Ainsi encore, pour le fidèle de l’Église romaine, la soumission aux décisions du pape en matière de foi est chose méritoire ; pour le libre-penseur, pour l’homme de science, soumettre tout croyance au contrôle de l’expérience et de la raison, puis se décider en pleine indépendance est à la fois un droit et un devoir.
Mais ce n’est point assez de s’en prendre à chaque individu, il faut attaquer l’Art même ; & jugez si les Troupes sentiront fermenter leur courage, quand elles entendront ainsi parler de leur métier : Cette science exécrable consiste à savoir modifier, arranger, coller plusieurs milliers d’imbécilles côte à côte comme des harengs en caque, les faire tourner à droite, à gauche tous en même temps, comme des mannequins qui tiennent au même fil, & ne faire de ces troupeaux de bêtes féroces qu’un seul corps, une seule muraille composée d’un pareil nombre d’automates, puisse les renverser du même choc & les étouffer le plus lestement possible.
Les livres des Proverbes et de l’Ecclésiaste sont pleins de sentences qui, sous leur splendeur orientale, ne recèlent, comme les fruits de la mer Morte, que poison et cendres. « À une grande sagesse se joint un grand chagrin ; augmenter la science, c’est augmenter la douleur. » — « Et j’ai haï la vie, car tout ce qui se fait sous le soleil me déplaisait. » — « J’ai trouvé la femme plus amère que la mort, la femme qui est un piège, dont le cœur est un filet, et dont les mains sont des liens. » — Aux lueurs du bûcher de Sardanapale, les rêveurs de l’inassouvi et de l’impossible entrevoient en lui un ancêtre.
Tout le temps, il éclate en images inattendues, qui peignent tantôt poétiquement, tantôt brutalement, à votre pensée, les hommes et les choses par l’antithèse ou le rapprochement : des images multiples et variées, jaillissant d’une mémoire nourrie d’une immense lecture, et non enfermée en un temps et une branche de sciences, mais qui a grappillé au fond de tous les livres de moelle, de toutes les curiosités de l’histoire, de tous les traités de théogonie et de psychologie.
et je n’y comprends rien, mais c’était comme ça… Il y a un moment dans le galop, où le pied gauche ne laissait plus de trace, ne laissait que cette petite marque presque invisible. » Et voilà l’original garçon, qui se met à parler du galop du cheval, avec une grande science, des aperçus nouveaux, des divagations amusantes, tout en me faisant passer sous les yeux des croquetons, où il s’est essayé à saisir la réalité du galop : « C’est le diable, vois-tu, cette jambe est vraie, et elle paraît bête, c’est juste et ça semble faux.
Étalages de princes, de « monarques », et de capitaines ; du peuple, des lois, des mœurs, peu de chose ; des lettres, des arts, des sciences, de la philosophie, du mouvement de la pensée universelle, en un mot, de l’homme, rien.
Les gens distraits, et généralement ceux qui manquent de présence d’esprit, n’ont pas moins d’idées ou d’esprit que les autres, et même assez souvent ils en ont davantage ; mais ils ont les idées moins présentes, parce qu’ils ont moins que les autres la mémoire des expressions ; c’étaient les expressions, et non assurément la science et la doctrine, qui manquaient au célèbre Nicole, lorsqu’il disait d’un certain docteur… : Il me bat dans le cabinet, mais il n’est pas au haut de l’escalier que je l’ai confondu. » Ainsi amendée, l’analyse de Ronald n’est plus d’accord avec ce que nous avons appelé son platonisme ; mais elle est beaucoup plus pénétrante et plus exacte.
Il reçoit, quelle que soit sa naissance, une éducation fondée essentiellement sur le travail, la science et l’histoire ; et par elle, son esprit et son cœur s’ouvrent à l’égalité, à la vérité et à la justice.
Imbart de la Tour, « L’Évolution des Idées sociales au moyen âge », dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences morales et politiques, 1896, II, p. 425.
À ceux dont la vertu n’est pas une science d’emprunt, mais à qui par nature est départie la modération en tout, il appartient de cueillir ces couronnes.
Ils participent de la science, de la curiosité, de l’histoire, des mémoires et enfin de l’intérêt qui s’attache à la vie privée du voyageur. […] Ils ont beaucoup de dispositions aux sciences, aux arts libéraux et aux arts mécaniques.
Tous les philosophes savent bien qu’en fait de science on ne peut jamais se fier au vieux dicton Vox populi, vox Dei. […] Assez de surprises semblables sont déjà enregistrées dans le domaine de la science.
Après un second instant de silence et de réflexion, j’ajoutai : les philosophes disent que deux causes diverses ne peuvent produire un effet identique, et s’il y a un axiôme dans la science qui soit vrai, c’est celui-là ; et deux causes diverses en nature ce sont deux hommes… et l’abbé, dont la rêverie allait apparemment le même chemin que la mienne, continua en disant : cependant deux hommes ont la même pensée et la rendent par les mêmes expressions, et deux poëtes ont quelquefois fait deux mêmes vers sur un même sujet. […] -et vous voilà, après une assez longue excursion, revenu au point d’où vous êtes parti. — C’est que, dans la science, ainsi que dans la nature, tout tient ; et qu’une idée stérile, un phénomène isolé sont deux impossibilités.
On ne rira pas des images brusques qu’il façonne, si l’on sait voir toute la science ouvrière qu’elles décèlent ; elles sont un produit de la connaissance la plus étroite, la plus retorse et la plus sûre de la matière plastique. […] Simplement il les dénoue et conduit leur développement avec la science du magicien. […] — Le Monde ne se développe pas par un enchaînement simplement mécanique ; il n’est pas une machine fonctionnant avec une nécessité indifférente ; les philosophes suppriment toute intention dans les choses ; sous prétexte de science, ils excluent toute fin extérieure à la Nature : Aussi devant eux : « Voici l’automate éternel dansant indéfiniment101 ! […] L’esprit qui tient toute chose ensemble a la science de la voix, Son cri intarissable en moi comme une eau qui fuse et qui déferle ! […] Œuvre à la fois trop bien faite, parce que s’y emploie toute la science acquise pendant la période qu’elle achève, et incertaine, parce qu’elle est l’essai d’une manière encore mal consciente338.
Paul Bourget, que l’Église accepte franchement toute la science et toute la démocratie. » Laissons la science de côté. […] Il sait les lois générales des nombres et des lignes ; il sait ce que sont les forces physiques : la pesanteur, la lumière, le son, l’électricité, la chaleur, et il sait qu’elles ne sont peut-être que les diverses apparences d’un mouvement unique et qu’elles obéissent toutes à des lois semblables dont un certain nombre d’exemples ont suffi à lui montrer l’éternelle fixité. » Soit l’histoire naturelle, l’anthropologie, l’histoire, un humanisme fait de la tradition gréco-romaine, où le christianisme ne figure que pour avoir versé dans le cœur de l’homme nouveau « le sentiment nouveau de la pitié » (contre sens qui vient de la proscription subie officiellement par tous les sens du mot charité), et qui se termine sur « la Réforme et la Renaissance l’éveillant pour ainsi dire de la longue nuit du passé, et lui mettant au front comme une aurore le rayon de la liberté de penser ; la France moderne, de Descartes à Voltaire, achevant dans une langue d’une force et d’une précision définitive l’affranchissement de son esprit, et faisant enfin, dans l’explosion de 1789, tomber autour de lui les dernières entraves, et le dressant, au milieu du monde, dans la hauteur de tous ses droits et le rayonnement de toutes ses libertés. » Évidemment, c’est monument de Gambetta, c’est court, et l’on comprend que ce manifeste officiel du laïcisme ait été alors accueilli avec quelque gaîté par l’opinion littéraire, laquelle allait céder au mouvement dit des Cigognes, et prendre parti, en sens divers, dans la bataille Brunetière-Berthelot de 1894 sur la faillite ou l’apothéose de la science, — sorte d’ouverture de l’affaire Dreyfus, où l’on se disputa fort le jeune Français de demain. […] Sa position est intermédiaire entre une science et un art, entre la géographie et le roman.
Aucun. » Il en prend d’ailleurs très vite son parti : « J’entrevis que le but de ce premier voyage serait manqué… et, en attendant l’avenir, je promis à la poésie ce qui serait perdu pour la science. » Et alors au lieu de ce qu’il devait faire, voici ce qu’il fait (assure-t-il). […] Il vient d’opposer à l’ignorance d’Hannon la science de Cook. Mais tout à coup : Cependant, il faut l’avouer, ce que nous gagnons du côté des sciences, nous le perdons en sentiment. […] À l’origine, la tristesse vieille comme le monde ; la tristesse de Job ; celle qui fait dire à l’ecclésiaste que tout est vanité, que tout a été fait de poussière et retourne à la poussière ; que celui qui augmente sa science augmente sa douleur ; qu’il a trouvé plus amère que la mort la femme, dont le cœur est un piège et un filet, et dont les mains sont des liens ; que les morts sont plus heureux que les vivants, et plus heureux que les uns et les autres, celui qui n’a pas encore existé et qui n’a pas vu les mauvaises actions qui se commettent sous le soleil. […] La liberté est si naturellement l’amie des sciences et des lettres qu’elle se réfugie auprès d’elles lorsqu’elle est bannie du milieu des peuples.
En vain, ses amis essayèrent-ils de lui réserver un meilleur accueil auprès de la science française : l’Académie des Sciences de Paris refusa de préparer un rapport sur son travail, qu’on ne jugea pas digne, selon l’expression de Cuvier, d’occuper une académie4. Sur ce terrain scientifique où il s’était aventuré avec plus de courage que de prudence, il ne réussit qu’à faire un seul disciple : le jeune Arthur Schopenhauer, qui entrait aussi dans la science avec des allures fantaisistes et que devait d’ailleurs persuader une intransigeante admiration pour l’illustre ami de sa mère. […] Goethe, au contraire, embrasse avec une clarté et une facilité merveilleuses tout ce qui se passe autour de lui, dans la nature et le monde politique, dans la science et l’art. […] S’intéresser à toutes choses, telle est bien la leçon que le maître donne à ses fervents : voyez ses premières études, partagées entre les lettres, le droit, les sciences, le dessin, ses collections si disparates, ses lettres qui trahissent tant de préoccupations diverses.
Une traduction de l’ouvrage paraîtra prochainement34, et je m’en réjouis d’autant plus que ne possédant pas le talent d’exposition de Strachey, j’eusse été fort embarrassé de résumer un livre qui vaut par la science des éliminations non moins que par le nombre et l’imprévu des éclairages. […] Jaloux est un de ceux qui possèdent encore cet art qui va se perdant, je veux dire l’art de lire, — car c’est un art, et non pas, comme on l’imagine habituellement, une besogne, — un art auquel nulle science ne supplée. […] Pearsall Smith apparaît comme un des plus purs lettrés d’aujourd’hui — de ceux dont la science est toujours équilibrée par l’art et par un tact infaillible en matière de goût. […] La science n’est dangereuse pour la religion, que lorsqu’elle est la science de soiho ». […] Je ne pense pas à sa qualité, à ce qu’il vaut… je n’ai souci que de le connaître… Chacun de mes sentiments a son indépendance, ses droits contre tous les autres et contre moi-même… L’esprit de science : ce souffle sans amour, ce conseil brûlant : « Apprends de toi tout ce qu’on en peut savoir !
la tragédie de Racine enseigne aux plus grands seigneurs de cette monarchie, les timidités, les sciences, les élégances, les politesses de l’amour, et voici ce damné Don Juan qui mène, tambour battant et haut la main, les duchesses et les bergères ! […] « pour sa science et pour son génie, qui peuvent enseigner aux artistes, quelle que soit leur profession, que : l’art et la poésie de la nature expriment le vrai au travers du prisme de l’idéal ». […] « Comme la science, comme la guerre et l’amour, l’espace a son peut-être.
L’ordre, la précision et la promptitude sont des qualités dont je tâche tous les jours d’acquérir un peu. » Au milieu de cela, des voyages en Suisse, en Italie, l’étude dans toutes les directions, la comparaison étendue dans toutes les branches des beaux-arts et des littératures ; bientôt les sciences naturelles qui vont s’y joindre ; une vie noble, assise, bien distribuée et ordonnée, occupée et non affairée, à la fois pratique et à demi contemplative (« Je demeure hors de la ville, dans une très belle vallée où le printemps crée dans ce moment son chef-d’œuvre ») ; tout ce qui, enfin, devait faire de cette riche organisation de Goethe le modèle et le type vivant de la critique intelligente et universelle.
*** J’ai reçu, il y a quelques années, par les soins d’un lecteur bienveillant, des extraits d’un Journal personnel, écrit en 1800 et 1801 par un jeune homme, alors élève de l’École polytechnique, et qui, plus tard, devint professeur et secrétaire de la Faculté des sciences de Caen, M.
« Pour ce qui est d’Hannon (le lait de chienne, soit dit en passant, n’est point une plaisanterie, mais il était et est encore un remède contre la lèpre : voyez le Dictionnaire des sciences médicales, article Lèpre ; mauvais article d’ailleurs et dont j’ai rectifié les données d’après mes propres observations faites à Damas et en Nubie), — Hannon, dis-je, s’échappe, parce que les Mercenaires le laissent volontairement s’échapper.
Il y a un moment dans la vie de l’artiste où, muni de toute sa science et riche de tous ses matériaux, fort de son entière expérience et encore en possession de toute sa force, mais pressentant qu’elle pourrait bien faiblir un jour et lui échapper, il se lance à fond de train, se déploie, s’abandonne avec fureur et sans plus de réserve comme s’il voulait s’épuiser et laisser son âme dans son œuvre : c’est le moment décisif, c’est celui qui, dans une grande bataille rangée, décide et achève la victoire.