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238. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

Au milieu de la débâcle de Fournier, S… la voyant se donner un mal de chien, à propos de ses affaires, et galoper toute la journée, lui demandait, si elle avait envie de reprendre le théâtre ? […] — Oui, reprend Giraud, supposez des personnes qui descendraient de ces sociétés-là, et qui, à première vue, dans le monde se reconnaîtraient en s’abordant, et se comprendraient d’un clin d’œil. […] » Et le travail reprend, sérieux, acharné, coupé de dépêches télégraphiques jaunes, que la princesse déchire à mesure et roule en boulettes. […] Dans l’escalier, il est obligé de rester assis dix minutes sur la banquette de l’escalier pour reprendre sa respiration. […] Les sifflets reprennent avec rage, mêlés à des cris d’animaux, à des imitations des intonations des acteurs.

239. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

Mais nous allons la reprendre. […] Mais voici le point où chacun reprend son originalité. […] En tous cas, chez Proust, il n’y a rien d’athlétique, pour reprendre le mot de M.  […] C’est un véritable gâteau, pour reprendre sa métaphore, un véritable gâteau d’impressions que Proust offre à la faim de notre esprit. […] Je le rassurai en riant et nous reprîmes notre conversation interrompue.

240. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre XII. Dernière et nécessaire opération, qui consiste à corriger ce que l’on a écrit »

Cependant, si fastidieux qu’il soit d’insister encore, et de repasser par toute la route déjà faite, la perfection est à ce prix : il faut reprendre son travail phrase par phrase, mot par mot, juger l’ensemble et scruter le détail, pour redresser tout ce qui serait mal venu, et y apporter la correction nécessaire.

241. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

Mais de la voir aux parvulo de Meudon, dans un fauteuil devant Monseigneur, en présence de tout ce qui y était admis, Mme la duchesse de Bourgogne et Mme la duchesse de Berry, qui y fut tôt introduite, chacune sur un tabouret, dire devant Monseigneur et tout cet intérieur : la duchesse de Bourgogne, la duchesse de Berry et le duc de Berry, en parlant d’eux ; répondre souvent sèchement aux deux filles de la maison, les reprendre, trouver à redire à leur ajustement, et quelquefois à leur air et à leur conduite, et le leur dire, on a peine à tout cela à ne pas reconnaître la belle-mère et la parité avec Mme de Maintenon, etc. […] Ils ne pensent qu’à eux et ne s’inquiètent ni de votre repos ni de votre santé : voilà ce qui m’intéresse, moi, et ce qui doit intéresser tout le royaume. — Tu fais bien, mon enfant, reprit le roi en secouant la tête ; j’ai envie de faire comme toi. — Faites donc, Sire, dit-elle ; au diable toutes ces querelles de prêtres ! reprenez votre santé, et tout ira bien.

242. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

La conversation roulait sur les événements politiques ; s’interrompant au milieu d’une de ces périodes à effet comme il savait les faire, le général lui dit : « Rappelez-vous, Pelleport, et vous êtes trop jeune pour que vous ne puissiez un jour ou l’autre mettre à profit mon avertissement, rappelez-vous qu’en révolution il ne faut jamais se mettre du côté des honnêtes gens : ils sont toujours balayés. » — « Après ce court dialogue, ajoute Pelleport, la conversation reprit son cours ordinaire, et je me promis bien de désobéir à mon général. » De retour en France, Pelleport continue sa marche d’un pas égal. […] » Un peu troublé par cette question, je perdis toute contenance, et répondis naïvement : « Mais rien, Sire. » — « Vous avez cependant une famille, reprit l’empereur ; que voulez-vous pour elle ? » — « J’ai deux frères servant Votre Majesté dans la marine ; ils font leur ehemin, m’empressai-je d’ajouter (car le maréchal Oudinot, placé derrière l’empereur, me faisait signe d’accepter), et je ne puis que les recommander aux bontés de l’empereur. » — « Mais enfin, colonel, reprit vivement l’empereur, je veux vous accorder une faveur quelconque : que voulez-vous ? 

243. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

Royer-Collard releva la tête et reprit part au mouvement public, il adopta pour sa devise le contre-pied de celle de Danton ; nommé au Conseil des Cinq-Cents, le premier et le seul discours qu’il y fit et qui fut très-remarqué se terminait par ces mots : « Aux cris féroces de la démagogie invoquant l’audace et puis l’audace, et encore l’audace. Représentants du peuple, vous répondrez enfin par ce cri consolateur et vainqueur, qui retentira dans toute la France : la justice, et puis la justice, et encore la justice. » Ainsi il reprend au rebours, de propos délibéré, le mot d’ordre de Danton : celui-ci, dans le mouvement, d’invasion et dans le temps d’assaut de la Révolution montante, a tout attaqué et détruit ; lui, dans la période du décours et du déclin, il veut restaurer, mais il le voudra selon la mesure et selon la justice. […] Interrompu presque à chaque phrase par cette majorité, ainsi atteinte à son endroit sensible, et qu’il dénonçait, elle royaliste par excellence, pour son manque réitéré de respect envers la royauté, rappelé même à l’ordre, il s’arrêtait imperturbable et reprenait derechef, résolu à ne pas laisser briser le fil de sa déduction rigoureuse et de son énumération vengeresse.

244. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

. — Il a repris le bourgeois après Henri Monnier, créateur du type ; mais au célèbre acteur-auteur il laisse presque exclusivement les abîmes et les bas-fonds d’où l’éloigne et le rejette toujours cette même naturelle et instinctive élégance. […] Mais je reprends notre Gavarni dessinateur ; c’est sous cette forme que tous l’acceptent et le comprennent. […] Ce petit volume est un premier canevas qui mériterait d’être repris plus en grand ; cela deviendrait un guide, un fil conducteur dans l’œuvre de Gavarni, qui est bien comme un labyrinthe.

245. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Quand on s’approchait d’un couvent et qu’on se disposait à y entrer, les moines donnaient un avis, et on reprenait sa route. […] Les prisonniers durent reprendre, à travers monts et à travers vaux, leur triste itinéraire. […] Le gouverneur de Majorque, à son tour, le général Reding, Suisse au service d’Espagne, se refusa obstinément à les recevoir ; « il y mit même une dureté qui semblait tenir de la cruauté bien plus que des circonstances, car il accompagna son refus de la menace de couler bas le navire, s’il n’avait pas viré de bord dans les vingt-quatre heures. » On dut reprendre le large.

246. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

Du Bellay le sait bien ; il nous exprime la haute idée qu’il se fait du poète, et, à dénombrer toutes les qualités qu’il lui attribue, on sent qu’il doit l’être lui-même : il exige avant tout un je ne sais quoi de divin, et il reprend à sa source et dans son vrai sens naturel, pour le lui appliquer, le mot de génie, genius. […] Si l’on avait pu, en remontant par-delà les romans d’aventures, se reprendre à quelque chanson de geste de forte trempe, la tradition vive était retrouvée. […] Il estime que quelques vieux mots repris et enchâssés dans la diction ne feraient pas mal ; il en indique quelques-uns qui, bien placés, fortifieraient ou honoreraient le vers ou la prose.

247. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

Tantôt même ce sont des ouvrages à part, et vraiment considérables, dans lesquels le critique essaye de reprendre et de résumer avec étendue, de fixer et d’approfondir sur un point les études jusque-là plus vagues, qui l’ont pourtant occupé de préférence ; tantôt, ce sont tout simplement d’anciens morceaux, déjà publiés en divers lieux, qu’on rassemble avec ordre, avec suite, en les revoyant pour la correction, mais en leur conservant leur premier caractère. […] Lorsqu’il lui arrive, par suite d’obstacles extérieurs, d’être obligé de s’arrêter, d’interrompre sur un point, il n’oublie rien, il amarre sa barque à l’endroit précis, et, s’il reprend ensuite sa marche, c’est sans avoir dérivé. […] Magnin de se trop souvenir peut-être dans quelques occasions, et de reprendre trop juste les choses où elles étaient hier.

248. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Par une sorte de jeu de bascule qui peut impatienter les historiens, mais qui fera sourire les moralistes, voici pourtant qu’un mouvement contraire le vient reprendre et comme replacer sous l’auréole. […] Brunehaut, pour triompher des difficultés intérieures et se donner un point d’appui au dehors, tend la main au pape saint Grégoire, qui reprenait, de son côté, l’œuvre d’agrandissement du saint-siége. […] Cependant, tout aussitôt après Dagobert, la décadence de sa race, un moment retardée, reprend son cours et se déclare par mille symptômes.

249. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

mais je vivrai d’un passé détruit, et ma vie sera une désolation éternelle et fidèle. » Et en parlant ainsi, il reprenait ses avantages près de ce cœur qui le revoyait s’animer comme au temps des premiers charmes. […] permettez-moi, disait-il en lui tenant la main avec le respect le plus tendre, dites que vous me permettez de reprendre courage et de vous adresser mes timides espérances, dites que vous tâcherez de m’aimer et que vous me permettez de vouloir vous convaincre. » — « Eh bien ! […] Il reprit son assiduité chez Mme de Noyon, et, partout où Mme de Pontivy alla durant cet hiver, il était le premier, en entrant, qu’elle y rencontrât ; le dernier, à la sortie, qui la quittât du regard.

250. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Il avait repris son calme au dernier moment. […] “Tranquillise-toi, mon enfant, lui dit sa tante, je vais remonter sans doute dans un instant. — Non, citoyenne, reprirent rudement les geôliers, tu ne remonteras pas ; prends ton bonnet et descends.” […] Réconcilions-nous sur leurs tombeaux pour reprendre leur œuvre interrompue !

251. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Quel ascendant un pareil livre ne devait-il pas prendre au premier pas sur un monde renversé, bouleversé, dépouillé, égorgé, qui ne savait plus que croire, que sentir, que dire, et qui attendait une voix d’en haut pour reprendre haleine ? […] Je me peignais les bois à travers lesquels cette onde avait passé, et mon âme était tout entière à la solitude. » Un matin, il revêt ses habits de sauvage et va se présenter à Lopez, l’arc et les flèches à la main, en déclarant qu’il veut reprendre sa vie de chasseur. […] XXII L’épilogue couronne dignement le poëme : c’est l’auteur lui-même, Chateaubriand, qui reprend la parole et qui raconte la suite de la destinée des personnages survivants (le père Aubry, Chactas), telle qu’il l’a apprise dans ses voyages aux terres lointaines.

252. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

Il faut d’abord en établir la situation chronologique, autant du moins qu’on le peut faire dans un exposé si sommaire, et dans ce moyen âge qui, ne laissant jamais reposer aucune œuvre dans la forme imposée par le poète, les reprend toutes et les remanie incessamment pendant trois siècles ou quatre. […] On se plaint, parce qu’on a pâti : c’est un moyen de reprendre l’avantage. […] Il avait trouvé aussi au xve  siècle un héritier dans la farce : héritier de l’esprit plutôt que des sujets, car dans les œuvres qui nous sont parvenues on voit rarement qu’un fabliau ait été repris en farce, comme le Vilain Mire se retrouve dans le Médecin malgré lui.

253. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Budé avait vingt-quatre ans, il avait terminé son droit, quand, vers 1491 ou 1492, il reprit les auteurs latins, surtout les poètes, et commença de les comprendre ; Erasme avait près de trente ans, en 1496, quand il s’enferma comme boursier au collège Montaigu. […] Il était tout français, imperceptiblement italianisé, et n’ayant pris à l’antiquité latine que ce qui mettait en valeur les vieux dons de sa race : par lui, La Fontaine et les autres reprenaient le contact du pur génie de la France, se remettaient en communion avec l’âme héréditaire de notre peuple. […] On se reprit aux tournois, à l’amour courtois, aux vieux romans, à leurs transcriptions rajeunies, à leur plus ou moins authentique postérité.

254. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

M. avec madame de Maintenon ne font que croître et embellir, qu’elles durent depuis six heures jusqu’à dix, que la bru (madame la dauphine) y va quelquefois faire une visite assez courte ; qu’on les trouve chacun dans une grande chaise, et qu’après la visite finie on reprend le fil du discours. […] Je reviens aux faits et j’en reprends la suite. […] La naissance de M. le duc de Bourgogne lui donna lieu de manifester le fond de ses sentiments pour la reine, et ces affections de famille qui reprennent si doucement leur place dans les âmes bien nées, après en avoir été quelque temps bannies.

255. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

reprend Crispin. […] madame, reprit froidement Lesage, je vais vous en faire gagner deux. » Et tirant sa révérence, il sortit sans qu’on pût le retenir. […] Gil Blas l’en reprend et veut avant tout de la netteté ; il demande qu’un sonnet même soit parfaitement intelligible.

256. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

— Salah, reprit mon ami, nous sommes perdus dans ces ruelles, conduis-nous. […] Ses frêles doigts vont et viennent, agiles, laissent et reprennent les fuseaux enroulés de fil de lin. […] Je reprends le tramway, j’arrive à Paris et je rentre me coucher. […] reprit-il, vous vous constituez juge du scandale. […] — Sire, reprend le vilain, je n’ai point perdu la raison.

257. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — I »

On aperçut qu’il n’y a pas lieu de tenir rigueur à un pouvoir qui nous fait concevoir les choses autres qu’elles ne sont si, à vrai dire, les choses ne comportent pas une réalité fixe, et, dans la troisième partie de cette étude on reprit avec complaisance l’examen des diverses conceptions au moyen desquelles l’esprit, par la vertu de ce pouvoir de déformation, nous ouvre sur les choses les perspectives où nous les saisissons.

258. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Réponse à une lettre de M. Grimm » pp. 205-206

La raison, je vais vous la dire, c’est que je n’ai rien apperçu dans ses derniers ouvrages d’important à reprendre.

259. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  premier article .  » pp. 326-341

Ces simples et vives décisions du goût ont pu être un moment obscurcies ; elles reprennent rang aujourd’hui, ce me semble, et elles subsistent en se combinant avec les travaux positifs et les progrès de la philologie qui, à elle seule, n’est pas tout. […] Son intervention surtout au sein de la littérature du jour redevint manifeste et hautement avouée ; des hommes instruits, des écrivains élégants, et un bon nombre des plus distingués dans ce journal même98, reprirent en main la cause des maîtres au point où La Harpe l’avait laissée, et, la poussant plus avant, remirent en circulation auprès du public et du monde les noms et les exemples des Anciens dont ils s’étaient longtemps nourris.

260. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Nommer Despréaux Desvipéreaux, lui reprocher d’avoir fait servir des alouettes au mois de juin dans son Repas ridicule, glorifier Pelletier de recevoir chaque jour vingt-cinq personnes à sa table, traiter l’auteur des Satires de « bouffon » et de « faussaire », ou de « jeune dogue » qui aboie autour de lui, et lui dire agréablement qu’il ne fait rien « que les mouches ne fassent sur les glaces les plus nettes », le menacer du bâton ou faire entendre que les cotrets ont déjà pris le contact de ses épaules, trouver dans ses vers des insultes au parlement, à la cour, au clergé, au roi, et un athéisme digne du sort de Vanini, le reprendre tantôt d’user « de quolibets des carrefours, de déclamations du Pont-Neuf qui ne peuvent être souffertes que dans un impromptu de corps de garde », et tantôt de piller Horace, Juvénal ou Molière : voilà ce que la rancune venimeuse des victimes de Boileau invente pour le confondre. […] Il se moque de Pelletier ou de Perrin : très bien ; mais qu’y trouve-t-il à reprendre ?

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