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468. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Le vieux janséniste s’apercevait bien de mes hérésies ; quand je lui lisais mes articles, je le voyais sourire à chaque phrase câline ou respectueuse. […] On voyait bien tout cela, mais cela sortait des habitudes ordinaires de la langue et du moule des phrases bien faites.

469. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre IV. Cause immédiate d’une œuvre littéraire. L’auteur. Moyens de le connaître » pp. 57-67

Il se trouve tous les jours des imitateurs pour traduire en belles phrases des sentiments qu’ils n’éprouvent pas. […] On cherche à savoir, au moyen de procédés ingénieux, de tests, comme on dit en langage technique, quelle est chez lui l’association habituelle des idées, quelle mémoire il a des couleurs, des sons, des mots, des phrases, des pensées ; comment il apprécie la distance, la durée, les dimensions des objets, à quel degré il possède l’adresse des mouvements, la facilité de la parole, etc.

470. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IV. La littérature et le milieu psycho-physiologique » pp. 126-137

Pour lui, la réflexion est un état contre nature ; il écrit cette phrase énergique : « L’homme qui médite est un animal dépravé. » Il se plaît à railler la raison, à l’humilier, à la fouler aux pieds ; il proclame la royauté, que dis-je ? […] Rousseau dit en parlant de certaines lettres de Saint-Preux : « Quiconque ne sent pas amollir et fondre son cœur dans l’attendrissement doit fermer le livre. » Les apostrophes, les élans passionnés, les effusions lyriques, les explosions d’éloquence, d’indignation, d’enthousiasme animent mille pages fiévreuses ; et si l’emphase, les tirades creuses et sonores les phrases ampoulées abondent également, si la sentimentalité fade et la sensiblerie fausse donnent une saveur écœurante à des ouvrages médiocres et gâtent çà et là ceux des meilleurs écrivains, c’est que, à toute époque, défauts et qualités sont intimement unis, c’est que toute forme d’esprit a, comme toute médaille, un revers et que ce revers est d’ordinaire la caricature de l’autre face.

471. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Conclusion »

Il est bien remarquable, en effet, que tandis qu’en France nos plus volumineuses physiologies278 se bornent généralement à réimprimer sur ces questions quelques phrases de Condillac, les physiologistes anglais sont au courant des plus récents travaux psychologiques et y contribuent pour leur part. […] « Herbart, dit-il, eut le mérite, durant la longue période où l’Allemagne était perdue dans les rêves de l’idéalisme, de maintenir toutes ses spéculations sur une base réelle, et de ne jamais noyer les faits de conscience dans les phrases et formes purement dialectiques.

472. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

Et plus loin, comparant le peuple écrasé à l’antique géant étouffé sous l’Etna : « On a cru, s’écria-t-il, anéantir un peuple, on a créé un volcan. » M. de Montalembert a une faculté qui manque à beaucoup d’autres, d’ailleurs éloquents, et qui fait que sa phrase ne résonne pas comme une autre phrase : il a la faculté de l’indignation.

473. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

Sur la phrase elle sera transportée, l’esprit demeure suspendu, et attend quelque grande comparaison, lorsque le prophète ajoute, comme une tente dressée pour une nuit. […] Déjà il avait charmé par ses discours deux générations d’hommes entre lesquelles il avait vécu dans la grande Pylos, et il régnait maintenant sur la troisième119. » Cette phrase est de la plus belle antiquité, comme de la plus douce mélodie.

474. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

C’est partout un remue-ménage assourdissant ; — on dirait un camp de Philistins, la veille d’une prise d’armes : maint Goliath brandit belliqueusement sa plume et s’essaye à des attitudes menaçantes ; — celui-ci ramasse un argument oublié dans un coin, cet autre fourbit à neuf une vieille phrase qui se rouillait. […] On y voit des rédacteurs occupés à sonner le tocsin d’alarme à toutes volées de phrases.

475. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « IX »

Le très perspicace Vinel, qui a parlé si hautement et si profondément de Pascal, est très frappé de ce fait : l’antithèse, dit-il « est la figure tout intellectuelle que Pascal emploie de prédilection, si ce n’est même exclusivement, Et l’un de mes auditeurs me faisait observer, l’autre jour, que les antithèses, chez Pascal, se redoublent et s’entrecroisent, opposant plusieurs mots à plusieurs mots, la phrase à la phrase, et souvent une série à la série inverse, avec la plus attentive exactitude.

476. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

L’ingénieux Vapereau, l’historiographe de nos grands hommes, a tourné la difficulté affligeante et écrit cette phrase de consolation qui nous rend Buloz sans le prendre à la Suisse : « Buloz (François), littérateur français, d’origine étrangère. » Et c’est si bien trouvé, et c’est si joli, que tout le monde a été content, et moi surtout !!! […] On y parlait, au début, de Platon et des siens, et le pauvre rédacteur, épris d’antiquité, disait élégamment : « Lorsque les brises de la mer Égée parfumaient l’atmosphère de l’Attique, quelques hommes, préoccupés de l’éternel mystère, venaient, dans les jardins d’Acadème, se suspendre aux lèvres de Platon, etc. » Buloz prit peur de cette phrase comme de la plus audacieuse hardiesse, et de sa patte dictatoriale et effarée il supprima le tout et mit à sa place ; « Il y eut aussi dans la Grèce des sociétés savantes. » Une autre fois, dans une étude sur la mystique chrétienne, on disait : « L’amour de la vérité cherche celle-ci dans les solitudes intérieures de l’âme » ; mais Buloz, qui ne connaît pas les solitudes intérieures de l’âme, traduisit d’autorité : « Les esprits curieux fuient les embarras des villes », qu’il connaît !

477. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Léon Gozlan » pp. 213-230

… À part le talent de ses œuvres, pour lequel on n’a trouvé que le mot de distingué, — ce qui n’est pas assez, — on n’a trouvé aussi pour caractériser l’esprit sur place de Gozlan que le mot banal de charmant causeur, et ç’a été à peu près tout, sauf les arabesques et les chatoiements de la phrase sur ces deux pauvres idées, l’aumône de la Superficialité émue un moment par la mort ! […] Il y avait débuté comme écrivain, et ce concentrateur y était promptement devenu le roi de l’entrefilet formidable, le serpent chatoyant, à langue aiguë, de la phrase courte, l’étrangleur avec un bracelet !

478. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Le Comte de Gobineau »

Ils mènent tout, portent les clés, ouvrent les portes, inventent les phrases, pleurent de s’être trompés, assurent qu’ils n’auraient jamais cru… Voici maintenant les drôles ! […] Mais si le livre est littérairement manqué, l’homme qui l’a écrit a des facultés littéraires quelquefois puissantes, souvent délicieuses, lorsqu’il échappe à quelques affectations de style retrouvées ici et là dans des phrases trop coquettes, et qui sont (ces affectations) la conséquence forcée de l’exquisité voulue, du trop de raffinement dans la conception et dans les sentiments.

479. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

M.Brunetière improvise ; et, ce qui est merveilleux, sa phrase parlée a l’ampleur, les vastes proportions et tout le poids de sa phrase écrite. […] La phrase de M.  […] « Sur quoi Abner fait des phrases selon sa coutume. […] » Marco fut inventée pour que cette phrase pût être dite, voilà tout. […] » Telle est sa première phrase.

480. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Herold, André-Ferdinand (1865-1940) »

Hérold, âme droite et sereine, amant des formes eurythmiques, et de qui la phrase souple et légère ondoie d’une harmonie personnelle, adéquate à son rêve, et telle que son style, suivant le juste critérium de Paul Adam, peut être dit excellent.

481. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 358-361

Est-ce par des antitheses pénibles, des phrases sententieuses, des détails apprêtés, des tableaux enluminés, des apostrophes de commande, qu’on fera rougir le vice, aimer la vertu, & respecter les vérités de la Religion ?

482. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Un grand respect la saisit, un grand prestige la subjugue ; les phrases de l’écrivain font texte, ses opinions font loi, ses rêveries mêmes font miracle pour ses fidèles ; et voilà l’homme prophète. […] Que de phrases malsonnantes, que d’expressions risquées jusqu’au grotesque napolitain, que de constructions russes ou savoyardes ne lui ai-je pas fait effacer avec la docilité du génie ! […] » Je cédais, quoique à regret, à ce petit désir d’effet par l’audace de la phrase. […] Ce style bref, nerveux, lucide, nu de phrases, robuste de membres, ne se ressentait en rien de la mollesse du dix-huitième siècle, ni de la déclamation des derniers livres français ; il était né et trempé au souffle des Alpes ; il était vierge, il était jeune, il était âpre et sauvage ; il n’avait point de respect humain, il sentait la solitude, il improvisait le fond et la forme du même jet ; il était, pour tout dire en un mot, une nouveauté. […] Écoutez son entretien secret avec Savary, et lisez quelques phrases du Mémoire que le comte de Maistre adresse à cet aide de camp de Napoléon pour être communiqué à Napoléon lui-même.

483. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Les prosateurs, qui, tel Jean-Jacques, suivent la dictée d’une voix intérieure et retournent vingt fois dans leur tête les phrases qu’ils construisent ; ceux qui, tel Flaubert, les font passer par leur « gueuloir » pour en éprouver l’euphonie, attachent une légitime importance aux délicates combinaisons de syllabes qui forment ce qu’on appelle « le nombre ». […] Ce fut au lendemain d’une époque où la musique avait suscité des admirations et des querelles ardentes ; ce fut aussi dans un temps où les âmes, troublées et désorientées, se plongeaient à s’y perdre dans la pénombre des sciences occultes et dans la grisante atmosphère du mysticisme ; ce fut enfin à un moment où le culte de l’art pour l’art rendait les écrivains plus sensibles au vêtement de l’idée qu’à l’idée même, plus attentifs à l’extérieur de la phrase qu’à son contenu. […] Il perdait son rythme pour se mouler sur celui de la phrase musicale, et, comme la rime le gênait encore dans ce travail d’assimilation, il finissait par s’anéantir dans une prose chantante qui n’était plus qu’une mélodie continue. […] Il lui faisait entendre une ariette, un motif quelconque, puis il disait : « Adaptez-moi à cela des mots qui soient dans le sentiment de la phrase musicale, du rythme, et, autant que possible, de la situation dramatique129. » Soumise à des conditions pareilles, obligée de se plier aux caprices du compositeur, la poésie a pu se plaindre souvent d’être sacrifiée, et il n’est pas surprenant qu’elle ait alors rempli sa tâche avec quelque négligence. […] C’est un artiste qui offre à ses yeux une fêté perpétuelle et relègue au second plan idées et sentiments, absorbé qu’il est par le plaisir de créer des images et de ciseler de belles phrases où les mots brillent comme des rubis ou des émeraudes.

484. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

Au bout de quatre ou cinq phrases, dites avec le ton suprême des journalistes du grand monde, je le trouve agaçant à l’image de son journal. […] Et au grand balcon, un vainqueur, dans la robe de chambre de Louis-Philippe, singeait, caricatural comme un Daumier, le salut de sa vieille phrase : « C’est toujours avec un nouveau plaisir… » Aujourd’hui, en repassant rue des Capucines, je regarde par hasard l’enseigne, et je lis, à la place de « Chaudronnier du Roi » : Chaudronnier de l’Empereur. […] * * * — L’autre jour, dans une phrase, la Païva s’est toute crachée. […] ce livre, je voudrais ne pas l’avoir fait, quoiqu’il m’ait valu… » et le vieillard battu de ses grands cheveux blancs, ne finissant pas sa phrase, tourne vers sa femme des yeux jeunes d’un remerciement d’amour. […] C’est le grand moment de la causerie, la digestion du peu qu’elle a mangé, semble faire jaillir de la princesse, une expansion vivace de récits, de souvenirs, de portraits des gens à l’emporte-pièce, des débâcles de phrases à la Saint-Simon.

485. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Mais si on leur avait appris que le mort avait son compte chez Rothschild, qu’il était le plus fort actionnaire de la Banque belge, qu’en homme prévoyant, il avait placé ses fonds hors de France, où l’on fait des révolutions et où l’on parle de brûler le Grand livre, et qu’il ne se départit de sa prudence et n’acheta de l’emprunt de cinq milliards pour la libération de sa patrie, que parce que le placement était à six pour cent ; si on leur avait fait entendre que le poète avait amassé cinq millions en vendant des phrases et des mots, qu’il avait été un habile commerçant de lettres, un maître dans l’art de débattre et de dresser un contrat à son avantage, qu’il s’était enrichi en ruinant ses éditeurs, ce qui ne s’était jamais vu ; si on avait ainsi énuméré les titres du mort, certes les honorables représentants de la Cité de Londres, ce cœur commercial des deux mondes, n’auraient pas marchandé leur adhésion à l’importante cérémonie ; ils auraient, au contraire, tenu à honorer le millionnaire qui sut allier la poésie au doit et avoir. […] Cette phrase qui paraîtra un plagiat du mot historique de Béranger, est une profession de foi : elle voulait dire, qu’il allait accepter les grâces et faveurs de la monarchie, tout en restant républicain dans son for intérieur. […] Le 21 juillet 1842, il eut le courage de jeter à la face de Louis-Philippe des phrases de ce calibre : « Sire, vous êtes le gardien auguste et infatigable de la nationalité et de la civilisation… Votre sang est le sang du pays, votre famille et la France ont le même cœur… Sire, vous vivrez longtemps encore, car Dieu et la France ont besoin de vous. » Victor Hugo a toujours été cosmopolite : il unissait tous les rois d’Europe dans son adulation. […] Dès qu’il se convainquit que l’existence de l’empire était assurée pour un long temps, il éteignit ses foudres justiciardes et concentra toute son activité à son commerce d’adjectifs et de phrases rimées et rythmées. […] Le poète était digne d’un tel sacrifice : Hugo fut en effet un héros de la phrase.

486. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

La preuve en est que si nous rompons la mesure en insistant plus que de raison sur une note de la mélodie, ce n’est pas sa longueur exagérée, en tant que longueur, qui nous avertira de notre faute, mais le changement qualitatif apporté par là à l’ensemble de la phrase musicale. […] Mais la vérité est que chaque surcroît d’excitation s’organise avec les excitations précédentes, et que l’ensemble nous fait l’effet d’une phrase musicale qui serait toujours sur le point de finir et sans cesse se modifierait dans sa totalité par l’addition de quelque note nouvelle. […] Force est donc bien d’admettre qu’il y a ici une synthèse pour ainsi dire qualitative, une organisation graduelle de nos sensations successives les unes avec les autres, une unité analogue à celle d’une phrase mélodique. […] Si, rentrant en moi-même, je m’interroge alors soigneusement sur ce qui vient de se passer, je m’aperçois que les quatre premiers sons avaient frappé mon oreille et même ému ma conscience, mais que les sensations produites par chacun d’eux, au lieu de se juxtaposer, s’étaient fondues les unes dans les autres de manière à douer l’ensemble d’un aspect propre, de manière à en faire une espèce de phrase musicale. Pour évaluer rétrospectivement le nombre des coups sonnés, j’ai essayé de reconstituer cette phrase par la pensée ; mon imagination a frappé un coup, puis deux, puis trois, et tant qu’elle n’est pas arrivée au nombre exact quatre, la sensibilité, consultée, a répondu que l’effet total différait qualitativement.

487. (1898) Introduction aux études historiques pp. 17-281

Après avoir analysé le document et déterminé le sens littéral des phrases, on n’est pas certain encore d’avoir atteint la véritable pensée de l’auteur. […] Souvent une seule phrase contient plusieurs affirmations, il faut les isoler pour les critiquer à part. […] Aussitôt qu’on a compris une phrase on l’analyse et on fait la critique de chacun des éléments. […] On sait la phrase que Luther a prononcée à la Diète de Worms ; on sait qu’il n’a pas dit ce que lui attribue la tradition. […] Aussitôt qu’une phrase d’un document est lue, une image est formée dans notre esprit par une opération spontanée dont nous ne sommes pas maîtres.

488. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

On est grisé par cette avalanche de jolies phrases comme par une pluie de fleurs exotiques et capiteuses. […] Ces phrases, pailletées comme un costume de théâtre, fourmillent d’allusions, débordent d’actualité. […] Sa phrase a des blandices qui chatouillent, des audaces cajoleuses où l’on se pâme. […] Telle de ces phrases est une pilule dorée, qui excite. […] Je vois d’ici, quelques nez de puristes s’éloignant, avec scandale, de ces phrases qui (soit dit sans mauvaise plaisanterie) sentent l’huile.

489. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Ces phrases furent décisives pour la direction des jeunes Anglais qui, vers 1843, unissaient des tendances artistiques au mysticisme des dégénérés et des hystériques. […] Charles Morice la responsabilité du manque de sens de la tournure de phrase finale. […] Celle-ci ne remonte jamais aux faits, mais répète les phrases toutes faites qui ont été dites devant elle. […] Les mots qui composent la phrase forment une écholalie pure ; c’est un alignement de sons similaires qui s’appellent l’un l’autre comme des échos. […] Ils s’insurgent impétueusement contre l’antique alexandrin avec césure au milieu et terminaison nécessaire de la phrase à la fin, contre l’interdiction de l’hiatus, la loi de l’alternement régulier des rimes masculines et féminines.

490. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Alexandre Hardy Il y a, dans la Poétique d’Aristote, une petite phrase que je me garderais bien de citer en son texte grec, si ce n’était qu’on en a proposé — comme de toutes les phrases de ce livre célèbre et obscur — cinq ou six traductions différentes. […] Si la langue ou la phrase de Pascal ont des mérites que celles de Nicole n’aient point, ne tâcherons-nous pas de les nommer par leur nom ? […] Toujours ample, toujours correcte, et généralement claire, la phrase d’Arnauld est souvent lourde, habituellement triste, et toujours monotone. […] Ou plutôt, il n’est ni long ni court, mais sa phrase, sans rien perdre de la netteté du contour qui la cerne, s’assouplit, se ploie, se brise et se raccourcit, ou s’allonge, quand et comme il lui plaît, avec une docilité, une vivacité uniques. […] On comprend sans doute qu’ainsi défini, ce mérite ne se borne pas à la phrase, mais il s’étend de la phrase à la période entière, et de la période à toute la Lettre, et d’une lettre à toutes les autres.

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