Mais l’innocente joie et la franche gaîté ont bien aussi leurs charmes ; et l’expression du bonheur est peut-être un hymne aussi respectueux pour le Dieu de qui nous tenons la vie, que ces éternelles lamentations qui semblent la lui reprocher comme un don funeste.
Son Jacques II, que je n’ai pas à juger ici, et son Guillaume III, qui en est le corollaire, ne sont, au fond, qu’une thèse whig très passionnée… Du reste, dès sa jeunesse, le whig tenait si fort Macaulay, que, dans son article sur Milton, — certainement une des plus belles choses qu’il ait écrites et l’une des plus belles qu’on ait écrites sur ce grand poète, — il se laisse emporter par son whigisme de la manière la plus… juvénile dans un hors-d’œuvre brillant, audacieux et colère.
Il y a des hommes et des femmes, en grand nombre, qui trouvent que le bonheur n’a pas de patrie nécessaire, que la joie et le souci d’une fortune à faire ou à augmenter, d’une famille à élever, d’une âme à ennoblir, d’une place à tenir dans l’amitié de quelques-uns et dans l’estime de tous, suffisent amplement à remplir les heures et à les rendre brèves.
L’homme a non-seulement des capacités spéciales comme chaque chose en a, et par exemple, celle de penser, de se souvenir, de se mouvoir ; mais, de plus, il gouverne ses capacités, c’est-à-dire qu’il les tient dans sa main et s’en sert comme il veut74.
S’il est permis de rappeler ici une habitude de sa vie qui, tout en excitant sa verve, affaiblit et consuma sa raison, il ressemblait dans son désordre poétique à ces soldats des avant-gardes turques enivrés d’opium, s’élançant avec une audace qui tenait du délire, et tombant vainqueurs, mais épuisés.
Ce privilège de l’image visuelle tient sans doute à ce qu’elle est une surface diversement colorée ; étant variée, elle attire et retient un instant l’attention, et, n’étant pas trop variée, puisqu’elle est superficielle, elle ne peut la fatiguer ; un visum est donc une diversité facilement discernable ; on ne peut en dire autant des autres images : les tacta sont monotones ; ils se distribuent sur trois dimensions sans changements bien appréciables ; enfin, ils forment avec les sensations musculaires et vitales, les odeurs et les saveurs, un écheveau difficile à débrouiller ; quant aux sons, ils ont, à bien des points de vue, plus d’indépendance que les visa ; mais ils ne se distinguent les uns des autres que s’ils forment une série successive ; simultanés, ils se confondent. […] Et, en effet, porter et maintenir l’attention sur les notions que les mots recouvrent, chercher à avoir une claire conscience de leurs rapports, comparer, après les notions, ces rapports eux-mêmes, de façon à porter la lumière de la conscience sur les conflits latents des idées ; en toute occasion, méditer, réfléchir, analyser, examiner ; tenir sa pensée toujours en éveil, toujours inquiète, toujours en devenir, en renouvellement et en progrès ; qu’est-ce autre chose que réagir contre cette inégale distribution de la conscience qui, conservant aux mots leur vivacité, laisse les idées s’évanouir et disparaître dans une ombre toujours plus épaisse ? […] Notre expérience ne nous en fournit pas du phénomène contraire : un suscité faible révélé par un suscitant fort ; cela tient sans doute à ce que l’esprit qui réfléchit et qui observe va plus volontiers de l’effet à la cause que de la cause à l’effet.
Herbert Spencer n’est ni pour Locke ni pour la doctrine contraire des « formes de la pensée. » « S’en tenir à l’assertion inacceptable que, antérieurement à l’expérience, l’esprit est une table rase, c’est ne pas voir le fond même de la question, à savoir ; — d’où vient la faculté d’organiser les expériences ? […] La justification positive du réalisme consiste à montrer que l’antithèse du sujet et de l’objet « est un produit d’actes réguliers de la pensée comme ceux qui établissent les vérités que nous tenons pour certaines au plus haut point.
Ma liaison avec M. de Mirabeau ne peut qu’accréditer l’idée qu’il a surpris mon secret ; je tiens cette liaison pour rompue, afin qu’elle ne m’expose pas au même danger pour la suite.
Gibbon, à son retour d’Italie en octobre 1765, avait repassé par Paris : il y avait trouvé Mme Necker récemment mariée et qui l’avait bien accueilli ; mais ce fut en 1777, après la publication de son premier volume, qu’il fit chez nous son séjour le plus prolongé et le plus agréable : il ne tint qu’à lui d’y être à la mode, comme David Hume quelque temps auparavant l’avait été.
Villemain, autre connaisseur, est allé jusqu’à dire (le rhéteur qu’il est) : « La paix était promise et assurée, même avant la victoire de Denain, qui n’en fut que la parure. » — Le mieux, je crois, est encore de s’en tenir au mot de Napoléon, convenablement entendu.
Sa place et la mienne elle-même ne tiennent à rien : un caprice des visiteurs peut nous replonger dans le cloître et nous replacer sous la main de ces moines qui nous haïssent.
Ce n’est là encore qu’une légère idée des désordres que j’ai vus sous mes yeux764. » — « Excessive en elle-même, la misère des campagnes l’est encore dans les désordres qu’elle entraîne ; il ne faut point chercher ailleurs la source effrayante de la mendicité et de tous ses vices765. » — À quoi bon des palliatifs ou des opérations violentes contre un mal qui est dans le sang et qui tient à la constitution même du corps social ?
Voilà la grande phrase oratoire, la période parfaite, et son cortège de propositions incidentes, enfermées les unes dans les autres, dont toutes les parties se tiennent comme les membres d’un corps vivant, et qui se porte d’un seul mouvement avec toute cette masse pour frapper un coup décisif.
Et il comprit aussi que l’enseignement supérieur, plus qu’à tout autre régime, importe au démocratique, lequel est plus visiblement fondé sur la raison ; que d’ailleurs tous les ordres d’enseignement se tiennent secrètement et influent les uns sur les autres, soit que l’ordre supérieur fasse descendre dans les autres son esprit et leur fournisse leurs méthodes, soit qu’il se recrute continuellement et se renouvelle en eux, par la facilité offerte à tous ceux que ces méthodes ont éveillés de s’élever à un degré plus haut de la connaissance.
Il croit que le bon sens, mis à l’épreuve de la pratique et de l’expérience, est le meilleur conseiller et le plus sûr guide : et il est tenté quelquefois de tenir pour inutiles les conseils écrits, à commencer par ceux qu’il donne à son fils ; mais aussitôt il se ravise, et il estime qu’il est profitable à tout bon esprit d’être mis en garde à l’avance et prémuni contre les erreurs.
Il lui conseille d’être au plus tôt un Monk, c’est-à-dire un restaurateur des rois légitimes : « Hâte-toi, s’écriait-il dans une apostrophe finale, de dissiper nos craintes et les tiennes ; hâte-toi de remplir nos vœux et d’achever ta gloire.
Le Casuiste veut montrer qu’un homme de son état est nécessaire à certaines gens, qui, sans viser à la perfection, tiennent à faire leur salut : « Comme ils n’ont point d’ambition, dit-il, ils ne se soucient pas des premières places ; aussi entrent-ils en paradis le plus juste qu’ils peuvent.
La science a été, jusqu’ici du moins, susceptible d’une extension sans limites ; c’est par elle surtout que nous pouvons espérer ajouter quelque chose à l’œuvre humaine, c’est par elle que nous pouvons espérer tenir en éveil et satisfaire à jamais notre curiosité, nous donner à nous-mêmes cette conviction que nous ne vivons pas en vain.
Le concret ne tient dans notre système dramatique que la moindre place possible.
Il est évident qu’ils sont plus petits que ne les tient même l’opinion de leurs ennemis ; car leurs ennemis conviennent volontiers de la force qui était en eux, et se contentent d’en blâmer l’usage.
La cause ancienne de cette opinion tenait sans doute à une sorte de rudesse des hommes de la Béotie, n’ayant pas eu, comme ceux d’Athènes, l’activité du commerce et des arts, vivant d’une vie plus simple, laboureurs et bergers, et ne pratiquant pas, comme les Spartiates, leurs voisins, cette forte discipline, cette vertueuse et austère pauvreté qui, seule aux yeux des Grecs, soutenait le parallèle avec la magnificence et le bon goût d’Athènes.
D’autres fois, le poète ne peut se tenir d’ajouter un trait plaisant à l’image qu’il évoque : c’est comme une intention littéraire en peinture, et cette voix qui veut nous amuser, nous distrait de la contemplation de l’objet qui d’abord avait été seul mis devant nos yeux.
Il ne vit jamais que des disputes de mots dans les querelles théologiques, même dans celle du jansénisme, auquel il ne tint que par une sympathie d’honnête homme et par certaines amitiés personnelles.