Mais ce ne sera qu’une métaphore, et s’il y avait réellement une direction préexistante le long de laquelle on se fût contenté d’avancer, les rénovations morales seraient prévisibles ; point ne serait besoin, pour chacune d’elles, d’un effort créateur. […] Elle cherche le motif de chacune des prescriptions, c’est-à-dire son contenu intellectuel ; et comme elle est systématique, elle croit que le problème est de ramener tous les motifs moraux à un seul. […] C’est dans les mœurs, dans les institutions, dans le langage même que se déposent les acquisitions morales ; elles se communiquent ensuite par une éducation de tous les instants ; ainsi passent de génération en génération des habitudes qu’on finit par croire héréditaires. […] Mais il y a loin de cet attachement à la cité, groupement encore placé sous l’invocation du dieu qui l’assistera dans les combats, au patriotisme qui est une vertu de paix autant que de guerre, qui peut se teinter de mysticité mais qui ne mêle à sa religion aucun calcul, qui couvre un grand pays et soulève une nation, qui aspire à lui ce qu’il y a de meilleur dans les âmes, enfin qui s’est composé lentement, pieusement, avec des souvenirs et des espérances, avec de la poésie et de l’amour, avec un peu de toutes les beautés morales qui sont sous le ciel, comme le miel avec les fleurs. […] Le mysticisme est incontestablement à l’origine des grandes transformations morales.
. — Gravité anglaise de ses préoccupations morales. — Comment les gens du monde et les écrivains se modèlent alors sur la France. […] C’est d’après les mathématiques qu’il veut réformer les sciences morales. C’est le point de départ des mathématiques qu’il donne aux sciences morales, lorsqu’il pose que la sensation est un mouvement interne causé par un choc extérieur, le désir un mouvement interne, dirigé vers un corps extérieur, et lorsqu’il fabrique avec ces deux notions combinées tout le monde moral. […] Il faut bien qu’on puisse représenter les maladies morales, surtout lorsqu’on le fait pour compléter la science, froidement, exactement, et en style de dissection. […] Denham n’est pas seulement courtisan, il est Anglais, c’est-à-dire préoccupé d’émotions morales.
Homère décrit toujours avec soin un mors, un bouclier, un char, une coupe, une armure ; il prête sans cesse à ces objets inanimés des qualités morales qui en font le prix aux yeux de leur possesseur, et qui leur valent l’estime ou les affections de l’armée. […] Une certaine lenteur de ton qui se confond ici dans la grâce décente, l’honnêteté du cœur intacte avec la malice enjouée de l’esprit, la nature prise à point, respirent dans ces pages aimables : le sens moral qui en ressort tendrait à tuer surtout le grand ennemi en nous, c’est-à-dire la vanité. […] La plupart des hommes célèbres en France, s’ils n’y prennent garde, meurent au moral, dans un véritable état de dilapidation, j’allais dire pis. […] En achevant cette lecture d’un auteur chez qui la littérature est née tout entière des habitudes morales et du foyer de la vie, est-ce une conclusion purement critique que je suis tenté d’y rattacher ?
Ce sont ensuite beaucoup de tours propres à cet esprit, où se peignent ses mouvements les plus naturels, et qui lui sont venus du sol même, de l’auteur de toutes les variétés du monde physique et moral de Dieu. […] Les preuves de la vraisemblance sont morales : c’est le contrôle même que la vraisemblance exerce sur la vérité ; c’est cette conformité des faits avec la raison, par laquelle seule nous sommes touchés des enseignements de l’histoire, et décidons invinciblement du faux et du vrai. […] Il fit, outre cette chronique, un grand nombre de vers des Consolations, à la façon de Sénèque et de Boëce, des traités moraux et, d’autres ouvrages, dont le nombre n’étonnait guère moins que la beauté. […] L’un emprunte ses images et ses couleurs aux spectacles qu’il décrit ; et lors même qu’il veut peindre les douleurs morales, il s’attache plus à en faire voir la pantomime qu’à en analyser les effets intérieurs.
Mais il ne suffit pas que la résolution résulte du caractère et porte ainsi la marque de notre tempérament physique et moral, pour être libre. […] L’homme s’est toujours cru libre, surtout dans l’accomplissement des actes moraux, et il a toujours fait consister cette liberté dans une certaine indépendance de son moi intelligent et actif par rapport aux objets extérieurs, et même aux objets intérieurs ou motifs particuliers d’agir. […] Les considérations morales et métaphysiques étant ici mises de côté, voyons comment, au point de vue psychologique, pourra se réaliser l’idéal de l’action libre. […] Ce sont des lois de finalité intellectuelle, qui permettent au moi de se prendre pour fin et, dans l’acte moral, de prendre en même temps pour fin l’être universel.
Tous les peuples, en leur âge grossier, en ont eu, qui, peu à peu, se sont parées des prestiges de l’art, et, parfois, recommandées de quelques considérations morales. […] Ils ont au moins la préoccupation des choses morales ; ils l’ont, ou leur public la leur impose, et cela revient presque au même. […] Le fond, ce sont les idées et les observations morales, et les grands siècles littéraires sont riches, avant tout, de cette double matière. […] Ce sont toujours, non précisément des observations morales, mais des situations psychologiques. […] Son fond d’optimisme, sa confiance dans les forces morales de l’homme, que lui a si durement reproché Joseph de Maistre, et que nous retrouverons ailleurs, vient de là.
Mais ce qui semble moins nécessaire et ce qui est une richesse tout à fait heureuse chez Vicq d’Azyr, ce sont les vues morales qu’il mêle continuellement à ses récits. […] Il semblait avoir à l’avance décrit et prédit son état moral, lorsqu’en mars 1784, dans l’Éloge de Sanchez, médecin de la cour en Russie sous Ivan et devenu victime des révolutions de palais, il avait dit : M.
Cet homme admet bien, comme vous, l’idée générale de Création, et même il ne saurait concevoir l’idée contraire, celle d’une succession continue à l’infini ; mais après cette idée de Création il s’arrête, il ne peut concevoir ni admettre que l’Intelligence et la Puissance infinie se soit, à un certain jour, incorporée, incarnée dans une forme humaine ; il respecte, d’ailleurs, au plus haut degré, à titre de sage et de modèle moral sublime, Celui que vous saluez d’un nom plus divin ; — et cet homme, parce qu’il ne peut absolument (à moins de se faire hypocrite) admettre votre idée à vous, avec toutes ses conséquences, vous l’insulterez ! […] Est-il possible de venir afficher à tout instant comme modèle, de proposer pour remède, ses recettes morales, ses pratiques dévotieuses, le secret des confessionnaux et des oratoires, devant des esprits, sensés d’ailleurs, quoique très-divers d’opinions, qui trouvent cela au moins de mauvais goût, ou qui se révoltent de la prétention et s’en irritent ?
Cette journée du 20 mai, où la perte réelle fut minime, était pourtant d’un effet moral désastreux. […] C’en était fait : peu importait, de part et d’autre, les pertes peu considérables en elles-mêmes ; l’effet moral était produit ; la honte du 20 mai était réparée ; l’armée française avait acquis conscience d’elle-même, elle existait ; l’ennemi le sut et, à dater de ce jour, se mit à la respecter, à la craindre.
Pour l’homme, sans doute, on ne pourra jamais faire exactement comme pour les animaux ou pour les plantes ; l’homme moral est plus complexe ; il a ce qu’on nomme liberté et qui, dans tous les cas, suppose une grande mobilité de combinaisons possibles4. […] Est-ce à dire que je vais prendre au pied de la lettre et louer pour leur générosité, comme je vois qu’on le fait tous les jours, les plumes de cygne ou les langues dorées qui me prodiguent et me versent ces merveilles morales et sonores ?
On comprend, on peut mesurer par la scène de notre Mystère le progrès, non littéraire, tout moral, que l’humanité avait fait depuis lors dans la manière de concevoir la pitié chez un dieu. […] Paulin Paris, que cette scène, ainsi que celles de Lazare et de la Madeleine et quelques autres encore, où l’on apercevrait tout au plus des tronçons de drame, appartiennent à « l’art le plus élevé. » C’est le fond moral tenant au christianisme même, qui fait, ici l’élévation.
Il relisait avec M. de Tillemont les volumes manuscrits de son Histoire ecclésiastique ; il surveillait la réimpression des Réflexions morales du Père Quesnel ; il collationnait avec de nouveaux traducteurs de saint Augustin, et l’original à la main, le texte de leur traduction. […] Vuillart est un des crimes moraux qui signalèrent l’influence triomphante des Tartufes sur la conscience de Louis XIV.
Plus de soixante ans après, au terme de sa carrière, M. de Talleyrand, adressant à l’Académie des sciences morales et politiques l’Éloge de Reinhard, prenait plaisir à remarquer que l’étude de la théologie, par la force et la souplesse de raisonnement, par la dextérité qu’elle donnait à la pensée, préparait très bien à la diplomatie ; c’en était comme le prélude et l’escrime ; et il citait à l’appui maint exemple illustre de cardinaux et de gens d’Église qui avaient été d’habiles négociateurs. […] Dumont, qui le vit beaucoup à ce moment, nous l’a peint au physique et au moral avec vérité : « Je ne sais s’il n’avait pas un peu trop l’ambition d’imposer par un air de réserve et de profondeur.
Celui qui, par un motif patriotique, religieux et même moral, se permet dans les faits qu’il étudie, dans les conclusions qu’il tire, la plus petite dissimulation, l’altération la plus légère, n’est pas digne d’avoir sa place dans le grand laboratoire où la probité est un titre d’admission plus indispensable que l’habileté. […] Qu’est-ce que cet amour de la vérité, poursuivie en dehors de tout intérêt matériel ou moral, à plus forte raison en dehors de toutes les théologies et dans l’oubli de toutes les explications qu’on a pu tenter de l’univers et de sa destinée qu’est-ce que cet amour, sinon une religion encore ?
Lorsqu’on cherche les précurseurs de tels principes essentiels de la mentalité européenne (principes scientifiques, esthétiques, moraux, sociaux), c’est le plus souvent en Italie qu’on les découvre ; et d’autre part, c’est en Italie que ces mêmes principes ont eu le moins d’efficacité dans l’application pratique. […] En effet : la vie nationale de l’Italie, entravée déjà au cours de la première et de la deuxième ère par des circonstances spéciales, aurait dû commencer du moins au lendemain de la Révolution française ; on sait que Napoléon Ier encouragea cette espérance jusqu’à un certain point ; mais la Restauration paralysa le mouvement : il ne s’est pleinement réalisé qu’avec la prise de Rome ; politiquement ; restaient d’énormes difficultés sociales et morales ; l’Italie, maîtresse de ses destinées, assagie par sa défaite en Érythrée, ne marche sûrement au triomphe que depuis 1900 environ ; à cet état des choses, à cet état d’âme, devrait correspondre une floraison épique.
Hégel trouve une méthode de construction, et conçoit une nouvelle idée de l’univers ; il applique cette méthode aux mathématiques, aux sciences physiques, à toutes les parties de l’histoire naturelle, à la psychologie, à l’histoire, à toutes les sciences morales, à toutes les sciences humaines, et meurt en contruisant. […] Nous lui attribuerons toutes ces qualités, et nous dirons que, s’il est l’auteur de l’humanité, il en est « le type. » Nous ne nous embarrasserons pas de concilier ces attributs moraux avec les attributs métaphysiques.
En faisant cela avec subtilité, avec raffinement, avec un talent curieux et un abandon quasi précieux d’expression, en perlant le détail, en pétrarquisant sur l’horrible, vous avez l’air de vous être joué ; vous avez pourtant souffert, vous vous êtes rongé à promener et à caresser vos ennuis, vos cauchemars, vos tortures morales ; vous avez dû beaucoup souffrir, mon cher enfant.
Le dommage moral est pire.
Jean-Jacques Weiss La comédie des Effrontés appartient au second Augier, celui qui est de son temps plus que de sa race et sur qui les influences de l’air moral ambiant ont eu plus d’action et de pénétration que les instincts de son imagination et de son cœur.
Maurice Bouchor nous offre ainsi un recueil de poèmes composés dans un but moral, dont la lecture n’est point ennuyeuse.
Néanmoins, quand la maîtresse du roi ne fait pas scandale dans la société, la société est plus corrompue que le roi, parce que, en l’imitant, elle n’a pas comme lui l’excuse de mariages formés par la politique, au lieu de l’être par les convenances morales.
Si le goût est une chose de caprice, s’il n’y a aucune règle du beau, d’où viennent donc ces émotions délicieuses qui s’élèvent si subitement, si involontairement, si tumultueusement, au fond de nos âmes, qui les dilatent ou qui les serrent, et qui forcent de nos yeux les pleurs de la joie, de la douleur, de l’admiration, soit à l’aspect de quelque grand phénomène physique, soit au récit de quelque grand trait moral ?
Les traits physiques ou les traits moraux y prédominent, s’y effacent, et ces traits physiques ou ces traits moraux éveillent en nous certaines répugnances ou certaines complaisances, quoi que nous en ayons. […] S’il dessine un paysage, c’est d’un trait mince et qui dégage un caractère moral dont les couleurs et les lignes sont le transparent symbole. […] Les premiers manquaient de respect envers leur âme, les seconds manquaient de sympathie envers les grands mouvements moraux de l’humanité. […] Il ne connaîtra plus la règle stricte, la sérénité des obéissances morales ou religieuses. […] La méthode se trouve être la même dans les sciences dites morales et dans les sciences dites naturelles.