Ainsi Flaubert, écrivant Madame Bovary, estime qu’il n’y a pas de style noble, et que son livre établira « que la poésie est purement subjective, qu’il n’y a pas en littérature de beaux sujets d’art, et qu’Yvetot vaut Constantinople66 ». […] Les femmes ne s’y trompent pas, elles reconnaissent en elle leur misère et leur beauté intérieures, comme un homme d’imagination noble se reconnaît dans Don Quichotte. […] Les instincts les plus nobles, les sympathies les plus pures… » Phrases professionnelles qui s’adressent à toutes les femmes comme celles du conseiller à tous les Comices. […] Il éprouve une passion sincère et noble. […] La noble gaucherie que ce bourgeois de Rouen portait dans le monde parisien, nous la retrouvons dans ses peintures mondaines.
Le découragement éteignant une à une toutes ses nobles facultés, il s’est fait laquais pour continuer paisiblement sa rêverie, pour se consoler de son impuissance et persévérer dans son oisiveté. […] Assurément c’est là un noble orgueil, une noble confiance, un espoir légitime dont la raison peut sourire, mais qu’elle ne condamne pas.
Michel Alexandrovitch Bakounine naît en 1814 d’une famille noble et très riche. […] Pendant la Révolution, il s’agissait de supprimer les Nobles qui trouvaient mauvais qu’une bande de voleurs, dénuée de parchemins, leur ravît le produit de leurs propres vols : châteaux, terres, numéraire, etc. […] Il écrivit une noble et courageuse défense d’Oscar Wilde qui lui valut la sympathie des sincères et la réprobation de Tartuffej.
Est-il un but plus noble que celui de convier à un plaisir aussi parfait et aussi pur un peuple récemment affranchi, mais libre, hélas ! […] Tout ce que les accents de cet hymne national remuent chez la reine et chez ses fidèles de beau, de patriotique, de chevaleresque évoque dans l’imagination des spectateurs une figure noble et sans tâche, une sorte d’archange royal prêt à couper les sept têtes de la Révolution de son épée flamboyante. […] Nous n’y ajouterons pas les nôtres, bien que l’école réaliste ait souvent mérité les sévérités de la critique en flattant les instincts les moins nobles de l’humanité et en prenant le succès d’une œuvre d’art pour la mesure de sa moralité.
je vous le dis, c’est un grand plaisir de traiter ses vieux amis, et de penser : « Cela recommencera de la sorte d’année en année, jusqu’à ce que le Seigneur Dieu nous fasse signe de venir, et que nous dormions en paix dans le sein d’Abraham. » Et quand, à la cinquième ou sixième bouteille, les figures s’animent, quand les uns éprouvent tout à coup le besoin de louer le Seigneur, qui nous comble de ses bénédictions, et les autres de célébrer la gloire de la vieille Allemagne, ses jambons, ses pâtes et ses nobles vins : quand Kasper s’attendrit et demande pardon à Michel de lui avoir gardé rancune, sans que Michel s’en soit jamais douté, et que Christian, la tête penchée sur l’épaule, rit tout bas en songeant au père Bischoff, mort depuis dix ans, et qu’il avait oublié ; quand d’autres parlent de chasse, d’autres de musique, tous ensemble, en s’arrêtant de temps en temps pour éclater de rire : c’est alors que la chose devient tout à fait réjouissante, et que le paradis, le vrai paradis, est sur la terre.
Enfin, le premier ministre, soit qu’il fût plus ami de l’équité que les autres, comme cette manière d’agir noble et désintéressée qu’il avait toujours fait paraître auparavant le donnait à conjecturer, soit qu’il craignît qu’à son défaut quelque autre prît la parole, ce qui l’eût rendu criminel, puisqu’il lui appartenait de parler le premier, et qu’il le venait de faire lorsqu’il avait opiné si fort au désavantage de Sefie-Mirza ; ce premier ministre, dis-je, rompit le silence et commença à dire: « que véritablement, sur l’assurance infaillible que l’on aurait que le fils aîné d’Abas II ne serait plus en état de recevoir la couronne, l’assemblée pourrait, sans injustice, passer à l’élection du second fils ; mais, puisque maintenant Aga-Mubarik les assurait fortement que Sefie-Mirza n’avait perdu ni la vie, ni la vue, sans délibérer davantage, il le fallait élire: c’est pourquoi il lui donnait de tout son cœur sa voix et ses vœux, et protestait qu’il fallait tout de ce pas lui aller présenter le diadème et l’empire. » Les autres seigneurs, à ces paroles, perdirent courage, et n’eurent plus la force de soutenir bien ce qu’ils avaient commencé mal.
* * * — Le plus grand signe du noble est de parler à son domestique ; l’homme, qui n’est pas un peu né, lui commande et ne lui parle pas.
Il y a un autre écueil à éviter : c’est de faire des facultés des êtres distincts comme Platon, qui non content de les matérialiser ainsi leur donne des demeures distinctes : il met le [en grec dans le texte], ou intelligence raisonnable, ce qu’il croit être la partie immortelle de l’âme de l’homme, dans la tête ; le [en grec dans le texte], qui représente en partie l’activité les appétits nobles de l’homme, dans la poitrine ; enfin l’[en grec dans le texte], qui représente les besoins, les désirs bas et vulgaires, sont placés dans le bas-ventre.
Victor Hugo lui-même, juge si compétent, vient de publier un livre qui fait de Shakespeare non le premier des hommes, mais plus qu’un homme ; mais l’engouement, quelque fondé qu’il soit, est souvent une exagération de l’enthousiasme et une noble manie d’une époque.
Quand la foule regarde les riches avec ces yeux-là, ce ne sont pas des pensées qu’il y a dans tous les cerveaux, ce sont des événements. » Victor Hugo, ici, a le courage de regarder le péril en face : « Les riches, écrit-il, sont en question dans ce siècle comme les nobles au siècle dernier. » Et il a aussi le courage de montrer la vanité des revendications dont il parle : ce n’est pas la pauvreté, c’est « l’envie » qui les dicte, et c’est à la richesse que la pauvreté s’en prend, sans se douter que, la richesse supprimée, « il n’y a plus rien pour personne214. » En 1830, il avait eu une idée fort juste sur la nécessité d’instruire le peuple avant de lui donner le droit de suffrage. « Les droits politiques doivent, évidemment aussi, sommeiller dans l’individu, jusqu’à ce que l’individu sache clairement ce que c’est que des droits politiques, ce que cela signifie, et ce que l’on en fait.
… La plus noble conquête que l’homme ait jamais faite est le Dâdâ !
Cela ressort surtout de ce frisson du noble, du grand, du véritable lyrisme, qui anime, sans aucune défaillance, l’auteur de la Vieille Maîtresse, du Chevalier des Touches, de l’Ensorcelée, et qui enveloppe, dépasse et efface, de tous côtés, le travail pénible de marqueterie, la syntaxe essoufflée et l’ironisme court de l’auteur de l’Éducation sentimentale, de Salammbô et de la Tentation de Saint Antoine. […] Habitant pendant les vacances, une des plus nobles régions de la noble Touraine, près d’une petite ville où l’industrie s’installe, j’ai maintes fois, au cours de mes promenades, médité sur le contraste saisissant des laboureurs et des vignerons, dans leurs champs dorés et rouges, à l’aube heureuse, et des ouvriers allant tristement rejoindre leurs sombres et sinistres bâtisses.
Il m’a semblé que tous les vieux portraits de ce foyer sévère, les ancêtres de la Tragédie noble et de la Comédie grave, les Orosmanes à turbans et les reines à poignard, fronçaient le sourcil devant le lutin du carnaval de l’Opéra.
Les Papes, — quelques papes du moins, — goûtèrent vivement le noble plaisir de faire de la capitale de la chrétienté la capitale de la Renaissance ; et, chez nous, François Ier, le « Père des Lettres », ou ne comprit pas la nature de la révolution qui s’opérait, ou ne s’attacha qu’aux profits qu’il en pouvait immédiatement tirer.
La morale antique, si noble qu’elle paraisse, et qui, à défaut de sciences exactes, emplit toute l’œuvre romaine et grecque, cette morale s’avère nulle aujourd’hui et ne correspond plus depuis longtemps à notre mentalité.
Mais Lise ne ressemble pas à l’autre ; ce n’est pas elle qui m’aurait préparé une vie d’humiliations ; elle ne m’aurait pas détourné de mes occupations ; elle m’aurait inspiré elle-même une activité honnête et sérieuse, et nous aurions cheminé ensemble vers un noble but.
Dimanche 28 avril Aujourd’hui, Daudet nous amuse des romans hyperboliques de Barbey d’Aurevilly, sur sa généalogie et sa noble enfance, le mettant en scène en compagnie de l’abbé chargé de son éducation, et auquel il criait avant de faire des armes avec lui : « Allons, l’abbé, retrousse ta soutane !
Mais des âmes nobles, quand il en vient, elles ne naissent pas viables ; vivre les rebute ; elles sont condamnées d’avance275. […] On le voit préférer cette ardeur accablée qui nous dévore à la dureté impassible de l’idéal : Car j’eusse avec ferveur baisé ton noble corps, Et depuis tes pieds frais jusqu’à tes noires tresses Déroulé le trésor des profondes caresses, Si, quelque soir, d’un pleur obtenu sans effort Tu pouvais seulement, ô reine des cruelles !
Vigny n’a pas laissé de plus beaux vers, qui lui ressemblent davantage, ni qui donnent de ce qu’il fut une plus noble idée. […] Les Préludes] ; — et d’être à la fois ce qu’il y a dans la poésie française de plus noble et de plus voluptueux.
. — La déformation oratoire consiste à attribuer aux personnages des attitudes, des actes, des sentiments et surtout des paroles nobles ; c’est une disposition naturelle aux jeunes garçons qui commencent à pratiquer l’art d’écrire et aux écrivains encore à demi barbares : c’est le travers commun des chroniqueurs du moyen âge154. — La déformation épique embellit le récit en y ajoutant des détails pittoresques, des discours tenus par des personnages, des chiffres, parfois même des noms de personnages ; elle est dangereuse parce que les détails précis donnent l’illusion de la vérité155. — La déformation dramatique consiste à grouper les faits pour en augmenter la puissance dramatique en concentrant sur un seul moment ou un seul personnage ou un seul groupe des faits qui ont été dispersés. […] Il faut se défier de tout récit très pittoresque, très dramatique, où les personnages prennent des attitudes nobles ou manifestent des sentiments très intenses. […] Il reste souvent un doute : c’est le terrain de polémique entre les partis ; chacun interprète les actes de son parti par des motifs nobles et ceux du parti adverse par des motifs vils.
Pareillement, quand la critique ne se propose plus d’autre ni de plus noble ambition que de « renouveler » les sujets à force de « documents inédits », elle en arrive bientôt à ne plus discerner la valeur de ces documents, pourvu seulement qu’ils soient inédits. […] « Ne me parlez pas, disait d’Alembert, ne me parlez pas de votre Buffon, ce comte de Tuffières, qui, au lieu de nommer simplement le cheval, s’écrie : La plus noble conquête que l’homme ait jamais faite est celle de ce fier animal qui… » Et Rivarol lui répondait : « Oui, c’est comme ce sot de Jean-Baptiste Rousseau, quand il dit : Des bords heureux où naît l’Aurore Aux bords enflammés du couchant ; au lieu de dire de l’est à l’ouest » ; — mais il aurait pu bien mieux répondre encore. […] Et je sais bien ce que l’on peut dire que Ronsard et ses amis n’ont pas craint d’employer des mots que Boileau, cent ans plus tard, eût renvoyés au langage des halles ; que leur vocabulaire, plus étendu, plus riche, est moins noble et plus familier que celui de Corneille et de Racine, ce qui pourrait d’ailleurs faire une question ; enfin que, dans leurs plus beaux vers, le « grotesque » y coudoie volontiers le « sublime »… Mais c’est tout simplement qu’ils vivaient dans un temps où ni la cour, ni la ville, ni la province, en y tendant pourtant, ne savaient ce que c’est que la politesse des mœurs, la décence du langage, ou la tenue du style.
Cet homme, dont le principal mérite consistait à porter des bottes à semelles fines, et à tâter délicatement le pouls de sa noble cliente, dormait quatorze heures sur vingt-quatre, soupirait le reste du temps, et administrait sans cesse à la baruinia des gouttes de laurier-rose.
Pureté et subtilité marquent ici des qualités analogues à celles de l’air et de la lumière, quand ils composent une noble atmosphère, quand sans pousser en avant leur beauté propre, ils embellissent et solennisent ce qu’ils baignent. […] Jaloux a fait monter ses fumées dans le ciel mélancolique et noble de la campagne aixoise ; il y a construit minutieusement, et avec une science achevée des plans, du relief et de la vie, les petites marionnettes humaines qui y font quelques tours et s’en vont. […] Il anoblit le roman en y portant l’éclat des genres jusqu’alors dits nobles. » Et le roman est un genre impérialiste.