Aussi, ne nous sommes-nous jamais dissimulé les suites d’une pareille entreprise. […] A la suite de ces attaques, il étoit dans l’ordre que l’humeur, l’invective & le sarcasme vinssent renforcer un Concerto de défenseurs, en effet trop foible, & suppléassent au défaut de raison. […] Après de tels assauts, pourrions-nous n’être pas aguerris contre tout ce qu’on osera dire & faire dans la suite ?
*** On a dit que parmi le mouvement de dissociation universelle qui commence avec la division de l’Être en objet et en sujet et se propage en une suite indéfinie de subdivisions, l’esprit serait impuissant à saisir aucun objet si, par une décision arbitraire et qui ne se justifie que par un désir de connaissance, il n’usait à quelque moment de son pouvoir d’arrêt. […] Cette présomption s’exprime en une suite de vérités et tant que s’exerce avec efficacité l’action prépondérante du pouvoir d’arrêt, l’esprit construit à loisir, au moyen de ces vérités, un système de connaissance dont il ordonne entre elles toutes les parties. […] On voit bien en effet que la science ne parvient à se constituer qu’en tenant pour vraies des propositions et des conceptions qu’une analyse plus pénétrante doit montrer par la suite illusoires.
Leur gamme étoit composée de dix-huit sons dont chacun avoit un nom particulier, ainsi que nous serons obligez de le dire dans la suite. […] Comme la simple déclamation consiste aussi-bien que le chant proprement dit, dans une suite de tons plus graves ou plus aigus que le ton qui les a precedez, et qui sont liez avec art entr’eux, il doit y avoir de la mélodie dans la simple déclamation aussi-bien que dans le chant proprement dit, et par conséquent une espece de melopée qui enseigne à bien faire la liaison dont parle Capella, c’est-à-dire à bien composer la déclamation. Rapportons de suite tout le passage où se trouvent les paroles qui viennent d’être citées.
Je préviens, au reste, qu’ici, comme dans toute la suite de cet écrit, je prends la parole dans le sens le plus général et le plus étendu. […] Nous nous sommes donc trouvés de suite dans un double esprit d’opposition. […] Pour introduire de suite le lecteur dans le sens intime d’une pareille discussion, je vais le mettre aux prises avec le plus grand nom des lettres françaises, avec Bossuet : encore ne prendrons-nous pas Bossuet tout entier.
Je donnerai donc ici, d’abord, une courte préface qui m’a été demandée pour une nouvelle édition d’Adolphe, et j’ajouterai à la suite quelques-unes des notes que j’avais recueillies autrefois dans les conversations de Mme Récamier. […] En vain, il voudrait se dissimuler et lui cacher, à elle, son ennui, sa lassitude ; elle n’est pas de celles qu’on abuse : nous assistons, dans une suite d’analyses merveilleuses de justesse et de vérité, à toutes les impuissances et à toutes les agonies convulsives de l’amour, à des reprises et à des déchirements réitérés et de plus en plus misérables.
Patin, esprit de tout temps très-délicat, qu’il est arrivé à force d’études, de suite et de soin, à une grande distinction critique. […] Saint-Marc Girardin a prêchée dans ses cours avec beaucoup de suite et de piquant, c’est la petite morale, comme il l’appelait, celle de tout le monde, celle de la société et du grand chemin, celle de la religion sans doute, mais celle aussi de l’intérêt bien entendu ; il sait la dose juste dans laquelle on peut combiner la générosité et l’utilité sans compromettre celle-ci ; il a constamment raillé, et souvent avec bien de la justesse, les enthousiasmes pompeux, les désintéressements à faux, toute l’exagération lyrique d’alentour.
Je n’y recommence pas la suite des rapprochements de textes et des indications de sources que j’ai dû faire en commentant Molière. […] C’est encore Molière qui, dans un intermède du Malade imaginaire, lui a donné le plus grand rôle ; mais il n’est là qu’un prête-nom ; il ne fait que remplacer le Pédant, comme on le verra dans la suite de ce livre, et n’a point son caractère original.
Chapitre XXX Années 1673 (suite de la huitième période) — Mort de Molière. […] Dans cette même année 1673, sa situation éprouva un nouveau changement : madame de Coulanges écrit à madame de Sévigné, le 20 mars : « Nous avons enfin retrouvé madame Scarron, c’est-à-dire que nous savons où elle est ; car, pour avoir commerce avec elle, cela n’est pas aisé. » La suite de cette lettre prouve que madame de Coulanges était instruite de bien des particularités concernant madame Scarron.
Outre Lucain & Perse, Juvénal s’éleva dans la suite contre le tyran prétendu bel-esprit. […] Comme Néron n’étoit plus, cette sortie contre lui & contre son gouvernement n’eut aucune suite.
Avant que Claudius épousât Agrippine, et plus de sept ans avant la mort de Britannicus, elle avoit été mariée à Lucius Vitellius, le frere de Vitellius qui fut empereur dans la suite. […] Paterculus reproche même à ces poëtes, comme une erreur grossiere, d’avoir appellé Thessalie cette partie de la Grece qui fut ainsi nommée dans la suite, en des tems où elle ne portoit pas encore ce nom.
. — Sans pousser l’induction si loin, le cas de l’étincelle électrique montre que la sensation de lumière, comme la sensation d’un son très aigu, est composée d’une suite continue de sensations très nombreuses, successives et semblables qui, pour nous, forment un bloc indécomposable et simple. […] Comme toutes les autres, elles ont pour stimulant direct une action du nerf transmise aux centres nerveux ; or, conformément à tous les faits connus, on admet que deux sensations différentes indiquent deux états différents des centres nerveux, et, si le nerf est le même, deux actions différentes du nerf. — Il reste donc à savoir de quelle façon agit le nerf olfactif ou gustatif, et, pour y parvenir, il faut déterminer l’événement extérieur à la suite immédiate duquel il entre en action. […] Mais le nombre de ces sensations, de ces actions et de ces systèmes de mouvements qui se succèdent en une seconde est énorme, et la sensation totale d’odeur ou de saveur, comme la sensation totale de Couleur, n’est que la somme de toutes les sensations élémentaires successives dont la suite occupe un certain temps94. […] Voilà tout ce qu’ils disent quand on les interroge sur le caractère de leur perception. » — On arrive à la même conclusion en considérant les sensations des personnes dont le corps, à la suite d’une arrestation ou de quelque autre plaie, présente une large cicatrice. […] Une sensation dont nous avons conscience est un composé de sensations plus simples, qui sont elles-mêmes composées de sensations plus simples, et ainsi de suite.
De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) I Pendant que ces meurtres s’accomplissaient dans le sanctuaire de la cathédrale, une autre scène, plus confuse encore, avait lieu sur la place du Gouvernement, dans le palais de la Seigneurie. […] Les gens du palais se saisirent de toutes les armes et de tous les ustensiles domestiques qu’ils trouvèrent sous la main pour se défendre ou pour attaquer la suite de l’archevêque qui s’enfuyait. […] Persécuté comme je l’ai été dès ma jeunesse, peut-être me pardonnera-t-on d’avoir cherché quelque consolation dans ce genre de travail. » Dans la suite de ses Commentaires, il a cru devoir donner quelques détails sur sa situation particulière. […] La démocratie de Florence, gouvernée par les corps de métiers et surtout par les ouvriers de la laine, ne l’inquiétait pas au-dedans, mais l’inquiétait pour le gouvernement extérieur, qui demande plus de suite que la multitude n’en met dans ses passions. […] Quant au train de votre maison, j’aimerais mieux que vous fussiez en deçà qu’au-delà des bornes de la modération, et je préférerais une maison noble et élégante, des domestiques mis décemment et honnêtes, à une suite pompeuse et magnifique.
On y a démontré des milliers d’erreurs, qui n’ont été défendues que par d’autres erreurs, plus absurdes & plus multipliées ; d’où il est aisé de conclure, qu’en voulant peindre l’esprit des Peuples, il n’a peint véritablement que son propre esprit, c’est-à-dire, un esprit asservi à toutes les bizarreries d’une imagination déréglée, aveuglé par les travers d’une raison inconséquente & sans suite, emporté par les inquiétudes d’un caractere audacieux & sans frein. […] Trouve-t-on dans cet Ouvrage, & dans tous les autres du même Auteur, ce nerf historique, cette combinaison des matieres, cet esprit de liaison & de suite, cet ensemble qui nourrit & soutient l’esprit du Lecteur, & forme une chaîne non interrompue de tableaux qui le fixent & l’intéressent jusqu'à la fin ? […] Nous conviendrons que Candide & le Huron sont de son invention, & que l’invention, du premier sur-tout, est originale ; mais nous sommes obligés d’ajouter que ces deux Romans, dépourvus de machines & de nœuds, n’offrent qu’une suite d’événemens décousus & le plus souvent invraisemblables ; que la hardiesse & l’obscénité en forment l’intérêt principal ; & que ces défauts ne sauroient être rachetés par l’agrément des détails & les graces du style. […] Quels seront les sentimens de la Postérité, quand, après avoir admiré la Henriade, Mérope, Alzire, &c. elle verra paroître, à leur suite, la Guerre de Geneve, la Défense de mon Oncle, les Honnêtetés Littéraires, & une infinité d’autres Libelles, qui supposeroient dans elle le plus grand degré de perversité, si elle ne les rejetoit avec horreur ! […] Tout le monde trouve que la Henriade est un beau Poëme, disoit M. l'Abbé Trublet ; je veux croire que c'en est un : mais d'où vient que personne n'en peut lire plus d'un Chant de suite ?
Daru au milieu de cette école poétique régnante de la fin du xviiie siècle à laquelle il est mêlé, et dont il ne se séparera jamais d’une manière tranchée, c’est l’étude, l’amour de l’investigation et des recherches, le besoin en tout de ne pas s’en tenir à l’aperçu, à la fleur et à la cime des choses, mais de les prendre, en quelque sorte, par la base, de s’en informer avec suite, avec étendue, par couches successives, et d’en dresser, soit dans des préfaces, soit dans des rapports académiques, soit dans des comptes rendus destinés à lui seul, un exposé judicieux, fidèle, qui donne un fond aux discussions et qui souvent les abrège. […] Pour lui, il passait quelquefois sept nuits de suite sans dormir. […] Mais, à défaut de ce qu’on a appelé le bonheur curieux d’expression, le curiosa felicitas d’Horace, qu’on sent trop échapper ici, on a chez lui la suite, des parties de force, de fermeté, et, dans les Épîtres et Satires, le courant facile et plein du bon sens. […] Et c’est ainsi que cette part de labeur qu’on avait acceptée et qu’on ne s’était point choisie, cette part qui pouvait ne sembler d’abord qu’ennui et corvée inévitable, imposée à l’ami des Muses, devient sa gloire la plus sûre auprès de la postérité ; car, à la suite et dans le cortège de celui qui ne mourra point, il a pris rang, lui aussi, comme témoin des prodiges, et il est entré dans l’histoire.
Comme il s’est, dans la suite, prononcé en toute occasion contre les inconvénients de l’éducation publique, telle surtout qu’elle existait alors, on a cherché dans les circonstances de ses premières années à expliquer cette opinion qui s’accorde si bien d’ailleurs avec toute sa manière de sentir et de craindre. […] C’est bien alors qu’on peut dire que nous formons de nos mains notre destinée, et que nous amassons pour nous-mêmes une suite de succès futurs ou de mécomptes. » Au sortir de l’étude de M. […] On a recueilli avec soin ces premières productions de Cowper ; on y distingue déjà un caractère de finesse, d’observation maligne et de tournure moralisante qu’il développera par la suite, mais il n’y avait encore aucun cachet propre, aucune originalité. […] De très petits commencements ont quelquefois de grandes suites.
Balzac, s’il avait été ici mieux avisé, et si le besoin de fumée et d’encens ne l’avait séduit, se serait pourtant méfié de Costar, caractère peu droit, très compliqué, atteint non seulement de la passion mais du vice littéraire, ne songeant qu’à se faire un nom, à faire preuve d’esprit curieux et superfin, et qui, une fois amorcé sur cette question chatouilleuse, n’y devait plus voir qu’une occasion de s’insinuer dans la renommée, à la suite et à la faveur du nom de Voiture. […] Il n’a été donné à personne en son temps d’imiter Voiture ; le seul que la nature semble avoir créé alors pour être son second tome, un peu moindre, mais faisant suite sans effort, c’est Sarazin. […] Les deux chefs avaient vécu entre eux dans les termes les plus décents ; mais après leur mort, leurs disciples et les gens de leur suite n’y tinrent pas, ils en vinrent aux mains, ils se gourmèrent : c’est l’histoire du débat de Girac et de Coslar. […] Je ne prétends pas que M. de Girac, dans la suite de la querelle, n’ait pas été au-delà et ne se soit pas emporté et fourvoyé ; mais à l’origine, et en ce qui concerne Voiture, il a trouvé à redire et à rabattre tout ce que le bon sens pouvait désirer.
Insistant sur l’utilité dont peut être une bonne dialectique pour prémunir contre les faux jugements : « Il est certain, dit-il, que la lecture fréquente des ouvrages de Bayle donne à l’esprit une certaine volubilité sur cette matière, qu’il ne tiendra jamais uniquement des avantages de la nature. » Tout en recommandant particulièrement à son frère quelques écrits de son auteur de prédilection, il ajoute que lui-même est occupé de faire imprimer en ce moment un extrait du Dictionnaire ; il compte que cet abrégé, qui porte principalement sur la partie philosophique de l’ouvrage, se répandra dans le public et pourra être utile : Je suis persuadé que la mauvaise conduite de la plupart des hommes vient moins d’un principe de méchanceté que d’une suite de mauvais raisonnements ; et je crois par conséquent que si on pouvait leur apprendre à raisonner d’une façon plus juste et plus conséquente, leurs actions s’en ressentiraient d’une manière avantageuse. […] Ce propos eut les suites qu’on sait, et amena la convention de février 1772 entre les trois puissances. […] Il lui écrivait, le 18 février 1776 : Mon très cher frère, on ignore le moment de sa mort ; mais on est obligé à prévenir tant que l’on peut les malheurs qui peuvent arriver dans la suite. […] C’est, en un mot, un frein de plus, lequel, s’il vient un jour à se relâcher totalement, aura des suites peut être aussi funestes que l’ont été ces affreuses guerres de religion.
Quant à la rhétorique et à la poétique, elle s’en tint prudemment à la Lettre de Fénelon, qu’elle peut montrer à ses amis et à ses ennemis comme une charmante suite de questions et de projets : chacun là-dessus peut bâtir et rêver à son gré, sur la parole engageante du moins dogmatique des maîtres. […] De tels jugements formeraient aujourd’hui une suite et comme une jurisprudence critique bien mémorable, et n’auraient pas été sans action certainement sur les vicissitudes et les variations du goût public. Mais je m’aperçois que cette vue suppose et demande toujours une suite ou au moins une fréquence de Richelieux historiquement impossibles. […] Et puisque j’en suis sur ce sujet de l’Académie, un des sujets les plus nationaux en France, dont tout le monde parle, qu’il est, ce semble, si aisé de connaître, et dont pourtant on raisonne si souvent à faux, je demande à rappeler quelques faits et à présenter quelques observations sans beaucoup de suite et dans le pêle-mêle où elles me viendront.
Carnot sur son père58 et qui attendent une suite ; et j’en viens au livre dans lequel j’ai à signaler un curieux chapitre que peut-être on n’irait pas y chercher, si l’on n’était averti. […] Cela lui donna occasion de faire, dans les voitures, de Monseigneur et à sa suite, une tournée épiscopale qui le lia avec les curés de la province et ne contribua pas peu à refroidir sa vocation ecclésiastique. […] Mais je me sentais révolté de ces maximes, ‘ne comprenant pas comment on pouvait se parjurer ainsi, et se consacrer à Dieu, tout en restant attaché aux vanités du monde. » Cependant les impressions, une fois reçues, ne s’effacèrent point et eurent des suites. […] » Mais la vue de la récréation aux jours de fête, avec la division tranchée des trois groupes, est d’une belle observation morale et d’un effet lugubre, qui termine bien cette suite de tableaux : « Ces jours-là, après les grâces dites à l’église, les chartreux se promenaient dans le grand jardin, en formant trois groupes séparés : les vieillards excluaient leurs confrères au-dessous de quarante ans, et ceux-ci les confrères au-dessous de trente ; les jeunes erraient pour la plupart seuls, craignant de se communiquer leurs tristes et douloureuses pensées ; la tète baissée, ils regardaient la terre et me semblaient lui demander de se hâter de s’ouvrir pour eux.
Eugène Fromentin (suite et fin.) […] Le contraste avec Dominique, et en même temps certain rapport insaisissable qui les rapproche, donnent à penser pour la suite et commencent à diversifier le récit. […] On eût dit que ce geste d’une personne qui marche et qui a chaud rafraîchissait aussi sa mémoire… Quoique brisée par un long voyage en voiture, il lui restait encore de ce perpétuel déplacement une habitude de se mouvoir vite qui la faisait dix fois de suite se lever, agir, changer de place, jeter les yeux dans le jardin, donner un coup d’œil de bienvenue aux meubles, aux objets retrouvés. […] Les romanciers modernes, quand ils entrent dans un lieu et qu’ils nous y introduisent à leur suite, se comportent comme des antiquaires, ou comme des enrichis : ils commencent par tout regarder, comme s’ils n’étaient pas chez eux, non plus que les personnages qu’ils y conduisent.
Envoyé en pénitence à La Flèche, par une punition fort douce, convenons-en, et de bien peu de durée, il ne revint à Paris que pour récidiver de plus belle : la Chartreuse courut avec la pièce des Ombres, qui en est la suite, et un libraire les imprima. […] Quelques hommes distingués avaient perfectionné cet art misérable, qui était devenu leur fonds de nature, et la jeunesse, comme toujours, s’y portait à leur suite par imitation et singerie. […] Duméril, et qui s’est égaré on ne sait comment, se rouvrirait aujourd’hui tout entier ; quand on en verrait sortir cette suite du Vert-Vert dont M. de Cayrol porte encore le deuil et dont il a tenté de nous donner en vers la complète restitution, on n’aurait guère à changer d’avis ; on y serait de plus en plus confirmé, je le crains. […] Gresset, dans son séjour d’Amiens, s’était extrêmement préoccupé, comme font volontiers les écrivains retirés en province, du néologisme qui s’introduisait en quelques branches du langage : « Il avait été frappé justement, mais beaucoup trop, dit Garat dans sa Vie de Suard, du ridicule d’une vingtaine de mots qui avaient pris leurs origines et leurs étymologies dans les boutiques des marchandes de modes, même dans les boutiques des selliers. » Il en forma comme le tissu de son discours ; toutes ces locutions exagérées dont il s’était gaiement raillé vingt-cinq ans auparavant dans le rôle du jeune Valère : Je suis comblé, ravi, je suis au désespoir, Paris est ravissant, délicieux, il les remit là en cause, il fit d’une façon maussade comme la petite pièce en prose à la suite du Méchant ; et tandis que Suard plaidait avec tact pour la raison, alors dans sa fleur, et pour la philosophie, Gresset souligna pesamment des syllabes, anticipant l’office que nous avons vu depuis tant de fois remplir à feu M.
Mais, rencontrant souvent Rome sur son chemin, il n’a pas su résister à la tentation : il s’est détourné pour un temps de son œuvre capitale, pour se donner le plaisir d’embrasser d’une seule vue toute la suite de l’histoire romaine. […] La grandeur de l’État romain qui a pour effet de substituer les guerres civiles aux dissensions du Forum, les guerres lointaines où périt le patriotisme du soldat, l’extension du droit de cité à toutes les nations, le luxe qui corrompt les mœurs, les proscriptions, qui, depuis Sylla jusqu’à Auguste, brisent par la peur le ressort des âmes et les dressent à la servitude, la suite des mauvais empereurs, le partage de l’empire, la destruction de l’empire d’Occident par les invasions barbares, et la lente agonie de l’empire d’Orient, voilà les principales étapes de la décadence du peuple romain. […] Aussi le néglige-t-il tout à fait par la suite, et rien ne donne plus à son ouvrage le caractère d’un système abstrait, qu’aucune réalité vivante ne soutient. […] Dans la suite du xviiie siècle, Montesquieu a semblé perdre du terrain ; d’autres l’ont dépassé, ont étouffé sa voix.
Il a, dans ces dernières années, publié une suite d’études aussi remarquables par la clarté de l’exposition que par la simplicité élégante du style, sur Georges Cuvier, sur Fontenelle, sur Buffon, qui n’était pas secrétaire perpétuel, mais qui était digne de l’être. […] Il y a le Fontenelle bel esprit, coquet, pincé, damoiseau, fade auteur d’églogues et d’opéras, rédacteur du Mercure galant, en guerre ou en chicane avec les Racine, les Despréaux, les La Fontaine ; le Fontenelle loué par de Visé et flagellé par La Bruyère ; et à travers ce Fontenelle primitif, à l’esprit mince, au goût détestable, il y en a un autre qui s’annonce de bonne heure et se dégage lentement, patiemment, mais avec suite, fermeté et certitude ; le Fontenelle disciple de Descartes en liberté d’esprit et en étendue d’horizon, l’homme le plus dénué de toute idée préconçue, de toute prévention dans l’ordre de la pensée et dans les matières de l’entendement ; comprenant le monde moderne et l’instrument, en partie nouveau, de raisonnement exact et perfectionné qu’on y exige, s’en servant avec finesse, avec justesse et précision, y insinuant l’agrément qui fait pardonner la rigueur, et qui y réconcilie les moins sévères ; en un mot, il y a le Fontenelle, non plus des ruelles ni de l’Opéra, mais de l’Académie des sciences, le premier et le plus digne organe, de ces corps savants que lui-même a conçus dans toute leur grandeur et leur universalité quand il les a nommés les états généraux de la littérature et de l’intelligence. […] Rien de plus piquant, rien de plus clair ; on assiste à cette suite d’explications provisoires et illusoires, à cette succession naturelle d’erreurs, et l’on comprend si bien comment l’on a dû dès l’abord y donner et les épuiser toutes, qu’on s’en détache déjà. […] Il a parfaitement défini cette suite d’éloges ingénieux, véridiques et succincts, où tout ce qui est obscur est éclairci, tout ce qui est technique généralisé, et où chaque savant n’est loué que pour ce qu’il a laissé d’important et de durable : « Il loue, a dit de lui M.