemps de l’ancien beau reculent devant les quarante hivers de l’estimable matrone. […] Tout cela compose un dénouement honnête et cordial, qui efface, comme une belle larme tombant sur une tache, les situations pénibles au milieu desquelles la pièce s’est débattue si longtemps.
Les disputes du quiétisme, de l’amour pur & parfait, si humiliantes pour la raison humaine, auroient eu le même sort, sans le nom des personnages qui s’y trouvèrent entraînés ; Louis XIV, madame de Maintenon, & les deux plus beaux génies qui fussent alors dans l’église. […] Avec son beau systême de ne s’inquiéter de rien, elle n’avoit pas laissé d’agir & de se précautionner contre les orages qui la menaçoient. […] Des actions si belles furent empoisonnées. […] Les plus beaux tableaux furent jugés des portraits.
Certains censeurs austères de la poësie la rédoutent au point de compter, parmi les belles actions de leur vie, celle de s’interdire la lecture de tout poëte. […] Sa prose égale les plus beaux vers, & son Cantique est un chef-d’œuvre de versification. […] Rien ne lui paroissoit au-dessus de ce beau pays de Féerie. […] La princesse répondit en riant : Je n’ai pas baisé l’homme, mais la bouche qui a dit tant de belles choses.
Les prêtres s’en plaignirent, et leurs plaintes fondèrent un proverbe : « Cela est beau, disait-on ; mais on n’y voit rien de Bacchus. » L’embarras est de savoir comment Thespis imagina le premier cette ombre de la tragédie, si les chœurs ne lui en ont pas donné lieu. […] On a beau dire, la vue des misérables ne nous console point de l’être : sans compter que l’homme se porte avec soin à éviter, autant qu’il le peut, une si triste vue, pour jouir plus tranquillement des douceurs de la vie ; ou qu’il se rend dur et insensible sur les misères de ses pareils, oubliant qu’il est homme comme eux, et qu’il paiera chèrement de courtes joies par de longues douleurs. […] Car alors, non contents d’étudier la nature dans leur propre cœur, ils jugeaient de ce qui devait plaire par ce qui plaisait en effet, et se conformaient au goût des peuples pour suivre de plus près la nature, comme un sculpteur habile et éclairé étudie l’antique qui a plu, pour approcher de plus près du vrai beau qui doit plaire. […] Mais les tragédiens ont été obligés d’en rectifier l’art pour l’ajuster à la tragédie : il faut des coups de maître pour exposer heureusement un sujet sur le théâtre ; au lieu qu’il n’est besoin que d’une belle simplicité, qui toutefois est rare, pour commencer un poème épique.
Cette queue impérieuse qui commande à la tête dans tous les partis et qu’il a méprisée l’a, dit-on, accusé d’avoir fait trop belles certaines individualités catholiques, comme si lui, le plus vrai d’impression de tous les historiens, même quand il ne l’est pas d’appréciation raisonnée, ne les avait pas vues telles qu’il les a peintes, absous par cette pureté de vision qui est, hélas ! […] Dargaud : le sentiment d’un christianisme invincible à la raison qui a tué le christianisme, mais qui subsiste sur ses débris, et il faut y ajouter un second caractère qui particularise encore davantage l’auteur de l’Histoire de la Liberté religieuse : l’égalité des belles choses humaines, qu’elles soient protestantes ou catholiques, devant l’admiration, le respect et la pitié de l’historien ! […] L’homme, sa personnalité libre, sa moralité, son intellectualité, partout où ces choses-là sont belles, il les sent avec un tressaillement profond, infaillible, qui ne se dément ni ne se blase jamais, et il les exprime avec une émotion presque géniale de vérité et quelquefois presque sainte. […] En s’élevant, la belle proportion, qui fait sa personnalité, n’a pas été troublée, et, comme toujours, ici encore, autant que dans ses précédents ouvrages, l’âme est aussi élevée que le talent et l’homme égal à l’écrivain.
Ce discours vous déplaira fort, Et je confesse que j’ai tort De parler du soin de ma vie À celui qui n’eut d’autre envie Que de chercher partout la mort… Mais vous et moi, c’est bien différent, continuait agréablement Voltaire : si, en l’une de vos belles journées, un coup de canon vous avait envoyé chez Pluton, vous étiez sûr d’avoir toutes les consolations magnifiques qu’on décerne aux fameux capitaines : service solennel, oraison funèbre, et Saint-Denis peut-être au bout : Mais si quelque jour, moi chétif, J’allais passer le noir esquif, Je n’aurais qu’une vile bière ; Deux prêtres s’en iraient gaiement Porter ma figure légère Et la loger mesquinement Dans un recoin du cimetière. […] Il l’a montré sous son beau jour dans le Siècle de Louis XIV. […] Un dernier bonheur de Villars, c’est d’avoir inspiré une des dernières bonnes oraisons funèbres : celle que prononça l’abbé Seguy, à Saint-Sulpice, sans échapper aux inconvénients du genre, est remarquable du moins par un bel exorde d’un nombre et d’une pompe bien appropriés au héros.
Il n’était pas laid d’ailleurs ; « il avait un beau visage et une physionomie extrêmement prévenante, qui portait l’image de la candeur de son caractère. » Cette difformité de sa taille lui fut bien souvent reprochée. […] On aurait tort, sur ce début, de juger l’abbé de Pons un de ces guerroyeurs qui n’ont de plaisir qu’à frapper, qui n’entrent en lice que pour jeter les gens par terre, et à qui l’on peut opposer ce beau mot de Montesquieu, devise et louange de la vraie critique : « Ceux qui nous avertissent sont les compagnons de nos travaux. » Le gentil abbé se dessine mieux et avec son vrai caractère dans sa Lettre à Du Fresny. […] Mais comme de belles paroles d’un ancien viennent éclairer à propos les bonnes raisons d’un moderne !
J’en ai plus été affligé qu’étonné, quoique j’en aie été étonné un peu, surtout de la part de certaines personnes : on a beau se croire une grande expérience des hommes, on persiste à se faire et à rêver des exceptions exprès pour soi tout seul. — C’en est assez, mon cher Béranger, pour vous poser fort incomplètement une question que vous saurez mieux préciser que moi : « Que me reprochez-vous à votre égard ? […] Dans les divers projets dont vous m’avez autrefois entretenu, celui du roman populaire, d’un Gil Blas moral, m’a souvent souri, comme allant à merveille à votre rôle et devant compléter votre œuvre. — Il se prépare ici une saison assez littéraire, assez poétique même : nous allons avoir dans une quinzaine un volume lyrique de Hugo ; il y aura des vers d’amour ; malgré toutes les hésitations, il se décide à son coup de tête, et bien que ce soit une unité de plus qu’il brise dans sa vie poétique (l’unité domestiqueaprès à politique et la religieuse), peu importe à nous autres frondeurs des unités et au public qui ne s’en soucie plus guère : les beaux vers, comme seront les siens, je n’en doute pas, couvriront et glorifieront le péché. […] Ce poëme, que plusieurs ont lu tout entier manuscrit (5,000 vers, s’il vous plaît, auparavant 8,000, — 3,000 supprimés), ce poëme est beau, il renferme quatre ou cinq grands morceaux qui classeront Quinet parmi les poètes ; son style, comme vous le pensiez, y a gagné.
Gallus, l’ami de Virgile, les avait traduites ou imitées en vers latins, comme Virgile semble y faire allusion dans la belle églogue où il introduit son ami. […] C’est bien, c’est beau, un air de simplicité vient à propos s’ajouter à l’artifice ; mais qui osera dire que c’est là exactement le premier palais ? […] Voilà donc un genre qu’on était tenté de refuser à l’antiquité, et qui se retrouve à l’improviste entre les plus belles pages.
C’est un beau sang-froid ! […] Varin, conservateur à la bibliothèque de l’Arsenal, et nous y reviendrons peut-être quelque jour ; mais aujourd’hui il nous a paru utile de présenter isolément, et sans correctif, le spectacle d’une mort beaucoup moins belle, et qui, dans ses détails les plus domestiques (c’est le lot des monarchies absolues), appartient de droit à l’histoire. […] La duchesse du Maine avait parmi ses femmes cette spirituelle Delaunay qui a écrit : « Les grands, à force de s’étendre, deviennent si minces, qu’on voit le jour au travers ; c’est une belle étude de les contempler, je ne sais rien qui ramène plus à la philosophie. » Et encore : « Elle (la duchesse du Maine) a fait dire à une personne de beaucoup d’esprit que les princes étaient en morale ce que les monstres sont dans la physique : on voit en eux à découvert la plupart des vices qui sont imperceptibles dans les autres hommes. » C’est en effet dans cet esprit qu’il faut étudier les grands, surtout depuis qu’on a appris à connaître les petits : ce n’est pas tant comme grands que comme hommes qu’il convient de les connaître.
A peine remise des attentats et des vengeances de prairial, privée d’un grand nombre de ses membres condamnés ou compromis, et aussi mutilée qu’au plus fort de la Terreur, la Convention avait repris son rôle paisible d’Assemblée législative, et la Commission des Onze lui présentait cette belle et sage Constitution de l’an III, qui devait pacifier la France, si la France alors avait pu être pacifiée par une Constitution. […] A quelle époque notre patrie fut-elle plus belle et plus grande ? […] S’abandonnant à la facilité de son esprit et à l’entraînement des choses, il jette, en courant, de grands tableaux, de belles couleurs, d’admirables traits ; mais il ne compose pas, et, dans ses pages les plus pleines de vie, on sent toujours je ne sais quoi d’épars et d’inachevé : on dirait par moment l’insouciance de M. de Lamartine.
Hâtons-nous, pendant que nous le pouvons encore, de signaler à l’attention de nos lecteurs ces deux derniers volumes, qui complètent la belle et patriotique histoire de M. […] Du moins nos pères furent bien excusables de s’y méprendre, et il est beau de voir avec quelle indulgence, dictée par une raison impartiale et supérieure, le jeune historien leur pardonne de s’être jetés dans fies bras du héros, et de s’être laissé enivrer à tant de gloire. […] Signalons surtout une belle description de l’Égypte.
Mais cette espèce de travail minutieux et attentif de physiologie sociale, qui consisterait à chercher, même à travers les moindres rameaux, la circulation souvent insaisissable de chaque idée, à démontrer le cours de ce chyle subtil et nutritif jusqu’à son arrivée à un système de vaisseaux évident, à y mesurer la proportion dans laquelle il s’y mêle avec les éléments antérieurs et moins virtuels, ce travail-là, qui serait, en ce qui concerne le xviiie siècle, le sujet de plusieurs beaux mémoires à faire, n’entrait pas dans le dessein de M. […] Lerminier, doué comme il l’est d’une intelligence vaste et progressive, tendant, comme il le fait, à une œuvre d’avenir où un si beau rang l’attend et où il convie en toute occasion avec tant d’ouverture de cœur ses contemporains amis et les générations plus jeunes dont il est un des maîtres, M. […] En terminant dignement toute la première partie de l’œuvre de l’auteur, la partie d’essai, de revue critique, d’introduction et de prolégomènes, l’ouvrage présent donne de belles assurances pour le développement qui doit suivre.
Quand Jules Favre, plaidant pour un critique sévère par lequel un peintre de portraits se prétendait diffamé, disait : « Voici un écrivain assis sur le banc des criminels pour avoir trouvé que le bras de Medina-Cœli n’était pas assez accusé, et que sa robe était trop belle », l’accusation ainsi énoncée était plus qu’à demi réfutée, et il enlevait à l’adversaire l’usage de tous ces lieux communs sur le respect dû aux personnes et sur les empiétements de la critique, qui pouvaient faire impression sur le tribunal. […] Deux ans après, Ingolstetetus, autre savant, écrit contre le sentiment que Rullandus avait de la dent d’or, et Rullandus fait aussitôt une belle et docte réplique. […] Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu’il fût vrai que la dent était d’or.
Il est très vrai qu’il y a des esprits d’une malheureuse fécondité, qui savent parler avant d’avoir pensé, échauffés de je ne sais quelle chaleur, qui emporte leur langue ou leur plume d’une folle et infatigable allure : n’ayant pas toujours le temps de se rendre compte de ce qu’ils disent, confiants en leur démon et dans la bonne foi du public, qui saura bien y trouver un beau sens. […] Théophile était plus poète que Malherbe, mais Malherbe composait : Théophile jetait sur le papier tout ce que sa fantaisie créait, et, sous prétexte de libre inspiration, noyait son talent dans la facilité et ses beaux vers dans le fatras. Un moindre génie, qui sait ordonner ses inventions, touche plus sûrement le but, fait une œuvre plus forte et plus belle qu’un grand esprit qui dédaigne ce soin asservissant.
Francis Vielé-Griffin Pour Verhaeren, aujourd’hui en plein épanouissement de son beau génie, le titre de grand poète est un strict qualificatif. […] Le beau jardin, l’éternel Éden les entoure, son amante et lui, et il dit doucement la beauté, la bonté de l’aimée ; il la remercie d’être venue à lui ; il énumère les joies de cœur et de chair qu’elle lui donne ; il célèbre le bonheur qu’ils goûtent tous deux à « être fous de confiance ». […] Il eût fait un beau buffle ou un noble poulain, ou un éléphant distingué, s’il est vrai que la réputation de sagesse décernée jadis à ce dernier animal soit complètement usurpée.
Oui, avant 1661, avant les beaux temps de Boileau, de Racine, de Bossuet, les genres étaient démêlés dans notre littérature. […] Aujourd’hui Racine ne mettrait pas dans la bouche d’un jeune prince déclarant son amour à une captive, cette humilité religieuse : Peut-être le récit d’un amour si sauvage Vous fait, en m’écoutant, rougir de votre ouvrage ; D’un cœur qui s’offre à vous, quel farouche entretient Quel étrange captif pour un si beau lien ! […] Il existait un grand nombre de lettres de Sévigné, modèles de style épistolaire ; on en avait de son cousin Bussy-Rabutin, homme de mauvais cœur, de mauvais esprit, mais d’assez bon goût ; En morale, on avait les nobles écrits de Balzac ; En métaphysique, la méthode de Descartes ; En didactique et en polémique, les Lettres provinciales ; En critique, plusieurs bons écrits de Port Royal, la critique du Cid ; En poésie, les belles odes de Malherbe, quelques ouvrages de Racan, de Segrais, de Benserade ; les chefs-d’œuvre de Corneille, Le Cid, Les Horaces, Cinna, Polyeucte, La Mort de Pompée, Le Menteur, Rodogune.
Cette dernière nature, ou cette nature de la société, est la plus belle : le génie en est l’instinct, et la vertu l’innocence, car le génie et la vertu de l’homme civilisé ne sont que l’instinct et l’innocence perfectionnés du Sauvage. Or, personne ne peut comparer un Indien du Canada à Socrate, bien que le premier soit, rigoureusement parlant, aussi moral que le second ; ou bien il faudrait soutenir que la paix des passions non développées dans l’enfant a la même excellence que la paix des passions domptées dans l’homme ; que l’être à pures sensations est égal à l’être pensant, ce qui reviendrait à dire que faiblesse est aussi belle que force. […] Ces beaux vers prouveront aux poètes que leurs Muses gagneraient plus à rêver dans les cloîtres, qu’à se faire l’écho de l’impiété.
En voici qui ne se suivent pas et qui sont très belles, et en voici qui se suivent et qui sont ridicules. » Telle fut, dans sa pauvreté, la thèse de M. […] Elle serait superbe, quoique suivie, si l’image était belle, et M. […] Brunetière, après avoir méprisé la théorie du travail, contraint de prendre son plus bel exemple de style chez l’auteur le plus notoirement célèbre par son labeur, ses refontes et ses ratures, chez un écrivain qui recherchait l’harmonie jusqu’à fuir la moindre assonance, qui poussait jusqu’à la manie la haine des répétitions, qui exigeait la suite la plus rigoureuse dans les métaphores, qui supprimait les qui et les que et prétendait qu’avec de l’application et du goût on peut arriver à avoir du talent ?
Nous nous disions donc que Champagny ne s’arrêterait pas en si belle route, quand, tout à coup, il en changea… Il publia un livre d’économie politique. […] Il n’était allé que jusqu’à Néron dans le beau livre de sa jeunesse, mais n’avait-il pas à reprendre la suite du terrible médaillier de tous ces monstres, gravés sur bronze ou sur onyx ? […] Franz de Champagny a beau nous dire avec raison, dans sa préface, que la question pour le monde et l’histoire n’est ni la question économique, ni la question politique, ni même la question sociale, mais la question morale, la question de l’homme, de sa vie terrestre et de sa vie au-delà de la terre : « L’homme est-il souverain ou subordonné ?
Pour lui, Villemain est un colosse ; Castille une haute autorité ; et il s’abrite, en se courbant presque jusqu’à terre, sous cette grande parole d’About, — sans inconvénient pour cette fois : — « Les beaux ouvrages sont soumis à la Critique. » Enfin, ce lauréat de l’Académie d’Arras (c’est de M. […] depuis que le Dante, insulté comme Shakespeare par Voltaire, ce grand connaisseur en sublime, a été amené dans la littérature française comme un gerfaut inconnu sur le poing de ce beau fauconnier de Rivarol, qui n’a pas pu (heureusement) franciser ou apprivoiser cet oiseau sauvage, que n’a-t-on pas écrit sur le Dante, même parmi nous, qui ne sommes pas des Italiens ! […] Selon lui, le Paradis est la partie la plus belle du poème, comme l’Enfer doit rester littérairement la plus populaire, et les raisons que le jeune lauréat a données de son opinion sont d’une solidité et d’une sagacité qui font bien présager de ce sens critique que je vois poindre en lui et qui est encore à l’état d’aurore.
Pour être poète, dit le terrible et opiniâtre railleur, qui ne se déferre jamais de sa plaisanterie effrayante de vulgarité, il faut d’abord « ne pas croire à Dieu et lire la Bible pour y prendre des métaphores ; — ne rien savoir, puisque les plus beaux génies de ce temps n’ont pas, en connaissances, de quoi couvrir une pièce de six pence au fond d’une cuvette ; — traiter tous les auteurs comme des homards, dont on choisit le meilleur dans la queue et dont on rejette le reste au plat ; — avoir toutes prêtes des comparaisons comme le cordonnier a ses formes ». […] En effet, Swift a beau s’élever, dans cet odieux morceau, jusqu’au cannibalisme de l’ironie, l’humour, s’il est permis de parler comme M. de Wailly de cet épouvantable humouriste, est de l’humour aux écrouelles. […] Cela lui apprit tard la fatuité : « Le plus beau jeune homme de la terre — dit-il — « n’a jamais que vingt-quatre heures d’avance sur moi. » Du reste, il n’avait jamais aimé les femmes, et il avait pour elles un mépris qu’il ne pensait pas à recouvrir d’ironie.
Lorsque les Juifs sont supérieurs, ils le sont d’une manière absolue, comme les Anglaises, quand elles sont belles, sont absolument belles. […] Un homme, un poète, un Juif aussi, réussi comme un Juif lorsqu’ils sont réussis : Henri Heine a parlé dignement de Lessing, avec cette imagination charmante qui fait de la vérité, sans la fausser et sans même l’atteindre, une chose belle comme une illusion.
Nous avons trouvé des vers bien faits, de beaux moules à idées, sans l’idée, l’aisance d’un poète, mais non sa puissance, et nous avons craint que M. […] Bouilhet aurait fait des vers dans la manière de Delille, et il aurait réussi comme il a réussi à faire des vers (parfois très beaux) dans la manière de M. […] Par exemple, la pièce intitulée Le Lion rappelle le Jean de Paris d’Hégésippe Moreau et est bien moins belle, d’un mérite bien moins insolent.
Paul Bourget revenait d’Italie et de Grèce ; plusieurs de ses poésies, et quelques-unes des plus belles, sont datées de Venise, de Florence, de Corfou. […] Les poètes sentent ces impondérables… II L’auteur de La Vie inquiète, qui n’a pas pris pour sa Muse l’anxiété, car on ne choisit pas sa Muse, quand on est un poète : on la subit, comme le cœur subit son vautour, n’était encore qu’un lyrique dont les poésies sont toujours belles quand elles sont marquées de cette personnalité byronienne avec laquelle il est né et qu’il ne doit à aucune imitation volontaire et servile. […] Il n’a pas effacé de son front ce grand et beau reflet de Dieu, qui s’y débat contre les ombres du doute quand tous les autres l’ont éteint sur le leur.
Antoinette, elle, n’est qu’une femme du monde qui est restée parfaitement tranquille et heureuse dans l’immaculé manteau d’hermine de son écusson, tout le temps qu’elle a été jeune et belle, mais qui, précisément, le jour où sa beauté décline, sent l’amour monter dans son cœur. […] Quand on est jeune, l’imagination aime assez la passion pour vouloir toujours la peindre belle et irrésistible, mais la montrer rapetissée, humiliée sous les habitudes de la vie, sacrifiée à la tyrannie de ces habitudes, et la prose de la réalité venant à bout de la dernière poésie de nos cœurs, suppose un désintéressement d’observation qui ne se voit guère que chez les hommes qui ont vécu et qui savent comme la vie est faite. […] Ce type de grandeur cachée, ce beau sujet à traiter pour un observateur profond, épouvante les écrivains en France, où le ridicule a tant d’empire : or, celui qu’on a jeté sur la position de la vieille fille est si grand et si officiel, qu’ils croiraient peut-être le voir rejaillir jusqu’à eux, s’ils considéraient seulement la vieille fille par les côtés touchants, élevés, héroïques, et voilà pourquoi ils se sont abstenus de la peindre dans la splendeur possible de son isolement désespéré ou courageux.
En se servant de la plus belle langue de l’univers, Platon ajouta encore à sa beauté : il semble qu’il eût contemplé et vu de près cette beauté éternelle dont il parle sans cesse, et que, par une méditation profonde, il l’eût transportée dans ses écrits. […] On ne pourra pas juger dans un extrait, du style et l’éloquence de Platon ; mais on connaîtra du moins le caractère moral de Socrate, un des plus beaux qu’il y ait jamais eu, depuis que chez les plus civilisés on parle de vertu en commettant des crimes. […] Qu’elle arme contre toi des bourreaux, qu’elle te jette dans les fers, qu’elle t’envoie aux combats pour recevoir des blessures et mourir, ton devoir est d’obéir ; fuir ou quitter ton rang est un crime ; dans les tribunaux, dans les prisons, sur les champs de bataille, partout les ordres de la patrie sont sacrés ; un citoyen qui se révolte contre elle est plus coupable qu’un fils armé contre son père… » Les lois continuent : « Il ferait beau entendre Socrate racontant sous quel déguisement ridicule il s’est enfui de sa prison !
Cher au cœur anglais est un beau combat, bien soutenu. […] La raison en est simple ; l’édifice a beau être défectueux, il offre un abri. […] J’ai dit les qualités générales et les défauts de ce beau livre. […] Prospero délivra le captif, et bientôt avec son aide il eut rempli cette île si sauvage, mais d’une fécondité si puissante, de belles visions et de belles mélodies qui en firent un séjour enchanté. […] Comme le genre humain est beau !
Sa part est assez belle pour qu’il s’y tienne et s’en contente. […] Le beau mérite vraiment de parler quand on a quelque chose à dire ! […] Les plus belles méditations n’offrent rien de pareil. […] J’aurais beau faire, je ne réussirai pas à faiblir. […] La belle chose, mon Dieu, que la philosophie de l’histoire !
— Vous pourriez dire un mot du poëme d’ Hermia de Laprade (Revue indépendante) ; c’est assez beau, grandiose, mais monotone. […] Théophile Gautier disait un jour de Janin : « On a beau dire, il y a un fameux tempérament dans ce style-là. » Quel sanglant éloge !
A propos de cet article, nous prions le lecteur de se reporter à la belle pièce des Pensées d’août. […] Auguste Préault sur cette sympathique figure de poète, et que n’eût point rejeté l’auteur des Portraits contemporains et des Premiers Lundis. c’est qu’il y a eu un très beau portrait, genre Titien, de Fontaney par le peintre Louis Boulanger.
Dans ses vers mêmes sur l’Italie, et malgré de très beaux passages, il se trahissait déjà beaucoup d’incertitude et d’indécision : Vigny disait, à propos du Pianto : « C’est beau mais ce n’est déjà plus de lui ».
Leconte de Lisle M. le vicomte de Guerne, dont nous venons de couronner à l’Académie les Siècles morts, une très belle œuvre. […] Tel est, en ces lignes générales, le beau livre du vicomte de Guerne.
La première et la seconde Ode à Jean Moréas , l’Ode à Du Plessys et l’Ode à Maurras sont nobles et belles. […] De la Métamorphose des fontaines aux Odes, aux Sonnets et aux Hymnes, qui se trouvent dans le même volume, on peut suivre l’agonie de son beau talent.
Une connoissance profonde des hommes, des pensées neuves, des caracteres bien saisis, des peintures vraies, des réflexions justes, en font aimer la lecture à ceux qui ne sont pas révoltés par un certain pédantisme qui ne devroit pas se trouver au milieu des belles qualités que nous venons d’y reconnoître. […] On trouve du moins à s’instruire dans ses Considérations * & dans ses Mémoires ; avantage qu’on chercheroit en vain chez la plupart de ceux qui ont voulu mettre la Philosophie en belles phrases.
On peut d’abord en juger par l’invocation de la Henriade, dont la tournure est la même que celle de Clovis : Muse, qui ceins ton front d’une immortelle gloire, Qui, plaçant les grands noms au Temple de Mémoire, Des outrages du temps affranchis les Guerriers, Couronne mon Héros de tes plus beaux lauriers. […] Ose répandre encor sur ces vérités saintes, Les voiles enchanteurs de tes images feintes ; La noble fiction, en flattant les Esprits, Charme & conduit au vrai par des chemins fleuris, Orne la vérité des attraits de la Fable, Et l’offre à nos regards plus belle & plus aimable.
Il ne mit qu’une condition à des procédés si beaux en apparence : c’est qu’Homère lui communiqueroit ses poësies. […] Il ne se consola jamais du vol de son plus bel ouvrage ; & la douleur de ne pouvoir confondre la perfidie de Thestorides le conduisit au tombeau, plus que l’âge, les infirmités & l’extrême misère.
Davila, Guicciardini, et Fra-Paolo eurent plus de simplicité, et Mariana, en Espagne, déploya d’assez beaux talents ; malheureusement ce fougueux Jésuite déshonora un genre de littérature dont le premier mérite est l’impartialité. […] Rappelons-nous que les écrivains des beaux siècles littéraires ont ignoré cette concision affectée d’idées et de langage.
Et vous ne songez pas que ces arbres doivent être touchés fortement, qu’il y a une certaine poésie à les imaginer selon la nature du sujet, sveltes et élégans, ou brisés, rompus, gercés, caducs, hideux ; qu’ici pressés et touffus, il faut que la masse en soit grande et belle ; que là rares et séparés, il faut que l’air et la lumière circulent entre leurs branches et leurs troncs ; que cette terrasse veut être chaudement peinte ; que ces eaux imitant la limpidité des eaux naturelles, doivent me montrer comme dans une glace l’image affaiblie de la scène environnante ; que la lumière doit trembler à leur surface ; qu’elles doivent écumer et blanchir à la rencontre des obstacles ; qu’il faut savoir rendre cette écume ; donner aux montagnes un aspect imposant ; les entr’ouvrir, en suspendre la cime ruineuse au-dessus de ma tête, y creuser des cavernes, les dépouiller dans cet endroit, dans cet autre les revêtir de mousse, hérisser leur sommet d’arbustes, y pratiquer des inégalités poétiques ; me rappeller par elles les ravages du temps, l’instabilité des choses, et la vétusté du monde ; que l’effet de vos lumières doit être piquant ; que les campagnes non bornées doivent, en se dégradant, s’étendre jusqu’où l’horizon confine avec le ciel, et l’horizon s’enfoncer à une distance infinie ; que les campagnes bornées ont aussi leur magie ; que les ruines doivent être solennelles, les fabriques déceler une imagination pittoresque et féconde ; les figures intéresser, les animaux être vrais ; et que chacune de ces choses n’est rien, si l’ensemble n’est enchanteur ; si composé de plusieurs sites épars et charmans dans la nature, il ne m’offre une vue romanesque telle qu’il y en a peut-être une possible sur la terre. […] Votre vierge est assez belle de draperie et de caractère ; mais elle est raide, et si je connaissais mieux les anciens peintres, je vous dirais à qui vous l’avez prise.
Le plus beau païsage, fut-il du Titien et du Carrache, ne nous émeut pas plus que le feroit la vûë d’un canton de païs affreux ou riant : il n’est rien dans un pareil tableau qui nous entretienne, pour ainsi dire ; et comme il ne nous touche gueres, il ne nous attache pas beaucoup. […] Quand une satire ne met pas dans un beau jour quelque verité dont j’avois déja un sentiment confus, quand elle ne contient pas de ces maximes dignes de passer incessamment en proverbes à cause du grand sens qu’elles renferment en abregé, je puis tout au plus la loüer d’être bien écrite ; mais je n’en retiens rien, et j’ai aussi peu d’envie de la vanter que de la relire.
Après un long détour, d’ailleurs nécessaire, nous en revenons à la sagesse des philosophes grecs ; l’analyse minutieuse n’a vu longtemps dans la diversité les choses qu’un vaste désordre et s’est divertie à étiqueter ces contradictions apparentes ; la synthèse retrouvera peu à peu l’ordre et le rythme, plus beaux encore dans l’effort humain que dans la marche des étoiles. Plus beaux, parce que plus conscients.
Un beau peintre, savant et sensible, se trouve paralysé par sa clairvoyance. […] Mais même quand il est beau, il ne suffit pas à rendre belle la toile ; en effet jamais à sa qualité les qualités de la couleur ne s’unissent. […] Le magicien évoque les beaux fantômes vivants. […] Le Beau Navire. […] « Le mystère, le regret sont aussi des caractères du Beau. » (Ibid.
Voilà un beau point d’honneur pour un philosophe tel que vous ! […] Ainsi, tout progrès paraît effrayant dans ce beau pays de France. […] Le regard est brûlant, le visage singulièrement vivant et beau. […] Fort bel homme, bon comédien quoique Collé, dans son Journal, le traite de grimacier. […] Le beau petit baron, comme on disait, avait aussi représenté l’Amour dans Psyché.
Je relis vos deux lettres, elles font honneur à votre esprit ; je pense à vos procédés, ils prouvent l’âme la plus belle. […] que c’est un beau cadre ! et que ce sera un beau tableau, quand vous y aurez mis vos idées ! […] Le reste, si beau que cela parût, lui tenait moins à cœur. […] Et moi, qui ne suis qu’un humble mortel, n’en ferai-je pas autant pour les caractères de cette belle langue révélée ?
Ils se déchirent entre eux, comme de beaux lions et de superbes panthères. […] Il cherche le remède de ses tristesses dans l’idée de la justice éternelle, et l’implore avec une ampleur de paroles qui fait de la prière un hymne en prose aussi beau qu’une œuvre d’art. […] Il a beau être calculateur, ambitieux par excellence, il est néanmoins vraiment fanatique et sincère. […] Elles l’appelaient le plus beau des dix mille, le Fils unique de Dieu, le prophète du Dieu très-haut, le Roi d’Israël, le Fils éternel de la justice, le Prince de la paix, Jésus, celui en qui l’espoir d’Israël réside. […] L’idée du beau y manque, et qu’est-ce qu’une littérature sans l’idée du beau ?
C’est le poète attitré de ce beau pays. […] Voilà une belle histoire de revenants et qui donne la chair de poule. […] » murmurait-elle ; et ses larmes s’arrêtaient dans les rides qui avaient changé son visage, si beau jadis. […] Elle avait beau jeu. […] les belles années qui suivirent 1860 !
Le ciel qui l’aimait lui réserva une femme jeune, charmante et belle pour ses vieux jours, et un ami fidèle après sa mort. […] Sa sœur, belle et fière, refusa de se marier. […] Ainsi se passa leur première enfance, comme une belle aube qui annonce un plus beau jour. […] Si tu marches vers la maison de nos mères, la perdrix qui court vers ses petits a un corsage moins beau et une démarche moins légère. […] L’azur du ciel est moins beau que le bleu de tes yeux ; le chant des bengalis moins doux que le son de ta voix.
qu’une belle et bonne œuvre serait la bienvenue, et que c’est misère à ceux qui le pourraient de laisser passer de tels moments uniques de la faveur et de l’avidité publiques ! […] On dit que l’admiration dure encore en Allemagne, et qu’elle vient seulement d’atteindre à son apogée à Vienne, où plus d’une belle dame appelle par gentillesse son petit enfant Tortillard.
. — La Belle Nivernaise (1886). — Numa Roumestan, pièce (1887). — Tartarin sur les Alpes, pièce avec MM. de Courcy et Bocage (1888) […] Depuis, l’écrivain en marche a quitté ce beau jardin, il est parti par les routes, il a traversé des forêts, il s’est frayé un âpre chemin à travers des espaces vierges.
Théodore de Banville Ce poète qui, quand il était jeune, n’a pu obtenir rien de ce qu’il désirait, si ce n’est le don d’écrire de beaux vers, a tout obtenu dans son âge mûr ; popularité, gloire, honneurs et même la beauté, car le succès, le contentement intérieur, la joie du devoir accompli ont éclairé sa tête naguère souffrante, poli l’ivoire de ses joues, allumé son regard et rendu ses lèvres aussi spirituelles, ses fiers sourcils — qui, très victorieusement, le dispensent de toute chevelure — aussi beaux que ceux de Boileau.
Le pays des chimères est en ce monde le seul digne d’être habité : et tel est le néant des choses humaines, que, hors l’être existant par lui-même, il n’y a rien de beau que ce qui n’est pas… ……………………………………………………………………………………………… Une langueur secrète s’insinue au fond de mon cœur ; je le sens vide et gonflé, comme vous disiez autrefois du vôtre ; l’attachement que j’ai pour ce qui m’est cher ne suffit pas pour l’occuper : il lui reste une force inutile dont il ne sait que faire. […] Comme il promet toujours une récompense pour un sacrifice, on croit ne rien lui céder en lui cédant tout ; comme il offre à chaque pas un objet plus beau à nos désirs, il satisfait à l’inconstance naturelle de nos cœurs : on est toujours avec lui dans le ravissement d’un amour qui commence, et cet amour a cela d’ineffable, que ses mystères sont ceux de l’innocence et de la pureté.
Ainsi l’Être abstrait, dont Tertullien et saint Augustin ont fait de si belles peintures, n’est pas le Jehovah de David ou d’Isaïe ; l’un et l’autre sont fort supérieurs au Theos de Platon et au Jupiter d’Homère. […] Notre système théologique nous paraît plus beau, plus régulier, plus savant que la doctrine fabuleuse qui confondait hommes, dieux et démons.
Il n’en est pas de nous ainsi que des Anciens qui avaient des bains, des gymnases, peu d’idées de la pudeur, des dieux et des déesses faits d’après des modèles humains, un climat chaud, un culte libertin ; nous ne savons ce que c’est que les belles proportions. […] Ces jugements d’après [lesquels] nous appelons beau dans la rue ce que nous appellerons laid dans l’atelier, et alternativement ne nous permettent pas d’avoir une certaine sévérité de goût.
Ainsi quand nous voïons une belle tragédie, ou bien un beau tableau pour la seconde fois, notre esprit est plus capable de s’arrêter sur les parties d’un objet qu’il a découvert et parcouru en entier.
Ce type lui est d’abord apparu sous les traits de Saint-Mégrin, dans son drame de Henri III ; puis quand il a cédé à l’influence transitoire de la passion révolutionnaire, sous les traits de Robespierre dans l’histoire, d’Antony dans le drame ; dès que la passion de 1830 est refroidie, on voit reparaître dans ses ouvrages toute une famille de personnages dont Saint-Mégrin est l’aîné, intelligences avisées et pleines de ressources, caractères sans peur et sans scrupules, poignets vigoureux, beaux joueurs qui se font place dans le monde à la pointe de l’épée et de l’esprit : Saint-Mégrin, dans Henri III ; d’Artagnan, dans les Mousquetaires ; Bussy, dans la Dame de Monsoreau… Sans doute, M. […] En 1829, Dumas avait vingt-six ans ; c’est le bel âge, dans toutes les branches de l’activité humaine, pour déployer ce qu’on porte en soi ; c’est l’âge du Béarnais à Cahors et de Bonaparte en Italie. […] Quel beau commencement d’une vie littéraire qui reste l’une des plus dignes d’envie de ce siècle, malgré les fréquentes misères dont elle a été troublée par l’imprévoyance, la prodigalité et le désordre !
Une causerie d’artistes qui plaisantent dans un atelier, une belle jeune fille qui se penche au théâtre sur le bord de sa loge, une rue lavée par la pluie où luisent les pavés noircis, une fraîche matinée riante dans les bois de Fontainebleau, il n’y a rien qui ne nous le rende présent et comme vivant une seconde fois. […] Théodore de Banville Je voudrais le montrer non tel que l’a dessiné Gavarni en cette lithographie exquise où le dandy-poète, déjà fatigué de la lutte, pâli par les veilles, ferme à demi ses yeux et regarde tristement le fantôme de la vie ; — mais fier, charmant, jeune, beau comme dans le médaillon où David nous conserva l’image de son enfance adorable, et tel qu’il apparut à cette soirée chez Charles Nodier, où il lut pour la première fois les Contes d’Espagne et d’Italie, et d’où il sortit célèbre. […] Il a su faire de beaux vers de très bonne heure ; et, encore adolescent de cœur assez avant dans la vie, il a eu toute l’ardeur de la passion quand il avait tout le talent pour la peindre.
Il se voit pris à partie par une belle assistante qui s’indigne de son entreprise comme d’un hommage au Symbolisme et qui, brandissant, contre lui, un éventail menaçant, le poursuit à son départ jusque dans l’antichambre et lui jette avec un frémissement colère : « Vos symbolistes… je les déteste ! » Incident piquant si l’on songe que le Symbolisme est déjà en route pour s’installer triomphalement au foyer de Heredia et plus piquant encore s’il était permis de supposer que la belle ennemie éphémère des symbolistes ne fût autre que la future Madame Henri de Régnier, elle-même écrivain de grand talent et qui s’est fait une place enviée dans les lettres sous le nom de Gérard d’Houville. […] On se heurtait, dans la pénombre, à des couples suspects, à des dames trop peu farouches et à des messieurs « trop beaux pour rien faire », parés, sous leur casquette à pont, de rutilants accroche-cœurs, quand ce n’était pas quelque poivrot en difficulté de gravir les degrés.
Ils ont beau s’écrier d’un fausset philosophique, qu’il n’a fait que copier Horace & Juvenal, qu’il n’est tout au plus qu’un bon versificateur, qu’il ne connut jamais le sentiment, que ses idées sont froides & communes, qu’il n’est pas enluminé comme eux, qu’il n’a qu’un ton, qu’une maniere ; ils ont beau s’applaudir réciproquement de leurs prouesses littéraires, lever jusqu’aux nues l’entortillage & l’enflure de leurs pensées, ne trouver rien d’égal à la profondeur de leurs courtes vues, s’extasier sur le vernis de leurs mystérieuses expressions ; la voix noble & ferme de Stentor n’a qu’à se faire entendre, & aussitôt cette engeance mutine disparoîtra, avec son Général, pour se cacher sous ses humbles pavillons. […] Tout le monde connoît sa belle Traduction de Longin, & ses Réflexions critiques contre Perrault.
On y trouve un écrivain dont les grands talens doivent faire oublier ses Lettres du chevalier d’Her… ses comédies peu théâtrales, son Apologie des tourbillons de Descartes & les Essais informes qu’il a faits dans les genres de Lucien & de Théocrite ; plus heureux dans ceux de Quinault & de Bacon, & surtout dans la géométrie ; faisant aimer les sciences les plus abstraites ; réunissant la subtilité du raisonnement à un stile qui lui est particulier & qui a fait beaucoup de mauvais imitateurs ; ayant plus d’esprit que de génie, & plus de délicatesse que d’invention ; placé sous deux règnes pour mériter l’estime de deux siècles, & par la variété de ses connoissances, & par la singularité de son ame toujours paisible, modérée, égale, inaccessible aux mouvemens inquiets ou violens, qui rendent les autres hommes malheureux ; fait, en un mot, pour les agrémens & les délices de la société, mais non pour être l’exemple des belles ames, des cœurs sensibles & reconnoissans. […] Cette première dissertation philosophique d’un de nos plus beaux génies, est terminée par un chapitre sur les sorts. […] On avoit ouvert les yeux sur la fausseté, l’avarice, les débauches infâmes des prêtres : ils faisoient accroire que le dieu vouloit admettre à son lit les plus belles femmes : elles alloient à la divinité, parées des mains de leurs maris, chargées de présens en reconnoissance de ses faveurs.
Sans une élocution élevée & sublime, le grand paroît toujours grand : le vrai & le beau, pour saisir l’ame, n’ont pas besoin d’ornement étranger. […] Connoît-on mieux ces trois genres*, après avoir lu que l’un ressemble à une table frugale, l’autre à une belle rivière bordée de vertes forêts , le troisième, à un foudre & à un fleuve impétueux qui renverse tout ce qui lui résiste ? […] Celui-ci l’honora pendant long-temps, ainsi que plusieurs beaux génies de l’Europe, d’une correspondance régulière.
Si l’imagination n’a pas à sa disposition une main et un oeil capables de la seconder à son gré, il ne résulte des plus belles idées qu’enfante l’imagination, qu’un tableau grossier, et que dédaigne l’artisan même qui l’a peint, tant il trouve l’oeuvre de sa main au-dessous de l’oeuvre de son esprit. […] Il faut, disoit ce prince, en se servant de la langue latine, dont le bel usage permettoit alors aux personnes polies, de mêler quelques mots dans la conversation. […] Delà naissent tant d’ouvrages ennuïeux, qui font prendre en mauvaise part le nom de poëte, et qui empêchent que personne veuille s’honorer d’un si beau titre.
J’appelle donc des causes morales de la perfection des arts, la condition heureuse où se trouve la patrie des peintres et des poëtes lorsqu’ils fournissent leur carriere ; l’inclination de leur souverain et de leurs concitoïens pour les beaux arts ; enfin, les excellens maîtres qui vivent de leur temps, dont les enseignemens abregent les études et en assurent le fruit ? […] Les compatriotes des grands artisans, peuvent-ils donner aux beaux arts cette attention qui les encourage avec tant de succès, s’ils ne vivent pas dans un temps où il soit permis aux hommes d’être plus attentifs à leurs plaisirs qu’à leurs besoins. […] Le goût pour les beaux arts, ne vint pas aux romains, tandis qu’ils faisoient dans leur propre païs une guerre, dont tous les évenemens pouvoient être mortels à la republique : puisque l’ennemi pouvoit, s’il gagnoit une bataille, venir camper sur les bords du Tévéron.
qui sautent tous sur le même, à la queue les uns des autres, comme les moutons de Dindenaut sautaient dans la mer, vont, après le livre que voici, être encore plus attrapés que ces finauds de bal masqué qui disent aveuglément à toute femme en loup : « Je te connais, beau masque ! […] La Pruderie, cette belle demoiselle pincée, n’était pas la maîtresse de la maison, et d’ailleurs il y avait autour de la table assez d’éventails pour cacher les embarras de tout le monde. […] Ce fut presque beau de gravité reprise, de pudeur revenue… Mais certainement Lamartine, qui n’était pas à ce souper, y aurait chanté une chanson à boire qu’on n’eût pas été plus surpris !
Armand Hayem, sans cesser d’être lui-même, et avec une habileté volontaire ou involontaire, avait étamé un miroir de la plus belle eau dans lequel messieurs des Sciences morales et politiques auraient pu se reconnaître, et dans lequel pourtant ces vieux Narcisses, à la vue trop basse, ne se sont pas reconnus. […] C’est un homme qui mériterait d’être resté ce qu’il était dans l’origine, une santé spirituelle, un beau tempérament bien venu, mais qui, au contact de son siècle, a contracté les maladies intellectuelles d’une époque hégélienne hier, — nihiliste aujourd’hui, — et qui, si elle n’est tout à fait morte, deviendra on ne sait quoi demain ! […] Sa forme est élégante, rapide et claire, — de cette belle clarté de cristal qui fait voir tout ce qui n’est pas dessous, quand c’est quelque chose que je voudrais y voir, moi !
Homme d’imagination plus savante que dévorante, il aimait les choses d’art, les belles étoffes, les armes, les camées, les urnes antiques, tout le bric-à-brac des civilisations lointaines et disparues, qui donnaient à son imagination l’élan fécond qu’elle n’avait pas naturellement. […] Né compagnon, quoique rêveur, fait pour aller en troupe, Gérard de Nerval ne fut point un talent solitaire, et il n’y a jamais de grand et de beau que les talents solitaires ! […] Que Gérard de Nerval ait été un aimable garçon ; qu’il ait offert à ses contemporains le phénomène que nous offre Monselet en ce moment de n’avoir pas eu un ennemi, — ce qui put lui être agréable pendant sa vie, et ce qui lui est, comme vous le voyez, utile encore après sa mort ; qu’il ait été bambin avec des célèbres et qu’il ait joué aux petits jeux de l’amour et de la poésie avec des gens qui ont fait là-dessus leurs Poésies de jeunesse et qui vont faire maintenant là-dessus leurs Poésies de vieillesse, — car les choses sont plus belles quand on se retourne, et les lointains, à mesure qu’ils s’éloignent, se veloutent d’un si joli bleu !
Il gardait l’accent chrétien dans son charme pieux et sincère, et l’accent chrétien, quoiqu’on ne l’écoute plus, est le plus beau que puisse donner la voix des hommes. […] La fortune superbe, En naissant, me fit don de sa plus belle gerbe. […] Qui dit spécial dit plus artiste, et à l’exception des deux odes, dont nous parlions tout à l’heure, deux belles intruses auxquelles on pardonne en faveur de leur beauté, Chateaubriand et La mer à Biarritz, et de quelques fables dans lesquelles il n’a point imité La Fontaine, le seul genre d’éloge qu’on puisse donner à qui ose écrire une fable après l’incomparable et désespérant Maître Jean, M.
Il a aussi des anti-élégances : « Je suis trop poli pour vous démentir », fait-il dire aux personnages des belles compagnies qu’il invente. […] Charles Didier est un conteur à événements qui a l’habitude de la plume, mais il n’a jamais eu, ce prosateur, d’étoffe ferme et étoffée, dans l’imagination ou dans le style, ni les enchantements passionnés ou rêveurs, ni les belles indolences d’attitudes ou les vivacités éprises, ni les grâces armées et désarmées de la causerie ou du récit, ni les gaietés d’alouette dans un ciel heureux, ni les mélancoliques lenteurs des cygnes sur les bassins tranquilles, que doivent avoir, pour réussir dans la pensée et le langage, les peintres ou les poètes des Décamérons ! […] Jamais la question du mariage du prêtre et des épouvantables conséquences individuelles et sociales dont il est plein n’a été éclairée d’une lueur plus pénétrante et plus belle.
Faisant la route à cheval, il fut surpris par un orage violent, bien que le temps n’eût cessé d’être fort beau depuis le commencement de la campagne. […] Napoléon les saisit en s’écriant : “Voilà un beau présent pour les Invalides, surtout pour ceux qui ont fait partie de l’armée de Hanovre. […] Thiers restera dans toutes les langues le plus beau volume de l’histoire moderne d’Espagne et de France. […] Thiers que nous ferions porter la véritable critique qui pèsera sur cette belle histoire ; c’est sur l’absence de philosophie politique qui marque et qui attriste ce long récit. […] Il y a même de beaux côtés dans cette mâle indulgence, qui fait beaucoup pardonner à qui a beaucoup gouverné dans un temps où le gouvernement semblait anéanti en Europe.
Ce regard d’honnête homme, en tombant calme et serein sur les foules, semblait les contenir, les éclairer et les calmer, comme un beau rayon de soleil sur les vagues écumeuses d’une mer d’équinoxe. […] Il soutint que le caractère de toute vérité était d’être pratique, et que la moindre découverte en ce genre valait mieux pour lui et pour l’État que les plus beaux songes. […] Il contribua puissamment à enrichir les sciences naturelles, dont son maître, alors en Perse, lui envoyait les plus beaux modèles vivants ou morts pour être étudiés, ou décrits, ou disséqués, dans son Histoire des animaux. […] Mais il n’estimait la poésie que comme le plus beau vêtement de la vérité dans le sentiment. […] Le peintre ne laissera point dans son tableau un pied qui dépasserait les proportions des autres parties de la figure, ce pied fût-il beaucoup plus beau que le reste ; le charpentier de marine ne recevra pas davantage une proue, ou telle autre pièce du bâtiment, si elle est disproportionnée ; et le choriste en chef n’admettra point, dans un concert, une voix plus forte et plus belle que toutes celles qui forment le reste du chœur.
Mais, mon cher frère, c’est une entreprise qui surpasse mes forces, une idée théorique qui m’a occupé souvent, et dont l’exécution ne se réalisera probablement que lorsqu’on établira la belle république que Platon avait imaginée. […] Mais après quelques jours (le 9 juin), il revenait sur cette douleur par une lettre trop belle, trop à l’honneur de sa sensibilité pour ne pas être donnée tout entière : Mon cher frère, vous avez bien de la bonté de participer au chagrin qui me ronge. […] Un jour que Frédéric lui avait envoyé un écrit de sa façon, un Essai sur les formes de gouvernement et sur les devoirs des rois (1777), le prince Henri, en remerciant son frère, lui disait : Vous avez fait le plus beau portrait des devoirs d’un souverain ; ce tableau cependant ne peut guère être imité : il faudrait toujours des princes doués de votre génie, et qui eussent vos connaissances ; la nature n’en produit pas de cette espèce : je désirerais donc encore un chapitre utile pour un homme que la naissance place sur le trône, mais auquel la nature a refusé les dons que vous possédez. […] Ce général, connu alors par sa belle conduite dans les îles et par ses exploits maritimes, et qui un jour, dans les circonstances les plus critiques, fera tout pour sauver Louis XVI, avait vu Frédéric à Berlin et aux revues de Silésie, et lui avait plu, avait gagné son estime. On lit dans une lettre du roi ce bel éloge : « Nous avons eu ici (10 octobre 1784) M. de Bouillé, qui est un homme de mérite, parce qu’il a su allier au mérite d’un bon militaire tout le désintéressement d’un philosophe ; et, quand on est assez heureux de rencontrer des hommes pareils, il faut en tenir compte à toute l’humanité. » Le prince Henri, en recevant M. de Bouillé à Rheinsberg, ne put s’empêcher de s’exprimer devant lui, de s’épancher sur le compte du roi son frère, comme il n’avait cessé malheureusement de penser et de sentir : Il le représentait, dit M. de Bouillé dans des mémoires dont on n’a donné que des extraits57, comme impatient, envieux, inquiet, soupçonneux et même timide, ce qui paraît extraordinaire ; il lui attribuait une imagination déréglée, propre à des conceptions décousues, bien plus qu’un esprit capable de combiner des idées pour les faire judicieusement fructifier.
Lorsque je me suis mis, cette fois, à relire dans le beau volume de M. […] ) J’ai vu avec une grande impatience, sur la frontière de France et de Hainaut, la continuation des magistrats municipaux plus d’une année dans leurs magistratures passer pour une faveur dont il fallait gratifier le public dans les belles occasions, comme l’avènement d’un gouvernement, la naissance d’un prince, la convalescence du roi, etc. ; mais ayant remarqué que cette faveur accordée ne faisait que maltraiter les peuples en enorgueillissant quelques coquins de bourgeois qui faisaient bientôt une tyrannie de leurs magistratures, j’arrêtai cela, y étant intendant, et dans une célèbre occasion, qui fut le sacre de Louis XV à Reims : et je me fis écrire une lettre par le secrétaire d’État de la province, qui marquait que les magistrats seraient renouvelés malgré cette circonstance, et que l’on se proposait de les faire renouveler annuellement, malgré toute remontrance et nonobstant toute occasion quelconque, et cela par les principes des motifs allégués ci-dessus, savoir leur négligence et abus quand on manquait à les renouveler annuellement ; et je fis imprimer et afficher cette lettre dans tous les carrefours de mes villes. […] Trente intendants sur ce moule et d’Argenson premier ministre, on en aurait vu de belles ! […] Ses propres espérances, selon qu’elles montent ou qu’elles baissent, lui font voir en beau ou en laid certaines gens qui lui semblent favorables ou contraires. […] Il compte fort en dernier lieu, pour réaliser ce beau rêve, sur le fidèle Bachelier, valet de chambre du roi, et introducteur de Mme de Mailly, la première maîtresse : ce parti d’alcôve et d’antichambre lui paraît pour le quart d’heure, et tant qu’il en espère son avancement, le plus patriotique et le plus honorable : « En effet, tout l’autre parti radote ou trompe, et celui-ci est seul ferme, solide, dans les vrais intérêts de la couronne et plein d’amour pour la personne du roi. » D’Argenson, qui se laisse appuyer par Bachelier, appelle cela être dans l’intrigue passivement.
Le grand défaut de son style, c’est l’élégance vague, celle du beau monde et des salons. […] Nous sommes de bien grossiers personnages, et ce beau monde qui vit de blanc-manger littéraire a bien raison de nous mépriser ; mais enfin, quand nous avons quelque chose à dire, nous le disons autrement, nous appelons les choses par leurs noms. […] J’ai mauvaise grâce assurément de chicaner un éditeur aimable qui rachète de légères inexpériences du métier par des mots spirituels chemin faisant, surtout par la richesse du tissu étranger qu’il développe à nos yeux, par les lettres fort belles qu’il insère à tout moment dans son texte et qui en font le prix. […] Il semble apparemment plus difficile et plus beau de revenir de près que de loin. […] Le salon de Mme Récamier, infiniment plus facile, plus agréable, se ressentait quelque peu du boudoir où avait trôné si longtemps la belle Juliette ; un parfum d’élégance s’y respirait ; on devinait dès l’entrée, à de certains arrangements discrets et à de certains demi-jours, la ci-devant jolie femme : chez l’autre on sentait trop celle qui ne l’avait jamais été.
La description de ce bal improvisé, et du pressoir voisin où le travail s’achève, m’ont rappelé la belle idylle de Théocrite qui a pour titre Les Thalysies, la fête de la récolte. […] Dominique, à la veille de quitter les Trembles et se sentant arraché lui-même du lieu où il a pris racine et où il a mis tout son cœur, avait mêlé de ses sentiments à ceux du héros carthaginois, et il avait écrit cette composition scolaire les yeux tout baignés de larmes ; la nature lui parlait plus haut qu’Annibal en ce moment et par cette belle après-midi d’automne, où il essayait de le mettre en scène et de le traduire : « La pierre qui me servait de pupitre était tiède ; des lézards s’y promenaient à côté de ma main sous un soleil doux. […] Elle avait vu de beaux pays, découvert toutes sortes de nouveautés, de mœurs, d’idées, de costumes. […] Il était bien facile de décrire en détail cet hôtel d’Orsel de la rue des Carmélites, cette vieille et très belle maison de province ; il y avait de quoi tenter une autre plume que celle de M. […] L’homme bien né, ainsi qu’on l’entendait autrefois, était au milieu des belles choses comme dans son élément ; il y était chez lui, non pas insensible sans doute à la finesse et à la noble élégance des objets qui l’entouraient, mais il ne s’y montrait pas non plus perpétuellement attentif et tout occupé de les faire remarquer aux autres ; il vivait au milieu, il en usait, et il vaquait à ses affaires, à ses plaisirs, à ses sentiments.
Il habitait le château de Valençay (Indre), et sa nièce, la belle et spirituelle duchesse de Dino, était près de là à Rochecotte. […] — Il sort de ma chambre un buveur d’eau abîmé de rhumatismes et qui en conséquence voit tout en noir : le présent et l’avenir lui fournissent un beau champ qu’il exploite toute la journée. Chez vous, au contraire, on voit tout en beau, et je crois que cela ne changerait pas, même quand on aurait des rhumatismes, tant la disposition est douce. […] Voici une strophe que j’ai placée dans ma mémoire. — Je la trouve très belle : vous direz si j’ai tort ou raison ; je vous croirai. […] S’il avait eu, comme Chateaubriand, le goût des contrastes, son imagination aurait eu beau jeu à se déployer par la comparaison de son succès personnel à Londres en 1830 et de la souveraine considération dont il jouissait, avec l’accueil si défavorable (pour ne pas dire pis) qui lui avait été fait trente-huit années auparavant en janvier 1792, lorsqu’il y était venu chargé d’une mission secrète de la part d’un gouvernement décrié que le choix qu’on faisait de lui décriait encore davantage41.
Elle s’adresse à une amie que de pareils scrupules n’atteignaient pas ; les vers sont d’une pureté racinienne et méritent d’être rappelés : Le monde où vous régnez me repoussa toujours ; Il méconnut mon âme à la fois douce et fière, Et d’un froid préjugé l’invincible barrière Au froid isolement condamna mes beaux jours. […] Parmi celles qui sont adressées à Mlle Valmore dès ces années 1821 et suivantes, j’en trouve pourtant d’intéressantes de Mme Sophie Gay, qui s’était prise d’un goût très vif pour elle, et qui, pendant les séjours de Lyon ou de Bordeaux, la tenait au courant du monde poétique de Paris, des premiers succès de la belle Delphine, des brillants hommages qu’elle recevait, et aussi de son premier trouble de cœur pour ce jeune officier gentilhomme et poète, Alfred de Vigny. […] Ces pauvres Anglais avaient beau rappeler les droits de l’hospitalité ; rien n’était compris par ce peuple ours. […] Les beaux étés sans toi, c’est la nuit sans flambeau. […] rien de toutes ces belles choses.
… Je me tais par prudence, et plutôt pour vous que pour moi… » Berthier, ce grand chef d’état-major dont je ne prétends point méconnaître les mérites appropriés au génie du maître, mais « à qui il fallait tout dicter » ; Berthier, « à qui vingt campagnes n’avaient pas donné une idée de stratégie », et qui n’en avait que faire sans doute dans son rôle infatigable d’activité toute passive ; Berthier, qui, au début de la dernière guerre d’Allemagne (1809), dépêché d’avance à Ratisbonne pour y rassembler l’armée, avait signalé son peu de coup d’œil personnel, son peu de clairvoyance dans l’exécution trop littérale des ordres en face d’une situation non prévue ; Berthier, qui pourtant s’était vu comblé de toutes les dignités, de toutes les prérogatives, et finalement couronné et doté jusque dans son nom de cette gloire même de Wagram, — un tel personnage avait certes beau jeu contre un simple officier en disgrâce, dont il ne prévoyait pas les titres distingués et permanents auprès de tous les militaires instruits et des studieux lecteurs de l’avenir. […] il y a plus d’une manière de l’entendre ; mais ici, au sens de Jomini, le feu sacré, c’est la science et l’amour du bel art : montrer ce qu’on peut et ce qu’on vaut par une application des principes de la grande guerre. La patrie suisse exceptée, le pays d’ailleurs et le théâtre n’y font rien ; la belle école (comme il la conçoit), l’école de la grande guerre, est partout où il y a des capitaines capables de la comprendre et de la pratiquer. — C’est trop d’indifférence, dira-t-on. — J’exprime le fait sans blâmer ni approuver. […] Il aurait pu se dispenser aussi de personnalités qui déparent son bel ouvrage, et mieux choisir les pièces justificatives qu’il a données. […] Sa brouille avec l’illustre maréchal a cessé ; le voilà revenu à la bonne intelligence des belles années.
Envoyé en pénitence à La Flèche, par une punition fort douce, convenons-en, et de bien peu de durée, il ne revint à Paris que pour récidiver de plus belle : la Chartreuse courut avec la pièce des Ombres, qui en est la suite, et un libraire les imprima. […] Elle a d’assez beaux yeux, Pour des yeux de province……… On ne vit qu’à Paris, et l’on végète ailleurs… Tout le monde est méchant, et personne ne l’est… L’aigle d’une maison n’est qu’un sot dans une autre… L’esprit qu’on veut avoir gâte celui qu’on a… Et c’est là qu’on entend le cri de la nature… Et cent autres. […] Il avait eu son beau moment de maturité dans le Méchant, mais ce n’avait été qu’un éclair : à partir de là, son talent devint tout aussitôt vieillot avant l’âge, de même qu’il avait été si agréablement jeunet dans Vert-Vert. […] et que cela donnait beau jeu à Voltaire de s’écrier dans le Pauvre Diable, qui est justement de l’année suivante : …………. […] Il est juste que les belles aient la préférence sur les rois. » 34.
Les prétendus passent et s’éloignent : ils se plaignent avec raison que la mariée est trop belle. […] L’amour, le dévouement, la tendresse, les noms des plus belles et des plus douces choses, prennent dans sa bouche, un son irrité et rauque. […] Au troisième acte, mademoiselle Hackendorf, cette belle victime de la vie mondaine, lui offre sa main avec une humilité bien touchante ; il la refuse sèchement. […] J’ai beau chercher, je ne trouve pas la moralité de ce moraliste. […] Valmoreau l’a échappé belle, et la pitié vous prend, lorsqu’on le voit revenir, l’œil contrit et l’air résigné, se déclarant prêt à épouser l’ange déchu, dans la chapelle des Filles repenties.
La présidente Le Jay prêta à cette petite troupe son hôtel, rue Garancière ; le beau monde y accourut ; on dit que la porte, gardée par huit suisses, fut forcée par la foule. […] Je doute qu’il en eût été ainsi de Mlle Le Couvreur, mais sa voix s’insinuait avec justesse, avec finesse : elle soutenait même les vers faibles et donnait toute leur valeur aux plus beaux. […] Le Mercure nous la montre plus au naturel, « parfaitement bien faite dans sa taille médiocre, avec un maintien noble et assuré, la tête et les épaules bien placées, les yeux pleins de feu, la bouche belle, le nez un peu aquilin, et beaucoup d’agrément dans l’air et les manières ; sans embonpoint, mais les joues assez pleines, avec des traits bien marqués pour exprimer la tristesse, la joie, la tendresse, la terreur et la pitié ». […] Mlle Duclos n’était qu’un représentant de l’école déclamatoire ; et si Mlle Desmares et la Champmeslé avaient eu de grandes et belles parties, elles n’avaient certainement pas atteint à la perfection d’ensemble d’Adrienne Le Couvreur. […] Les jours où elle n’était pas trop envahie par les duchesses et par les personnes de bel air, Mlle Le Couvreur se plaisait à recevoir ses amis : Ma vanité, disait-elle, ne trouve point que le grand nombre dédommage du mérite réel des personnes ; je ne me soucie point de briller ; j’ai plus de plaisir cent fois à ne rien dire, mais à entendre de bonnes choses, à me trouver dans une société de gens sages et vertueux, qu’à être étourdie de toutes les louanges fades que l’on me prodigue à tort et à travers.
Il naquit à Grenoble, le 22 octobre 1761, d’un père homme de loi respecté, d’une mère noble et belle. […] ta belle physionomie est un guide plus sûr que la morale des hommes. […] J’avoue que mes muscles étaient crispés… On voit, ce me semble, la situation, l’attitude et le geste des deux parts : d’un côté, M. de Lally, celui qu’on a appelé le plus gras, le plus gai, le plus gourmand des hommes sensibles, ce personnage spirituel et démonstratif, à qui un moment d’éloquence généreuse et de pathétique dans sa jeunesse permit d’être déclamateur toute sa vie, ayant le beau rôle des larmes et se le donnant ici comme toujours ; de l’autre côté, un homme jeune, ardent, un peu amer, irrité de voir un mouvement d’humanité devenir une machine oratoire et un coup de tactique ; qu’on se représente les deux hommes en présence, et tout s’expliquera. […] Le premier grand discours de Barnave à l’Assemblée, sur la question même qu’avait soulevée cette fuite, sur l’inviolabilité royale remise en question, peut compter pour son plus beau triomphe, bien qu’un triomphe éphémère. […] L’autre fin pour lui a été plus digne et plus belle.
» Elle, c’est être aimée qu’elle veut, ou plutôt c’est aimer, dût-elle ne pas être payée de retour : « Vous ne savez pas tout ce que je vaux ; songez donc que je sais souffrir et mourir ; et voyez après cela si je ressemble à toutes ces femmes, qui savent plaire et s’amuser. » Elle a beau s’écrier par instants : Oh ! […] Mon âme n’avait pas besoin d’aimer ; elle était remplie d’un sentiment tendre, profond, partagé, répondu, mais douloureux cependant ; et c’est ce mouvement qui m’a approchée de vous : vous ne deviez que me plaire, et vous m’avez touchée ; en me consolant, vous m’avez attachée à vous… Elle a beau maudire ce sentiment violent qui s’est mis à la place d’un sentiment plus égal et plus doux, elle a l’âme si prise et si ardente, qu’elle ne peut s’empêcher d’en être transportée comme d’ivresse : « Je vis, j’existe si fort, qu’il y a des moments où je me surprends à aimer à la folie jusqu’à mon malheur. » Tant que M. de Guibert est absent, elle se contient un peu, si on peut appeler cela se contenir. […] Elle essaie de Tancrède qui la touche et qu’elle trouve beau, mais rien n’est au ton de son âme. […] Pourtant, si l’on est sage, on ne les envie pas ; on préférera un intérêt calme, doucement animé ; on traversera, comme elle le fit un jour, les Tuileries par une belle matinée de soleil, et avec elle on dira : Oh ! qu’elles étaient belles !
Aux beaux jours du Consulat, Mme de Genlis, encore à la mode, un soir qu’elle devait recevoir beaucoup de monde, eut l’idée de jouer au coin de sa cheminée un proverbe improvisé, avec M. […] Leclercq : c’est la plus belle invention, c’est la source de mille tracasseries. […] « Et ma belle omelette ? […] Une belle veuve, après quelques années de veuvage, s’est décidée à se remarier. […] La belle veuve, à le voir si tranquille en ce jour solennel, et si bien établi tout le soir dans le salon, en est piquée et presque irritée ; elle va jusqu’à se repentir, et elle ne sait pas dissimuler devant ses bonnes amies, qui ne demandent pas mieux que de surprendre sa faiblesse ; retirée chez elle, elle est près de se porter à quelque résolution extrême, et de vouloir continuer ses habitudes de veuve, lorsque pourtant, bien qu’un peu tard et fort tranquillement, M. de Gerfaut arrive.
Qui dit Lauzun tout court veut dire ce qu’il y a de plus recherché et de plus suprême en fait d’élégance, de fatuité et de bel air. […] Quant à sa carrière, on ne lui laissa pas le temps d’y songer : « On me fit entrer à douze ans, dit-il, dans le régiment des Gardes (françaises), dont le roi me promit la survivance, et je sus, à cet âge, que j’étais destiné à une fortune immense et à la plus belle place du royaume, sans être obligé de me donner la peine d’être un bon sujet. » A quatorze ans, il commença sa carrière de Richelieu et de don Juan. […] Vu et lu aujourd’hui sur le papier, ce genre d’esprit, bien qu’agréable, paraît assez mince : porté brillamment alors par un homme beau, brave, généreux, à grandes manières, cela avait toute sa valeur, et tournait les têtes. […] Ce gros amoureux, appelé sir Marmaduke, avait formé un projet des plus galants : « C’est dans quinze jours les courses d’Ipswich, écrivait miss Marianne à Lauzun ; il a fait faire une coupe d’or plus lourde que moi, qui sera gagnée par un cheval qui lui a coûté deux mille louis. » Il ne demandait que la faveur de mettre la coupe d’or aux pieds de sa belle. […] Il est remarquable pourtant que cet homme qui, par bel air, ne paraît s’occuper que de femmes, et qui croirait déroger à son personnage s’il ne prenait note du moindre minois qu’il rencontre, n’entre pas dans plus de développements quand il aborde les choses sérieuses et les hommes considérables.
Si jeune pourtant, si belle, et d’une beauté si pure et si délicate entre ses compagnes ! […] Qu’elle est belle, gracieuse ! […] Il y montrait l’influence d’une belle église sur la population du Midi, qui aime à se figurer dès ici-bas le ciel ouvert, et dont la piété dépend quelque peu des représentations extérieures. […] Heureux de la conversion, le poète s’écrie en finissant, dans un sentiment qui déborde le cadre de son poème : « C’est beau de sauver la sainte poésie, mais c’est cent fois plus beau de sauver son pays !
Villemain semble avoir épuisé le sujet dans une de ses plus belles leçons sur la Littérature du dix-huitième siècle. […] Dans la préface qu’il mit en tête de sa traduction de Hales, il célèbre la méthode de l’expérience en physique et s’élève contre les systèmes, de manière à faire qu’on se demande si c’est bien lui qui va en construire de si beaux : Le système de la nature dépend peut-être, dit-il, de plusieurs principes : ces principes nous sont inconnus, leur combinaison ne l’est pas moins. […] « Des sourcils noirs, ombrageant des yeux noirs très actifs », ressortaient encore plus sous de beaux cheveux blancs. […] D’Alembert, moins délicat que Voltaire, et moins averti par le sentiment du beau, se donnait toute carrière sur Buffon. […] Le sentiment moral reste un peu blessé, au milieu de tous les étonnements qu’excite ce bel ouvrage, de le trouver si muet et si désert du côté du ciel. — Seul le Génie de l’humanité y domine et s’y glorifie dans une dernière page d’une perspective grandiose et superbe, bien que légèrement attristée49.
la belle destinée de ne pouvoir plus mourir, sinon avec un immortel ! […] Sur le meilleur pied à la Cour, voyant son élève chéri, le petit Charles IX, devenu roi dès l’âge de onze ans, et ne cessant jusqu’à la fin de le considérer comme le plus gentil et le plus doux des princes ( natura mitissimus erat ) ; également estimé et honoré de son autre élève Henri III, grand aumônier de France sous tous deux, bientôt évêque d’Auxerre, Amyot avait réalisé le plus beau rêve d’un savant et d’un lettré au xvie siècle. […] En ce qui est sobre, simple et grand, nulles pages ne sont plus belles que celles de la mort de Pompée. M. de Chateaubriand en jugeait ainsi à son retour d’Orient, en les relisant la mémoire encore pleine du souvenir des plages historiques qu’il avait visitées : « C’est, selon moi, disait-il, le plus beau morceau de Plutarque, et d’Amyot son traducteur. » Dans les traités moraux de Plutarque, que de charmantes pages aussi, riches de sens, pleines d’aisance et de naturel, et qui ont un air de Montaigne ! […] La jeunesse, qui se plaît aux choses d’amour, ne lui a pas su un moindre gré, alors et depuis, de sa ravissante traduction du petit roman de Daphnis et Chloé, chef-d’œuvre que Paul-Louis Courier a retouché, corrigé et réparé quant au sens, tout en y respectant les belles et naïves expressions du premier interprète, et en les imitant de son mieux dans les parties inédites qu’il a retrouvées.
On y distingue dans la première scène du premier acte un morceau assez beau et sensé dans la bouche de Brutus, qui montre les Romains déchus de la liberté par leurs mœurs et méritant désormais la servitude. […] » etc., etc.) ; quand on s’est bien convaincu que cet auteur n’a pas relu Villehardouin avant de faire parler ses chevaliers, il faut saluer et applaudir avec le parterre quelques beaux vers qui redoublent d’effet en situation, cinq ou six hémistiches qui rendent quelque écho du sublime de Corneille, un cri d’innocence qui s’élève des dernières scènes, et le très beau récit final du supplice. […] mon ami, répondit-il, si je les faisais plus forts, le dernier vers ne paraîtrait pas si beau. » C’était ce système d’économie poétique qui lui avait réussi dans Les Templiers, mais qui ne lui réussit pas deux fois. […] L’historien en a pris l’occasion d’écrire une de ses plus belles pages.
Quant aux Œuvres du grand Frédéric, il y entre tant de mélange qu’on ne saurait s’étonner que les belles parties historiques, qui en composent le fondl, aient été longtemps perdues dans le fatras littéraire qui les recouvrait à première vue et qui les compromettait. […] Des plumes incarnates et des rubans de la même couleur achevaient sa parure ; mais les beaux traits de son visage, la douceur de ses yeux jointe à leur gravité, la blancheur et la vivacité de son teint, avec ses cheveux qui alors étaient fort blonds, le paraient encore davantage que son habit. […] La douceur pourtant, qui se mêlait à ses paroles, nous est singulièrement attestée et dépeinte dans ce beau passage de Bossuet : Qui veut entendre combien la raison préside dans les Conseils de ce prince, n’a qu’à prêter l’oreille quand il lui plaît d’en expliquer les motifs. […] Ce discours nous livre à nu Louis XIV jeune, dans son premier appareil d’ambition : « Il me semble, dit-il, qu’on m’ôte de ma gloire quand on en peut avoir sans moi. » Ce mot de gloire revient à chaque instant dans sa bouche, et il finit lui-même par s’en apercevoir : « Mais il me siérait mal de parler plus longtemps de ma gloire devant ceux qui en sont témoins. » Dans cette exaltation et ce commencement d’apothéose où on le surprend, on le trouve pourtant meilleur et valant mieux que plus tard : il a quelques mots de sympathie pour les amis, pour les serviteurs qui s’exposent et se dévouent sous ses yeux : « Il n’y a point de roi, dit-il, pour peu qu’il ait le cœur bien fait, qui voie tant de braves gens faire litière de leur vie pour son service, et qui puisse demeurer les bras croisés. » C’est pourquoi il s’est décidé à sortir de la tranchée et à rester exposé au feu à découvert : dans une occasion surtout, dit-il, « où toutes les apparences sont que l’on verra quelque belle action, et où ma présence fait tout, j’ai cru que je devais faire voir en plein jour quelque chose de plus qu’une vaillance enterrée ». […] Vu de plus près et dans l’intimité de la vie, Louis XIV ne cesse point d’être Louis le Grand ; on est charmé qu’un si beau buste n’ait point une tête vide, et que l’âme réponde à la noblesse des dehors.
L’étal de la Sarriette, la vitrine de la belle Lisa, la fromagerie, les poissons d’eau douce de Claire Méhudin, les gibiers et les volailles, sont décrits en des paragraphes pleins de faits, que résume une phrase-thème, de volupté, d’obscénité, de perfidie, de grâce, de fermentante chaleur. […] Désirée, la belle idiote de la Faute, accroupie dans la chaleur de son poulailler et frémissante du rut de ses bêtes, est décrite avec dilection, comme l’est aussi ce couple bestial et réjoui de Marjolin et de Cadine, qui promène à travers les Halles son impudicité. […] Le teint clair et le pouls calme de la belle Lisa sont admirés dans le Ventre de Paris, comme l’insolent bien-être de Louise Méhudin et de sa mère. […] Ce que nous y aimons, c’est cette Christine si bonne, si douce, sensée, aimante, d’une si belle noblesse d’âme et toute simple ; c’est même cette brute de Lantier, qui, s’il ne mettait une grossièreté de manœuvre à clamer des théories ridicules, serait en somme un être bon, simple et fort, qui eût pu être un brave homme faisant des heureux autour de lui, s’il n’était allé se perdre dans une carrière où il est, malgré son intransigeance, un médiocre et un raté ; c’est Sandoz, d’une si belle fermeté, têtu, paisible et solide, ayant une idée en tête et la réalisant patiemment sans se tourner aux clameurs sur ses talons.
La femme de Mantinée, Diotime, qui est invoquée dans le Banquet de Platon et qui dit de si belles choses par la bouche de Socrate, est une initiée, une sorte de prêtresse ou de femme docteur ès sciences amoureuses et sacrées, et elle sort des conditions ordinaires. […] » Plus tard, à des siècles de là, au déclin, mais à un bien beau déclin encore, le Tasse, avec sa séduction magique et ses ravissantes héroïnes, dut inspirer autour de lui autant et plus de passions peut-être qu’il n’en ressentit lui-même. […] Us sont beaux ; on ne leur a pas ôté une feuille ; tout est comme vous l’avez laissé ; vos fleurs montent, montent et vont, sans treillage, donner du couvert. […] C’est ici que nous avons à citer une fort belle lettre de Rousseau, parfaite de raison, de sagesse ; il oppose les conseils d’une morale juste et saine aux objections un peu trop délicates et raffinées, au bon sens attristé de Mme de Verdelin. […] Je suis sûre qu’il ne pardonnerait pas à la plus belle femme d’être coiffée de travers.
Quand on commence, comme les Bénédictins, à Pythéas, le navigateur grec de Marseille, antérieur de 400 ans environ à Jésus-Christ, qui se dirigea au Nord à la recherche de la mystérieuse Thulé, et qui racontait tant de choses et si merveilleuses, qu’il passa en son temps pour menteur, comme Marco Polo dans le sien, et qu’on lui appliquait déjà le proverbe : A beau mentir, qui vient de loin ; quand on s’arrête à montrer les premiers établissements des Romains dans le midi de la Gaule, qu’on énumère les nombreux rhéteurs et grammairiens latins que produisit cette contrée, dès lors si prompte au beau langage : qu’on n’omet ni Marc-Antoine Gniphon, qui tint école à Rome, l’un des maîtres de César, et qui eut Cicéron pour auditeur ; — ni Valère Caton, le grammairien et le poète, que les Romains, novices encore à l’harmonie, avaient surnommé la Sirène latine, pour son talent de lire les poètes et de les former, qui faisait lui-même d’assez beaux vers, assez énergiques et touchants (il avait été dépossédé de son champ par les vétérans, cela l’inspira), et qu’a imité Virgile ; — quand on est heureux de rencontrer sur son chemin le grand comédien honnête homme Roscius, sous prétexte qu’il naquit dans la Narbonnaise ; — quand on embrasse ce cadre et qu’on tient à le remplir en détail, on écrit tout simplement un livre intéressant qui comprend une riche province de la culture latine, une province entièrement romaine depuis César. […] On entendait, tant bien que mal, le beau latin, celui de la ville, et on en parlait un mauvais, un rustique. […] Il eût fait beau voir qu’un de ces jargons de province se fût rebellé contre Paris en se prétendant un dialecte ; on ne voulait pas plus d’un dialecte que Richelieu ou Louis XIV n’eussent voulu d’un baron féodal indépendant : on lui eût rabattu la tête. […] Nous avons beau jeu, nous autres, pour grouper les mots par ordre de famille, de racine, d’analogie ; nous ouvrons le riche Lexique de la langue des Troubadours, et quatre-vingt-dix-neuf fois sur cent, nous y trouvons tout ce qu’il nous faut, dans le plus bel arrangement du monde. […] Diez, de Bonn, qui s’est dès l’origine occupé des troubadours, a produit surtout de beaux et consciencieux travaux sur l’étymologie des idiomes modernes néo-latins.
Il aimait passionnément les beaux vers ; il en avait composé beaucoup dans ses loisirs, il nous en récitait des strophes dont les lambeaux sont restés dans ma mémoire. […] Quoi qu’il en soit, le comte de Maistre inventa dans sa féconde imagination, une belle nuit, un plan de restauration, ici ou là, de la cour de Sardaigne. […] Dans le cabinet de la belle dame, décoré avec la plus somptueuse élégance, nous vîmes au-dessus du sopha, devinez quoi ? […] La belle Maria-Antonia recevait son monde avec sa robe blanche et ses cheveux noirs, sans diamants, sans perles, sans fleurs ; elle sait fort bien qu’elle n’a pas besoin de tout cela. […] Chaque jour on la trouve plus belle.
Les belles choses ne sont belles pour moi, qu’à la condition d’être bien habillées. […] » J’ai beau lui objecter qu’il y a un sentiment général qui s’oppose à ce qu’il garde le commandement, j’ai beau lui dire que s’il ne commande plus, il est nécessaire qu’il abandonne son rôle de chevalier errant, qu’il est nécessaire qu’il soit sur son trône, qu’il rentre aux Tuileries. […] Il achète quatre chevaux, il entretient la plus belle des Grecques, que possédait alors Nice. […] Un beau mot du général de Bellemare qui refusait de signer, et auquel un signataire disait : « Mais c’est du roman que vous faites là ! […] la belle désorganisation physique, que fait, même chez les plus forts, les plus solidement bâtis, la vie cérébrale.
Dans le roman où se dessine cette héroïne d’une si chaude vie, on peut suivre le même travail minutieux de représentation par un grand nombre d’incidents sur tous les personnages de premier plan ; toute une période de leur vie nous est donnée en d’innombrables instants pour Wronsky l’homme moderne du bel air, élégant, un peu lourd d’esprit ; mais noble, constant, délicat, digne d’être aimé, et se haussant parfois à de grandes idées humaines étrangères à sa caste, comme pour Lévine plus fruste, plus simple et plus profond et dépeint de ses occupations de gentilhomme campagnard à ses angoissantes préoccupations sur le but et le sens de la vie. […] Dans ce vaste drame, la vie même est jouée ; les spectateurs sont de la pièce ; ils ne sortent pas d’eux-mêmes, mais, pris à la magie de cet art, s’abandonnent à la belle et facile occasion de poursuivre leur existence quotidienne dans le fictif, dans un lieu sans peines, sans dégradants soucis de soi-même, mais baigné d’une atmosphère de rêve et de brume immense, complexe, obscur, fragmentaire, vaste, noire, et si immédiatement connu d’une vue si proche, que le lecteur s’y perd et s’y trouve comme un passant dans le large miroir des eaux profondes ou stagnent le ciel, le site et lui-même qui reconnaît son ombre dans la leur. […] Comme Tolstoï sait montrer le charme vrai de la vie de famille, il décrit encore et fait aimer le libre attachement des hommes entre eux, la camaraderie, l’amitié, la fraternité, l’affection et l’aide mutuelle des paysans d’une même commune, les beaux attachements des soldats d’une même troupe, l’en-masse des foules, ou plus individuellement la liaison de Wronsky avec ce grand officier lent de la garde Javshine, ou de Nicolas Rostow avec Denissow ; la vérité sans embellissement du récit est la même et provoque de cordiales adhésions. […] Mêlée de vues bornées chez Lévine et sa femme, de morgue chez Wronsky, d’exaltée amertume chez Anna, de sèche étroitesse chez Karénine, cette bonté élémentaire et comme animale éclate pure cependant et puissante chez ce groupe d’êtres de haut rang, et dans le grave tableau de la mort de Nicolas Lévine, où son frère et la femme de celui-ci viennent simplement et cordialement s’asseoir au chevet de ce pauvre agonisant à côté de la prostituée dont il a fait sa compagne et, plus haute encore et plus belle, quand Anna adultère au su de son mari, et croyant mourir des couches de la fille de son amant joint la main de l’homme pour qui elle s’est perdue à celle de l’homme qu’elle a trahi et induit Karénine à pardonner avec tant de noblesse à son ennemi que le comte Wronski reste troublé de devoir s’incliner devant celui qu’il méprisait. […] Ce problème est un objet de pensée que l’on ne tranche pas de quelques apostrophes : il appartient de le discuter à ceux qui sont fervents de vérité plus que de belles illusions, ne connaissent d’autre passion que celle d’égaler leur âme au système du monde.
De la culture classique il n’a retenu que ce beau talent d’écrire, mis au service de quels appétits ! […] Mignon insiste, avec beau coup de raison, sur la valeur éducative de l’exemple. […] Quel discours, aussi éloquent dans sa rudesse militaire que les plus beaux de Tite-Live ! […] Le père d’Ernest Dupré, qui occupait, si mon souvenir ne me trompe pas, une chaire importante du lycée Condorcet, avait transmis à son fils un goût des beaux vers et de la belle prose qui se manifestait sans cesse par des citations, tantôt classiques, tantôt modernes. […] La liste serait longue des précieuses et belles œuvres ainsi disparues.
En principe et dans la logique du cabinet, les libertés ont beau se toucher, il n’en est pas ainsi dans les faits. […] Jusqu’ici nous n’avons vu que le beau côté de Montaigne. […] Changeray-je pas pour vous cette belle contexture des choses ? […] Espérez-vous bien d’expliquer par l’amour-propre tant de belles notions dont l’histoire est pleine ? […] Les plus belles de ses pensées n’appartiennent peut-être pas à cette sphère.
Il aime les ardents, les tendres, les indisciplinés : et les tristes qui voient tout en beau en pleurant sur tout. […] Ni gagne-pain751, ni amusement, sa poésie fut l’épanchement nécessaire d’une âme noble, belle et, si j’ose dire, fondante. […] Il avait l’orgueil adroit, l’art d’imposer son génie, de le présenter en beau jour. […] Dans une dernière pièce l’auteur dénonçait lui-même la fantaisie créatrice de sa poésie, il disait adieu à son beau rêve d’Asie, et remisait pour ainsi dire tout le bibelot oriental qu’il avait déballé : il annonçait une poésie plus intime et plus personnelle. […] Je ne finirais pas si je voulais nommer tous ceux qui à côté d’eux, disciples, amis, indépendants, firent de beaux vers, et se firent un nom.
Ce qui est certain, c’est qu’en lisant les Commentaires de Montluc, il revit pour nous tout entier. « Il faisait beau l’ouïr parler et discourir des armes et de la guerre » ; ainsi disait en son temps Brantôme qui l’avait entendu, et nous, lecteurs, nous pouvons le redire également aujourd’hui. […] On lui donna même pour récompense la Torre della Nunziata, près la Torre del Greco, un des beaux châteaux et la première baronnie du pays. […] Lui qui n’a point lu les livres ni étudié, il a de belles et grandes paroles que lui envierait un Chateaubriand et tout écrivain d’éclat, et comme les trouvent parfois, sans tant de façons, ceux qui, avec une pensée vive et une âme forte, écrivent ou dictent en tenant l’épée. […] Il est content quand il peut dire dans une de ces marches hardies : « C’était une belle petite troupe que la nôtre. » Dans les guerres de Piémont, sous le maréchal de Brissac, il avait extrait de sa compagnie, qui était dans une garnison, trente-quatre soldats qui avaient des morions ou casques jaunes (car il avait éprouvé le bon effet, sur le moral, de ces marques distinctives), et qui étaient renommés sous ce nom : « Tant qu’il y aura mémoire d’homme qui fut alors en vie, écrivait-il vingt ans après avec orgueil, il se parlera en Piémont des braves morions jaunes de Montluc : car, à la vérité, ces trente quatre en valaient cinq cents, et me suis cent fois étonné de ce que ces gens firent lors : je pouvais bien dire que c’était petit et bon11. » Je ne voudrais pas avoir l’air de restreindre les mérites et la portée de Montluc.
On trouve, en effet, chez lui de belles pensées qui semblent n’avoir pu être conçues que par un chrétien, à côté d’autres pensées qui semblent ne pouvoir être que d’un philosophe. […] Assurément on aurait mieux aimé voir dans ces élans et ces prières, dans ces méditations sur la foi, les traces directes et les témoignages d’une lutte intérieure et d’un de ces beaux orages mélancoliques et mystiques tels qu’on en a dans la jeunesse, une seconde forme du drame intérieur de Pascal. […] Gilbert, faisant à merveille son devoir d’avocat et d’ami de Vauvenargues, observe d’ailleurs avec justesse qu’on ne doit pas prendre trop au sérieux une idée en l’air, et dont Vauvenargues avait été le premier à faire bon marché et à rire. — La seule conclusion que je veuille tirer, c’est que nous avons désormais en Vauvenargues un sujet plus compliqué qu’on ne l’imaginait, un sujet plus mélangé et plus humain, et moins pareil (au moral) à une belle statue d’éphèbe. […] Il fallait pour nous le produire, dès vingt-deux ans, sous ces aspects non moins vrais et plus généralement respectables, sa correspondance avec le marquis de Mirabeau, fort belle des deux parts, et tout à fait digne de leurs noms.
comment s’y prendre, si l’on veut ne rien omettre d’important et d’essentiel à son sujet, si l’on veut sortir des jugements de l’ancienne rhétorique, être le moins dupe possible des phrases, des mots ; des beaux sentiments convenus, et atteindre au vrai comme dans une étude naturelle ? […] Despréaux le satirique avait un frère aîné, satirique également, mais un peu plat, un peu vulgaire ; un autre frère chanoine, très gai, plein de riposte ; riche en belle humeur, mais un peu grotesque, un peu trop chargé et trop enluminé ; la nature avait combiné en Despréaux les traits de l’un et de l’autre, mais avec finesse, avec distinction, et avait aspergé le tout d’un sel digne d’Horace. […] Les académies, les chaires oratoires sont plutôt destinées à montrer la société et la littérature par les côtés spécieux et par l’endroit ; il n’est pas indispensable ni peut-être même très-utile que ceux qui ont pour fonction de déployer et de faire valoir éloquemment les belles tentures et les tapisseries, les regardent et les connaissent trop par le dessous et par l’envers : cela les gênerait. […] Un mot d’Eschine est resté le plus bel éloge de Démosthène.
La pudeur, la rougeur, cet apanage de la première jeunesse, leur a passé il y a beau jour ; l’audace va naître tout d’un coup, même chez les plus timides ; elles sont femmes désormais à faire les avances. […] Clotilde est belle, de sa pleine et entière beauté, jeune encore, trente-quatre ans et demi, pas davantage ; elle est dans l’âge de la crise, mais le danger n’est pas le même pour elle que pour l’épouse précédente ; car elle, elle aime son mari, son Fernand ; elle fait, il est vrai, ménage on étage à part depuis huit ou dix ans, mais elle guette le moment de le reconquérir. […] Vous avez vu quelquefois un beau jeune homme de trente-cinq à trente-neuf ans environ : il a encore toute la physionomie de la jeunesse ; son œil est vif, sa tempe marquée à peine, sa moustache brune, toute son expression souriante. […] cet homme, jeune encore d’air et d’années, est assis devant vous, de côté, près d’une fenêtre ; le soleil se couche ; un rayon glisse et l’effleure, et alors, sur cette tête si riche et si fière de sa brune parure, vous voyez tout à coup se dessiner, avec une précision désespérante, quelques mèches qu’on ne soupçonnait pas et qui ont beau être mêlées artistement aux autres plus naturelles : une couleur rougeâtre, sous cette lumière rasante, les a trahies.
. — Le bon Sosie ne manque pas de glisser de nouveau son proverbe et de pousser, selon son habitude, l’idée de son maître jusqu’à en faire une maxime : « C’était bien sage à lui, dit-il, d’en agir ainsi ; car, par le temps qui court, la complaisance engendre l’amitié, la vérité fait des ennemis. » — « Cependant, poursuit le père, voilà bien trois ans de cela, arriva ici dans le voisinage une femme d’Andros, sans parents, pauvre, belle, à la fleur de l’âge. » — « Aïe ! […] Mais non : le père a beau questionner le matin les petits esclaves qui vont et viennent. — « Holà ! […] Pour nous tous, qui sommes déjà d’autrefois, pour ceux qui, comme nous, ont été nourris des lettres dès l’enfance et qui sont plus volontiers critiques qu’artistes, plus des hommes de livres que des curieux de marbres et de statues, ce sont nos figures préférées, nos formes à nous, toutes poétiques et littéraires, lesquelles aussi, comme les trois ou quatre beaux groupes antiques conservés, nous apparaissent toutes les fois que nous regardons en arrière et décorent nos fonds de lectures et de souvenirs. […] Ce genre, en effet, est l’un des plus beaux fleurons de la poésie dite de l’Empire.
M. de Senfft, qui venait de perdre sa belle — mère, ne le vit lors de son passage à Dresde en avril 1811 que dans quelques conférences d’affaires. […] Il n’épargne ni le roi Jérôme qui, durant son passage à Varsovie, s’était renfermé dans son rôle de général en chef d’un des corps de la grande armée, et s’était abstenu soigneusement, avec une intention marquée, de tout ce qui aurait pu blesser le roi de Saxe, souverain du pays, ou gêner l’ambassadeur extraordinaire de l’Empereur, — il n’épargne ni le maréchal Davout, ce grand militaire et qui eut en face de l’ennemi, dans les moments les plus difficiles, de si belles inspirations couronnées par la victoire, ni Vandamme, alors persécuté, ni le duc de Bassano, dépouillé de tous ses pouvoirs et honneurs, ni personne…, ni M. […] Bignon, a donné les plus curieux détails, et les plus circonstanciés, sur les ladreries, mesquineries et lésineries avérées de cet archevêque ambassadeur qui ne savait faire que de belles phrases, s’endormir au Conseil et dans toutes les cérémonies, et qui ne voulut jamais qu’on prît la peine d’approprier sa chapelle pour y entendre une seule fois la messe42. […] Je le vois encore avec sa petite taille, sa tête portée en arrière, son geste pétulant, cette figure dont on a dit « qu’elle ressemblait à celle du péché mortel vieilli. » J’eus beau faire, je n’avais encore rien rabattu en moi, à cette époque, des hauts dégoûts et des dédains superbes de la jeunesse ; on l’entourait, on faisait cercle, on l’appelait Monseigneur à tour de bras : pour moi, je ne pus parvenir à rattacher à la figure du personnage rien qui ressemblât à de la considération et à du respect.
Il n’est pas moins vrai que le jeune abbé malgré lui, fier et délicat comme il était, dut ressentir avec amertume l’injustice des siens : quoique d’un rang si distingué, il entrait dans le monde sous l’impression d’un passe-droit cruel dont il eut à dévorer l’affront ; il se dit tout bas qu’il saurait se venger du sort et fixer hautement sa place, armé de cette force qu’il portait en lui-même, et qui déjà devenait à cette heure la première des puissances, — l’esprit si la théologie avait pu être en passant une bonne école de dialectique, il faut convenir encore que cette nécessité où il se vit aussitôt de remplir des fonctions sacrées, sans être plus croyant que l’abbé de Gondi ; que cette longue habitude imposée durant les belles années de la jeunesse d’exercer un ministère révéré et de célébrer les divins mystères avec l’âme la moins ecclésiastique qui fût jamais, était la plus propre à rompre cette âme à l’une ou l’autre de ces deux choses également funestes, l’hypocrisie ou le scandale. […] Il était au cercle de Mme du Barry : les habitués y racontaient tout haut leurs bonnes fortunes ; le jeune abbé de vingt ans, très-élégant sous son petit collet « avec une figure qui sans être belle était singulièrement attrayante et une physionomie tout à la fois douce, impudente et spirituelle », gardait le silence : « Et vous, vous ne dites rien, monsieur l’abbé ? […] Selon les uns, ce serait Lannes ou Lasalle qui, voyant Talleyrand dans son costume de cour et faisant belle jambe, autant qu’il le pouvait, aurait dit : « Dans de si beaux bas de soie, f.… de la m…. !
Et encore : « Ce n’est qu’en dansant que je sais dire les symboles des choses les plus sublimes. » L’individualisme de Nietzsche, — bruit, agitation, tumulte, orgie, plus qu’harmonie, — est moins beau que le stoïcisme ou l’épicurisme. […] Sa pensée centrale est noble, belle et puissante : il me paraît juste de la délivrer de ce qui lui est contraire ou étranger. […] Il constate, implacable : « Les fantaisies de Lycurgue coûtèrent à Sparte son intelligence ; les hommes y furent beaux comme des chevaux de course et les femmes y marchaient nues drapées de leur seule stupidité ; l’Athènes des courtisanes et de la liberté de l’amour a donné au monde moderne sa conscience intellectuelle. » Ce redoutable destructeur des apparences, seules divinités adorées par la tourbe, cet amoureux de l’unique réalité, l’individu, a bien conscience d’être un monstre fort haïssable non seulement pour la foule, mais aussi pour les « âniers innocents qui accompagnent mais ne guident pas la caravane ». […] Je voudrais louer convenablement ce que Camille de Sainte-Croix, si bien doué pour la définition rapide, appelle le « beau jardin intellectuel » où Remy de Gourmont « cultive ses paradoxes spéciaux avec une foi de son choix, curieusement faite d’ironie fervente et de caprice raisonné ».
Ce n’est plus lui, c’est un ami (le meilleur et le plus beau de ses amis, il est vrai), Raphaël, qui a laissé en mourant un manuscrit. […] Une riche nature sans doute les sert mieux et les enchante ; la grande nature admirée ensemble est le plus bel accompagnement d’un noble amour. […] Dans cette admirable élégie du Lac, qui vaut mieux, à mon sens, que tout Raphaël, le poète ne prenait encore les objets que pour ce qu’ils étaient un peu indistinctement à ses yeux, pour les témoins confus, pour les confidents et les dépositaires de son bonheur : Ô lac, rochers muets, grottes, forêt obscure, Vous que le temps épargne ou qu’il peut rajeunir, Gardez de cette nuit, gardez, belle Nature, Au moins le souvenir ! […] Je m’attache au seul personnage de Julie, qui fait l’âme du livre, et je lui applique ce que M. de Lamartine lui-même, dans l’un des beaux passages du volume, dans sa visite aux Charmettes, nous a dit de Mme de Warens : Je défie un homme raisonnable, affirme-t-il, de recomposer avec vraisemblance le caractère que Rousseau donne à son amante, des éléments contradictoires qu’il associe dans cette nature de femme.
Havet, sur un seul point, et montrer comment, malgré tous les changements survenus dans le monde et dans les idées, malgré la répugnance que causent de plus en plus certaines vues particulières à l’auteur des Pensées, nous sommes aujourd’hui dans une meilleure position pour sympathiser avec Pascal qu’on ne l’était du temps de Voltaire ; comment ce qui scandalisait Voltaire dans Pascal nous scandalise moins que les belles et cordiales parties, qui sont tout à côté, ne nous touchent et ne nous ravissent. […] La langue française n’a pas de plus belles pages que les lignes simples et sévères de cet incomparable tableau. Poursuivant l’homme au-dedans comme il l’a fait au-dehors, Pascal s’attache à démontrer dans l’esprit même deux autres abîmes, d’une part une élévation vers Dieu, vers le beau moral, un mouvement de retour vers une illustre origine, et d’autre part un abaissement vers le mal et une sorte d’attraction criminelle du côté du vice. […] Il faut citer ce passage d’une souveraine beauté : Qui voit Pythagore ravi d’avoir trouvé les carrés des côtés d’un certain triangle, avec le carré de sa base, sacrifier une hécatombe en actions de grâces ; qui voit Archimède attentif à quelque nouvelle découverte, en oublier le boire et le manger ; qui voit Platon célébrer la félicité de ceux qui contemplent le beau et le bon, premièrement dans les arts, secondement dans la nature, et enfin dans leur source et dans leur principe, qui est Dieu ; qui voit Aristote louer ces heureux moments où l’âme n’est possédée que de l’intelligence de la vérité, et juger une telle vie seule digne d’être éternelle, et d’être la vie de Dieu ; mais (surtout) qui voit les saints tellement ravis de ce divin exercice de connaître, d’aimer et de louer Dieu, qu’ils ne le quittent jamais, et qu’ils éteignent, pour le continuer durant tout le cours de leur vie, tous les désirs sensuels : qui voit, dis-je, toutes ces choses, reconnaît dans les opérations intellectuelles un principe et un exercice de vie éternellement heureuse.
Qu’on interroge ceux de nos grands poètes qui ont fait passer avec succès en notre langue quelques beaux endroits de Virgile ou d’Homère : combien de fois ont-ils été forcés de substituer aux idées qu’ils ne pouvaient rendre, des idées également heureuses et prises dans leur propre fonds, de suppléer aux vers d’image par des vers de sentiment, à l’énergie de l’expression par la vivacité des tours, à la pompe de l’harmonie par des vers pensés ? […] On connaît ces beaux vers de Virgile sur les malheureux qui se sont donnés la mort : ……………………… Qui sibi lethum Insontes peperêre manu, lucemque perosi Projecêre animas. […] Le génie timide de notre langue ne permettait pas d’employer cette image, toute animée et toute noble qu’elle est ; un de nos grands poètes y a substitué ces deux beaux vers : Ils n’ont pu supporter, faibles et furieux, Le fardeau de la vie impose par les dieux. […] En général, lorsque le sens m’a paru disputé ou douteux, j’ai choisi le plus beau, parce qu’il y a toujours lieu de croire que c’est celui de Tacite.
À l’Académie, elle fut trouvée belle, comme elle y fut trouvée poëte. […] Pour elle grande chose — trop grande même, — prendre l’Italie révolutionnée pour piédestal, c’était plus beau que le cap Misène ! […] Mme Colet a beau, en effet, s’absorber dans l’adoration de la Liberté et de la Révolution italienne et se plonger en leurs délices, il faudrait bien des révolutions, les unes sur les autres, pour empêcher sa personnalité de remonter à la surface, et pour faire disparaître de ses livres, cette petite vanité de bas-bleu, qui y remonte toujours, comme sur l’eau dans laquelle on le noie, un petit chat, impossible à tuer ! […] Mais quand on rayerait ces deux faits navrants des récits de Mme Colet, ce qui reste serait encore d’une assez belle ignominie.
Comme les hommes d’antique science, de goûts studieux et innocents, il se passait quelquefois sa belle humeur en tenant la plumes. […] [1re éd.] il se passait quelquefois sa belle humeur plume en main.
Mon cher ami, J’ai reçu votre beau volume, et j’ai à vous remercier d’abord des mots aimables dont vous l’avez accompagné ; vous m’avez depuis longtemps accoutumé à vos bons et fidèles sentiments à mon égard […] Bien des champs aussi étaient déjà moissonnés, et les plus beaux lauriers étaient coupés.
Il y avait force beau monde. […] Ce parterre de l’Odéon, au moindre beau vers, frémissait comme un seul homme, comme une forêt sous le souffle.
Arthur, à son début dans le monde, se rend au château de Montholin en Bretagne, pour y épouser la jeune et belle Izolette à laquelle il est destiné sans la connaître. Izolette réunit tous les charmes et toutes les vertus ; elle aime Arthur dès le premier jour : mais elle n’a pas l’air assez mélancolique ni assez idéal ; et le jeune et bel Arthur, qui a été élevé par le philosophe systématique Olburge, dans tout le vague de théories hyperboliques, ressent pour elle je ne sais quel mécontentement.
Je cueille au hasard ces beaux vers : Ne te lamente pas, homme des nouveaux âges, Parce que, dans les yeux des voyants et des sages, Les rêves du passé ne resplendiront plus. […] Quel plus bel éloge pourrait-on en faire ?
Les vers du sonnet sont très beaux — tous font image. […] Ce sonnet est un amusant paradoxe détaillant une des correspondances possibles des choses, et, à ce titre, il est beau et curieux.
Ils sont pleins de vie, de santé et de belle humeur. […] Gabriel Vicaire s’en va, comme plusieurs autres muses, remplir sa cruche à la fontaine d’où coule intarissable le beau flot d’argent de la chanson populaire, et elle écoute les oiselets qui pépient autour de la source sacrée.
Quand il pensait à tant de belles choses qui seraient à faire, quand il voyait la moisson si belle et les ouvriers si peu nombreux, il était pris d’une sorte de fièvre ; il assumait pour lui la tâche de dix autres.
Jupiter lui accorda encore cette requête ; et les chevaliers et leurs dames, descendant des nues sur le théâtre au son de plusieurs instruments, dansèrent divers ballets : ce qui fut la fin de cette belle moralité. […] Dès qu’il est arrivé, il se confesse au saint père, qui lui fait un beau sermon pour lui faire sentir toute l’énormité de son crime ; et voyant la sincérité de son repentir, il lui donne l’absolution.
Ici le christianisme va plus loin que la nature, et par conséquent est plus d’accord avec la belle poésie, qui agrandit les objets et aime un peu l’exagération. […] La religion chrétienne est si heureusement formée, qu’elle est elle-même une sorte de poésie, puisqu’elle place les caractères dans le beau idéal : c’est ce que prouvent nos martyrs chez nos peintres, les chevaliers chez nos poètes, etc.
Belle sainte, venez ; entrons dans cette grotte, et là nous nous rappellerons peut-être quelques moments de votre première vie. […] La différence qu’il y a entre la Magdelaine du Correge et celle de Vanloo ; c’est qu’on s’approche tout doucement par derrière de la Magdelaine du Correge, qu’on se baisse sans faire le moindre bruit, et qu’on prend le bas de son vêtement seulement pour voir si les formes sont aussi belles là-dessous qu’elles se dessinent au dehors ; au lieu qu’on ne forme nulle entreprise sur celle de Vanloo.