J’enviais autrefois Pierre Loti, qui mourra comme moi, mais qui aura, durant sa vie, habité toute une planète, tandis que je n’aurai été l’habitant que d’une ville, ou tout au plus d’une province. […] Il les aime comme le peuple le plus sérieux d’allures, le plus préoccupé de morale et aussi comme celui qui a le plus complètement réalisé son rêve de la vie élégante et riche. […] Je ne suis cosmopolite ni par ma vie ni par mon esprit ou mon cœur.
« Le seul mode d’union qui ne soit pas contradictoire est l’union de succession rapprochée dans le temps, ou de position dans la ligne continue de la vie consciente. […] Sans certains modes particuliers de l’étendue — le cerveau et le système nerveux — nous ne pourrions avoir ces moments d’extase, — nos plaisirs, nos souffrances, nos idées, — qui dans cette vie alternent par accès avec notre conscience étendue. » II Allant encore plus loin, M. […] Une vie consacrée tout entière à la culture de l’intelligence doit être accompagnée d’un affaiblissement général des autres facultés, aussi bien que des fonctions purement physiques.
L’homme fait, depuis des siècles de siècles, des efforts de cauchemar pour secouer le servage naturel qui plie vers la terre la moitié de sa vie. […] Rêver de ta beauté, de ta grandeur, de la douceur affolante de tes baisers, cela suffit à remplir une vie. […] Ses frémissements doivent rester libres, ne point servir à payer la vie de la bête.
Si l’impartialité est de rigueur pour l’historien tout le temps qu’il raconte les faits, scrute les causes et peint les caractères, une fois cette triple trame de l’histoire impassiblement déroulée, il reste la conclusion dernière, le jugement suprême à prononcer ; et cette conclusion et ce jugement ont toujours autant de chaleur, de passion et de vie, qu’il y en a dans la conscience et le sentiment moral de l’historien. Eh bien, c’est cette passion et cette vie, qui révèlent la force de la conscience, que je voudrais voir davantage dans ce livre ! […] De tout cet Henri IV de Pont-Neuf, d’illusions et de préjugés, il reste le vrai, le Henri de Capefigue, cet Henri d’une duplicité gausseuse, de cette duplicité qu’il opposa à tout dans la vie et même à lui : car, sans l’indiscrétion de sa raillerie, il eût été facilement hypocrite.
Inspiration personnelle ou sociale, regret du cœur, perspective de la vie revue en se retournant de l’autre bord de l’horizon, sentiment de l’irréparable, d’abord amer et devenant plus triste à mesure qu’il est plus résigné, oui ! cette chimère du passé, des réalités la plus terriblement réelle, cette inévitable fatalité du souvenir que Manfred maudit, dans Byron, et qu’il appelle l’impossibilité d’oublier, voilà, malgré les tours de force du linguiste et les travaux de joaillier que Gramont exécute sur le rhythme, ce qui distingue ses poésies et communique un charme profond à ce recueil, qui est, on le sent à travers les ciselures passionnées du poète et de l’idolâtre matériel, un fragment rompu de la vie et non un livre de vers écrit seulement pour montrer qu’on sait faire des vers ! […] en y laissant des portions de nous-mêmes qui sont plus que la vie, et qui ne reviendront pas plus qu’elle… Eh bien, c’est le mal de ce temps, au fond de son âme, à lui, qu’on retrouve dans le livre de Gramont !
Sa famille, comme protestante, ne vivait, depuis la révocation de l’Édit de Nantes, que d’une vie précaire, errante et presque clandestine. […] M. de Fontanes, en sauvant l’esprit religieux, conserva toute sa vie l’aversion des dogmes durs qui avaient contristé son enfance. […] Mais bientôt la vie de Paris et du xviiie siècle, la vie de monde et de plaisir le prit et insensiblement le dissipa. […] Tête, cœur, caractère, j’ai tout trouvé en vous à ma guise, et je sens désormais que je vous suis attaché pour la vie…. […] Ne voulant pas imiter un estimable et du reste excellent biographe, qui, dans la Vie de Fénelon, est pour Fénelon contre Bossuet, et qui, dans la Vie de Bossuet, passe à celui-ci contre Fénelon, je n’ai rien à redire ni à modifier.
Or, la vie est une évolution. […] Discontinue est l’action, comme toute pulsation de vie ; discontinue sera donc la connaissance. […] A qui s’installe dans le devenir, la durée apparaît comme la vie même des choses, comme la réalité fondamentale. […] Et dès lors on envisagerait sous un nouvel aspect la vie que nous rencontrons à la surface de notre planète, vie dirigée dans le même sens que celle de l’univers et inverse de la matérialité. […] Mais la vie et la conscience sont cette montée même.
Comment raconter la vie de Jean-Jacques, son enfance, ses durs commencements, ses belles années, comment retracer de nouveau les particularités de sa physionomie de jeune homme, après les Confessions ? […] La Correspondance avec Bancal, et quelques autres lettres inédites encore que nous avons eues sous les yeux, nous présentent Mme Roland durant une partie de sa vie qu’elle a moins retracée en ses Mémoires, après les années purement intérieures et domestiques, et avant l’entrée de son mari au ministère. […] Il est difficile, à cinquante ans de distance, de laver Brissot des calomnies de Morande ; mais toute la partie publique de sa vie repousse et anéantit les récriminations adressées à la partie antérieure et obscure. […] Et, avec cela, elle ressentait la vie domestique, la vocation maternelle, pratiquait le ménage dans sa simplicité et savait écouter la nature dans ses secrètes solitudes. […] Saturæ sordida rura casæ, dit Martial. « J’asine à force et m’occupe de tous les petits soins de la vie cochonne de la campagne. » (Lettre du 12 octobre 1785.)
On ne sait rien ou presque rien de la vie de La Bruyère, et cette obscurité ajoute, comme on l’a remarqué, à l’effet de son œuvre, et, on peut dire, au bonheur piquant de sa destinée. […] Ses habitudes étaient prises, sa vie réglée ; il n’y changea rien. […] On lit dans la note manuscrite de la bibliothèque de l’Oratoire, citée par Adry, « que madame la marquise de Belleforière, de qui il était « fort l’ami, pourroit donner quelques mémoires sur sa vie « et son caractère. » Cette madame de Belleforière n’a rien dit et n’a probablement pas été interrogée. […] Il représente les inconvénients, les passions, les ridicules, et dans sa vie il y tombe ; La Bruyère jamais. […] La Bruyère, après cela, a bien d’autres applications possibles par cette foule de pensées ingénieusement profondes sur l’homme et sur la vie.
En 1811, M. de Latouche faisait représenter sur le théâtre de l’Impératrice (Odéon) une petite comédie en un acte et en vers, Les Projets de sagesse ; c’était la vie de jeune homme, d’étudiant en droit d’alors, esquissée dans des vers légers et assez bien tournés. […] Si, dans sa vie, il songea beaucoup à la poésie et à la gloire, il commença par beaucoup écrire pour les libraires. […] » Non : sa vie est encore errante en mille atomes… Objet de mes chastes serments, Tu n’as point revêtu la robe des fantômes, Et tes restes encor me sont doux et charmants. […] Ceux qui ont trouvé en leur vie quelques-uns de ces accents, eussent-ils ensuite poussé bien des cris de colère et de rancune, il doit leur être beaucoup pardonné. […] Vous étiez là aux sources de l’inspiration, de la consolation véritable, de la poésie limpide et de la vie.
Il y a des fables où les animaux sont des prétextes, et pas autre chose, et où, sous le nom de lion, il faut entendre le roi, sous le nom de loup, le hobereau cruel et tyrannique de campagne, ou — car il y a cela aussi — l’homme absolument indépendant et vivant la vie libre et sauvage. […] Autrefois on t’eût vu sauver sa bergerie : Tu menais une honnête vie. […] Tu vivais de sa vie et tu meurs de sa mort. […] dans sa première nature, dans sa première origine, l’homme lui-même, a eu à apprendre tout pour soutenir et défendre sa pauvre vie ; l’animal comme l’homme. L’animal a appris un certain nombre de choses nécessaires à sa subsistance, nécessaires à sa défense, nécessaires à sa vie, et quand il les a sues, quand sa vie a été à peu près assurée, il a été très sage, il s’est arrêté, parce qu’il est un sage ; il a dit : « Je n’ai besoin de rien de plus !
Il n’a pas le montant du talent, le ragoût enragé de l’apprêt, de l’art de tout ce qui crée la vie et l’illusion dans le mensonge humain. […] La physiologie n’est pas chose si désintéressée dans sa vie. […] Michelet, qui a passé sa vie à faire de l’histoire, devrait savoir cela. […] il s’agit de la vérité absolue ; il s’agit de la vie ou de la mort de la France ! […] Cet ennemi du Christianisme, pour instituer sa société révolutionnaire a rabâché le Christianisme, dont il méconnaît l’esprit, la vie, la puissance immortelle.
Il regarde sous un angle particulier et dans une certaine perspective et les caractères et la vie humaine ; il considère de parti pris une série de faits en éliminant tous les autres : il fait son choix systématique et exclusif dans l’immense variété du « document humain ». […] Il n’est point exact, ainsi qu’il le prétend, qu’il ait le premier essayé de se mettre en face de l’humanité réelle et vivante ; mais ce qui est exact, et il convient de lui accorder cette originalité, c’est qu’il a sa psychologie et son observation particulières, qu’il voit la vie contemporaine et s’efforce de la représenter à sa manière, avec un parti pris, brutal si l’on veut, mais décidé. […] L’artiste n’est pas un savant qui recherche les causes ; sa tâche à lui c’est de peindre les effets, de faire jaillir de son œuvre l’émotion, douce ou terrible, qui tour à tour nous prend en face de la vie elle-même, de remuer nos cœurs, de nous attendrir, de nous faire sourire ou frémir. […] Je ne sais si l’on a jamais vu une femme, même arrivée à cette crise redoutable de la quarantième année, tombant tout d’un coup, sans transition, sans explication, sans cause, après une vie honnête et régulière, à une aussi lamentable dégradation que celle dont l’un d’eux nous a dit l’histoire. […] Il l’a avertie que ce n’était pas tout l’art et toute l’humanité que la Cité-Dorée, la Boule-Noire ou la rue de la Goutte-d’Or, qu’il y avait autre chose dans Paris que Belleville ou le quartier Mouffetard, et que le roman contemporain n’aurait vraiment donné sa mesure que lorsqu’il aurait su représenter une Parisienne de nos jours avec toute l’élégance de sa vie et toute la délicatesse de ses sensations.
De tant de tragédies, il ne s’est conservé que quatre vers des Pélopides, où se rencontre une forte et mélancolique image : « Les infortunés144, quand la mort est loin, l’appellent de leurs vœux ; mais, lorsque vient sur nous le dernier flot de la vie, nous souhaitons de vivre : on n’a jamais satiété de la vie. » Que si, d’après la seule œuvre de ce poëte qui lui ait survécu, on augure mal de son génie ; si la subtile et bizarre emphase du poëme d’Alexandra ne permet de lui attribuer, ni la libre éloquence nécessaire au drame, ni la splendeur lyrique, n’oublions pas cependant qu’il fut, pour les contemporains, l’égal d’Apollonius de Rhodes, d’Aratus et de Théocrite, formant avec eux et d’autres plus obscurs la pléiade poétique du ciel alexandrin. « L’or et la boue sont confondus pendant la vie de l’artiste, et la mort les sépare », dit la Bruyère, parlant de ces faux parallèles que fait, à toutes les époques, la vue partiale et confuse des témoins du temps. […] Mêlés par le commerce, le partage de la milice, le service public des princes, à toute la vie du peuple conquérant, ils adoptèrent des idées, des systèmes de philosophie qu’ils exposèrent à leur tour dans la langue nouvelle dont ils se servaient pour l’exercice même de leur culte : ainsi, beaucoup de leurs croyances durent se répandre autour d’eux et se communiquer au dehors. […] ce restaurateur de la naïveté homérique, ce peintre des champs et de la vie pastorale fut d’abord un poëte de cour. […] La différence entre la poésie pastorale et la poésie rurale des Géorgiques, c’est la peinture de l’amour et l’expression dramatique dans la vie la plus simple.
Ce n’était pas l’enthousiasme de l’ode que vous pouviez attendre d’un tel poëte, Il fut à la muse lyrique de l’antiquité ce que l’Italie du moyen âge était aux cités glorieuses de l’ancienne Grèce, Il représenta cette vie plus oisive que libre, plus agitée que forte, où l’Italie du quatorzième siècle souffrit et lutta, sans rien faire de grand au dehors, et sans s’affranchir elle-même. […] Non qu’il ait jamais donné une vie actuelle et puissante aux grands souvenirs qui font la gloire et l’illusion de l’Italie. […] levez les yeux vers la sphère éternelle ; vous dédaignerez les aspects de cette vie menteuse, et tout ce qu’elle craint, et tout ce qu’elle espère. […] N’est-ce pas elle, en effet, qui, toute ravie d’amour divin, s’écrie dans un cantique : « Je vis, sans vivre en moi-même ; j’aspire à une vie si haute, je la sens si proche, que je meurs de ne pas mourir ! […] Ajoutons-le : dans cette inégale mais forte civilisation du seizième siècle, où la vie était partout et s’accroissait par la division même, une ville de province, justement citée aujourd’hui pour son École de cavalerie, avait alors son éditeur de Pindare, Jean Benoist, docteur en médecine, professeur de langue grecque à l’Académie royale de Saumur.
On s’attend à s’épancher : on se trouve à sec, si l’on ne veut nourrir ses causeries et ses lettres de commérages et de niaiseries, ou remplir son journal du détail extérieur et insignifiant de sa vie. […] On tâche donc au contraire de suspendre son activité ; on arrête en soi la vie, comme si de ce calme et de cette langueur allait soudain jaillir la pensée comme l’eau parmi les sables du désert.
. — La Vie et la mort du duc de Berry (1820). — De la Restauration (1831). — Du bannissement de Charles X (1831). — Sur la captivité de la duchesse de Berry (1833). — Les Natchez (dans les Œuvres complètes de 1826-1831). — Aventures du dernier des Abencérages (dans les Œuvres complètes de 1826-1831) […] — Études sur l’Empire romain (1831). — Voyages en Amérique, en France et en Italie (1834). — Essai sur la littérature anglaise (1836). — Le Paradis perdu de Milton (1836). — Le Congrès de Vérone (1838). — La Vie de Rancé (1844). — Les Mémoires d’outre-tombe (1849).
On voit, par la plupart de ses Pieces, & sur-tout par celle du Joueur, qu'il auroit pu égaler plus souvent son Modele, si une vie trop dissipée, des voyages très-longs & très-fréquens n'eussent nui à la perfection de ses talens. […] La vie de Regnard a été totalement opposée à ce principe.
On constata, qu’avec l’aspiration vers la Vérité, l’homme propose à la vie phénoménale un but qui, atteint, irait à supprimer la vie phénoménale, qu’avec cette aspiration, il applique à ce qui est situé dans le devenir et dont l’essence est le mouvement dans la diversité, la loi de ce qui par hypothèse serait immuable et reposerait, inconcevable, dans l’identique.
Dans l’Élysée antique le fleuve du Léthé n’avait point été inventé sans beaucoup de grâce ; mais toutefois on ne saurait dire que les ombres qui renaissaient à la vie sur ses bords, présentassent la même progression poétique vers le bonheur que les âmes du purgatoire. […] entre la mère et la fille, entre l’époux et l’épouse, entre la vie et la mort !
Les yeux du voyageur viennent d’abord s’attacher sur cette flèche religieuse, dont l’aspect réveille une foule de sentiments et de souvenirs : c’est la pyramide funèbre autour de laquelle dorment les aïeux ; c’est le monument de joie où l’airain sacré annonce la vie du fidèle ; c’est là que les époux s’unissent ; c’est là que les chrétiens se prosternent au pied des autels, le faible pour prier le Dieu de force, le coupable pour implorer le Dieu de miséricorde, l’innocent pour chanter le Dieu de bonté. […] Ce bâtiment religieux est placé derrière les bâtiments militaires, comme l’image du repos et de l’espérance, au fond d’une vie pleine de troubles et de périls.
Il semblait qu’une joie sortait du ciel, de l’eau, de l’arbre, de la terre, avec les rayons, et disait, dans le cœur, aux oiseaux, aux animaux, aux jeunes gens et aux jeunes filles : « Enivrez-vous, voilà la coupe de la vie toute pleine. » Dans ces moments-là, monsieur, on se sentait, de mon temps, soulevé pour ainsi dire de terre, comme par un ressort élastique sous les pieds. […] Après avoir bien regardé, bien soupiré et bien sangloté devant chacun de ces morceaux du domaine, qui étaient aussi des morceaux de notre pauvre vie, nous rentrâmes en silence dans le petit espace presque inculte qui nous était réservé, nous attachâmes les bêtes dans la cour herbeuse, à la porte de l’étable. […] XCIII Ce fut ainsi, monsieur, que notre vie se replia tout à coup comme un mouchoir qu’on aurait déchiré dans une large pièce de toile. […] le chagrin mûrit le cœur avant la saison ; quand le ver pique le fruit et que le vent secoue la branche, le fruit véreux tombe de lui-même ; ils ne savaient pas ce que c’était que de s’aimer, mais la peur de se perdre faisait qu’ils ne pouvaient pas plus se séparer en idée que deux agneaux nés de la même mère et qui ont sucé leur vie au même pis et à la même crèche. […] … c’est plus que ma pauvre tête, ajoutai-je en pleurant ; c’est la vie de toute ma famille, c’est le père nourricier de ma sœur, de mon neveu, de ma fille et de moi !
N’est-ce pas lui seul qui est capable, par ses deux bras, de gagner la vie de mon père, de ma tante et du pauvre chien de l’aveugle ? […] C’est moi, c’est ta sœur, c’est mon père et ma tante, c’est tout ce qui t’aime entré avec moi dans ton sépulcre pour t’arracher à la mort au prix de leur propre vie, s’il le faut, ou du moins pour mourir avec toi si tu meurs. […] — Mais c’est la vie ! lui dis-je, Hyeronimo, mon frère, mon compagnon dans le paradis comme sur la terre, ce sera la vie, sois-en sûr ! […] Vous savez, monsieur, quand on est si jeune et que l’on compte si peu de mois dans la vie passée, les mois à venir paraissent longs comme des années.