Cet homme de joie et de plaisir était, comme nous tous, un forçat de littérature, un homme de travail et de peine. […] Dans ce recueil des Poésies complètes, les soupers, le bal masqué, le carnaval, tous les plaisirs de ce débauché de Paris, tiennent une large place comme sources d’inspiration, mais l’émotion du poète les attendrit et les idéalise : Monselet est, avant tout, un élégiaque.
C’est cette formule qui a soutenu toute sa conduite, l’a décidé à s’abstenir des plaisirs, à modifier son pouvoir, à respecter la dignité de tout être et à s’épuiser, sans illusion d’ailleurs, pour le bien de l’empire. […] Or, il considère qu’elles n’eussent pas été telles et ne se seraient pas abstenues des plaisirs, si elles n’avaient eu pour précepteurs moraux que notre Marc-Aurèle ou notre Spinoza.
Et ici, je le dis avec plaisir, un certain nombre de pages vraiment intéressantes. […] On prend plaisir à sa souffrance ; on est irrité et on est ravi ; on s’écrie : Assez ! […] cette douleur est un plaisir, cette torture une jouissance. […] on s’étonne, et le plaisir ainsi interrompu tourne pour quelques-uns à la fatigue. […] Mais, réclamaient-ils, j’y ai pris plaisir, moi !
… — moi qui ne vaux rien que seul et inconnu, moi qui n’aime et n’aimerai peut-être plus jamais rien que la solitude et le sombre plaisir d’un cœur mélancolique. — Mais il faudrait des événements et des sentiments pour appuyer cela ; il faudrait au moins des études sérieuses pour me rendre témoignage à moi-même. […] Je me promets beaucoup de plaisir et de vraies jouissances au milieu de cette nature grande et nouvelle. […] « On s’établit dans la vie ; on est las de ce qu’il y a de roide et de contemplatif dans les premières années de la jeunesse ; on est un peu plus avant dans le secret des Dieux ; on sent qu’on a à vivre pour soi, pour son bien-être, son plaisir, pour le développement de toutes ses facultés, et non-seulement pour réaliser un type abstrait et simple ; on vit de tout son corps et de toute son âme, avec des hommes, et non seul avec des idées. […] Ce jugement est assez favorable pour que je m’en honore, et il est à la fois assez sévère pour que j’ose le reproduire ici : « Dans le premier ouvrage (dans Joseph Delorme), dit-il, c’était une âme flétrie par des études trop positives et par les habitudes des sens qui emportent un jeune homme timide, pauvre, et en même temps délicat et instruit ; car ces hommes ne pouvant se plaire à une liaison continuée où on ne leur rapporte en échange qu’un esprit vulgaire et une âme façonnée à l’image de cet esprit, ennuyés et ennuyeux auprès de telles femmes, et d’ailleurs ne pouvant plaire plus haut ni par leur audace ni par des talents encore cachés, cherchent le plaisir d’une heure qui amène le dégoût de soi-même. […] « L’auteur prend encore tous ses plaisirs dans la vie solitaire, mais il y est ramené par l’ennui de ce qui l’entoure, et aussi effrayé par l’immensité où il se plonge en sortant de lui-même.
Ils sont conduits par une idée, et malgré eux, sans même s’en apercevoir, pour le plaisir de ne point blesser cette idée, ils faussent toutes les notions qu’ils reçoivent. […] Je crois bien que c’est une nouveauté dans la littérature que cette haine d’un auteur pour ses héros, et ce plaisir de dessiner sans fin des êtres antipathiques. Les Hollandais ont peint des buveurs ivres, de grasses commères sans coquetterie ; Cervantès nous a montré des brigands et des catins, Callot a dessiné des gueux, et il est certain que tous ont pris plaisir à nous présenter leurs personnages. […] Que valent aussi sa théorie du surhomme et ses hymnes tristes au plaisir ? […] Dans tous les cas, la classe des oisifs est la plus apte à souffrir, est celle qui souffre le plus ; son contentement, son plaisir de l’existence est moindre, sa tâche est plus grande.
De la vie moderne, grossière sous son élégance apparente, ricane en s’efforçant au plaisir superficiel ; mais tout autour, joie et douleur, profondeur et poésie et noblesse farouche, la vie des imagiers bretons sourit, pleure, chante. […] Je ne puis résister au plaisir égoïste de briser quelques thyrses et de les porter dépaysés et tristes, effeuillés et qui se fanent, en mes mains sacrilèges : Ces gens avaient perdu, l’une après l’autre, leurs espérances et, « comme dans une cathédrale, quand on a éteint tous les cierges, la nuit noyait leur pensée ». — Entendez, résonnement fait de souvenir, la voix tue du rossignol : « Les dernières notes de son chant étaient tombées, rebondissantes en écho, comme des perles jetées de très haut dans un bassin de fabuleux cristal. » — Un être lucide jusqu’ici devient fou. […] Une troisième courtisane, celle dont le baiser enchaîne plus fidèlement, la reine des définitifs oublis, la Mort, vient lui offrir mieux que les insuffisants léthés du songe et du plaisir. […] Et voici, parmi les gros plaisirs bruyants d’une kermesse, des flirts subtils et griffants. […] Une coquette parle : « Je me promène parfois rien que pour le plaisir de voir, selon le contour des sentes, mon ombre rôder à mon entour pour s’unir à moi ou me fuir, puis disparaître à gauche et, un pas plus loin, renaître à droite ; ici me précéder, tel un héraut, et là me suivre, tel un page.
» Il ajoute : « Au fond, on ne le sait pas, mais ce qu’il aimait, c’était la science et la philosophie… Quand Robin a été nommé sénateur, cette nomination lui a fait autant de plaisir que les élections de 76. […] * * * — Expression d’un marchand d’eau-de-vie artiste : « Oui, c’est de l’eau-de-vie… mais pas de l’eau-de-vie qui donne chaud sous les ongles. » Vendredi 9 février Zola disait hier chez Daudet « que nous avions un malheur… que nous avions trop besoin de nous faire plaisir… qu’il fallait, que la page que nous écrivions, nous donnât aussitôt, après sa fabrication, le petit bonheur d’une harmonie, d’un tour, d’un orné, auquel nous sommes habitués dès l’enfance. » * * * — M…, un modiste de filles, déclarait qu’il n’habillait pas les femmes du monde, parce qu’elles manquaient de conversation. […] Ce poète, aux récits invraisemblables, nous fait un tableau amusant d’une ville du Texas, avec sa population de convicts, ses mœurs au revolver, ses lieux de plaisir, où on lit sur une pancarte : Prière de ne pas tirer sur le pianiste qui fait de son mieux. […] Partie de canot, où Daudet, crânement, renversé sur les avirons, et jetant à la rive des chansons de marin, fait plaisir à voir parmi la jolie ivresse, que lui verse la nature. […] Dans ce qu’il conte, en marchant, et en jetant des bouffées de sa petite pipe culottée, ça me paraît très bien arrangé, très bien architecturé… En cette improvisation parlée et jouée de son œuvre future, je suis frappé d’une chose qui me fait plaisir : son observation est en train de monter à la grande, à la sévère, à la brutale observation.
Vos événements, pressés les uns sur les autres selon votre bon plaisir, sont plus romanesques qu’intéressants : ils se composent de la proscription d’un noble devenu chef de brigands, ce qui n’est pas nouveau ; d’un acte de générosité fait par un vieillard rodomont, jaloux et bavard, faible et fausse imitation du beau don Diègue de Corneille ; d’un galantin devenu empereur et philosophe profond au moment de son couronnement ; enfin, de la noce d’une demoiselle tant soit peu dévergondée ; et tout cela finit au bruit d’un cor merveilleux, qui force deux tendres amants, près de s’enivrer de la coupe du plaisir, à s’empoisonner de compagnie, le tout pour satisfaire la vengeance d’un vieillard stupide ; car c’est ainsi que vous l’appelez vous-même. […] Il suffisait pour cela qu’une phrase blessât la coquetterie de l’actrice en faveur, qu’on y parlât mal de l’âge ou de la beauté du personnage qu’elle représentait, que l’acteur son rival fût plus applaudi qu’elle, qu’elle eût un congé pour aller faire ses récoltes départementales, ou enfin qu’il lui plût de ne pas jouer la pièce par un simple caprice, pour une partie de plaisir de quelques jours. Tous mes confrères, et même les acteurs, vous attesteront de bonne foi que jamais pièce n’a été jouée au Théâtre-Français que selon leur bon plaisir. […] Je ne tirerai pour moi aucune conséquence de cette anecdote : je n’ai point l’orgueil d’être un grand maître ; mais si dans l’art dramatique les gens de lettres et le public ont bien voulu me reconnaître une importante qualité, celle de charpenter une pièce, de préparer une situation et d’enchaîner les scènes, je me ferais toujours un plaisir d’offrir à qui me les demanderait des conseils qui seraient le résultat du travail, de l’âge et de l’expérience.
Mais on prend plaisir à se chantera soi-même, avec un délicieux plaisir de l’oreille et même de l’esprit, des vers comme ceux-ci : Est-ce que l’on consulte au moment qu’on s’enflamme ? […] A croire que les sots sont ici-bas pour nos menus plaisirs, on devient malicieux, et la malice est l’antichambre de la méchanceté. […] Veut-on que tout un public s’abuse sur ces sortes de choses et que chacun n’y soit pas juge du plaisir qu’il y prend ? […] Les inclinations naissantes, après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l’amour est dans le changement. […] […] Le moyen de chasser ce qui fait du plaisir ?
Lorsque, par un jour demi-serein, on sort dans la campagne et qu’on arrive sur une hauteur, les yeux éprouvent une sensation unique et un plaisir qu’ils ne connaissaient pas. […] Comme ils vivent opulemment dans les clairières, étalés à plaisir, toujours rajeunis et abreuvés par l’air moite ! […] Ils goûtent encore les plaisirs naturels ; la précocité ne les a point gâtés. […] Paris, en comparaison, n’est qu’une élégante ville de plaisir ; la Seine, avec ses quais, un joli jouet commode. […] Les arts ont besoin d’esprits oisifs, délicats, point stoïciens, surtout point puritains, aisément choqués par les dissonances, enclins au plaisir sensible, et qui emploient leurs longs loisirs, leurs libres rêves à arranger harmonieusement, sans autre objet que la jouissance, les formes, les couleurs et les sons.
Sinon, le lecteur est choqué, trouve que l’on amplifie à plaisir, et saute les pages. […] Mais rien de moins juste que cette conclusion ; elle conduirait à admettre que l’on choisit, en général, plus librement, par une nécessité intérieure moins altérée de motifs pratiques, les carrières et les conditions que les plaisirs. […] Cet homme intérieur, parfois extrêmement différent de l’homme social, on ne peut le connaître que par ses actes libres, ses actes non intéressés, par le choix de ses plaisirs, par le jeu de ses facultés inutiles. Les hommes à vocation native présentent rarement, croyons-nous, un désaccord accusé entre leurs délassements et leurs occupations Les artistes, qui généralement s’adonnent à leur carrière par suite d’un entraînement instinctif, ne parlent que de leur art et ne cherchent de plaisirs intellectuels qu’en lui. […] Hennequin suggère tout ce que le plaisir esthétique, et partant la valeur esthétique, doivent à ce qu’on appellera plus tard « norme », « code », ou « convention », voire « idéologie ».
« Quant aux efforts qu’il m’en coûta pour m’y rendre raison d’abord de quelques mots, puis par-ci par-là de phrases isolées, et enfin de passages d’une assez longue haleine, il sera facile au lecteur de s’en faire une idée, comme aussi du plaisir qui me transporta quand je fus parvenu à cette intelligence. […] La nature semblait prendre plaisir à favoriser cette heureuse contrée : des pluies douces et fécondantes, dans la saison la plus favorable, arrosaient régulièrement la terre, dont le sein fertile, sans être déchiré par le soc de la charrue, produisait en abondance les fruits les plus nourrissants ; et d’immenses troupeaux, errant de toutes parts dans de gras pâturages, apportaient chaque jour à l’homme le tribut de leur lait. […] Un jour, accompagné d’une armée immense composée de chevaux, de fantassins, d’éléphants et de chars, il résolut de se rendre à une vaste et épaisse forêt pour s’y livrer au plaisir de la chasse. […] Douchmanta , la contemplant avec le plus vif plaisir. […] » XIX Au second acte, le héros, rejoint par deux de ses officiers, dont l’un est un bouffon gourmand et poltron comme le Falstaf de Shakespeare, s’entretient avec eux, et feint d’être dégoûté du brutal plaisir de la chasse.
Ainsi, notre maître a procuré un grand plaisir au roi, afin que tout le profit en revînt à ce misérable ! […] Un autre chambellan leur décrit en ces termes l’abattement du prince : « Le roi n’eut pas plutôt jeté les yeux sur ce fatal anneau, que, la mémoire lui revenant tout à coup, il se rappela le mariage qu’il avait secrètement contracté avec Sacountala, s’accusa de l’avoir repoussée avec tant de cruauté et d’injustice, et, depuis ce temps, il est livré au plus amer repentir ; il a les plaisirs en horreur ; il se refuse, contre son habitude, à recevoir chaque jour les hommages de son peuple. […] Les pièces étaient préalablement châtiées et destinées autant à l’édification qu’au plaisir. […] Les règles de leur littérature théâtrale, règles puisées dans la religion plus que dans l’art, révèlent, dans ces temps reculés, de profondes notions sur la manière d’émouvoir, d’intéresser, de tendre et de détendre l’esprit des hommes rassemblés, et de les faire sortir de ces représentations dans un état d’édification morale où le plaisir même profite à la sainteté. […] » La scène s’évanouit après ces paroles, et le peuple édifié sort du spectacle comme d’un temple, où le plaisir même sert de mobile à la religion et à la vertu.
La vie ne paraît qu’un instant auprès de l’éternité, et la félicité humaine, un songe ; et, s’il faut parler franchement, ce n’est pas seulement contre la mort qu’on peut tirer des forces de la foi ; elle nous est d’un grand secours dans toutes les misères humaines ; il n’y a point de disgrâces qu’elle n’adoucisse, point de larmes qu’elle n’essuie, point de pertes qu’elle ne répare ; elle console du mépris, de la pauvreté, de l’infortune, du défaut de santé, qui est la plus rude affliction que puissent éprouver les hommes, et il n’en est aucun de si humilié, de si abandonné, qui, dans son désespoir et son abattement, ne trouve en elle de l’appui, des espérances, du courage : mais cette même foi, qui est la consolation de misérables, est le supplice des heureux ; c’est elle qui empoisonne leurs plaisirs, qui trouble leur félicité présente, qui leur donne des regrets sur le passé, et des craintes sur l’avenir ; c’est elle, enfin, qui tyrannise leurs passions, et qui veut leur interdire les deux sources d’où la nature fait couler nos biens et nos maux, l’amour-propre et la volupté, c’est-à-dire tous les plaisirs des sens, et toutes les joies du cœur… Vauvenargues avait vingt-quatre ans quand il écrivait ces lignes. […] Il continue et prolonge cette conversation par lettres avec Saint-Vincens, sur les sentiments de différente sorte et les troubles qui agitent une âme à la vue des derniers moments : On ne saurait tracer d’image plus sensible que celle que tu fais d’un homme agonisant, qui a vécu dans les plaisirs, persuadé de leur innocence par la liberté, la durée, ou la douceur de leur usage, et qui est rappelé tout d’un coup aux préjugés de son éducation, et ramené à la foi, par le sentiment de sa fin, par la terreur de l’avenir, par le danger de ne pas croire, par les pleurs qui coulent sur lui.
Ce fut un plaisir de la voir téter ; elle n’avait jamais tété de cette sorte. […] Sa fille lui avait écrit qu’elle était un peu jalouse de voir cette tendresse extrême pour l’enfant : elle croyait sans doute, en parlant ainsi, faire plaisir à sa mère qui lui avait quelquefois reproché son air de froideur et d’indifférence. […] On ne peut rien détacher en ce genre ; lisez tous ces charmants endroits dans le livre (tome II, pages 149 et 173), mais surtout ce passage où elle nous expose et nous étale si plaisamment, si crûment, la satiété, le dégoût et la profonde nausée d’une nature repue et gorgée de plaisirs.
Biot la portait encore sur bien des objets, astronomie, physique, chimie, agriculture, et les plaisirs actifs, chasse, pêche, nage ; vieux, il disait en souriant : « J’ai aimé dans ma vie bien des choses. » Faudrait-il en conclure qu’il s’est trop dispersé, et qu’il ait eu le droit de se dire à lui-même comme La Fontaine : J’irais plus haut peut-être au Temple de Mémoire, Si dans un genre seul j’avais usé mes jours… ? […] Les premières fois que j’eus l’honneur de causer avec lui, je crus m’apercevoir que, si on le laissait faire, il aimait assez la méthode de Socrate, c’est-à-dire à vous supposer quelque idée fausse que souvent vous n’aviez pas, et à se donner le plaisir de la réfuter en se faisant naturellement la belle part, — un peu comme Béranger. […] Ce qui est vraiment beau pour un savant et ce qui mérite d’être envié en effet de tous ceux qui ont connu les plaisirs de l’esprit, c’est qu’il se maintint constamment frais et dispos d’intelligence, et qu’il vécut, presque jusqu’à la dernière heure de la vie de la pensée.
Dans ces jeux de l’érudition et du goût, l’original sans cesse relu, manié et remanié à plaisir, devenait chose familière, facile, non apprise, mais sue de tout temps et comme passée en nous, on ne l’oubliait plus. […] « Je m’en réjouissais fort », dit le père. — « Vous aviez bien raison, répond Sosie, qui ne perd jamais l’occasion de glisser son proverbe : je suis bien d’avis qu’il n’y a rien de plus utile dans la vie que rien de trop. » — Simon continue l’éloge de ce modèle de fils qui s’accordait si bien avec tous ceux de son âge, prenait sa part modérée dans leurs plaisirs, se prêtant à tous, ne se préférant à personne : manière sûre de se faire bien venir et d’acquérir des amis. — Le bon Sosie ne manque pas de glisser de nouveau son proverbe et de pousser, selon son habitude, l’idée de son maître jusqu’à en faire une maxime : « C’était bien sage à lui, dit-il, d’en agir ainsi ; car, par le temps qui court, la complaisance engendre l’amitié, la vérité fait des ennemis. » — « Cependant, poursuit le père, voilà bien trois ans de cela, arriva ici dans le voisinage une femme d’Andros, sans parents, pauvre, belle, à la fleur de l’âge. » — « Aïe ! […] se disait-il parlant à lui-même, c’est là, après tout, un cas bien rare ; résister ainsi à l’exemple, à l’entraînement de compagnons de plaisir, c’est ce qui s’appelle être maître de soi, c’est déjà tenir le gouvernail de sa vie. — Joignez à cela que le jeune homme si cher à son père était en même temps agréable à tous ; chacun chantait ses louanges et félicitait l’heureux Simon d’avoir un tel fils.
Vais-je pour quelques passages fermés renier mon plaisir ? […] François Coppée, lequel pourtant me faisait plaisir en imprimant si judicieusement ce matin : « J’ai lu, maigre mon incompétence, les Écoles de cavalerie de M. le baron de Vaux, m’étant donné pour discipline de lire tous les livres techniques qui me tombent sous la main. […] Pour soi d’abord. « J’ai assez de quelques lecteurs, dit à peu près Montaigne, j’en ai assez de trois ou de deux, j’en ai assez d’un, j’en ai assez de pas un. » Il y a des natures sensibles et communicatives qui ne se résoudront pas à perdre le plaisir, même pris seul, de l’épanchement littéraire.
C’est là que M. de Musset déroule sa théorie du Don Juan et oppose les deux espèces de roués qui se partagent, selon lui, la scène du monde : le roué sans cœur, sans idéal, tout égoïsme et vanité, cueillant le plaisir à peine, ne visant qu’à inspirer l’amour sans le ressentir, Lovelace ; et l’autre type de roué, aimable et aimant, presque candide, passant à travers toutes les inconstances pour atteindre un idéal qui le fuit, croyant aimer, dupe de lui-même quand il séduit, et ne changeant que parce qu’il n’aime plus. […] Faites l’incrédule, retournez-les en tous sens, mettez-y le scalpel, cherchez chicane à votre plaisir, il peut s’y rencontrer quelques taches, des tons qui crient ; mais, si vous avez le sentiment poétique vrai et si vous êtes sincère, vous reconnaîtrez que le souffle est fort et puissant ; le dieu, dites si vous voulez le démon, a passé par là. […] Quelles sont, dans les pièces de poésie composées depuis 1819 jusqu’en 1830, celles qui se peuvent relire aujourd’hui avec émotion, avec plaisir ?
Quoiqu’ils trouvent dans l’exercice de leur art assez d’entraves qu’ils ne peuvent rompre, nous avons pris plaisir à resserrer gratuitement leurs liens, comme pour nuire à leur encouragement et à nos intérêts. […] Quel plaisir peut faire dans une traduction de l’Énéide, l’endroit où les Harpies enlèvent le dîner des Troyens ; dans une traduction de Cicéron, les plaisanteries froides et quelquefois grossières qui déparent ses harangues ; dans la traduction d’un historien, les endroits où sa narration n’offre rien d’intéressant, ni par les choses, ni par le style ? […] Quel plaisir, par exemple, ne feraient pas Sénèque et Lucain, resserrés et réduits ainsi par un traducteur habile ?
Quel plus grand plaisir que de se battre ? […] Cousin invente peu ou point ; mais il a besoin d’éprouver des émotions métaphysiques ; il ressent le plus vif et le plus poétique plaisir, lorsqu’il voit un système se former dans son cerveau, se développer et embrasser l’univers dans ses conséquences. Ne pouvant se donner ce plaisir lui-même, il appelle les autres à son aide ; il expose un, deux, dix, vingt systèmes.
Son plaisir propre n’est absolument ni d’aimer, ni de goûter la musique, mais de cristalliser à propos de l’amour et de la musique. […] L’ignorance de la cristallisation amoureuse amènerait pareillement un homme grossier à trouver ridicule qu’un amoureux se donne tant de peine pour obtenir d’une certaine femme un plaisir que cent femmes entre lesquelles il peut choisir lui procureraient à l’instant. […] L’amour individuel, « l’amour éprouvé se complaisant en soi et se bâtissant lui-même toute sa tragédie », cet amour-passion que Stendhal goûtait chez les autres avec un plaisir un peu artificiel, est, pour M.
Nation impétueuse et légère, ardente à ses plaisirs, occupée toujours du présent, oubliant bientôt le passé, parlant de tout, et ne s’affectant de rien, elle regarde avec indifférence tout ce qui est grand ; et quelquefois un ridicule est tout le salaire d’une action généreuse, ou d’un service rendu à l’État et à nous. […] Nos plaisirs, comme nos peines, sont composés ; l’idée principale en attire à elle une foule d’autres qui s’y mêlent, et en augmentent l’impression. […] Ce qui eût transporté d’admiration et fait palpiter de plaisir un habitant de Lacédémone, n’eût pas même fixé l’attention d’un Sybarite : il y a la même différence entre les hommes.