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372. (1767) Salon de 1767 « De la manière » pp. 336-339

La différence de l’ iliade à un roman est celle de ce monde tel qu’il est à un monde tout semblable, mais où les êtres, et par conséquent tous les phénomènes physiques et moraux, seraient beaucoup plus grands ; moyen sûr d’exciter l’admiration d’un pygmée tel que moi.

373. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XV »

Le phénomène est singulier. » Je ne trouve pas.

374. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (2e partie) » pp. 417-487

Ajoutez que, s’il est rencontré dans son âge de faiblesse par un autre homme isolé plus fort que lui, il devient à l’instant sa victime ou son esclave ; en sorte que le premier phénomène que présente la première société, c’est un maître et un esclave, un bourreau et une victime, jusqu’à ce que par les années la force du plus âgé devienne faiblesse, et la faiblesse du plus jeune devienne force et oppression, que les rôles changent, et que l’esclavage alternatif passe de l’un à l’autre avec la force brutale. […] Tout cela n’est rien aux yeux du législateur immoral pour qui tout le spiritualisme social, et même sentimental, consiste à nier toute loi morale et tout sentiment, et à ne voir dans la divine loi de filiation de l’être pensant que le phénomène d’une sève nourricière, d’une chair humaine, qui, quand elle a passé d’une veine à une autre veine, ne laisse à l’espèce renouvelée que le devoir de fleurir un jour sur les débris desséchés et indifférents de l’espèce qui fleurissait hier dans le même sillon ! […] Le principe, c’est Dieu, qui a voulu que l’homme sociable et perfectible développât comme un magnifique spectacle devant lui ce phénomène matériel, et surtout intellectuel, et encore plus moral, de la société ; et c’est la nature, interprète de Dieu, qui a donné à l’homme dans tous ses instincts le germe de toutes ses lois et la condition absolue de cette souveraineté sans laquelle aucune société ne subsiste, parce qu’aucune loi n’est obéie.

375. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Cette première vérité, ou plutôt ce principe même de toute certitude, le mène invinciblement à une seconde vérité, la distinction du corps et de l’âme, fondée sur l’incompatibilité absolue de leurs phénomènes. […] Descartes, avec une admirable réserve, se contente de distinguer les deux ordres de phénomènes, et de démontrer leur coexistence et leur incompatibilité. […] Il y donne la même définition de la philosophie, et y comprend de même les sciences ; il distingue, dans nos sensations, les phénomènes de l’esprit et ceux du corps ; il assigne la même origine à nos idées, et trouve dans l’entendement des idées supérieures aux idées sensibles ; il donne la même preuve de l’existence de Dieu ; il reconnaît, comme Descartes, la souveraineté de la raison dans toutes les opérations de l’esprit, dans l’appréciation du vrai et du faux, dans la conduite de la vie.

376. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Mais c’est pour n’avoir pas compris l’importance de ce double fait qu’on a vu dans le comique une simple curiosité où l’esprit s’amuse, et dans le rire lui-même un phénomène étrange, isolé, sans rapport avec le reste de l’activité humaine. […] Mais ce n’est là qu’une question de degré, et la loi générale de ces phénomènes pourrait se formuler ainsi : Est comique tout incident qui appelle notre attention sur le physique d’une personne alors que le moral est en cause. […] Quand le juge Brid’oison arrive sur la scène en bégayant, n’est-il pas vrai qu’il nous prépare, par son bégaiement même, à comprendre le phénomène de cristallisation intellectuelle dont il va nous donner le spectacle ?

377. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Envisagée dans l’espace, elle étale à nos yeux des éléments coexistants si intimement solidaires entre eux, si exclusivement faits les uns pour les autres, qu’aucun d’eux ne pourrait appartenir en même temps à deux organismes différents : chaque être vivant est un système clos de phénomènes, incapable d’interférer avec d’autres systèmes. Changement continu d’aspect, irréversibilité des phénomènes, individualité parfaite d’une série enfermée en elle-même, voilà les caractères extérieurs (réels ou apparents, peu importe) qui distinguent le vivant du simple mécanique. […] Il est aisé de voir, en effet, que le quiproquo théâtral n’est que le cas particulier d’un phénomène plus général, l’interférence des séries indépendantes, et que d’ailleurs le quiproquo n’est pas risible par lui-même, mais seulement comme signe d’une interférence de séries.

378. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Ces phénomènes mériteraient déjà que la psychologie leur ouvrît un compte spécial ; il se solderait par de beaux bénéfices. […] Le phénomène vital est-il résoluble. disions-nous, en faits physiques et chimiques ? […] De leur côté, les âmes détachées des corps seraient sans influence sur les phénomènes naturels si elles n’étaient du même genre que les esprits, et plus ou moins capables de prendre place parmi eux. […] De l’action de l’inanimé sur l’inanimé (à moins qu’il ne s’agisse d’un phénomène, météorologique ou autre, dans lequel l’homme a pour ainsi dire des intérêts) il n’est jamais question. […] Dans mon cas, sensation et émotion furent si fortes qu’il ne put tenir que peu de pensée, et nulle réflexion, nulle volition, dans le peu de temps qu’occupa le phénomène.

379. (1925) Dissociations

C’est une chose, je crois, qu’on ne fit jamais, à cette date de l’année, et j’en éprouvai une certaine satisfaction : je participais à un phénomène. […] À les croire, chacun vécut parmi une succession de phénomènes. […] Et l’on aura, à son tour, l’aspect d’un phénomène. […] Il y a là chez le marchand de fromage et de céleri un phénomène de dédoublement de la personnalité encore inexpliqué. […] Qu’il y ait quelques milliers ou quelques millions d’habitants autour de ce centre, le même phénomène se produit, à des proportions diverses : tous ces habitants, à certaines heures de la journée, affluent vers la partie centrale et les rues deviennent insuffisantes.

380. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Mouche et Mlle Préfère, deux vénérables personnes d’une hypocrisie sereine et d’une parfaite méchanceté, disent bien ce qu’ils doivent dire, mais ne le disent pas tout à fait comme ils le diraient dans la réalité : leurs propos, comme leurs figures nous arrivent répercutés et réfléchis  Cette continuelle et presque involontaire ironie, c’est bien le ton habituel d’un homme qui se regarde vivre lui et les autres, et pour qui tout est apparence, phénomène, spectacle ; car une telle façon de prendre le monde ne va pas sans un détachement de l’esprit qui est nécessairement ironique. […] c’est peut-être là la suprême sagesse : voir le monde et s’en émerveiller comme les tout petits, mais ne revenir à cet émerveillement qu’après avoir passé par toutes les sagesses et les philosophies ; concevoir le monde comme un tissu de phénomènes inexplicables, à la façon des enfants, mais par de longs détours et pour des raisons que les enfants ne connaissent pas.

381. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VIII. L’antinomie économique » pp. 159-192

C’est ce phénomène de dépersonnalisation et de « médiatisation85 » des valeurs qui caractérise notre stade de civilisation. […] Mais si la règle de répartition change, deux phénomènes différents peuvent avoir lieu : 1° avec la nouvelle répartition chaque individu reçoit plus qu’il n’avait avant Ce cas est semblable au précédent, et tous les individus auront intérêt à ce que l’augmentation supposée de richesse se produise ; 2° les uns reçoivent plus ; les autres moins qu’ils n’avaient avant.

382. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre X. La Science est-elle artificielle ? »

Le second cas pris pour exemple est celui d’une éclipse où le phénomène brut est un jeu d’ombre et de lumière, mais où l’astronome ne peut intervenir sans apporter deux éléments étrangers, à savoir une horloge et la loi de Newton. […] Que voulez-vous dire après tout quand vous parlez de cette création libre du fait scientifique et quand vous prenez pour exemple l’astronome qui intervient activement dans le phénomène de l’éclipse en apportant son horloge ?

383. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Mais nous en avons assez dit pour faire voir la liaison perpétuelle et intime des phénomènes littéraires et des phénomènes juridiques, et puisque, dans cette brève étude, nous nous sommes placé au point de vue de l’historien soucieux de démêler les rapports d’une littérature avec le milieu social environnant, nous pouvons résumer ainsi les recherches qui s’imposent à lui dans le domaine que nous venons de parcourir.

384. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre II »

Ravissant et merveilleux prodige emprunté aux extases de la mysticité chrétienne et coloré d’un phénomène de lumière par le grand peintre des teintes magiques. […] C’est la loi, c’est la règle, c’est le phénomène fatal et sacré de la nature.

385. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « L’abbé Galiani. » pp. 421-442

Il fit les délices des sociétés qui se l’arrachaient ; ses amis particuliers, surtout Grimm et Diderot, appréciaient hautement la nouveauté et l’étendue de ses vues, de ses lumières : Ce petit être, né au pied du mont Vésuve, écrivait Grimm, est un vrai phénomène. […] Apprenant par Mme d’Épinay la mort d’un de ses amis de Paris, le marquis de Croismare, il s’étonne de n’en pas être aussi affecté qu’il aurait cru : Ce phénomène m’a étonné, a pensé me faire horreur à moi-même, dit-il, et j’ai voulu en approfondir la cause.

386. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

C’est un choix particulier d’expressions, une certaine distribution de syllabes longues ou brèves, dures ou douces, sourdes ou aiguës, légères ou pesantes, lentes ou rapides, plaintives ou gaies, un enchaînement de petites onomatopées analogues aux idées qu’on a et dont on est fortement occupé, aux sensations qu’on ressent et qu’on veut exciter, aux phénomènes dont on cherche à rendre les accidens, aux passions qu’on éprouve, et au cri animal qu’elles arracheraient, à la nature, au caractère, au mouvement des actions qu’on se propose de rendre, et cet art-là n’est pas plus de convention que les effets de l’arc-en-ciel ; il ne se prend point ; il ne se communique point ; il peut seulement se perfectionner. […] Qu’il aille, qu’il regarde et qu’il fasse provision de phénomènes.

387. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Le bon sens est une grande chose, et Bossuet l’appelle « le maître des affaires », mais le petit sens est souvent pris pour lui, et ce petit sens, qu’on adore aussi sous le nom de sens commun, est souvent faux, quand il s’agit de juger les phénomènes de providence, les hommes et les faits historiques. […] En étudiant leurs pressentiments, l’historien aurait donc pu apprendre que le spectacle de l’immersion du sol romain par cet océan inépuisable de Barbares n’était pas un de ces simples phénomènes comme ceux que l’histoire, depuis le commencement du monde, pouvait constater.

388. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’art et la sexualité »

Que l’excitation sexuelle produise sur le cerveau une action féconde, ceci non seulement je ne cherche pas à le nier, mais je l’affirme avec l’auteur et avec tout homme de bon sens, qui aura pu observer ce phénomène d’après les autres ou d’après lui-même. […] Dès que la fatigue physique s’est dissipée, non seulement le cerveau ne demeure pas obscurci, mais c’est alors qu’éclate dans toute son intensité le phénomène de fécondité qu’engendre l’amour sexuel.

389. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

L’hymne où il la célèbre, avec les nombres sonores de son idiome natal, répandit tout à coup son nom dans les États-Unis, que flattait cet hommage aux phénomènes de leurs solitudes sauvages encore. […] Un nuage de vapeurs qui remontent couvre l’abîme, s’arrondit en coupole, s’élève aux cieux en pyramide, et, planant sur les forêts d’alentour, épouvante le solitaire chasseur. » Dans l’original, cette peinture est pleine d’éclat ; mais elle n’a pas la beauté sévère que le grand lyrique de l’antiquité portait dans la description des phénomènes de la Sicile.

390. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

» — L’explication de ce curieux phénomène de physiologie biographique serait à rechercher.

391. (1874) Premiers lundis. Tome I « Victor Hugo : Odes et ballades — I »

Dans le cercle, malheureusement trop étroit, où il se produisit, l’apparition de ses premières poésies fut saluée comme l’un de ces phénomènes littéraires dont les muses seules ont le secret .

392. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre VII. Éducation de la sensibilité »

Il y a toute une éducation de la sensibilité, qui met de l’ordre et des nuances dans le chaos des émotions, qui surtout rend nettes et perceptibles les impressions confuses et faibles, qui développe le tact de l’âme, et fait qu’au plus léger attouchement elle frémit de joie et de peine, enregistrant les moindres phénomènes comme un instrument délicat.

393. (1897) La crise littéraire et le naturisme (article de La Plume) pp. 206-208

Voilà, dans l’occurrence, la plus grossière des erreurs, et qui révèle une grave ignorance des phénomènes ethniques et historiques.

394. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Paul Bourget, Études et portraits. »

Quand on a bien raisonné sur les accidents, qu’on a essayé de les rattacher à leurs causes et de parcourir toute la série des phénomènes en les faisant rentrer les uns dans les autres, il se trouve qu’il y a encore plus de mystère et d’inconnu dans la conception générale à laquelle on arrive que dans l’humble sensation de laquelle on était parti ; et ainsi la rêverie est à la fin de la contemplation de ce monde, comme elle était au commencement.

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